Le journal - Musée Unterlinden

Transcription

Le journal - Musée Unterlinden
Le Journal
Le nouvel
Unterlinden
Bienvenue
Le journal du
Musée Unterlinden
à Colmar
23.1.16
Sommaire
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26
30
42
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
24
Un projet
d’envergure
Le nouveau
musée
Du cloître
à l’Ackerhof
04
Le nouvel Unterlinden
Le Musée Unterlinden s’est agrandi au
terme d’un chantier de trois ans.
22
Le soutien des mécènes du musée
L’engagement des donateurs pour
soutenir le musée.
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Les coulisses du chantier
Histoire de formes et de matières pour
modeler le nouveau visage du musée.
06
L’extension du Musée Unterlinden
Les architectes Herzog & de Meuron ont
travaillé simultanément sur l’urbanisme,
l’architecture et la muséographie.
24
Un musée unique
L’action de la Société Schongauer
pour enrichir le musée.
36
26
Agir, contempler
L’exposition inaugurale d’Herzog &
de Meuron explore l’expérience de l’action
et de la contemplation dans l’art.
Un nouveau regard
Le projet d’agrandissement a permis
de redécouvrir certaines œuvres
des collections.
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Des bains au musée
Les bains ont fait peau neuve pour
devenir un espace événementiel :
la Piscine
02
Le musée et
son quartier
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42
La boutique et le café Schongauer
Les nouveaux services d’accueil
apportent un plus grand confort
de visite.
44
Culture
Le musée et ses voisins élaborent
une programmation culturelle riche
et inventive.
46
Autres délectations
Les adresses gourmandes autour
du musée.
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Le nouvel
Unterlinden
Le Musée Unterlinden s’est agrandi au
terme d’un chantier de trois ans.
Il aura connu de profondes transfor­
mations, de son bâti et de ses salles
d’exposition. Il aura vécu le creusement
de tranchées, l’élévation de murs,
­l’évidement d’espaces, la création d’es­
caliers… Sa ­métamorphose a modifié
sa structure et son parcours de visite, en
créant de nouveaux espaces d’expo­
sition qui permettent un redéploiement
remarquable de ses collections.
Le visiteur retrouve un musée embelli,
restructuré, réaménagé, qui lui offre
des possibilités de découvertes passion­
nantes. Il profite d’une muséographie
innovante et accessible qui facilite la
compréhension de l’espace et le dé­
ploiement des collections, de supports
multimédia qui rendent son parcours
plus vivant, d’une signalétique forte et
claire, de cartels trilingues et de nom­
breux services qui favorisent d’excel­
lentes conditions de visite.
Toute une part d’invisible s’est déroulée
en coulisses pour préparer ce nouveau
musée. En plus des travaux d’agrandis­
sement, s’est opéré un travail scientifique
essentiel réalisé par la conservation
du musée : le récolement informatisé
des œuvres, prévu pour préparer leur
déplacement en réserves le temps du
chantier, a été l’occasion de mieux
connaître les collections et d’étudier
plus précisément certains objets.
Il découvre un musée encyclopédique
dont les collections sont montrées sous
un autre jour. L’extension des surfaces
d’exposition permet d’en présenter toute
la richesse et d’en saisir toutes les
­qua­lités. Le parcours de visite couvre
près de 7000 ans d’histoire. Du Néo­
lithique à l’art moderne. Le Retable
­d’Issenheim, chef-d’œuvre de l’art occi­
dental (1512–1516), a repris place dans
la chapelle entièrement rénovée du
­couvent des Unter­linden. La Piscine a
retrouvé sa splendeur du début du
20e siècle et est, à présent, destiné aux
­expositions, conférences, concerts. Le
nouveau bâtiment réalisé par Herzog
& de Meuron, appelé Ackerhof, est situé
derrière le bâtiment des bains. Pensé
comme un pendant à la chapelle du cou­
vent, il abrite sur deux niveaux les col­
lections modernes et contemporaines et
au troisième niveau, les expositions
temporaires. La galerie souterraine, qui
relie le ­couvent à l’édifice moderne,
­présente l’histoire du musée ainsi qu’un
pano­rama de l’art du 19e siècle et du
début du 20e siècle.
Les restaurations, financées par la
­Société Schongauer, l’État, la Région et
le Cercle des Mécènes Unterlinden,
ont redonné à certaines œuvres tous
leurs apprêts. Le retable des Domini­
cains de Martin Schongauer et son en­
tourage, les peintures du couvercle
du clavecin de Hans Ruckers ou encore
le Double portrait d’hommes (1931)
de Léon Zack ont été soigneusement
préparés avant de se montrer à nouveau
aux yeux du public.
04
05
Ce projet d’extension du musée, porté
par la Ville de Colmar et réalisé par
le cabinet bâlois Herzog & de Meuron et
les Monuments Historiques, a égale­
ment envisagé les aménagements des
places Unterlinden et de la Sinn et
l’harmonisation des abords extérieurs
du musée pour le replacer au cœur
du circuit touristique dans la ville.
Le musée a redonné à sa collection
de renommée internationale un écrin à
sa mesure. Il s’est mu en un espace
chaleureux et ouvert, offrant des possi­
bilités d’échange, de rencontre et
de dialogue infinies entre le visiteur et
les œuvres.
Pantxika De Paepe,
directrice du Musée Unterlinden.
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
L’extension
du Musée
Unterlinden
Dans le projet d’extension du Musée
Unterlinden à Colmar, réalisé par
Herzog & de Meuron, les trois dimensions
que sont l’urbanisme, l’architecture
et la muséographie sont étroitement
associées. Le projet interroge les
­notions de reconstruction, de simula­
tion et d’intégration.
06
Urbanisme
Le Musée Unterlinden est constitué de
deux ensembles qui se font face de
part et d’autre de la place Unterlinden,
reliés par une galerie souterraine.
D’un côté le couvent médiéval, avec
la chapelle, le cloître ouvert et un
jardin. De l’autre côté, le nouveau bâti­
ment d’exposition (l'Ackerhof) fait
écho au volume de la chapelle et forme
avec les anciens bains municipaux –
qui abritent les bureaux, la Piscine, la
bibliothèque, le café et l’office
de tourisme – une deuxième cour.
07
Située entre ces deux pôles du musée,
la place Unterlinden retrouve sa signi­
fication ancrée dans l’histoire, à l’époque
où écuries et ferme formaient vis-à-vis
du couvent, un ensemble appelé Acker­
hof. Ce qui était, avant la rénovation du
musée, une gare routière est aujourd’hui
une nouvelle place, publique et urbaine.
Le canal de la Sinn, dont les eaux
s’écoulent sous la vieille ville de Colmar,
est rouvert et devient l’élément central
de ce nouvel espace public. Tout près
de l’eau, une Maison marque la ­présence
du musée sur la place. Elle reprend
la position, la volumétrie et la forme du
bâtiment d’entrée de la ferme qui
s’y trouvait autrefois. En regardant à
travers ses deux fenêtres, on peut
­apercevoir l’intérieur de la galerie sou­
terraine en contrebas, qui relie les
deux ensembles.
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Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
L’architecture, résolument contemporaine, de l’extension du musée vient s’insérer dans
l’architecture médiévale, avec des courbes travaillées comme dans les escaliers ou
les ogives de l’espace d’accueil. Le traitement des nouvelles surfaces au lait de chaux a
été choisi pour être en harmonie avec les parties anciennes du musée.
Architecture
Nous avons cherché une configuration
urbaine et un langage architectural
qui s’intègrent dans la vieille ville, tout en
manifestant son caractère contempo­
rain à ceux qui y regardent de plus près.
Située au centre de la place, face au
­canal, l’entrée du nouveau musée donne
sur le couvent, dont la façade a été
­délicatement rénovée. Les travaux de
rénovation ont été planifiés et exécutés
en étroite collaboration avec les ar­
chitectes des Monuments Historiques.
Débarrassées des structures muséogra­
phiques des années 80, les salles ont
retrouvé un état similaire à celui d’autre­
fois. Nous avons dégagé d’anciens
­plafonds en bois et rouvert des fenêtres
longtemps murées, donnant sur le
cloître et la ville. Le toit de chapelle a été
assaini et le sol doté d’un parquet. Un
escalier en spirale qui ne se donne pas
immédiatement comme un nouvel élé­
ment architectural, conduit le visiteur à
la galerie souterraine, qui relie le cou­
vent et le nouveau bâtiment.
Pour la galerie et l’Ackerhof, où sont
présentées les collections des 19e
et 20e siècles, nous avons choisi un lan­
gage architectural abstrait, contem­
porain, blanc. Au second étage du bâti­
ment, le volume de la salle dédiée aux
expositions temporaires évoque, avec
son toit à pignon et sa hauteur extra­
ordinaire de 11,50 mètres, la chapelle des
Dominicaines. L’espace central des
­anciens bains, la Piscine, communique
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avec les nouvelles salles d’exposition.
Il peut accueillir des concerts, des
performances, des conférences, des
fêtes diverses ou des installations
d’art contemporain.
Les façades de l’Ackerhof et de la Mai­
son, ainsi que les murs délimitant la
nouvelle cour, ont une texture rugueuse,
faite de briques. Un dialogue se crée
avec le couvent aux façades de moellons
et de crépi, où styles et époques se
­superposent. Dans l’épaisseur des murs
sont découpées quelques fenêtres en
ogive. Les toits sont en cuivre. Le sol de
la nouvelle cour est recouvert de grès,
comme la place Unterlinden. Au cœur de
cette cour, un verger, le pomarium,
se développe sur un socle de pierre et
de briques.
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Collections et muséographie
Développée en étroite collaboration
avec Jean-François Chevrier et Élia
­Pijollet, dans un constant dialogue avec
les conservateurs du Musée Unter­
linden, la muséographie a été pensée
en relation avec l’architecture : nous
avons eu le souci de valoriser au mieux
chaque espace et chaque œuvre,
tout en rendant lisibles les ensembles
stylistiques et les relations chronolo­
giques et historiques.
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La structure composite et hétérogène
de la collection se redouble dans
celle du bâtiment, assemblage d’entités
architecturales d’époques et de styles
très divers. Nous avons cherché à clari­
fier le parcours en définissant des
relations simples et lisibles : le Cloître
abrite l’art médiéval (et au premier
étage les collections d’art décoratif et
d’art populaire) ; la Galerie la transition
du 19e au 20e siècle, vers l’art mo­
derne ; l’Acker­hof l’art depuis les années
1930 et les expositions temporaires. À
chacune de ces trois entités correspond
un traitement particulier des espaces
intérieurs (matériaux, couleurs, propor­
tions et partitions).
Le Retable d’Issenheim n’a pas changé
d’emplacement : il se déploie dans
la chapelle attenante au cloître, dont
­l’espace intérieur a été clarifié. Il est
présenté dans une nouvelle structure qui
­libère les panneaux de bois peint, de
manière à rendre visible le chef d’œuvre
de l’art plutôt que l’image de dévotion.
L’éclairage a été entièrement repensé.
L’important ensemble d’art médiéval des
14e au 16e siècles est présenté dans
les salles qui entourent le cloître au rezde-chaussée et dans une partie du
sous-sol, selon une présentation chro­
nologique rassemblant les supports
divers – tableaux, retables, sculptures,
reliefs, vitraux, objets d’art – par pé­
riode et par foyer géographique. L’accro­
chage est dense, il permet un réseau
de relations très vivant et parlant entre
les œuvres. Cette densité est modulée
par deux moments plus amples : la deu­
xième salle (1420–1470) et la chapelle.
14
La galerie se présente comme
une suite de trois salles d’exposition
bien différenciées.
La première salle de la galerie est consa­
crée à l’histoire du musée. Elle expose
et éclaire l’hétérogénéité de la collection,
en combinant trois types d’artefacts :
œuvres d’art, objets, documents.
La deuxième salle s’élève jusqu’au-des­
sus du sol de la place : elle se prolonge
en surface avec la Maison. C’est un
­volume haut et vaste, dans lequel les deux
grandes baies apportent de la lumière
naturelle et des vues sur le ciel. Les trois
dimensions du projet – urbanisme, ar­
chitecture, muséographie – s’y rejoignent
de manière très visible. C’est un moment
fort du parcours, qui rapproche trois
œuvres représentatives de trois direc­
tions de l’art du 19e siècle et marque
le début de la transition vers l’art mo­
derne, reprise et développée dans la
suite de la galerie.
La partie la plus longue, qui constitue à
proprement parler la « galerie » accueille
la collection d’art du 19e siècle et
une première partie de la collection 20e
siècle, jusqu’au début des années
1930. L’espace en longueur est structuré
par trois cabinets d’art graphique,
consacrés respectivement au 19e siècle,
à la photographie et au début du 20e
siècle. Posées à intervalles irréguliers le
long de l’axe central, ces trois petites
boîtes blanches définissent quatre sé­
quences spatiales. Les deux longs
murs continus permettent un accrochage
sans interruption en deux « lignes ».
Le rythme de l’accrochage est donné
par les séquences ouverture / res­
serrement : espace ouvert entre deux
­cabinets, espace plus intime de part
et d’autre de chaque cabinet, propice aux
petites œuvres.
15
Le rez-de-chaussée et le premier étage
de l’Ackerhof accueillent les collections
de peinture et de sculpture des années
1930 à aujourd’hui. La muséographie a
été conçue de manière à faire apparaître
la signification historique de la col­
lection, stimuler sa complexité et être
ouverte à son enrichissement à venir.
La division de l’espace en salles cloison­
nées a été écartée, car la recherche
d’une pureté abstraite ne convient pas
à la collection : une succession de
volumes autonomes la figerait en petits
ensembles fermés sur eux-mêmes.
Nous avons cherché au contraire à rendre
visibles des tensions historiques dans
des espaces fluides et découpés. Le
système de cimaises suspendues, déve­
loppé spécifiquement pour le Musée
Unterlinden, permet d’associer mobilité
et structure rigoureuse de l’espace.
Chacun des deux niveaux est traité
comme une unité spatiale continue,
où les œuvres dialoguent : dès l’entrée,
le niveau est perçu par le visiteur
comme une entité – un seul volume –,
dont il découvre le contenu et les
­articulations au fil de son avancée dans
la salle. Cette mobilité permet de
mettre en valeur les points forts de
la collection, faisant jouer des relations
de parenté évidentes mais aussi
des glissements et des contrastes
moins attendus.
Herzog & de Meuron,
décembre 2015
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Détail de l’Agression de saint Antoine, un des panneaux du
Retable d’Issenheim, célèbre polyptique réalisé par Grünewald et
Nicolas de Haguenau (1512–1516)
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Dans la galerie souterraine, des œuvres de 1830 à 1930
comme le Couple Alsacien (1881) de Claire Hildebrand et
Les Pèlerins de Sainte-Odile (1863) de Gustave Brion.
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Point focal du musée, la Maison apporte de la lumière naturelle
à la galerie et présente trois œuvres emblématiques des collections,
de Théophile Schuler, Georges Rouault et Claude Monet.
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Détail de la Vierge à l'Enfant,
Retable d’Issenheim, 1512–1516
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Le soutien
des mécènes
du musée
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Depuis 2007, le Cercle des Mécènes
regroupe des entreprises qui ont choisi
d’exprimer leur valeur d’engagement
et de soutenir des actions solidaires et
patrimoniales. Ces entreprises ont
été associées au grand projet d’extension
et ont apporté une aide financière
substantielle.
Des donateurs privés ont également
rejoint ce grand élan de ­soutien. Un gé­
néreux mécène, Thomas Dietschweiler,
a notamment offert 800 000 euros
pour la rénovation de la chapelle dans
laquelle est conservé le Retable
d’Issenheim. D’origine suisse, ce pas­
sionné de Grünewald appartient au
Conseil d’administration de la Fondation
suisse Ria & Arthur Dietschweiler qui
soutient de nombreux projets dans les
domaines de la culture et du social.
« La Fondation Timken soutient des
­projets d’investissement à but non
lucratif dans les domaines culturels,
éducatifs, sociaux et sportifs dans
les villes où sont établies des usines
Timken. Pour Colmar, la Fondation
Timken participe finan­cièrement à de
très nombreux projets depuis plus
de quatre décennies. Elle a déjà soute­
nu des projets du Musée Unterlinden
dans le passé. La dimension exception­
nelle du projet d’extension l’a convaincu
de consacrer un engagement financier
conséquent réparti sur plusieurs années*. La qualité du projet d’agrandissement
a été l’un des facteurs déterminants
de la forte implication de la Fondation
Timken au côté de la Ville de Colmar,
de la Société Schongauer et d’autres mé­
cènes et partenaires financiers. Sa
participation reflète l’idée que si le pa­
trimoine culturel du musée est la pro­
priété de tous, il est avant tout celui des
habitants de Colmar et de sa région,
même si le rayonnement du musée va
bien au-delà. La Fondation Timken est très heureuse
d’être associée à un projet de cette
­ampleur aussi bien sur le plan culturel
qu’éducatif. Elle espère que l’exten­
sion du musée permettra d’attirer de
nouvelles générations de visiteurs
vers l’art et la culture. Les collections
du musée méritent d’être partagées
avec le plus grand nombre. » Dominique Ohl,
Général Manager, Timken Europe
En haut, la salle 1470–1500 présentant peintures,
sculptures et objets d’art des années 1480
Dans l’Ackerhof sont exposées des œuvres des années 1960
aux années 2000 comme Longue ocre de Olivier Debré (1972)
ou l’imposant Veilleur de Simone Boisecq (1984–85).
* La Fondation Timken a apporté plus d’un million
de dollars au projet d’extension du musée.
22
23
« Notre premier don d’un montant de
10 000 € remonte à 2007 : nous souhai­
tions ajouter une orientation culturelle
à nos différents sponsorings qui étaient
plutôt sportifs.
Nous vivons le lien avec le musée
avec beaucoup de bonheur et nous es­
pérons que, malgré une crise éco­
nomique persistante dans nos métiers,
nous pourrons continuer à le soutenir.
Notre contribution est modeste, elle est
à la hauteur de ce que nous estimons
pouvoir faire, mais nous ressentons, par
les échanges et par l’accueil qui nous
est réservé, qu’elle est appréciée à sa
juste valeur, non pas tant à cause
de son montant mais simplement parce
qu’elle existe.
Notre engagement montre aussi qu’une
entreprise de second œuvre, comme
nous le sommes, peut également être
présente dans une action culturelle.
Nous ne souhaitons pas seulement faire
un chèque, nous aimons inscrire notre
action dans l’acquisition d’une œuvre ou
dans une restauration complète et
­marquer ainsi notre présence dans la
durée. Notre coup de cœur dans
les ­collections ? Le visage du Christ
d’Otto Dix. Poignant. »
Fernand Stihlé,
groupe Stihlé – Stihlé Frères 68
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Un musée
unique
Jean Lorentz,
Président de la
Société Schongauer
« Quand avez-vous projeté
l’extension du musée ?
Nous y réfléchissions depuis
le début des années 2000,
lorsque je suis devenu
­président de la Société Schon­
gauer. Nous n’avions déjà
plus assez de place pour pré­
senter les collections d’art
moderne. Nous avions imagi­
né deux solutions : soit une
extension sous la place de la
Sinn en agrandissant les
salles du sous-sol, soit un vé­
ritable redéploiement des
collections dans le bâtiment
néobaroque des bains mu­
nicipaux. Grâce à son maire,
la Ville de Colmar a finale­
ment choisi de mettre ce der­
nier à disposition du musée :
elle est devenue maître
­d’ouvrage de l’extension et a
assuré une large part du
­financement du projet, aux
côtés de ses partenaires
publics (État/Direction régio­
nale des Affaires Culturelles,
Région Alsace, Conseil
­départemental du Haut-Rhin).
La Société Schongauer a
­également contribué au finan­
cement de l’opération par
le versement d’un fonds de
concours et de fonds issus
du mécénat. Nous avons, par
exemple, vendu l’immeuble
que nous avait cédé le peintre
Robert Heitz à Strasbourg
et nous avons cherché et trou­
vé plus de 3 millions d’euros
de mécénat, ce qui n’était pas
facile à rassembler en ces
temps de crise. Grâce à des
dons généreux de la fonda­
tion Timken, de la fondation
Scheide de Princeton,
du Crédit Mutuel et de dona­
teurs comme T
­ homas Diet­
schweiler, nous avons réussi
à apporter un total de
4,8 millions d’euros. Mais nous
continuons à chercher pour
parvenir à couvrir le coût réel
de ce projet.
Car la Société Schongauer
supporte également des
dépenses non inclues dans
le projet d’extension : le
réaménagement du 1er étage
du couvent et des vitrines
de la salle d’archéologie, la
restauration d’œuvres et
leur transfert, les nouveaux
supports de communica­
tion, le nouveau site internet,
les actions de médiation,
l’aménagement de la biblio­
thèque et des bureaux et le
café Schongauer.
Qu’est-ce que ce projet
de rénovation et d’extension
a apporté à la Société
Schongauer ?
Le projet d’extension, pour
lequel nous avons œuvré avec
dynamisme, a attiré et
rendu possible un nombre ex­
ceptionnel de donations.
Plus d’une décennie de dona­
tions remarquables s’est
­ouverte avec le don de Brigitte
Coudrain de plus de deux
cent œuvres de Johnny Fried­
laender, l’un des plus grands
graveurs de la scène ar­
tistique parisienne d’aprèsguerre. Cette donation
s’est accompagnée du don
de Georges et Lia Coppel
d’œuvres de la célèbre
collagiste Jeanne Coppel.
24
La Société Schongauer est fière d’avoir rendu possible
le nouveau musée pour lequel elle a œuvré avec dynamisme
en suscitant de nombreuses donations.
Jean-Paul Person, grand
­collectionneur parisien,
rédacteur en chef de la revue
Vogue, a ensuite été l’un
des trois grands mécènes de
la Société Schongauer. Bien
que rien ne le prédestinait à
s’orienter vers Colmar, il nous
a fait la joie de venir, encou­
ragé par un galeriste parisien,
à la rencontre de notre
­musée et nous a légué 146
tableaux : toute sa collection
d'œuvres principalement
du 20e siècle. Nous avons su
accueillir cet homme re­
marquable qui cherchait une
institution à laquelle léguer
sa collection, et le projet d’ex­
tension du musée a achevé
de le convaincre. Une salle
porte son nom dans le nou­
veau bâtiment et présente
une partie de ses collections.
Nous conservons, grâce à
lui, quelques-uns des plus
beaux Dubuffet !
Nous avons eu, ensuite,
d’autres donations
marquantes : 124 œuvres
du peintre américain Joe
Downing par Emmanuel
Wardi, la collection du rédac­
teur en chef de la revue Es­
prit, le grand écrivain Camille
Bourniquel, qui a notamment
donné des œuvres d’Alfred
Manessier. De nombreuses
compositions de Hans Reichel
nous ont été léguées par
le professeur en pharmacie à
Paris, Jean Étienne, égale­
ment d
­ onateur d’un Braque
fameux. Et enfin, Jacques
Polain, de Bruxelles, nous a
apporté généreusement
2 panneaux peints du 15e
siècle, une R
­ ésurrection
et un Christ au calvaire, et
une sculpture de Vierge à
l’Enfant de la même époque.
Nous avons bénéficié de ces
donations en raison de l’ex­
tension, de notre dynamisme
qui est très apprécié, mais
aussi de la forme juridique
que nous avons : nous ne
sommes pas un musée muni­
cipal ou national mais un
­musée d’association géré par
des membres dirigeants
­bénévoles qui s’investissent
pleinement et s’engagent
­auprès des futurs donateurs.
Ces collectionneurs ont
­trouvé au sein de la Société
Schongauer des interlocu­
teurs attentifs et passionnés.
Ils n’avaient, pour beaucoup
d’entre eux, aucun lien avec la
Ville de Colmar ou ses habi­
tants. Mais à la découverte de
notre institution, de nos
­collections, de notre politique
ambitieuse et en raison de
ces liens d’amitié qui se sont
noués, ils ont réalisé ces dons
exceptionnels. Nous avons
su saisir ces opportunités :
peu de musées de villes
moyennes peuvent s’enor­
gueillir d’avoir séduit autant
de donateurs. Nous avons
été grandement récompensés
de nos efforts.
Quelle orientation
souhaitez-vous donner au
nouveau musée ?
Nous espérons que ce bel élan
d’enrichissement des col­
lections va se poursuivre. Les
grandes transformations
du musée vont faire parler de
nous. Nous souhaiterions
également retrouver une dy­
namique d’acquisition qui
s’est un peu ralentie tandis
que nous cherchions des
fonds pour les travaux d’ex­
tension. Car le mécénat,
jusque-là, nous a aidé à ac­
quérir des œuvres exception­
nelles. Nous étions un des
musées de province à faire le
plus d’acquisitions. Nous
avons su acheter, au bon mo­
ment, des Primitifs remar­
quables et de nombreux ta­
bleaux d’art moderne. Nous
allons essayer de renouer,
dès que possible, avec une
politique d’acquisition ambi­
tieuse. Nous espérons, à pré­
sent, une moyenne annuelle
de 350 000 visiteurs, à nous
de les attirer grâce à une
programmation d’expositions
de grande qualité.
Le travail effectué par la
­Société Schongauer contribue
au rayonnement international
de Colmar. Le nouveau musée
offre à la ville, à la région
mais aussi au pays un remar­
quable pôle d’attractivité
culturel. Nous faisons partie
maintenant des plus grands
musées d’Europe. »
Jean Lorentz,
Président de la Société
Schongauer
25
Gilbert Meyer,
Maire de Colmar
« La Ville de Colmar a été
maître d’ouvrage des travaux
d’agrandissement et de
­réaménagement du musée.
Elle a souhaité redonner
à cette institution, fleuron du
patrimoine rhénan, son
­caractère attractif et lui offrir
les moyens de doubler
sa fréquentation. Le dévelop­
pement des surfaces d’ex­
position lui permet aussi de
s’inscrire dans le monde
contemporain et d’affirmer
sa vocation d’ouverture et
d’accessibilité à tous.
La Municipalité accorde une
large place à la culture et
consacre plus de 18% de son
budget à ce secteur foison­
nant. Elle n’a pas hésité
à investir plus de 17 millions
d’euros sur les 44 millions
qu’ont exigé les travaux du
musée. Grâce aux Colmariens,
le Musée Unterlinden est
de nouveau installé dans un
écrin à la hauteur des trésors
que l’Histoire a légués à
Colmar. L’extension du musée
est essentielle pour le rayon­
nement de la ville et de
la région : elle est le résultat
d’une stratégie d’ordre pa­
trimonial. À Colmar, nous
construisons l’avenir en nous
appuyant sur notre histoire. »
Gilbert Meyer,
Maire de Colmar
Agir,
contempler
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
L’exposition inaugurale d’Herzog & de Meuron, associés à
Jean-François Chevrier, se déploie dans les nouveaux espaces
du musée du 24 janvier au 20 juin 2016 et évoque les deux
registres d’expérience dans l’art : la contemplation et l’action.
Jeff Wall, Monologue, 2013, © Jeff Wall Studio
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Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Charles Ray, Plank Piece I and II, 1973
© Charles Ray / Courtesy Matthew Marks Gallery, New York
« L’exposition inaugurale prend place
dans le nouvel espace d’exposition tem­
poraire de l’Ackerhof et dans la Piscine.
Dans l’Ackerhof seront présentées des
peintures, des sculptures et des œuvres
sur papier (issues des collections du
musée), qui nécessitent des conditions
d’exposition muséale ; dans l’espace
contigu de la Piscine sera montré un en­
semble de plus de trente films et ex­
traits de films couvrant tout le 20e siècle,
jusqu’à aujourd’hui : certains seront
projetés sur un grand écran central,
d’autres dans des cabines spécialement
aménagées, d’autres encore diffusés
sur des moniteurs répartis dans la salle.
Outre ces deux parties continues, on
peut considérer que l’exposition compte
une troisième partie, faite de rendezvous ponctuels dans la Piscine : des
rencontres et des performances.
Il fallait que l’exposition puisse utiliser
et mettre en valeur le passage entre la
salle d’exposition et la Piscine. Cet
espace est magnifique, c’est la tête de
pont du musée vers l’art du 21e siècle ;
nous faisons en sorte de l’utiliser au
mieux de ce qu’il permet.
La problématique de l’exposition évoque
le partage de la culture artistique entre
deux registres d’expérience : la contemplation et l’action. Cette bipolarité
s’est vérifiée dans l’histoire des arts en
Europe depuis le Moyen Âge et le temps
des cloîtres (consacrés à la vie contem­
plative) jusqu’à l’ère actuelle des écrans.
Action et contemplation ne sont pas
deux voies distinctes de l’art, mais deux
dimensions qui coexistent, à des degrés
divers, dans la plupart des œuvres. Il
s’agit de donner au visiteur la possibilité
de s’interroger sur ses propres attentes
concernant l’art.
Nous avons souhaité que cette exposition
soit une occasion pour le visiteur de
­découvrir des œuvres mais aussi de voir
le lieu, les espaces magnifiques qui
le constituent. Le désir de laisser entiè­
rement ouverte la grande salle de
l’Ackerhof, sans la cloisonner ou la sub­
diviser, était partagé par tous, du
côté des architectes comme du côté de
l’équipe du musée. Nous avons choisi
également d’y présenter peu d’objets,
afin qu’ils trouvent toute leur place
et que les relations qui s’établissent de
l’un à l’autre apparaissent pleinement.
L’exposition ne présente pas une histoire
exhaustive et linéaire ; elle évoque trois
grandes phases de l’histoire de l’action
dans l’art, du 15e siècle à la période
­actuelle. Nous montrons aussi que cette
grande salle de l’Ackerhof permet de
présenter de manière très diversifiée des
œuvres de toute nature et de toutes
les époques. »
Jean-Baptiste Peytavin, Les Sept Athéniennes
et le Minotaure, début du 19e siècle
Photo © RMN-Grand Palais / Thierry Ollivier
Pierre Klossowski, Roberte aux barres parallèles, 1990
© Courtesy Cabinet Gallery, London
René Daniëls, De Terugkeer Van De Performance
(Le Retour de la performance), 1987,
Collection Paul Andriesse
Jean-François Chevrier et Élia Pijollet,
commissaires de l’exposition
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Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Les coulisses
du chantier
Des entreprises spécialisées ont travaillé à la
rénovation complète des bains, à la construction
de l’Ackerhof et de la galerie souterraine
ainsi qu’aux aménagements de l’ancien couvent
des Unterlinden.
Harmoniser l’ancien
et le nouveau
« Le souci des architectes était
de préserver le bâti ancien et
de rester dans des enduits naturels, des surfaces minérales.
En général, nos enduits de chaux
sont à grande granulométrie,
comme aux Dominicains de Gueb­
willer ou à l’abbaye d’Ottmars­
heim. Mais, pour le musée, nous
avons réalisé des enduits beaucoup plus fins et plans, notamment
pour les salles Moyen Âge, les
salles Schongauer et les espaces
d’accueil. Par contre, dans le
chœur de la chapelle, qui est classé,
nous avons préservé l’enduit
d’origine et nous l’avons recouvert
avec un lait de chaux pour unifier
la surface. Le visiteur observera que
ce n’est pas uniforme, ce qui peut
sembler difficile à comprendre. Ce
traitement invite à suivre le mou­
vement des façades et des murs, il
est réalisé à main d’homme qui
a plus ou moins caressé la surface.
C’est ce qui lui donne sa respiration et exprime l’âme du bâtiment.
Cette technique rare et difficile du
lait de chaux, nous l’avons adaptée
pour couvrir l’escalier hélicoïdal
de l’espace d’entrée et lui donner
une texture ancienne. Ce très bel
ouvrage en béton a été traité avec
un enduit à base de chaux et de
­ciment, un sable de granit rose qui
vient de Gérardmer et, pour finir,
un lait de chaux que l’on a coloré
avec des ocres. »
Ahmed Naghmouchi,
chef de c
­ hantier, entreprise
Scherberich-Monuments
Historiques
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Histoire d’une
restauration
« Le Double portrait d’hommes
de Léon Zack (1931) s’est révélé
être une œuvre particulière.
Le peintre a utilisé les deux côtés
de la toile : le revers présente
un double portrait de femmes. La
restauration devait permettre
une présentation du caractère
double face de cette peinture.
L’état de conservation était assez
mauvais : le vernis s’était assombri
et encrassé, la toile présentait
de nombreuses déformations et
était partiellement détachée
du châssis. Nous avons décidé de
garder le châssis ancien, qui
est intimement lié à l’histoire de
l’œuvre, puisqu’il témoigne du
réemploi par l’artiste du revers de
la première composition et nous
l’avons retendu pour reprendre les
déformations. Nous avons aussi
découvert, au cours de cette restauration, qu’une troisième œuvre
est probablement présente sous la
surface principale ! »
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Julie Sutter, restauratrice du
­patrimoine, spécialité peinture
De nouvelles
formes
Le retour des œuvres au musée :
un ballet parfaitement chorégraphié
« La forme de l’escalier qui fait
la transition entre les bains et le
second étage de l’Ackerhof ne
manquera pas d’attirer l’at­tention :
nous avons créé un plafonnement
complètement courbe réalisé
à partir de fils métalliques agrafés
sur un treillis soudé que l’on
a enduit de plâtre et lissé jusqu’à
obtenir l’arrondi. La dis­position
de la Maison n’a pas non plus été
une réalisation commune : ni
carrée, ni régulière, parfaitement
excentrique ! »
« La réinstallation du Retable
dans la chapelle a évidemment été
une phase très technique dans
le réaménagement du musée. Les
panneaux de l’œuvre monu­
mentale sont à présent montés
dans une structure métallique
qui permet leur évacuation rapide
en cas d’urgence.
Frédéric Baumgart, chef de chantier, entreprise Werey-Stenger.
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Nous avons ensuite orchestré le
­retour d’environ cinq cent œuvres
en quelques jours dans un musée
complètement remanié, avec
une nouvelle distribution des espaces d’exposition. Les lapidaires
ont d’abord été remis en place,
des pièces de plusieurs tonnes, dont
le déplacement, remarquablement coordonné par Ahmed Naghmouchi, a nécessité une mani­
pulation e
­ xigeante et des solutions
parfois inédites : les grandes
­statues de prophètes ont dû être
penchées dans l’ascenseur pour
les faire descendre dans le soussol de l’ancien couvent.
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Nous avons pensé le soclage des
œuvres en amont, avec Aubert
Gérard, Directeur du Centre Régional de Restauration d’Œuvres
d’Art de Vesoul, pour trouver une
ligne continue parmi ces dispo­
sitifs de présentation selon le type
des objets.
Nous avons aussi profité de cette
phase pour refixer les fragments
d’œuvres abîmées avec le temps
et procéder au dépoussiérage
des objets. »
Emma Delgado,
régisseur des œuvres
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Plafond des salles Martin Schongauer et des années 1470–1500, éléments
en bois peint hétéroclites des 17e et 18e siècle découverts lors de la
rénovation de ces salles provenant d’anciens éléments du couvent des
Unterlinden et remis à leur emplacement après nettoyage et refixage.
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« Sa composition n’offre aucun
­repère et notre regard se perd dans
la profondeur et l’espace de la
toile – pourtant pas très grande –
absorbé par ce qui pourrait être
une parcelle de terre ou un univers
étoilé, un microcosme ou un
macrocosme. Le titre ajouté à la
présence de couleurs terreuses
nous éclaire sur le sujet traité
et contraste avec le caractère raffiné des tons et de la matière.
À cette époque, Dubuffet réalise de
véritables célébrations du sol
où la forme disparaît pour céder
l’espace à l’uniforme foisonnant.
La projection aléatoire en gout­
telettes de peinture de différentes
nuances sur la toile le rapproche
alors des dripping de Jackson
Pollock. Mais pour Dubuffet, il ne
s’agit en aucun cas d’une com­
position abstraite et ses intensions
sont claires, comme le confirment les titres et les sous-titres
donnés à chacune des pièces
de la série des Texturologies. J’aime
la possibilité que nous donne
le peintre, en nous laissant la voie
libre, de participer nous aussi
à ce champ créatif. »
Un nouveau
regard
Au détour des restaurations et des réaménagements
des salles d’exposition, le musée a dévoilé de nouveaux
secrets. Les conservateurs présentent quelques-unes
de ces œuvres qui se sont révélées sous un autre jour.
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Frédérique Goerig-Hergott,
conservatrice en chef, chargée des
collections d’art moderne
Jean Dubuffet (1901–1985)
Texturologie XXXVII (grave), 1958
Huile sur toile
Legs Jean-Paul Person 2008
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« Ce clavecin a véritablement
une position d’outsider au sein des
collections : non seulement il est
en état de jeu mais il a conservé la
sonorité la plus proche de ce
qu’elle a pu être au moment de sa
création. Tous les plus grands
­solistes du clavecin comme Blandine Verlet, Christophe Rousset
ou Gustave Leonhardt ont joué sur
cet instrument, ce qui lui donne
aussi une place dans l’histoire de
la musique.
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
« Ce fragment de bas-relief
fait partie d’un ensemble sculpté
de grande taille appartenant
à un monument commémoratif ou
cultuel. Il représente un personnage identifié comme un guerrier
barbare ou un géant, les yeux
implorants, le bras levé dans une
attitude de défense. Par ce thème,
il s’insère dans la tradition des
scènes grecques de gigantomachie ;
l’attitude du personnage est
­comparable à celles des barbares
du Grand autel de Pergame, un
des chefs-d’œuvre de la sculpture
hellénistique conservé à Berlin,
commémorant les batailles des
Grecs contre les Galates.
Par ses qualités artistiques et
l’émotion qui s’en dégage, l’œuvre
se démarque très nettement
des bas-reliefs funéraires locaux,
comme les stèles de facture pro­
vinciale présentées dans la même
salle. Certainement réalisé
par un artiste de grand talent et
de formation classique, le basrelief de Biesheim constitue une
des sculptures antiques majeures
de la région. »
C’est un objet étrange, composite,
qui touche à différents arts :
­l’ébénisterie, la facture d’instruments à cordes et la grande
­peinture, la peinture d’histoire
qu’on appelait le grand genre. L’intérieur du couvercle historié a
trait à la peinture française du
17e : la composition a été réalisée
par un peintre parisien des années 1680–1700 qui a représenté la
joute musicale entre Apollon et
Pan devant le roi Midas, dans un
paysage d’influence flamande
avec des personnages qui font penser à Poussin. C’est une scène
qui détonne dans les collections
du musée qui n’est pas vraiment
spécialisé dans le 18e ! »
Raphaël Mariani, attaché de
conservation, chargé des collections 19e siècle et objets d’art
Clavecin, 1624/18e et 19e siècles, bois, laque, or, métal, peinture à l’huile
Ioannes II Ruckers (Anvers, 1578–1642), Classement au titre des Monuments Historiques, 1966
Achat, 1980
« Le Retable de saint Éloi est une
œuvre que j’ai redécouverte,
je l’ai toujours connue dans les réserves du musée et je n’avais
jamais pu l’observer précisément
car le retable était très difficile
à voir dans l’espace dans lequel il
était conservé.
Suzanne Plouin, conservateur
en chef, chargée des collections
archéologiques
Il est composé de 2 volets peints et
il manque la partie centrale qui
était certainement sculptée. Donné
il y a longtemps par le Curé
­d’Ammerschwihr, c’est une œuvre
très anecdotique qui raconte
la vie de saint Éloi orfèvre du roi
Dagobert. Les légendes autour
du saint le montrent souvent coupant la jambe d’un cheval pour
ferrer son sabot. Dans cette composition, on peut véritablement
observer les petites échoppes
telles qu’elles étaient établies au
début du 16e siècle.
Bas-relief représentant un combattant barbare, Biesheim
Grès rose, trouvé en 1770, don de Gabriel Morel, 1842
En réexaminant l’œuvre, s’est
présentée à moi une sorte de révélation : il s’agissait en fait du
chainon manquant de la peinture à
Colmar post Martin Schongauer.
L’auteur de cette peinture appartient à un atelier colmarien qui a dû
exister dans les années 1480 jusque
1520, un suiveur de Schongauer,
très inspiré par lui. »
Pantxika De Paepe, Directrice,
conservateur en chef, chargée des
collections d’art ancien
Rhin supérieur, Colmar, Retable de saint Éloi, Saint Éloi ferrant le sabot d’un cheval après l’avoir coupé,
Saint Éloi devant le roi Dagobert, Sainte Marguerite et sainte Madeleine, Sainte Barbe et sainte Catherine
Vers 1510, peinture à l’huile sur bois, don de l’abbé Hugar, curé d’Ammerschwihr, 1844
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Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Des bains
au musée
Le bâtiment des bains a retrouvé sa splendeur du début du 20e siècle
pour devenir un espace événementiel pour les manifestations du musée
(spectacles, concerts, conférences) et pour des réceptions privées.
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La boutique du
Musée Unterlinden
Le musée
et son quartier
Une nouvelle boutique, attenante à
la billetterie, offre sur une surface
de près de 80m2 une belle sélection
d’objets en rapport avec les col­
lections : papeterie, librairie d’art,
art de la table et espace jeunesse.
L’extension a permis au musée de proposer des espaces d’accueil
dignes des grands musées internationaux et de redonner une
nouvelle dynamique au quartier qui l’environne.
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Réédition d’une série exceptionnelle de 20 gravures de Martin
Schongauer, numérotées, réalisées
par le graveur en taille douce
Rémy Bucciali, à partir de plaques
de cuivre du 19e siècle conservées
au musée.
Création de trois bijoux, oeuvres
singulières et poétiques de Christophe Burger, longtemps designer
pour la maison finlandaise Lapponia. La Sphère de la Mélancolie,
présentée dans une boîte-écrin,
ouvre un dialogue subtile avec
l’œuvre de Cranach, un des chefsd’œuvre du musée.
Le café
Schongauer
Installé dans le bâtiment des bains,
le café du musée accueille le visiteur dans un décor entièrement
créé par les architectes Herzog & de
Meuron. Un service continu lui permet de se restaurer, à tout moment,
grâce à une carte de plats simples,
raffinés, et de pâtisseries délicates,
et de profiter, à la belle saison, de la
superbe cour bordée de pommiers.
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Culture
Muséo’Ciné
« Nous avons imaginé une programmation dans la durée, en lançant
notamment un cycle de projections
autour de l’exposition inaugurale
à partir de janvier puis autour de
l’exposition Otto Dix à l’automne.
Un troisième programme de cinq
projections se déroulera en pa­
rallèle, tout au long de l’année, qui
évoquera le rapport entre le cinéma, l’art pictural et le musée. Nous
y présenterons par exemple le documentaire sur le musée du Louvre
sous l’occupation d’Alexandre
­Sokourov, « Francofonia », en compétition à la dernière Mostra de
Venise.
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Nous poursuivons, avec l’équipe du
musée, la même inclinaison pour
favoriser la diversité et la transversalité dans les arts. »
Fabien Huchelmann,
Direction Cinéma Colisée
Documentaire « Mon musée en chantier »
Réalisation Seppia en coproduction avec
France 3 Alsace
Suivez l’histoire singulière d’une icône de
­l’institution muséale qui présente les différents
visages d’un musée plus que centenaire, le 2e
plus visité en région, et l’aventure extraordinaire
de son agrandissement.
Centre Européen
du livre et
de l’illustration
Comme le musée qui vient d’achever sa transformation, la Bibliothèque des Dominicains va bientôt
entrer dans une phase de rénovation et d’aménagement pour devenir
le Centre Européen du livre et
de l’illustration (CELI) lui offrant les
moyens de valoriser un fonds
exceptionnel rassemblant livres
anciens, cabinet des estampes
et fonds régionaux.
Office de Tourisme
de Colmar
Préparez votre séjour, vos
vacances, vos visites grâce aux
services et informations touristiques de l’Office de Tourisme de
Colmar en Alsace.
L’ancien couvent des Dominicains
et celui d’Unterlinden constituent
les pendants d’un exceptionnel
ensemble historique et architectural. Tout les réunit : leur proximité
géographique, leur histoire, leur vocation d’institutions patrimoniales.
Ce sont les mêmes érudits qui, au
19e siècle, ont présidé au début de
la bibliothèque et à la création de
la Société Schongauer.
Office de Tourisme de Colmar
Place Unterlinden
68000 Colmar
Tél. 03 89 20 68 92
[email protected]
www.ot-colmar.fr
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Autres
délectations
La Maison Mulhaupt
Pour Thierry Mulhaupt, la gourmandise est un art. Plongez dans l’univers du maître chocolatier pâtissier
alsacien et découvrez ses mille et
une créations délicates et raffinées.
Déjà maintes fois primé et salué
par la presse, Thierry Mulhaupt, qui
a fréquenté les Beaux-Arts, revisite
en virtuose l’art de la pâtisserie et
du chocolat.
Créée dans les années 1930, la
pâtisserie est située en plein cœur
du centre historique de Colmar.
6 Place de l’École
68000 Colmar
Tél. : 03 89 41 24 63
La pâtisserie
japonaise
Azukiya, pâtisserie
du Japon
Horaires
Lundi : 13h30–18 h 30
Mardi au vendredi : 9h–18h30
Samedi : 9h–18h30
Dimanche : 9h–12h
www.mulhaupt.fr
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Découvrez les douceurs du Japon
dans cette petite pâtisserie au
décor épuré et zen, véritable invitation au pays du soleil levant. Cécile
Sasaki vous fera découvrir des mets
sucrés et salés raffinés, préparés
au rythme du calendrier japonais et
au fil des saisons. Vous apprendrez
à en connaître les recettes, les
­ingrédients et la manière de les déguster selon la tradition et les
­coutumes japonaises. Goûtez à un
moment de pure poésie…
Ouverture :
les vendredis, 11h30–15h
et les samedis 11h30–7h
Selon la vente de la production du
jour, il arrive que le magasin ferme
plus tôt.
35 rue Kléber
68000 Colmar
Tél. 06 73 78 38 67
[email protected]
www.azukiya.fr
Côté Four –
Côté Cour
Coté four, c’est une boulangerie
avec ses bonnes odeurs de pains
frais, sortis tout chaud du fournil de Laurent Sanchez de 7h30 et
11h30. Le maitre boulanger et son
équipe vous proposent chaque
jour, un grand choix de viennoiseries et pains au levain naturel et
pains spéciaux au fil des saisons.
Côté Four, c’est aussi un restaurant
qui propose des plats du jour et
une carte selon les saisons.
La Boulangerie Coté-Four est
ouverte tous les jours de 7h30 à
22h30. Les dimanches et jours
fériés de 7h30 à 13h.
1924,
Un Monde
de Cafés Véritable mine d’or pour les amateurs de thé et café et de tous leurs
dérivés. Partez à la découverte des
grands crus de café, savourez la
tasse fruitée d’un Moka Sidamo ou
les notes d’épices du Guatemala
Huehuetenango. Sans oublier les
180 variétés de cette boisson millénaire qu’est le thé.
Côté Cour, dans l’esprit d’une brasserie chic parisienne, la cuisine est
traditionnelle et contemporaine.
Horaires :
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Fermé : lundi
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68000 Colmar
Tél. 03 89 21 19 18
www.cotecour-cotefour.fr
9 rue des Têtes
68000 Colmar
Tél. 03 89 20 61 10
[email protected]
Le journal du Musée Unterlinden
Comité de rédaction : Pantxika De Paepe, Marie-Hélène Siberlin Conception et création graphique : New Identity Ltd., Basel Textes : Hélène Braeuner
Photos : Ville de Colmar, George Dupin, Jean-Marc Hédoin, Christian Kempf, Peter Mikolas, Ruedi Walti Impression : Valblor Diffusion : 3000 exemplaires
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Lucas Cranach l’Ancien, La Mélancolie, détail, 1532, Musée Unterlinden, Colmar
Le Journal du Musée Unterlinden 23.1.16
Musée Unterlinden
Place Unterlinden
F-68000 Colmar
musee-unterlinden.com
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Crédit Mutuel Centre Est Europe, Timken Foundation,
me
M. Thomas Dietschweiler, M. et M William et Judith Scheide