Les Leaders Cambodgiens et leurs Alliances Tragiques1

Transcription

Les Leaders Cambodgiens et leurs Alliances Tragiques1
_____________
Sharing Information & Knowledge for Global Vision and Collective Progress
______________________________________________________________________________________________
Les Leaders Cambodgiens et leurs Alliances Tragiques1
L’histoire politique contemporaine du Cambodge ne peut être saisie pleinement sans avoir un
regard inquisiteur sur son passé. Comme disait Conficius : « study the past, if you would divine the
future », et c’est dans cet esprit que nous avons la ferme conviction qu’il n’est parfois pas inutile de
revoir le « passé » pour bien comprendre le « présent » et améliorer le « futur ».
Le passé du Cambodge est chargé de relations « de causes à effets ». Et c’est en recherchant
et analysant les causes que l’on parvient à comprendre sa situation actuelle. Les évènements qui se
sont produits au Cambodge le mardi 13 juillet 2004 avec le départ de Samdech Chea Sim vers la
Thaïlande pouvaient être interprétés sous plusieurs angles comme il a été mentionné dans nos
réponses adressées à certains de nos lecteurs.
Mais quant à notre position, nous avons privilégié les aspects relatifs aux tactiques
manipulatrices qui ont été utilisées et réutilisées dans de divers moments de l’histoire politique
Cambodgienne.
Dans notre recherche, les alliances conclues par quelques uns de nos leaders ont retenu notre attention
et nous souhaitons les reprendre dans cet article à travers quelques faits stylisés. Ces alliances nous
semblent constituer une des causes majeures de la « pathologie » que souffre actuellement le
Cambodge. Car c’est à travers elles qu’ont pu être exécutées les stratégies imaginées dans le but
d’anéantir la Nation Khmère.
Le but de notre article n’est pas de susciter la haine à l’égard de personne, mais tout simplement
d’apporter à nos actuels et futurs leaders des éléments de réflexion susceptibles de leur
permettre d’analyser les conséquences de leur politique d’alliances, et de favoriser les capacités
d’anticipations et la conscience collective de la communauté khmère.
Cet article est la version modifiée des réponses adressées aux diverses réactions de la part de la communauté khmère en
France et aux Etats-Unis à la suite de la diffusion de l’analyse intitulée « Une implosion du PPC ou une simple Tactique
Politique ? ». Bien que ces réactions nous aient été adressées en privé, nous tenons à remercier ces personnes pour
l’intérêt qu’elles portent à notre analyse qui a été diffusée précédemment au sein des forums khmers.
1
___________________________________________________________________________
© Khmer Diffusion
- Page 1 – 22 Juillet 2004
_____________
Sharing Information & Knowledge for Global Vision and Collective Progress
______________________________________________________________________________________________
Bien qu’étant analysées successivement comme suit, ces stratégies ne sont pas exclusives et
ne constituent pas non plus la liste exhaustive de la panoplie des stratégies utilisées.
1) Stratégies de coopération et de manipulations
Norodom Sihanouk et Ho Chi Minh : la rencontre de ces deux hommes n’est pas le fruit d’un
hasard mais d’une stratégie mûrement conçue par le dernier. Après avoir tenté en vain de lutter contre
le colonialisme français par ses propres moyens, Ho Chi Minh a eu l’idée de conclure des alliances
stratégiques avec le Roi Sihanouk pour évincer la France de l’Indochine afin de permettre au Vietnam
de bâtir son Empire au détriment du Cambodge et du Laos.
Grâce aux soutiens discrets de Ho Chi Minh, le Roi Norodom Sihanouk est devenu aux yeux de la
plupart des Cambodgiens « le Père de l’Indépendance » pour la Nation Khmère et a gagné une
popularité immensément grande de la part du peuple Khmer. Comme on a pu constater, les
Vietnamiens ont servi à plusieurs reprise la « carte Sihanouk » pour faire progresser leurs intérêts. Pour
convaincre le Roi Sihanouk à se mettre de manière indéfectible de leurs côtés, les Vietnamiens lui
auraient promis de restituer le Kampuchea Krom afin de renouveler sa popularité auprès du peuple
Khmer.
Ayant goutté avec plaisir l’immense popularité généreusement offerte par un peuple honnête, le Roi
Sihanouk s’est engagé à servir les intérêts du Vietnam sans modération.
Les accords conclus avec les Vietnamiens ne manquent malheureusement pas : soutien, malgré sa
politique de neutralité, au Vietnam lors de la guerre contre les Américains (piste Ho Chi Minh,
approvisionnement en nourriture), création du FUNK le 24 mars 1970 pour combattre aux côtés des
Vietnamiens contre les soi-disants agresseurs Américains au Cambodge, etc…
Mais au bout du compte, le Kampuchea Krom est toujours resté non seulement sous l’emprise du
Vietnam mais l’existence du Cambodge même, ou du moins pour ce qui reste de l’Empire Khmer, est
également menacée.
2) Stratégie de coopération et de destruction
Les Khmers Rouges et les stratèges Vietnamiens : la « carte Sihanouk » n’était
malheureusement pas la seule à figurer sur l’échiquier des Vietnamiens. Pendant que le Roi Norodom
Sihanouk régnait sur son Royaume au travers de son Sangkum Restr Niyum, les Yuons préparaient
déjà la relève en s’alliant avec les Khmers Rouges. Ces derniers ont été le « produit fabriqué » à la fois
par Sihanouk et les Vietnamiens. Car ne trouvant aucune place au sein du Sangkum Restr Niyum, les
Khmers Rouges ont pris le maquis avec le soutien des Vietnamiens. Les années 60-70 allaient donc
marquer le début de la destruction du Cambodge par le Vietnam à travers les « mains Khmères ». Cette
stratégie a été très efficace dans la mesure où elle a contribué à la fois à créer la haine entre les
Khmers et la destruction du Cambodge au profit du Vietnam.
___________________________________________________________________________
© Khmer Diffusion
- Page 2 – 22 Juillet 2004
_____________
Sharing Information & Knowledge for Global Vision and Collective Progress
______________________________________________________________________________________________
Connaissant bien le projet de « révolution sociale et sociétale » et les intentions nationalistes des
Khmers Rouges, les Vietnamiens les ont aidés à venir au pouvoir tout en infiltrant leurs éléments au
sein du mouvement des Khmers Rouges afin de les réactiver le moment venu. Les Khmers Rouges
étaient à peine au nombre de 3 000 hommes au début de 1970 et les Vietnamiens savaient
parfaitement mesurer leur potentiel militaire (des Khmers Rouges). A la différence des Chinois, les
Vietnamiens ont agi secrètement au sein de l’organisation des Khmers Rouges grâce à leurs éléments
infiltrés qui détenaient plus ou moins le contrôle de ce mouvement politique.
Après avoir appliqué leur projet de « révolution sociale et sociétale » démentiel, les Khmers Rouges
allaient se retrouver dans un engrenage destructeur : affaiblissement militaire et humain par des
attaques frontalières et épuration interne suite aux rumeurs de complots.
A partir de 1977, la confusion règne au sein du mouvement Khmer Rouge. D’une part Pol Pot est
informé d’un imminent complot visant à le renverser, et d’autre part on faisait croire à un autre groupe
de Khmers Rouges, parmi lesquels figuraient Hun Sen, Chea Sim, Heng Samrin et Pen Sovann, qu’ils
allaient être trahis par Pol Pot. Car ce dernier, par peur d’être effectivement renversé, a commencé par
massacrer ses compagnons d’arme.
De ce fait, les stratèges Vietnamiens ont réussi, comme prévu, à créer deux clans visibles au sein du
mouvement des Khmers Rouges. D’un côté, on avait le clan de Pol Pot, mais toujours infiltré d’éléments
Yuons (Nuon Chea par exemple) et de l’autre on avait le groupe de Hun Sen, Chea Sim, etc, enragés
de l’idée de trahison par Pol Pot, qui allait être utilisés par les Vietnamiens comme les valeureux
sauveurs de la Nation Khmère du génocide perpétré par les Khmers Rouges (Pol Pot, Hun Sen, etc).
Mais en fait, ils n’ont fait que servir les intérêts du Vietnam pour envahir le Cambodge. Le plan des
stratèges Vietnamiens a bien fonctionné. La plupart de la population khmère et une partie de l’opinion
internationale ont effectivement perçu l’arrivée des Bo Doi Vietnamiens comme étant celle des
« libérateurs providentiels».
Persuadés qu’ils étaient sauvés de justesse par les Vietnamiens de la trahison de Pol Pot, le clan de
Hun Sen et Chea Sim règne de fait sans partage depuis 1979 au Cambodge tout en se conformant
aveuglément aux diktats de Hanoi sans avoir le moindre souci à l’idée qu’ils puissent être un jour
mis hors de la scène politique, voire même éliminés, par les Vietnamiens une fois que ces
derniers n’auront plus besoin d’eux pour conquérir le Cambodge.
3) Stratégie de duplication et de manipulation
PPC et Opposition Khmère : pour parer aux mécontentements de plus en plus croissants du
peuple Khmer qui vit dans l’extrême pauvreté, le Vietnam semble vouloir mettre en place une stratégie
qui consisterait à « dupliquer » leur pions, et à faire croire à la population Cambodgienne et à la
communauté internationale à un début de dissension au sein du PPC.
En fait, une telle stratégie a déjà été testée avec Pen Sovann. Ce dernier a été attribué d’un rôle de soidisant dissident dès le début des années 80 avec la protestation contre la politique du gouvernement de
l’époque et notamment contre la construction des murs de bambou.
___________________________________________________________________________
© Khmer Diffusion
- Page 3 – 22 Juillet 2004
_____________
Sharing Information & Knowledge for Global Vision and Collective Progress
______________________________________________________________________________________________
Pour cette audace, Pen Sovann a écopé, selon les informations en «libre circulation»,
seulement de quelques années de prison à Hanoi. Alors que d’autres ont été exécutés pour des crimes
encore mineurs.
Il semblerait que l’essence d’une telle stratégie réside dans la volonté de préparer le
prolongement de la vie du PPC sous une autre appellation en attendant la prise en main directe du
Cambodge par les Vietnamiens. « Jouer au jeu d’échec » avec des pions khmers permettrait au
Vietnam d’éviter la confrontation directe comme le cas des Israëliens et Palestiniens et d’éveiller la
conscience nationale khmère.
La stratégie de duplication de leur « bras conquérant » (PPC) permettrait aux Vietnamiens de :
-
voir ceux (au sein du PPC) qui ne leur sont pas fidèles. Ceux qui ne bénéficient pas de rôle
de dissidents et osent rejoindre le soi-disant dissident seront probablement éliminés. La
dissension d’apparence au sein du PPC pourrait être un moyen efficace pour pratiquer une
« purge » vis -à-vis des éléments non fiables.
-
faire croire au peuple Khmer au nationalisme des soi-disants dissidents. De ce fait, ces
derniers pourront réduire le potentiel électoral de l’opposition khmère. Le vote du peuple
sera donc divisé entre la vraie opposition et la fausse opposition. Et la marge de manœuvre
démocratique de la vraie opposition au sein de l’Assemblée Nationale sera de ce fait
réduite.
En guise de conclusion
Au vu de cette analyse, on peut dire que la scène politique Cambodgienne ressemble curieusement à
un théâtre d’ombres où la plupart des acteurs sont des éléments préalablement choisis pour exécuter
des rôles qui ont été formatés à leur mesure. Malgré l’apparition successive de quelques acteurs sur
cette scène, le scénariste reste toujours le même. Quel que soit les tours de magie subtilement
imaginés, il est du devoir de tous les spectateurs, qu’ils soient de gauche ou de droite, de dévisager
l’ombre maléfique afin d’assainir l’ « amphithéâtre » pour réécrire ensemble nos propres scénarii dans
l’intérêt de tous.
___________________________________________________________________________
© Khmer Diffusion
- Page 4 – 22 Juillet 2004