usages Une tablette

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usages Une tablette
ATHENA 270 · Avril 2011
> TECHNOLOGIE
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Une tablette
pour de nouveaux
usages
Texte : Alain de FOOZ • [email protected]
Photos: APPLE (pp.18 - 20), TidBITS (p.20) Le•net (p.21)
Alain de FOOZ ·TECHNOLOGIE
Objets hybrides, entre netbooks et
smartphones. À la maison ou
au travail, elles commencent à nous
envahir. On peut les utiliser en toutes
circonstances, pour une présentation
commerciale ou pour jouer, vautré
dans un canapé, voire au lit !
Les tablettes tactiles feront un tabac
en 2011, préfigurant de nouveaux
usages: communication, collaboration,
sociabilisation, divertissement...
P
rès d’un million d’iPad 2
vendues aux États-Unis
durant le week-end des 12
et 13 mars 2011 ! Alors que
les experts pensaient n’en
vendre qu’entre 350.000 et 400.000, les
deux premiers jours après son arrivée sur
le marché, la tablette tactile d’Apple était
déjà en rupture de stock; le 15 mars, le
constructeur à la pomme annonçait sur
son site web un délai de réassort de trois
à quatre semaines...
En 2010, toutes marques confondues, il
s’est vendu 18 millions de tablettes dans
le monde, estime le cabinet d’analyse de
marché IDC. Dont 10,1 millions au cours
du seul quatrième trimestre. À lui seul, le
géant Apple s’est accaparé 83% du marché.
Loin, loin derrière le coréen Samsung.
Mais les jeux sont loin d’être faits. Au cours
de l’édition 2011 du CES (Consumer Electronics Show), le grand rassemblement
mondial des fournisseurs de produits
électroniques qui se tient chaque année
début janvier, on a dénombré pas moins
de 80 tablettes - certaines disponibles, la
plupart annoncées.
C’est dire si le marché explose ! Au total,
55,7 millions d’unités devraient trouver
acquéreur en 2011 et 172,4 millions d’unités en 2014, pronostiquent les consultants
de la banque d’affaires Goldman Sachs.
Outre Samsung, Apple devra compter
sur les coups de Fujitsu, HTC ou HP. Toute
l’industrie du high tech est bien décidée à
prendre position.
Tactile, la différence
L’explication de ce phénomène ? La
généralisation des écrans tactiles, qui
a d’abord touché les smartphones
- en 2015, ces téléphones à multiples usages pourraient d’ailleurs
«balayer» définitivement les GSM.
Ensuite, côté ordinateurs, l’essor
des netbooks, ces petits ordinateurs
portables à fonctionnalités limitées, conçus pour être branchés en
permanence sur Internet.
Qui dit «tablette» dit «tactile». Le fait
de toucher la zone avec laquelle on
veut interagir est spontané. Cela
revient à montrer du doigt ce que
l’on souhaite atteindre, à la manière d’un
enfant. Toucher un objet pour se l’approprier, en somme. Utiliser ses doigts pour
naviguer est par conséquent le geste le
plus naturel qui soit.
Aujourd’hui, on se sert essentiellement
d’une tablette pour consulter des contenus écrits ou visuels, prendre des notes,
dessiner, mais aussi visionner des vidéos,
jouer en ligne, dialoguer par webcams
interposées... Demain, d’autres usages encore à inventer - suivront. Par nature,
une tablette tactile est avant tout un
explorateur de contenus, un support
multimédia qui tisse un lien entre le
virtuel et le réel, transformant radicalement l’expérience traditionnelle de
consommation du média.
Ainsi, la presse a trouvé dans les tablettes une probable source de revenus
complémentaires en commercialisant
de nouveaux types de contenus, et donc
de nouveaux formats de diffusion publicitaire. Encore une fois, c’est l’interface
qui fait la différence: tactile elle est plus
intuitive; elle pourrait permettre à certaines cibles encore peu technophiles
de surfer plus facilement sur Internet,
envoyer des e-mails, regarder des vidéos
et ce, le plus simplement du monde…
Les métiers de la communication, en particulier, utiliseront surtout des fonctions
de visionnage de contenus (photo, vidéo,
son), la navigation Web, ainsi que des
fonctions de conception graphique. Pour
certaines fonctions logistiques (dispatch,
accueil, picking,..), la mobilité et l’autonomie des tablettes, ainsi que la possibilité
de consulter et de modifier des informations leur donne un avantage certain par
rapport aux supports plus «lourds» et
moins ergonomiques - netbooks et PC
portables. Un gérant de magasin pourra
utiliser les fonctions graphiques pour
consulter et mettre à jour son inventaire.
Un chef de chantier pourra suivre, grâce
à une application, le bilan carbone des
travaux. Et ce ne sont là que quelques
exemples...
Un nouveau
compagnon
Rien n’est gagné pour autant. L’arrivée
d’Internet a bouleversé les habitudes des
consommateurs; nombreux, aujourd’hui,
sont ceux qui considèrent l’accès à
l’information comme «gratuit». À tout le
moins, ils ne sont pas prêts à payer une
édition numérique au prix d’une édition
papier. C’est donc bien aux éditeurs de
contenus de trouver la recette qui saura
satisfaire le lecteur. On ne la connaît
toujours pas, on avance à tâtons, par
«essai-erreur». Aujourd’hui seulement,
on commence à analyser les premiers
usages de l’iPad. De tous, c’est la lecture
qui l’emporte. 41% des utilisateurs préfèrent lire des livres ou des magazines
sur iPad contre 36% sur papier (source:
août 2010, Cooper Murphy Webb). 43%
l’utilisent plus de 10 h par semaine, c’est
désormais leur premier outil de loisirs.
Enfin, 20% l’utilisent... au lit !
Et dans l’entreprise ? Parmi de multiples usages, la tablette est un excellent
assistant. L’outil consiste alors pour le
commercial en déplacement à avoir
sur lui la totalité de la littérature de son
entreprise. Il n’a plus à transporter des
mallettes, des classeurs, voire des valises
de documents. Tout est présent dans la
mémoire interne de sa tablette. Il peut
aussi montrer des vidéos, voire des
démonstrations interactives, des présentations de type PowerPoint...
En déplacement, l’ordinateur représente
souvent une barrière. En cause, sa relative lourdeur et plus encore, son écran
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Astuce:
6 critères pour
choisir une
tablette tactile
»Ergonomie:
Clavier
ou
pas ? Tout dépend des
usages. Dans leur majorité,
les utilisateurs n’en ont pas
besoin. La possibilité d’utiliser
une station d’accueil peut
néanmoins être un plus.
»Confort:
Assurez-vous
d’être en mesure d’utiliser
confortablement le clavier.
Généralement,
ils
sont
«rétrécis» de 15%. Essayez de
dactylographier au moins un
paragraphe entier...
ȃcran:
Outre l’affichage, dont
on peut rapidement évaluer
le confort, considérez l’éclat
du LCD: est-il assez lumineux
dans vos conditions normales
d’utilisation ?
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»Batterie:
Si ce n’est pas un
facteur «critique» dans la
mesure où l’on peut exploiter
une batterie supplémentaire,
il s’agit de ne pas perdre de
vue qu’une tablette, malgré
sa taille, consomme plus
qu’un PC (de 28 à 40 watts par
heure).
»
Mémoire: 256 MB suffiront
pour un usage normal.
Comptez 384 MB pour faire du
traitement d’images. Ne soyez
pas bloqué dans vos usages
par ce «détail» étroitement lié
au prix.
vertical, véritable «mur» qui sépare les
interlocuteurs. Posée à plat, la tablette
est plus amicale. Elle agit tel un trait
d’union; elle favorise le dialogue commercial, qui devient interactif, donc plus
dynamique, voire ludique.
Et mon clavier
dans tout ça ?
Tout en prédisant un avenir radieux aux
PC grand public équipés d’interfaces
tactiles, les analystes de l’Institut Gartner
sont plus sceptiques quant aux usages
en milieu professionnel, estimant que
seulement 10% des ordinateurs livrés
aux entreprises devraient être équipés
d’interface tactile en 2015. Et de justifier cette «fracture» entre grand public
et professionnels par les usages. Les
habitudes de travail héritées de l’utilisation du «couple» clavier-souris sont
bien ancrées...
Demain, tout peut changer, reconnaît
néanmoins Gartner. Déjà, ce ne sont
plus les entreprises qui imposent à
leurs collaborateurs leurs outils de travail, mais les collaborateurs qui impulsent le changement en introduisant
peu à peu leurs propres outils dans la
sphère professionnelle, à l’image de
ce qui se passe avec les smartphones,
mêlant désormais usages professionnels et personnels.
Si Apple, maître à penser du marketing,
parle de «segment intermédiaire» entre
smartphone et netbook, c’est pour permettre de faire plus facilement ce que
les gens avaient l’habitude de faire sur
leur smartphone mais sans avoir besoin
de prendre leur ordinateur portable,
plus lourd, plus long à démarrer, moins
ergonomique. Vrai. Mais jusqu’ici les
tablettes ne remplacent toujours pas
smartphones et netbooks. Ce qui veut
dire que les utilisateurs ont entre les
mains un «appareil» de plus...
Faudra-t-il choisir ?
Les tablettes peuvent réaliser la plupart des tâches
que les ordinateurs portables proposent ainsi qu’une
partie des fonctions offertes
par les smartphones, les incorporant
dans un seul et même appareil. Dans
certains cas, elles s’avèrent plus efficaces, cannibalisant l’usage des deux
autres appareils, comme par exemple,
la navigation sur Internet et les médias
de divertissement qui procurent une
plus belle expérience sur tablette.
On peut dès lors envisager celle-ci
comme un ordinateur portable à écran
tactile, qui sera une alternative viable
aux notebooks et ordinateurs portables classiques, mais qui ne remplacera
pas de sitôt le téléphone mobile en
tant que petit appareil à emporter en
poche; qui ne remplacera pas davantage l’ordinateur de bureau pour la
création graphique, la rédaction de
longs documents, la programmation
informatique, etc.
On peut donc craindre une période
d’incertitude. D’autant que tous les
géants de l’industrie high tech, sans
exception, sont en train de concevoir
une version spécifique de l’ordinateur
de demain, qui sera largement incompatible avec ses autres concurrents...
Ne nous leurrons pas: la suprématie
d’un Windows n’est plus assurée, pas
plus que celle d’Apple iOS. Aujourd’hui,
on voit d’ailleurs qu’Android de Google
s’impose plus rapidement que ses
concurrents. Une belle bagarre en
perspective dont les consommateurs
seront les premières victimes !
«Choisir c’est renoncer», dit le proverbe.
Ce ne sera plus le prix ou le niveau de
performance qui guidera le choix du
consommateur, mais la compatibilité
de la plate-forme, le nombre d’applications disponibles, les accords du fabricant avec les éditeurs de livres et autres
fournisseurs de contenu... L’«objet» en
tant que tel passera en arrière-plan,
priorité sera donnée aux usages. Un
vrai changement de paradigme. n
Alain de FOOZ ·TECHNOLOGIE
«C’est du belge, c’est du wallon !»
Interview de Stéphane Legrand,
E
n avril 2010, LePointNet, entreprise de services informatiques du Brabant wallon, s’est fait connaître en distribuant la première tablette tactile «made in Belgium».
Aujourd’hui, un an plus tard, quel bilan tirez-vous ?
Une belle success story ! Le projet initial remonte à fin 2009.
Quand Benjamin Vanopbroeck a conçu la tablette Dune, l’iPad
n’existait pas encore. Et quand nous l’avons commercialisée,
Apple annonçait à peine la disponibilité de son produit... Ce fut
un véritable pari. Autant par notre expérience dans le développement de solutions mobiles, nous avions une idée assez précise de ce que devait être une tablette, autant nous ne savions
pas comment la produire. Ce devait être en Asie, pour des raisons évidentes de coûts. Mais avec qui s’engager ? Sur quelles
chaînes de production ? Et, surtout, avec quelles garanties ?
Outre la qualité des composants, il fallait s’assurer des coûts et
délais de livraison. On s’est rendu compte de l’importance du
«sourcing». Pour un marché émergent, comme celui des tablettes tactiles, il est stratégique.
U
ne PME d’à peine 17 personnes peut-elle s’imposer
sur le terrain des multinationales de l’électronique de
masse ? Quels ont été, et quels sont encore vos atouts ?
Tout tient à l’innovation, à la créativité, à la proactivité, et donc
à la flexibilité... Soyons clairs: vu notre taille, nous sommes
condamnés à devancer la concurrence tout en en assurant nos
clients de standards de qualité élevés. Via un réseau de consultants spécialisés, nous disposons aujourd’hui de notre propre
bureau de conseil en qualité à Hong Kong. Ce qui nous permet
d’acheminer nos tablettes par avion, et non par bateau. On
gagne des semaines.
Le time-to-market fait clairement la différence. Au dernier CES
2011, le grand salon de la technologie, on a constaté que si
les annonces étaient nombreuses, peu de produits finalement
étaient commercialisables... Le succès de Dune, notre première
tablette, repose en grande partie sur sa disponibilité. Il en ira
de même avec Anapurna, tablette de deuxième génération,
que nous commercialisons depuis fin mars 2011.
U
D
es tablettes, mais aussi d’autres supports tactiles...
Pourquoi tout miser sur le tactile ?
Tactile est synonyme de simplicité, ce qui va favoriser de
nouveaux usages. Voyez ce qu’expérimente Microsoft avec
Surface, une véritable table qui permet de manipuler des images, des fichiers ou des catalogues en glissant ses doigts sur
l’écran en surface. Via la technologie PixelSense, chaque pixel
de l’écran est un petit capteur sensitif. La surface peut ainsi
scanner, reconnaître et interagir avec vingt doigts évoluant
en même temps; elle est aussi capable d’analyser des objets
posés sur l’écran, les textes imprimés sont également reconnus
et numérisés... Aujourd’hui, par souci d’anticipation, nos développeurs se préparent au développement d’applications sur la
Microsoft Surface 2.0. Nous sommes impliqués dans Surface 2.0
autant que nous le sommes avec Dune ou Anapurna, nos propres produits. Pour nous, tout se tient!
L e parrainage de Microsoft est donc très important...
Le premier éditeur mondial de logiciels a parfaitement compris qu’il lui fallait s’adosser à des fabricants d’équipements.
Aujourd’hui, nous comptons parmi ses partenaires privilégiés
dans la mesure où, par notre avance technologique, nous sommes l’un des premiers acteurs mondiaux à proposer des tablettes tactiles sous Windows 7, système d’exploitation phare. Il
ne s’agit pas d’une simple transposition; nous enrichissons
constamment Windows 7 pour les usages tactiles. C’est notre
valeur ajoutée.
Cette avance nous a permis d’attirer parmi nos clients des
organisations comme Belgacom, le constructeur automobile
SEAT ou AC Restaurants, du groupe italien Autogrill... Nous
sommes aujourd’hui sollicités dans tous les secteurs. Ainsi,
dans l’automobile où certains constructeurs pensent intégrer
des tablettes dans leurs véhicules. C’est là que notre expertise
en communication mobile fait la différence; nous sommes
spécialisés dans le développement de solutions clés sur
porte à destination d’entreprises qui désirent faire passer du
contenu sur le réseau vers leurs utilisateurs et le mettre à jour
n
facilement. n
ne première tablette il y a six mois, une deuxième
aujourd’hui. Quelle est votre feuille de route ?
La communication tactile au sens large. Si Apple a créé le buzz
avec l’iPad, nous pensons qu’il faut voir par-delà le produit, et
donc proposer des solutions. C’est précisément ce qu’attendent les entreprises, dont la première question, après avoir vu
le produit, est de savoir comment l’intégrer dans leur système
d’information... Avec notre partenaire TechnyHub, autre société
wallonne spécialisée dans la communication interactive, nous
développons des solutions de communication complètes et
intégrées, combinant une large gamme de terminaux tactiles:
bornes, tables, pupitres, vitrines et bien sûr, tablettes.
La tablette Dune
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