Quels sont les traitements mis à notre disposition ? Le Zyban
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Quels sont les traitements mis à notre disposition ? Le Zyban
22 PRÉVENTION TABAC Prévention Tribune Édition Française | Juin 2011 Pour bien apprécier la consommation du patient, et quelle que soit la méthode, le recueil d’informations est indispensable : – Où, quand, comment fume le patient ? – Combien de fois par jour ? – Avec qui, avec quoi ? – Qu’est-ce qui précède le comportement ? – Qu’est-ce qui le diminue ? – Qu’est-ce qui l’augmente ? – Qu’est-ce qui le fait disparaître ? – Quelle est la relation entre comportement et environnement ? Il faut également savoir reconnaître les différents tabagismes : – Tabagisme social (carence d’affirmation de soi) – Tabagisme à affects négatifs (lors de moments de tristesse) – Tabagisme stimulant (fin de repas, milieu de journée) – Tabagisme anti-stress – Tabagisme anorexigène Pour cela, des échelles et des questionnaires sont à notre disposition : – Test de Fagerström – HAD (Hospital Anxiety and Depression Scale), de A.S. Zigmond et R.P. Snaith – Évaluation de la motivation – Consommation de boissons alcoolisées – Vos habitudes alimentaires – Quelle est votre histoire avec le tabac ? – Pourquoi fumez-vous ? – Quel est votre degré de motivation ? – Pourquoi voulez-vous arrêter de fumer ? – Que craignez-vous en arrêtant de fumer ? Tous ces résultats ainsi que la connaissance des différents traitements vont nous permettre de mettre en place une proposition de sevrage. Quels sont les traitements mis à notre disposition ? En accord avec les conclusions de la conférence de consensus de 1999, à ce jour, seuls sont reconnus : comme non-validées, ce qui ne veut pas dire qu’elles ne sont pas efficaces pour certains patients : acupuncture, phytothérapie, auriculothérapie, benzodiazépines et anxiolytiques, cassettes audio, cigarettes sans tabac, filtres anti-tabac, homéopathie, laser, hypnose, médicaments de médecine douce (logado, tabagum, nicoprive, paranico, pastaba, etc.), mésothérapie, psychothérapie de groupe, thérapie comportementale par aversion, sophrologie. La cigarette électronique doit toutefois être considérée comme dangereuse car elle dégage du propylène glycol, une substance chimique non reconnue comme inoffensive. De même, la cigarette sans tabac est au moins aussi dangereuse que la cigarette « normale » car l’absence de nicotine y est remplacée par d’autres substances parfois mal identifiées, et le taux de CO y est souvent plus important. Enfin une cigarette sans nicotine ne pourra certainement pas aider un fumeur nicotino-dépendant. – les traitements substitutifs nicotiniques (patch, gommes…) – les thérapies comportementales et cognitives (TCC) Néanmoins, les traitements psychotropes comme le Zyban (Bupropion - LP), et plus récemment le Champix ont donné également la preuve de leur efficacité dans l’aide à l’arrêt du tabac. Il existe d’autres méthodes de sevrage classées par la Haute Autorité de Santé (HAS) Quelles sont les conditions de réussite ? 1. Programmer l’arrêt total du tabagisme ou la diminution en choisissant le bon moment (motivation optimale, période propice où tout va bien…) 2. Adopter une posologie initiale suffisante 3. Éduquer à la prise éventuelle des gommes et des timbres 4. Adapter la posologie 5. Procéder à un suivi prolongé 6. Prévenir les récidives Nous disposons pour cela de différents outils : Timbres (patchs) Différents dosages Le Zyban (chlorhydrate de bupropion) Au départ le bupropion était prescrit aux USA comme antidépresseur. Suite à certaines remarques de patients ayant signalé ne plus avoir de goût pour la cigarette, ce médicament a changé d’indication. C’est un inhibiteur sélectif de la recapture neuronale de la noradrénaline et de la dopamine. La durée totale du traitement est de 7 à 9 semaines et l’arrêt du tabac a lieu au cours de la deuxième semaine. Il comporte beaucoup de contre-indications et d’effets secondaires, et représente un rapport efficacité/risque très bas. Le Zyban est donc peu prescrit, en tout cas rarement en première intention, mais plutôt lorsque tout le reste n’a pas fonctionné. Dans ce cas, les patients doivent être suivis de près par un médecin tabacologue. Le Champix Il fonctionne comme un agoniste partiel sélectif des récepteurs nicotiniques, en atténuant les manifestations de manque et en bloquant les effets renforçant de la nicotine. Il comporte quelques effets indésirables tels des nausées (traitées au Primperan), des troubles du sommeil (rêves anormaux, insomnie) et des céphalées. Photo: jcjphotography/Shutterstock.com quant une sensation de soulagement mais sans « shoot », donc sans sensation de plaisir. La prise de nicotine n’étant plus liée à une sensation agréable, la dépendance n’est plus entretenue et la désaccoutumance progressive du cerveau peut avoir lieu. Beaucoup d’espoirs reposaient sur l’apparition du Champix en février 2007, mais des effets indésirables graves ont été recensés suite à de récentes études (cf. la revue Prescrire, nov. 2008, n°301). Au total, la balance bénéfices/risques est donc défavorable. Les traitements substitutifs à la nicotine (TSN) Les TSN jouent sur le principal facteur de dépendance : la nicotine. À l’arrêt de la cigarette, le cerveau réclame sa dose et occasionne nervosité et irritabilité. La nicotine sous forme de substitut pénètre par d’autres voies que respiratoire et sanguine, c’est-à-dire par la peau ou la muqueuse buccale, et arrive en douceur au cerveau sans passer par les poumons, en provo- Formes orales Forme nasale Spray nasal Source: Le Houezec J. Le point sur …la substitution nicotinique. Actualités Innovations-Médicine, No. 53, Octobre 1998 Modalités du traitement : – Toutes les formes de substituts nicotiniques ont une efficacité similaire à posologie égale. – Le choix entre les différentes formes doit se fonder en priorité sur la préférence du patient – Les fumeurs les plus dépendants présentent plus de succès avec la gomme dosée à 4 mg qu'avec celle à 2 mg. – Habituellement, le traitement par patch est diminué progressivement par paliers, en conservant plus longtemps les SNO (substituts nicotiniques oraux). – L'association des substituts nicotiniques avec une prise en charge psychologique augmente les taux d’abstinence. (Source : AFSSAPS, Recommandations de bonne pratique : les stratégies thérapeutiques médicamenteuses et non médicamenteuse de l’aide à l’arrêt du tabac, 2003) En cas de syndrome de sevrage, qui se caractérise par des pulsions à fumer (par ondes), de la nervosité et de l’irritabilité corrélées à l’absence d’apport de nicotine, et durant les premiers jours par des difficultés de concentration, il ne faut pas hésiter à augmenter le dosage en associant patchs et SNO, voire à utiliser plusieurs patchs si le syndrome persiste après 48 h. D’un point de vue pratique, il faut aussi éduquer le patient à la prise de gomme et/ou à la pose du timbre. On notera qu’il n’y a pas de contre-indication de ces traitements chez la femme enceinte et chez les personnes cardiaques : la substitution est ainsi moins dangereuse que le tabagisme. Durée de la substitution : • Schéma traditionnel 2 à 3 mois à dose décroissante toutes les 4 semaines (pas de prescription longue sans suivi). • Schéma modifié selon les circonstances Le traitement est parfois raccourci par le patient après un ou deux oublis sans conséquence. Il doit souvent être prolongé au-delà de 3 mois, pour cause de : – Réapparition de la pulsion – Anxiété – Tentation, selon l’environnement. Lors de protocole de diminution, on peut fumer même avec des substituts. La nicotine n’est en effet pas responsable des effets nocifs de la cigarette. En résumé les substituts nicotiniques sont : – un remède à la dépendance physique – utiles lors de toute tentative de sevrage On ne devient pas dépendants aux substituts nicotiniques : au contraire, ils permettent d’anticiper les difficultés liées à l’arrêt. La seule façon de devenir dépendant à la nicotine, c’est de fumer du tabac ! Les résultats des traitements de substitution sont scientifiquement établis : le taux d’abstinence est multiplié par deux à court terme (de la fin du traitement à 3 mois) et à long terme (de 12 à 24 mois). Néanmoins, ces résultats sont encore insuffisants (50 % maximum de taux d’abstinence à 3 mois), et n’évitent pas les rechutes (50 % de rechutes entre 3 et 12 mois). Les bons taux de réussite et l’accessibilité au plus grand nombre des substituts nicotiniques ne suffisent pas : encore faut-il que le professionnel qui le prescrit et le délivre soit formé de façon adéquate, pour peu qu’il ait la volonté de s’impliquer. LES TCC ou thérapies cognitivo-comportementales L’approche cognitivo-comportementale, c’est l’analyse des pensées, des comportements et des émotions des fumeurs. Les TCC dans l’aide au sevrage tabagique visent à déconditionner le sujet en provoquant l’extinction du comportement fumeur afin de le remplacer par un comportement non-fumeur sans tensions psychologiques. Le tabagisme est un comportement, or tout comportement acquis provient d’un apprentissage : « On a appris un comportement, il va falloir le « désapprendre » pour apprendre un comportement adapté. » Les TCC peuvent s’utiliser seules, mais en général s’utilisent avec l’aide des substituts nicotiniques : on augmente alors les chances d’abstinence un an après l’arrêt. Ces méthodes s’adressent à la majorité des patients et peuvent être utilisées dans les cas simples par des chirurgiens-dentistes qui désirent se former. En tant que chirurgiens-dentistes nous serons surtout là pour les cas simples, en tant que « facteur déclenchant », et pour les cas un peu plus complexes, en tant que coach, en utilisant l’entretien motivationnel et un suivi rapproché. La motivation est bien sûr l’élément essentiel et la clé du succès. Cycle de cessation L’arrêt du tabac est en effet un changement comportemental, un processus dynamique bien identifié et universellement admis en 5 stades de motivation, avec une probabilité croissante d’arrêter totalement de fumer. INDÉTERMINATION (pré-contemplation) – Le fumeur n’envisage pas sérieusement d’arrêter de fumer dans un délai de 6 mois. – Les « avantages » de la cigarette l’emportent sur les risques.