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Les cahiers de L’ADAPT
#173 - 1er semestre 2014
Préparer l'avenir des jeunes
avec les jeunes !
L’ADAPT - Association pour l’insertion
sociale et professionnelle des personnes handicapées
L'ADAPT
{ ÉDITORIAL
en chiffres
Dans le cadre de ses activités sanitaires, sociales et médico-sociales,
L’ADAPT prodigue soins et rééducation et propose orientation,
formation et aide à l’insertion professionnelle à chacun de ses
bénéficiaires.
12 000
personnes accueillies.
2 300
La mission qu’elle mène depuis plus de 80 ans :
accompagner la personne handicapée dans son combat ordinaire,
celui de sa vie quotidienne, pour que tous, nous puissions
“Vivre ensemble, égaux et différents”.
salariés dont
10,73% de
travailleurs handicapés.
accompagner
27
établissements ou
services médico-sociaux
accompagnent
1 100 personnes.
En 2013, L’ADAPT
a organisé pendant
la Semaine pour
l’emploi des personnes
handicapées, des
forums emploi/handicap,
des Jobdatings© et des
Handicafés© permettant
66 500 rencontres entre
personnes handicapées
en recherche d'emploi et
recruteurs.
1 600
24
scolariser
10
établissements et services
accueillent 540 enfants.
soigner
insérer
établissements de soins
de suite et de réadaptation
rééduquent 3 900 patients.
places en ESAT dont
370 places en ESAT
Hors-les-murs
9
{ Administrateur de L’ADAPT
et président de la commission
Innovation, Président de
Ecole2demain
former
16
sites géographiques,
dispensant des formations
dans le cadre de nos
établissements médicosociaux, accueillent
3 000 stagiaires
830
« ÉGALITÉ N’EST PAS
NORMALISATION,
C’EST UNE VALEUR DE
CIVILISATION. ELLE DOIT
ÊTRE RECHERCHÉE,
DÉVELOPPÉE, INCARNÉE
DE MANIÈRE TANGIBLE »
"Égaux". Égalité n’est pas normalisation,
c’est une valeur de civilisation. Elle doit être
recherchée, développée, incarnée de manière
tangible : démarche exigeante, intense et
au long cours. Pour indispensable qu’il soit,
le travail sur les représentations n'est plus
suffisant. Pour s’enraciner avec pérennité
dans nos sociétés, être rétablie – et établie
s’agissant du handicap, domaine tellement
emblématique de la "marge de progrès" à
réaliser - l’égalité doit impérativement se
référer à l'équité.
L’axe 2 du projet associatif : Préparer l’avenir
des jeunes avec les jeunes s’attaque à l’une
des conséquences de ce manque d’équité, à
un analyseur sociétal de première importance :
l’emploi des jeunes en situation de handicap.
Celui-ci est le fruit de facteurs multiples et
complexes. Parmi ces derniers, l’association
a choisi d’agir en priorité sur la scolarisation,
la construction de l’autonomie progressive,
L’ADAPT a ainsi marqué sa forte volonté
d’innovation, d’échanges de bonnes pratiques
et de retours d’expériences, quels que
soient les domaines concernés, en faveur
du développement des projets scolaires,
professionnels et, plus largement, du projet de
vie des jeunes en situation de handicap.
Ce Cahiers de L’ADAPT, synthétise les temps
forts et les thèmes abordés lors de ces
conférences et constitue un outil de diffusion
et de partage de bonnes pratiques existantes
sur le territoire. Je remercie ici tous nos
partenaires et collaborateurs qui ont œuvré
de conserve à l’organisation et à la qualité des
échanges lors de ces conférences.
Ce Cahier en est le reflet. De plus, il pose
les bases de projets pertinents, innovants et
ambitieux à mener, ensemble !
{ SOMMAIRE
Le Réseau des Réussites, pour parrainer bénévolement un travailleur handicapé dans
sa recherche d’emploi :
Comités des Réussites,
320
parrains bénévoles,
400
personnes parrainées
P4 & 5
TRIBUNES DE GEORGE PAU-LANGEVIN ET PHILIPPE VAN DEN HERREWEGHE
P6
PRÉPARER L'AVENIR DES JEUNES AVEC LES JEUNES
1997 : Création de la Semaine pour l’emploi des personnes handicapées
2003 : Organisation des Etats généraux de la citoyenneté des personnes handicapées
2004 : Création des Jobdatings© et des Trophées handicap et citoyenneté
2007 : Création des Handicafés©
2009 : Conférence “La place du secteur associatif dans la conception des politiques sanitaires et sociales” lors des 80 ans de L'ADAPT
2011 : Lancement du projet associatif de L'ADAPT 2011-2015 : “Vivre ensemble, égaux et différents”
2011 : Colloque “Emploi et handicap : la question d'une seule semaine ?” à l’occasion de la 15e Semaine pour l’emploi des personnes handicapées
2012 - 2013 : Cycle de conférences “Préparer l'avenir des jeunes avec les jeunes !”
P30
P2
l’ouverture de l’enseignement supérieur, la
création de nouvelles voies pour l’emploi.
C’est pourquoi la commission mixte Innovation
de notre conseil d’administration a souhaité
qu’un travail de réflexion valorisant les
actions innovantes et les échanges de bonnes
pratiques soit mené, aboutissant en 2013 à
un cycle de conférences en régions. Il a été
soutenu par une campagne de communication
autour de la thématique « Une école, des
formations, un emploi pour tous, handicapés
ou non » matérialisée par une affiche, un blog
(www.jeunes.ladapt.net), des témoignages
filmés et une exposition de portraits de jeunes.
adhérents
postes d’administrateurs
30
Jean-Marc Roosz
“Vivre ensemble, égaux et différents” porte la
conviction du projet associatif 2011-2015 de
L’ADAPT. Cette devise traverse et éclaire avec
force chacune des préoccupations, initiatives
et actions de l'association dans chacun de
ses territoires. Cette formulation, brève et
complète, dépasse l'aspect sectoriel, exprime
l'ancrage sociétal et le caractère universel de
L’ADAPT, son rayonnement et sa capacité, de
fait, à alimenter le champ du politique.
P 10
Abattre les frontières
P 12
Imaginer la scolarité autrement: l'unité d'enseignement
P 14
Les dispositifs de décloisonnement : un accompagnement pluriel
P 16
Travail partenarial : un facteur de réussite
P 18
On ne fait pas pour mais avec et par les jeunes
P 20
La construction d'un projet professionnel: poser les bases
P 22
Accompagner pour qualifier
P 24
L’alternance pour tous
P 26
Les jeunes et l’entreprise : bâtir une confiance mutuelle
P 28
Le logement partagé et regroupé, une vie indépendante en appartement
GLOSSAIRE
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P3
{ TRIBUNES
PACTE POUR
LA RÉUSSITE ÉDUCATIVE
UNE AVANCÉE :
DES PROPOSITIONS COMMUNES
Philippe van den Herreweghe
{ Délégué ministériel aux personnes handicapées. Ministères de l'éducation
nationale et de l'enseignement supérieur et de la recherche
« NOUS AVONS SOUHAITÉ METTRE EN EXERGUE, COMME L'UN DES PRINCIPES DE LA RÉUSSITE ÉDUCATIVE,
L’ENFANT AU CŒUR DES ACTIONS EN “S’ADAPTANT À CHAQUE ENFANT ET CHAQUE JEUNE”. »
George Pau
Langevin
{M
inistre déléguée
auprès du ministre de
l'Éducation nationale,
chargée de
la Réussite éducative
Le ministère dont j’ai la charge est un
ministère qui a placé l’inclusion scolaire
dans ses principales priorités. Les avancées
aujourd’hui sont réelles et se font sentir
dans nos territoires, dans nos écoles et
établissements scolaires. C’est une stratégie à
visée qualitative que nous avons entamée
avec Vincent Peillon, en inscrivant dans la loi
pour la refondation de l’école de la République
le principe d’école inclusive. Favoriser la
qualité a été une volonté affirmée par JeanMarc Ayrault quand il a décidé de pérenniser
les assistants d’éducation/auxiliaires de vie
scolaire qui accompagnent les élèves en
situation de handicap. La reconnaissance
d’un vrai métier est aussi actée, car la
pérennisation des personnels s’accompagnera
d’une démarche de validation des acquis de
l’expérience et permettra ainsi de valider le
nouveau diplôme.
Cet engagement gouvernemental était une
mesure très attendue ; c’est un soulagement
pour les élèves en situation de handicap,
pour leur famille et pour toute la communauté
éducative. Mais au-delà, c’est un signal
fort pour notre société ; car quoi de plus
réaliste que de faire de l’école un lieu de
transformation sociale, incubateur et reflet
de la société vers laquelle nous tendons.
Lors de la journée nationale de la réussite
éducative le 15 mai dernier, un travail de
définition et d’élaboration de principes
construisant ce qu’est la réussite éducative
a réuni le ministère délégué chargé de la
réussite éducative, celui en charge de la ville,
P4
les associations, les élus, les représentants
des parents d’élèves. L’ensemble de ces
partenaires a participé à l’élaboration de ce
qui est aujourd’hui le pacte pour la réussite
éducative signé au niveau national dont je
souhaite qu’il connaisse un essor dans les
territoires.
L’élaboration de ce pacte a nécessité le travail
partenarial, inhérent et indispensable à la
construction d’un projet qui prenne en compte
tous les temps de l’enfant.
La réussite éducative s’attache à considérer
l’élève dans toutes ses dimensions, c’est-àdire qu’elle s’attache à prendre en compte
l’environnement de l’élève comme un des
aspects déterminants de son parcours
scolaire. Ainsi, l’environnement social, culturel,
territorial a des impacts sur la réussite des
élèves, de même sa santé ou ses besoins
éducatifs particuliers.
Nous avons souhaité mettre en exergue,
comme l'un des principes de la réussite
éducative, l’enfant au cœur des actions en
« s’adaptant à chaque enfant et chaque
jeune ». Ce principe rappelle que c’est
aux acteurs qui entourent l’enfant de se
mobiliser, de s’adapter à ses besoins. Les
lieux accueillant les enfants en situation de
handicap, mais aussi tous les autres enfants
à besoins éducatifs particuliers, allophones
nouvellement arrivés par exemple, doivent
être pensés pour répondre au plus près aux
besoins de tous.
Ce principe s’insère dans un cadre structurant
qui reconnaît l’importance de la co-éducation,
de l’implication des familles. Reconnaître la
place de celles-ci est une avancée majeure
pour que notre École, celle qui véhicule les
valeurs de la République, puisse pleinement
remplir ses fonctions.
Au-delà, il s’agit bien de l’implication de tous
les adultes. Ainsi, le 3 décembre dernier, à
l’occasion de la journée internationale des
personnes handicapées, le rôle des adultes
dans le système éducatif a été clairement
identifié : ils ont le devoir de sensibiliser
tous les élèves aux situations de handicap
que connaissent certains de leurs pairs,
ils ont le devoir d’accompagner les élèves
dans la compréhension du handicap afin de
déconstruire les représentations et de faciliter
les processus de communication.
Ces actions et bien d’autres démontrent que
nous avons avancé, que le chemin parcouru
est notable mais force est de constater que
la route est encore longue. C’est un combat
gouvernemental qui s’inscrit dans la durée
et garantit l’exigence de qualité sur laquelle
chaque famille, chaque enfant, doit pouvoir
compter à l’Ecole, dans la Cité, sur tout le
territoire de la République.
La scolarisation des jeunes en situation de handicap reste la
préoccupation majeure du ministère de l’éducation nationale.
C’est dans cet esprit que la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013
d'orientation et de programmation pour la refondation de
l'école de la République définit les priorités de l’éducation
nationale.
Cette loi est le fruit de la réflexion de différents groupes
de travail mis en place par le ministre de l’éducation
nationale le 5 juillet 2012. Dans le groupe « Des élèves au
cœur de la refondation », un atelier appelé « La réussite
des élèves en situation de handicap » a fait ressortir 43
propositions fondées sur ces thématiques : les principes
de la loi, la formation, le parcours, l’orientation, l’inclusion,
la coopération avec le secteur médico-social, la place des
parents, l’hétérogénéité territoriale, l’accompagnement
humain, l’adaptation de l’école à la diversité des situations,
les examens.
Ces travaux ont abouti à la loi du 8 février 2013 dont les
grandes orientations se présentent comme suit.
Sur le plan pédagogique, l’accent est mis sur les
enseignements adaptés. Il devra être mis à disposition des
enseignants des outils et des ressources pédagogiques. Le
recours au numérique apparaît comme un accélérateur de
l’apprentissage. L’accent est également mis sur la formation
initiale et continue des enseignants. Cette loi mentionne la
prise en compte de la communication bilingue quant aux
projets linguistiques des élèves sourds. L’accompagnement
reste au cœur du suivi des élèves en situation de handicap
confrontés à de grandes difficultés.
Concernant l'enseignement agricole, il est proposé la
création de nouveaux postes en vue d’aider les élèves en
situation de handicap.
L’accent est également mis sur la coopération renforcée
entre l’éducation nationale et le secteur médico-social.
Concrètement, en 2013-2014, des moyens très importants
ont été mis sur l’accompagnement. Désormais, certains AED/
AVS bénéficient d’une CDisation, au bout de six années de
mission. Aussi, les nouveaux enseignants, ainsi que d’autres
personnels de l’éducation nationale, sont désormais formés à
la question du handicap.
Le travail effectué par les différents groupes et qui a fait
ressortir 43 propositions est déterminant. C’est ce socle de
propositions qui devra être sans cesse exploité, pour garantir
aux élèves handicapés la réussite éducative. Espérons que
les associations et les ministères concernés poursuivront
leur collaboration pour une mise en place rapide de ce
socle qu’ils ont désormais en commun. Aujourd’hui, plus de
225 563 élèves handicapés sont scolarisés à l’école ordinaire
contre 117 834 en 2006.
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P5
PRÉPARER L'AVENIR DES
JEUNES AVEC LES JEUNES
En dépit des progrès enregistrés, de nombreux obstacles freinent encore l’insertion pleine et entière
des jeunes handicapés dans la vie sociale et professionnelle. Parcours chaotiques marqués par
les ruptures, réticence des institutions éducatives, méfiance du monde de l’entreprise... Pourtant,
plus que jamais, les jeunes revendiquent le droit à une vie professionnelle et sociale épanouie.
Comment leur donner les moyens de choisir leur avenir, sans brider leurs ambitions ? C’est à ce
défi crucial que L’ADAPT répond aujourd’hui, avec volonté et pragmatisme.
Lorsque l’on observe de près la trajectoire des jeunes en situation
de handicap, depuis l’école jusqu’à l’insertion dans la vie active,
un constat s’impose : les ruptures de parcours sont une quasi
norme. Plus on avance en âge et moins nombreux sont les élèves
handicapés qui poursuivent leurs études. Souvent, c’est lors du
passage entre les différents niveaux d’enseignement que s’opère
le décrochage, notamment à partir de la charnière collège/lycée.
Alors que l’on dénombre 60 000 élèves en situation de handicap
dans les collèges, ils ne sont plus que 14 000 dans les lycées :
ce qui signifie que seuls 23 % des collégiens passent le cap...
La déperdition est également flagrante entre le secondaire et le
supérieur : parmi les élèves handicapés qui ont atteint le niveau
BAC, seuls 20 % poursuivent des études supérieures, soit quatre
fois moins que ceux de la population non handicapée.
UNE CULTURE D’ACCUEIL
ENCORE TROP FAIBLE
Plusieurs éléments expliquent ce phénomène. D’abord, la
culture d’accueil des élèves en situation de handicap n’est pas
développée de la même façon à tous les niveaux d’enseignement.
En l’occurrence, le lycée compte nettement moins d’ULIS que
l’école élémentaire ou le collège sur lesquels on a beaucoup
investi depuis la loi du 11 février 2005. En résulte un manque
de compréhension et de connaissance du handicap par les
intervenants de l’école ordinaire, mais aussi une absence de
sensibilisation des autres élèves et des parents. Quant à la jonction
du secondaire et de l’université, elle souffre du « passage »
d’un ministère à l’autre, sans continuité d’accompagnement :
les référents scolaires handicap ne sont pas habilités à
poursuivre l’accompagnement au sein des universités. Résultat :
les dispositifs existent mais manquent de lisibilité, restant
inaccessibles pour une majorité de bacheliers.
P6
TÉMOIGNAGE
“Le jeune handicapé, miroir grossissant
des problématiques adolescentes”
PHILIPPE JEAMMET
Professeur émérite de psychiatrie, spécialiste de l’enfant
et de l’adolescent.
« Le travail avec des adolescents en
difficulté dite psychiatrique est un miroir
grossissant de la problématique humaine.
La vie est une co-construction, un échange
permanent avec l’extérieur. Un être vivant
n’existe que dans un contexte :
quelqu’un qui est isolé va en mourir. Or,
quand on se sent rejeté, impuissant,
abandonné, on peut être tenté de retrouver
un sentiment de pouvoir dans une forme
de destructivité. Et celle-ci s’exprime
de différentes façons ; ça peut aller
du refus affectif aux comportements à
risque (addiction, anorexie mentale) en
passant par l’échec scolaire : « si j’essaie
de réussir et que j’échoue, je ressens la
douleur de l’humiliation. Au contraire,
si je ne m’intéresse pas à l’école, je
reprends une maîtrise sur ma vie ». Cette
destructivité n’est pas un choix, c’est une
façon de retrouver du pouvoir et d’éviter la
souffrance en s’anesthésiant. Mais il est
injuste que pour exister, on soit amené à
s’abîmer et ainsi à se priver de ses droits
essentiels : nourrir son corps, développer
ses compétences et sa sociabilité.
Diminuons les risques et pour cela, soyons
conscients de ce fonctionnement qui
nous appartient tous. Si l’on connaît cette
tentation, on peut se dire « il n’est pas juste
que je sois en train de m’embourber alors
que je voudrais justement le contraire ».
Mais attention, seule la rencontre avec les
autres peut permettre de s’en convaincre. »
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P7
{ PRÉPARER L'AVENIR DES JEUNES AVEC LES JEUNES
PROPOSER DE NOUVELLES
VOIES VERS L’EMPLOI
LE FLÉAU DES RIGIDITÉS ADMINISTRATIVES
S’ajoute le carcan administratif, qui gêne l’élaboration de
réponses sur-mesure. Le couperet des limites d’âge, par
exemple, est très pénalisant. Alors même qu’un jeune porteur
de handicap a besoin de mûrir son projet, on lui confisque la
possibilité de prendre son temps, de se tromper, de bifurquer. De
la même manière, il demeure compliqué de ménager des périodes
transitoires – des allers-retours entre le milieu ordinaire et les
établissements spécialisés – qui pourraient justement permettre
d’éviter les ruptures. Trop souvent, le retour en établissement
après scolarisation est vécu comme un échec, alors qu’il pourrait
constituer un tremplin. Ce contexte, conjugué au manque
d’accessibilité (tant du bâti pour les lieux de formation et les
lieux de « loisirs », que des supports pédagogiques), entraîne
un phénomène d’autocensure : l’orientation est alors choisie par
défaut, c’est-à-dire en éliminant tout ce qui n'est « pas possible »
Reste ensuite à « baliser » le parcours qui va de l’école à l’entreprise,
en modernisant les dispositifs de professionnalisation. Si l’on
veut renforcer l’employabilité des jeunes porteurs de handicap, il
est par exemple plus que jamais nécessaire de développer chez
eux des savoir-faire opérationnels, en phase avec les besoins
des recruteurs. Pour cela, l’alternance est aujourd’hui une voie
privilégiée ; il s’agit d’un cursus qui alterne les périodes en
entreprise et les périodes en centres de formation professionnelle.
En signant un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation,
un jeune découvre progressivement le monde de l’entreprise (ses
codes, ses usages), mais aussi les exigences d’un métier : il peut
ainsi valider ou au contraire repenser son projet professionnel.
FAIRE DU JEUNE UN CITOYEN
À PART ENTIÈRE
SCOLARISATION : CAP SUR LA QUALITÉ DE
L’ACCOMPAGNEMENT
Mais la reconnaissance par l’emploi ne saurait suffire à assurer
une intégration pleine et entière dans la société. C’est pourquoi, il
s’agit également de s’engager sur les questions de socialisation
et d’accès à la citoyenneté. La prise en compte de ces dimensions
par les établissements et les structures d’accompagnement est
primordiale. L’objectif est d’accompagner le jeune pour qu’il
puisse exercer pleinement sa citoyenneté, accéder au sport et
aux loisirs, accéder à une vie affective et sexuelle. Ainsi, des
solutions souples sont proposées pour maintenir au maximum la
personne dans son environnement : services mobiles, formations
à distance, hospitalisation de jour... Loin de n’être qu’un patient
ou un usager, chaque personne est avant tout considérée comme
un être social, le membre d’une famille, un voisin, un collègue.
En un mot : un citoyen. ■
Comment combattre cette résignation, et ce dès le plus jeune
âge ? Certes, les chiffres montrent une augmentation notable
du nombre d’enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire
– une évolution annuelle moyenne de 6,3 % depuis la loi de
2005 – mais L’ADAPT rappelle que le quantitatif ne doit pas
suppléer le qualitatif de l’accompagnement des enfants (par
exemple par la professionnalisation et l’augmentation du nombre
d’AVS). Aussi, de par l’éventail de ses activités, l’association
soutient activement la scolarisation et l’acquisition de l’autonomie
pour chaque enfant. Une autre de ses priorités consiste à
conseiller et informer les familles sur leurs droits et à les aider
à exprimer leurs besoins. Par ailleurs, l’association endosse un
rôle d’interface entre le secteur médico-social et l’Education
nationale, notamment en contribuant au développement
d’innovations pédagogiques. Une coopération essentielle pour
construire des réponses adaptées à la réussite de chaque enfant.
TÉMOIGNAGE
“Le chômage des jeunes : un
véritable gâchis collectif”
FRANÇOISE DUMONT
Vice-présidente de la Ligue des Droits de
l'Homme
« Parler de la jeunesse c’est parler
d’une jeunesse plurielle, frappée
par les inégalités. Nous sommes le
pays d’Europe dans lequel le poids
des origines sociales détermine
le plus les inégalités scolaires.
Dès le CP, la proportion d’enfants
en difficulté issus de milieux
populaires est plus élevée que celle
issue d’autres classes sociales.
Et ce phénomène s’accentue au
P8
fur et à mesure, le summum
se situant dans les grandes
écoles où certaines catégories
de la population sont quasiment
inexistantes. S’ajoutent ensuite
d’autres inégalités – territoriales,
d’accès aux services publics, de
genre – et des discriminations
liées par exemple aux origines
ethniques. Néanmoins, il est un
domaine où tous les jeunes, quels
qu’ils soient, rencontrent des
difficultés, c’est l’insertion dans le
monde du travail. Et ce alors même
qu’ils partagent une aspiration
commune : l’autonomie !
En France, en 2012, 22,7 % des
15-24 ans étaient au chômage.
Différentes explications sont
avancées – ils seraient mal formés,
mal orientés... Ce qui est certain,
c’est qu’une partie de nos élites
économiques considère la précarité
comme un passage obligé. Nous,
nous pensons que le chômage des
jeunes représente un véritable
gâchis collectif, qui induit une
concurrence entre les jeunes et les
anciens. Aussi, face au risque de
vivre dans une société de plus en
plus fragmentée, faite d’inégalités
intra et inter générationnelles,
nous en concluons à l’urgence
d’un nouveau pacte social. Il faut
s’attaquer à cette dynamique
inégalitaire, via une réforme de
fond de l’école et une régulation du
marché du travail. »
INTERVIEW
Se tromper fait partie de la
construction d’un parcours”
SOPHIE ORANGE, Maître de conférences en sociologie à l’Université
de Nantes
Qu’est-ce qu’un parcours
atypique ?
En France, l’institution scolaire
considère qu’un parcours
« normal » est un parcours
linéaire, réalisé de A à Z dans
une seule et même filière. Or,
quand on observe les parcours
de plus près, on s’aperçoit
que la majorité d’entre eux
est constituée d’arrêts, de
reprises, de réorientations et
de bifurcations. Ce sont ces
parcours-là qui constituent
la norme et ils ne sont pas
forcément synonymes d’échec.
C’est-à-dire ?
Se tromper fait partie
de la construction d’un
parcours. Généralement, il
y a une réussite à l’issue
d’un parcours atypique,
tout simplement parce que
l’année manquée a permis
à l’élève de trouver la voie
qui lui correspond vraiment,
mais aussi d’engranger de
l’expérience, de mûrir son
projet. Le problème, c’est que
les étudiants sont sommés de
réussir rapidement...
Les élèves handicapés
sont-ils plus exposés que
les autres ?
Oui, car comme ceux issus
de familles modestes, ils ont
tendance à se sentir peu
légitimes dans l’enseignement
supérieur et sont plus prompts
à intérioriser cette injonction
de réussite. Ainsi, il y a
urgence à dédramatiser et à
réhabiliter le droit à l’erreur !
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P9
TERRITOIRE CENTRE
vendredi 14 juin 2013 | Bourges
ABATTRE LES FRONTIÈRES
La scolarisation pour tous est un droit qui
s’applique également aux enfants handicapés
depuis la loi de 2005. Mais au quotidien, la
route est parfois jonchée d’obstacles et exige
l’implication de chacun (enseignants, enfants
valides, enfants porteurs d’un handicap).
Changer les regards et les mentalités, s’enrichir
mutuellement, bref remettre en question
nos idées préconçues est un pari de tous les
instants.
Témoignages croisés
|1
|2
|3
P10
COMMUNIQUER POUR SENSIBILISER
DE LA THÉORIE À LA PRATIQUE
Augmenter le nombre de jeunes en inclusion nécessite de
mettre en place un certain nombre de dispositifs pour briser la
méconnaissance du handicap. « Abattre les frontières, nous explique Jacques Godfroy, directeur territorial de L’ADAPT/Centre,
c’est communiquer sur ce que l’on fait, comment on le fait,
pourquoi, et avec quels résultats. Cela passe par l’organisation de diverses manifestations (portes ouvertes, fêtes, conférences) ou de tables rondes avec nos différents partenaires :
éducation nationale, MDPH, secteur médico-social, GRETA,
AFPA, ARS, Conseil général. » Les freins, reconnaît Jacques
Godfroy, peuvent être dus aux phobies de certains directeurs
d’établissements ou de quelques enseignants : « Certains ne
sont pas intéressés par l’accueil de jeunes en difficulté, ils préfèrent ne pas être ennuyés. Lorsqu’on arrive à entrer dans un
établissement c’est grâce à la personnalité de son directeur. »
Parfois les effectifs chargés des classes permettent aussi moins
de souplesse comme le souligne Frédéric Delanoue, professeur
de technologie : « Dans une classe à 25 voire 28 élèves, il n’est
pas toujours facile de rajouter 1, 2 ou 6 élèves en situation de
handicap, même s’ils ont une AVSi. Si les classes comptaient
20/22 élèves, les enseignants seraient plus attirés par ce dispositif d’inclusion. »
Mais parfois les blocages sont plus conjoncturels, liés à la mise
en place de transports des enfants handicapés vers les écoles,
qui demeurent coûteux.
Intégrer un enfant handicapé en classe ordinaire, c’est le
confronter au regard des autres. Comme le confie Alain Payen,
principal du collège Jean-Renoir à Bourges, qui accueille dans
une classe de 6e, six élèves handicapés de l'IEM de Trouy :
« Cela permet aux enfants valides de travailler sur leur propre
représentation des autres. On a par exemple vu des enfants
timides reprendre confiance en eux, comme on a observé des
enfants handicapés, communiquant peu, qui s’ouvraient aux
autres au contact d’enfants valides. » Même sentiment chez
Frédéric Delanoue. « En classe entière cela ne change en rien ma
manière d’enseigner. Les enfants de l’IEM ont essentiellement
des difficultés pour écrire mais ils sont aidés par une AVSi et une
professeure des écoles spécialisée. En TP, je les fais travailler
en binôme (un jeune du collège, un jeune de l’IEM) et c’est
enrichissant pour tout le monde. Nous étudions les transports,
en ce moment, c’est le roller et un enfant de L’ADAPT nous a dit :
« Moi je n’ai jamais fait de roller »... Ça fait réfléchir les autres ! »,
explique ce professeur (voir l’encadré « Témoignages croisés »).
« Même si la route semble longue, confie Serge Dubreule, de
l'IEM de Trouy, les élèves s’apprivoisent les uns les autres.
L’expérience est toute récente, c’est le début de l’histoire... »
|4
Six jeunes de L’ADAPT/Cher à Trouy (banlieue de Bourges) suivent, une demijournée par semaine, les cours en 6e au collège Jean-Renoir de Bourges. Tous
les 15 jours, la moitié de la classe se retrouve pour des TP (travaux pratiques) de
technologie, qui se déroulent en binôme (un jeune du collège, un jeune de l’IEM).
Parallèlement, tous les lundis, 7 jeunes de 4e et 3e du collège se rendent à L’ADAPT
de Trouy pour des ateliers culturels et scientifiques. Voici leurs témoignages.
Que vous ont apporté
l’échange et le travail avec
d’autres élèves en situation
de handicap de votre âge ?
BB : J’ai déjà été en
contact avec des enfants
handicapés au primaire,
j’ai participé à des voyages
ou des activités avec eux,
je ne me pose même pas la
question.
MJ : C’est comme s’ils
avaient toujours été dans
la classe. A la récréation
ils restent un peu entre
eux mais on arrive quand
même à créer des liens.
GE : J’ai un frère
handicapé donc je suis
plus empathique envers
les enfants handicapés.
En allant à l’IEM le lundi,
j’ai pu en apprendre
un peu plus sur les
différentes maladies dont
ils souffrent. Au début on
était tous timides, on avait
peur de ne pas arriver à
communiquer, mais les
personnes handicapées
manifestaient plus d’envie
de nous connaître et les
échanges se sont faits
naturellement. Je me sens
bien dans ce groupe.
Chloé, que peux-tu dire
sur cette journée que tu
passes au collège JeanRenoir tous les mardis ?
CS : Les premières fois
j’étais intimidée mais les
autres sont venus vers
moi pour me poser des
questions. Une fois un
élève m’a dit : « Tiens
y’a une handicapée ». Ça
m’a fait de la peine mais
maintenant je me sens bien
dans cette classe, et la
technologie est ma matière
préférée.
1 | BENJAMIN BOUTHORS,
11 ans, en 6e au collège Jean-Renoir.
2 | MATTEW JACQ,
12 ans, en 6e au collège Jean-Renoir.
3 | CHLOÉ SERVES,
15 ans, de L’ADAPT/IEM de Trouy, en 6e tous les mardis au collège Jean-Renoir.
4 | GILLIAN ESPINASSY,
15 ans, en 3e au collège Jean-Renoir, participe aux ateliers à L’ADAPT tous les lundis.
INTERVIEW
Je cherche à créer une dynamique de groupe”
JEAN-MARC ARMANSIN, AMP (Aide médico-psychologique) à L’ADAPT/Cher
“Une fois par semaine nous
accueillons 6 élèves de 4e et
de 3e du collège Jean-Renoir
à Bourges, en situation de
décrochage scolaire et
6 jeunes de L’ADAPT en
situation de handicap.
Ils participent à un atelier de
3 heures durant lesquelles,
par demi-groupes, et pendant
une heure et demie, j’anime
pour eux un atelier d’écriture
baptisé Slam tandis qu’une
collègue, enseignante
spécialisée, les fait travailler
sur un concours d’affiches en
partenariat avec l’association
FRANCAS. Ensuite nous
intervertissons les groupes
pendant l’heure et demie
suivante. L’atelier Slam sert à
libérer la parole. Le texte écrit
peut prendre la forme d’un
texte poétique, d’un texte mis
en chanson. Les collégiens
et les jeunes de l'IEM se
sont ouverts mutuellement,
ils laissent s’exprimer leur
personnalité et leur créativité
avec plus d'aisance. Ils
partagent ensemble, au-delà
de leurs différences, les
mêmes intérêts (musique,
conversation...). Ils "se
reconnaissent".
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P11
TERRITOIRE NORD/PICARDIE
lundi 18 novembre 2013 | Lille
IMAGINER
LA SCOLARITÉ AUTREMENT
L’UNITÉ D’ENSEIGNEMENT
Le devenir scolaire d’un enfant handicapé mobilise autour de lui tous les acteurs qui luttent
pour lui assurer les meilleures chances de réussite et éviter les ruptures. Pour cela, l’unité
d’enseignement de Cambrai accueille des enfants et des étudiants de 0 à 20 ans. Fondée sur le
principe de l’inclusion à tous les niveaux de la scolarité, elle est le premier dispositif de ce type
en France et propose des passerelles entre l’Education nationale et L’ADAPT.
Depuis la loi du 11 février 2005, la scolarisation des enfants
handicapés en milieu ordinaire a fortement augmenté, avec la
création de 1 500 postes d'auxiliaires de vie scolaire individuels
(AVSi) à la rentrée 2012 et 8 000 à la rentrée 2013. Malgré
tout, les besoins réels sont loin d’être comblés, mais surtout,
les professionnels du handicap attirent l’attention sur la qualité
de l'accompagnement et les ruptures de parcours, encore
fréquentes.
QU’EST-CE QU’UNE RUPTURE
DE PARCOURS ?
Les ruptures peuvent être liées à la santé (évolution d’une maladie,
douleur due à la station assise prolongée, fatigue récurrente,
intervention chirurgicale), qui ne permet pas de répit dans le
rythme de l’enfant, au mal-être psychologique, aux difficultés
sociales, à l’inadaptation des lieux de scolarité (passage d’un
établissement adapté à un autre pensé uniquement pour des
valides), voire à la malveillance des autres enfants : « Moqueries,
brimades, les enfants handicapés sont parfois confrontés à la
bêtise humaine et ils se découragent », explique Thierry Awner,
chef du service de kinésithérapie au centre de rééducation
fonctionnelle de Cambrai. Pour Michel Trollé, directeur territorial
de L’ADAPT/Nord-Picardie, « il y a deux étapes délicates : la fin
du primaire, et la fin du collège. Lors d’une rupture de parcours,
il faut environ un an pour se repositionner, mais ce n’est pas un
an perdu, puisqu’on repart sur des bases pertinentes ».
RÉPONDRE AVEC UN PARCOURS
PERSONNALISÉ
Un programme d’accompagnement doit se mettre en place,
adapté à chaque enfant/adolescent. « On intervient sur le plan
P12
TÉMOIGNAGE
“J’ai trouvé ma voie malgré
mon handicap”
ALEXANDRE BRICOUT
« J’ai 18 ans et je suis interne à l'IEM
de Cambrai depuis novembre 2009.
Auparavant, j’ai suivi une scolarité en
milieu ordinaire jusqu'en 2005, année
de mon CM1. Cette année-là, de graves
soucis de santé m’ont obligé à prendre
un traitement qui a affecté ma mémoire,
ce qui perturbe mon expression orale. Je
suis alors entré en milieu spécialisé pour
poursuivre ma scolarité avec l’aide d’une
accompagnatrice scolaire.
Malheureusement en 3e, j’ai mesuré
les difficultés que j’avais dans les
apprentissages théoriques et décidé
d’arrêter ma scolarité. Après plusieurs
stages en entreprises ordinaires et
adaptées (ESAT), tour à tour dans une
blanchisserie, une maison de retraite,
en cuisine, en service en salle, ou encore
pour un service de sous-traitance chez
Renault, j’ai réalisé mon rêve lors d’un
stage de 15 jours à l’hôpital de Cambrai
au service des personnes âgées touchées,
entre autres, par la maladie d’Alzheimer.
J’ai alors découvert le BPJEPS (brevet
professionnel de la jeunesse, de l'éducation
populaire et du sport), passé les tests de
sélection avec succès avant d’être admis en
formation avec l'option animation sociale
en septembre 2013. »
INTERVIEWS CROISÉES
scolaire mais également sur la gestion de la vie quotidienne,
informe Thierry Awner. Comment un enfant peut-il manger à la
cantine par exemple alors qu’il est en fauteuil roulant et que les
tables ne sont pas à la bonne hauteur ? Comment peut-il aller
aux toilettes seul ? Avec quelle intimité ? Comment dispenser des
soins à un enfant dans un établissement peu ou pas équipé ?
Bref, toutes ces situations nous amènent sans cesse à repenser
l’environnement de l’enfant en fonction des contraintes et des
aides à apporter. » Les difficultés rencontrées ou la prise de
confiance d’un jeune peuvent amener à modifier son parcours.
L’élève peut passer de la scolarisation en établissement à une
inclusion partielle ou totale dans une école, ou vice versa :
« Aucune décision n’est définitive, des adaptations dans le
parcours scolaire sont fréquentes », indique Michel Trollé.
LES PISTES D'AMÉLIORATION POSSIBLES
Pour arriver à une scolarité de qualité, L'ADAPT propose toute
une série de recommandations, comme l'allégement des
procédures administratives, le renforcement de la coopération
entre l'Éducation nationale et le secteur médico-social, essentiel
pour construire des réponses sur-mesure, la remise à plat du
projet personnalisé de scolarisation (PPS), rendu obligatoire
par la loi de 2005, mais peu appliqué, un plan de formation
« handicap » pour tous les professeurs du 1er et du 2nd cycles,
et le renforcement des ULIS, très peu présentes au lycée : « Sur
notre secteur, explique Michel Trollé, seuls deux lycées en sont
pourvus. Il y a peu de jeunes handicapés au lycée, ce qui explique
le peu de passage dans le supérieur. Nous travaillons aussi sur
l’inclusion scolaire à vocation sociale : même si un élève ne peut
pas passer un diplôme complet il validera certaines matières et
fréquentera d’autres jeunes de son âge, ce qui lui permettra de
vivre des expériences sociales essentielles à son bien-être. » ■
Créer du lien entre le milieu
enseignant et le personnel médicosocial”
BRUNO LEDRU, chef des services socio-éducatifs et SASSPro
DENIS DUQUESNOY, coordinateur de l’éducation nationale de l’unité
d’enseignement de L'ADAPT/Nord (Cambrai et Maubeuge)
Qu’est-ce qu’une unité
d’enseignement ?
DD : Ce sont les offres
scolaires proposées en
établissement par l’Éducation
nationale pour accueillir des
élèves handicapés : CLIS, ULIS,
plateformes d’observation,
inclusions modulables en
milieu ordinaire...
Quel est votre rôle ?
DD : Les deux mots qui
résument notre action sont
adaptabilité et réactivité.
On ouvre des portes et on
crée des passerelles entre le
parcours de vie et le parcours
scolaire afin d’éviter les
ruptures.
BL : Ca peut être, au cas par
cas, la mise en place d’aides
techniques, l’apport d’un
ordinateur, d’un système de
commandes vocales,
la prévoyance d’une AVSi,
mais le plus important c’est le
lien qu’on va réussir à créer
entre le milieu enseignant et
le personnel médico-social.
Quels freins rencontrezvous ?
DD : L’inclusion scolaire est
synonyme d’inconfort pour
le corps enseignant. Les lois
sont là mais les freins humains
sont terribles. On explique à un
professeur qu’il n’a pas
24 élèves + 1 élève handicapé
mais 25 élèves. On passe
notre temps à dédramatiser.
BL : L’inclusion est un
processus en marche que l’on
doit accompagner avec l’aide
de nos partenaires. On est là
pour la guider. C’est une autre
manière d’imaginer la scolarité.
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P13
TERRITOIRE ÎLE-DE-FRANCE
mercredi 29 mai 2013 | Paris
LES DISPOSITIFS DE
DÉCLOISONNEMENT
UN ACCOMPAGNEMENT PLURIEL
Un accompagnement suivi est nécessaire pour éviter toutes les ruptures dans le parcours des
jeunes jusqu’à l’insertion sociale et professionnelle. Ils pourront ainsi co-construire leur projet
individualisé, en s’appuyant sur les acteurs du réseau associatif, institutionnel, de l’Éducation
nationale...
« L'accompagnement des jeunes est pluriel et doit prendre en
compte leur projet professionnel et leur projet de vie, précise
Jocelyn Méli, directeur territorial de L’ADAPT/Ile-de-France. Les
équipes qui accompagnent un jeune doivent être extrêmement
attentives à toutes les problématiques qu’il rencontre pour
l’aider à identifier les causes des échecs successifs et traiter les
différentes composantes de son projet individualisé. Il s’agit de
l’aider à devenir le plus autonome possible dans ses démarches
et à trouver sa place dans la société. Un travail de longue haleine,
étape par étape, qui nécessite de donner du temps au jeune pour
qu’il s’approprie son projet en portant un regard bienveillant sur
lui-même afin de retrouver confiance en lui. »
TRAVAILLER EN RÉSEAU
Souvent il y a plusieurs problématiques à gérer simultanément :
logement, famille, santé, transports, reprise d’un parcours de
professionnalisation, recherche d’emploi... « Les solutions sont
un peu cousues main, elles passent nécessairement par la mobilisation des acteurs de l’insertion en fonction de leur expertise. La
confrontation des différents regards enrichit l’accompagnement.
L’ADAPT a un rôle de déclencheur » remarque Jocelyn Méli. Ces
situations complexes demandent aux équipes de travailler en
réseau interdisciplinaire en nouant des partenariats pour pouvoir
accompagner le jeune. « On joue la carte inclusive, c’est un axe
fort du projet associatif avec nos partenaires : l’Éducation nationale, le milieu associatif, les services sociaux... parallèlement à
un travail de sensibilisation autour de la citoyenneté, de la scolarité, du travail, de la vie affective et sexuelle... »
A Paris, par exemple, un Service d’accompagnement à la vie
sociale (SAVS), qui s’adresse prioritairement à des jeunes,
travaille en lien avec l’ALJT (Association pour le logement des
jeunes travailleurs) pour leur permettre d’obtenir une chambre
dans une résidence de jeunes travailleurs. Avoir un logement
dans un cadre de vie sécurisé leur permet de se stabiliser et
P14
TÉMOIGNAGE
“Si on nous donne les moyens, on peut
réussir là où tout le monde pensait que l’on
échouerait.”
LAURELINE LODYGENSKY, 20 ans
« J’ai été suivie depuis ma petite enfance
par un SESSAD de L’ADAPT tout en
étant dans des CLIS et ULIS où on nous
surprotège. Alors au moment du lycée,
j’ai eu envie d’aller en internat, une école
normale avec une AVS où j’étais la seule
à être différente - j’ai une hémiplégie
de naissance. Je pouvais aussi faire de
l’équitation, ma passion : si je ne peux pas
courir, sur un cheval je suis comme tout
le monde. En rentrant à Paris, j’ai fait de
nouveau appel à L’ADAPT pour m’aider à
repasser le BAC ES et m'aiguiller dans
mon orientation. J’aurais voulu travailler
avec les chevaux mais toutes les portes
se sont fermées, alors j’ai commencé par
une année de CAP Photo où je me suis
découragée. Par chance j’ai pu intégrer
une deuxième année de BTS Photo, là il
y a de l’entraide et on est tous motivés.
L’éducateur, le même depuis le début, m’a
accompagnée d’une étape à l’autre, pour
m’aider à prendre mon indépendance,
apprendre à me débrouiller dans la vie
quotidienne, faire valoir mes droits...
ainsi que dans toutes les démarches :
dossiers pour les écoles ou stages, CV,
lettre de motivation... mais c’est moi
qui les faisais. Je pense que toute seule
j’aurais abandonné. Si on nous donne les
moyens, on peut réussir là où tout le monde
pensait que l’on échouerait. A l’avenir, je
voudrais être photographe notamment dans
l’événementiel équestre. »
de rechercher un emploi ou une formation qualifiante dans de
bonnes conditions. L’ADAPT espère pouvoir étendre le partenariat
à d’autres départements franciliens.
ACCÉDER AU MILIEU ORDINAIRE
DE TRAVAIL
Autre initiative dans l’Essonne, pour des jeunes scolarisés dans
l’éducation spécialisée en situation d’échec et qui ne pouvaient
pas intégrer l'apprentissage : « Nous avons sollicité la Chambre
des métiers pour voir comment ils pouvaient ouvrir leurs
formations, avec l’objectif de permettre aux jeunes de s’inscrire
dans un dispositif de droit commun : passer un CAP et trouver du
travail ensuite. Progressivement ils arrivent à remettre le pied à
l’étrier avec des formations qualifiantes : cuisinier, mécanicien...
On arrive à susciter l’envie » développe le directeur territorial.
Les jeunes qui ont besoin d’être soutenus, sont accompagnés
un certain temps, par des équipes de L’ADAPT dans ce parcours.
L’ESAT Hors-les-murs d’Evry a créé une section Jeunes
(voir interview) pour leur permettre de construire un projet
professionnel, d’identifier leurs aptitudes, leurs compétences
et de se qualifier. Ils peuvent ainsi tester et découvrir, à travers
des mises à disposition en entreprise, un certain nombre de
métiers jusqu’à ce qu’ils trouvent celui qui leur convient, et
décrocher un CDI. Les jeunes sont accompagnés sur leur lieu de
travail par un jobcoach, qui sensibilise les équipes de travail et
« explique le mode d’emploi du jeune » précise Manuèle Masset.
Ainsi, Karty, entré en septembre 2011, qui a témoigné lors de la
conférence de mai 2013, a été embauché en septembre 2012
par une grande enseigne de bricolage, après différentes mises
à disposition. ■
INTERVIEW
Ouvrir des possibles ”
MANUÈLE MASSET, directrice adjointe en charge de deux ESAT
Hors-les-murs à Chatillon et Evry
Que proposez-vous aux
jeunes ?
Beaucoup de jeunes ayant des
troubles cognitifs sont sans
solution, n’ayant ni formation,
ni diplômes pour accéder à
l’emploi. A Evry nous avons
créé une section jeunes de
16 à 25 ans. Ils suivent un
module de remobilisation,
prennent le temps de définir
leur projet, avec expériences
en entreprise. Petit à petit ces
25 jeunes vont monter en
compétences. Ils pourront être
mis à disposition en entreprise
avant d’être embauchés,
certains choisiront de s’orienter
vers une formation ou d’aller
en ESAT.
Qu’est-ce que la Passerelle
bleue ?
C’est une année de
préapprentissage
accompagnée par l’Éducation
nationale que suivent
15 jeunes issus d’ULIS.
Remises à niveau et stages
de découverte métiers, leur
permettent ensuite d’accéder à
l’apprentissage dans un CFA.
Quels en sont les objectifs ?
Ces dispositifs
d’accompagnement ouvrent
des possibles pour chaque
jeune, en lui permettant de
retrouver sa capacité à agir en
accumulant des expériences
positives, de participer à
la co-construction de son
parcours vers une formation
ou un travail. On part de ce
qu’il sait faire et il va gagner
en autonomie, compléter
les savoirs de base... Dans
son projet, il y aura toujours
quelque chose qui va pouvoir
se concrétiser.
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P15
TERRITOIRE SUD RHÔNE-ALPES/MÉDITERRANÉE
mercredi 26 juin 2013 | Toulon
TRAVAIL PARTENARIAL
UN FACTEUR DE RÉUSSITE
Afin de répondre aux besoins des jeunes à chaque étape de leurs
parcours, les acteurs du handicap et de l’emploi conjuguent
leurs efforts et leurs savoir-faire. Qu’ils soient associatifs ou
institutionnels, leur coopération garantit un accompagnement
pertinent. Visite dans les coulisses de ce travail en réseau.
Profiter de l’expertise particulière de chacun et mutualiser les
compétences : tel est le mot d’ordre qui s’impose aujourd’hui
parmi ceux qui accompagnent les jeunes porteurs de handicap.
En Avignon, l’ITEP dirigé par Sylvain Favereau accueille des
jeunes porteurs de troubles psychologiques âgés de 12 à 18
ans. L’établissement ne disposant pas d’enseignant en interne,
la majorité des jeunes sont inscrits à temps partiel au collège, en
milieu ordinaire ou en milieu adapté (Segpa). Or, cette scolarisation
s’appuie sur une collaboration étroite entre les professionnels
de l’ITEP et les enseignants : « Ces jeunes connaissent des
difficultés psychologiques, notamment un rapport difficile avec
l’autorité, explique le directeur. Aussi, les enseignants ont besoin
d’être soutenus pour décrypter leur comportement ou intervenir
le cas échéant.» Même chose avec les CFA que certains jeunes
intègrent à l’âge de 16 ans pour suivre un apprentissage.
MIEUX CONNAÎTRE SES CAPACITÉS
La direction de l’ITEP s’adresse ensuite à la Mission locale, qui
accompagne les 16-25 ans vers l’emploi, en proposant tout
d’abord un diagnostic de situation. Puis, là encore, le réseau
entre en action. Ainsi, lorsqu’il est nécessaire de mieux cerner la
problématique du jeune (et à condition que celui-ci possède une
RQTH), elle se tourne généralement vers L’ADAPT pour mobiliser
une PPS (prestation ponctuelle spécifique). Exemple en DrômeArdèche, où ce dispositif s’adresse au handicap intellectuel ou
psychique. « Le problème numéro un de ce public est l’absence
de repères quant à ses capacités réelles sur un poste de travail, »
explique Julie Achaume, responsable du service insertion
professionnelle de L’ADAPT/Drôme-Ardèche. L’objectif de la
PPS est de les évaluer : degré d’autonomie, minutie, vitesse de
travail, capacités d’organisation et de raisonnement. Cela passe
par un bilan neuro-psychologique (qui jauge les troubles cognitifs
et leurs incidences) et/ou des mises en situation en entreprise.
Pour beaucoup, la PPS est un moyen de mieux se connaître,
éventuellement de sortir du déni ou au contraire, de gagner en
confiance.
P16
TÉMOIGNAGE
“J’ai retrouvé un peu de confiance en moi ”
CASSANDRA BUISSON, 23 ans,
bénéficiaire d’une PPS.
« Après mon parcours en IME, j’ai passé
un CAP de restauration dans un CFA. Mon
premier contrat a duré six mois puis je
me suis retrouvée au chômage. J’ai alors
sollicité la mission locale et L’ADAPT m’a
proposé une PPS. Ce dispositif m’a fait
évoluer : d’abord dans ma capacité à voir
ce qui est fait pour moi. Ensuite, L’ADAPT
m’a orientée vers de nouveaux secteurs
d’activité : j’ai passé récemment un
entretien pour devenir agent d’entretien
à l’hôpital de Valence. Ça n’a pas abouti
mais ça a été une bonne expérience. Puis
j’ai retrouvé un peu confiance en moi.
J’ai passé une évaluation qui consistait
à fabriquer une boîte à bijoux en bois : je
me suis très bien débrouillée, j’ai constaté
que j’avais des capacités. Je suis aussi
accompagnée par un SAVS, qui m’aide
notamment pour tout ce qui est gestion
administrative. C’est rassurant de savoir
que je peux les solliciter. Ça me permet de
ne pas me stresser dès qu’il y a quelque
chose de nouveau dans mon quotidien. »
FAIRE LE BON CHOIX D’ORIENTATION
RÉUSSIR L’ENTRÉE DANS L’ENTREPRISE
Cette PPS, comme les autres bilans et/ou évaluations proposés
par les associations, représente alors une aide précieuse,
notamment pour les équipes techniques des MDPH. « Chaque fois
que nous devons définir une orientation, nous nous appuyons sur
le travail mené par les associations spécialisées, explique Michel
Maingon, référent insertion professionnelle au sein de la MDPH
du Var. Quel que soit le handicap, cela nous permet de savoir si le
jeune a bâti un projet professionnel clair et réaliste, s’il possède
les qualifications nécessaires, etc. ». Ensuite alors, l’orientation
se décide ; soit vers le milieu protégé (ESAT), soit vers le milieu
ordinaire, soit encore vers une formation complémentaire pour
étayer ses compétences. Pour Evelyne Perrin, chargée de
mission au sein de Pôle emploi, qui pilote le partenariat travailleur
handicapé, l’objectif est clair : accompagner ces jeunes vers la
réussite « Car comment assurer une insertion professionnelle en
ignorant les besoins liés au handicap ? » s’interroge-t-elle.
Ainsi, toujours dans cet esprit partenarial, Pôle emploi multiplie
les occasions de présenter son « offre de services » aux acteurs
du handicap (associations, établissements) afin qu’ils s’en
saisissent dès qu’un besoin se présente pour un candidat à
l’emploi. « Par exemple, nous pouvons organiser une évaluation
en milieu de travail ou financer une formation courte d’adaptation
au poste pour un jeune travailleur handicapé », rappelle Evelyne
Perrin. Dresser des passerelles avec le milieu professionnel
ordinaire, c’est aussi le rôle que remplit l’ITEP. Car comme l’école
précédemment, l’entreprise a besoin du soutien d’experts pour
comprendre le handicap et cesser d’en avoir peur. « Souvent
les employeurs sont craintifs à l’idée d’embaucher un jeune
travailleur handicapé, indique Sylvain Favereau. Là encore, un
partenariat étroit et suivi peut garantir le succès. »
INTERVIEW
Coordonner pour garantir
un accompagnement adapté ”
PHILIPPE BROUSSE, directeur au sein de Viv’act
Qu’est-ce que Viv’act ?
Un dispositif d’appui au
service des acteurs de
l’insertion professionnelle
des jeunes handicapés
drômois, âgés de 16 à 26
ans, dans le milieu ordinaire
de travail. Son objectif : leur
garantir un accompagnement
socioprofessionnel adapté,
dans des délais rapides.
Vos missions ?
L’information sur les dispositifs
jeunes handicapés. Ensuite,
un appui ponctuel par rapport
à des situations données :
exemple, si la mission locale
nous sollicite pour un jeune
qui a besoin d’une adaptation
dans un centre de formation,
nous faisons le lien avec un
expert. Enfin, nous pilotons
un groupe appui ressources,
qui réunit tous les deux mois
les acteurs de l’emploi : la
mission locale, la chambre des
métiers, Cap emploi, la MDPH,
L’ADAPT, etc.
évoquant des cas particuliers.
C’est l’occasion de faire un
point sur le besoin en SAVS.
En effet, le Conseil général
nous confie une enveloppe de
dix-sept SAVS, mobilisables
en moins d’un mois : une
véritable plus-value pour
gagner en souplesse et en
réactivité.
A quoi sert le GAR ?
C’est une instance d’échanges
au sein de laquelle nous
informons les acteurs, tout en
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P17
TERRITOIRE RHÔNE-ALPES/AUVERGNE/LIMOUSIN
mercredi 28 mai 2013 | Lyon
“Leur donner envie d’avoir envie”
ON NE FAIT PAS POUR MAIS
Dans le cadre d’Initiative 500 de Danone,
L’ADAPT/Haute-Savoie accompagne des
jeunes en pré-qualification : quatre mois
pour une remise à niveau, développer
autonomie, savoir-être et savoir-faire.
“Préparer l’avenir des jeunes avec les jeunes” est le deuxième axe du projet associatif de
L’ADAPT. Une priorité : « On ne fait pas pour mais avec et par les jeunes » souligne Thierry Delerce,
directeur territorial Rhône-Alpes/Auvergne/Limousin. Tout un travail de fond a été mené dans la
région pour impliquer et faire participer les jeunes. Certaines actions, où ils ont pu déployer leur
créativité, ont été présentées lors des Interactives à Lyon.
Permettre à une vingtaine de jeunes de se
qualifier, « leur donner envie d'avoir envie,
les responsabiliser, travailler l'estime de
soi… » sont, selon un formateur, les objectifs
de la pré-qualification assurée par L’ADAPT
depuis 2010 en Haute-Savoie, dans le cadre
d’Initiative 500 de Danone. Ce dispositif
doit permettre, sur plusieurs années, à
500 jeunes de se former en alternance et
d’intégrer le marché du travail. Un projet
de territoire qui associe la Société des eaux
minérales d’Évian (Danone) et d’autres
entreprises, dans le cadre d’un partenariat
avec Pôle emploi, le Conseil régional…
AVEC ET PAR LES JEUNES
« Il faut intégrer les jeunes, les mettre dans la boucle. Il y a une
cohérence entre ce que l’on fait au long court et les événements,
explique Thierry Delerce. C’est pourquoi nous avons appelé la
conférence de Lyon « les Interactives de L’ADAPT », un point
d’orgue de tout ce qui a été fait avec eux en amont sous
différentes formes plutôt festives. Une occasion d’aller plus loin
que le travail d’accompagnement quotidien pour aider chaque
jeune à progresser vers ce qu’il veut et peut faire, en lui redonnant
une chance. Il nous faut laisser les jeunes s’exprimer et même si
une de leurs idées ne nous paraît pas bonne, l’essayer en ne se
limitant pas a priori. » Il s’agit d’aider le jeune à puiser en lui la
capacité à agir, de trouver les ressources qui lui permettront de
continuer son chemin quand il aura quitté L’ADAPT.
UNE CONFÉRENCE « INTERACTIVE »
Flashmob, interventions dans les écoles, Cafés des Réussites
dans des lycées, saynète de théâtre, slam, Handicafé©, fête
du Printemps, mises en situation (parcours en fauteuil roulant,
lunettes déformantes)... une vingtaine d’initiatives très variées
ont été montées tout au long de l’année, sur l’ensemble du
territoire, dans des écoles ou en ville. L’occasion de créer des
rencontres et de sensibiliser un large public... « C’est important
pour les jeunes d’irradier à l’extérieur et parfois de témoigner de
ce qu’est leur particularité, précise Thierry Delerce, cela permet
de vrais échanges. C’est bien aussi qu’ils puissent confier leurs
galères, leurs inquiétudes et leurs espoirs comme dans le slam. »
Les Interactives du 28 mai 2013 ont mis la lumière sur certaines
des actions développées et donné toute leur place aux jeunes
en un lieu prestigieux et symbolique, l’École Normale Supérieure
de Lyon. Le directeur territorial a animé la journée avec une
jeune étudiante « pour être cohérent ». Entre les différentes
interventions sur l’emploi ou la scolarisation, des séquences
étaient animées par les jeunes sous différentes formes : saynète
de théâtre, films, dont le Flashmob, musique et slam. Plusieurs
jeunes ont aussi témoigné de leurs parcours.
P18
3615 CODE FACEBOOK
« Au lieu de nous soûler parce qu’on passe notre temps sur
Facebook, essayez pour une fois de comprendre pourquoi on
le fait. Qu’est ce qu’on veut ? Une vie normale, un boulot, une
femme/un mec, des enfants, une maison, des copains. Mais pour
nous, aujourd’hui, tout cela c’est du virtuel. Alors, on s’invente
une vie meilleure. Mais préparez-nous une société où on aura
notre place et on pourra alors se parler et pas par SMS » lance
un jeune dans la saynète de théâtre écrite par Jean-Luc Dhédin,
directeur de L'ADAPT/Ain.
Un questionnaire a été élaboré pour aller à la rencontre des
jeunes, leur demander ce qu’ils aiment ou pas, comment ils
se projettent dans l’avenir, mieux connaître leurs modes de
communication, leurs attentes... Les réponses étaient simples :
un conjoint, un travail... comme les autres. Deux ou trois
seulement veulent être champions de foot ou star TV ! Cela a
servi de matière à la pièce 3615 code Facebook, jouée et mise
en scène par des encadrants et des jeunes. Avant les répétitions
ils déjeunaient ensemble, l’occasion d’échanger librement.
« Nous accueillons des jeunes de 16 à 20 ans qui ont des
grosses difficultés d’apprentissages pour construire un projet
professionnel et leur permettre d’entrer dans la vie active »,
développe Jean-Luc Dhédin. « En préparant la conférence nous
nous sommes dit que souvent, nous, adultes, nous pensons et
faisons pour eux. Nous nous sommes demandé ce qu’un jeune
veut, comment il voit sa vie. Ce fut intéressant au niveau de la
structure, quelques jeunes ont parlé très librement nous disant
“Vous imaginez des choses pour nous, mais ce n’est pas ce que
nous voulons”. Il faut que nous arrêtions de penser tout pour eux
mais travaillions avec eux en utilisant les outils avec lesquels
ils sont bons, en valorisant leurs capacités, en reconnaissant ce
qu’ils savent faire... Il nous faut changer certains modèles. »
Au programme de la formation de quatre
mois, dont six semaines en entreprise :
remise à niveau des savoirs de base
(maths, français), savoir-faire et savoirêtre notamment les codes de l’entreprise,
autonomie, techniques de recherche
d’emploi… par « une approche ludique
des apprentissages » en petit groupe.
Les stagiaires pourront confirmer leur
choix de métier : logistique, secrétariat,
restauration… « La formation est gérée
comme une formation d’adultes, en
s’adaptant à leurs besoins, explique
Elodie Bouzon, chargée des Actions
Conventionnées. Chaque jeune est
accompagné par un référent pour maintenir
la motivation, lui apprendre à se prendre
en main, à se projeter dans l’avenir, en le
laissant faire par lui-même. Il s’agit de le
rendre acteur de sa vie en sachant qu’on est
là si nécessaire. »
TROUVER EN SOI L’ESPOIR D’Y CROIRE
Quelques séances d’atelier slam ont été proposées aux jeunes
de l’Ain. Des textes forts découverts sur la scène des Interactives.
Extraits.
Un sort m’est jeté
par rapport à mon corps #
PAR FLORIAN LACOURIEUX,
20 ans
Toute mon aventure est
à reconstruire
Pour en finir avec les blessures
Avec cette atmosphère
Ces horaires lourds
Cette terre sans amour#
Je voudrais de la volonté de
la stabilité pour voyager et
m’orienter.
Je voudrais bâtir découvrir
devenir star
PAR AYOUB BZILI, 18 ans
Avec mon handicap
On m’a demandé
t’es cap ?!
Je viens stopper
vos larmes
Arrêter le vacarme
Je veux juste
faire du slam !
Vous passer le salam !
PAR MAGALI TRUANT, 18 ans
Avancer, ne pas reculer
Ne pas se tourner
vers le passé
Parler, discuter
Transmettre à nos aînés
Trouver en soi l’espoir
d’y croire
Bosser, travailler
pour manger
Accumuler sans se brûler
Bâtir, construire pour
essayer de s’en sortir
S’entourer pour être aimée
Élever, éduquer sans
s’imaginer le pire
Voyager…
PAR CHARLÈNE LAITI, 20 ans
Je voudrais voyager pour
découvrir
Transmettre et partager
Travailler pour bâtir mon
avenir
Voyager pour m’évader et
rêver
Revenir et affronter l’avenir
Pour trouver : stabilité et
réussite
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P19
TERRITOIRE NORMANDIE
mercredi 28 mai 2013 | Hérouville-Saint-Clair
LA CONSTRUCTION D’UN
PROJET PROFESSIONNEL
POSER LES BASES
Avant même d’envisager son insertion professionnelle, un jeune porteur de handicap doit bien
souvent mener un travail pour se projeter dans l’emploi, autrement dit : se donner le droit de
réussir. Seul un accompagnement pluridisciplinaire peut l’y aider. Décryptage.
Si une insertion durable dans le monde du travail s’appuie
sur des savoir-faire, elle dépend aussi de la confiance en soi
et de l’aptitude sociale : le respect des règles, la capacité à
communiquer, le comportement. C’est pourquoi toutes ces
dimensions sont intégrées dans l’accompagnement proposé aux
jeunes handicapés, et ce dès le plus jeune âge. « Bien sûr notre
travail porte sur l’éveil, les soins et les apprentissages scolaires,
précise Claire Guilhen-Wetton, directrice adjointe du pôle Enfants
de L’ADAPT/Basse-Normandie. Mais ce n’est pas tout : nous
travaillons aussi sur la construction d’une image valorisante de la
personnalité. Plus celle-ci sera bâtie sur des bases solides, plus
le jeune sera à même, plus tard, de s’approprier un sentiment de
compétences. » Après 14 ans, ce travail se poursuit avec, cette
fois, la construction du projet professionnel en ligne de mire. Au
travers de mises en situations très progressives, les habiletés
sociales et comportementales sont évaluées, c’est-à-dire la
capacité à se présenter ou à faire face au regard d’autrui...
ACQUÉRIR UNE AUTONOMIE
S’INSCRIRE DANS UNE DYNAMIQUE
Pourtant, tous les jeunes en situation de handicap ne suivent
pas un parcours linéaire en établissement. Exemple avec les
jeunes porteurs d’une déficience cognitive dont beaucoup
connaissent des périodes de déscolarisation, parfois en raison
de problèmes médicaux ou familiaux, parfois aussi parce qu’ils
sont en attente d’une place en établissement après un parcours
scolaire chaotique. Résultat, à l’approche des 18 ans, certains
sont en rupture totale avec l’institution. « Lorsqu’ils nous arrivent,
ces jeunes ont parfois été inactifs pendant un, deux ou trois
ans, note Annie Desleux, responsable du dispositif de « Préprofessionnalisation jeunes » de L’ADAPT/Basse-Normandie.
« Bien sûr notre objectif final est de les aider à bâtir un projet
professionnel. Mais pour y arriver, nous leur proposons de
travailler sur tous les autres domaines de leur vie : l’autonomie,
la gestion du quotidien, l’envie de s’engager. »
Le dispositif dure quarante-huit semaines, durant lesquelles le
jeune bénéficie du suivi d’une équipe pluridisciplinaire : médecin,
psychologue, infirmière, ergothérapeute, éducateur spécialisé,
formateurs et chargé d’insertion. Après un « diagnostic »
pour identifier ses difficultés, des ateliers lui sont proposés remédiation cognitive, atelier créatif, découverte des activités
sportives, vie quotidienne - qui vont permettre au jeune de
retrouver des repères, un cadre et une image valorisante de luimême. En Haute-Normandie, le CRP de L’ADAPT propose aussi
plusieurs modules pour aider les jeunes à se « redynamiser ».
« Pour ceux qui sont le plus en rupture, l’idée est, avant de
remettre en route les apprentissages de base, de réapprendre
les codes de la vie en groupe (respecter des horaires, travailler
collectivement le groupe, etc.) », explique Claire Truffaut,
formatrice. « Quant aux autres, un module de pré-orientation les
invite à se concentrer sur le projet professionnel, pour en dessiner
les contours (vers quel secteur ou quel métier je souhaite me
tourner ? Quelle qualification viser ? etc.). »
TÉMOIGNAGE
“Je m’apprête à créer ma micro-entreprise”
CÉDRIC CHANTREUIL, 20 ans, interne au sein de l’IEM de L’ADAPT de Saint-Lô.
« Après l’obtention d’un CFG
en 2010, l’IEM m’a aidé à faire
émerger des pistes d’orientation
et mon intérêt pour le graphisme
est apparu. J’ai suivi une première
formation en bureautique avec le
Greta puis réalisé deux stages en
imprimerie, qui ont validé mon
projet, mes tuteurs professionnels
ayant donné un avis favorable. J’ai
alors enchaîné avec une formation
professionnalisante pour maîtriser
P20
les logiciels de PAO : Photoshop,
Illustrator, InDesign, à raison de
quatre heures par semaine pendant
six mois. Un nouveau stage au
sein du service communication
de L’ADAPT/Basse-Normandie
m’a ensuite permis de mettre
en œuvre mes connaissances.
Maintenant je me sens prêt à
monter ma micro-entreprise. Je
vais créer un site Internet pour
proposer mes services : création
d’affiches, de dépliants, de cartes
de visite, etc. Pourquoi ce choix ?
Pour travailler à mon rythme et
parce que c’est difficile de trouver
du travail. Ça sera aussi le moyen
de régler beaucoup de problèmes
logistiques : je vais pouvoir
travailler chez moi, sans dépendre
de personne. »
INTERVIEW
Nous avons besoin d’un regard
expert sur le handicap”
NATHALIE DURÉCHOU, Référente handicap au sein de la Mission
Locale du Sud Pays d’Auge.
OUVRIR L’HORIZON DES POSSIBLES
Quel est le profil des jeunes
que vous orientez vers
L’ADAPT ?
Des jeunes de 16 à 25 ans,
pas ou peu qualifiés, chez
lesquels nous avons repéré
des freins importants et
pour lesquels on sait que les
dispositifs du milieu ordinaire
seront inadaptés. Souvent ces
jeunes n’ont pas de RQTH.
Nous les aidons alors à monter
un dossier.
« Souvent les premiers souhaits professionnels relèvent d’un
idéal, rappelle Claire Guilhen-Wetton. Notre rôle est de respecter
ce souhait tout en amenant le jeune vers un projet réalisable
et réaliste. » En Basse-Normandie, les jeunes effectuent pour
cela des enquêtes métiers. Elles consistent à interroger des
professionnels sur les exigences de leur poste de travail, les
diplômes à décrocher, les compétences techniques à acquérir.
Vient, enfin, la prise de contact progressive avec le monde du
travail : d’abord des mises en situation, puis des stages qui
vont permettre de valider (ou invalider) une orientation. Une
étape cruciale où les intervenants du milieu ordinaire (chefs
d’entreprise, formateurs) permettent d’ajuster un projet, et
parfois, d’en garantir la réussite. ■
Quel est l’intérêt de la préprofessionnalisation de votre
point de vue ?
Elle apporte un regard
expert sur le handicap, dont
nous avons besoin. Les
problématiques spécifiques
de chacun sont identifiées :
un manque de maturité, un
problème comportemental,
une propension à se mettre
en danger, etc. L’ADAPT nous
transmet ces éléments, ce
qui nous permet de mieux
connaître les jeunes, et
d’ajuster notre suivi à l’issue
du dispositif.
Votre rôle à l’issue du
dispositif ?
Poursuivre l’accompagnement,
selon les préconisations de
L’ADAPT, pour que le projet
d’insertion professionnelle se
concrétise. C’est-à-dire que
nous mettons en place les
relais nécessaires - assistante
sociale, éducateur, ESAT,
entreprise du milieu
ordinaire - en fonction du profil
de chacun.
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P21
TERRITOIRE BRETAGNE
jeudi 13 juin 2013 | Rennes
Le service civique
ACCOMPAGNER POUR
QUALIFIER
Accéder à l’entreprise, ne serait-ce que pour
y faire un stage, reste un exercice difficile qui
relève parfois du parcours du combattant,
pour les jeunes en général, et encore plus pour
ceux qui sont en situation de handicap. D’où
l’importance pour eux de prendre en main leur
parcours, d’expérimenter les possibles, de
tester leurs limites.
Lancé en juin 2010,
ce dispositif est ouvert à
tous les jeunes de 16 à 25
ans qui souhaitent s'engager
dans une mission d'intérêt
général pour une durée
de 6 à 12 mois. Aucun
diplôme, aucune expérience
professionnelle ne sont
exigés. Les candidats doivent
s'adresser aux organismes
proposant des missions ou
à certaines structures relais
locales de l'Agence du service
civique (missions locales
notamment). La mission
proposée concerne les
domaines suivants : solidarité,
éducation pour tous, culture
et loisirs, environnement,
développement international
et action humanitaire,
mémoire et citoyenneté,
sport et santé... Les jeunes
perçoivent une indemnité
mensuelle nette de 573 euros,
cumulable avec l'AAH. Le
service civique est un outil
pertinent pour des jeunes
en situation de handicap,
notamment lorsque celui-ci
impose un aménagement du
parcours de formation (durée
plus longue et formation à
temps partiel) : le service
civique sur l'autre partie du
temps partiel est une façon
de combiner une activité
concrète et opérationnelle
avec des études (notamment
universitaires).
TÉMOIGNAGE
GRAFIC BRETAGNE :
INSÉRER POUR FORMER
Contrairement au système scolaire traditionnel qui forme pour
insérer ensuite, Grafic Bretagne est une association qui a pour
but inverse d’insérer pour former. Depuis sa création en 1992,
elle développe l’accès à la qualification des jeunes en situation
de handicap ou d’inadaptation. « Nous sommes sur le champ du
handicap mental et de la déficience intellectuelle chez des sujets
plutôt jeunes, qui viennent essentiellement d’IME, de SEGPA et
des ULIS lycées et préparent des diplômes de niveau V », explique
Daniel Bredoux, le responsable de Grafic.
Grafic accompagne des jeunes pendant leur contrat d’apprentissage sous la forme de trois dispositifs : le renforcement
pédagogique, les visites d’entreprises et le côté éducatif et
social. « Nous nous inscrivons dans le temps, tout au long de
l’apprentissage pour pouvoir insérer, élaborer et valider un
projet », affirme Daniel Bredoux. Le renforcement pédagogique
se déroule sur une journée par semaine prise sur le temps de
l’entreprise et permet de reprendre ce qui a été fait en CFA, de
débriefer et de maintenir le jeune dans son projet. Une visite par
mois en entreprise est organisée afin de rencontrer le maître
d’apprentissage et de fixer les objectifs à atteindre pour le jeune.
Enfin, Grafic garantit un accompagnement éducatif et social pour
que le jeune passe lentement du statut d’élève à celui d’adulte
P22
salarié. Cette méthode porte ses fruits puisque, selon Daniel
Bredoux, « 62 à 63 % obtiennent leur CAP, et malgré la crise,
plus des deux tiers sont en emploi ».
HANDISUP BRETAGNE :
DU LYCÉEN AU JEUNE ADULTE
Handisup Bretagne accompagne les étudiants (parfois les
lycéens) en situation de handicap, intégrés en milieu ordinaire,
dans leur insertion sociale et professionnelle et ce quel que soit
leur handicap (moteur, sensoriel, psychique ou cognitif) et la
filière d’études choisie. « L’objectif, explique Adeline Delacroix,
coordinatrice d’HANDISUP Bretagne, est de faire un bilan global
de sa situation et de l’accompagner tout au long du parcours
y compris dans des problématiques plus globales d’accès au
logement, de transport, d’autonomie, de confiance en soi, etc.»
L’étudiant a alors la possibilité d’être reçu par l’un des deux
services d’HANDISUP : le SAVS ou le SAVP en fonction de ses
demandes. Ces jeunes sont accompagnés jusqu’à un an après
l’obtention de leur diplôme pendant cette étape de changement
de statut étudiant/demandeur d’emploi. « En 2012, souligne
Adeline Delacroix, 78 % des étudiants ont pu bénéficier d’une
opportunité professionnelle correspondant à leur demande. Cela
peut aussi bien concerner un stage, un job étudiant, un emploi
en alternance, un premier emploi mais aussi un entretien conseil
auprès d’un professionnel, une journée découverte d’un métier
dans une entreprise, etc. »
“J’ai trouvé ma voie grâce à HANDISUP”
METTRE EN SITUATION POUR SÉCURISER
« Après 10 ans dans un centre de
rééducation de L’ADAPT, j’ai intégré une
classe de 3e ordinaire au collège tout en
étant interne à L’ADAPT. J’ai passé un bac L
(littéraire) et me suis inscrite en fac de
droit. C’est à cette époque que j’ai connu
HANDISUP Bretagne. En 2011, ils m’ont
invitée à participer à un forum-entreprises.
J’ai pris ça comme un exercice et j’ai
décroché deux emplois saisonniers l’été
suivant dont l’un au service social de DCNS
Brest, société de construction navale.
J’ai redoublé ma première année de droit
mais je n’ai pas obtenu le succès attendu.
J’ai fait un nouveau stage de deux semaines
chez DCNS Brest puis je me suis inscrite à
l’IPAG de Brest pour préparer le concours
d’entrée en école d’assistant social. Tout
en étant bénévole chez HANDISUP, j’ai pu
effectuer un autre stage d’observation de
15 jours au service social de Thales.
J’ai réussi le concours d’entrée à l’ITES
de Brest en avril 2013 et j’y suis maintenant
inscrite en formation assistante de service
social. Si HANDISUP n’avait pas été là je
n’aurais jamais songé à devenir assistante
sociale. »
De manière complémentaire, les ESAT ciblent davantage leur
action en direction des jeunes handicapés issus de milieux
protégés dont les capacités ne permettent ni de travailler
en entreprise ordinaire ni en entreprise adaptée. Pour les
confronter à la réalité, trois étapes ont été mises en place :
la visite, l’expérimentation et la mise en situation. La visite
permet au jeune d’aller voir une entreprise et de se confronter
(douloureusement parfois) au décalage entre son handicap et
la réalité. L’expérimentation sert à appréhender les contraintes
(horaires – tôt le matin, tard le soir – trajets plus ou moins
longs, etc.). Enfin, la mise en situation « permet au jeune de
s’essayer. Elle peut avoir lieu sous forme de stage, avec moins de
contraintes horaires, moins de tâches à accomplir. Elle sécurise
le jeune et lui permet de se situer par rapport à ses propres
limites », explique Jean François Dando, responsable de service
d’un ESAT Hors-les-murs. ■
ERIKA YVEN
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P23
TERRITOIRE GRAND-EST
mardi 25 juin 2013 | Troyes
L’ALTERNANCE POUR TOUS
Le système de l’alternance représente une expérience nouvelle. Il est parfois difficile de décoder
les règles et les exigences du monde du travail, de se situer comme salarié débutant apprenant un
métier, de se confronter à ses limites. Et lorsque ces difficultés croisent celles liées au handicap,
faire la part de ce qui relève du handicap et de l'expérience de l'alternance est complexe. D’où
l’intérêt d’anticiper et de se préparer.
TÉMOIGNAGE
“L’alternance m’a permis de rebondir ”
JÉRÉMIE MAGNIETTE, 20 ans
*JARD : Le
JARD se définit
comme un service
d’accompagnement et
de préparation à la vie
active. Il accompagne
autant dans la prise
d’autonomie au
quotidien que dans
l’insertion dans le
monde du travail. Sa
compétence s’étend
sur toute la Marne.
P24
« Par le biais de l’ESAT où j’étais, j’ai eu la
possibilité de faire plusieurs stages dans
le secteur des espaces verts avant d’être
embauché en CDI chez Edivert. Mais au
bout de 4 ans j’ai été licencié économique.
J’ai recommencé ma recherche d’emploi
seul, jusqu’à ce que la permanence
du JARD* me propose une formation
en alternance de 2 ans pour passer le
CAPA travaux paysagers. Le JARD m’a
accompagné tout au long de la construction
de mon projet et m’a aidé à trouver une
entreprise d’accueil (la mairie de Cormicy),
à remplir les dossiers. J’ai passé l’examen,
que j’ai réussi, en juillet 2013. Ce diplôme
m’a permis de trouver un emploi au sein
de l’association APF entreprise 51, à
Reims, où je travaille depuis septembre
2013 en tant qu’ouvrier qualifié espaces
verts. L’alternance est un bon moyen
de travailler tout en apprenant. J’étais
rémunéré, l’ambiance était bon enfant et j’ai
surtout acquis de nouvelles compétences
techniques par rapport à un secteur que je
croyais déjà connaître. »
LE RAPPROCHEMENT AVEC LES CFA
De nombreux CFA se sont montrés intéressés parce
qu’ « Alternance pour tous » apporte une réponse à des publics
de l'emploi : « Pourtant, reconnaît Laurence Dal Cin, directrice
adjointe de L’ADAPT/Aube à Troyes, il n’est pas toujours facile
pour un CFA d’accueillir un jeune handicapé. Tous les CFA ne
sont pas à l’aise avec ce projet. Il faut faire des aménagements
en fonction du handicap du jeune (temps de travail, supports
de cours, etc.), et accepter de modifier un peu ses pratiques. »
Les CFA qui se positionnent le mieux sont ceux des secteurs de
l’agriculture et du bâtiment. ■
L’ALTERNANCE : UN BON MOYEN
D’ARRIVER À L’EMPLOI
Le système de l’alternance comme intermédiaire pour accéder
à une formation puis à l’emploi a fait ses preuves. La faculté
des métiers d’Evry et L’ADAPT, par exemple, en convention avec
la DSDEN, accueille chaque année 8 à 10 jeunes handicapés
de 16 ans minimum, en vue de les préparer à une formation
par l’apprentissage. Cette initiative, appelée « La passerelle
bleue » permet un parcours en quatre ans : un an de stage de
découverte, un an de passerelle préparatoire à l’apprentissage,
suivis des deux ans classiques d’apprentissage.
Cette initiative a fait des petits puisqu’un nouveau dispositif baptisé
« Alternance pour tous » vient d’être mis en place en août 2013
dans l’ensemble des quatre départements de la ChampagneArdenne (Marne, Haute-Marne, Ardennes, Aube). Il s’adresse
à des jeunes présentant un handicap mental, psychique et/ou
cognitif d'apprentissage et ayant des besoins spécifiques
d’accompagnement pour accéder à la qualification et à
l’emploi. L’effectif visé concerne 36 personnes sur les quatre
départements, provenant d’origines diverses : 15 personnes
issues d’établissement médico-sociaux (ESAT, IMPRO ou IME),
14 de structures d’insertion (Cap Emploi, missions locales, Pôle
emploi) et 7 d'ULIS (lycées).
Les trois phases d’ « Alternance pour tous » :
Positionnement, pré-alternance, alternance
Une première phase de
positionnement a pour objectif
de valider la faisabilité de
l’alternance et les conditions
d’accompagnement
nécessaires pour le jeune.
En effet, ce dernier doit
pouvoir se projeter dans le
système de l’alternance,
s’approprier ses atouts, ses
manques. Cette phase peut
durer au maximum 3 mois. Il
est nécessaire que le projet
professionnel soit validé en
amont car le positionnement
sert à mesurer la « distance »
à parcourir entre le jeune et le
futur apprenti :
« en général, assure
Laurence Dal Cin, le projet
professionnel est connu, le
projet d’alternance, moins, et
le projet d’accompagnement,
encore moins ». L’objectif de
cette première période est
d’identifier les pré-requis pour
que le parcours d'alternance
ait les meilleures chances de
succès.
La phase de pré-alternance
permet l'acquisition de
connaissances théoriques,
complétées par des mises en
situations professionnelles
de trois semaines à un mois
qui permettent de préparer à
l'alternance et de rechercher
une entreprise d'accueil.
Il est prévu un temps de
renforcement des acquis
(soutien assuré par le CFA ou
l'organisme de formation).
Cette phase est complétée
par un accompagnement
socio-professionnel pour
préparer l'autonomisation du
jeune, assurer un appui dans
la recherche d'entreprise
et préparer l'entrée dans le
contrat.
La troisième et dernière
phase est celle de
l’alternance proprement
dite, qui débute avec
la signature du contrat
de professionnalisation
ou d'apprentissage. Le
renforcement des acquis
se poursuit pour consolider
les connaissances dans les
matières générales, mais de
manière plus légère qu'en
phase de pré-alternance.
L’accompagnement socioprofessionnel dont continue
à bénéficier le jeune est ciblé
sur la pérennisation du contrat
de travail afin d’éviter les
ruptures en cours de contrat
et à l'issue de ce dernier,
favoriser la transformation du
contrat en CDI et l’obtention
du diplôme.
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P25
TERRITOIRE LOIRE/CHARENTES
lundi 3 juin 2013 | Nantes
LES JEUNES ET L’ENTREPRISE :
BÂTIR UNE CONFIANCE
MUTUELLE
Comment les jeunes titulaires d’une reconnaissance de la
qualité de travailleur handicapé abordent-ils l’entreprise ?
Souvent fragilisés par un parcours chaotique et confrontés
à un univers professionnel peu sensibilisé, les jeunes candidats
à l’emploi peinent à se sentir légitimes.
Craintes et appréhensions, ce sont les sentiments qui semblent
dominer dans l’esprit des jeunes handicapés à l’aube de leur vie
professionnelle. Et pour cause : avant d’entrer dans le monde
du travail, ils ont pour la plupart connu des désillusions et
éprouvé de grandes difficultés pour faire respecter leurs droits
(par exemple vis-à-vis de l’institution scolaire pour obtenir des
aménagements). Ainsi « échaudés » par des années de bataille,
ils adoptent la plupart du temps une attitude méfiante vis-àvis de ce nouvel interlocuteur qu’est le monde de l’entreprise.
L’autre difficulté réside dans le fameux « savoir-être ». Comment,
là encore, s’afficher en un clin d’œil comme une personnalité
sûre d’elle-même alors que l’estime de soi est la plupart du
temps altérée par des années d’incompréhensions, voire de
discriminations ? Du point de vue des recruteurs, ce double
constat est pourtant dommageable : les jeunes titulaires d’une
RQTH donneraient, selon eux, trop d’importance à leur handicap,
au lieu de se concentrer sur la valorisation de leurs compétences,
comme n’importe quel autre candidat...
UNE VISION DÉFORMÉE
Autre élément pénalisant : les jeunes handicapés, plus encore
que les autres, connaissent mal le monde de l’entreprise, ce qui
génère une vision partielle ou déformée de la réalité. Souvent
dispensés du stage professionnel de troisième, ils rencontrent
aussi plus de difficultés que les autres pour décrocher des stages
professionnels dans leur cursus universitaire. Si bien qu’ils
arrivent souvent à leur premier entretien avec déjà une carence
en matière d’expérience... Et le problème monte encore d’un cran
pour les jeunes qui n’ont connu que le milieu protégé : certains
arrivent en âge de travailler en ignorant quasiment tout de ce
qui les attend. « Nous constatons le décalage lorsque les jeunes
d’IME viennent visiter l’ESAT, indique Didier Dereux, directeur
territorial Loire-Charentes de L’ADAPT. Leurs préoccupations
sont liées au salaire, aux vacances, à la possibilité de changer de
poste. Ils s’interrogent très peu sur les exigences de rentabilité
P26
INTERVIEW
Nos actions gagnent en force
et en visibilité”
ERIC CRISPIN, directeur de L’ADAPT/Sarthe
TÉMOIGNAGE
“Je ne focalise plus sur mon handicap ”
DAMIEN HÉRAULT, 25 ans, demandeur d’emploi.
« Ma scolarité a été compliquée du fait de
ma dysgraphie. En seconde, mon lycée
a refusé que j’utilise un ordinateur et j’ai
dû partir à l’autre bout de la France pour
raccrocher en classe de première. J’ai
finalement poursuivi mes études jusqu’à un
Master 2 de droit social et management des
ressources humaines, que j’ai obtenu avec
une mention bien. Deux premières expériences en entreprise m’ont permis de me
familiariser avec le monde du travail, puis
j’ai intégré le groupe Airbus pour un stage
de six mois. Là, j’ai réalisé différentes missions : veille et conseil juridique, recrutement, etc. Au début j’étais peu à l’aise, puis
j’ai repris confiance. Cette double casquette
de travailleur handicapé/recruteur m’a
ouvert les yeux. Aujourd’hui, je ne focalise
plus sur mon handicap : je fais mention de
ma RQTH en haut à droite sur mon CV mais
je m’en tiens là. Je n’en parle pas du tout
dans ma lettre de motivation. Je sais qu’une
entreprise cherche avant tout des compétences et un profil précis correspondant
à un poste. Certes les entreprises ont fait
du chemin dans l’acceptation du handicap,
mais elles n’ont pas de vocation sociale.
Un travailleur handicapé doit savoir valoriser ses compétences, comme les autres
candidats. »
ou l’organisation du travail. Beaucoup ont par ailleurs une vision
exclusivement artisanale de l’entreprise : ils pensent qu’ils vont
réaliser un produit de A à Z. Quand ils s’aperçoivent que le travail
est morcelé, compartimenté, ils sont très déçus et leur motivation
s’en ressent. »
COACHING ET TUTORAT
Il y a donc urgence, selon les professionnels, à multiplier les
occasions de se confronter à la réalité via des immersions terrain.
Avec des journées de découverte de l’entreprise pour les plus
jeunes, puis des stages obligatoires, d’au moins deux ou trois
semaines, voire de plusieurs mois dans le cursus universitaire.
Mais attention, le bénéfice de telles expériences repose sur une
solide préparation. Cela peut passer par un coaching en termes de
savoir-être (pour apprendre à se positionner au sein d’un groupe,
savoir valoriser ses compétences, etc.) ou la désignation d’un
tuteur de stage au sein de l’entreprise. Cet accompagnement
doit aussi inclure la façon de se présenter et de parler de son
handicap (et une sensibilisation de l’entreprise accueillante !).
Comment est né ce
partenariat entre le CNAM et
L’ADAPT ?
Le CNAM* forme et
accompagne tous les publics
qui visent une insertion
professionnelle réussie, dont
les personnes handicapées.
C’est un organisme très
actif et porteur de valeurs
humanistes en lien avec celles
de L’ADAPT. Aussi, nous avons
pensé qu’il serait pertinent de
travailler main dans la main et
nous les avons sollicités dans
ce sens.
En quoi consiste-t-il ?
La toute première action a
commencé il y a deux ans. Elle
vise à répondre ensemble à
des appels à projets initiés par
le Conseil régional ou l’Agefiph
pour l’élaboration de projets
professionnels portés par des
personnes handicapées. Le
deuxième volet est la coorganisation de conférences
sur le thème du handicap,
en direction des étudiants
du CNAM en ressources
humaines et la conférence
« Préparer l’avenir des jeunes
avec les jeunes » du 3 juin
2013 à Nantes. Enfin, L’ADAPT
a participé à la réalisation et au
lancement d’un serious game
de sensibilisation au handicap
qui s’adresse aux entreprises,
conçu par le CNAM.
Quels en sont les bénéfices ?
Nous sommes
complémentaires : le CNAM
apporte sa compétence
logistique et son savoir-faire
en termes de formation, et
L’ADAPT, sa connaissance du
handicap. Ainsi, nos actions
gagnent en force et en
visibilité.
*Conservatoire national des arts et métiers
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P27
TERRITOIRE SUD-OUEST
mercredi 27 novembre 2013 | Bordeaux
LE LOGEMENT PARTAGÉ ET REGROUPÉ
UNE VIE INDÉPENDANTE
EN APPARTEMENT
Dans le Sud-Ouest, les maisons familiales accueillant trois ou quatre jeunes adultes handicapés
moteur, et d’autres formes de logement partagé, sont le fruit d’un partenariat entre des associations,
le SAMSAH de L'ADAPT/Gironde et des prestataires d’aides humaines. Explications avec Yannick
Vignaud, chargé de développement territorial pour L’ADAPT/Sud-Ouest.
Pouvoir habiter un appartement, de manière autonome mais
sécurisée par la présence d’aides humaines, mutualisées en
fonction des besoins, en allant à son travail ou à des activités
socio-culturelles... Un rêve devenu réalité depuis 1998 pour
des jeunes lourdement handicapés moteur ou cérébro-lésés qui
ne voulaient pas vivre dans un foyer ou dans leur famille. Une
offre variée se développe, en partenariat avec des associations
comme l’AFTC ou l’APF.
TENIR COMPTE DU PROJET INDIVIDUEL
« Certaines personnes ont un handicap moteur très important
mais des compétences sur le plan cognitif et des capacités
d’autonomie ; d’autres ont davantage de capacités motrices mais
des troubles cognitifs et parfois des troubles du comportement.
C’est pour cela que différentes formules ont été développées,
pour répondre au désir de vie en milieu ordinaire de personnes
qui ne sont pas capables de vivre seules » explique Yannick
Vignaud, ancien directeur du SAMSAH de L'ADAPT/Gironde.
Le SAMSAH, créé en 2008, intervient dans la formulation du projet
individuel,l’évaluation des besoins,avec une prise en charge de trois
à cinq ans. Proximité des transports, de l’ESAT, du GEM ou du CAJ... :
« Quand on entend le désir de vivre en appartement, on se
met en recherche d’un lieu qui corresponde au projet des
personnes et aux problématiques de handicap, en s’assurant
qu’il y ait un équilibre et une dynamique de groupe. Ensuite, on
se tourne vers l’association chargée des aspects financiers »
poursuit-il (voir encadré).
TÉMOIGNAGE
“Les Coucous ont fait leur nid”
« Aller en foyer médicalisé ou rester chez
nos parents étaient les seuls choix que
nous avions à 20 ans en quittant l'IEM de
l’APAJH à Eysines, confie Homar Badji.
Mais nous voulions devenir autonomes,
avoir une vie indépendante en appartement.
Le directeur, les éducateurs, les aidesoignants... nous ont soutenus. » Après
des mois d’essai concluants dans des
appartements thérapeutiques totalement
adaptés pour des personnes ayant un
handicap moteur lourd, le projet met
deux ans à se monter avec le bailleur
social Gironde Habitat, le GIHP, la mairie
de Bordeaux... Homar emménage avec
Olivier et deux jeunes filles dans un second
appartement en 2007. Les auxiliaires de
vie sont mutualisés. Depuis Olivier a pris
son indépendance dans un T2, Homar
espère faire de même bientôt et d’autres
projets d’appartement sont en cours. Ils
ont créé l’association Les Coucous, dont le
jeune homme est président, « pour aider
les personnes handicapées à trouver un
appartement, les conseiller. On voit que les
jeunes de l’IEM veulent faire comme nous,
des parents s’y intéressent. Nous avons
aussi créé un système d’autopartage avec
la location d’un véhicule adapté et avons le
projet d’un point rencontre dans une Maison
des associations ».
DES PETITES UNITÉS AU CŒUR
DE LA CITÉ
Différentes formes de logement partagé existent pour répondre
au mieux aux besoins.
Les maisons familiales, les plus nombreuses, sont des
appartements ou maisons pour trois ou quatre personnes : chacun
a sa chambre meublée par lui, avec des parties communes
(cuisine, salon, sanitaires), les repas sont pris ensemble, des
activités sont organisées ainsi que le partage des tâches (et des
dépenses) avec l’aide des auxiliaires de vie dont le temps de
présence est mutualisé... Il y a un règlement de vie. Le loyer est
divisé entre les habitants qui sont en sous-location.
Des appartements partagés en colocation (voir encadré Les
Coucous) où chacun est plus indépendant.
Des appartements individuels regroupés dans un même
immeuble pour ceux qui aspirent à une vie autonome, certaines
aides humaines pouvant être mutualisées comme la surveillance
de nuit. Il peut y avoir des espaces communs.
Les personnes les plus autonomes peuvent bénéficier de
logements satellites éloignés les uns des autres, avec un
accompagnement individuel.
TOUT UN TRAVAIL D’ACCOMPAGNEMENT
« Aujourd’hui notre équipe accompagne 72 personnes dans
18 maisons familiales de deux à quatre personnes et une de
cinq, et une dizaine en sous-location individuelle, explique
Aurélie Touy-Rimbaud, chef de service du SAMSAH/UEROS de
L’ADAPT/Gironde. Nous nous adaptons en fonction du projet de
chacun. Les projets sont validés avec l'UEROS Aquitaine qui évalue
les capacités de la personne à vivre en appartement, le mode
de déplacement, l’insertion socio-culturelle et professionnelle.
Ensuite, nous construisons le projet de manière individuelle :
la maison sera peut-être une étape vers un appartement
indépendant et on verra plus rarement le désir de revenir vers
le collectif. Soit une chambre se libère dans une des maisons
soit, quand trois ou quatre personnes ont le même projet,
nous recherchons un logement qui leur convient, évaluons
la part d’aides humaines qui peut être mutualisée en fonction
des besoins de chacun et de la sécurité de tous. Ensuite, nous
assurons le suivi, la médiation entre les sous-locataires, les
auxiliaires de vie, les familles. Il y a un ergothérapeute référent
par maison. »
« Avec l’AFTC, l’APF et les Coucous, nous travaillons pour faire
évoluer le modèle, conclut Yannick Vignaud. Nous travaillons aussi
avec les bailleurs sociaux pour les sensibiliser aux besoins des
personnes handicapées et pour qu’ils prévoient des logements
vraiment adaptés.» ■
P28
Un partenariat à trois
Le SAMSAH n’a pas
de lien financier
avec les usagers
et les auxiliaires
de vie. Après des
entretiens, le projet
de la personne
orientée par la
MDPH peut prendre
forme en fonction
de ses besoins
(aide humaine,
transports, mise en
place d’activités, vie
sociale). Le SAMSAH
accompagne, le
temps nécessaire,
la mise en œuvre
du projet de vie
du locataire,
coordonne les
actions des différents
intervenants et
l’organisation.
L’AFTC est locataire
des appartements
dont les habitants
signent un bail
de sous-location.
L’association
s’occupe de tout
l’aspect financier,
la répartition des
charges (eau,
électricité, entretien
courant) et du compte
« alimentaire »
(alimentation,
produits d’entretien,
vaisselle).
Des associations
prestataires
d’aide humaine
font intervenir
des auxiliaires de
vie qui peuvent
être mutualisées
notamment pour
l’organisation
quotidienne (repas,
entretien, activités
communes, veille de
nuit).
LES CAHIERS DE L'ADAPT #173
P29
{ GLOSSAIRE
AED
AFPA
AFTC
AGEFIPH
ALJT
APF
ARS
AVS
AVSI
Assistant d’éducation
Association pour la formation professionnelle des adultes
Association de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés
Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées
Association pour le logement des jeunes travailleurs
Association des paralysés de France
Agence régionale de santé
Auxiliaire de vie scolaire
Auxiliaire de vie scolaire individuel
BPJEPS
Brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport
CAJ
CAP
CFA
CFG
CLIS
CNAM
CRP
Centre d’accueil de jour
Certificat d’aptitude professionnelle
Centre de formation d’apprentis
Certificat de formation générale
Classe localisée pour l’inclusion scolaire
Conservatoire national des arts et métiers
Centre de réadaptation professionnelle
DSDEN
Direction des services départementaux de l’éducation nationale
ESAT
Établissement et service d’aide par le travail
GAR
GEM
GIHP
GRETA Groupe appui ressources
Groupe d’entraide mutuelle
Groupement pour l’insertion des personnes handicapées physiques
Groupement d’établissements
IEM
IME
ITEP
Institut d’éducation motrice
Institut médico-éducatif
Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique
LPC
Langage parlé complété
MDPH
Maison départementale des personnes handicapées
ONISEP
Office national d'information sur les enseignements et les professions
PAO
PPS
PPS
Publication assistée par ordinateur
Projet personnalisé de scolarisation
Prestation ponctuelle spécifique
RQTH Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé
SAMSAH
SAVP
SAVS
SEGPA
Service d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés
Service d’accompagnement à la vie professionnelle
Service d’accompagnement à la vie sociale
Section d’accompagnement général et professionnel adapté
TH
Travailleur handicapé
UEROS
ULIS
Unité d’évaluation, de réentraînement et d’orientation sociale et/ou professionnelle des traumatisés crâniens
Unité localisée pour l’inclusion scolaire
Les
cahiers de L’ADAPT
N° 173 - 1 semestre 2014
er
L'ADAPT Siège
Tour Essor - 14 rue Scandicci
93508 Pantin Cedex
P30
Directeur de la publication : Emmanuel Constans
Rédacteur en chef : Éric Blanchet
Coordination éditoriale : Cyrielle Claverie
Comité éditorial : Cyrielle Claverie, Nicole Frêné, Valérie Paparelle
Rédaction : Marie-Claire Brown, Émilie Gilmer, Séverine Maestri
Conception, réalisation :
Impression : Chauveau imprimerie
Commission paritaire : n°52-562
Parution trimestrielle : ISSN 0182-5437
Dépôt légal : 1er semestre 2014
Crédits photos : L’ADAPT, Jean-Jacques Bernard, Philippe
Devernay – MEN, Tristan Paviot
L’ADAPT Siège social
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