pdf N¡9 - Terrestaurines.com

Transcription

pdf N¡9 - Terrestaurines.com
HÉRITIER DU TOREO FASTUEUX de son maestro de père, José
Mari saura-t-il naître à la poésie et transcrire dans l'envol
de sa muleta les secrets de la métrique et du sens qui lui
ont été transmis ?
SUR LE CHEMIN DE FUITE des Bonhommes vers l’Espagne,
non loin du bûcher de Montségur où les Parfaits partirent
en fumée, les toros de l’Ariège survivent en pays Cathare
malgré la traque impitoyable dont ils sont l’objet.
SÉBASTIEN CASTELLA
Peau de lumière
LE 4 JUIN DERNIER un tabou est tombé. Pour la première
fois Sébastien Castella a parlé, évoquant son enfance
malheureuse et donnant par là-même un éclairage poignant à son toreo de condamné.
I
l était une fois un enfant triste… ainsi pourrait débuter ce conte
moderne conforme aux règles du genre : un enfant s’enfuit de la
maison paternelle et part à la conquête de son identité avec pour
seule arme une sourde colère. Son courage et sa maîtrise face au
danger font vite de lui un héros. Riche, glorieux et comblé, il porte
alors la plus difficile estocade de sa carrière en dévoilant tous les
non-dits de son incroyable ascension, entièrement construite sur le
refus du modèle du père dont le meurtre symbolique est ainsi
consommé : dans la victoire sur le taureau d’abord –chaque mise
en danger volontaire affirmant le mépris éprouvé pour les
anciennes brimades et chaque estocade leur sanction– dans l’aveu
de ses blessures intimes qui font tomber les masques de respectabilité ensuite, et dans le pardon enfin, offert à ses parents en précisant avoir dépassé la «peur de leur ressembler». Dans la trame de
ce conte oedipien, comment, sous couvert de Freud et Lacan, ne
pas voir un parallèle troublant avec l’histoire de Peau d'âne dont
l'enveloppe seconde-peau qui se constitue, écrit Anzieu, pour suppléer un Moi-peau défaillant, se matérialise ici dans le costume de
lumières ? Pour s’extraire de la pénombre de son enfance douloureuse Castella s’habille de lumière, cache ses meurtrissures sous
cette nouvelle peau et se construit en s’opposant au toro.
67
«MES TOROS MARCHENT au super et tous les autres au gas-oil»,
assurait Juan Luis Fraile pour expliquer le succès de ses
gracilianos dont les explosions de caste tranchaient avec
la combustion plus lente de ses concurrents. Quelques
chocs pétroliers plus tard, ses héritiers tentent de remédier
aux effets de la crise.
EN QUELQUES CORRIDAS à peine, les aficionados le
comparent à José Tomas. La raison en est simple : rarement,
art du toreo et spiritualité avaient été ainsi sciemment
fondus dans une philosophie globale de la condition de
torero revendiquée jusqu'à son but ultime, la mort acceptée
comme valeur structurante du projet.
AU PAYS DE D’ARTAGNAN les toros braves ont pris la place
des mousquetaires et dans la lumière dure d’un été trop
chaud le mirage incertain des temps anciens fait trembler
les rapières.
APRÈS QUELQUES ANNÉES de galère, le chemin de croix de
Fernando Cruz vient de changer de direction : station Ventas, la
gare de triage du toreo, il a abandonné la ligne qui descend vers
les pueblos pour celle qui monte vers les ferias.

Documents pareils

terres taurines n.4 - Terrestaurines.com

terres taurines n.4 - Terrestaurines.com ORGUEILLEUSEMENT assise sur sa réputation de faiseuse d’anges, Las Ventas est une Babel callipige vorace qui dévore ses plus beaux enfants...

Plus en détail