Extrait - Librinova

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Extrait - Librinova
jacques FEVRE
A la manière de...
MERCI DOCTEUR GLUTEN !
© jacques FEVRE, 2016
ISBN numérique : 979-10-262-0463-3
Courriel : [email protected]
Internet : www.librinova.com
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intellectuelle.
Introduction
A l’école je n’étais pas un passionné de littérature. La lecture ne
m’attirait pas plus que ça. Hermétique aux grands auteurs classiques ou
contemporains, seule la bande dessinée avait mes faveurs.
Passé l’adolescence je n’avais lu que quelques ouvrages vertueux
dans la pension religieuse où j’avais été incarcéré. C’est alors que je
croisais sur mon chemin, par hasard, un volume de San Antonio.
La révélation fut d’importance. Je devins du jour au lendemain un
lecteur obsessionnel. Je n’avais de cesse de chercher tous les livres de mon
maître.
Frédéric Dard, en effet devint mon maître. Enfin une écriture vivante,
imagée, blasphématoire. C’est grâce à lui que j’ai aimé la lecture sans
limite. Il a sans doute éveillé en moi l’envie d’écrire. Merci.
Cet ouvrage n’a d’autre but que de lui rendre hommage. J’avais envie
de ressortir de mon subconscient toute la verve compilée après la lecture
de ses dizaines de polars uniques. Une façon de dire à monsieur Dard qu’il
n’est pas mort. Il vit dans la mémoire des gens de ma génération. Pour les
jeunes, sortez le nez de vos téléphones, trouvez chez un bouquiniste un
vieux San Antonio patiné et savourez. Vous ne risquez pas de mourir, juste
d’avoir envie de recommencer.
Et vous, puristes inconditionnels de la prose Dardienne, ne soyez pas
offusqué de ma démarche. Je n’ai pas l’intention de copier notre inimitable
maestro. C’est seulement un message envoyé au père de San Antonio, làhaut, pour lui dire simplement merci. Merci de ces moments de bonheur,
merci d’avoir été là, à côté de Victor Hugo, Pagnol, et tous les autres.
MERCI DOCTEUR GLUTEN
C’est le sous-titre…..banane !
CHAPITRE PREMIER
En dilé-tante
Dans mon putain de métier il n’y a pas beaucoup d’occasion de se
détendre. Je venais de passer trois semaines à courir après des détraqués en
tous genres, assassins découpeurs de grand-mères, obsédés de la prostate,
sérials violeurs et autres déjantés du cervelet.
J’étais naze. Ras la casquette Toinon. Roti, pilé.
Dans ces moments, soit je plonge sous ma couette avec une frangine
pour jouer à une partie des quatre jambons suspendus au même crochet (ça
soulage… !), soit je dégage en solo à la campagne : salut Pantin, bonjour
les bois et les champs, à moi les petites fermières !
Mon phone se mit à vibrer comme un serpent à sonnette. La voix
perçante de la tante Tinette me vrilla les esgourdes.
— Bonjour mon Toinon ! C’est Tinette. Comment vas-tu mon petit
chou ? Toujours dans la maison poulaga ? Tu me manques mon biquet. Tu
ne viendrais pas voir ta vieille tante en basse Bretagne, histoire de se
remémorer les belles années, avant que je calanche ?
Tante Tinette c’est toute mon adolescence. Ce fut une belle femme
qui m’a enseigné le b-a-ba des parties de jambes en l’air, une artiste de la
copulation no limit, une princesse du plumard. Je dois reconnaitre que sans
elle je n’aurais jamais eu les bases pour propulser au septième ciel les
gonzesses variées et avariées que j’ai glané au cours de ma carrière. En
effet bande, de nazes il ne suffit pas d’être monté tel un âne comme mezig
pour les faire crier, les géraldines, il faut aussi maitriser le point et le
contre-point, être un virtuose du broute-minou, connaitre le piano, le
mezzo et le crescendo, la clé de fa, de dos, de face et de profil. Faire des
gammes sur clitoris n’est pas à la portée du premier bandeur venu. Des
heures d’exercice. Gymnastique des doigts, des pieds, de la langue. Tout un
art ! Ne rêvez pas tas d’handicapés de la bistouquette. Pour être au sommet
beaucoup de travail et au départ un professeur comme Tinette qui vous
enseigne par l’exemple. Indispensable !
Pendant les vacances, alors que ma pauvre mère savourait sa sieste
dans son transat, Tinette m’entrainait à l’étage pour me prodiguer ses
leçons d’art appliqué. Tout y est passé : la brouette japonaise, le bilboquet
royal, le tourniquet indien, le mettez m’en un double garçon ! La
tyrolienne enchantée, la cravate infernale, tout je vous dis ! Nos fesses noz
quotidiens risquaient de réveiller le quartier. Heureusement ma mère était
dure de la feuille. Elle a toujours cru que je regardais des films de cowboys pendant ma sieste.
— Chère Tinette. Tu ne voudrais pas remettre le couvert, à ton âge…
— Mais non mon Toinon ! Je suis une vieille dame maintenant, je ne
suis qu’un vieux volcan éteint, aussi sec que le désert de Gobi. Ne crains
rien mon grand.
Je vois juste passer les années, trop vite. Je serais heureuse de te voir.
J’ai toujours aimé ma Tante. J’aime aussi la Bretagne.
Excellent pour les poumons. Exactement ce qu’il me fallait. Taille la
route !
CHAPITRE DEUX
Tu me tentes, ma Tante.
Tinette s’était mise sur son trente-deux pour mon arrivée. Sa tenue de
gala à tout pour effrayer un troupeau de zèbres. Sa robe à trois fleurs a des
couleurs hallucinogènes entre le bleu électrique et le vert acidulé. Des
chaussures fluorescentes avec des talons hauts comme le gode de ma
cousine, une coiffure de vampire flippé, couleur lie de vin jaune pipi. Tu
rajoutes une paire de lunettes à la Sophia Loren en pire avec des branches
pailletées et gondolées. J’allais oublier les trois kilos de bijoutaille répartis
des chevilles aux oreilles.
Ah ! Sûr de ne pas la perdre au marché, la Tinette !
Chaleureuses embrassades. Elle me laisse la moitié de son
maquillage sur mon polo Lacoste.
C’est vrai, ce n’est plus la starlette que j’ai connu. Le temps est passé
par là. Cette saloperie de temps qui va trop vite, qui nous décatit, nous
lamine, nous transforme en vieux sans que l’on s’en rende compte.
Tinette a brulé les étapes. Elle est passée de Miss Bretagne à Miss
vieille peau en dix ans. Le temps a rattrapé le retard, pour se venger.
Je l’aime. C’est une bonne personne. C’est ma tante, ma chère Tante.
Je n’ai plus qu’elle.
Son coquet logis est à la même enseigne que sa tenue. Fleurs en
plastique, napperons partout, poupées à la con sur les murs, et summum du
top : un chien en peluche télécommandé.
— Il n’est pas mignon mon René ? C’était le prénom de mon dernier
mari. Au moins lui il ne pisse pas partout et il ouvre sa gueule quand on lui
demande.
Je te montre ta chambre.
La piaule est conforme au reste. Je me ferai au baldaquin en filet de
pêche constellé de poissons argentés. Aux murs des photos de grands
hommes, Tabarly, Churchill, Patrick Sebastien, Pascal Sevran, Luis
Mariano. Les cadres en coquillage accentuent le côté poissonnerie.
— C’est trop, ma Tante !
— Tu n’as pas tout vu ! Quand tu éteins la lampe de chevet ça
déclenche un bruit de ressac avec des cris de mouette. Je te jure ! C’est
génial pour s’endormir !
— Oui, super !...
Je jubile.
— Ah ! Mon Toinon, je suis si heureuse de te voir, dit-elle en me
sautant au cou, sauvagement.
Je la voyais venir, l’ex papesse du braquemard, la virtuose de la
levrette enchantée. Elle avait fantasmé puissance dix en attendant mon
arrivée. Pas contre se faire un dernier petit rappel à la volée. Je veux mon
neveu !
— Molo Tinette ! Je te vois venir ! Reste sage ma tante. Ce ne serait
pas décent. Pas la peine de rallumer le fourneau ! Je n’ai rien à mettre au
four. Pour me mettre en émoi il me faut de la viande fraiche, pas du
faisandé. Avec tout le respect que je te dois et l’amour que je te porte,
remettre le couvert à ton âge avec moi, cela ternirait tous nos souvenirs,
nos parties flamboyantes de touche-pipi, nos envolées lyriques à pousser la
tyrolienne en jouant à la bête à deux dos.
Dépitée, la pauvrette. Mais bonne joueuse.
— Je ne me faisais pas d’illusions. Je sais bien qu’un beau mâle
comme toi, il lui faut de la jeunette et pas une antiquité. M’enfin à titre
humanitaire t’aurais pu te fendre d’un massage ou d’une petite léchouille.
Tant pis !
Pour me faire pardonner je lui roulais un patin grand modèle. Elle
avait tellement de rouge à lèvre, je crus sucer un cul de babouin.
C’est une image bande de crabes ! Vous vous imaginez déjà que le
commissaire Toinon va se taper des singes au zoo de Vincennes. Si, si, je
vous entends. Dégénérés incultes ! Jaloux !
— Mon Toinon tu as vu que je n’ai plus l’énergie d’antan. La
vieillerie mais aussi une thyroïde déglinguée qui me joue des tours. Elle
fait plus son boulot cette salope. D’ailleurs demain je dois voir un nouveau
toubib qui propose un traitement parait-il efficace à base d’épluchure de
navet, de saucisse de Strasbourg et de nid d’hirondelle. Le docteur Gluten
est réputé dans toute l’Europe, de Laval à Landivisiau. J’ai attendu deux
mois pour un rendez-vous.
— Tu le connais d’où, Herr Gluten ?
— C’est une amie d’une cousine d’une copine de la sœur de mon
amie Georgette, abonnée au Chasseur Français, qui a trouvé le tuyau dans
les petites annonces.
— Fais gaffe Tinette, les charlatans dans le paramédical ça pousse
comme du chiendent.
— Tu peux m’accompagner si tu veux. Il habite l’ile aux Moines.
C’est charmant. En m’attendant tu pourras courir la gueuse dans le
village…
— Bonne idée. Enfin une proposition intéressante !
A l’embarcadère nous eûmes droit aux regards ahuris des
autochtones, pourtant habitués aux délires vestimentaires des touristes. La
tante avait tout dessus. Caleçon moulant multicolore, robe à volant de
dentelle style flamenco plus un boléro paré de mini pompons colorés et de
fausses pièces d’argent. Le boa orange dégoulinait sur sa généreuse
poitrine sanglée dans un corset. Cerise sur le gâteau : un panama orné
d’une fausse plume de paon et de sa patte de lapin porte bonheur. Les
sandales roses n’arrangeaient pas la silhouette Fellinienne. D’aucuns