Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes

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Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes
Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes
Reprise de la conduite automobile chez les
personnes ayant eu un traumatisme crânien :
Evaluation en ergothérapie
UE 6.5 S6
Evaluation de la pratique professionnelle et recherche
LE COAT Alexandra
24 mai 2013
Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle faite sans le
consentement de l'auteur est illégale.
Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes
Reprise de la conduite automobile chez les
personnes ayant eu un traumatisme crânien :
Evaluation en ergothérapie
UE 6.5 S6
Evaluation de la pratique professionnelle et recherche
LE COAT Alexandra
24 mai 2013
Remerciements
Je tiens tout d’abord à remercier ma maître de mémoire, Caroline DIPLAS, pour
son accompagnement, ses conseils avisés et ses encouragements tout au long du
mémoire.
Merci aux ergothérapeutes ayant répondu aux questionnaires, et à tous qui m’ont
accompagnée durant mes recherches et ma formation.
Merci à mes compatriotes de groupe mémoire et plus largement de promo pour
leurs soutiens et leurs conseils.
Merci à ma mère pour ses multiples relectures et l’intérêt qu’elle a pu porter à
mon travail.
Sommaire
Introduction ..................................................................................................................................................... 1
1.
Problématique ......................................................................................................................................... 2
2.
Partie Théorique ...................................................................................................................................... 7
2.1. L’évolution d’un traumatisme crânien ......................................................................................................... 7
2.1.1. Anatomie du cerveau ........................................................................................................................... 7
2.1.2. Une lésion cérébrale : le traumatisme crânien .................................................................................... 9
2.1.3. Le parcours de soin d’une personne ayant un traumatisme crânien ................................................. 10
2.2. Une étape de la rééducation : la conduite automobile .............................................................................. 17
2.2.1. Les différentes fonctions de la conduite automobile ......................................................................... 17
2.2.2. Les capacités mises en jeu lors de cette activité ................................................................................ 18
2.2.3. Incapacités liées au traumatisme crânien et conduite automobile ................................................... 19
2.2.4. Quelles solutions face à ces incapacités ? .......................................................................................... 20
2.2.5. L’évaluation de la conduite automobile ............................................................................................. 23
2.2.6. Conduite automobile et handicap : le cadre législatif ........................................................................ 25
3.
Partie Pratique ....................................................................................................................................... 27
3.1. La méthode mise en place ......................................................................................................................... 27
3.1.1. Objectif de l’étude .............................................................................................................................. 27
3.1.2. Choix de la population ........................................................................................................................ 27
3.1.3. Choix de la méthode........................................................................................................................... 27
3.2. Analyse des données .................................................................................................................................. 28
3.2.1. Caractéristiques de professionnels interrogés ................................................................................... 28
3.2.2. L’évaluation de la conduite automobile ............................................................................................. 29
3.2.3. Les pratiques concernant les évaluations « papier-crayon » ............................................................. 31
3.2.4. Les pratiques concernant l’évaluation écologique ............................................................................. 32
3.2.5. Les pratiques concernant le simulateur de conduite ......................................................................... 34
3.2.6. A la suite de l’évaluation .................................................................................................................... 35
3.2.7. Quelle serait, pour vous, la démarche idéale d’évaluation à la conduite automobile ? .................... 40
3.2.8. En conclusion de l’enquête ................................................................................................................ 42
4. Discussion .................................................................................................................................................. 44
4.1. Vérification des hypothèses ....................................................................................................................... 44
4.2. Critique de la méthode............................................................................................................................... 45
4.2.1. Critique du questionnaire ................................................................................................................... 45
4.2.2. Critique de notre recherche ............................................................................................................... 45
4.3. Les pistes de réflexion ................................................................................................................................ 46
4.3.1. Le manque de reconnaissance de l’évaluation .................................................................................. 46
4.3.2. Anosognosie et conduite automobile, quelles solutions? .................................................................. 48
4.3.3. La mise en situation écologique ......................................................................................................... 49
4.3.4. Le travail équipe ................................................................................................................................. 49
Conclusion...................................................................................................................................................... 52
Bibliographie .................................................................................................................................................. 53
ANNEXES ............................................................................................................................................................
Introduction
En 2012, un programme d’action en faveur des traumatisés crâniens a été élaboré
dans le but de répondre aux besoins et de mettre en place des aides pour cette population
aux caractéristiques spécifiques. Par ce document, l’Etat montre l’importance de prévenir ce
problème de santé publique qui touche de plus en plus de jeunes mais traduit également une
volonté de prendre en charge et d’intégrer cette population dans notre société.
Lors de ma formation, la prise en charge d’une personne ayant eu un traumatisme
crânien m’a interrogée par sa spécificité mais également par sa complexité qui touche tous
les aspects de la vie quotidienne.
Une des étapes de la réinsertion passera par une activité pouvant être chère au patient
souvent jeune : la conduite automobile. Cette activité est un mode d’indépendance qui fait
parti du quotidien de près de 40 millions de Français. Malgré tout, il ne faut pas oublier
l’enjeu et les habiletés mises en jeu lors de son exécution qui peut se révéler impossible
pour une personne ayant des lésions cérébrales.
Afin de permettre le retour à une qualité de vie antérieure, l’ergothérapeute sera amené à
évaluer les capacités de conduite du patient ayant eu un traumatisme crânien. Pour ce faire,
il aura à sa disposition des outils d’évaluation variés mais également son savoir-faire et ses
compétences d’analyse.
Afin de comprendre comment l’ergothérapeute met en place une évaluation pertinente de la
conduite automobile auprès d’un patient ayant eu un traumatisme crânien, nous allons en
détailler plusieurs aspects.
Après avoir expliqué le cheminement de notre réflexion, nous allons exposer plusieurs
apports théoriques qui nous permettront de comprendre cette problématique. Nous allons
présenter le résultat d’une enquête faite auprès des ergothérapeutes pour voir comment ils
fonctionnent et pour confronter la théorie à la pratique. Après avoir analysé les résultats nous
apporterons des pistes de réflexions permettant de comprendre ce qui pourrait être mis en
place chez ces professionnels de santé.
1
1. Problématique
Lors de mon stage de fin de deuxième année dans un centre de rééducation et de
réadaptation fonctionnelle en service neurologie, j’ai suivi un patient (Mr L) âgé de 30 ans
ayant eu un traumatisme crânien. Cet accident a eu pour conséquence un déficit moteur de
l’hémicorps gauche et des troubles des fonctions cognitives dont une anosognosie. Il était
pris en charge par une équipe pluridisciplinaire afin de lui permettre de redevenir autonome
et indépendant.
Du fait de cette prise en charge globale, nous avons pu remarquer des améliorations auprès
de ce patient.
En lien avec le projet de réadaptation, la question de la conduite automobile s’est alors
naturellement posée. Il savait que des évaluations auto-école étaient effectuées dans ce
centre et m’a donc demandé quand il pourrait en réaliser une.
La situation de ce jeune m’a posé question du fait de l’importance au quotidien de la
conduite. En milieu rural, la perte du permis de conduire est synonyme d’exclusion.
Pour comprendre au mieux la situation de ce jeune, je me suis posée la question : Et si cela
m’arrivait ? Si je perdais mon permis du fait d’un problème de santé ou à la suite d’une
contravention, je serais en difficultés pour me rendre où je le souhaite. Cela aura des
répercussions sur mes interactions sociales et professionnelles.
En discutant avec lui de la problématique de la conduite, j’ai appris qu’il conduisait sa
voiture, malgré la non-autorisation du médecin. Du fait de l’anosognosie, il n’y avait, pour lui,
pas d’obstacles à ce qu’il conduise. A ses yeux, les possibilités au niveau de son bras lui
permettaient de conduire et ses autres troubles ne perturbaient pas la conduite. Il mettait
alors sa vie ainsi que celles des autres usagers de la route en danger.
Cette situation m’a permis de réfléchir plus largement aux conséquences d’un traumatisme
crânien. Les troubles faisant suite à cet accident sont variés, il faut donc bien les comprendre
et les évaluer pour pouvoir les prendre en charge.
Quels moyens sont à la disposition de l’ergothérapeute pour prendre en charge les
personnes ayant eu un traumatisme crânien ? Quelles sont les méthodes utilisées lors de
l’intervention de l’ergothérapeute dans le cadre de la reprise de la conduite automobile ?
Comment faire comprendre aux patients cérébrolésés la dangerosité de la reprise
automobile ?
2
La réadaptation est également une phase importante de la prise en charge du patient ayant
eu un traumatisme crânien. La conduite automobile peut être considérée comme un mode
d’insertion sociale permettant à toute personne en capacité de conduire d’être indépendante.
Mais que se passe-t-il quand nous perdons cette indépendance ? Quels peuvent être les
impacts sur la vie quotidienne ? Dans quelles mesures cela a-t-il des conséquences sur
notre qualité de vie mais également sur notre entourage ?
Des difficultés motrices peuvent entraver la reprise de la conduite automobile. Ces
difficultés ajoutées à des troubles des fonctions exécutives peuvent devenir un réel handicap
pour le patient et lui faire perdre en indépendance dans la vie de tous les jours.
J’ai choisi de m’intéresser uniquement à la reprise de la conduite automobile et non à
son apprentissage.
En effet, la reprise de la conduite induit la prise en compte d’habitudes antérieures, bonnes
ou mauvaises, d’automatismes et de réflexes qu’acquiert un conducteur. Lors de
l’apprentissage, le jeune doit apprendre à connaître le véhicule et découvre la conduite, il n’y
a donc pas de comparatif possible avec le comportement avant le traumatisme crânien.
De plus, les démarches administratives sont différentes dans ces deux cas. Lors de
l’apprentissage, il suffit juste de signaler son handicap tandis qu’en cas de reprise, les
démarches à effectuer sont plus lourdes et rajoutent une problématique à la situation de
handicap.
Le deuil est également présent dans la reprise de la conduite tandis que dans
l’apprentissage, cette notion est moins présente, la conduite n’étant pas ancrée dans les
habitudes de vie.
Pour permettre la reprise de la conduite, des outils de rééducation sont à la disposition des
professionnels de santé. L’ergothérapeute, rééducateur spécialiste des activités de la vie
quotidienne, est le premier sollicité par les patients. Il pourra alors utiliser des tests papiercrayon, des évaluations écologiques sur route ou encore sur simulateur de conduite.
Quels sont les limites du simulateur de conduite? Comment l’ergothérapeute intervient-il ?
Les patients observent-ils de réelles améliorations suite à l’utilisation de ces différents
outils ?
Afin de répondre au mieux à toutes ces questions, j’ai effectué diverses recherches et j’ai eu
l’occasion d’effectuer un entretien exploratoire.
Pour cet entretien j’ai contacté une ergothérapeute exerçant en Centre Médical et
Pédagogique (CMP)
3
qui s’occupe plus particulièrement de la reprise de la conduite
automobile. Dans ce centre, un simulateur de conduite permet aux ergothérapeutes de faire
une évaluation de la conduite chez des patients ayant pour objectif la reprise de la conduite
automobile. C’est le seul simulateur de conduite de Bretagne. En cas de situations plus
complexes nécessitant de nombreux aménagements, l’ergothérapeute dirige les patients
vers le centre de Kerpape à Ploemeur (56) qui dispose d’une auto-école adaptée.
Les patients utilisant le simulateur de conduite peuvent être en rééducation dans la structure
ou bien externes mais sont forcément adressés en ergothérapie sur prescription médicale.
Six séances sont alors prescrites : cinq séances sur simulateur d’une durée d’une heure
permettent d’évaluer les capacités de la personne puis une heure d’évaluation écologique
avec un moniteur auto-école afin d’évaluer les capacités du patient en situation réelle.
Certains patients ne feront pas cinq séances si l’ergothérapeute juge qu’ils sont aptes à
effectuer l’évaluation écologique. Tandis que d’autres devront en faire plus car
l’ergothérapeute ne les évaluera pas prêts pour la conduite sur route.
Les heures sur simulateur permettent de voir quels aménagements du poste de conduite
peuvent être mises en place en fonction des déficiences de la personne : fourche au volant,
direction assistée ou sur-assistée, pédale inversée. Des calculs du temps de réaction de
freinage, du temps de passage entre la pédale de frein et d’accélérateur sont calculés afin
de voir si les aménagements mis en place conviennent. Ces calculs sont effectués plusieurs
fois afin que la personne puisse s’habituer aux aménagements et au simulateur. Différents
parcours sont ensuite proposés : conduite sur circuit, conduite sur route avec plus ou moins
de trafic, conduite de nuit. Ces différentes mises en situation permettent de voir comment la
personne réagit face à des évènements.
Mais comme me l’a dit l’ergothérapeute, le simulateur ne traduit pas la réalité. Les situations
rencontrées dans l’ordinateur ne plongent pas forcément dans la réalité. C’est pourquoi une
évaluation écologique est essentielle afin d’observer les capacités du patient. Le moniteur
auto-école est alors contacté afin de le tenir au courant des aménagements mis en place sur
le simulateur afin que le patient puisse avoir les mêmes sur le véhicule adapté.
Lors de l’évaluation écologique, l’ergothérapeute est présent dans la voiture. Le patient est
mis dans différentes situations de conduite : sur un parking, avec de la circulation, etc.
A l’issue de ces six séances, l’ergothérapeute et le moniteur auto-école donnent leur avis sur
l’aptitude du patient à la conduite. Un document de synthèse lui est alors remis.
4
Dans ce CMP, le neuropsychologue n’est pas forcément sollicité dans le cadre de la reprise
de la conduite automobile. Même si l’ergothérapeute n’est pas un spécialiste des troubles
cognitifs, des troubles comme l’anosognosie sont facilement remarquables. En cas de doute,
le neuropsychologue peut néanmoins être sollicité afin de faire un bilan des capacités plus
précis.
Cet entretien avec l’ergothérapeute m’a permis de mieux comprendre la procédure
d’utilisation du simulateur de conduite. La multitude des aménagements possibles permet de
pouvoir adapter au mieux le poste de conduite à toute personne en situation de handicap.
Les patients ayant eu un accident de voiture n’ont pas forcément d’appréhension à
reconduire, la conduite est une telle nécessité dans leur vie quotidienne qu’ils ont hâte de
reconduire. Ils ne sont pas forcément plus prudents dans la conduite.
L’ergothérapeute du CMP m’a également parlé de l’étape de deuil qui pouvait ressortir lors
d’une séance de conduite sur simulateur. Le simulateur permet de tester les capacités de
chacun mais place également la personne face à ses difficultés. Même s’il ne s’agit pas de la
réalité, le réalisme de la situation peut apporter beaucoup d’émotions aux patients. « Le deuil
de la conduite, c’est le deuil de l’indépendance. » (Paroles de l’ergothérapeute)
L’écoute est également un élément important. Durant une séance, cela permet de
comprendre les besoins de la personne, ses attentes et de l’accompagner dans cette étape
de la réadaptation.
Au cours de cet entretien, j’ai également appris que la loi avait changé. Depuis juillet 2012,
une personne ayant eu un problème de santé et devant régulariser son permis de conduire
ne passe plus en commission médicale en préfecture mais devant un médecin agréé.
L’ergothérapeute se posait donc des questions par rapport à cette nouvelle modalité.
Comment sont préparés les médecins agréés ? Ont-ils une formation particulière ? Sont-ils
sensibilisés aux différentes troubles neurologiques ?
Cet entretien m’a permis de me questionner sur les différentes modalités de prise en charge
d’un patient ayant eu un traumatisme crânien dans le cadre de la reprise de la conduite
automobile. Comment les différents outils d’évaluation à la conduite automobile sont-ils
utilisés ? Y-a-t-il des différences significatives observées en fonction de l’utilisation d’un type
d’outil ?
5
Au cours de mes recherches, j’ai également pu voir qu’une conférence sur
l’automobile et le handicap avait eu lieu le 15 septembre 2011. Cette matinée a été
organisée par le CEREMH (Centre de ressource et d’innovation mobilité handicap) en
partenariat avec l’APF (Association des Paralysés de France) et la MACIF (qui représentait
ainsi la part des mutuelles). Différents thèmes en relation avec la conduite automobile et le
handicap ont été abordés et notamment un état des lieux de l’évaluation de la conduite
automobile en France. Il n’y a pas d’uniformisation des pratiques.
Un travail de réflexion est en cours entre le CEREMH et le Réseau Comète France pour
harmoniser les pratiques.
Cette conférence m’a permis de voir quelle était vraiment la situation en France et qu’il y a
bien des disparités en fonction des établissements. Mais quelles sont les pratiques ? En quoi
leurs différences ont-elles un impact sur la prise en charge du patient ?
Dans le cadre de la reprise de la conduite automobile chez un patient ayant eu un
traumatisme crânien, comment l’ergothérapeute élabore-t-il une évaluation pertinente
pour une prise en charge globale du patient ?
Hypothèses :
Hypothèse 1 : Le patient est au centre de la prise en charge. En fonction de ses besoins et
attentes, l’ergothérapeute adapte sa prise en charge et effectue des évaluations permettant
au patient de se rendre compte de ses capacités et incapacités.
Hypothèse 2 : L’évaluation écologique permet de mettre le patient en situation réelle et qu’il
prenne conscience de ses capacités L’utilisation d’une évaluation écologique, couplée ou
non à l’emploi d’autres outils, est essentielle pour une évaluation pertinente du patient.
Hypothèse 3 : L’ergothérapeute doit s’adapter aux moyens de la structure, ce qui limite ses
choix et ses possibilités d’effectuer une évaluation la plus pertinente.
6
2. Partie Théorique
Dans cette partie, nous allons étudier plusieurs concepts théoriques afin de
comprendre dans quelles mesures la reprise de la conduite automobile est difficile pour les
personnes ayant eu un traumatisme crânien.
2.1. L’évolution d’un traumatisme crânien
Lors d’une lésion cérébrale, le traumatisme est dû à une atteinte de l’encéphale. Les
informations nerveuses sont élaborées et transmises dans le système nerveux central. Celuici correspond à l’encéphale et à la moelle épinière. Nous allons donc dans un premier temps
nous intéresser à la composition de l’encéphale et à son fonctionnement afin de comprendre
quelles seront les conséquences d’une lésion.
2.1.1. Anatomie du cerveau
2.1.1.1. Composition de l’encéphale
Figure 1 : Composition de l’encéphale
7
Situé dans la cavité crânienne, l’encéphale est protégé par les méninges qui forment
une couverture protectrice.
L’encéphale (figure 1) comprend :

le cerveau qui est la partie la plus volumineuse. Il est séparé en deux hémisphères,
gauche et droit, qui sont reliés au centre par le corps calleux. Ce dernier permet la
communication des informations entre les deux hémisphères.

le diencéphale est lui-même composé du thalamus, de l’épithalamus, de
l’hypothalamus, du subthalamus et du métathalamus. Situé au centre de l’encéphale,
il « représente un centre sécrétoire hormonal et un carrefour des voies végétatives »
(P. Kamina)

le tronc cérébral est lui-même composé du mésencéphale, du pont et du bulbe. C’est
dans cette partie que se trouve l’origine des nerfs crâniens.

le cervelet situé en dessous de l’encéphale et en arrière du tronc cérébral. La
communication avec ce dernier se fait par les pédoncules cérébelleux. Le cervelet est
composé de deux hémisphères cérébelleux responsables de la coordination des
mouvements et d’un vermis cérébelleux (situé au centre) qui intervient dans la
fonction d’équilibration.
Nous pouvons donc voir que l’encéphale est un organe complexe du corps humain. Son
organisation en plusieurs parties lui permet de répartir dans différentes zones les différentes
fonctions qui lui sont propres.
Lors d’un traumatisme crânien les fonctions motrices, sensorielles ou encore cognitives
peuvent être atteintes. Ces fonctions sont réparties dans différentes zones du cerveau que
nous allons voir.
2.1.1.2. Morphologie du cerveau
Le cerveau est composé de quatre lobes séparés par des scissures. Chaque lobe est
responsable de différentes fonctions.
Figure 2 :
Morphologie du cerveau
8

Le lobe frontal : situé en avant de la scissure centrale, il représente 40% du poids
total du cerveau. C’est dans cette région que sont élaborées les fonctions motrices,
exécutives et les émotions.

Le lobe pariétal : situé en arrière de la scissure centrale. Il est principalement
responsable des fonctions sensitives et c’est également dans cette région que la
fonction du schéma corporel est élaborée.

Le lobe temporal : situé en dessous du lobe frontal et en avant de l’encéphale. Il
intervient dans les fonctions sensorielles, auditives et visuelles.

Le lobe occipital : situé en dessous du lobe pariétal et en arrière de l’encéphale. Ce
lobe est responsable de la réception et l’analyse de l’information visuelle.
Le cerveau est donc un organe complexe et organisé. Il est important de comprendre son
fonctionnement afin de pouvoir traiter au mieux les lésions qu’il peut subir.
Lors d’un traumatisme crânien, la région de la lésion permet de comprendre les troubles qui
peuvent alors être associés. Plusieurs zones peuvent également être touchées ce qui
augmentera les troubles pouvant être présents.
2.1.2. Une lésion cérébrale : le traumatisme crânien
2.1.2.1. Définition
Le traumatisme crânien est un mécanisme complexe ayant des conséquences
diverses selon la portée et l’importance du choc.
Selon le Larousse, un trauma est défini comme une « blessure, lésion locale produite par
une violence extérieure ». Dans un traumatisme crânien, la lésion est située au niveau de la
tête ce qui a pour conséquence une atteinte cérébrale. Ce choc peut être direct ou indirect et
trois types de mouvement sont à l’origine de la projection du tissu cérébral contre la boîte
crânienne : la décélération, l’accélération et la rotation.
Lors de cet évènement traumatique, « la dissipation de l’énergie mise en jeu dans
l’accident provoque au niveau de l’encéphale et de ses enveloppes des altérations plus ou
moins sévères, plus ou moins étendues, plus ou moins évolutives » (F. Cohadon, J.P.
Castel, E. Richer et al. 2008).
Cette atteinte aura pour conséquence la destruction ou le dysfonctionnement des cellules
cérébrales.
En fonction des dommages et de leurs étendues, des séquelles de gravités différentes
pourront être repérées. Cela traduira alors un traumatisme crânien sévère, modéré ou léger.
9
Suite à l’accident responsable du traumatisme crânien, le patient va être confronté à
différentes périodes, de durée variable selon la gravité de l’atteinte et la prise en charge qui
s’en suit.
En fonction de la localisation, de la gravité des lésions ou encore de l’étendue, le devenir du
patient sera différent. Le traumatisme crânien touchant une zone complexe et de multiples
fonctions du corps humain, la pathologie en découlant sera d’autant plus variée. Plusieurs
facteurs entrent en cause dans cet accident, d’où l’importance de comprendre les causes et
les différents mécanismes s’y rattachant
2.1.2.2. Epidémiologie
Le traumatisme crânien en France est un grand problème de santé publique. Chaque
année, 155 000 personnes sont admises à l’hôpital suite à un traumatisme crânien et 8500
personnes auront des séquelles invalidantes suite à ce traumatisme qui sera alors considéré
comme grave.1 Les traumatismes crâniens touchent deux hommes pour une femme et
concernent en majorité les jeunes adultes de 15 à 30 ans.
La principale cause de traumatisme crânien est l’accident de la voie publique.
Les traumatismes crâniens légers représentent 80% de l’ensemble des traumatismes
crâniens.
Ces données nous permettent de voir que le traumatisme crânien est évènement fréquent en
France. La prise en charge variera en fonction des troubles observés mais du fait de
l’important nombre de traumatisme crânien, plusieurs solutions pourront être envisagées afin
de permettre ainsi d’adapter au mieux la prise en charge à chaque patient.
2.1.3. Le parcours de soin d’une personne ayant un traumatisme crânien
Suite à l’accident à l’origine du traumatisme crânien, la personne pourra traverser
différentes étapes qui passeront du coma, à l’amnésie post-traumatique jusqu’à la
rééducation finale et la réadaptation dans un milieu ordinaire ou adaptée.
Toutes les personnes ayant eu un traumatisme crânien ne passeront pas par les mêmes
phases, cela dépendra de l’étendue des lésions, de la localisation. La prise en charge sera
donc ajustée en fonction de chacun.
Dans un premier temps, à la suite d’un traumatisme crânien, toute personne sera prise en
charge aux urgences.
1
Programme d’actions 2012 en faveur des traumatisés crâniens et des blessés médullaires
10
2.1.3.1. La première évaluation aux urgences
L’arrivée de la personne aux urgences est une étape essentielle de la prise en
charge. C’est lors de ce premier contact qu’une évaluation initiale pourra être effectuée
permettant ainsi de faire un état des lieux de l’étendue des lésions de la personne.
Pour évaluer la gravité du traumatisme crânien, l’échelle de coma de Glasgow2 est
l’outil de mesure le plus largement répandu, notamment du fait de sa simplicité d’utilisation.
Dans cette évaluation, trois critères sont évalués : l’ouverture des yeux, la réponse motrice et
la réponse verbale. L’échelle se cote de 3 à 15, un score en dessous de 8 traduit un coma.
L’échelle de Glasgow permet également d’avoir une première approche de la gravité du
traumatisme crânien. En fonction du score obtenu, nous avons trois degrés de gravité :
-
Score de 3 à 8 : traumatisme crânien grave ou sévère (5 à 10%)
-
Score de 9 à 12 : traumatisme crânien modérée (10 à 15 %)
-
Score de 13 à 15 : traumatisme crânien léger (80%)
Elle permet d’observer la profondeur d’un coma, l’évolution du patient à différents niveaux
mais également d’aider le personnel soignant sur le choix des traitements et donner un
premier pronostic quant à la suite du parcours de la personne.
Une personne ayant un score faible aura une plus longue rééducation et probablement des
séquelles à long terme.
Suite à cette évaluation, l’amnésie-post traumatique3 (APT) pourra être évaluée. La
durée de l’APT permettra de définir la sévérité du traumatisme crânien et ainsi de prédire les
séquelles et le futur des patients.
Le score de Goat4 est alors utilisé. Dans cette évaluation, différentes questions sont posées
au patient par rapport à l’orientation temporale, spatiale ou encore au sujet de l’accident.
Suite à ces premières évaluations et aux différentes évolutions du patient, plusieurs troubles
pourront être perçus.
2.1.3.2. Les troubles pouvant être présents
Le patient ayant eu un traumatisme crânien peut présenter différents types de
séquelles. En fonction des séquelles mais également de leur gravité, le projet de vie du
patient pourra être entravé. Afin de comprendre à quelles difficultés devront faire face les
patients, nous allons développer les principales séquelles.
2
Annexe 1
« Période de longueur variable suivant le coma pendant laquelle le patient est confus,
désorienté, souffre d’amnésie rétrograde et est incapable d’enregistrer et de rappeler de nouvelles
informations ». (Cofemer)
4
Annexe 2
3
11
Les séquelles motrices
Selon Handipole, « une déficience motrice est une atteinte de la capacité du corps ou
d’une partie du corps à se mouvoir. » Les séquelles motrices peuvent avoir des
conséquences sur le déplacement dans l’espace, sur l’interaction avec l’environnement du
fait de difficultés de préhensions ou encore sur l’alimentation. Toutes actions nécessitant
l’intervention de muscles pourront être entravées en fonction de l’atteinte. Ainsi, un patient
ayant un traumatisme crânien peut avoir une hémiplégie, un déficit musculaire à un membre
supérieur ou encore des difficultés au niveau de la parole.
Les personnes ayant eu un traumatisme crânien ont très souvent des déficiences
neuromotrices qui tendent à diminuer au cours des mois. En effet, suite à une rééducation, à
peine 5% des patients conservent un déficit hémiplégique. De plus, 70% récupèrent une
marche qui leur permet d’être autonomes.
Ces séquelles « constituent rarement un handicap majeur pour la réinsertion » (F. Cohadon,
J.P. Castel, E. Richer et al. 2008).Elles ne sont pas la plus grande problématique pour les
personnes ayant eu un traumatisme crânien.
Les séquelles cognitives
Ces déficiences constituent un handicap invisible. Du fait de la problématique de la
réinsertion sociale, familiale et professionnelle, ce sont elles qui seront la principale source
de handicap. Les fonctions supérieures, l’attention, la mémoire ou encore les fonctions
exécutives sont élaborées dans différentes zones du lobe frontal. Par exemple, une atteinte
de l’hémisphère droit du lobe frontal aura pour conséquences des troubles attentionnels.
Troubles de l’attention :
L’attention est un mécanisme permettant de sélectionner des informations et de les
maintenir à la conscience. Plusieurs processus sont mis en jeu : des processus
automatiques tels que l’alerte (la réaction à un stimulus extérieur), la vigilance (le traitement
de plusieurs informations en même temps) et enfin l’attention soutenue et des processus
volontaires qui sont l’attention sélective et la concentration qui demandent une plus grande
participation à la personne. L’attention permet donc de pouvoir exécuter une tâche de façon
adaptée. Elle est sollicitée lors de nombreuses activités de la vie quotidienne et peut être
déficitaire chez le patient ayant eu un traumatisme crânien.
Un déficit attentionnel se traduira par des difficultés à se concentrer sur une tâche s’il
y a des stimuli extérieurs, le patient ne pourra pas effectuer deux actions différentes en
même temps et présentera un ralentissement psychomoteur et une fatigabilité.
12
Troubles de la mémoire :
La mémoire se définit comme la capacité à maintenir et à restituer des informations
ou des faits passés. La mémoire est un mécanisme complexe divisé en plusieurs systèmes
ayant chacun leurs rôles.
- La mémoire de travail conserve les informations pendant un temps limité, elle est utile pour
la manipulation mentale
- La mémoire épisodique concerne les épisodes de vie anciens comme récents, elle est
associée aux émotions et aux sensations
- La mémoire autobiographique correspond aux informations de vie
- La mémoire sémantique contient les informations sur les connaissances générales
- La mémoire procédurale touche les procédures sémantiques.
Nous avons aussi deux autres mémoires : la mémoire rétrograde qui concerne les
évènements s’étant déroulés avant le traumatisme tandis que la mémoire antérograde
touche les évènements postérieurs au traumatisme.
Nous pouvons donc voir que la mémoire est un système organisé et complexe dont la
rééducation se fera en fonction de l’atteinte. Nous pouvons également noter que la
récupération est très variable et que les troubles de la mémoire sont très fréquemment
présents à la suite d’un traumatisme crânien.
Syndrome dysexécutif :
Les fonctions exécutives sont les actions nécessaires pour faire face aux situations
non routinières, nouvelles ou inhabituelles. Elles sont donc essentielles pour pouvoir faire
face à des situations telles que prendre l’avion ou se rendre à un rendez-vous.
Dans le versant cognitif du syndrome dysexécutif, nous pouvons retrouver un déficit
d’inhibition, de flexibilité, de l’attention divisée, de l’attention soutenue, de la mémoire
prospective ou encore un déficit de la planification. Dans le versant comportemental, nous
pourrons observer une apathie, un désintérêt, des troubles des conduites sociales.
Le patient traumatisé crânien ayant un syndrome dysexécutif pourra ainsi avoir une
désinhibition (avoir des comportements inappropriés), un déficit d’attention divisée et
soutenue ou encore un défaut de planification (difficulté pour organiser une journée). Ces
troubles auront pour conséquences d’entrainer des difficultés dans la vie quotidienne.
Un
trouble
souvent
présent
chez
un
patient
cérébrolésé
est
l’anosognosie :
« méconnaissance, par un malade, de son affection, cependant évidente » (Dictionnaire
illustré des termes de médecine). Le patient ne se rend alors pas compte de ses troubles et
peut alors être dangereux pour lui et les autres. Ce trouble est problématique tout au long de
13
la prise en charge car le travail effectué n’aura, aux yeux du patient anosognosique, pas de
sens et il ne sera pas investi dans sa rééducation.
Autres troubles
En plus de ces principaux troubles, le patient ayant eu un traumatisme crânien peut
présenter d’autres déficiences.
La communication peut être altérée. En effet, on peut observer des troubles de la parole
(dysarthrie), des aphasies ou encore des problèmes de communication non verbale.
Des troubles sensoriels peuvent également être observés comme une héminégligence
Nous pouvons donc voir que de nombreux troubles peuvent être associés au
traumatisme crânien. En fonction du traumatisme, les troubles associés varieront et donc la
prise en charge sera différente. Par exemple, si une personne a des troubles de l’attention
divisée, la mise en place de stratégies de compensation ou la restauration de ces capacités
sera primordiale pour avancer dans la prise en charge. Si ce trouble n’est pas pris en compte
en premier lieu, le patient ne pourra pas sélectionner les informations pertinentes et ainsi
poursuivre son évolution. Une prise en charge individualisée et adaptée à chaque patient
permettra de prendre en compte chaque déficit qu’il présente.
En fonction des capacités de la personne, elle sera orientée pour une prise en charge en
service de rééducation ou alors sera admis en unité pour personnes en état végétatif.
Dans cette étude, nous nous intéresserons à la prise en charge dans une structure de
rééducation type MPR (Médecine Physique de Réadaptation) des personnes ayant eu un
traumatisme crânien.
2.1.3.3. La rééducation mise en place par une équipe pluridisciplinaire
La prise en charge rééducative a pour objectif global la rééducation des déficiences
motrices et cognitives. Pour ce faire, une équipe pluridisciplinaire interviendra auprès du
patient sur prescription du médecin référent du patient. Celui-ci sera coordinateur des soins
et supervisera les différents intervenants.
Un des professionnels rééducateurs intervenant auprès du patient ayant eu un
traumatisme crânien est l’ergothérapeute.
Selon l’ANFE, « l’ergothérapeute est un professionnel de santé qui fonde sa pratique sur le
lien entre l’activité humaine et la santé. L'objectif de l'ergothérapie est de maintenir, de
restaurer et de permettre les activités humaines de manière sécurisée, autonome et
efficace. Elle prévient, réduit ou supprime les situations de handicap en tenant compte
des habitudes de vie des personnes et de leur environnement. L'ergothérapeute est
14
l'intermédiaire entre les besoins d'adaptation de la personne et les exigences de la vie
quotidienne en société.»
L’ergothérapeute permet aux personnes en situation de handicap d’acquérir une
véritable autonomie dans les activités de la vie quotidienne.
L’ergothérapeute, de part ses compétences, va pouvoir analyser une personne dans
différentes situations et lui apporter des solutions pour pouvoir mener à bien ses activités.
Chez une personne ayant eu un traumatisme crânien, la réalisation d’une activité pouvant se
montrer simple peut devenir irréalisable. L’analyse par l’ergothérapeute de l’exécution du
geste moteur permettra de rechercher des stratégies de compensation ou encore d’axer sa
rééducation sur certains éléments. De plus, des troubles cognitifs peuvent entraver la
réalisation du geste. Les connaissances de l’ergothérapeute seront utiles afin de comprendre
les difficultés auxquelles doit faire face le patient et trouver des stratégies de rééducation à
mettre en place.
La rééducation par l’ergothérapeute est à visée fonctionnelle et l’implication du patient par le
passage d’activités significatives lui permet de gagner en indépendance au quotidien. En lien
avec les acquis observés en rééducation et les progrès du patient, il y aura ensuite une
transposition des méthodes de rééducation dans des situations écologiques au plus près de
la réalité. Grâce à ces différentes méthodes, l’ergothérapeute prendra en charge le patient
ayant eu un traumatisme crânien dans sa globalité.
Un autre rééducateur essentiel dans la prise en charge de ces patients est le masseurkinésithérapeute. Son travail est axé sur le mouvement et donc le développement musculaire
du patient. A travers des techniques variées et adaptées à chaque patient il traite les déficits
afin de pallier aux incapacités que la maladie peut engendrer.
Le kinésithérapeute interviendra auprès de la personne cérébrolésée dans le cadre
de la rééducation motrice. Ce travail, pratiqué en équipe, aura pour objectifs une prise de
conscience de son corps, la posture ou encore le travail du tonus musculaire. Ses acquis
seront alors transposés dans des situations de vie quotidienne : les transferts, la
manipulation du fauteuil roulant ou encore la toilette.
La rééducation motrice sera couplée par une rééducation des troubles cognitifs.
Dans ce cadre, le neuropsychologue pourra être plus spécifiquement sollicité. C’est un
professionnel de santé qui étudie les fonctions cognitives et les structures cérébrales. Il
analyse le fonctionnement cognitif d’un patient, cherche à comprendre sa manière de
raisonner et met en place des stratégies qui permettent une amélioration.
Auprès d’une personne ayant eu un traumatisme crânien, le neuropsychologue va effectuer
plusieurs bilans afin de comprendre son fonctionnement cognitif. Plusieurs fonctions vont
15
être évaluées : l’attention, la mémoire, la planification, la rapidité, etc. Ce travail sera
effectuer en collaboration avec l’ergothérapeute afin d’adapter au mieux les compétences
acquises dans la vie quotidienne.
En fonction des lésions et des améliorations observées durant la rééducation, un projet de
réadaptation pourra être mis en place. Selon les cas, un changement de situation
professionnelle pourra être envisagé ainsi qu’un éventuel déménagement. Toutes ces
difficultés seront vues en équipe, l’ergothérapeute pourra être amené à faire une visite à
domicile afin d’évaluer au mieux la situation.
Nous avons également pu voir que le traumatisme crânien peut avoir de lourdes
conséquences sur le quotidien des personnes. Afin d’accompagner au mieux les patients,
une psychologue peut intervenir pour aider dans la prise en charge de la souffrance
psychique et également pour accompagner la famille dans ce travail. La famille, qui a
conscience des troubles du patient, est très sollicitée et doit faire face à de nombreuses
difficultés. Afin de les accompagner dans des démarches administratives, l’assistante sociale
peut également être sollicitée. Le traumatisme crânien étant un accident, il est souvent
question de tiers responsable et d’actions en justice, démarches qui peuvent être
compliquées à comprendre.
Le travail en équipe pluridisciplinaire et la prise en compte des différents troubles permet
d’être au plus proche des besoins du patient et de lui permettre d’être le plus indépendant
possible.
Chez une personne ayant eu un traumatisme crânien, nous avons pu voir que les troubles
peuvent être variés. Il sera donc important d’adapter au mieux la prise en charge afin de
permettre une meilleure récupération du patient.
2.1.3.4. Une phase toujours présente: le deuil
Durant toute la rééducation, la personne ayant eu un traumatisme crânien doit faire
face à de nombreuses pertes.
Le deuil est souvent apparenté à la mort mais ce n’est pas forcément le cas.
S. Freud (1915) définit le deuil comme « la réaction à la perte d’une personne aimée ou
d’une abstraction venue à sa place comme la patrie, la liberté, un idéal, etc. ». Nous pouvons
d’ailleurs remarquer que le mot « mort » n’apparait pas dans cette définition. D’après M.
Hanus (2006), « toute perte significative tout renoncement important requièrent aussi une
intégration psychique, un « travail » intérieur, une élaboration mentale qui s’apparentent au
travail de deuil nécessité par la mort d’un proche ».
16
Lors d’un travail de deuil, plusieurs stades peuvent être observés.
Nous avons tout d’abord un état de choc qui peut avoir une durée variable selon les
personnes. Il y alors un refus de croire à la situation, une non-acceptation de la perte.
Dans un deuxième temps, une période dépressive s’installe. Un repli sur soi-même peut
alors être observé ainsi que de l’agressivité, le sentiment d’abandon ou encore la culpabilité.
Enfin dans un dernier temps nous avons le rétablissement qui correspond à l’acceptation de
la perte, la personne peut recréer de nouveaux liens.
Tout deuil représente un traumatisme psychique qui s’associe à un sentiment de manque. La
durée des différents stades est variable selon les personnes mais le processus est universel.
Une personne ayant eu un traumatisme crânien pourra avoir à faire face à différentes pertes.
En fonction des troubles, il pourra s’agir de la perte de la marche, de son travail ou encore
l’abandon de certaines activités de la vie quotidienne telles que la conduite automobile. Il
sera donc essentiel de prendre en compte ce deuil dans la rééducation et d’adapter la prise
en charge et l’annonce des pertes en fonction de l’état de la personne.
La rééducation des personnes ayant eu un traumatisme crânien est donc un processus
complexe et global. La compréhension de l’ensemble des caractéristiques des troubles et de
la personne est essentielle pour avoir une prise en charge optimale.
2.2. Une étape de la rééducation : la conduite automobile
Dans cette seconde partie, nous nous intéresserons plus particulièrement à une
étape de la rééducation de la personne ayant eu un traumatisme crânien : la conduite
automobile.
2.2.1. Les différentes fonctions de la conduite automobile
La conduite automobile est un acte de la vie quotidienne qui peut être essentiel pour
un commercial qui effectue des milliers de kilomètres par semaine ou plus occasionnel pour
un citadin ayant ses activités principales à proximité. Avec plus de quarante millions de
titulaires du permis de conduire en France, nous pouvons dire que cette activité fait partie du
quotidien d’une grande majorité de Français.
En milieu rural, la possession du permis de conduire et d’une voiture est essentielle afin de
pouvoir vaquer à ses occupations. La conduite automobile peut alors être considérée comme
17
un mode d’insertion sociale. Selon M. Enjalbert, C. Fattal et A. Thevenon (2000), « la
conduite automobile est un facteur d’autonomie dans les pays industrialisés. »
Les personnes ayant eu un traumatisme crânien sont souvent des personnes jeunes
(15-24 ans) ou des personnes âgées.
La perte de la conduite automobile chez une personne jeune peut être une véritable situation
de handicap. En effet, les loisirs, la vie professionnelle peuvent être entravés par la perte de
ce moyen de transport. Cette situation de handicap peut être majorée chez cette population
car il s’agit d’une tranche d’âge plus active.
Chez la personne âgée, d’après Catherine Espinasse, psychosociologue, la perte de la
conduite est « comme une première entrée dans la dépendance ». Pour eux, la conduite
automobile est synonyme de « liberté », d’ « indépendance » et permet de ne pas être « à la
merci des autres ».
La conduite automobile permet donc d’entretenir les relations sociales que peuvent avoir les
individus. Elle est souvent associée à l’indépendance car elle permet une plus grande
capacité de déplacements de la part des individus. La perte de ce moyen de locomotion peut
donc avoir un fort retentissement sur la vie de la personne et donc de son état
psychologique. L’impact de la perte de la conduite automobile est cependant variable en
fonction de la localisation de l’habitation du patient. En effet, pour une personne habitant en
milieu urbain, la perte de la conduite automobile pourra être compensée par l’utilisation de
moyen de transport en commun par exemple. Tandis qu’une personne habitant en milieu
rural pourra être contraint de déménager afin de se rapprocher des commerces. Cela aura
alors des conséquences sur ses habitudes de vie.
2.2.2. Les capacités mises en jeu lors de cette activité
Malgré la nécessité que représente la conduite pour certaines personnes, il ne faut
pas oublier que la conduite reste une activité mettant en jeu de nombreuses capacités.
Selon J. Roche, conduire « nécessite une capacité à résoudre plusieurs actions
simultanément ». Il décompose cette capacité en trois axes :

Le savoir-faire du conducteur : habilité obtenue par la formation de base et
l’expérience acquise en roulant régulièrement.

Le comportement du conducteur : les actes de chacun influent sur sa conduite.

L’aptitude à conduire : elle concerne l’état physique et mental du conducteur.
Pour obtenir une bonne aptitude à la conduite, certaines capacités sont mises en jeu. La
perception de l’environnement est essentielle pour interagir avec celui-ci, ce sont les
systèmes sensitifs et sensoriels qui interviennent. Afin d’adapter au mieux sa conduite aux
18
stimuli extérieurs, un bon fonctionnement des fonctions cognitives est également primordial
et pour une bonne exécution du geste, des capacités motrices suffisantes sont nécessaires.
2.2.3. Incapacités liées au traumatisme crânien et conduite automobile
Nous avons pu voir que la conduite automobile demande de nombreuses capacités
qui permettent une bonne exécution de l’action. Les séquelles en lien avec le traumatisme
crânien peuvent avoir des conséquences sur la conduite automobile. Nous allons voir les
différents niveaux d’atteintes possibles.
2.2.3.1. La perception
La perception regroupe plusieurs aspects.
La vision est un facteur important à prendre en compte. 90% des indications sont
fournies par la vision, elle permet au conducteur de s’orienter et d’identifier les différentes
informations. Plusieurs zones du cerveau sont impliquées dans la vision : le cortex pariétal
pour la coordination visuo-motrices et la voie occipito-temporale reconnaître les objets.
L’information vestibulaire, située dans l’oreille interne, apporte des informations
importantes au conducteur.
La sensibilité, située dans la zone pariétale, permet au conducteur de recevoir des
informations supplémentaires sur la conduite.
Au niveau perceptif, nous pouvons voir qu’en fonction de l’atteinte au niveau du
cerveau, la conduite automobile pourra être entravée. L’atteinte de la vision pourra, en
fonction de la gravité, empêcher la reprise de la conduite automobile.
2.2.3.2. La commande motrice
En lien avec les informations reçues notamment par les yeux, le conducteur devra
adapter son comportement en fonction des situations en effectuant une réponse motrice.
Deux paramètres seront pris en compte : le temps de réaction et l’adaptation de la réponse
motrice. En fonction des lésions, la commande motrice peut être entravée ne permettant pas
au conducteur d’effectuer l’action souhaitée. Une hémiplégie ou encore un trouble de la
coordination bimanuelle peut donc empêcher la conduite chez une personne ayant eu un
traumatisme crânien. La motricité volontaire est élaborée dans le lobe frontal.
2.2.3.3. Traitement cognitif de l’information
Chez une personne ayant eu un traumatisme crânien, plusieurs fonctions essentielles
à la conduite automobile pourront être touchées.
19
Le traitement cognitif de l’information passe par plusieurs fonctions cognitives. L’attention est
nécessaire pour permettre au conducteur de percevoir les dangers éventuels, la mémoire
permet un traitement adapté de l’information.
L’apraxie correspond à l’incapacité d’exécutions intentionnelles de gestes. Lors de la
conduite, sa présence peut se révéler un danger pour des réactions adaptées aux situations.
Les fonctions exécutives, qui permettent la réalisation de tâches complexes, sont
essentielles pour permettre la reprise de la conduite automobile.
L’anosognosie peut également être un facteur de risque, la non-conscience des troubles
peut amener le conducteur à adopter un comportement dangereux. Nous pouvons
également noter parfois la présence de troubles du comportement qui peuvent avoir pour
conséquences des réponses motrices inadaptées.
La localisation de l’atteinte cérébrale est donc importante afin de comprendre les troubles en
lien et ainsi voir dans quelles mesures la personne présentera des incapacités la conduite.
2.2.4. Quelles solutions face à ces incapacités ?
Suite à un programme de rééducation, lorsque l’équipe constate que le patient n’a
plus de marges de progression, des solutions peuvent être proposées en fonction de ses
incapacités et des possibilités.
Au niveau moteur, de nombreux aménagements du véhicule peuvent être réalisés tandis
qu’au niveau des troubles cognitifs des évaluations peuvent être effectuées afin de
comprendre l’étendue des difficultés.
2.2.4.1. L’aménagement du poste de conduite
Malgré la présence de séquelles motrices ou neuromotrices, il y a la possibilité pour
les patients de reconduire du fait de l’existence de nombreuses adaptations.
En cas de déficits moteurs, plusieurs aménagements au poste de conduite pourront être
effectués. Afin de permettre l’accès au poste de conduite et aux différentes commandes,
plusieurs points pourront être aménagés :
-
l’accès au poste de conduite : pour faciliter les transferts, des sièges pivotants
pourront par exemple être installés. Il faudra également veiller à ce que le fauteuil puisse
être chargé dans le véhicule.
-
la direction du véhicule : selon les capacités du conducteur, une boule au volant ou
encore une direction podale pourra être envisagée.
-
l’accélération/freinage
20
-
le changement de vitesse : un embrayage automatique est le plus souvent envisagé.
-
les commandes annexes
Nous pouvons donc voir que lors de l’aménagement du poste de conduite, plusieurs points
peuvent être à aménager. Cependant, la diversité des équipements possibles permet de ne
pas être un frein à la reprise de la conduite.
2.2.4.2. La prise en charge en ergothérapie
La notion générale d’évaluation
Au niveau des séquelles cognitives et sensitives, des aménagements physiques ne peuvent
être envisagés comme précédemment.
Afin de déterminer quelles pourront être les difficultés à la conduite automobile liées aux
séquelles du traumatisme crânien, des évaluations pourront être effectuées.
L’évaluation est un processus faisant une partie intégrante de la rééducation. « Evaluer, c’est
apprécier objectivement l’efficacité de telle ou telle stratégie pour permettre un meilleur choix
au malade. C’est aussi mettre en place des procédures permettant d’en vérifier la bonne
réalisation, détecter et quantifier les écarts, imaginer et fournir les éléments pour les
corriger »(Y. MATILLON (HAS)).
L’évaluation en ergothérapie
L’évaluation en ergothérapie est très diversifiée. Selon les modèles utilisées, elle permet de
comprendre différents aspects du patient. J-M, Caire, I. Margot-Cattin, A. Schabaille et al.
(2008) nous parle de la dynamique d’évaluation en ergothérapie. « L’évaluation en
ergothérapie permet d’identifier les problèmes de l’usager, de les comprendre et les
expliquer, voire de les coter et les interpréter. » Il s’agit donc d’un procédé qui permet de
comprendre aux mieux les difficultés du patient et d’adapter ainsi la prise en charge.
L’ergothérapeute, de part son approche holistique, évalue le patient dans sa globalité et cible
ainsi sa rééducation sur les besoins de la personne.
Dans l’évaluation, nous pouvons distinguer quatre temps d’interventions :
-
le recueil de données : cette étape permet de recueillir des informations sur le patient
et de faire un premier point sur l’enjeu de la rééducation.
-
la sélection des éléments à évaluer : en fonction des difficultés de la personne, un
choix des évaluations à effectuer est essentiel.
-
le choix de l’outil : en fonction la personne et des capacités observées, le choix de
l’outil sera essentiel pour évaluer au mieux les capacités du patient.
21
l’interprétation : cette étape post-évaluation permettra d’interpréter les résultats et
-
prévoir ainsi un plan de traitement adapté au patient.
Plusieurs évaluations pourront par la suite être effectuées au cours de la rééducation. Il est
important d’adapter la prise en charge en fonction des résultats afin de prendre en compte le
patient dans sa globalité.
Les évaluations des séquelles cognitives et sensorielles en ergothérapie
Les évaluations des fonctions cognitives et sensorielles sont variées et permettent de
comprendre dans quelles mesures les troubles du patient peuvent entraver la reprise de la
conduite automobile. Elles ont pour but de comprendre les incapacités du patient afin de le
préparer plus particulièrement à l’évaluation de la conduite automobile.
L’ergothérapeute pourra effectuer ses bilans en collaboration avec le neuropsychologue.
Selon la fonction à évaluer, plusieurs bilans pourront donc être effectués.
Pour avoir une première approche des capacités au niveau des fonctions cognitives, l’ERFC5
(Evaluation Rapide des Fonctions Cognitives) pourra être effectuée. Cette première
approche des fonctions cognitives permettra à l’équipe rééducative de comprendre les
difficultés du patient au niveau de l’attention, de la mémoire ou encore du raisonnement
logique.
La figure de Rey est un bilan également souvent utilisé pour évaluer les stratégies mises en
place par le patient. Lors de la conduite automobile, la mise en place de stratégies efficaces
est importante pour permettre une bonne réaction aux situations pouvant se présenter sur la
route.
La mémoire pourra également être évaluée. Des épreuves de mémorisation de mots ou
d’objets pourront être effectuées.
Les différents types d’attention pourront également être évalués.
L’attention divisée pourra être observée lors d’exercices demandant par exemple de se
concentrer sur une information visuelle et une auditive simultanément.
L’attention soutenue pourra être testée par le test de barrage des « H » qui évalue
également l’héminégligence.
L’ergothérapeute pourra, de part ses compétences, comprendre les erreurs du patient et
ainsi axer sa rééducation sur certains troubles. En fonction des capacités du patient, des
améliorations et de l’avis de l’équipe soignante l’évaluation à la conduite automobile pourra
être proposée. L’ergothérapeute, du fait de sa place dans la rééducation, aura un rôle
essentiel dans la proposition d’évaluation à la conduite automobile.
5
Annexe 3
22
2.2.5. L’évaluation de la conduite automobile
Afin de permettre une appréciation plus précise des capacités du patient traumatisé
crânien dans le cadre de la conduite automobile, des évaluations spécifiques peuvent avoir
lieu. L’équipe encadrant cette pratique est primordiale afin de permettre une évaluation au
plus proche des besoins du patient.
2.2.5.1. Les pratiques actuelles en France sur l’évaluation de la conduite automobile
Nous pouvons tout d’abord dire, qu’en France, les pratiques sont diversifiées. Il n’y a pas de
protocole de mis en place sur l’ensemble du territoire français, les différentes structures font
alors comme elles veulent et comme elles peuvent.
3 types d’évaluation peuvent être dégagés :
-
Les évaluations papier/crayon ; bilans cognitifs : cette pratique consiste à faire
passer différents bilans cognitifs afin de déterminer les aptitudes du patient à la reprise de la
conduite. Ces bilans ne sont pas systématiques mais peuvent aider à comprendre les
réactions du patient. Elles sont effectuées par le neuropsychologue ou l’ergothérapeute en
fonction des centres.
- L’évaluation sur simulateur de conduite : En France il n’existe qu’une dizaine de
simulateurs, cette pratique n’est donc pas très commune. D’après une étude, l’évaluation sur
simulateur ne semble pas pouvoir totalement remplacer l’évaluation écologique sur route
mais permet de faire plus de choses que sur route (laisser le patient faire des erreurs,
pouvoir choisir les conditions météorologiques).
Des données peuvent également être exploitées sur simulateur : temps de réaction, temps
mis entre la pédale de frein et d’accélérateur. Ces paramètres permettent de voir
quantitativement les capacités du conducteur. Il peut ainsi être comparé à une norme.
- Les évaluations écologiques : Cette pratique semble la plus répandue et la plus
reconnue. La mise en situation permet de confronter le patient à ses difficultés ou à ses
capacités.
L’évaluation sur route est classiquement réalisée avec l’ergothérapeute et un moniteur
d’auto-école. En fonction des difficultés du patient, le neuropsychologue pourra également
être présent et permettre ainsi d’apporter un autre regard sur la situation. La durée de
passage varie selon les centres tout comme le nombre de séances.
Un compte rendu de cette évaluation est ensuite donné au patient qui n’a pas obligation de
le montrer lors du passage devant le médecin agréé. Cet avis n’est donc qu’indicatif mais
permet d’aider le médecin dans sa décision.
La diversité des pratiques permet de dire que chaque patient n’est pas pris en charge de la
même manière selon la structure d’hospitalisation.
23
2.2.5.2. Un travail en équipe essentiel
La rééducation de la conduite automobile se fait grâce à l’action de plusieurs professionnels
permettant ainsi une approche globale des troubles du patient. Chaque professionnel, de
part sa spécialité, peut analyser la situation et ainsi apporter des solutions ou proposer des
axes de rééducation à améliorer.
Nous avons plusieurs intervenants lors de l’évaluation écologique sur route.
Cette évaluation se déroule dans un véhicule en présence d’un moniteur auto-école.
Le moniteur auto-école est un enseignant qui apprend aux personnes souhaitant
passer leur permis à conduire. Il est titulaire du BEPECASER. Il n’a généralement pas de
formations spécifiques pour l’apprentissage ou la reprise de la conduite automobile auprès
des personnes en situation de handicap. L’expérience et les connaissances personnelles
sont les compétences majoritairement utilisées.
Lors de l’évaluation auto-école, le moniteur observe la conduite du patient, ses
réactions aux différentes situations, s’il ne fait pas des infractions au code de la route. Il
prend note des différentes erreurs effectuées.
Avec l’habitude, le moniteur auto-école pourra également participer aux choix des
aménagements. En fonction des pathologies des patients, il pourra préparer le véhicule et
prévoir d’effectuer des trajets spécifiques pour évaluer les réactions du patient dans
différentes situations.
L’ergothérapeute sera également généralement présent lors de cette évaluation. La
conduite automobile est une activité qui permet à tout être humain d’être libre dans ses
déplacements. L’ergothérapeute est donc logiquement le premier acteur de la rééducation
dans le but de la reprise automobile.
Grâce à des aides-techniques, des aménagements et de la rééducation la personne en
situation de handicap pourra reprendre la conduite automobile en toute sécurité.
Les évaluations auto-écoles sont faites en présence de l’ergothérapeute qui, par sa vision,
pourra voir si les aménagements mis en place conviennent. Il pourra également
accompagner dans les démarches administratives à effectuer ou bien orienter le patient vers
une assistante sociale.
Afin d’évaluer au mieux les troubles cognitifs pouvant être décelés lors de
l’évaluation, le neuropsychologue pourra être présent.
En fonction de la gravité des troubles, une évaluation « papier-crayon » sera primordiale
dans le cadre de la conduite automobile, elle permettra de donner un premier avis sur sa
24
reprise. Malgré son intérêt, elle n’est pas forcément effectuée en amont de l’évaluation
écologique sur route, comme nous l’avons précédemment, son utilisation n’est donc pas
systématique. Les tests neuropsychologiques permettent de comprendre le fonctionnement
du patient mais n’ont pas les mêmes apports que l’évaluation écologique. En effet, les
évaluations des patients ont pour objectifs « de cerner les conséquences comportementales
des lésions cérébrales susceptibles d’affecter la conduite automobile » (M. Enjalbert, C.
Fattal et A. Thevenon, 2000). Cette évaluation permet donc une approche des troubles mais
ne permet de voir la personne en situation et ainsi de voir les difficultés qui peuvent être
rencontrées au volant.
Lors de l’évaluation écologique, la présence du neuropsychologue permettra de comprendre
les erreurs de types cognitives et d’analyser si elles peuvent entraver la reprise de la
conduite automobile.
C’est grâce aux avis croisés des professionnels que l’aptitude à la conduite du patient sera
déterminée. Le compte-rendu délivré au patient sera rempli conjointement par les différents
professionnels présents lors de l’évaluation : le moniteur auto-école, l’ergothérapeute et
parfois le neuropsychologue. Le médecin aura également un avis de coordinateur, il sera
souvent sollicité en cas de non compréhension des décisions par l’équipe soignante.
2.2.6. Conduite automobile et handicap : le cadre législatif
Afin d’encadrer la conduite automobile, des textes de lois ont été mis en vigueur.
Au niveau européen, la directive européenne du 29 juillet 1991, modifiée le 14 septembre
2010, définit notamment les normes minimales d’aptitudes physiques à la conduite.
Au niveau du droit français, plusieurs textes régissent les droits et devoirs des conducteurs.
Le code de route regroupe toutes les lois en lien avec l’utilisation de la route, les conditions
d’aptitudes à la conduite automobile sont présentes aux articles R123 à R129.
Au cours des dernières années, différentes lois ont été rédigées. Actuellement en France, de
nombreuses modifications sont en cours au niveau législatif.
L’arrêté du 21 décembre 2005 permet de fixer la liste des incapacités physiques
incompatibles avec l’obtention ou le maintien du permis de conduire.
Cet arrêté met également en évidence six classes d’incapacités :
-
Groupe I = Cardiologie
-
Groupe II = Œil et vision
-
Groupe III = Oto-rhino-laryngologie et pneumologie-
-
Groupe IV = Neurologie (dont les traumatismes crâniens) et psychiatrie
25
-
Groupe V = Appareil locomoteur
-
Groupe VI = Divers.
Lorsqu’un patient devait faire face à une incapacité ou qu’il avait eu une maladie, il devait se
présenter devant une commission départementale qui pratiquait alors une visite médicale. Le
médecin généraliste agréé par le Préfet pouvait également faire appel à un spécialiste s’il
souhaitait un bilan plus approfondi. Le décret du 17 juillet 2012 apporte une nouveauté à la
législation en cours. Désormais, un patient ayant eu un problème de santé ne doit plus se
présenter en préfecture mais chez un médecin agréé par le préfet. Ces médecins n’ont pas
de formations particulières, de ce fait ils peuvent toujours demander l’avis d’un spécialiste.
La visite médicale, obligatoire pour régulariser sa situation, n’est pas prise en charge par
l’assurance maladie.
D’après la loi, une personne ayant eu un problème de santé doit faire d’elle-même les
démarches nécessaires pour régulariser son permis de conduire. Pour les personnes ayant
eu un traumatisme crânien et présentant une anosognosie, ces démarches ne sont pas
évidentes à faire puisqu’à leurs yeux, ils n’ont pas de troubles.
De plus les démarches administratives à effectuer sont très nombreuses et peuvent
sembler fastidieuses. Face à ces démarches, des personnes peuvent se décourager pour
régulariser leurs situations.
Suite aux apports théoriques que nous avons pu apporter sur la question de la reprise de la
conduite automobile chez les personnes ayant eu un traumatisme crânien, nous allons
maintenant confronter la théorie à la pratique afin de répondre à notre question de
recherche.
26
3. Partie Pratique
Après vous avoir exposé la méthodologie mise en place, nous allons vous
présenter les résultats de l’enquête et les analyser. En lien avec ses résultats, nous vous
présenterons enfin l’émergence de nouvelles interrogations.
3.1. La méthode mise en place
3.1.1. Objectif de l’étude
L’objectif de cette étude est de comprendre comment l’ergothérapeute élabore une
évaluation pertinente d’un patient ayant eu un traumatisme crânien dans le cadre de la
reprise de la conduite automobile.
Afin de répondre aux hypothèses, nous allons devoir confronter ces suppositions à la réalité
des pratiques. Pour se faire, nous avons pratiqué un recueil de données.
3.1.2. Choix de la population
Nous avons choisi de porter notre attention uniquement sur les ergothérapeutes du
fait de l’importance de son rôle dans l’évaluation de la reprise de la conduite automobile.
Afin de cibler au mieux notre recherche, nous avons retenu plusieurs critères concernant les
ergothérapeutes :
-
Ils travaillent auprès de personnes ayant eu un traumatisme crânien
-
Ils effectuent des évaluations à la reprise de la conduite automobile
3.1.3. Choix de la méthode
Notre choix d’outil de recherche s’est porté sur un questionnaire. Nous avons pu voir
que les pratiques concernant l’évaluation de la conduite automobile sont très variées, la
réalisation d’un questionnaire semblait donc le plus approprié pour permettre d’avoir une
approche globale des pratiques en France.
Ce questionnaire est constitué de questions fermées, avec des réponses binaires ou
multichotomique, ouvertes, des questions filtre, de fait, de motif et d’opinion. L’utilisation de
ces différents modes de questionnement permet d’avoir plusieurs approches de la question
posée.
Nous avons construit ce questionnaire en ligne ce qui permettait une plus grande
clarté de lecture mais également une plus grande rapidité de remplissage pour les
27
ergothérapeutes. De plus, des graphiques étant réalisés automatiquement au fur et à
mesure des réponses, une première analyse des données pouvait être rapidement réalisée.
Pour diffuser le questionnaire, nous avons cherché sur internet une liste des centres
effectuant des évaluations de la conduite automobile puis nous les avons contacté afin
d’obtenir des informations sur les pathologies qu’ils accueillaient. Cette étape permettait de
cibler la population et également d’établir le contact avec les ergothérapeutes.
Pour permettre une approche encore plus large du public concerné, une annonce a été faite
sur un groupe de discussion entre ergothérapeutes permettant ainsi d’aborder des
professionnels que nous aurions pu oublier lors de la précédente étape de prise de contact.
3.2. Analyse des données
Dans cette partie nous allons présenter les résultats du questionnaire et également
analyser les réponses qui en ressortent. Avec un total de 35 réponses, nous avons pu
exploiter au mieux les résultats et avoir un assez large panel de réponses.
3.2.1. Caractéristiques de professionnels interrogés
Graphique 1 : Temps d'exercice des
ergothérapeutes auprès de personnes
ayant eu un traumatisme crânien
Plus de 10
ans
46%
Moins de 5
ans
26%
Graphique 2 : Proportion de personnes
traumatisées crâniennes dans le service
De 50 à 75
%
6%
De 75 à
100 %
12%
De 25 à 50
%
14%
Entre 5 et
10 ans
28%
De 0 à 25 %
68%
Comme nous le montre le graphique 1, les professionnels interrogés ont de
l’expérience auprès de la population ciblée. Nous pouvons également noter que l’expérience
la plus courte est de 1 an et demi. Malgré tout, cette expérience est à mettre en relation avec
la population présente dans la structure, en effet 68% ergothérapeutes interrogés travaillent
avec moins de 25% de personnes traumatisées crâniennes (graphique 2).
28
 Nous pouvons donc voir que malgré la longue expérience des ergothérapeutes
auprès des personnes ayant eu un traumatisme crânien, il ne s’agit majoritairement pas de
leur principale intervention au quotidien. La population ciblée est restreinte, c’est pourquoi le
choix d’un questionnaire semblait également le plus judicieux pour avoir un plus large panel
d’expérience.
3.2.2. L’évaluation de la conduite automobile
L’évaluation de la conduite automobile auprès de la personne ayant eu un
traumatisme crânien est spécifique et n’a pas lieu dans tous les centres de rééducation. De
plus, elle n’est pas fréquente.
Graphique 3 : Fréquence d'évaluation de la conduite automobile
auprès des personnes traumatisées crâniennes
1 ou plus par
semaine
8,5%
Moins d'1 par mois
54%
1 toutes les 2
semaines
8,5%
1 par mois
29%
Ce graphique nous permet de confirmer que l’évaluation de la conduite automobile
auprès de cette population ne fait pas partie du quotidien des ergothérapeutes. En effet, plus
de la moitié des ergothérapeutes effectuent cette activité moins d’une fois par mois.
Graphique 4 : La demande d'évaluation de la conduite automobile
36%
L'ergothérapeute
33%
Le patient
25%
Le médecin
6%
Autre
0
29
5
10
15
20
25
Nous voulons savoir dans quelles mesures le patient investit cette évaluation et l’importance
qu’il y porte. Cependant, l’évaluation peut venir d’autres personnes mais le patient peut être
tout à fait intéressé sans être forcément au courant de cette pratique.
L’ergothérapeute, acteur principal de l’évaluation de la conduite automobile, est
souvent à l’origine de la proposition d’évaluation car c’est lui qui sera présent. De plus, nous
pouvons voir que le patient est demandeur de ce type d’évaluation.
L’avis du médecin est obligatoire pour pratiquer cette évaluation, donc même si la demande
n’émane pas de lui, il sera forcément tenu au courant de cette évaluation.
Dans la catégorie "Autre", nous avons eu la famille, la commission médicale, le médecin de
ville ou encore l’ergonome. Nous pouvons voir que d’autres acteurs de l’entourage du patient
peuvent intervenir. Il peut s’agir d’aspects législatifs ou bien plus personnels. En effet, la
famille peut avoir besoin de clarifier la situation qui peut sembler difficile à comprendre du fait
de l’anosognosie du patient ou encore parce que les troubles qu’il présente sont cognitifs et
donc invisibles. La commission médicale peut également être à l’origine de la demande car
cette évaluation permet une appréciation plus précise du patient, la décision prise en
conséquence sera donc plus juste.
Graphique 6 : Utilisation des différents
outils d'évaluation
Graphique 5 : Outils d'évaluation de la
conduite automobile à disposition
Ecologique
et
simulateur
3%
37%
Les tests papier-crayon
Les 3
11%
97%
L'évaluation écologique
Ecologique
et papiercrayon
23%
17%
Simulateur de conduite
0
10
20
30
Uniquement
l’évaluation
écologique
63%
40
Tous les centres n’ont pas les mêmes outils à leurs dispositions, cette question
permet donc de voir quel choix d’outils a été privilégié. Certains centres possèdent un seul
outil d’évaluation tandis que d’autres en ont plusieurs. Nous pouvons noter que les
personnes semblent avoir confondu « outils utilisés » et « outils à disposition ».
97 % des centres interrogés ont à leurs dispositions l’évaluation écologique. Le centre qui ne
l’utilise pas possède un simulateur de conduite et effectue une rééducation en fonction des
capacités du patient, ce dernier peut alors demander une deuxième évaluation sur
simulateur afin d’observer sa progression.
30
37 % des ergothérapeutes disposent des évaluations "papier-crayon" et 17 % le simulateur.
Nous pouvons donc observer que l’évaluation écologique est l’outil le plus favorisé. Cela est
logique en regard de la partie théorique portée précédemment. En effet, nous avons vu
précédemment que l’évaluation écologique est une activité essentielle de l’ergothérapeute
qui observe ainsi le patient en situation réelle et peut alors interpréter ses erreurs pour mieux
les rééduquer. Nous observons également que l’évaluation écologique est majoritairement
utilisée seule. Son utilisation, que nous avons pu voir précédemment privilégiée, se confirme.
Ce chiffre semble cependant important. En effet, l’évaluation écologique est un outil
permettant de montrer au patient ce dont il est capable en le mettant dans des conditions de
conduite réelle.
 L’évaluation de la conduite automobile n’est donc pas un acte fréquent, il est effectué
à 54% moins d’une fois par mois. La majorité des demandes vient de l’ergothérapeute (36%)
mais le patient semble également investi (33%). Il faut également noter l’importance de
l’évaluation écologique puisque 97% des centres disposent de cet outil.
Afin de comprendre comment ces outils sont utilisés, nous allons nous intéresser à chacun
d’eux.
3.2.3. Les pratiques concernant les évaluations « papier-crayon »
Nous allons tout d’abord nous intéresser à l’évaluation « papier-crayon » et à la
manière dont les ergothérapeutes l’utilisent. Nous rappelons que 37 % des ergothérapeutes
interrogés « utilisent » cette évaluation, seuls ces derniers ont répondus à ces questions.
Graphique 7 : Les tests sont-ils effectués
en collaboration avec le
neuropsychologue?
Effectués
par
neuropsy
15%
Graphique 8 : Avez-vous tout le temps
recours aux tests papier-crayon?
Non
31%
Oui
54%
Non
31%
Oui
69%
Parmi les « non », 2 ergothérapeutes sur 4 ont suivi plusieurs formations en
neuropsychologie ce qui permet une analyse plus poussée des capacités de la personne.
31
A travers le graphique 7, nous pouvons que les compétences du neuropsychologue sont
sollicitées, majoritairement l’évaluation se fait avec sa collaboration qui permet une analyse
plus précise des erreurs pouvant être réalisées. Cependant, il ne faut pas oublier que
l’ergothérapeute a également une formation de base en neuropsychologie et que ces bases
permettent une approche de ces troubles.
Dans 85% des cas, les tests papier-crayon ne sont jamais utilisés seuls c’est-à-dire
non couplés à l’utilisation d’un autre outil.
Dans les cas où les tests papier-crayon ne sont pas utilisés avec un autre outil, le
patient est jugé inapte à la conduite, l’évaluation écologique n’est donc pas nécessaire. Il
peut également s’agir de situation où l’évaluation sur route est à la charge du patient et ne
peut donc pas être effectuée.
Nous avons également voulu savoir si ces tests étaient tout le temps utilisés dans
l’évaluation de la conduite. Dans 70 % des cas, les ergothérapeutes ont tout le temps
recours à cette évaluation.
 Au vu de ces résultats, nous pouvons voir que cette évaluation papier crayon permet
une première approche de la conduite mais ne peut être utilisée seule. Le recours
systématique à 69 % de cette évaluation montre son intérêt.
3.2.4. Les pratiques concernant l’évaluation écologique
Nous avons pu voir que l’évaluation écologique joue un rôle important dans
l’évaluation de la conduite automobile auprès des personnes ayant un traumatisme crânien
et qu’elle est largement utilisée par les ergothérapeutes.
Cette évaluation peut se dérouler selon différentes manières en fonction de l’organisation de
l’établissement. 83% d’entre eux disposent d’un partenariat avec une auto-école et 11% d’un
véhicule adapté. Le partenariat avec une auto-école est essentiel afin d’avoir un moniteur
auto-école présent lors de l’évaluation, sinon il peut y avoir un moniteur propre à la structure
ou encore un ergothérapeute ayant effectué une formation pour être moniteur auto-école. Un
ergothérapeute nous explique avoir également un partenariat avec le CEREMH 6 ce qui leur
permet d’avoir une plus meilleure approche de la conduite automobile et du handicap mais
également d’avoir une reconnaissance auprès de la commission médicale.
6
Centre de Ressources et d’Innovation Mobilité Handicap.
C’est un centre ressource concernant la conduite automobile et le handicap, des formations ou
encore des conférences à ce sujet sont mises en place par cet organisme.
32
Graphique 9 : Qui est présent lors de cette évaluation?
97%
L'ergothérapeute
12%
Parfois la famille
9%
Le neuropsychologue
3%
Moniteur expérimenté
0
5
10
15
20
25
30
35
Lors de cette évaluation, en plus du patient et du moniteur auto-école, dans 97% des cas
l’ergothérapeute est présent. Dans l’unique cas où l’ergothérapeute n’est pas présent,
l’évaluation est effectuée avec un « moniteur expérimenté depuis plus de 17 ans ».
Nous pouvons donc voir que l’ergothérapeute est un acteur important de cette évaluation. Sa
présence permet une réelle évaluation des capacités du patient et une maitrise des éléments
d’adaptations. La famille et le neuropsychologue sont alors sollicités pour permettre un avis
plus approfondi et aider le patient à prendre conscience de ses capacités.
La situation d’évaluation sans l’ergothérapeute pose tout de même question. Un moniteur
auto-école, bien qu’habitué à côtoyer des personnes en situation de handicap, ne peut, sans
formation, avoir les mêmes compétences qu’un ergothérapeute. L’analyse de la situation ne
sera peut être pas aussi complète qu’en présence d’un ergothérapeute.
Graphique 10 : Vous arrive-t-il d'utiliser
uniquement l'évaluation écologique?
Graphique 11 : Avez-vous tout le temps
recours à l'évaluation écologique?
Non
12%
Jamais
18%
Toujours
29%
Rarement
21%
Souvent
32%
Oui
88%
Par rapport à l’utilisation de l’évaluation écologique, les façons de procéder sont
différentes en fonction des centres. Cette utilisation variable de l’outil est proportionnelle
auprès de tous les thérapeutes interrogés. Cela dépend des outils à la disposition des
ergothérapeutes. Nous pouvons également penser que les ergothérapeutes utilisent d’autres
33
procédés comme l’observation de la personne et de ses capacités afin de ne pas
systématiquement proposer une évaluation sur route.
Le graphique 11 nous permet de confirmer que l’évaluation écologique est essentielle dans
l’évaluation de la conduite automobile.
 Nous pouvons donc dire que l’évaluation écologique est un outil important dans
l’évaluation de la conduite automobile auprès des personnes ayant eu un traumatisme
crânien. Son utilisation, bien que différente par son approche, est néanmoins majoritaire
(recours systématique à 88%) et plus largement utilisée par les ergothérapeutes qui sont au
centre de cette évaluation, ils sont présent dans 97% des évaluations écologiques.
3.2.5. Les pratiques concernant le simulateur de conduite
Il est difficile d’évaluer les résultats de l’utilisation de cet outil car uniquement 6 centres le
possédant ont répondu à ce questionnaire.
Graphique 12 : Vous arrive-t-il d'utiliser
uniquement le simulateur?
Graphique 13 : Avez-vous tout le temps
recours au simulateur?
Souvent
33%
Non
33%
Jamais
67%
Oui
67%
Néanmoins, nous pouvons noter que dans 4 cas sur 6, le simulateur de conduite n’est jamais
utilisé seul. Dans les 2 autres cas, il est souvent utilisé seul.
De plus, dans 4 cas sur 6, les ergothérapeutes ont tout le temps recours au simulateur de
conduite pour évaluer les capacités du patient à la conduite.
 Nous pouvons donc dire que le simulateur de conduite est un outil utile permettant
d’apporter des évaluations supplémentaires sur les capacités du patient.
L’évaluation de la conduite peut donc se faire par plusieurs outils qui sont à la disposition
des ergothérapeutes dans des proportions variables : l’évaluation écologique
sur route
(97%), les tests papier-crayon (37%) ou encore le simulateur de conduite (17%). L’évaluation
34
écologique est plus largement plébiscitée par les ergothérapeutes mais son utilisation
couplée à d’autres outils permet une meilleure approche du patient.
3.2.6. A la suite de l’évaluation
Nous avons donc pu voir que les pratiques en ce qui concerne l’évaluation de la
conduite automobile pour évaluer les capacités d’une personne ayant un traumatisme
crânien sont variées. En plus des outils à la disposition de l’ergothérapeute, d’autres aspects
peuvent être étudiés. Dans cette partie quand nous parlerons d’évaluation il s’agira de
l’évaluation en général, quel que soit l’outil utilisé.
Graphique 14 : Taux de reprise de conduite automobile chez les
personnes ayant eu un traumatisme crânien suite à l'évaluation
De 0 à 25 %
9%
De 75 à 100 %
20%
De 50 à 75 %
28%
De 25 à 50 %
43%
D’après ce graphique nous pouvons voir que le taux de reprise de la conduite
automobile est variable. 71 % des ergothérapeutes ont estimé le taux de reprise de la
conduite entre 25 et 75%. La moyenne globale de ce taux est d’environ 50% ce qui
correspond à une reprise pour deux évaluations. Le taux de reprise est donc moyen.
Graphique 15 : Combien d'évaluations effectuez-vous en moyenne
auprès d'un même patient?
Plus de deux
12%
Deux
37%
35
Une
51%
Nous pouvons tout d’abord voir que le nombre d’évaluations est variable en fonction
des ergothérapeutes. En majorité (à 88 %), les ergothérapeutes effectuent 1 à 2 évaluations
de la conduite automobile chez un même patient. La moitié effectue une seule évaluation.
Cela nous permet de dire que l’évaluation de la conduite automobile chez une personne
ayant eu un traumatisme crânien n’est pas un acte fréquent. Il s’agit d’un acte ciblé et
permettant d’évaluer les capacités du patient.
Nous pouvons tout de même noter qu’une réponse indique que 4 ou 5 évaluations minimum
sont réalisées. Nous remarquons donc une disparité dans les pratiques.
Il faut également noter que dans cette question il n’est pas question de durée. Ce paramètre
peut être très variable en fonction des centres et il est important à prendre en compte. En
effet, lors d’une évaluation de 30 minutes le patient ne pourra pas être mis dans autant de
situations que lors d’une évaluation de 2 heures. Malgré tout, l’évaluation est tout de même
effectuée et permet de voir, même de façon brève, les capacités du patient.
Afin de comprendre le nombre d’évaluations à la conduite automobile effectuées
auprès des patients ayant eu un traumatisme crânien, nous avons demandé aux
ergothérapeutes d’expliquer la raison de ce nombre.
Lorsqu’une seule évaluation est effectuée, plusieurs raisons sont mises en avant.
Tout d’abord, cette évaluation est encadrée par l’ergothérapeute qui connait les capacités du
patient et qui est donc proposée à un moment avancé de la rééducation permettant ainsi
d’apprécier au mieux les capacités du patient. « Généralement lorsqu'un essai de conduite
est réalisé c'est que l'on suppose (connaissant le patient lors des séances de rééducation)
que la reprise de la conduite va être possible (régression des troubles attentionnels et
exécutifs, comportement adapté, bonne stratégie visuelle...). Si, aux vus des troubles, la
reprise de la conduite risque d'être dangereuse, nous ne faisons pas d'essai de conduite. »
Le fait de proposer l’évaluation de la conduite automobile le plus tardivement possible
permet également d’avoir plus de chances de réussites et ainsi ne proposer qu’une seule
évaluation.
Le coût de cette évaluation est également mis en avant. En effet, selon les centres, l’épreuve
de conduite en situation écologique est prise en charge dans la rééducation ou bien est à la
charge du patient. Il est donc important de savoir évaluer au bon moment les capacités du
patient. Même si parfois une autre évaluation permettrait de mieux apprécier les progrès du
patient, le coût financier ne le permet pas forcément.
Lorsque plusieurs évaluations sont proposées au patient, les raisons peuvent être
variées
36
Tout d’abord, cela permet de voir les progrès éventuels qui ont pu être faits. Ainsi, suite à la
première évaluation qui a pu être négative, une rééducation a pu avoir eu lieu et une
réévaluation des acquis permet de voir si le patient dispose encore d’une marge de
progression quant au développement de ses capacités.
La première évaluation ne traduit pas non plus forcément la réalité des capacités du patient.
En effet, lors de ce temps, le patient peut se sentir évalué, observé et jugé. Il peut alors en
découler du stress et de l’appréhension. Les ergothérapeutes nous font remarquer que ces
personnes n’ont pas conduit depuis un certain temps ce qui peut avoir pour conséquence
une perte des automatismes de conduite.
Ensuite, la première évaluation peut être à la demande du patient qui n’a pas forcément
conscience de ses troubles. Ce temps permet à la personne de se rendre compte de ses
capacités mais ne permet pas à l’ergothérapeute de voir le potentiel maximum de la
personne. Une deuxième évaluation sera donc essentielle pour permettre de donner un avis
objectif des capacités réelles du patient.
Le nombre d’évaluations dépend également de la manière de fonctionner du centre. En effet,
certains ergothérapeutes effectuent des évaluations des fonctions cognitives dans
différentes situations ou encore suivent un programme d’évaluation. Par exemple, un
ergothérapeute nous explique qu’une évaluation initiale et une évaluation finale sont
systématiquement effectuées (Évaluation comprenant tests neuropsychologiques, évaluation
sur simulateur et sur route). Entre les deux, des séances d’entrainement peuvent être
proposées (séances auxquelles l’ergothérapeute n’assiste pas).
Enfin, la pratique de plusieurs évaluations permet de mettre en place et d’ajuster les
aménagements au poste de conduite. Des réglages peuvent être nécessaires afin de
permettre à la personne d’être le plus à l’aise possible au poste de conduite.
 Le nombre d’évaluations de la conduite automobile effectuées auprès d’un même
patient est à 88% de 1 à 2. La connaissance du patient, l’évaluation tardive augmentant le
taux de réussite ou encore le coût sont des éléments en faveur du nombre restreint
d’évaluations.
Plusieurs évaluations peuvent être effectuées afin de voir les progrès, faire des ajustements
ou encore mettre le patient dans des situations différentes.

Qui annonce généralement le résultat de l’évaluation au patient ?
Suite à cette évaluation, un avis sur la reprise de la conduite automobile peut être
donné au patient. En fonction des centres, l’annonce du résultat est effectuée de différentes
manières.
37
Dans la majorité des cas, un premier point est fait à la fin de l’évaluation avec les personnes
présentes lors de cette évaluation : ergothérapeute, moniteur auto-école et parfois le
neuropsychologue. Ce compte-rendu permet au patient d’avoir un avis sur ses capacités et
ainsi parler de ses ressentis vis-à-vis de l’évaluation. Dans 20% des cas, le médecin est
également présent ce qui permet d’appuyer l’argumentation. Dans 14% des cas,
l’ergothérapeute est seul pour expliquer les résultats de l’évaluation.
Suite à cette première annonce des résultats, un compte-rendu est souvent donné au
patient. Cette trace écrite permet au patient de mieux comprendre ce qu’il lui a été expliqué
et lui permet également de présenter cet avis au médecin agréé qu’il devra aller voir pour
régulariser son permis de conduire. Ce compte-rendu, issu de l’évaluation de la conduite
automobile, sera effectué par l’ergothérapeute et le moniteur auto-école ou bien sera revu
lors d’une synthèse d’équipe. Ce temps de discussion permet aux ergothérapeutes
d’échanger quant aux capacités et d’indiquer des perspectives d’évolutions.
Nous pouvons également noter que le médecin est souvent sollicité lors d’évaluations plus
problématiques. Si le patient ne comprend pas, ne veut pas ou ne peut pas reconnaitre ses
difficultés, le médecin peut intervenir en temps que référent du patient.
Un ergothérapeute nous explique également que l’évaluation (papier-crayon et écologique)
est filmée ce qui permet de montrer au patient ses erreurs et ainsi de lui faire comprendre
plus précisément les difficultés qui ont pu être notées.
La présence du médecin permet de recadrer le résultat et aide le patient à
comprendre la décision. Il n’est cependant pas toujours présent, « ça devrait être le médecin
en théorie » (un ergothérapeute). La réalité du terrain, le manque de temps des médecins
ne permet donc pas une annonce parfaite des résultats. Mais il est cependant essentiel de
prendre le temps de discuter des résultats en équipe afin que chaque thérapeute comprenne
les difficultés du patient et puisse par la suite l’expliquer au patient.
 Nous pouvons donc souligner qu’un premier point est effectué par l’ergothérapeute à
la suite de l’évaluation. La présence du médecin et d’une réunion d’équipe est un souhait
des ergothérapeutes permettant ainsi un meilleur compte-rendu pour le patient.

En cas d’avis négatif suite à une première évaluation, effectuez-vous une
rééducation spécifique ?
Afin de comprendre comment le patient est pris en charge par les ergothérapeutes,
nous avons voulu savoir si une rééducation spécifique était alors mise en place.
La majorité des ergothérapeutes (52%) n’effectuent pas de rééducation spécifique
suite à une évaluation de la conduite automobile avec un avis négatif. Plusieurs raisons
expliquent ce choix.
38
Un ergothérapeute nous dit : « Une rééducation spécifique permettra-t-elle la reprise de la
conduite ou est-ce une chose de plus complexe ? ». En effet, les évaluations à la conduite
automobile sont proposées en fin de rééducation, la marge de progression est donc limitée.
Continuer la rééducation demanderait d’autant plus d’efforts pour le patient et cela ne lui
permettrait pas de comprendre que la conduite automobile ne lui est pas accessible. Les
patients ayant un traumatisme crânien depuis très longtemps devront alors accepter que
leurs séquelles sont définitives.
De plus, certains troubles comme la HLH, l’anosognosie ou encore des troubles sévères de
l’attention constituent une contre-indication à la reprise de la conduite, ces troubles seront
des critères de dangerosité pour le patient ainsi que les autres usagers de la route. Un travail
de prise de conscience et de deuil devra alors être effectué.
Nous avons également une poursuite du travail de rééducation cognitive classique déjà mis
en place afin de voir si des progrès sont possibles. Contrairement à précédemment, la
rééducation n’est pas spécifique à la conduite mais il s’agit tout de même d’exercices ciblés
sur les déficits retrouvés lors de l’évaluation de la conduite.
Une rééducation spécifique peut également ne pas être mise en place car le patient est en
hospitalisation de jour. En effet, l’évaluation de la conduite automobile chez une personne
ayant eu un traumatisme crânien se déroule en phase de réadaptation. Selon les cas, les
patients peuvent déjà être sortis du centre de rééducation et ils reviennent pour des
demandes spécifiques comme par exemple l’évaluation des capacités de la conduite.
Il peut également s’agir d’une demande du patient qui ne souhaite pas refaire d’essais à la
conduite, il juge ses capacités insuffisantes et la rééducation ne sera donc pas nécessaire.
Malgré tout, une évaluation pourra être effectuée plus tard s’il trouve que ses capacités ont
évolué.
Nous pouvons également noter qu’un ergothérapeute nous a parlé de la réalité virtuelle et de
réalité augmentée qui pourrait être des outils intéressants mais trop chers pour être utilisés.
48 % des ergothérapeutes interrogés effectuent une rééducation spécifique. Nous
allons donc voir quels moyens sont mis en place auprès de ces patients.
Lors de la mise en place d’une rééducation spécifique, le travail en équipe pluri
professionnelle est essentiel afin d’améliorer au mieux les capacités du patient. Ce travail
permet d’axer la rééducation sur les déficits observés lors de l’évaluation initiale. Les erreurs
de types neuropsychologiques sont les plus grands facteurs de non reprise de la conduite
chez une personne ayant eu un traumatisme crânien, le neuropsychologue aura un rôle
essentiel à jouer pour permettre d’appréhender les difficultés et voir si les erreurs peuvent
39
être corrigées. Les ergothérapeutes utilisent également la mise en situation ou encore les
jeux pour permettre à la personne de s’améliorer.
Nous pouvons également noter que la rééducation effectuée est uniquement ciblée sur les
fonctions cognitives et non sur les troubles moteurs qui seront compensés par des
adaptations.
En lien avec la conduite automobile, le code de la route est également travaillé. En effet, les
erreurs ayant pu être observées peuvent être en lien avec une non-connaissance ou un oubli
du code de la route, cet apprentissage permet donc de voir les capacités de compréhension
et d’intégration du patient. Des heures de conduite avec un moniteur auto-école peuvent
également être conseillées, cela permet au patient de se familiariser avec l’outil et de
retrouver des habitudes antérieures. Un entrainement sur simulateur peut également être
proposé, il s’agira d’observer les capacités d’apprentissage et de progression du patient.
Malgré tous ces moyens de rééducation possibles, une rééducation n’est pas toujours
proposée en cas d’avis négatif. En effet, au vue de la première évaluation effectuée,
l’ergothérapeute peut se rendre compte des capacités de la personne, de la marge de
progression possible et qu’une rééducation ne sera donc pas utile.
 Nous pouvons donc voir que les pratiques concernant la suite de la prise en charge
de l’évaluation des capacités du patient traumatisé crânien à la conduite automobile sont très
diversifiées. Dans 52% des cas, il n’y a pas de rééducation spécifique pour plusieurs
raisons : la marge de progression du patient est limitée, le manque de moyens des centres
ou encore une volonté du patient de ne pas poursuivre. Cela dépend des moyens à la
disposition des ergothérapeutes, du fonctionnement des services mais également de la
façon de travailler des professionnels.
La rééducation spécifique, proposée dans 48 % des cas, se fait par un travail en équipe axé
sur les déficits observés, la pratique est orientée sur les troubles cognitifs et un travail
complémentaire sur le code de la route ou encore des heures de conduite peuvent être
proposées.
3.2.7. Quelle serait, pour vous, la démarche idéale d’évaluation à la conduite
automobile ?
A cette question, les ergothérapeutes ont eu des réponses variées mais en même
temps très proches. Afin de comprendre les attentes des ergothérapeutes en ce qui
concerne l’évaluation de la conduite automobile chez une personne ayant eu un traumatisme
crânien, nous avons souhaité comparer les pratiques actuelles des ergothérapeutes avec
celles souhaitées.
40
Pratiques actuelles
Pratiques idéales
En amont de
- Un premier point avec est fait
- Evaluation du médecin
l’évaluation, pour
avec le médecin.
- Evaluation du champ visuel
préparer le patient
- Un bilan ophtalmologique est
- Entretien en équipe pour décider
fait
du moment opportun
- Evaluation du code de la route
Durant l’évaluation
- Evaluation ergothérapique des
- Bilans cognitifs en ergothérapie
fonctions cognitives
- Evaluation en lien avec le
- Bilans cognitifs effectués par le
neuropsychologue des
neuropsychologue
fonctions cognitives
- Evaluation écologique
- Evaluation écologique
- Evaluation sur simulateur
- Evaluation sur simulateur
- Observer le patient dans
- Mise en situations de conduite
différentes situations
répétées si nécessaire
- Filmer le patient
- Filmer le patient
A la suite de
- Auto-école intégrée
- Auto-école intégrée
l’évaluation
- Médecin présent lors de
- Présence du médecin lors de
l’annonce du résultat
l’annonce du résultat
- Entretien avec la famille si
nécessaire
- Lien avec le médecin agréé.
- Rendre cette évaluation
obligatoire
De part ce tableau nous pouvons observer de nombreuses similitudes entre les pratiques
actuelles et les pratiques idéales. Des différences peuvent être repérées principalement au
niveau de la préparation de l’évaluation et de sa continuité.
-
Le travail en équipe : Plusieurs ergothérapeutes nous expriment l’importance de
réunion d’équipe en amont. En effet, nous avons pu voir que le travail en équipe est
essentiel chez les personnes ayant eu un traumatisme crânien, la discussion en équipe de
l’évaluation semble donc logique afin d’appréhender au mieux les capacités du patient et
également de choisir le moment adéquat de l’évaluation. Le médecin aura un rôle de
coordinateur au niveau de la conduite automobile.
-
L’évaluation des connaissances du code de la route semble aussi essentielle du fait
que les erreurs observées par la suite pourraient être dues à un oubli ou une
méconnaissance des règles de conduite.
41
-
L’entretien avec la famille en aval est également un élément souhaité qui permettrait
une meilleure compréhension de la décision par le patient.
-
Le lien avec le médecin agrée est soulevé. Le manque de communication avec les
structures administratives ne permet pas un suivi optimal du patient.
-
Rendre obligatoire cette évaluation : pour une meilleure prise en compte de
l’évaluation ergothérapique au niveau de la régularisation des permis de conduire.
Nous pouvons donc voir que la plupart des éléments sont à la disposition des
ergothérapeutes mais qu’un manque de communication entre les différents centres ne
permet pas le partage de connaissances concernant les outils et les évaluations effectuées.
Le manque de moyens peut également expliquer ses différences, par exemple une autoécole intégrée ne peut être mise en place dans toutes les structures de soins.
3.2.8. En conclusion de l’enquête
Les résultats de cette enquête nous montrent que les pratiques concernant
l’évaluation de la conduite automobile auprès d’une personne ayant eu un traumatisme
crânien sont variées. Les ergothérapeutes, qui ont une longue expérience mais peu de
pratique auprès de cette population, ont à leur disposition trois outils : les tests papiercrayon, l’évaluation écologique et le simulateur de conduite. L’évaluation écologique est plus
largement utilisée, couplée aux autres outils elle permet une meilleure compréhension des
capacités du patient. Nous notons également un taux de reprise de la conduite automobile
moyen d’environ 50% et un nombre d’évaluations variables, 88% des ergothérapeutes en
effectuent 1 à 2. Cela s’explique notamment par des pratiques différentes au niveau des
outils utilisés et de la durée des évaluations.
Au moment de l’annonce du résultat, l’ergothérapeute est un acteur principal mais il y a une
volonté d’améliorer cela en intégrant d’autant plus l’équipe rééducative. Une synthèse en
amont et en aval de l’évaluation est proposée par les ergothérapeutes qui souhaiteraient
également une plus grand participation du médecin. A la suite de l’évaluation, la prise en
charge est variable, elle dépend des résultats de l’évaluation mais également des moyens à
la disposition de l’ergothérapeute.
Nous avons également pu voir que des similitudes existaient en ce qui concerne les
pratiques actuelles et souhaitées notamment en ce qui concerne l’utilisation des outils. Des
propositions d’améliorations sont apportées pour préparer l’évaluation et accompagner sa
compréhension par le patient. Nous pouvons notamment noter un souhait général d’une plus
grande réflexion en équipe de cette évaluation, l’importance de l’évaluation du champ visuel
et également une plus grande communication avec les médecins agréés.
42
Malgré les disparités observées dans les pratiques et les réponses des
ergothérapeutes, l’évaluation de la conduite automobile est effectuée dans le seul but
d’observer et d’analyser les capacités du patient ayant eu un traumatisme crânien. La finalité
de cette pratique étant la reprise de la conduite automobile pour permettre au patient
d’effectuer ses activités antérieures.
43
4. Discussion
4.1. Vérification des hypothèses
Nous rappelons que la question de recherche et les hypothèses étaient :
Dans le cadre de la reprise de la conduite automobile chez un patient ayant eu un
traumatisme crânien, comment l’ergothérapeute élabore-t-il une évaluation pertinente
pour une prise en charge globale du patient ?
- Hypothèse 1 : Le patient est au centre de la prise en charge. En fonction de ses besoins et
attentes, l’ergothérapeute adapte sa prise en charge et effectue des évaluations permettant
au patient de se rendre compte de ses capacités et incapacités.
La première hypothèse est partiellement vérifiée par le fait qu’une rééducation n’est pas
forcément proposée en fonction des résultats observés. Cette adaptation, aux capacités de
la personne, permet une intégration à l’évaluation et l’aide à le rendre acteur de sa
rééducation.
Cependant, cette hypothèse n’est pas vérifiée par le fait que l’utilisation les outils peut être
systématisée. En effet, nous avons pu voir qu’il y avait un recours systématique à certains
outils, comme par exemple l’évaluation écologique, ce qui permet de penser que l’évaluation
proposée n’est pas spécifique au patient traumatisé crânien.
Il n’y a donc pas de réelle adaptation de la prise en charge du patient, même si celle-ci est
individualisée, l’ergothérapeute ne peut adapter sa prise en charge, l’hypothèse 1 n’est donc
que partiellement vérifiée.
- Hypothèse 2 : L’évaluation écologique permet de mettre le patient en situation réelle et
qu’il prenne conscience de ses capacités. L’utilisation d’une évaluation écologique, couplée
ou non à l’emploi d’autres outils, est essentielle pour une évaluation pertinente du patient.
Nous pouvons voir que l’évaluation écologique est un outil essentiel de l’ergothérapeute. Son
utilisation privilégiée et fortement plébiscitée par les ergothérapeutes permet de dire que
c’est un outil indispensable pour une évaluation pertinente du patient. L’utilisation couplée ou
non à d’autres outils est variable selon les ergothérapeutes. L’hypothèse 2 est donc
confirmée.
44
- Hypothèse 3 : L’ergothérapeute doit s’adapter aux moyens de la structure, ce qui limite
ses choix et ses possibilités d’effectuer une évaluation la plus pertinente
Le manque de moyens financiers et techniques contraint l’ergothérapeute à restreindre sa
pratique. L’hypothèse 3 selon laquelle le choix des outils limite les possibilités d’adaptations
de la prise en charge est donc vérifiée.
4.2. Critique de la méthode
Alors que nous arrivons à la fin de ce travail de recherche, il est important d’avoir un
avis critique sur la méthode utilisée.
4.2.1. Critique du questionnaire
A travers l’analyse des réponses obtenues nous avons pu voir que les questionnaires
n’ont pas été compris de la même manière par tous les ergothérapeutes. Concernant les
outils à la disposition des ergothérapeutes, seulement 37% d’entre eux ont répondu avoir les
tests « papier-crayon ». Or, cette évaluation est classiquement retrouvée dans tous les
services, nous pouvons donc nous demander si la question n’a pas été comprise comme
« quels outils utilisez-vous » ou alors les ergothérapeutes imaginaient que des évaluations
papier-crayon spécifique à la conduite automobile existaient.
Afin d’éviter cela, il aurait été plus judicieux de mettre une phrase explicative à chaque
question permettant ainsi aux ergothérapeutes de mieux comprendre notre questionnement
ou de formuler différemment la question.
4.2.2. Critique de notre recherche
Durant les recherches sur les apports théoriques, nous avons été confrontés à
plusieurs difficultés, la littérature concernant la reprise de la conduite automobile n’est pas
très riche, tout comme celle concernant la conduite automobile et les traumatismes crâniens.
Concernant la partie pratique, nous avons choisi d’interroger les ergothérapeutes
uniquement par questionnaires. Afin d’avoir des avis et une analyse plus approfondis, il
aurait été intéressant d’effectuer quelques entretiens avec des ergothérapeutes afin
d’échanger plus librement et qu’ils s’expriment sur les résultats obtenus.
De plus, nous avons choisi d’interroger uniquement des ergothérapeutes. Afin de
comprendre la place de chacun dans l’évaluation de la conduite auprès d’une personne
ayant eu un traumatisme crânien, il aurait été intéressant d’interroger d’autres
45
professionnels : un neuropsychologue, un médecin rééducateur ou encore un moniteur
d’auto-école.
Nous nous sommes également posé la question de l’intérêt d’interroger un patient. Cela
nous aurait permis d’avoir le point de vue de
la personne et ainsi de comprendre
l’importance de cette évaluation.
Malgré tout, la méthode de recherche mise en place nous a permis de mener à bien notre
travail de recherche. Nous avons pu élaborer une analyse des données aboutie et ainsi
parfaire notre savoir professionnel.
L’évaluation de la conduite automobile chez une personne ayant eu un traumatisme
crânien est donc un processus complexe et varié. Lors de cette pratique, les compétences
de l’ergothérapeute sont sollicitées, ainsi que son sens de l’analyse et également sa
connaissance du patient. Tous ces aspects permettent une prise en charge globale et
efficace du patient.
Afin de compléter et d’affiner cette analyse, des pistes de réflexion peuvent être
apportées.
4.3. Les pistes de réflexion
4.3.1. Le manque de reconnaissance de l’évaluation
Tout d’abord, des ergothérapeutes nous ont parlé du manque de reconnaissance de
cette évaluation auprès de la préfecture. En effet, le patient n’est pas obligé de présenter le
résultat de cette évaluation au médecin agréé. Or, un patient ayant eu un traumatisme
crânien présente parfois une anosognosie, il peut ne pas comprendre le résultat de cette
évaluation et ne le communiquera pas au médecin. Ce dernier, lors de l’évaluation du
patient, n’aura que peu de temps pour évaluer les capacités du patient. Les difficultés
motrices pourront être observées à l’œil nu mais l’évaluation des fonctions cognitives
nécessite plus de temps, les troubles pouvant passer inaperçus au premier abord. De plus,
les outils à la disposition du médecin sont plus restreints que ceux de l’ergothérapeute. Une
reconnaissance de cette évaluation semble donc indispensable.
Si dans ma pratique professionnelle future je suis amenée à évaluer les capacités de
conduite d’une personne ayant eu un traumatisme crânien, je souhaiterais que la décision
juridique prise pour ce patient soit en accord avec les résultats de l’évaluation ayant été
effectuée. La conduite automobile étant une activité pouvant mettre en danger autrui, il est
important que la décision prise soit réfléchie et juste. S’il n’y a pas de prise en compte de
46
cette évaluation, le travail effectué en ergothérapie pourra paraître difficile à faire
reconnaître.
C’est pourquoi la réalisation en ergothérapie d’une évaluation de la conduite automobile pour
une personne ayant eu un traumatisme crânien pourrait être rendue obligatoire. Cela
permettrait d’effectuer des essais concernant les aménagements du véhicule mais
également de voir les capacités cognitives du patient. Cela obligerait également les patients
anosognosiques à présenter le compte-rendu de l’évaluation à la préfecture.
Pour permettre une plus grande reconnaissance de cette évaluation, une grille de
compte-rendu standardisé pourrait être mise en place. Le passage en préfecture serait alors
plus rapide et permettrait ainsi un gain de temps pour des personnes ayant déjà beaucoup
de dossiers administratifs à remplir.
C’est dans cette optique que le GERCAH-IDF (Groupe d’Etudes et de Recherche pour le
Conduite Automobile des personnes Handicapées en Ile de France) a été créé en 2004.
Composé de médecins, d’ergothérapeutes ou encore de neuropsychologues de plusieurs
centres MPR (Médecine Physique et de Réadaptation) d’Ile de France, ce groupe de travail
a pour objectif « d’approfondir et harmoniser l’évaluation ainsi que les procédures liées à la
régularisation et au passage du permis de conduire adapté (déficit moteur et/ou
neuropsychologique) ».
Un questionnaire de pré-consultation d’évaluation des capacités à la conduite automobile7 a
été élaboré et mis en ligne sur le site internet du GERCAH.
Ce document comporte deux volets :
- une partie à remplir par le patient où il explique dans quelles mesures la conduite
automobile a un impact sur ses habitudes de vie ;
- une partie à remplir par le médecin où il explique la situation du patient à laquelle
peuvent être associés des comptes-rendus d’hospitalisation, un bilan ophtalmologique ou
encore neuropsychologique.
Ce guide est destiné aux ergothérapeutes qui le complètent d’un compte rendu propre au
centre. A l’inverse, le patient peut venir en ergothérapie avec ce questionnaire rempli afin de
tester les aménagements proposés par la commission médicale.
 Cette proposition de questionnaire montre donc la volonté d’harmoniser les pratiques.
Il faudrait maintenant mettre en place un compte-rendu universel à tous les centres pour
permettre aux différents professionnels d’effectuer au mieux l’évaluation de la conduite
automobile et d’accompagner ainsi le patient dans les démarches.
7
Annexe 5
47
4.3.2. Anosognosie et conduite automobile, quelles solutions?
Comme nous avons pu le voir, la reprise de la conduite automobile chez une
personne ayant eu un traumatisme crânien peut également se révéler problématique du fait
de la présence d’une anosognosie. Afin de permettre une aide à la reconnaissance de ce
trouble par le patient, des solutions peuvent être imaginées comme par exemple la pairémulation qui est « le partage d’expérience entre plusieurs personnes en situation de
handicap ». Dans le cadre de la reprise de la conduite automobile, cela pourrait s’imaginer
par la présence d’un patient lors de l’évaluation d’une autre personne. La discussion pouvant
alors s’instaurer entre les pairs pourrait amener à une meilleure reconnaissance des
troubles. Malgré tout, cela peut s’avérer difficile. En effet, il faut trouver des personnes étant
au même stade de la rééducation et acceptant de partager cette expérience. Ce procédé me
semble intéressant mais je ne suis pas sûre qu’il puisse être réalisable dans une structure de
soins.
Une solution a été apportée par un ergothérapeute : l’utilisation d’une caméra lors de
l’évaluation écologique. Cet outil permet de montrer comment s’est déroulée l’évaluation au
patient qui pourra alors peut être réaliser ses erreurs. L’utilisation de cet outil me semble
judicieux mais il faudra faire attention de ne pas s’appuyer uniquement dessus. Ce qui sera
retranscrit lors de la vidéo ne traduira pas forcément la réalité.
Afin d’aider à la reconnaissance des troubles par le patient, je souhaiterais également parler
de l’importance de la famille. Lors de la réinsertion, en fonction des troubles du patient, elle
fera partie intégrante du projet de vie du patient, c’est pourquoi il est important de l’intégrer à
l’évaluation de la conduite automobile. Bien que la présence de la famille ne soit requise tout
le temps, elle permettrait une meilleure compréhension des troubles par l’entourage qui
pourra alors mieux l’expliquer au patient.
Enfin, et comme dans toutes prises en charge, l’instauration d’une relation de confiance est
primordiale pour permettre une adhésion au programme de rééducation. Le résultat de
l’évaluation sera également mieux accepté.
A travers les résultats de la recherche, nous avons pu voir que plusieurs éléments
étaient essentiels mais cela peut également s’appliquer plus largement à la pratique de
l’ergothérapeute.
48
4.3.3. La mise en situation écologique
La mise en situation écologique est une pratique permettant de mettre la personne dans une
situation de la vie quotidienne. Son utilisation peut se faire dans toutes les activités de la vie
quotidienne, elle est d’ailleurs mise en pratique en ergothérapie par l’activité cuisine, lors
d’une sortie en ville ou encore lors d’une mise en situation en chambre. Il s’agit d’une des
bases de l’ergothérapie.
Je me suis alors posée la question de son intérêt au quotidien. Peut-elle être applicable à
toutes les situations ? Y-a-t-il une nécessité de l’utiliser systématiquement ?
La mise en situation écologique est un outil de prise de conscience mais il faut
également noter que des pré-requis sont nécessaires à son utilisation. Des capacités de
bases telles qu’une commande motrice minimale ou encore une capacité de compréhension
de l’activité sont fondamentales afin d’en faire bon usage.
L’élaboration de cette activité requiert également du temps. Il faut donc mesurer la
portée et l’importance de sa réalisation pour optimiser son utilisation.
Mais contrairement à d’autres activités plus analytiques pouvant être proposées au patient,
celle-ci peut révéler des résultats surprenants. Lors de l’exécution de l’activité, en plus des
capacités requises, des automatismes entrent en jeu qui seront plus ou moins présents
selon les habitudes de vies antérieures du patient. Ces automatismes permettront donc
parfois au patient de réaliser une activité qui semblait difficilement réalisable au premier
abord.
La mise en situation écologique est donc une pratique intéressante que j’utiliserai lors de ma
future pratique professionnelle.
Cependant, il faudra faire attention de ne pas l’utiliser à mauvais escient, de bien
comprendre son utilisation, la situation mise en place et également les conséquences pour le
patient. Elle peut avoir un effet positif sur le patient qui se rendra compte de ses capacités
dans une situation qu’il connait et réaliser ainsi qu’il peut effectuer seul cette activité.
Mais au contraire, elle peut le mettre en échec et être un frein pour la suite de la rééducation
si la réalisation de l’activité n’est pas possible et confronte donc le patient à ses difficultés
qu’il ne réalisait peut être pas auparavant.
4.3.4. Le travail équipe
Nous avons également pu voir l’importance du travail en équipe et notamment la
place du médecin dans la prise en charge du patient.
49
Lors de mes expériences en tant que stagiaire, j’ai pu voir que le médecin était présent de
différentes manières. Il pouvait être présent à toutes les réunions d’équipe, ou alors sa
présence se limitait à une visite hebdomadaire au patient.
De part sa profession, il est le coordinateur d’une équipe rééducative. Son rôle est alors de
prendre en compte les différentes professions et cela dans le but de permettre une approche
globale du patient. Il a également un rôle de prescripteur, l’ergothérapeute agira sur son avis.
Lors de notre recherche, nous avons pu voir que la place du médecin était variable mais qu’il
y avait un souhait général qu’il soit plus présent lors de la reprise de la conduite automobile
chez une personne ayant eu un traumatisme crânien notamment pour l’annonce du résultat.
Nous pouvons donc nous poser plusieurs questions à ce sujet. Est-il possible que le
médecin puisse s’investir et accorder ce temps à chaque patient ? Ou encore plus
largement, jusqu’où le médecin doit-il être présent ?
De manière réaliste, je me rends bien compte que le médecin ne peut pas être sollicité pour
chaque intervention. Néanmoins, son avis est important car il connaît le point de vue de tous
les rééducateurs et peut ainsi faire une synthèse du patient.
Des réunions d’équipe sont essentielles pour permettre une prise en charge globale
du patient. L’évaluation de la conduite automobile, bien qu’il s’agisse d’une activité exercée
par l’ergothérapeute, devrait se faire avec l’avis de toute une équipe. Une synthèse avant
l’annonce du résultat permet une plus grande compréhension pour l’équipe de la situation et
ainsi une meilleure intégration de l’information pour le patient. Ce temps est primordial pour
cette activité car il s’agit d’un acte important pouvant avoir de lourdes conséquences sur la
vie du patient mais également pour autrui.
Ce travail en équipe est cependant difficile. Selon N. Alméras, « la communication au sein du
plateau technique est encore mal systématisé, du fait d’un individualisme d’un autre âge que
le descriptif des décrets de compétence des différents acteurs du soin favorise ». La
communication au sein d’une équipe n’est pas une chose aisée, il faut comprendre la place
de chaque personne, prendre en compte son travail et son caractère.
Cela se ressent également lors du partage de savoirs entre les différentes structures de soin.
Comme nous avons pu le voir concernant la démarche idéale d’évaluation, les
connaissances peuvent être à la disposition des ergothérapeutes mais le manque de partage
de ce savoir entraîne une mauvaise optimisation du temps et des moyens de
l’ergothérapeute.
Suite à un stage effectué auprès de personnes ayant eu un traumatisme crânien, l’évaluation
en ergothérapie de la conduite automobile m’avait posé question. Ce travail de recherche
50
nous a permis de voir que l’évaluation écologique et la coordination des différents
professionnels sont des éléments essentiels de la démarche.
Dans ma future pratique professionnelle, qu’il s’agisse d’un patient ayant eu un traumatisme
crânien, un accident vasculaire cérébral ou encore une amputation, cette problématique de
l’évaluation de la conduite automobile me paraît plus facile à aborder. Enrichies par mes
différentes recherches théoriques et par le partage des expériences et des techniques
apportées par les ergothérapeutes, je pourrais aborder cette pratique avec un meilleur recul.
Malgré tout, seul mon exercice professionnel futur me permettra de mettre en
pratique les connaissances acquises et ainsi d’appliquer la démarche d’évaluation de la
conduite automobile.
51
Conclusion
L’accident à l’origine d’un traumatisme crânien aura de lourdes conséquences sur les
habitudes de vie antérieures du patient. Après avoir dû faire face à un parcours de soin long
et spécifique, le patient devra faire face à des troubles qu’il ne comprend et ne perçoit parfois
pas. Du fait de ses incapacités, le patient ne retrouvera pas une qualité de vie antérieure et
devra faire le deuil de certaines activités.
La conduite automobile peut faire partie des activités importantes aux yeux du patient
mais elle demande un encadrement spécifique du fait de sa dangerosité potentielle pour
autrui. L’exécution de cette activité demande des compétences spécifiques et des capacités
minimales motrices, attentionnelles ou encore comportementales. Pour permettre une
reprise de cette activité en toute sécurité, une évaluation des capacités du patient est
primordiale et pourra se faire de différents moyens selon les services d’ergothérapie.
Ce travail de recherche nous a montré que les pratiques concernant l’évaluation de la
conduite automobile auprès des personnes ayant eu un traumatisme crânien sont variées.
Les moyens à la disposition de l’ergothérapeute limitent sa pratique qui ne peut alors faire
une prise en charge optimale du patient. De plus, nous avons pu voir l’importance de
l’évaluation écologique lors de cette pratique qui permet pour le patient une prise de
conscience de ses troubles mais également pour le thérapeute une mise en situation réelle
permettant de mettre en avant des automatismes.
Cette recherche nous a permis d’approfondir nos connaissances et de comprendre
les pratiques des ergothérapeutes en ce qui concerne la conduite automobile. Cela nous a
également permis de soulever d’autres interrogations.
L’accompagnement d’une personne ayant eu un traumatisme crânien passe par un
travail d’équipe et un partenariat entre les différents intervenants autour du patient. Pour
permettre une évaluation écologique pertinente de la conduite automobile, le travail en
équipe de l’ergothérapeute et du moniteur auto-école est essentiel. Ce dernier, par sa
connaissance
des
aménagements
et
son
expérience,
complétera
l’analyse
de
l’ergothérapeute. Mais nous pouvons nous poser la question si un partenariat entre
l’ergothérapeute et le moniteur auto-école permettrait une meilleure évaluation écologique de
la conduite automobile ?
52
Bibliographie
Livres
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53
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en situation de Handicap. Ergothérapies, Sept. 2008, n°31, p. 37-40
 BOITEUX D. Evaluation sur simulateur de conduite des personnes cérébrolésées.
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Disponible sur Internet : http://www.handipole.org/spip.php?article1043 (Consulté le
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http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Programme_d_actions_2012_en_faveur_des_trau
matises_craniens_et_des_blesses_medullaires.pdf (Consulté le 12 septembre 2012)
Autres
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 Décret n° 2012-886 du 17 juillet 2012 relatif au contrôle médical de l’aptitude à la
conduite. Journal officiel n°0166 du 19 juillet 2012, texte n°31, page 11844.
Disponible sur Internet :
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000026200519&da
teTexte&categorieLien=id (Consulté le 10 janvier 2013)
55
ANNEXES
Annexe 1 : Echelle de Glasgow
Annexe 2 : Score de GOAT
Annexe 3 : L’ERFC
Annexe 4 : Questionnaire destiné aux ergothérapeutes
Annexe 5 : Questionnaire de pré-consultation d’évaluation des capacités à la conduite
automobile du GERCAH-IDF
Annexe 1 : Echelle de Glasgow
Ouverture des yeux
Réponse verbale
Réponse motrice
4 > Spontanée
5 > Orientée
6 > Obéissance aux ordres
3 > Stimulation verbale
4 > Confuse
5 > Flexion adaptée
2 > A la douleur
3 > Inappropriée
4 > Flexion non adaptée
1 > Aucune
2 > Incompréhensible
3 > Décortication
1 > Aucune
2 > Décérébration
1 > Aucune
Annexe 2 : Score de GOAT
1. A. Quel est votre prénom et votre nom à la naissance ?
B. Quelle est votre date de naissance ? J M A
C. Dans quelle ville demeurez-vous ?
2. A. Dans quelle ville êtes-vous maintenant ?
B. Dans quel endroit êtes-vous présentement ?
3. A. Quand avez-vous été admis à cet hôpital ? J M A
B. Comment êtes-vous venu ici ? (moyen de transport ?)
4. A. Quel est le premier évènement après l’accident dont vous vous souvenez ?
B. Pouvez-vous décrire en détail cet évènement ? (date, moment, personnes)
5. A. Quel est le dernier évènement avant l’accident dont vous vous souvenez ?
B. Pouvez-vous décrire cet évènement ? (date, moment, compagnons)
6. Quelle heure est-il maintenant ? (1 point par ½ heure d’erreur)
7. Quel est le jour de la semaine ? (1 point par jour d’erreur)
8. Quel jour du mois est-ce aujourd’hui ? (1 point par jour d’erreur)
9. Quel mois est-ce ? (5 points par mois d’erreur)
Total sur 100 points
Fin d’amnésie post-traumatique quand le score est supérieur à 75
Annexe 3 : L’ERFC
Annexe 3 : L’ERFC
Annexe 3 : L’ERFC
Annexe 4 : Questionnaire destiné aux ergothérapeutes
Bonjour,
Actuellement en troisième année d’étude à l’Institut de Formation en Ergothérapie de
Rennes, je prépare mon mémoire de fin d’études sur l’évaluation en ergothérapie dans le
cadre de la reprise de la conduite automobile chez des patients ayant eu un traumatisme
crânien.
Afin de comprendre comment cette démarche est mise en place et comment la reprise de la
conduite est abordée auprès de cette population, je vous sollicite pour répondre à ce
questionnaire.
Réponses souhaitées pour le 20 mars
Je vous remercie de porter attention à cette demande.
Cordialement,
Alexandra LE COAT
1 A rue ty guen
29 241 LOCQUIREC
[email protected]
06.71.29.62.90
Annexe 4 : Questionnaire destiné aux ergothérapeutes
1. Depuis combien de temps travaillez-vous avec des personnes ayant eu un traumatisme
crânien ?
2. Dans votre service, quelle est la proportion de personnes traumatisées crâniennes ?

De 0 a 25%

De 25 à 50%

De 50 à 75%

De 75 à 100%
Ces questions permettent d’établir le profil de la population interrogée et de
comprendre dans quelles mesures l’intervention auprès des personnes ayant eu un
traumatisme crânien fait partie de leur quotidien.
3. Combien effectuez-vous d’évaluation de la conduite automobile en moyenne auprès de
cette population ?

1 ou plus par semaine

1 tous les 2 semaines

1 par mois

Plus d’1 par mois
Par cette question nous cherchons à comprendre l’importance de l’évaluation de la
conduite automobile dans la pratique de l’ergothérapeute.
4. La demande d’évaluation de la conduite automobile vient le plus souvent :

De l’ergothérapeute

Du patient

Du médecin

Autre :
Cette question nous permet notamment de comprendre l’importance de cette
évaluation pour le patient.
5. Quels outils d’évaluation à la conduite avez-vous à votre disposition ?

Evaluation « papier-crayon »

Evaluation écologique sur route

Evaluation sur simulateur de conduite
Avec cette question nous cherchons à savoir quelle est la proportion des outils à la
disposition des ergothérapeutes.
Evaluation « papier-crayon »
Répondre à cette partie uniquement si vous avez cochez "Évaluation "papier-crayon " pour les
outils à votre disposition (question 5)
Annexe 4 : Questionnaire destiné aux ergothérapeutes
Nous avons ensuite différencié plusieurs parties pour faciliter le remplissage du
questionnaire par les ergothérapeutes.
Dans cette partie nous voulons savoir comment les évaluations « papier-crayon » sont
utilisées et leurs importances.
6. Les tests sont-ils effectués en collaboration avec le/la neuropsychologue ?
7. Pour évaluer les capacités du patient à la conduite, vous arrive-t-il d’utiliser uniquement
les tests « papier-crayon » ?

Jamais

Rarement

Souvent

Toujours
8. Pour évaluer les capacités du patient à la conduite, avez-vous tout le temps recours aux
tests papier-crayon ?

Oui

Non
Evaluation écologique sur route
Répondre à cette partie uniquement si vous avez cochez "Évaluation écologique sur route" pour
les outils à votre disposition
Dans cette partie nous voulons savoir comment les évaluations écologiques sont
mises en place, comment elles sont utilisées et leurs importances.
9. Disposez-vous :

D’un véhicule adapté

D’un partenariat avec une auto-école

D’une auto-école intégrée

Autre :
10. Qui est présent lors de cette évaluation ? (en plus du patient et du moniteur auto-école)
11. Pour évaluer les capacités du patient à la conduite, vous arrive-t-il d’utiliser uniquement
l’évaluation écologique ?

Jamais

Rarement

Souvent

Toujours
Annexe 4 : Questionnaire destiné aux ergothérapeutes
12. Pour évaluer les capacités du patient à la conduite, avez-vous tout le temps recours à
l’évaluation écologique?

Oui

Non
Evaluation sur simulateur
Répondre à cette partie uniquement si vous avez cochez "Évaluation sur simulateur " pour les
outils à votre disposition
Dans cette partie nous cherchons à comprendre comment le simulateur de conduite
est utilisé
13. Pour évaluer les capacités du patient à la conduite, vous arrive-t-il d’utiliser uniquement
le simulateur de conduite ?

Jamais

Rarement

Souvent

Toujours
14. Pour évaluer les capacités du patient à la conduite, avez-vous tout le temps recours au
simulateur de conduite?

Oui

Non
Pour finir
Je vous rappelle que ce questionnaire concerne l’évaluation de la conduite automobile chez une
personne ayant eu un traumatisme crânien
15. Quel est, en moyenne, le taux de reprise de conduite automobile des personnes ayant
eu un traumatisme crânien suite à l’évaluation ?

De 0 à 25 %

De 25 à 50 %

De 50 à 75 %

De 75 à 100 %
A travers cette question nous cherchons à savoir quelle est la proportion d’avis
favorable suite à l’évaluation.
Annexe 4 : Questionnaire destiné aux ergothérapeutes
16. Combien d’évaluations effectuez-vous en moyenne auprès d’un même patient ?
Pourquoi ?
A travers cette question, nous cherchons à comprendre comment l’évaluation de la
conduite automobile est utilisée par les ergothérapeutes.
17. En cas d’avis négatif suite à une première évaluation, effectuez-vous une rééducation
spécifique ?

Oui

Non
Si oui, quel type de rééducation effectuez-vous ?
Si non, pourquoi ?
Nous voulons savoir si à la suite du résultat une prise en charge spécifique est mise
en place ou non.
18. Quelle serait, pour vous, la démarche idéale d’évaluation à la conduite automobile ?
Cette question ouverte nous permet d’avoir une plus grande possibilité d’expression
de la part des ergothérapeutes. Nous voulons savoir quelle serait la volonté des
ergothérapeutes en ce qui concerne l’évaluation de la conduite automobile chez une
personne ayant eu un traumatisme crânien.
19. Qui annonce généralement le résultat de l’évaluation au patient ?
Nous cherchons à savoir si l’ergothérapeute est impliqué jusqu’au bout dans
l’évaluation et s’il est accompagné d’autres intervenants.
20. N’hésitez pas à me faire part de vos remarques.
Cette question permet d’aborder des sujets qui n’ont pas été soulevés et de compléter
l’enquête.
Annexe 5 : Questionnaire de pré-consultation d’évaluation des capacités
à la conduite automobile
Annexe 5 : Questionnaire de pré-consultation d’évaluation des capacités
à la conduite automobile
Résumé
A la suite d’un traumatisme crânien, le patient peut présenter des troubles cognitifs,
moteurs ou encore comportementaux qui entraveront la réalisation des activités de la vie
quotidienne. La conduite automobile, activité nécessitant des capacités d’analyse et
d’exécution, peut devenir problématique pour cette personne. C’est pourquoi une évaluation
pertinente en ergothérapie est essentielle pour une réalisation sécuritaire de cette activité.
Les recherches effectuées et les observations professionnelles ont permis de
comprendre les pratiques mises en place et que l’évaluation écologique est un élément
essentiel. Le manque de moyens techniques et financiers limite la prise en charge optimale
du patient. L’évaluation ergothérapique de la conduite automobile mérite d’être reconnue
auprès de la préfecture pour un accompagnement complet du patient.
Il est important de noter que lors de l’évaluation de la conduite automobile auprès
d’une personne ayant eu un traumatisme crânien, un partenariat entre les différents acteurs
présents autour du patient parait essentiel.
Mots clés : traumatisme crânien, conduite automobile, évaluation, travail en équipe
Abstract
Following a head injury, the patient can suffer from cognitive, motor or behavioral
disorders which will hinder daily living. Driving is an activity requiring analysis and execution
abilities and can become problematic for this person. On that account, a pertinent evaluation
in occupational therapy is essential for a safe realization of this activity.
The searches made and the professional observations allowed to understand the set
up practices and that the environmental assessment is an essential factor. The lack of
technical and financial means limit optimal health care. The occupational therapist
assessment of the driving abilities deserves to be recognized by the prefecture for a
complete monitoring of the patient.
It’s important to note that during the driving assessment with a person with a head
injury, a partnership between the various participants evolving around the patient seems
essential.
Keys words : head injury, driving, assessment, team work

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