le statut du cachemire
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LE STATUT DU CACHEMIRE Certificat d’études juridiques internationales, 2014/2015 Rapport de recherche Raphaëlle Tulane Source : « Diplomatie. L’Inde et le Pakistan formalisent leur rapprochement », Courrier International relayant The Hindus-Madras, 27 juillet 2011, illustration accessible en ligne sur http://www.courrierinternational.com/sites/ci_master/files/styles/image_original_765/public/assets/ima ges//illustrations/dessin/2003/09/i245005stephff.gif?itok=rmJjAQuO 1 Table des matières Introduction Page 3 I) La détermination du statut du Cachemire, enjeu de l’exercice des souverainetés indienne et pakistanaise Page 8 A) La traduction d’une dispute territoriale par l’absence de définition juridique arrêtée des éléments territoriaux du Cachemire B) La définition du statut du Cachemire à l’origine d’enjeux multiples Page 8 II) La définition du statut du Cachemire au moyen d’un référendum : une solution dépassée Page 15 A) Le soutien de l’ONU à la sécession B) La primauté du principe de souveraineté des États Page 15 Page 19 III) La recherche d’une solution bilatérale : quel statut envisageable pour le Cachemire à l’avenir ? Page 23 A) Le gel de la ligne de démarcation et l’autodétermination interne des régions du Cachemire : une solution au conflit ? B) Une sortie de crise dépendante des relations entre l’Inde et le Pakistan Page 23 Bibliographie Page 30 Annexes Page 35 Page 12 Page 26 2 Introduction Après avoir été successivement contrôlé par les Mongols, les Afghans et les Sikhs, le Cachemire est, dès 1846, placé sous domination britannique. Par le traité d’Amristar, le 16 mars 1846, la direction de l’État princier est confiée à la dynastie des Dogra, hindoue. Au sein du Cachemire, les populations musulmanes ont peu à peu remplacé les bouddhistes et les hindous et sont devenues majoritaires. Le 15 août 1947, l’empire britannique des Indes (ou British Raj) laisse place aux indépendances. Les territoires majoritairement musulmans tendent à rejoindre le Pakistan, tandis que les territoires à population hindoue se tournent vers l’Union indienne. Les États princiers, eux, bénéficient d’un choix plus élargi. Ayant conservé une certaine autonomie du temps de l’empire britannique, ils peuvent choisir leur rattachement à l’un ou l’autre État, ou se déclarer indépendant. Trois États princiers envisagent alors leur indépendance. Il s’agit du Jūnāgadh, de l’Hyderabad, et du Cachemire. Au moyen d’un référendum, les populations des deux premiers États princiers choisissent un rattachement à l’Union indienne. Celle du Cachemire, elle, est divisée : le mouvement de la Conférence musulmane, majoritaire au sein de la population, se prononce en faveur d’une intégration au Pakistan, tandis que celui de la Conférence nationale préfère se tourner vers l’Inde. Le maharadjah Hari Singh, hindou, se montre hésitant. Face à cette indécision, le Pakistan décide de couper les voies de communication qui relient l’État princier à l’Inde (et qui, alors, passaient par Lahore). Il soutient l’offensive des forces armées musulmanes, qui venues du Pakistan, envahissent le Cachemire le 22 octobre 1947. Alors que celles-ci approchent de Srinagar, le maharadjah demande un soutien militaire au premier ministre indien Nehru. Celui-ci accepte de lui apporter une aide pour faire reculer les groupes armés, mais exige en retour de la part du souverain qu’il accepte l’intégration du Cachemire à l’Inde, et la formation d’un gouvernement avec le leader du mouvement de la Conférence nationale, Cheikh Abdhullah. Toutefois, une lettre signée par le premier ministre et par le vice-roi des Indes, Lord 3 Mountbatten, prévoit que le rattachement sera confirmé par une consultation populaire. Nehru se tourne également vers l’Organisation des Nations Unies pour faire reconnaître l’attaque pakistanaise et obtenir sa condamnation. Après avoir ordonné la création de la Commission des Nations Unies pour l’Inde et le Pakistan (Résolution 39 du Conseil de sécurité du 20 janvier 19481), l’Organisation des Nations Unies se prononce pour la première fois sur le conflit indo-pakistanais par la Résolution 47 émise par le Conseil de sécurité le 21 avril 19482. Celle-ci, qui se contente de prévoir l’organisation d’un référendum pour décider de l’avenir du Cachemire, est dénoncée par l’Inde, qui y voit un alignement de la position de l’ONU sur celle du Pakistan, pourtant à l’origine de l’agression armée qui a déclenché la première guerre indo-pakistanaise. Le 1er janvier 1949, les Nations Unies interviennent à nouveau pour le tracé d’une ligne de cessez-le-feu3. Celle-ci donne lieu à un partage des territoires fondé sur les conquêtes armées de l’Inde et du Pakistan. L’Inde obtient, au sud de la ligne de cessez-le-feu, le Jammu-etCachemire, qui couvre les deux tiers de l’ancien État princier, et qui devient un État fédéré. Le Pakistan, pour sa part, hérite de l’Azad Jammu-et-Cachemire, et des Territoires du Nord. Dès le 24 janvier 1949, l’Organisation des Nations Unies déploie le Groupe d’observateurs militaires des Nations Unies dans l’Inde et le Pakistan (UNMOGIC) pour veiller au respect du cessez-le-feu4. Alors que se dessine le contexte de guerre froide, le conflit du Cachemire cesse d’être strictement territorial et devient structurant sur le plan géopolitique. Au cours des années 1950, le Pakistan devient un point d’appui du camp occidental en Asie, et s’inscrit dans le cadre du « cordon sanitaire » développé autour du bloc communiste. Il adhère ainsi à l’Organisation du traité de l’Asie du 1 Conseil de sécurité, Résolution 29, 20 janvier 1948, accessible en ligne sur Conseil de sécurité, Résolution 47, 21 avril 1948, accessible en ligne sur http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=S/RES/47(1948)&Lang=E&style=B 3 Agreement Between Military Rrepresentatives Of India And Pakistan Regarding the Establishment of a Cease-Fire Line in the State of Jammu and Kashmir (Karachi Agreeement), 29 juillet 1949, accessible en ligne sur http://peacemaker.un.org/sites/peacemaker.un.org/files/IN%20PK_490729_%20Karachi%20Agree ment.pdf 4 Historique de l’UNMOGIP, accessible en ligne sur http://www.un.org/fr/peacekeeping/missions/unmogip/background.shtml 2 4 Sud-Est par la signature du Pacte de Manille en 1954, qui répond à une volonté américaine de limitation de l’influence chinoise dans la région, et signe en 1955 le Pacte de Bagdad, lequel institue l’Organisation du traité central (CENTO), qui tend à limiter la progression de l’URSS au Moyen-Orient et en Asie centrale. Nehru, quant à lui, prône le non-alignement. Dans les années 1960 et 1970, l’Union indienne entreprend toutefois un rapprochement avec l’Union soviétique. Elle redoute le développement d’un axe de solidarité incluant le Pakistan, les Etats-Unis et la Chine, la plaçant dans une situation de faiblesse. En 1962, la défaite de l’Inde face à la Chine donne lieu à l’introduction d’un nouvel acteur dans le conflit du Cachemire. Disputant de nombreuses frontières de l’Inde héritées de 1947, la Chine occupe, en particulier, l’Aksai Chin. L’année suivante, elle conclut avec le Pakistan un accord qui prévoit un échange de territoires, et acquiert ainsi une portion supplémentaire de terre, d’une superficie d’environ 5 000 km2, dans la région de Karakorum. En 1965, la mort de Nehru apparaît, aux yeux des autorités pakistanaises, comme l’occasion de récupérer une partie des territoires contestés. L’armée pakistanaise envahit le Jammu-et-Cachemire et tente de l’arracher au contrôle indien. Mais la réponse de Lal Bahadur Shastri, qui a succédé à Nehru, et le soutien apporté par Moscou à l’armée indienne, conduisent à une défaite rapide du Pakistan. La deuxième guerre indo-pakistanaise se conclut par une médiation soviétique organisée à Douchambé, au Tadjikistan. La médiation aboutit au rétablissement de la situation antérieure de partage des territoires entre les deux pays. La troisième guerre indo-pakistanaise se tient en 1971. Alors que les Bengalis se mobilisent pour obtenir leur indépendance, l’Inde entreprend de les soutenir, et intervient militairement à leurs côtés. La fin de la guerre, outre la création de l’État du Bangladesh, donne lieu à la redéfinition de la ligne de partage du Cachemire entre l’Inde et le Pakistan. L’accord de Silma, en 1972, conduit au transfert de Kargil en territoire indien et à la reconnaissance de la ligne de cessez-le feu (désormais appelée « Ligne de contrôle » ou « Loc ») par les deux 5 protagonistes. Il prévoit par ailleurs que tout règlement ultérieur de la question du Cachemire se fera sur la base de négociations bilatérales5. Dans les années 1990, les sources de tensions entre l’Inde et le Pakistan se modifient. D’une part, le retrait des troupes soviétiques d’Afghanistan à la fin de la guerre froide a coïncidé avec une forte reprise de l’insurrection issue de groupements indépendantistes au Cachemire. D’autre part, les essais nucléaires pratiqués en 1998 par l’Inde puis le Pakistan, et le développement des technologies nucléaires, ont contribué à un accroissement des tensions entre les deux pays. En 1999, l’entrée de ressortissants pakistanais en territoire indien, autour des villes de Kargil et de Drass, où la répartition des terres est difficilement discernable, donne lieu à une réponse armée de la part de l’Inde. Les affrontements conduisent à la mort de plusieurs milliers de rebelles au cours de l’année 1999. En 2008, le nombre de décès liés aux affrontements depuis 1989 est estimé à 47 0006. Ainsi, Bill Clinton, en 2000, désigne la vallée du Cachemire comme « the most dangerous place on earth »7. Suite aux attentats de 2001, l’attention portée par la communauté internationale à la menace terroriste a mis en évidence le caractère de sanctuaire du Cachemire. Dans une région instable, et au cœur de revendications religieuses, le Cachemire est devenu, après l’intervention américaine en Afghanistan, un « haut lieu du djihad »8. La question du Cachemire, qui se limite en apparence à des revendications concrètes de répartition des territoires, cristallise en réalité de nombreux enjeux pour l’Inde et le Pakistan. L’affrontement sur la délimitation des territoires soulève les questions de la sécurité des États, de leur approvisionnement en ressources naturelles, ou encore de l’affirmation d’une identité nationale. Ainsi le statut du Cachemire témoigne-t-il de l’enjeu que représente la délimitation 5 Agreement Between the Government of India and the Government of the Islamic Republic of Pakistan on Bilateral Relations (Simla Agreement), 07-02-1972, Ministry of External Affairs, accessible en ligne sur http://mea.gov.in/bilateral-documents.htm?dtl/5541/Simla+Agreement 6 Reuters, « India Revises Kashmir Death Toll to 47,000 », Srinagar, 21 novembre 2008, accessible en ligne sur www.in.reuters.com/article/2008/11/21/idINIndia-36624520081121 7 Pankaj mishra, « A Jihad Grows in Kashmir », The New York Times, 26 août 2008, accessible en ligne sur www.nytimes.com/2008/08/27/opinion/27mishra.html 8 JAFFRELOT Christophe et ZÉRININI-BROTEL Jasmine, « La question du Cachemire. Après le 11 septembre et la nouvelle donne au Jammu et Cachemire », Occasional Papers, n°43, Mars 2003 6 territoriale pour l’exercice de la souveraineté et la stabilité étatique comme régionale. Alors que le conflit au Cachemire est, ainsi que le rappelle régulièrement l’Organisation des Nations Unies, le plus long conflit que le monde contemporain ait eu à connaître, on peut tenter d’identifier les différents paramètres relatifs au statut du Cachemire qui aujourd’hui opposent l’Inde et le Pakistan, et questionner les différentes options juridiques de règlement du conflit, du moins sur le plan territorial. Quelles sont les différentes problématiques soulevées par la définition du statut juridique du Cachemire ? Le règlement du différend territorial passe-t-il par l’octroi d’un statut spécifique au Cachemire ou à ses régions ? Le différend opposant l’Inde et le Pakistan s’agissant de la qualification juridique des composants territoriaux du Cachemire traduit l’enjeu que cela représente pour les deux pays s’agissant de l’exercice de leur souveraineté et de leurs intérêts politiques (I). La solution passant par l’organisation d’une consultation et le respect de la volonté des population cachemiries, longtemps préférée, semble désormais dépassée (II). Aujourd’hui, la question du Cachemire dépend principalement de l’acceptation par l’Inde et le Pakistan de la situation factuelle et de leur capacité à s’accorder sur des procédures amiables (III). 7 I) La détermination du statut du Cachemire, enjeu de l’exercice des souverainetés indienne et pakistanaise Le statut de l’ancien État princier du Cachemire est discuté par l’Inde et le Pakistan, et ne bénéficie pas d’une reconnaissance au niveau international (A). Cette mésentente témoigne de l’importance des conséquences juridiques attachées à ces qualifications au regard des intérêts politiques des deux pays (B). A) La traduction d’une dispute territoriale par l’absence de définition juridique arrêtée des éléments territoriaux du Cachemire Plusieurs éléments territoriaux sont aujourd’hui en cause dans le différend qui oppose l’Inde au Pakistan s’agissant de la définition du statut du Cachemire. Ces divergences apparaissent nettement dans l’étude des déclarations et des productions cartographiques émises par l’Inde et le Pakistan (voire annexe 2)9. Les frontières extérieures du Cachemire actuel, maintenues après la disparition de l’État princier, ne sont pas sources de différend pour l’Inde et le Pakistan : il est entouré par les monts Kunlun au Nord, le Pamir et l’Hindu Kush à l’Ouest, et au Sud par la plaine du Pendjab. Dans l’identification du statut du Cachemire, la qualification de la ligne de cessez-le-feu, distinguant les territoires de facto indiens et pakistanais, est centrale. Celle-ci, dessinée en 1949 sous l’égide de l’ONU, puis légèrement modifiée en 1972 dans le cadre des accords de Simla, n’était alors qu’une ligne de démarcation virtuelle, correspondant aux territoires acquis lors des combats. Suite aux offensives djihadistes menées à partir du début des années 1990, l’Inde décide de la création d’une barrière physique et militarisée. Construite en 2002 et 2003 le long de la « LoC », la barrière, longue de 550 km, est composée de barbelés ainsi que de dispositifs de détection au moyen de radars et de capteurs thermiques. Elle a donné 9 REKACEWICZ Philippe « Le Cachemire, un casse-tête cartographique », Le Monde Diplomatique, blog, 6 février 2012, accessible en ligne sur http://blog.mondediplo.net/2012-02-09-Le-Cachemire-uncasse-tete-cartographique 8 lieu au déploiement de 30 000 soldats pakistanais dans l’Azad-Cachemire, et de 450 000 soldats indiens au Jammu-et-Cachemire10. Le premier objectif de la barrière est le contrôle des infiltrations terroristes en territoire indien. L’armée indienne juge que si elle n’a pas permis de stopper l’intégralité des passages, la barrière a conduit à une nette réduction des franchissements illégaux de la ligne de cessez-le-feu (-80%)11. La construction de cette barrière, en plus d’un objectif de sécurité, remplit également une autre fonction : elle confère à la « LoC » un caractère permanent. L’Inde, ainsi, cherche à transformer de facto la ligne de cessez-le-feu en frontière. Si aujourd’hui cette position n’est plus formellement rejetée par le Pakistan, elle soulève chez les cachemiris une forte opposition. En effet, elle contrevient aux termes de la solution proposée par l’ONU dans la Résolution 47 du Conseil de sécurité12, qui donnait à la situation factuelle un caractère provisoire et préconisait la tenue d’une consultation populaire. Enfin, on assiste, depuis le début des années 2000, à un assouplissement des conditions de franchissement de la frontière. La création de la barrière s’inscrit, pour l’Inde, dans le projet de création d’une « soft border », plus ouverte aux échanges13. Cette idée était notamment soutenue par le Général pakistanais Musharraf, arrivé au pouvoir en 1999, qui a proposé au début des années 2000 un plan en quatre points recoupant cette idée d’ouverture accrue de la ligne de cessez-le-feu. Ainsi les cachemiris sont-ils, de manière croissante, habilités à franchir la ligne pour rejoindre leurs familles. Les marchandises circulent elles aussi de plus en plus librement. Le 7 avril 2005, pour la première fois, une ligne de bus est créée entre Muzaffarabad et Srinagar, c’est-à-dire entre les zones pakistanaise et indienne du Cachemire14. Ainsi il semble que la ligne de cessez-le-feu prenne, de plus en plus, les aspects d’une frontière : délimitée spatialement, elle est le lieu d’échanges humains et 10 NOVOSSELOFF Alexandra, Des murs entre les hommes, Paris, La Documentation française, 2007, 211 p., pp. 159-173 11 GAYER Laurent, Asie du Sud : Fondamentalisme, séparatisme, maoïsme, Michalon, coll. Mondes rebelles, 2009, 187 p., pp. 81-100 12 Conseil de sécurité, Résolution 47, 21 avril 1948, op. cit. p. 4 13 PURI Luv, « Towards a Softer Border », Economic and Political Weekly, Vol. 38, No. 22 (May 31 Jun. 6, 2003), pp. 2116-2117, accessible en ligne sur www.jstor.org.janus.biu.sorbonne.fr/stable/4413613 14 CALLE Marie-France, « Caravane de la paix entre l’Inde et le Pakistan », Le Figaro, vendredi 8 avril 2005, p. 8, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Search/Result/Result.aspx 9 commerciaux. Le 17 avril 2005, le Général Musharraf a déclaré, au terme d’un match de cricket opposant les équipes nationales, que « L’importance des frontières doit disparaître »15. Toutefois, indépendamment de cette situation factuelle, la « LoC » ne jouit pas du statut juridique de frontière internationale. Le différend territorial relatif au Cachemire oppose par ailleurs l’Inde et le Pakistan s’agissant de la qualification des territoires dont elles disposent et qu’elles revendiquent. La position des Nations Unies, dans un souci de neutralité, ne reconnaît aucun titre de souveraineté sur le Cachemire. Elle emploie les termes de « régions administrées » s’agissant des régions sous contrôle du Pakistan ou de l’Inde. L’administration désigne l’exercice de prérogatives de puissance publique sur un territoire en l’absence de souveraineté territoriale. Le terme d’ « administration » renvoie donc à une situation factuelle qui n’emporte pas application d’un régime juridique16. L’Union européenne, elle emploie le terme d’ « occupation » pour parler de la présence indienne comme pakistanaise au Cachemire17. Ainsi, elle considère comme illégale car contrevenant à la souveraineté d’un État la configuration actuelle. Implicitement, le Parlement européen reconnaît l’existence d’un État indépendant du Cachemire, ou du moins sa pertinence théorique. Cette qualification va dans le sens d’une prise de position plus générale de l’Union européenne pour la création d’un État indépendant cachemiri. L’Inde, et le Pakistan revendiquent leur souveraineté sur l’ensemble du Cachemire. Les zones qu’elles contrôlent effectivement sont assimilées au reste de 15 CHIPAUX Françoise, « Le processus de paix entre l'Inde et le Pakistan est qualifié d'« irréversible » par leurs dirigeants », Le Monde, International, mardi 19 avril 2005, p. 3, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Document/DocumentPDF.aspx?Doc Name=news·20050419·LM·0q1904_1054333&PageIndex=0 16 KOHEN Marcelo G., Possession contestée et souveraineté territoriale, PUF, coll. Publications de l’Institut universitaire des hautes études internationales de Genève, 1997, 608 p., pp. 79-82, cité dans KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, vol. 53, n° 2, 2012, p. 383-416, doi: 10.7202/1009446ar , accessible en ligne sur http://id.erudit.org/iderudit/1009446ar 17 « (...) la ligne de contrôle qui sépare les zones du Cachemire occupées respectivement par le Pakistan et l'Inde (...) », Résolution du Parlement européen du 12 mars 2014 sur le rôle régional du Pakistan et les relations politiques de ce pays avec l'Union européenne (2013/2168(INI)), 12 mars 2014, accessible en ligne sur http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=//EP//TEXT+TA+P7-TA-2014-0208+0+DOC+XML+V0//FR 10 leur territoire, tandis que les zones contrôlées par l’autre pays sont considérées comme occupées. Cette fois, l’ingérence, constituée par la présence de l’occupant, ne heurte par la souveraineté du Cachemire, mais bien celle de l’Inde ou du Pakistan. Engin, les régions contrôlées par la Chine, à savoir l’Aksaï Chin et le Ladakh, sont revendiquées par l’Inde, qui les considère comme des territoires occupés, tandis que le Pakistan, qui a accepté cette situation, les intègre officiellement au territoire chinois. Le partage du glacier de Siachen constitue également un point de friction qui cristallise le différend indo-pakistanais s’agissant du statut du Cachemire. Long de 78km, culminant à 5 753 mètres d’altitude, le glacier est, depuis 1984, contrôlé à 80% par l’Inde. En raison de son caractère inaccessible et inhospitalier, et de l’absence de troupes déployées sur le glacier lors de la première guerre indopakistanaise, le tracé de la ligne de cessez-le-feu s’arrête au commencement du glacier, à un point géographique qui porte le nom de « NJ9842 » 18 . Dans les représentations indiennes et pakistanaises, le glacier est inséré dans les régions contrôlées par le pays à l’origine de la carte. Au niveau international, le glacier n’est pas considéré comme « administré » ou « occupé » par une partie : il ne fait l’objet d’aucune qualification juridique, si ce n’est de celle de « no man’s land ». La qualification en termes juridiques de la « LoC », des régions contrôlées par l’Inde ou le Pakistan, ainsi que du glacier de Siachen, témoigne du caractère subjectif du droit international : les termes employés renvoient à une réalité telle qu’elle est perçue par un État, et non à une situation objective. Ainsi, le contentieux territorial relatif au Cachemire se manifeste par l’absence de définition, ou l’existence de définitions controversées, s’agissant des éléments géographiques qui composent l’ancien État princier. Cela témoigne des enjeux liés à l’apport de telles qualifications juridiques pour l’Inde et le Pakistan. 18 BHOLA P. L., « Indo-Pakistan control march over Siachen glacier », Indian Journal of Asian Affairs, Vol. 1, No. 1 (SUMMER 1988), pp. 28-48, accessible en ligne sur www.jstor.org.janus.biu.sorbonne.fr/stable/41950323 11 B) La définition du statut du Cachemire à l’origine d’enjeux multiples L’attribution d’une qualification juridique aux composantes territoriales du Cachemire représente un enjeu fondamental pour l’Inde et le Pakistan, du point de vue de la défense de leurs intérêts nationaux, ainsi que de leur identité nationale. Pour l’Inde, la définition d’un statut juridique du Cachemire, et en particulier la reconnaissance d’un statut de frontière internationale à la ligne de cessez-le-feu issue de l’accord de Simla, lui permettra d’exercer un contrôle accru sur ses territoires, et de lutter plus efficacement contre les menaces terroristes qui pèsent sur elle, et contre les trafics de drogue. En effet, l’une des principales accusations indiennes envers le Pakistan est de permettre l’établissement de bases terroristes à l’origine d’attaques récurrentes sur son territoire. L’armée pakistanaise, en particulier, est accusée de tolérer, si ce n’est d’encourager, le développement d’activités terroristes, tandis que le système judiciaire est dénoncé pour son laxisme à l’égard des auteurs d’attentats survenus en Inde. La reconnaissance par le gouvernement pakistanais du soutien apporté par certains de ses instructeurs aux groupements terroristes19, en 2009, n’a pas permis de réduire la méfiance indienne. Pour le Pakistan comme pour l’Inde, la définition d’un statut juridique pour le glacier de Siachen constitue un enjeu majeur. Il représente en effet une réserve d’eau considérable, et d’autant plus estimable que le développement économique des deux pays a considérablement accru leurs besoins en eau. Le partage des réserves en eau a déjà fait l’objet d’un règlement partiel : dans un traité bilatéral du 19 novembre 1960, l’Inde et le Pakistan se sont accordés sur le partage des eaux de l’Indus. Toutefois, c’est encore l’un des points de friction qui fait naître chez les deux pays des tensions importantes. Ainsi, récemment, le Pakistan a saisi la Cour permanente d’arbitrage du fait de la construction par l’Inde du projet hydro-électrique de Kishenganga, et de sa 19 GARAUDE Pauline, « Islamabad reconnaît la piste pakistanaise », Sud Ouest, 16 février 2009, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Search/Result/Result.aspx 12 crainte de réduction de son débit d’eau20. Aujourd’hui, c’est la construction du barrage indien de Wulla qui oppose les deux États. Mais surtout, la répartition des territoires du Cachemire constitue pour l’Inde et le Pakistan un enjeu relatif à la définition de leur identité nationale. Le Pakistan, d’une part, a construit son identité sur sa vocation à réunir en son sein tous les musulmans issus de la partition de l’empire des Indes britanniques. Or, à l’intérieur de la partie du Cachemire contrôlée par l’Inde, la vallée de Srinagar, qui réunit 5/6ème de la population cachemirie placée sous contrôle indien, est à 90% musulmane21. Il semblerait même que la lettre K de « Pakistan » fasse explicitement référence au Kashmir, rappelant ainsi que l’État ne sera jamais entièrement constitué en l’absence d’un rattachement territorial du Jammu-et-Cachemire. L’Inde, d’autre part, revendique son caractère laïc, inscrit dans sa Constitution de 195022. Dès lors, la présence d’une population à majorité musulmane ne justifie pas son détachement de l’autorité indienne, qui s’est construite sur la notion de diversité. En outre, les autorités indiennes font valoir que les musulmans ne bénéficient pas d’un traitement moins favorable que les ressortissants de confession différente 23 . Toutefois, s’agissant du rattachement des anciens États princiers de Jūnāgadh et d’Hyderabad, l’Inde a utilisé l’argument de la prévalence d’hindous (qui représentaient 80% de la population du Jūnāgadh et 85% de celle de l’Hyderabad) pour obtenir le rattachement des territoires à l’Union indienne. Ainsi, le Cachemire, pourtant situé dans une région difficile d’accès et peu habitable, constitue un enjeu central qui, pour le Pakistan comme l’Inde, dépasse la 20 Cour permanente d’arbitrage, Arbitrage des Eaux de l’Indus Kishenganga (Pakistan c. Inde), sentence du 20 décembre 2013, sentence accessible en ligne sur http://www.pcacpa.org/showfile.asp?fil_id=247 21 « Forces armées à la suite d'une mission effectuée du 3 au 10 mars 2002 en Inde et au Pakistan », Rapport d'information n° 336 (2001-2002) de M. André DULAIT, Mme Danielle BIDARD-REYDET, MM. André BOYER, Serge VINÇON, Jacques BLANC et Jean-Pierre PLANCADE, fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 24 juin 2002, accessible en ligne sur http://www.senat.fr/rap/r01-336/r01-336_mono.html 22 « We, the people of India, having solennly resolved to constitue India into a sovereign socialist secular democratic republic and to a secure to all its citizen », Préambule de la Constitution indienne du 26 janvier 1950, accessible en ligne sur http://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/en/in/in023en.pdf 23 Ibid. 13 simple ambition territoriale et impacte directement l’exercice de leur souveraineté, leur développement économique, et leur crédibilité du point de vue de leur identité. 14 II) La définition du statut du Cachemire au moyen d’un référendum : une solution dépassée Saisie par l’Inde de la question du Cachemire dès 1947, l’ONU a longtemps mis en avant l’idée d’un règlement du différend en fonction de la volonté des populations du Cachemire (A). Depuis cette date, sa position a évolué, prenant en compte l’évolution du droit ainsi que des circonstances (B). A) Le soutien de l’ONU à la sécession Introduit parmi les buts de l’ONU, cité à l’article 1 de la Charte des Nations Unies, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes a été reconnu comme droit fondamental de l’homme24. Il s’est vu reconnaître une portée universelle dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques25, ainsi que dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels 26 . La Cour Internationale de Justice a reconnu son opposabilité erga omnes en 1995, dans l’Affaire relative au Timor oriental27. Peu répandue au cours de la décolonisation, la pratique des référendums s’est développée à la fin des années 1980, lorsque se sont multipliées les volontés indépendantistes au sein de URSS. Dans l’avis consultatif rendu en 1975 au sujet du Sahara occidental, la Cour Internationale de Justice a reconnu la pertinence du 24 « Développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité́ de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, et prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix du monde », article 1, Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, accessible en ligne sur http://www.un.org/fr/documents/charter/pdf/charter.pdf 25 « Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel », article 1, Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté le 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976, accessible en ligne sur http://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/CCPR.aspx 26 « Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel », article 1, Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté le 16 décembre 1966, entré en vigueur le 3 janvier 1976, accessible en ligne sur http://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/CESCR.aspx 27 Cour Internationale de Justice, Affaire relative au Timor oriental (Portugal c. Australie), arrêt du 30 juin 1995, C.I.J. Recueil 1995, p. 102, accessible en ligne sur http://www.icjcij.org/docket/files/84/6949.pdf 15 recours au référendum pour appliquer le principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Toutefois, « La validité du principe d’autodétermination (...) n’est pas diminuée par le fait que dans certains cas l’Assemblée générale n’a pas cru devoir exiger la consultation des habitants de tel ou tel territoire ». Le référendum n’est donc qu’une modalité facultative28. L’ONU, dès 1948, s’est prononcée en faveur de l’organisation d’un référendum pour décider du rattachement à l’Inde ou au Pakistan du Cachemire29. Plus particulièrement, elle vise la partie indienne du Cachemire, à savoir le Jammu-et-Cachemire, qui fait naître les plus fortes contestations. Entre le 21 avril 1948 et le 2 décembre 1957, le Conseil de sécurité des Nations Unies à voté onze résolutions dans lesquelles il appelle à la tenue d’une consultation populaire. Toutefois, au cours des années 1950, le Conseil de sécurité s’éloigne de l’objectif d’un rattachement à l’un des deux pays, n’évoquant plus que la « volonté des populations », ouvrant la voie à une indépendance du Cachemire. En 1960, l’Assemblée Générale des Nations Unies adopte la Résolution 1541, qui prévoit les modalités d’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Selon cette dernière, il peut s’agir de la création d’un État indépendant, d’une libre association à un État indépendant, ou encore d’une intégration volontaire à un État indépendant30. En 1970, l’Assemblée Générale des Nations Unies confirme que le droit d’un peuple à disposer de lui-même peut donner lieu à la création d’un État souverain et indépendant 31 . L’initiative onusienne correspond au contenu de l’engagement du premier ministre Nehru, dans une lettre signée en parallèle de 28 Cour Internationale de Justice, Sahara occidental, avis consultatif en 16 octobre 1975, accessible en ligne sur http://www.icjcij.org/docket/index.php?sum=323&p1=3&p2=4&case=61&p3=5&lang=fr 29 Conseil de sécurité, Résolution 47, 21 avril 1948, op. cit. p. 4 30 Assemblée Générale des Nations Unies, Résolution 1541 (XV), 14 décembre 1960, Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, accessible en ligne sur http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/RES/1514(XV) 31 Assemblée Générale des Nations Unies, Résolution 2625 (XXV), 24 octobre 1970, Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies, accessible en ligne sur http://www.un.org/french/documents/view_doc.asp?symbol=A/RES/2625(XXV)&Lang=F 16 l’accord prévoyant le rattachement de la région du Jammu-et-Cachemire à l’Inde lors de la partition des Indes en 194732. On peut alors se demander si le peuple cachemiri constitue un peuple au sens du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. La notion de peuple en ellemême ne semble pas disposer d’une définition établie. Elle ne peut vraisemblablement pas se réduire à l’appartenance à une même minorité, qu’elle soit ethnique, religieuse ou linguistique. Selon Hector Gros Espiell, la notion de peuple peut être entendue comme « Toute forme particulière de communauté humaine unie par la conscience et la volonté de constituer une entité capable d’agir en vue d’un avenir commun »33. La notion de peuple semble alors se rapprocher de celle de nation. Pour Ernest Renant, une nation se définit par « Le consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie commune. L’existence d’une nation est [...] un plébiscite de tous les jours »34. On peut alors identifier un critère objectif, à savoir la présence sur un territoire déterminé, et un critère subjectif, constitué par la volonté de vivre ensemble au sein d’une entité indépendante. Le critère de l’assise territoriale ne pose pas de difficulté dans la mesure où celle-ci correspond aux frontières de l’ancien État princier, issues du traité d’Amristar de 1846. L’existence d’une volonté globale de la population cachemirie à se déclarer indépendante et à vivre ensemble est plus incertaine. En effet, les relations entre les différentes communautés se sont dégradées, en particulier depuis le développement des mouvements intégristes musulmans dans la région. Ainsi, on estime qu’environ 100 000 hindous ont quitté les terres cachemiries depuis 1989. De plus, les revendications indépendantistes sont largement concentrées dans la vallée de Srinagar qui, peuplée de 1,3 million d’habitants, à 95% musulmane, n’est pas représentative de l’ensemble du Cachemire. Cependant, on peut estimer que la population du Cachemire constitue 32 « Reply from Lord Mountbatten to Maharajah Sir Hari Singh Dated 27 October 1947 », Legal Document no 115, accessible en ligne sur www.kashmir-information.com/historicaldocuments/115.html 33 GROS ESPIELL Hector, Le droit à l’autodétermination: application des résolutions de l’Organisation des Nations Unies, New York, Nations Unies, 1979, cité dans KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, op. cit. p. 10 34 RENAN Ernest, « Qu’est-ce qu’une nation ? », Conférence prononcée le 11 mars 1882 à la Sorbonne, accessible en ligne sur www.classiques.uqac.ca/classiques/renan_ernest/qu_est_ce_ une_nation/renan_quest_ce_une_nation.pdf 17 un peuple par le simple fait qu’elle a, pendant un siècle, vécu comme population d’un État princier fortement autonome. Par ailleurs, on peut se demander si le droit des peuples à disposer d’euxmêmes, développé dans le cadre de la décolonisation, peut s’appliquer au cas du Cachemire. La Résolution 1541 (XV) prévoit que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes s’applique en présence d’un « territoire géographiquement séparé et ethniquement ou culturellement distinct du pays qui l’administre ». On distingue donc le critère de séparation géographique, et celui de l’état de subordination. Selon Théodore Christakis, le critère de séparation géographique est rempli « là où la domination d’un peuple traverse les mers et les océans (...) mais non là où elle en traverse que de l’eau douce » : on parle de test de l’ « eau salée »35. La région indienne du Jammu-et-Cachemire ne remplit pas ce premier critère. S’agissant de celui relatif à l’existence d’un lien de subordination, l’existence d’un statut spécifique au Jammu-et-Cachemire par la Constitution indienne, à son article 370, semble écarter lui aussi l’application du droit consacré par la Résolution 1541. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, consacré dans un contexte de décolonisation, ne s’applique pas aisément au Jammu-et-Cachemire. Toutefois, en dépit de ces difficultés théoriques, on peut considérer que la reconnaissance par l’ONU de la légitimité des revendications indépendantistes permet de considérer que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est applicable au Cachemire. Ainsi, dès l’apparition du conflit, l’ONU est prononcée en faveur d’une libre-détermination des populations cachemiries, malgré des difficultés théoriques d’application du droit à la sécession issu du droit des peuples à disposer d’euxmêmes. Mais depuis plus d’un demi-siècle, le changement de contexte international et la réaffirmation de la primauté du principe d’intégrité territoriale des États semblent avoir définitivement fermé toute possibilité d’application de cette solution. 35 CHRISTAKIS Théodore, Le droit à l’autodétermination en dehors des situations de décolonisation, Paris, La Documentation française, 1999, cité dans KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, op. cit. p. 10 18 B) La primauté du principe de souveraineté des États La notion de droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, après les années 1970, a fait naître des réticences croissantes au sein de la communauté internationale. Le droit et le contexte évoluant, la situation du Cachemire doit « être examiné[e] à la lumière des règles de droit qui lui sont contemporaines, telles qu’on les comprend à ce moment-là »36. Dans un avis consultatif rendu le 21 juin 1971, la Cour Internationale de Justice a également indiqué que : « Tout instrument international doit être interprété et appliqué dans le cadre de l’ensemble du système juridique en vigueur au moment où l’interprétation a lieu »37. Or, il semble que, passée la période de décolonisation, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est devenu secondaire au regard du principe d’intégrité territoriale. La perte de vitesse de la notion de droit des peuples à disposer d’eux-mêmes face à celle d’intégrité territoriale a donné lieu à une réduction de son champ d’application par l’ONU. Dans la résolution 2625, l’Assemblée Générale a indiqué que la consécration du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes « ne sera interprété comme autorisant ou encourageant une action (...) qui démembrerait ou menacerait, totalement ou partiellement, l’intégrité territoriale ou l’unité politique d’un État »38. Cette tendance s’est ensuite confirmée dans les décennies suivantes. Désormais, « Des deux principes fondamentaux du droit international général, le principe de l’égalité souveraine des États et le principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, le principe de l’égalité 36 RUCZ Claude, «L’application par le juge du principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », dans Philippe WECKEL (dir.), Le juge international et l’aménagement de l’espace : la spécificité du contentieux territorial, Paris, Éditions A. Pedone, 1998, cité dans KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, op. cit. p. 10 37 Cour Internationale de Justice, Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif, 21 juin 1971, accessible en ligne sur http://www.icjcij.org/docket/files/53/5594.pdf 38 Assemblée Générale des Nations Unies, Résolution 2625 (XXV), 24 octobre 1970, Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies, op. cit. p.16 19 souveraine des États nous semble se situer au sommet de la hiérarchie des normes du droit international »39. Ainsi, en dépit des appels formulés par le Conseil de sécurité en 1948 et dans les premières années du conflit, l’application du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes tel qu’il a été défini lors de la décolonisation ne semble pas pouvoir s’appliquer au Cachemire. On peut enfin questionner, dans la perspective d’une sécession partielle ou totale du Cachemire, l’applicabilité de la théorie de la sécession remède. La théorie de la sécession remède a été introduite par la Résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970 portant sur les relations amicales entre les États. Celle-ci prévoit que « les États doivent respecter les conditions de représentativité de l’ « ensemble du peuple » (...) sans distinction de race, de croyance ou de couleur »40. Cette formule a été interprétée par le groupe de travail des Nations Unies sur le projet de déclaration sur le droit des populations autochtones comme rendant possible une sécession en dehors de toute situation de colonisation. Cette sécession est alors envisageable lorsqu’une minorité fait l’objet de violations massives des droits de l’homme41. Dans le cas du Cachemire, les violations des droits de l’homme des cachemiris par l’Inde sont fréquemment dénoncées42. En particulier, il semble que les exactions les plus graves se produisent dans le cadre des opérations indiennes de maintien de l’ordre. Toutefois, il semble qu’une proportion importante des 39 TOURET Denis, « Le principe de l’égalité souveraine des États, fondement du droit international», Revue Générale de Droit International Public, 1973, cité dans KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, op. cit. p. 10 40 Assemblée Générale des Nations Unies, Résolution 2625 (XXV), 24 octobre 1970, Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies, op. cit. p.16 41 « Dès lors qu’un État indépendant a été créé et reconnu, les peuples qui le constituent doivent essayer d’exprimer leurs aspirations par l’intermédiaire du système politique national et non en créant de nouveaux États, sauf si le système politique national devenait si exclusif et si peu démocratique qu’on ne pourrait plus le considérer comme «représentant l’ensemble du peuple», Discrimination à l’encontre des peuples autochtones, Note explicative concernant le projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones, cité dans KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, op. cit. p. 10 42 Annual Report : India 2013, Amnesty International, 23 mai 2013, accessible en ligne sur http://www.amnestyusa.org/research/reports/annual-report-india-2013?page=show 20 violences dont sont victimes les cachemiris provienne des entités séparatistes elles-mêmes. De plus, le principe de sécession-remède est peu reconnu par la doctrine, qui globalement n’admet que la décolonisation comme mode de sécession conforme au droit international : « Dans le droit international actuel, le seul type de sécession qui reste autorisé, c’est la décolonisation. Or, on peut considérer que le mouvement de décolonisation touche très largement à sa fin, et que, par conséquent, toutes les sécessions qui seraient en mouvement ou qui pourraient apparaître dans le futur, seraient considérées comme contraires au principe de l’intégrité territoriale des États »43. Ainsi, il semble que la sécession du Jammu-et-Cachemire ne puisse être envisagée dans la mesure où l’on ne peut pas qualifier la situation rencontrée de colonisation, et que la théorie de la sécession ne semble pas par ailleurs constituer une alternative sérieuse. Ainsi, en dépit des appels formulés par le Conseil de sécurité en 1948 et dans les premières années du conflit, la tenue d’un plébiscite permettant de décider de l’avenir du statut d’une partie ou de la totalité du Jammuet-Cachemire, ne peut pas s’envisager d’un point de vue juridique. En outre, la tenue d’un plébiscite n’entre plus dans le champ des revendications politiques, qu’elles soient indiennes ou pakistanaises. L’Inde, malgré l’accord conclu par Nehru, s’est toujours refusée à une telle solution, et le Pakistan, qui a longtemps milité pour la tenue d’un référendum, a finalement abandonné cette revendication. Ainsi, la tenue d’un plébiscite, et la possibilité pour le Jammu-et-Cachemire ou le Cachemire dans son intégralité, de faire sécession de l’Inde et/ou du Pakistan, ne semble pas pouvoir être soutenue par les règles de droit international et les applications dont elles font l’objet aujourd’hui. L’Inde, comme le Pakistan, y préfèrent une solution bilatérale44. Le secrétaire général de l’ONU appelle désormais également à un règlement bilatéral 45 . Aujourd’hui, seule l’Union 43 Société française pour le droit international, Révolution et droit international. Colloque de Dijon, Paris, Éditions A. Pedone, 1990, p. 157, cité dans KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, op. cit. p. 10 44 « Pakistan’s relations with India : Beyond Kashmir ? », Internationa Crisis Group, Asia Report n°224, 3 mai 2012 45 « Il est urgent de rechercher une solution politique à ce problème par le biais d’un dialogue constructif », Rapport du secrétaire général sur l’activité de l’Organisation, Assemblée Générale, 77ème 21 européenne voit la tenue d’un plébiscite comme le moyen de mettre un terme au conflit46. session, 20 août 1996, accessible en ligne sur http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/67/1 46 Résolution du Parlement européen du 24 mai 2007 sur la situation actuelle et les perspectives d’avenir au Cachemire, (2005/2242(INI)), accessible en ligne sur http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P6-TA-20070214+0+DOC+XML+V0//FR 22 III) La recherche d’une solution bilatérale : quel statut envisageable pour le Cachemire à l’avenir ? Au delà de l’idée d’une possible sécession du Cachemire, la notion d’autodétermination des populations a été avancée de manière croissante comme voie potentielle de règlement du conflit (A). Toutefois, l’atteinte d’une telle solution suppose l’existence de relations bilatérales cordiales entre l’Inde et le Pakistan (B). A) Le gel de la ligne de démarcation et l’autodétermination interne des régions du Cachemire : une solution au conflit ? L’autodétermination, si elle peut se manifester par une sécession (autodétermination externe), s’exprime aussi par « l’accord du droit à un peuple ou à un groupe d’exister de façon autonome à l’intérieur d’un État existant et à posséder sa propre représentativité à travers un organe politique décentralisé choisi par lui »47 : c’est l’autodétermination interne. L’autodétermination interne semble être, dans la pratique du droit international, désormais préférée à l’autodétermination externe pour répondre aux revendications des minorités. Ce passage a été marqué par l’avis rendu par la Commission d’arbitrage de la Conférence pour la paix en Yougoslavie en 1992, au sujet des volontés sécessionnistes des populations serbes de Croatie et de Bosnie-Herzégovine. Consacrant le principe de primauté du principe d’intégrité territoriale sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, la Commission, présidée par Robert Badinter, affirme qu’en dépit du droit à la sécession, les minorités peuvent légalement revendiquer la reconnaissance de leur spécificité sur le plan interne : « Quelles que soient les circonstances, le droit à l’autodétermination ne peut entraîner une modification des frontières existant au moment des indépendances sauf en cas d’accord contraire de la part des États concernés » mais « ces groupes ont, en vertu du droit international, le droit de voir 47 KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, op. cit. p. 10 23 leur identité reconnue » 48 . Cette solution, qui concilie autodétermination et principe d’intégrité territoriale, semble constituer aujourd’hui la voie privilégiée à une sortie de conflit. La notion d’autodétermination interne des cachemiris avait, dès 1950, été inscrite dans la Constitution indienne de 1950, à son article 370. Celui-ci prévoit qu’une assemblée élue exercera la quasi-totalité des compétences étatiques, à l’exception des compétences régaliennes49. Ce statut est confirmé par l’Accord de Delhi, en 1952. Celui-ci donne lieu à la détermination d’un drapeau propre au Jammu-et-Cachemire, ainsi que la désignation d’un chef d’État sur recommandation de l’Assemblée du Jammu-et-Cachemire, reconnu au niveau fédéral50. Toutefois, en dépit de ces dispositions, le pouvoir central indien a, dès 1953, remis en cause ces droits et empêché leur application. En 1953, le Cheikh Farouk Abdullah, chef du gouvernement de Jammu-et-Cachemire depuis 1950, est arrêté, « accusé d’intelligence avec des éléments dits « antinationaux » »51. Peu à peu, le statut de l’État de Jammu-et-Cachemire est aligné sur celui des autres États fédérés, en contradiction avec la promesse d’une grande autonomie. Enfin, dans les années 1990, la résurgence des tensions entre l’Inde et le Pakistan donne lieu au placement de l’État de Jammu-et-Cachemire sous la tutelle directe du pouvoir central (en application de la « President’s rule », férule présidentielle). De plus, l’Inde est accusée de truquer les élections régionales, afin d’assurer la présence dans la région d’un relai favorable au pouvoir central52. 48 PELLET Alain, « Notes sur la Commission d'arbitrage de la Conférence européenne pour la paix en Yougoslavie », Annuaire français de droit international, volume 37, 1991. pp. 329-348, doi : 10.3406/afdi.1991.3021, accessible en ligne sur www.web/revues/home/prescript/article/afdi_00663085_1991_num_37_1_3021 49 Constitution de l’Inde, adoptée le 26 novembre 1949, entrée en vigueur le 26 janvier 1950, accessible en ligne sur http://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/en/in/in023en.pdf 50 Accord de Delhi, 24 juillet 1952 , accessible en ligne sur http://www.satp.org/satporgtp/countries/india/states/jandk/documents/papers/delhi_agreement_1952.h tm 51 LACOSTE Yves, « L’Inde et la question nationale », Hérodote. Revue de géographie et de géopolitique, volume 71, octobre-décembre 1993, accessible en ligne (retranscription informatique) sur http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56209715/texteBrut 52 RACINE Jean-Luc, « Cachemire. Au péril de la guerre », Politique étrangère N°3-4 - 2003 - 68e année pp. 860-861, accessible en ligne sur 24 Depuis le début des années 2000, il semble que la voie de l’autonomie soit rétablie. Les élections régionales d’octobre 2002, saluées pour leur transparence, ont permis aux cachemiris du Jammu-et-Cachemire de s’exprimer, pour la première fois, avec une certaine liberté, bien que le taux de participation ne se soit établi qu’à 44%. Pour la première fois, le BJO, parti hindou allié de la Conférence nationale, à été écarté, au profit du parti du Congrès, et du Parti Démocratique du Peuple (PDP)53. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032342x_2003_num_68_3_1260_t1_0860_0000_2 53 Inde : information sur les résultats des plus récentes élections pour les États suivants : Pendjab, Pondichéry, Tamil Nadu, Haryana, Andhra Pradesh, New Delhi, Goa, Gujerat, Jammu-et-Cachemire (2002-2007), Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, 8 May 2007, doi : IND102463.EF, accessible en ligne sur http://www.refworld.org/docid/469cda281e.html 25 B) Une sortie de crise dépendante des relations entre l’Inde et le Pakistan La résolution de la question du Cachemire, qui passe par la définition d’un statut arrêté, est indissociable de la qualité des relations bilatérales indopakistanaises. Dès 1999, la Déclaration de Lahore avait donné lieu à l’établissement d’une feuille de route destinée à aborder l’ensemble des points de contentieux entre les deux pays54. La qualité du dialogue semble s’être considérablement accrue au cours des quinze dernières années. Le 23 novembre 2003, le Général pakistanais Musharraf annonce un cessez-le-feu unilatéral le long de la « LoC »55. Il est rapidement suivi par une déclaration similaire de la part de l’Inde. En décembre de la même année, Musharraf fait savoir qu’il est prêt à abandonner la condition de tenue d’un référendum au Cachemire indien, si cela peut permettre de négocier un règlement pacifique du conflit. En janvier 2004, à l’occasion du Sommet de la South Asian Association for Regional Cooperation (SAARC) de janvier 2004, la reprise du dialogue entre les deux pays est officialisée56. Le 28 février 2004, les deux pays s’accordent sur les sujets qui seront intégrés dans le « dialogue composite ». En termes de paix et sécurité, la discussion porte sur la démilitarisation du glacier du Siachen, le désarmement, la prise de mesures de confiance (dont la mise en place de la ligne de bus entre Srinagar et Muzaffarabad en 2005 est une illustration). En 2007, le Général Musharraf propose un plan d’action subdivisé en quatre points, à savoir la transformation de la « LoC » en frontière internationale, la démilitarisation progressive de la frontière indo-pakistanaise, l’accord d’un statut d’autonomie aux régions du Cachemire, et la mise en place d’un mécanisme de contrôle des accords par un organe composé d’indiens, de pakistanais, et de représentants de la minorité cachemirie. 54 Déclaration de Lahore, 21 février 1999, accessible en ligne sur http://www.nti.org/treaties-andregimes/lahore-declaration/ 55 « Pakistan : un cessez-le-feu unilatéral au Cachemire », Les Échos, 24 novembre 2003, numéro 19037 p. 16, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Search/Result/Result.aspx 56 « Pakistan’s relations with India : Beyond Kashmir ? », Internationa Crisis Group, op. cit. p.21 26 Les rencontres des équipes nationales de cricket, dans des tournois qui mobilisent l’ensemble du sous-continent, constituent un maillon à part entière des relations indo-pakistanaises, quoiqu’elles soient suspendues en temps de crise57. C’est donc devant l’équipe de cricket indienne en tournée au Pakistan, que le Général Musharraf a déclaré en mars 2004 que l’ « Inde et le Pakistan disposent tous deux d’armes de destruction massive », faisant référence à deux célèbres joueurs des équipes nationales, le pakistanais Shoaib Akhtar et l’indien Sachin Tendulkar58. En 2008, les attentats de Bombay provoquent une interruption brutale du processus engagé. Les autorités indiennes attribuent au LeT les attaques qui provoquent la mort de 172 de ses ressortissants, et accusent le Pakistan d’avoir soutenu l’initiative du groupe djihadiste séparatiste59. En octobre 2011, le rapprochement de l’Inde et de l’Afghanistan, qui concluent un pacte stratégique visant à une plus grande collaboration dans la lutte contre les menaces terroristes après le retrait des forces occidentales, a conduit les autorités pakistanaises à initier une nouvelle tentative de rapprochement. Devant l’Assemblée Générale de l’ONU, Muhammad Nawaz Sharif a déploré les pertes financières, économiques et humaines dues à l’altérité persistante entre les deux pays, et appelé à une coopération. Le premier ministre pakistanais a indiqué : « Le Pakistan en l’Inde peuvent prospérer ensemble et toute la région peut profiter de notre coopération »60. Le 28 septembre 2013, Manmohan Singh est intervenu à son tour et a salué le « nouveau départ » des relations entre les deux pays61. Un 57 BOBIN Frédéric, « La paix couleur cricket », Le Monde, Lettre d’Asie, 2 avril 2011, p.28, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Document/DocumentPDF.aspx?Doc Name=news·20110402·LM·0q0204_337968&PageIndex=0 58 VARADAJAN, Tunku. "Cricket Diplomacy: India and Pakistan Celebrate Their Weapons of Mass Destruction." The Wall Street Journal, 25 March 2004 29 Jul 2008 http://www.opinionjournal.com/la/?id=110004862 59 « Pakistan’s relations with India : Beyond Kashmir ? », Internationa Crisis Group, op. cit. p.21 60 Intervention de Nawaz Sharif devant l’Assemblée Générale de l’ONU le 27 septembre 2011 : http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=31191#.VT43WM4RmT8 61 Intervention Manmohan Singh devant l’Assemblée Générale de l’ONU le 28 septembre 2011 : http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=31206#.VT43Uc4RmT9 27 peu plus tôt la même année, une rencontre avait déjà eu lieu entre les ministres des Affaires étrangères, la première depuis les attaques de 200862. L’élection de Narendra Modi, en mai 2014, intervient elle aussi à la faveur d’un rapprochement indo-pakistanais. Il a invité Nawaz Sharif à être présent le jour de son investiture, le 26 mai 201463. C’est la première fois que le premier ministre pakistanais assiste à la cérémonie d’investiture de son homologue indien. La veille de leur première rencontre, le Pakistan avait libéré 151 pêcheurs indiens, emprisonnés en raison d’un différend portant sur la démarcation des frontières maritimes dans l’Océan indien 64 . Depuis 2013, Coca-Cola a installé des distributeurs de canettes de soda invitant les indiens et les pakistanais à se saluer à travers les machines, équipées de caméras65. Malgré un regain de tension entre les deux pays à l’été 2014, après que la ligne de cessez-le-feu a été violée, et qu’une fusillade a conduit à la mort d’un soldat indien 66 , l’Inde et le Pakistan semblent engagés sur la voie d’un rapprochement. À terme, la principale faiblesse des relations indo-pakistanaise demeure la force des nationalismes, très présents dans les deux pays. Illustration de cette rivalité persistante, la relève de la garde à Wagah, unique poste-frontière entre les deux pays, donne lieu chaque jour à une poignée de main, mais aussi à la réunion de plusieurs milliers de personnes de part et d’autres de la frontière dans des manifestations nationalistes6768. 62 « Diplomatie. L’Inde et le Pakistan formalisent leur rapprochement », Courrier International relayant The Hindus-Madras, 27 juillet 2011, accessible en ligne sur http://www.courrierinternational.com/breve/2011/07/27/l-inde-et-le-pakistan-formalisent-leurrapprochement 63 FARCIS Sébastien, « Rapprochement entre Inde et Pakistan, à la faveur de l'investiture de Narendra Modi », 26 mai 2014, RFI, accessible en ligne sur http://www.rfi.fr/asiepacifique/20140526-inde-pakistan-nawaz-sharif-investiture-narendra-modi/ 64 Ibid. 65 Installation Coca-Cola entre l’Inde et le Pakistan : https://youtu.be/ts_4vOUDImE 66 « L'Inde dénonce des violations "provocatrices" du cessez-le-feu au Cachemire », AFP Infos Françaises, 30 août 2014, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Search/Result/Result.aspx 67 NOVOSSELOFF Alexandra, Des murs entre les hommes, op. cit. p.9 68 Vidéo amateur montrant la relève de la garde à Wagah accessible en ligne sur https://www.youtube.com/watch?v=wmuo7BEcpv4 28 Enfin, le renforcement des relations bilatérales semble se dessiner aujourd'hui en contournement de la question du Cachemire. Le conflit, considéré comme difficilement soluble dans l’immédiat, est mis de côté. Le rapprochement passe alors en premier lieu par un renforcement des échanges économiques, le règlement des multiples conflits opposants les deux pays étant envisagé sur le long terme69. 69 « Pakistan’s relations with India : Beyond Kashmir ? », Internationa Crisis Group, op. cit. p.21 29 Bibliographie Documents officiels • • • • • • • Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, accessible en ligne sur http://www.un.org/fr/documents/charter/pdf/charter.pdf Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté le 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976, accessible en ligne sur http://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/CCPR.aspx Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté le 16 décembre 1966, entré en vigueur le 3 janvier 1976, accessible en ligne sur http://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/CESCR.aspx Constitution de l’Inde, adoptée le 26 novembre 1949, entrée en vigueur le 26 janvier 1950, accessible en ligne sur http://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/en/in/in023en.pdf Accord de Karachi : Agreement Between Military Rrepresentatives Of India And Pakistan Regarding the Establishment of a Cease-Fire Line in the State of Jammu and Kashmir (Karachi Agreeement), 29 juillet 1949, accessible en ligne sur http://peacemaker.un.org/sites/peacemaker.un.org/files/IN%20PK_490729_%20Ka rachi%20Agreement.pdf Accord de Delhi, 24 juillet 1952, accessible en ligne sur http://www.satp.org/satporgtp/countries/india/states/jandk/documents/papers/delhi_ agreement_1952.htm Agreement Between the Government of India and the Government of the Islamic Republic of Pakistan on Bilateral Relations (Simla Agreement), 07-02-1972, Ministry of External Affairs, accessible en ligne sur http://meaindia.nic.in/treatiesagreement/1972/chap463.htm Rapports • • • • DULAIT André, BIDARD-REYDET Danielle, BOYER André, VINÇON Serge, BLANC Jacques et PLANCADE Jean-Pierre, « Forces armées à la suite d'une mission effectuée du 3 au 10 mars 2002 en Inde et au Pakistan », Rapport d'information n° 336 (2001-2002) fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 24 juin 2002, accessible en ligne sur http://www.senat.fr/rap/r01-336/r01-336_mono.html Rapport du secrétaire général sur l’activité de l’Organisation, Assemblée Générale, 77ème session, 20 août 1996, accessible en ligne sur http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/67/1 « Immigration and Refugee Board of Canada, Inde : information sur les résultats des plus récentes élections pour les États suivants : Pendjab, Pondichéry, Tamil Nadu, Haryana, Andhra Pradesh, New Delhi, Goa, Gujerat, Jammu-et-Cachemire (2002-2007) », 8 May 2007, doi : IND102463.EF, accessible en ligne sur http://www.refworld.org/docid/469cda281e.html « Pakistan’s relations with India : Beyond Kashmir ? », Internationa Crisis Group, Asia Report n°224, 3 mai 2012 30 • Annual Report : India 2013, Amnesty International, 23 mai 2013, accessible en ligne sur http://www.amnestyusa.org/research/reports/annual-report-india2013?page=show Communiqués de presse • • • « Ban Ki-moon exhorte l’Inde et le Pakistan à trouver une solution pacifique pour le Cachemire », UN News Centre, accessible en ligne sur http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=33503#.VT5qyM4Rl8c Intervention de Nawaz Sharif devant l’Assemblée Générale de l’ONU le 27 septembre 2011 : http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=31191#.VT43WM4RmT8 Intervention Manmohan Singh devant l’Assemblée Générale de l’ONU le 28 septembre 2011 : http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=31206#.VT43Uc4RmT9 Résolutions • • • • • • Conseil de sécurité, Résolution 39 du 20 janvier 1948 http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=S/RES/39(1948)&Lang=E &style=Bf Conseil de sécurité, Résolution 47 du 21 avril 1948 http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=S/RES/47(1948)&Lang=E &style=B Assemblée Générale des Nations Unies, Résolution 1541 (XV), 14 décembre 1960, Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, accessible en ligne sur http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/RES/1514(XV) Assemblée Générale des Nations Unies, Résolution 2625 (XXV), 24 octobre 1970, Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies, accessible en ligne sur http://www.un.org/french/documents/view_doc.asp?symbol=A/RES/2625(XXV)& Lang=F Résolution du Parlement européen du 24 mai 2007 sur la situation actuelle et les perspectives d’avenir au Cachemire, (2005/2242(INI)), accessible en ligne sur http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P6TA-2007-0214+0+DOC+XML+V0//FR Résolution du Parlement européen du 12 mars 2014 sur le rôle régional du Pakistan et les relations politiques de ce pays avec l'Union européenne (2013/2168(INI)), 12 mars 2014, accessible en ligne sur http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7TA-2014-0208+0+DOC+XML 31 Décisions de justice • • • • Cour Internationale de Justice, Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif, 21 juin 1971, accessible en ligne sur http://www.icj-cij.org/docket/files/53/5594.pdf Cour Internationale de Justice, Affaire du Sahara occidental, avis consultatif en 16 octobre 1975, accessible en ligne sur http://www.icjcij.org/docket/index.php?sum=323&p1=3&p2=4&case=61&p3=5&lang=fr Cour Internationale de Justice, Affaire relative au Timor oriental (Portugal c. Australie), arrêt du 30 juin 1995, C.I.J. Recueil 1995, p. 102, accessible en ligne sur http://www.icj-cij.org/docket/files/84/6949.pdf Cour permanente d’arbitrage, Arbitrage des Eaux de l’Indus Kishenganga (Pakistan c. Inde), sentence du 20 décembre 2013, sentence accessible en ligne sur http://www.pca-cpa.org/showfile.asp?fil_id=2471 Manuel • COMBACAU Jean, SUR Serge, Droit international public, LGDJ-Lextenso, coll. Domat droit public, 2014, XXVI-830 p., pp. 267 et 269-281 Ouvrages spécialisés • • • • • • • CHRISTAKIS Théodore, Le droit à l’autodétermination en dehors des situations de décolonisation, Paris, La Documentation française, 1999 GAYER Laurent, Asie du Sud : Fondamentalisme, séparatisme, maoïsme, Michalon, coll. Mondes rebelles, 2009, 187 p., pp. 81-100 GROS ESPIELL Hector, Le droit à l’autodétermination: application des résolutions de l’Organisation des Nations Unies, New York, Nations Unies, 1979 FOUCHER Michel, L’obsession des frontières, Paris, Perrin, 2007, 248 p., pp. 9698 KOHEN Marcelo G., Possession contestée et souveraineté territoriale, PUF, coll. Publications de l’Institut universitaire des hautes études internationales de Genève, 1997, 608 p., pp. 79-82 NOVOSSELOFF Alexandra, Des murs entre les hommes, Paris, La Documentation française, 2007, 211 p., pp. 159-173 RUCZ Claude, «L’application par le juge du principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », dans Philippe WECKEL (dir.), Le juge international et l’aménagement de l’espace : la spécificité du contentieux territorial, Paris, Éditions A. Pedone, 1998 32 Articles académiques • • • • • • • • BHOLA P. L., « Indo-Pakistan control march over Siachen glacier », Indian Journal of Asian Affairs, Vol. 1, No. 1 (SUMMER 1988), pp. 28-48, accessible en ligne sur www.jstor.org.janus.biu.sorbonne.fr/stable/41950323 JAFFRELOT Christophe et ZÉRININI-BROTEL Jasmine, « La question du Cachemire. Après le 11 septembre et la nouvelle donne au Jammu et Cachemire », Occasional Papers, n°43, Mars 2003, accessible en ligne sur http://www.iss.europa.eu/uploads/media/occ43.pdf KISHORE Pallavi, « Le Cachemire : peuple sans État ? », Les Cahiers de droit, vol. 53, n° 2, 2012, p. 383-416, DOI: 10.7202/1009446ar , accessible en ligne sur http://id.erudit.org/iderudit/1009446ar LACOSTE Yves, « L’Inde et la question nationale », Hérodote. Revue de géographie et de géopolitique, volume 71, octobre-décembre 1993, accessible en ligne (retranscription informatique) sur http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56209715/texteBrut PELLET Alain, « Notes sur la Commission d'arbitrage de la Conférence européenne pour la paix en Yougoslavie », Annuaire français de droit international, volume 37, 1991. pp. 329-348, doi : 10.3406/afdi.1991.3021, accessible en ligne sur http://web/revues/home/prescript/article/afdi_00663085_1991_num_37_1_3021 PURI Luv, « Towards a Softer Border », Economic and Political Weekly, Vol. 38, No. 22 (May 31 - Jun. 6, 2003), pp. 2116-2117, accessible en ligne sur www.jstor.org.janus.biu.sorbonne.fr/stable/4413613 RACINE Jean-Luc, « Cachemire. Au péril de la guerre », Politique étrangère N°34 - 2003 - 68e année pp. 860-861, accessible en ligne sur http://web/revues/home/prescript/article/polit_0032342x_2003_num_68_3_1260_t1_0860_0000_2 TOURET Denis, « Le principe de l’égalité souveraine des États, fondement du droit international», Revue Générale de Droit International Public, 1973 Articles de presse • • • • BOBIN Frédéric, « La paix couleur cricket », Le Monde, Lettre d’Asie, 2 avril 2011, p. 28, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Document/Docum entPDF.aspx?DocName=news·20110402·LM·0q0204_337968&PageIndex=0 CALLE Marie-France, « Départ hier des premiers autocars reliant les deux parties de la région. Caravane de la paix entre Inde et Pakistan », Le Figaro, International, 8 avril 2005, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Search/Result/Res ult.aspx CHIPAUX Françoise, « Le processus de paix entre l'Inde et le Pakistan est qualifié d'« irréversible » par leurs dirigeants », Le Monde, International, mardi 19 avril 2005, p. 3, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Document/Docu mentPDF.aspx?DocName=news·20050419·LM·0q1904_1054333&PageIndex=0 GARAUDE Pauline, « Islamabad reconnaît la piste pakistanaise », Sud Ouest, 16 février 2009, accessible en ligne sur 33 • • • • • http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Search/Result/Res ult.aspx FARCIS Sébastien, « Rapprochement entre Inde et Pakistan, à la faveur de l'investiture de Narendra Modi », RFI, 26 mai 2014, accessible en ligne sur http://www.rfi.fr/asie-pacifique/20140526-inde-pakistan-nawaz-sharif-investiturenarendra-modi/ VARADAJAN Tunku, « Cricket Diplomacy : India and P Celebrate Their Weapons of Mass Destruction." The Wall Street Journal, 25 March 2004 29 July 2008, accessible en ligne sur http://www.opinionjournal.com/la/?id=110004862 « Pakistan : un cessez-le-feu unilatéral au Cachemire », Les Échos, 24 novembre 2003, numéro 19037 p. 16, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Search/Result/Res ult.aspx « Diplomatie. L’Inde et le Pakistan formalisent leur rapprochement », Courrier International relayant The Hindus-Madras, 27 juillet 2011, accessible en ligne sur http://www.courrierinternational.com/breve/2011/07/27/l-inde-et-le-pakistanformalisent-leur-rapprochement « L'Inde dénonce des violations "provocatrices" du cessez-le-feu au Cachemire », AFP Infos Françaises, 30 août 2014, accessible en ligne sur http://www.bpe.europresse.com.janus.biu.sorbonne.fr/WebPages/Search/Result/Res ult.aspx Sites internet • • http://www.kashmirnewz.com http://www.kashmirtimes.com Vidéos • • Relève de la garde à Wagha : http://www.dailymotion.com/video/xmbvzo_indiapakistan-wagah-attari-border-closing-ceremony-by-sanjeev-bhaskar-the-longestroad_travel Installation Coca-Cola entre l’Inde et le Pakistan : https://youtu.be/ts_4vOUDImE Documents divers • • « Reply from Lord Mountbatten to Maharajah Sir Hari Singh Dated 27 October 1947 », Legal Document no 115, accessible en ligne sur www.kashmirinformation.com/historicaldo- cuments/115.html RENAN Ernest, « Qu’est-ce qu’une nation ? », Conférence prononcée le 11 mars 1882 à la Sorbonne, accessible en ligne sur http://classiques.uqac.ca/classiques/renan_ernest/qu_est_ce_ une_nation/renan_quest_ce_une_nation.pdf 34 Annexes Annexe 1 : Cartographie du Cachemire diffusée par l’ONU, agréée par l’Inde et le Pakistan Source : Département de cartographie des Nations Unies 35 Annexe 2 : Cartographie du Cachemire vue par l’Inde et le Pakistan Source : « Un territoire, deux perceptions », Carte extraite de l’Atlas du Monde diplomatique, Un monde à l’envers, Paris, 2009 36 Annexe 3 : Représentation cartographique communément présentée Source : REKACEWICZ Philippe 37