Rapport MCHM Madame Hazaël-Massieux (désormais MCHM

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Rapport MCHM Madame Hazaël-Massieux (désormais MCHM
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Rapport MCHM
Madame Hazaël-Massieux (désormais MCHM) prend la parole.
Monsieur Bardury présente ici une thèse de dimension importante ( 584 p.) sur
un sujet original, encore pas exploré en matière de langues créoles. Il s’agit
certainement d’un travail long et délicat qui a nécessité de fait plus de temps
que normalement requis pour une thèse. Il était donc urgent que Daniel
Bardury puisse soutenir enfin cette thèse.
Malheureusement, et peut-être en raison de l’importance de la tâche, le texte
qui en résulte comporte encore de nombreuses imperfections qu’il convient de
souligner aujourd’hui.
[Même si le jury a estimé normal de récompenser le candidat pour ce gros
travail, il convient d’attirer son attention sur des points qui ne permettent pas
d’envisager la publication de cette thèse sans d’importantes corrections.]
D’abord le déséquilibre patent entre les parties ne permet guère de suivre et
de comprendre la démarche. Une présentation (veut-on dire ici
« introduction » ?) de 116 p. Une deuxième partie qui constitue l’essentiel de
l’ouvrage (385 p.) ; une troisième partie très courte : 42 p. (ouverture sur des
concepts généraux), avant d’arriver à une conclusion générale de 13 pages.
Dans la 2e partie (Analyse cognitive des prépositions créoles), on cite de
nombreux exemples – mais dont la source n’est jamais précisée. Sont-ils tous
tirés de l’ouvrage mentionné dans la présentation Ti Anglé a – mais alors il
fallait donner chaque fois les références précises : l’une des rares figure p. 126 :
BARTHELERY 2008 : 166). L’ouvrage étant introuvable ne permettait aucune
vérification. Cependant en regardant une autre œuvre de Barthéléry, Mme
MCHM a pu toutefois constater que l’auteur met un tiret entre le nom et le
déterminant – ce qui facilite grandement la lecture -, alors que M. Bardury s’y
oppose avec des justifications qui ne me semblent guère tenir, et supprime ces
marques partout : ainsi, s’il cite effectivement des phrases de ce roman (à
vérifier), le candidat trahit l’auteur en modifiant son texte. S’il ne le cite pas,
cela veut dire qu’il s’inspire tout au plus de lui… ou d’autres auteurs (non
cités)?), ou qu’il produit des exemples de son cru. On aimerait souvent
examiner les exemples en contexte (si important en cognitique) – ce qui n’est
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pas possible. Par ailleurs on connaît les dangers d’un corpus constitués des
seules phrases produites par le linguiste qui les décrit. Sur ce point, on aurait
aimé avoir des informations plus précises en particulier sur la constitution de la
liste des prépositions examinées (p. 13 : pourquoi un tri et sur quels critères ?).
Par ailleurs sont parfois explicitement mêlés aux autres exemples des éléments
tirés du corpus de textes anciens de MCHM, mais ce corpus est par définition
soumis à une extrême variation qu’examine précisément MCHM (variation
historique, géographique, sociologique… et d’ailleurs graphique !) et les
phrases citées par M. Bardury ne proviennent pas alors d’un seul « créole » pas du martiniquais le plus souvent – alors que c’est cette variété qu’il prétend
étudier… On voit déjà les multiples critiques dont le corpus peut être l’objet (on
y reviendra). Quand un nombre différent de prépositions, dans deux états de
langue ou dans deux langues, se partagent le « champ » d’analyse, il est
manifeste que chaque préposition (ou absence de préposition) est chargée de
significations diffé&rentes, souvent en rupture (voire en contradiction ?) d’une
langue à l’autre : il est difficile alors de parler d’un sens de base (unique) que
seul différencierait le contexte ; il faut bien que l’ensemble des relations soient
exprimées ou suggérées ! De ce fait on ne peut pas sans danger mêler des
formes relevant d’autres « langues » ou d’autres variétés. Une autre référence
constante de M. Bardury est le français, mais les prépositions françaises lors de
la constitution des créoles n’avaient pas les sens d’aujourd’hui ; en outrela
formation et l’évolution des créoles s’est déroulée en contact de langues
africaines ayant aussi apporté leurs signification… : point dont il conviendrait
de tenir compte. M. Bardury emprunte également des exemples et références
à Jules Faine (par ex. p. 525 concernant les verbes sériels » : mais il s’agit là
d’haïtien et non pas de martiniquais : comment peut-on mêler les deux langues
ainsi. (Cf. p. 526 sq) ?
Dans la présentation-introduction-1er chapitre ( ?), on entre directement dans
la perspective de la « cognitique » : aucune définition, aucune présentation en
rapport avec les autres sciences proches (linguistique, théorie de l’information,
sémantique…). Simplement l’expression de la séduction qu’a entraîné Pottier
sur M. Bardury, l’évocation de la partie-tout , ou encore le fait que certains
auteurs (Kleiber, Schnedecker et Theissen) la considèrent comme une approche
essentielle ou qu’ « elle témoigne de la place que le locuteur occupe dans le
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Monde Référentiel » (p. 9) (pourquoi d’ailleurs des majuscules ici ?)i, etc. On
aimerait une véritable définition, et surtout des indications méthodologiques
rigoureuses… face à une conception un peu étonnante des frontières et des
rencontres disciplinaires : linguistique, sémantique, cognitique, psychologie...
de fait dans la thèse surtout un certain psychologisme qui n’a pas sa place dans
un tel travail (« Pour nous, le patient est une entité qui… il est porteur d’une
conscience » ( !), pp. 546-547. Id pour « le patient dont le moi est divisé » (p.
547) parce qu’il dit qu’il n’a pas fait son choix ! ou pour d’autres généralités
contestables : « L’homme aspire plutôt à monter qu’à descendre » (p. 530). De
même quand certaines données phoniques sont prises en compte (dimension
des mots…) pour expliquer du sens ou des interprétations… mais il est vrai que
M. Bardury tient à démontrer la « motivation » linguistique et qu’il confond
sans doute là des concepts que généralement les linguistes veillent à séparer.
La nécessité d’une catégorie est autre chose que sa motivation phonique qui
s’apparente à l’étude des onomatopées ou des formes symboliques du langage.
Il faut dire que toutes les questions méthodologiques pèchent vraiment chez
M. Bardury : aucune précision sur la façon dont il a procédé ; aucune méthode
pour l’analyse du corpus ; aucune donnée statistique sur les fréquences des
prépositions, etc. On voit parfois mêler d’ailleurs des points d’analyse portant
sur d’autres langues (anglais par exemple pp. 102 -109) ; mais peut-on tirer des
conclusions d’analyses de l’anglais pour les porter sur le martiniquais ? Cela me
semble précisément au moins délicat dans une perspective « cognitiviste »
dont les prémisses ne sont pas posées. Parfois on a l’impression que le mot
« cognitique » est un mot magique auquel le candidat se rattache avec force
en mêlant des analyses qui linguistiquement sont très contestables.
Dans le détail d’ailleurs on peut noter de nombreuses incohérences. On ne
sait pourquoi l’on passe d’une préposition à l’autre ; on s’interroge sur le choix
et l’origine des exemples retenus. Il importait dans un travail de thèse
d’indiquer clairement les exemples renvoyant au corpus, avec pagination à
l’appui, en précisant quels sont ceux qui sont produits par le candidat lui-même
ou extraits d’autres œuvres…. Ce point est important car il aurait permis au jury
de vérifier et d’analyser le contexte, si souvent indispensable dans une
approche linguistique et cognitiviste (dès lors que le sens est en cause).
D’autres exemples sont présentés qui renvoient à M.C. Hazaël-Massieux, 2008
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(je n’insisterai pas sur les mésinterprétations qui ont données de mes propos) ;
le plus grave est que les exemples contenus dans MCHM 2008 soient traités en
même temps que les autres, alors qu’ils renvoient manifestement à un état de
langue, voire à des langues différentes ; il nous semble alors qu’il y a là de
grands risques de confusions : pourquoi envisager des items d’une autre
époque, dans un autre environnement sociolinguistique, items graphiés d’une
autre façon et fonctionnant en contraste et opposition avec d’autres
prépositions ? Il semble souvent douteux que ces textes anciens livrent des
informations compatibles avec celles que tente de dégager M. Bardury de son
corpus contemporain. Il faut noter encore que les exemples des corpus anciens
proviennent souvent d’autres îles de la Caraïbe que la Martinique, peut-on
penser qu’il s’agit du même créole et les traiter comme s’ils comptaient au
nombre des usages martiniquais ? Cette grosse question de la compatibilité des
données est l’une de celles qui a sans doute le plus gêné Mme HM. D’autant
plus qu’il est également fait recours à Baissac (créole mauricien) : on se
demande ce que cela vient faire dans une thèse sur le martiniquais, de même
que lorsque l’on cite Elodie Jourdain (martiniquaise, certes) mais pour deux
exemples réunionnais, tirés de Héry 1828 – langue qu’elle ne connaît pas et qui
ne vous concerne pas ! (thèse p. 54).
Quant à l’analyse du créole lui-même, sans vouloir mettre en cause la
compétence de locuteur natif de M. Bardury, Mme HM n’a pu s’empêcher de
noter un certain nombre de points très contestables. Notamment le parti-pris
de traduction littérale du candidat l’engage très souvent dans de fausses
pistes : les « expressions », les figures (métaphores, etc.) ne résistent pas à ce
type de traduction et on se demande comment un non-locuteur (ce qui est le
cas de la plupart des membres du jury) pourrait comprendre les significations
véritables dès lors que le candidat veut s’en tenir à l’idée d’un « sens de base »
- même s’il ne l’appel pas ainsi (fondé sur le sens de la préposition
correspondante en français, mais qui ne correspond précisément que pour
certaines valeurs) ? Inacceptable l’ignorance dans laquelle M. Bardury se
complaît de la valeur des positions dans la phrases (certains ont pu parler de
morphèmes tactiques en sémantique pour désigner le rôle significatif de la
position dans la phrase) : ainsi il ne traduit jamais le « relatif »quand il est non
marqué en créole (notamment pour le relatif « objet ») alors que c’est
précisément la disposition et le rapport des mots entre eux, voire l’intonation,
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qui l’expriment : « moun lan ou té ka palé a [,] sot [sòt] » (p. 35) phrase
traduite par « La personne tu parlais est sotte »)). Ou encore « Sòti déwò an
kay mwen an souplé ! » traduit maladroitement « Sors dehors dans ma maison
s’il te plaît » (il conviendrait de dire tout simplement ici que le créole utilise
« an » dont le sens en créole ne recouvre pas « en, dans » en français : an peut
indiquer la provenance, le lieu d’où l’on vient…, et pas seulement la présence
dans un lieu. On pense encore à la traduction proposée pour « Mwen
asou dan », p. 276 (« je suis sur dents ») : le générique (rendu souvent par un
pluriel en français) se marque en créole par l’absence de morphème ; en
français il faudrait obligatoirement restituer le « les » dans la traduction : ce qui
donne tout simplement l’expression française « je suis sur les dents » – tandis
que la traduction tronquée de M. Bardury ne permet en aucun cas de
comprendre le sens et qu’il doit se livrer à de multiples contorsions pour
déterminer le sens. Les problèmes liés à ces traductions dites littérales (mais
qui ne peuvent rendre compte des vraies valeurs en créole) sont tellement
nombreux que l’on ne peut examiner tous les exemples. D’où viennent les
exemples des pages 36-37, phrases tellement irréelles/irréalistes que les
repères manquent pour sortir de la confusion induite (considération sur les
solides inanimés !).
Dans cette même perspective, il faudrait relever de nombreuses erreurs de
langue, d’analyse de la langue créole objet d’étude… Quelques confusions plus
graves proviennent de l’utilisation de marques dont la valeur grammaticale
n’est pas comprise par M. Bardury. Les problèmes de langue et de
compréhension du créole martiniquais ne manquent pas. C’est ainsi encore
que le candidat confond plusieurs « an » qui ne relèvent pas de la même
préposition française et qu’il assimile abusivement ? On pense à la confusion
des suites phoniques [ã]. Ainsi traite-t-il ensemble des exemples comme
« mouch an mièl, p. 195, « dyab an bwet », alors que ces deux « an » relèvent
de deux morphèmes bien distincts : le « an » dans « mouch an mièl » n’est pas
la préposition « an » (qu’elle veuille ou non dire « dans »), mais la préposition
« a » nasalisée en contexte nasal (cf. miel). Ce « a » marque ici une relation de
détermination et non un « locatif » quel lequ’en soit la valeur exacte (« dans »,
« provenance »…)
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Parmi les problèmes de langue et de compréhension du créole martiniquais,
on peut évoquer encore la discussion sur l’aphérèse largement erronée :
confusion par ex. de « anviolé » avec ses significations (tandis que le préfixe
« an » est détachable), dans la même discussion, avec « anvai » (envahir) ou le
« an » n’est pas détachable (p. 31) A cause de andjézé (formé sur djèz = dièse
musical qui augmente la valeur de la note, nous dit-on ?), on étend aux autres
verbes préfixés par « an » la valeur d’intensification ou d’augmentation :
concluant de la valeur de djèz en l’occurrence à la valeur de « an » préfixé !. La
notion de « fausses aphérèses », p. 33-34 est très confuse. Peut-on alors faire
confiance à la cognitique si elle entraîne de telles erreurs d’interprétations ? On
a souvent l’impression que M. Bardury fabrique les sens des formes analysées
pour démontrer ce qu’il veut démontrer. Il faudrait encore discuter les analyses
du préfixe « dé-», p. 518 sq qui comporte des éléments tout aussi contestables.
Ce ne sont là que quelques aperçus des analyses fausses du créole et des
significations recouvertes par les diverses prépositions, ou préfixes – qui, hélas,
ne peuvent d’ailleurs pas apparaître à des non-locuteurs et risquent de fausser
le jugement du jury ou la connaissance de la langue.
Je souhaite noter encore toutefois (sans doute est-ce une phrase de
Barthéléry, bien que sans pagination on ne puisse vérifier ?) dont les graphies
posent indéniablement des questions de cohérence qu’il conviendrait de
souligner. Je pense à la phrase (cité par vous toujours en p. 126) :
« Mwen gadé [,] mwen kouté lézansien ek mwen éséyé rifè tou sa yo té ka
fè. Sé pa’w la mwen rivé fè an tanbouyé » « (J’ai regardé j’ai écouté les
anciens et j’ai essayé de refaire tout ce qu’ils faisaient. C’est par là je suis
arrivé faire un tambourinaire »).
L’orthographe maladroite de Barthéléry (si elle est de lui : exemple toujours
sans référence) aurait due être expliquée : il s’agit de noter laprononciation de
« par » avec cette apostrophe et « w » en guise de « r »…., alors qu’autrement
« pa’w » marquerait logiquement un « par vous » ? Sans connaître assez les
principes de notation de Barthéléry ou la source exacte des phrases évoquées,
on aimerait ici des explications. Ce problème de notation fautive est largement
étayé dans Neg-zabitan an du même auteur et par une profusions de
formes (plusieurs par pages de dialogues) dans lesquelles « ou » [w] est une
marque de 2e personne – pronom ou déterminant possessif : « ki moun ki fè’w
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sa » (p. 15), « pa mélé’w » (p. 16), « man mété’w lékol » (16), « dapré’w » (16),
ou encore « kò’w » (avec un nom ici), etc.
L’usage d’une terminologie non seulement quasiment illimitée et mal
contrôlée, mais tirée d’auteurs et de théories très diverses, est insupportable
(ex. actorialité / agentivité, diastème, méronyme, holonyme, cible, site, trajet,
aléthique, déflexivité, ergatif, etc.). Ceci en outre en l’absence de toute
définition (une terminologie « connivente » ne convient pas dans une thèse),
ou parfois seulement avec une clause qui laisse le lecteur sur sa faim : « nous
entendons « marqueur » tel que le conçoit Culioli » (p. 137). Un exemple de
charabia incompréhensible p. 137 : (« Conceptualiation » à lire), ou encore p.
539-540 un paragraphe à peu près incompréhensible, et combien d’autres !
Dans ce cadre, il est particulièrement malvenu d’utiliser des termes avec des
contresens – sans les justifier et peut-être même les concevoir par rapport à
l’usage ordinaire dans nos spécialités. Mme HM conteste ainsi l’usage des
termes ergatif/ergativité quand M. Bardury dit par exemple p. 131 que
« zèklè » devient ergatif ( ???), alors que ce terme d’ergatif renvoie à l’analyse
de certaines langues flexionnelles où une marque particulière permet de
distinguer les sujets de verbes transitifs (marque d’ergatif) et de verbes
intransitifs ou absolutifs, par une marque différente qui porte sur le sujet voire
sur le COD ou l’attribut. On peut dire aussi que l’ergatif est le cas que prend le
sujet de verbes transitifs employés intransitivement. Le créole n’est pas une
langue à déclinaison… Le candidat hésiterait sans doute à parler de nominatif
ou d’accusatif en créole… alors pourquoi parler d’ergatif ? Il est
particulièrement malencontreux de recourir à ce terme pour le créole (langue
où les mots sont non fléchis) simplement parce qu’ils se combinent avec un
verbe dont l’usage « de base », selon M. Bardury, exclut les sujets inanimés (cf.
« Zèklè a antré… » p. 131) : il suffisait de dire que dans cette
phrase/construction, le sujet inanimé devient « agent », ou acteur… ?). Et cela
veut simplement dire que la « grammaire de base » du candidat st mauvaise si
elle est conçue comme excluant certaines phrases pourtant normales et tout à
fait courantes : il n’y a pas que les humains et les animaux (animés) qui sont
susceptibles d’entrer. En français ne dit-on pas « ce paquet n’entre pas dans la
boîte », etc.et pour autant personne ne parle d’ergativité ! il n’est pas
nécessaire de recourir à une notion aussi particulière et peu représentée dans
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les langues du monde (on cite toujours le basque) pour proposer une
explication- qui elle-même n’est peut-être pas nécessaire si l’on donne une
anlayse correcte du verbe « antré » dès le départ.
Il y aurait aussi beaucoup à dire sur la question de la déflexivité, (terme
utilisé, dit-on, en référence à Neveu 2004 mais dans un sens tout à fait
différent, en l’appliquant là encore abusivement aux créole en cours de
formation (p. 510-511), dans des phrases notées d’ailleurs (textes anciens) par
des lettrés francophones, selon des principes non examinés de « calque du
français »). « contré » signifie « rencontrer » et non pas « contrer » p. 512.
Cette interprétation oblige M. Bardury alors à interpréter « en » -dans « r-encontrer » français comme signifiant « avec » ! Quel rapport avec la déflexivité
(sui signifie littéralement : perte de flexion) qui implique (dans les langues
romanes venant du latin, par exemple) souvent la post-position de certains
morphèmes non liés (ex de « mangerai » formé sur « j’ai à manger », avec
verbe avoir postposé : « manducare habeo »)en latin tardif par rapport au futur
latin flexionnel,. Les formes véritablement déflexives vont aussi dans le sens
d’un « vidage » du sens – par généralisation – et la répartition du sens
autrement, ailleurs (cf. plus de conscience chez le locuteur du verbe « avoir »
en finale des verbes au futur en français). Autre ex. quand illum devient le,
quand non devient ne… pas puis « pas » (négation). Le passage de
« en »(français dans rencontrer) qui se déploie en créole après aphérèse dans
une préposition comme « épi ») est bien plutôt une prise en charge de sens
divers qu’une « évolution » à expliquer en terme de perte de flexion ! id. pour
« dé-passer » qui donne « pasé anlè ». Un peu plus sérieux « pré-céder » :
« pasé douvan mwen » mais c’est sérieux parce qu’on ne le met pas en rapport
avec « céder » au sens moderne du mot en françias, mais avec « cedere » latin.
Voir aussi dans la présentation p. 33 sq.
Un index (pourquoi l’avoir limité à 11 items ?) de l’ensemble des notions serait
bienvenu pour circuler dans la thèse, mais aussi un index des prépositions pour
permettre au fil de la lecture des vérifications qui se révèlent impossibles.
Ssurtout, on regrette l’absence d’un glossaire donnant les définitions de tous
les termes du métalangage utilisé, et de leurs réemplois par rapport à d’autres
théories.
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Quant à la bibliographie Mme HM tient encore à faire quelques remarques :
non seulement elle est très incomplète : de nombreuses références citées dans
le corps du texte en sont absentes, ce qui ne permet pas de retrouver des
références pourtant intéressantes en apparence ; une référence à un écrit de
Jean Bernabé manque même dans cette bibliographie et l’on reste sur sa
indécis : A quoi correspond BERNABE 1987 (p. 46), mais l’on peut citer encore
(il ne s’agit que d’un tout petit nombre des références manquantes) : qui est
Deledalle, 1978, p. 4, Hummel, 1994, Neveu 2004, Morlane-Hondere et Fabre
(p. 28), Delbecque (p. 19), Winston, Chaffin et Herremann (p. 28 également),
Raemondeck ou Raemdonck ???, on peut citer aussi Brondal, p.30, Vilar, p. 29,
Hazaël-Massieux, Guy, 1989…. Les négligences dans cette bibliographie sont
d’ailleurs de tous ordres (étonnant une seule référence à Dennis Philps et l’on
ne cite nulle part les études sur les prépositions créoles dans The world Atlas of
language Structures, et manifestement les normes que l’on s’efforce
d’apprendre aux doctorants, n’ont jamais été acquises par M. Bardury. Il ne
dispose la date que dans une position souvent ultime (avant la pagination
quand celle-ci existe, ce qui est bien rare). Aucune distinction par l’italique
entre titres de livres ou de périodiques, et titre d’articles. Les références sont
souvent très partielles (parfois juste un titre d’article sans indication du
périodique ou de l’ouvrage où le trouver).
A noter aussi l’orthographe souvent catastrophique (qu’on pourra parfois
baptiser « fautes de frappe ») mais tout ceci aurait dû disparaître dans une
bonne relecture : on écrit par exemple que « dépalé » signifie « parler à tord et
à traversé (avec d sur tort), on voit apparaître un « holonyme » (p. 132) en lieu
est place, semble-t-il , d’ « homonyme » - à moins que ce soit un terme
nouveau introduit dans la si vaste terminologie ?» ; « interdépendence » (avec
« ence » à la fin), les noms d’auteurs eux-mêmes sont souvent graphiés de
façons diverses (ex. Marque-Pecheu ou Marque-Pechen, etc. et quand l’auteur
est inconnu, non répertorié dans la bibliographie, ou répertorié sous une forme
différente, il faut alors pour le lecteur se documenter pour retrouver l’auteur
qui est cité !) ; les négligences que représentent les inversions de lettres, les
lettres sautées (« otion » pour « notion » p. 33, et combien d’autres qui
rendent parfois la lecture hasardeuse), les mots collés, ou encore les mots
sautés (un exemple p. 17 : « La pensée de DELBECQUE (2006) nous révèle [que]
le langage est une partie intégrante de la cognition humaine » sans « que »,
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sont extrêmement nombreuses (plusieurs par pages), et parfois il faut s’y
reprendre à plusieurs fois pour comprendre ce qu’a voulu écrire M. Bardury
(ex. presque à chaque pages : on citera au hasard : 146, 147, 131, 132, 133…
Ceci est inacceptable pour une thèse ! De même qu’une répétition presque
intégrale dans la conclusion (pp. 554-555) : tout est repris en 562-563… :
paragraphe qui commence par « Il reste encore à affiner l’étude du binôme
adan/andidan (dans)… etc. ».
Mme HM pense en avoir dit assez. Pour conclure sur une note positive, avant
de donner la parole à M. Bardury pour répondre à ses critiques, elle dit avoir
apprécié ses idées quant à une « grammaire des fautes » (p. 548 et suivantes) :
cela intervient tardivement (juste avant la conclusion générale), mais c’est une
piste intéressante et qu’on aimerait voir exploiter davantage en ce qui
concerne les rapports français-créole. Elle ajoute en outre qu’il est indéniable
que le candidat ne sait pas mettre en valeur les points significatifs sauf dans
l’ultime conclusion (assez bonne) où il réévoque la question des binômes
français-créole « déjà/depuis », « pa/par », « ba-pou / pour » : points que Mme
HM a trouvés intéressants au cours de la lecture de la thèse.

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