Nuages blancs, ciel bleu – Eugène Boudin
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Nuages blancs, ciel bleu – Eugène Boudin
FICHE PÉDAGOGIQUE Nuages blancs, ciel bleu – Eugène Boudin Auteur : François-Raphaël Loffredo Contexte Titre : Nuages blancs, ciel bleu Artiste : Eugène Boudin (Honfleur, 1824 – Deauville, 1898) Date : Vers 1859 Dimensions : H. 16,2 cm ; L. 21 cm Technique : Pastel sur carton Lieu de conservation : Musée Eugène-Boudin, Honfleur © Photo : Illustria Lieu de création : Honfleur « Si je suis devenu peintre […] c’est à Eugène Boudin que je le dois », reconnaît Claude Monet (1). Cette rencontre influe directement sur la naissance du mouvement impressionniste. Boudin est l’initiateur. Les deux peintres travaillent ensemble. « Nous voilà partis pour Rouelles, note Monet, sans grande conviction de ma part. Boudin installe son chevalet et se met au travail. Je le regarde avec quelque appréhension, je le regarde plus attentivement et puis ce fut tout à coup comme un voile qui se déchire : j’avais compris, j’avais saisi ce que pouvait être la peinture ; par le seul exemple de cet artiste épris de son art et d’indépendance, ma destinée de peintre s’était ouverte (2). » Boudin participe à son premier salon en 1859 avec des œuvres en pleine rupture avec celles de l’académisme triomphant et son développement dans le style éclectique (Delaroche, Signol, Pils, Cibot, Meissonnier…). Il propose une nouvelle vision bien avant la première exposition impressionniste de 1874. Baudelaire remarque déjà ses pastels au Salon de 1859. Dans son compte rendu du Salon, il décrit l’impression ressentie chez le peintre où il a vu plusieurs centaines d’études au pastel réalisées « en face de la mer et du ciel » (3) et s’enthousiasme devant « ces magies liquides ou aériennes », la capacité du peintre à fixer dans l’instant « ce qu’il y a de plus inconstant, de plus insaisissable (4) ». Il note l’absence de présence humaine propice à la rêverie de l’homme devant la mer. Analyse de l’œuvre Les pastels de ciel sont chez Boudin comme des instantanés éphémères picturaux. Il inscrit d’ailleurs précisément, sur certains d’entre eux, date, heure, orientation et indications météorologiques. Le cadrage renvoie pleinement au ciel. Quelques rares traits au bas de l’œuvre servent d’accroche au ciel marin. Le peintre, « roi des ciels » selon l’expression de Corot, n’utilise ici que quelques couleurs et se sert de la couleur du support cartonné comme couleur additionnelle selon le procédé de la réserve. CRDP de Basse-Normandie 1 Pistes pédagogiques Niveaux : Cycles 1, 2, 3 Disciplines : Pratiques artistiques – Français – Géographie – Sciences expérimentales et technologie Thématiques : L’œuvre d’art et l’évocation du temps et de l’espace Pratiques artistiques/arts visuels Cycle 3 Thème : les nuages Photographie, initiation à la prise de vue Photographier le ciel avec ses nuages à différents moments de la journée. Choisir son « morceau » de ciel nuageux. Tenir un carnet avec, pour chaque vue, la notation de l’instant (date, heure, orientation, conditions météorologiques) et éventuellement un commentaire : « quand je fais cette photo, je sens, je vois, je distingue… ». Se constituer un fichier d’images instantanées de ciel. Ce fichier d’images peut servir d’illustration pour un journal personnel. Les vues peuvent être travaillées avec un logiciel de retouche numérique pour faire ressortir les contrastes et optimiser la balance des couleurs. Accrocher le ciel sur le sol Travail au pastel. « Les pastels sont très prisés des impressionnistes dont le style limite l’importance du dessin pour exalter la couleur et les effets de lumière : différents des aquarelles, liquides et transparentes, les pastels sont utilisés pour leur aspect velouté, la douceur de leurs reflets, les délicates associations de tons chauds et denses. » (4) Initiation à l’emploi du pastel (bâtonnets, crayons pastel, godets) : utilisation de la pointe pour les lignes, de la tranche pour les surfaces, le travail du doigt, de l’estompe, de la gomme. Comment dessiner un nuage ? L’emploi de lignes courbes successives. Choisir le cadrage. Varier le format : passer du cadrage horizontal oblong classique au format « portrait » oblong vertical. Prendre le temps nécessaire pour essayer les différentes solutions possibles du cadrage et du format. Constater leur importance dans le rendu final. Quelle place choisit-on de réserver au ciel dans le dessin ? Comment placer la ligne d’horizon ? Avec juste l’« accrochage terrestre », comme chez Boudin ? Les deux tiers de la surface comme chez les paysagistes hollandais ? Avec une ligne d’horizon médiane ? Les deux tiers occupés par le sol ? A-t-on besoin d’éléments verticaux pour faire la transition entre sol et ciel ? La technique de la réserve Se servir de la couleur du support comme couleur additionnelle Choisir un papier ou carton coloré en fonction du sujet représenté (ex. : bleu pour un ciel, beige clair pour une plage). Expression créative « Ces merveilleux nuages » Souvent, les nuages prennent des formes qui nous paraissent reconnaissables. Ainsi, dans le ciel passe au gré de notre imagination des animaux, des vaisseaux, des têtes, enfin l’observateur y devine une multitude de formes. Dessiner un ciel en faisant apparaître des formes identifiables. CRDP de Basse-Normandie 2 Français Langage/vocabulaire Lecture d’image Cycles 1, 2 et 3 Décrire le pastel de Boudin de la manière la plus précise possible. Procéder par questionnement : Quoi ? Où ? Qui ? Comment ? Quand ? Relever les termes de vocabulaire descriptif. Faire construire et enrichir un lexique de référence utilisé pour la description : format, cadrage, sens, sujet, ligne, point, premier, moyen, arrière-plan, droite, centre, gauche, partie supérieure, inférieure, couleurs, orientation, large, long… Faire découvrir le tableau : atmosphère, émotion ressentie. Le vocabulaire descriptif acquis peut être enrichi par d’autres séquences et les mots inscrits dans un carnet. Outil d’aide à la lecture d’image. Littérature Cycle 3 Étude du texte Baudelaire et la critique d’art […] j’ai vu récemment chez M. Boudin […] plusieurs centaines d’études au pastel, improvisées en face de la mer et du ciel. […] Mais M. Boudin, qui pourrait s’enorgueillir de son dévouement à son art, montre très modestement sa curieuse collection. Il sait bien qu’il faut que tout cela devienne un tableau, par le moyen de l’impression poétique rappelé à la volonté, et il n’a pas la prétention de donner ses notes pour des tableaux. Plus tard, sans aucun doute, il nous étalera dans des peintures achevées les prodigieuses magies de l’air et de l’eau. Ces études, si rapidement et si fidèlement croquées d’après ce qu’il y a de plus inconstant, de plus insaisissable dans sa force et dans sa couleur, d’après des vagues et des nuages, portent toujours écrites en marge la date, l’heure et le vent : ainsi, par exemple, 8 octobre, midi, vent de nord-ouest. Si vous avez eu quelquefois le loisir de faire connaissance avec ses beautés météorologiques, vous pourriez vérifier par mémoire l’exactitude des observations de M. Boudin. La légende, cachée avec la main, vous devineriez la saison, l’heure et le vent. Je n’exagère rien. J’ai vu. À la fin, tous ces nuages aux formes fantastiques et lumineuses, ces ténèbres chaotiques, ces immensités vertes et roses suspendues et ajoutées les unes aux autres, ces fournaises béantes, ces firmaments de satin noir ou violet, fripé, roulé ou déchiré, ces horizons en deuil ou ruisselants de métal fondu, toutes ces profondeurs, toutes ces splendeurs me montèrent au cerveau comme une boisson capiteuse ou comme l’éloquence de l’opium. Chose assez curieuse, il ne m’arriva pas une seule fois devant ces magies liquides ou aériennes de me plaindre de l’absence de l’homme. Baudelaire, Curiosités esthétiques, Salon de 1859, VII. Le paysage Exploitation possible comme exemple pour un entraînement progressif au commentaire artistique. Introduction à l’univers d’Alphonse Allais, journaliste, poète, écrivain né à Honfleur et contemporain du peintre – humour et théorie de l’absurde : « Impossible de vous dire mon âge, il change tout le temps ». Recherche documentaire sur le thème du ciel, des nuages, de la mer (textes littéraires, images, évènements, musique…) : trier les informations. Géographie Cycles 2 et 3 S’orienter par l’observation : soleil, direction, ombres portées du soleil. Observations et relevés météorologiques. Embouchures fluviales, littoraux, ports, voies, trafics, économies côtières, fluviales et maritimes : Honfleur, Le Havre, la Seine, Rouen. Honfleur, cité corsaire ; port de pêche ; liens avec Terre-Neuve. CRDP de Basse-Normandie 3 Sciences expérimentales et technologie Cycles 2 et 3 Manipuler, utiliser, comprendre. Initiation à l’utilisation, au fonctionnement d’un appareil photo, de jumelles, d’un télescope, les lentilles optiques. Les pastels (composition, pigment et liants). L’atmosphère, sa composition ; les nuages, le cycle de l’eau. Prolongements possibles • Visite à Honfleur : le musée Eugène-Boudin, le « Petit musée d’Alphonse », la maison d’Erik Satie, le musée de la Marine. Musée des Beaux-Arts de Caen. • Les peintres de marine hollandais du xviie siècle (Van Ruysdael, Van Goyen, Van de Velde) : comparer. • La musique d’Erik Satie, de Claude Debussy. • Le littoral de la Côte fleurie. Ressources (1) Jean-Aubry G., Eugène Boudin, Neuchâtel, Ides et Calendes, 1968, p. 30. (2) Ibid. (3) Bergeret-Gourbin, Anne-Marie, Catalogue du musée Eugène-Boudin, Honfleur, 2003, p. 20 (4) Crepaldi, Gabriele, Petite encyclopédie de l’impressionnisme, Solar, 2006. CRDP de Basse-Normandie 4