communiqué de presse - Les Sables d`Olonne

Transcription

communiqué de presse - Les Sables d`Olonne
Musée de l’Abbaye Sainte-Croix
Les Sables d’Olonne
---------
DOSSIER DE PRESSE
De la fin du vol (détail), 2008 (installation)
Delphine Gigoux-Martin
La vague de l’océan
(5 février – 5 juin 2010)
Communiqué de presse
Delphine Gigoux-Martin place l'animalité au cœur de sa démarche artistique. Les bêtes
les plus inattendues, à poils ou à plumes, sont les protagonistes d'histoires qui au fond,
ne filent la métaphore animalière que pour mieux épingler les travers de notre
humanité. Le constat souvent cruel est adouci par la façon fort séduisante de l'énoncé.
L'artiste ne privilégie a priori aucune technique : elle se laisse porter par le génie du
lieu qui au finish détermine les règles du jeu. Et pratique un art de l'installation
bluffant : une intervention mesurée, tout en retenue, presque immatérielle, qui
s'approprie l'espace du sol au plafond et en redéfinit magistralement les contours. Dans
des décors sobres et superbes à la fois, qui marient le noir et le blanc, l'ombre et la
lumière, elle met en scène ses personnages, morts ou vifs, dessins animés ou bêtes
empaillées, dans de courts récits animaliers tendres et cyniques. Un art du double-jeu,
adepte de la douche froide et des fortes variations climatiques, orchestré d'une main de
fer dans un gant de velours.
Delphine Gigoux-Martin est invitée au musée de l'Abbaye Sainte-Croix à fêter quelque
dix années de création. Elle présentera pour l'occasion plusieurs nouvelles créations.
2
Texte de présentation
Les oiseaux (ou ces merveilleux fous volants dans leur drôle de machine)
« Peut-être serai-je le pauvre petit Icare qui tombe et disparaît dans l'eau ou le sable, parmi l'indifférence
générale... Le pêcheur continuera à pêcher, le laboureur à labourer, le berger à regarder le ciel et les
moutons eux-mêmes tourneront le dos à l'épave... Tant pis, j'aurai essayé. Je suis un pilote d'essai. »
(Elsa Triolet)1
Restreindre l'œuvre de Delphine Gigoux-Martin au seul domaine des arts plastiques n'a pas de sens. D'ailleurs,
qui saurait aujourd'hui dire de façon certaine ce qui relève de l'une ou de l'autre des disciplines artistiques
strictement établies. Danse, théâtre, arts plastiques, musique et même cinéma se mêlent désormais bien
souvent dans des pièces où l'hybridation est de mise. L'installation, qui est le format privilégié par l'artiste,
illustre de manière explicite cette confusion bénéfique des genres. A le considérer de près, le travail de
Delphine Gigoux-Martin se rapproche sensiblement du monde du spectacle. Il emprunte au cinéma et au théâtre
quelques procédés de fabrication bien rodés, le choix initial de l'argument présidant à la distribution des
personnages et à la définition des principes scénographiques. Le parallèle est d'autant plus flagrant que ses
pièces tirent parti des caractéristiques architecturales de leur lieu d'accueil. Mises en mouvement, au service
de l'histoire qu'elles racontent, elles investissent aussi l'espace temporel de la narration.
Prologue : l'argument de la pièce
Depuis quelques dix années que Delphine Gigoux-Martin a commencé à travailler, son propos nous est devenu
familier : il est centré sur l'animalité et exclut de ce fait presque totalement la représentation de la figure
humaine2. Pas de corps, pas de visages, pas de gestes caractéristiques de l'être humain dans son œuvre, qui
s'attache à observer et restituer fidèlement les us et coutumes d'animaux de tout poil. Espèces marines ou
aériennes, carnassières ou herbivores, proies ou prédateurs, félins racés ou insectes insignifiants, tout y passe.
« L'animal-machine » occupe la place et pourtant, sans être convoqué physiquement, l'homme, ou « l'animal
pensant », est partout présent car la bête, telle qu'elle est mise en scène, y renvoie immanquablement. Elle file
la métaphore, en quelque sorte, selon plusieurs registres parfois contradictoires.
Homo homini lupus (« l'homme est un loup pour l'homme ») est l'une des nombreuses expressions forgées par
l'homme pour accommoder l'animal à sa sauce et lui faire endosser des caractères, des vices ou des vertus qui
se rapportent en réalité à lui-même. Il suffit, pour illustrer ce propos, de puiser dans l'inventaire des « noms
d'oiseaux » (l'expression en soi est déjà savoureuse, puisqu'elle cache sous son apparente joliesse les mots les
plus vils de la langue française) quelques exemples éloquents. Beaucoup d'oiseaux s'avèrent d'une grande bêtise
(confère la tête de linotte, la cervelle de moineau, la bécasse, la dinde ou l'oie blanche, le pigeon) ; d'autres,
le coq, le paon (ou le pou !) sont fiers. Le pinson est gai, l'autruche se voile la face, la chouette est vieille et
moche et le rossignol chante...
Acte I : l'entrée des artistes
Le répertoire est vaste et laisse à Delphine Gigoux-Martin, lors de la distribution des rôles, toute licence de
faire interpréter aux oiseaux un morceau de choix. Dans son œuvre, on croise indifféremment des bons et des
truands, la volière et la volaille. Du côté du charme, la perruche caquetante incarne à la perfection le rôle titre
de La mégère apprivoisée de Shakespeare (2010) et le bel oiseau du paradis joue le jeu de la séduction dans Un
décor approprié (2009). Le vol planant du vautour, beaucoup plus inquiétant, est un présage de mort qui
menace des victimes toutes désignées (J'avais accoutumé..., 2006). Le vol plongeant de la mouette, fondant à
toute allure sur sa proie, est d'autant plus implacable qu'il succède à une phase d'observation en apparence
paisible (+ si affinités, 2005).
La destinée de la basse-cour semble bel et bien scellée étant donné que l'homme l'élève, en tout premier chef,
1
2
In Elsa Triolet, Luna-Park, (1959) ; cit. in Michèle Daucourt, Dédale et Icare : métamorphoses d’un mythe, Paris :
CNRS éditions, 2002, p. 187.
Une seule exception, l’œuvre Voyage autour de mon crâne part II, conçue en 2009 dans le cadre de l’exposition
Dreamtime présentée aux Abattoirs de Toulouse, où le dessin d’un homme nu s’anima sur une chorégraphie de Sidi
Graoui.
3
pour la mettre dans son assiette. L'œuvre sensorielle de Delphine Gigoux-Martin est aussi affaire de goût et de
papilles. Les oies qui semblent poursuivre leur route dans le ciel sont bel et bien embrochées et rôties (La
rôtisserie de la Reine Pédauque, 2008), prêtes à être dégustées de même que les faisans vénérés et les canards
siffleurs préparés en terrines pour orner la table le soir du vernissage. Seule une armada de petits poussins
jaunes semble échapper à l'appétit féroce de l'homme dans une œuvre d'un cynisme achevé intitulée, d'après
Ambrose Bierce, On ne mange pas toujours ce qui est sur la table (2004). Delphine Gigoux-Martin goûte
l'humour acide et le manie sans pincettes. Avec un soupçon de méchanceté, elle ne peut s'empêcher de forcer
le trait de l'accablement, en faisant vibrer la corde sensible. Elle utilise ainsi le poussin à contre-emploi faisant
de cet être douillet et attendrissant un projectile de tir. Mais sa revanche n'est qu'illusoire puisqu'il ne parvient
à s'envoler, échappant à son destin alimentaire, que pour aller se ficher, comme une fléchette, le bec dans un
mur.
Dans le rôle de l'idiot le pigeon, c'est entendu, occupe et souille la place. Il a le profil type de l'être mal aimé,
parasite de l'homme, fléau des villes qui vit sur nos ordures et nous impose ses déjections. Il est à l'oiseau ce
que le rat est au rongeur ou la mouche à l'insecte : un indésirable. Delphine Gigoux-Martin joue sur cette
déconsidération en la détournant plutôt qu'en l'exagérant. Dans sa pièce intitulée De la fin du vol (2008), les
pigeons sont les victimes de quelques coups de feu invisibles, figés dans la violence de leurs derniers instants.
Leur chute douloureuse, saisie dans un paysage dévasté, incarne avec une certaine majesté la tragédie de
l'existence, quelle qu'elle soit. Le même rôle est assigné à une escadrille de souris volantes, aplaties et
camouflées en chauve-souris le temps d'un combat (Féroces infirmes, 2010). Les souris de laboratoires sont des
cobayes par excellence, victimes de la barbarie. Ailleurs elles s'avèrent ravageuses. Alors comment les situer
dans la bataille ? Sont-elles en fuite ou bien poursuivent-elles un ennemi caché quelque part du côté du
spectateur ? Cette ambiguïté gouverne également les essaims de mouches dont Delphine Gigoux-Martin
exploite, contre toute attente, le potentiel esthétique. Dans Les damnés, ils peuvent être assimilés à des
créatures infernales qui gangrènent un lustre de cristal tombé au sol. Le motif kaléidoscopique de leurs ombres
projetées sur le mur, d'une beauté sombre et vénéneuse, semble faire pendant au chatoiement coloré des
papillons chimériques d'une autre pièce, installée dans le monde souterrain de la grotte du Mas d'Azil (Voyage
autour de mon crâne, 2009). Avec Cosmos (2010), l'insecte bas de gamme gagne l'immensité du ciel : la nuée de
mouches mortes fixée sur une cimaise d'un blanc immaculé dessine une constellation en négatif qui fait illusion.
Mais dans ce paysage en décomposition l'éclat des étoiles est souillé et les astres ressemblent à des chiures de
mouche. Dans cette version revisitée du conte d'Andersen, la mouche peine à s'extirper de la fange pour ne
devenir qu'une luciole à la triste figure.
Quelle que soit la spécificité de chaque espèce, l'attribut commun à tous ces drôles d'oiseaux, bien entendu,
c'est le vol. La belle affaire : en voilà un symbole aviaire qui dépasse en prestige tous les autres d'autant que
l'humanité, évoquée en filigrane, n'a jamais su voler. Ce n'est pas faute pourtant de s'y être employé ; ni d'en
avoir rêvé. Quel vertige ce doit être que de pouvoir contempler le monde d'en haut ! Le mythe fondateur
d'Icare, latent dans l'œuvre de l'artiste, est là pour nous le rappeler. Le vol incarne la bipolarité inhérente à
l'homme écartelé entre ses désirs et ses limites. Le principe de réalité surgit de plein fouet au beau milieu
d'une tentative de dépassement, la vouant irrémédiablement à une fin tragique. Si dans La vague de l'océan
(2010), le rusé renard échappe à la noyade, ce n'est que pour finir, à la mode des petits poussins, écrasé contre
un mur. Le saut dans le vide, au-dessus d'une lame de fond menaçante, n'est qu'un prodige de pacotille soldé
par un lamentable ratage. Le renard en super héros de fiction brave aisément tous les dangers mais hors-cadre,
il se couvre de ridicule en terminant sa course contre un élément du décor. L'espace scénique fonctionne ici à
double-sens : il s'affiche comme artifice et déclare que nos désirs les plus fous ne sont qu'illusoires.
La figure de la chute surtout retient l'attention de Delphine Gigoux-Martin dans la symbolique du vol. Plus les
espoirs sont grands, plus la déconvenue est vive. Icare, grisé par son exploit, s'est brûlé les ailes en s'approchant
trop près du soleil. Il a fini noyé. Le ciel et la mer sont deux horizons, pourtant pleins de promesses, ligués pour
le conduire à sa perte. Le soleil d'Icare exerce le même type de fascination que la mélodie de la sirène qui
attire les marins jusqu'aux récifs et les conduit au naufrage. D'ailleurs cette créature hybride mi-femme, mipoisson, n'était-elle pas selon la tradition antique, mi-femme, mi-oiseau ? Ni l'air ni l'eau ne semblent être des
éléments très surs pour l'homme. Dans les combles de l'Abbaye Sainte-Croix, ces magnifiques combles en carène
de bateau renversé qui portent le souvenir de l'histoire maritime des Sables d'Olonne, Delphine Gigoux-Martin
pense à la tempête, au déchaînement des éléments et aux naufrages peints par Paul-Emile Pajot. Mais le
mouvement des rames de son bateau est aussi celui des ailes d'un oiseau et son vaisseau céleste fraye à
proximité de la constellation du Navire Argo qui porte le souvenir du valeureux Jason et de la conquête de la
toison d'or. L'ascension et la chute ne se succèdent pas dans les pièces de Delphine Gigoux-Martin. Elles vont de
pair et s'entrelacent. L'homme, de toute évidence imparfait, balance, va et vient entre le grand et le petit. Il
tente de tenir son cap et bascule, entre sagesse et folie, acceptation résignée ou dépassement de soi. Grandeur
et décadence. Le vol fluctuant de l'oiseau symbolise cette démesure qui exacerbe la douleur de l'échec. « Rien
n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force/ Ni sa faiblesse ni son cœur ... »3.
3
Louis Aragon, « Il n’y a pas d’amour heureux » in La Diane française, (1944).
4
Entr'acte : demandez le programme
Lorsqu'il s'agit d'oiseaux, l'ombre de Léonard de Vinci plane au-dessus de l'œuvre de Delphine Gigoux-Martin. Sa
geste, marquée de doutes et de fulgurances, traversée d'éclats et de zones d'ombres, est la parfaite incarnation
renaissante du mythe d'Icare. Et ses travaux scientifiques ont poussé jusqu'à l'obsession l'étude des oiseaux, de
leur anatomie et de leur mouvement, en vue de réaliser le rêve technologique de l'homme volant. Le
mécanisme qui anime la perruche de La Mégère apprivoisée fait un clin d'œil aux projets de machines volantes
et aux automates de Léonard. Le Traité sur le vol surtout, que Delphine doit commencer à connaître par cœur,
vient étayer sa réflexion. Curieusement, elle ne s'en sert pas tant comme manuel technique que comme recueil
de poésies qu'elle cite librement au détour d'un titre (Du vol, De la fin du vol des oiseaux, De la nage, Du
brame) ou d'un carnet.
Delphine Gigoux-Martin, tout comme Léonard, prépare son travail dans des carnets qui donnent accès à une
kyrielle d'observations, d'inspirations, de réflexions qu'elle pose pêle-mêle pour cerner l'état d'esprit d'une
œuvre et en faire saisir la genèse. Elle accompagne ainsi chacune de ses pièces d'un petit livret qui fonctionne
comme une note d'intention de ce qu'elle entend installer dans l'espace d'exposition. Y sont consignés des
images (reproductions de peintures et de gravures, photographies), des citations littéraires, des annotations,
des dessins (études de détail, vues d'ensemble, croquis et schémas techniques) qui annoncent le programme.
Ces carnets d'une grande beauté sont des jalons essentiels pour sonder sa pensée.
Ainsi dans le carnet préparatoire à l'installation De la fin du vol des oiseaux (2008) l'artiste emprunte au passage
aux écrits de Léonard quelques considérations de haute volée, à commencer par cette sentence funeste qui
donne la tonalité générale : « Alors que je croyais apprendre à vivre, j'apprenais à mourir ». Suivent quelques
remarques précises sur l'anatomie des oiseaux dont elle apprécie avant tout l'étrange poésie4. Plus loin, la
reproduction d'une gravure de 1653 exécutée d'après le Paysage au chasseur de Rembrandt voisine avec un
extrait du treizième chant de L'Enfer de Dante, qui décrit une forêt hostile, « Un étrange bois / où de sentiers
ne se voyaient pas trace. / Les frondes n'y étaient point vertes mais bien noires / Point lisses les rameaux,
mais noueux et tordus ». Le décor est planté. Quelques esquisses rapides à l'encre noire ou au crayon en
soulignent la désolation par l'évocation d'un paysage escarpé ou de ramures décharnées. Ça et là, quelques
postures d'oiseaux, quelques mots-clés et un bref descriptif qui orientent la lecture de la pièce : « vol
suspendu. Des oiseaux se fracassent les ailes sur des paysages dessinés ». Des considérations techniques aussi
(un plan de masse et des photos du bâtiment), ou bassement matérielles (bronze, céramique, dessin à la mine
de plomb et au fusain), prévoient les procédés de fabrication et les contraintes d'installation. Puis finalement le
coup de grâce, sur la dernière double page, est asséné par le voisinage sinistre et cynique sur la gauche, de
suggestions culinaires pour accommoder les restes de pigeons dépecés, en grillades, rôtis, sautés, en salmis ou
en pâtés, et sur la droite d'une description jubilatoire du cadavre mutilé du Comte pourfendu d'Italo Calvino :
« Non seulement il lui manquait un bras et une jambe, mais tout ce qu'il y avait de thorax et d'abdomen entre
ce bras et cette jambe avait été emporté, pulvérisé par ce coup de canon à bout portant(...) ». Tout cela ne
laisse guère de doutes sur l'interchangeabilité de l'homme et de l'animal qui sous-tend le travail de Delphine
Gigoux-Martin, pas plus que sur la fragilité et la cruauté de toute vie terrestre qu'elle met en lumière. Memento
mori. Tout est dit dès ces carnets des préoccupations de l'artiste, de l'objectif qu'elle se fixe et de la façon dont
elle envisage sa mise en oeuvre. Elle nous livre ici en pâture, en une démonstration de quelques pages
magistrales, des bribes de son univers plastique et mental.
La lecture des carnets de Delphine Gigoux-Martin révèle aussi une grande érudition que l'artiste distille sans
ostentation dans son œuvre. De ses études en histoire de l'art elle conserve un penchant certain pour le Siècle
d'or hollandais dont elle revisite régulièrement les natures mortes et les scènes de chasse. Mais son goût
personnel la porte davantage vers la littérature et elle emprunte souvent le titre de ses œuvres à quelque
écrivain qui figure au panthéon de ses admirations. Souvent long, franchement poétique, le titre densifie le
propos d'une pièce en jouant de sa connotation et des rappels établis entre l'original et sa libre interprétation.
Le rôle de Catharina, « La mégère apprivoisée » de la comédie de Shakespeare, est tenu dans sa version
animalière par une belle perruche, allusion tout aussi claire que réjouissante. Ailleurs le lien est plus ténu,
moins immédiat, presque crypté. Il vient s'ajouter au réseau complexe des indices visuels qui mis bout à bout
vont faire sens. La pièce résolument guerrière intitulée d'après Une saison en enfer d'Arthur Rimbaud Féroces
infirmes retour des pays chauds (2010) se charge de la révolte du poète qui rend dans sa prose une vision
chaotique et désespérée d'une humanité en crise. Si l'évocation des « pays chauds » reste ambiguë, (promesse
d'un ailleurs meilleur ou territoire ravagé par la violence ?), celle des « féroces infirmes », de ces mercenaires
revenus brisés de la guerre, ne laisse en revanche aucune illusion.
4
Par exemple : « Quelle différence il y a entre les pointes flexibles des ailes des oiseaux et celles qui ne se plient pas ; et
si cette flexion vers le haut et vers le bas est nécessaire ou non au vol, attendu que ces pointes coupées, fût-ce
légèrement, le vol s’en trouve presque empêché » ; (K 10 r.) in Les carnets de Léonard de Vinci (tome 1), Paris,
Gallimard, 1942, p. 498.
5
Acte II : la scénographie
Dans ses pièces animalières, Delphine Gigoux-Martin présente ses héros ordinaires sous différents oripeaux. Une
constante cependant : son bestiaire n'existe pas. Reste alors le paradoxe de ses « natures mortes » qui s'agitent
devant nos yeux. L'artiste, un peu magicienne, use d'artifices qui se jouent de la vie et de la mort. Elle dessine
beaucoup mais sans souci naturaliste, des silhouettes d'animaux épurées qui s'inspire du réel sans lui promettre
fidélité. Son trait elliptique garde une structure générale vraisemblable mais ne s'interdit pas l'invention.
Surtout, il vide la forme de sa substance, la réduit à un contour, à quelques cernes, comme s'il ne saisissait
qu'une ombre fugitive. Ne reste de l'oiseau que quelques lignes directrices qui tranchent avec la surface de la
cimaise ou du papier, en noir sur fond blanc. Plusieurs centaines de dessins mis bout à bout sont nécessaires
pour animer l'oiseau. A raison de 24 images par seconde, il faut croquer 240 mouvements d'oiseaux pour une
séquence de 10 secondes. Mais le temps, dans les dessins animés de Delphine Gigoux-Martin, est en suspens et
s'égrène en léger ralenti (à raison de 24 images pour deux secondes de film). Cette sensation de flottement,
alliée à la répétition obstinée du même geste, crée un effet d'hypnose. Et tout autour le silence, à peine
troublé par le bruit des machines, favorise la fuite vers le domaine du rêve.
Avec la pièce intitulée De la fin du vol des oiseaux (2008), Delphine Gigoux-Martin inaugure le travail de la
porcelaine qu'elle expérimente pour créer de délicates coquilles blanches à l'apparence fantomatique. Pour les
pigeons, elle fabrique cinq moules rudimentaires correspondant au corps, aux pattes et aux ailes de l'oiseau puis
elle modèle la terre encore fraîche pour arrêter la position du corps. Le moulage, comme un masque mortuaire,
restitue l'empreinte de l'oiseau. La pâleur et la fragilité du biscuit, laissé tel quel, sans apprêt, suggère
l'évanescence et la disparition latente. Pourtant ces pigeons de porcelaine qui viennent se fracasser contre un
mur restent intacts sous le choc de l'impact. Cette ambivalence est également de mise avec les délicates
trompettes de la mort qui poussent bizarrement dans le jardin de son oiseau de paradis (Un décor approprié,
2010). Comme pour les centaines de poulpes qui hantent Le rêve de la femme du pêcheur (2009), l'artiste a
trempé un à un ses sujets dans la porcelaine liquide. Le procédé employé est destructif. A la cuisson, la matière
organique brûle et disparaît. Ne reste que la trace d'un dernier instant, juste avant que tout ne disparaisse. A
l'opposé du dessin animé, qui déroule dans le temps une séquence de vie, l'objet en porcelaine opère un arrêt
brutal et définitif sur image.
Avec la taxidermie, autre technique de « fabrication » à laquelle l'artiste recourt régulièrement, la présence de
la mort devient inévitable. L'enveloppe de l'animal réel est là devant nos yeux, mais devenue inerte. Par
l'emploi de l'un ou l'autre de ces trois procédés, le dessin (animé), la porcelaine et la taxidermie, l'artiste
déplace le curseur de l'artificiel vers le réel. Le dessin d'imagination donne une représentation fictive de
l'animal, le moulage en porcelaine en restitue une empreinte fidèle, la taxidermie présente l'animal lui-même,
l'intègre tel quel à l'œuvre d'art. Et curieuse ironie du sort, plus l'objet est réel, moins il semble vivant. La
taxidermie, en tentant de conserver l'apparence de la vie rend la présence de la mort plus prégnante encore. Et
que l'oiseau s'anime sous l'effet de quelque mécanisme ingénieux ne change rien à l'affaire. Le monde de
Delphine Gigoux-Martin est un monde de revenants, un fragile théâtre d'ombres. Et si la vie, tout comme le
théâtre, n'était finalement qu'un songe ? « Qu'est-ce que la vie ? Un délire. / Qu'est-ce que la vie ? Une
illusion, / une ombre, une fiction »5. Tous les principes plastiques de son travail contribuent à créer une
impression de flottement et de déréalisation : le glissement d'un niveau de réalité à l'autre (certains fantômes
seraient plus tangibles que d'autres !), la gamme chromatique effacée, réduite au noir et blanc, le recours à la
projection lumineuse, immatérielle et illusoire. Le décor, ou plutôt l'absence de décor, qui rend manifeste le
vertige de l'espace vide, fixe l'histoire hors du temps. En refusant l'anecdote et l'accessoire, l'art de Delphine
Gigoux-Martin touche à l'universel. En n'incarnant aucun fait historique précis, il vaut pour tous.
Acte III : apothéose et pleins-feux
Delphine Gigoux-Martin oppose à une grande économie de moyens (un dessin au trait ou projeté + quelques
animaux biscuités ou naturalisés) des principes de mise en espace démesurés. Adepte de l'in situ, elle réactive
chacune de ses pièces en fonction du lieu d'exposition ou plutôt modèle l'espace qui les accueille à leur mesure.
Ses œuvres investissent l'espace et très souvent le cassent, recomposant une nouvelle architecture suivant « les
principes du décadrage et du hors champ »6. Les plans et les points de repères habituels sont brouillés par la
multiplication des écrans et la déformation des surfaces. Le dessin animé, projeté dans l'espace, en redéfinit
les contours, non sans exploiter les décrochements de surface et l'ombre des objets qu'il traverse. Il se diffuse
sur différents plans, se prolonge à l'intersection d'un mur, traverse une fenêtre. Dans l'installation Féroces
infirmes retour des pays chauds (2010), l'image, défragmentée par des vitres placées à la sortie du vidéo
projecteur se déploie comme une aile sur les murs collatéraux. L'œuvre présentée à Fiac en 2005 occupait toute
5
In Pedro Calderon de la Barca, La vie est un songe, (1636) ; « (…) et le plus grand bien est peu de chose, / car la vie
n’est qu’un songe, / et les songes ne sont que des songes ».
6
Cf. Pascal Pique, « Animale humanité » in Delphine Gigoux-Martin, Château de Taurines : les Abattoirs, 2006, p. 9.
6
une maisonnée. Depuis l'extérieur, le spectateur en suivait les méandres, entre ciel et mer, en regardant à
travers les fenêtres d'une pièce à l'autre.
La découpe des objets participe également à la redéfinition d'un nouvel horizon. A l'intérieur du château de
Taurines, l'artiste a recréé toute une forêt à l'aide d'arbres gigantesques (J'avais accoutumé de mordre à même
les victuailles, 2006). Dans la salle du rez-de-chaussée, le sous-bois est matérialisé par des racines tombant du
plafond ; au premier étage, le ciel surplombe les frondaisons qui surgissent du sol. En bas, les sangliers
naturalisés, coupés en deux moitiés, semblent passer à travers les murs. En haut, au-dessus de leur tête, le
dessin animé d'un vol plané de vautours oblitère le plan et suggère un espace en plein-air. En installant un
paysage en trois dimensions, grandeur nature, à l'intérieur du château, l'artiste crée de toutes pièces un monde
factice, une scène de théâtre qui invite le spectateur à monter sur scène pour éprouver l'étrangeté du décor.
Après le spectacle : le souper
A Taurines, au soir du vernissage, les vautours n'ont pas cessé de planer pendant que les invités étaient attablés
autour d'un sanglier rôti dans la cheminée du château. Delphine Gigoux-Martin, en inconditionnelle des écrits
acerbes d'Ambrose Bierce, manie l'humour noir en virtuose. Les recettes de cuisine qu'elle collecte dans ses
carnets nous rappellent que l'animal est comestible et qu'il constitue la base de notre alimentation. Mais elles
élèvent le besoin de se sustenter au rang d'art culinaire et font aussi du repas un moment de convivialité. Ce
qui fait qu'avec les banquets organisés par Delphine Gigoux-Martin, on ne sait plus très bien sur quel pied
danser. La rôtisserie de la reine Pédauque (2008), titrée d'après un roman éponyme d'Anatole France, semble
préparer un « Festin cannibale » à la manière de Meret Oppenheim, celui de la reine Pédauque, ainsi nommée
du fait de son pieds palmé, qui fit ripaille de ses propres sujets. L'histoire traite-t-elle de la sauvagerie d'une
mère qui dévore le fruit de ses entrailles ou des abus d'une humanité dite civilisée ? Le doute est permis... En
traitant avec malice de nos pratiques alimentaires, Delphine Gigoux-Martin prolonge son questionnement sur la
nature schizophrénique de l'homme sans en omettre la dimension anthropophage, mise en évidence dans les
écrits de Freud qui liait le repas rituel au parricide primitif et la consommation symbolique de la chair au
sacrifice expiatoire. En préparant pour nous la chair de l'animal, du poulpe, du sanglier ou du pigeon, qu'elle a
symboliquement meurtri dans son oeuvre, l'artiste fait surgir furtivement l'ogre qui sommeille en nous. Mais
elle injecte aussi dans la cérémonie une bonne dose de gaieté. Ses banquets, conçus en pensant au pays de
Cocagne, nous invitent à partager un moment de plaisir et de fête en prolongement de l'exposition.
L'abondance et la générosité de la nature, que Bruegel l'ancien évoque dans sa peinture par un cochon lardé
d'un couteau, une oie qui se pose toute rôtie dans un plat ou un œuf à la coque muni d'une petite cuiller, y
invite l'homme à une courte trêve aux faux airs de paradis perdu.
Gaëlle Rageot-Deshayes,
conservatrice du patrimoine
7
La naufrage, début d’une autre histoire
Extraits de l’entretien avec Frédéric Bouglé, juillet 2010
[…]
Frédéric Bouglé : A quel moment Delphine, débute ta démarche artistique ?
Delphine Gigoux-Martin : En 1990, à l’âge de 18 ans, après un bac A3, options arts plastiques et histoire de
l’art. Je savais que je voulais continuer dans cette voie, mais je n’avais pas le désir d’aller en école d’art. J’ai
alors choisi une filière plus adaptée, plus juste en rapport avec ce qui me manquait pour me développer dans ce
domaine. J’ai pensé que des études d’histoire de l’art seraient le bon choix.
FB : Et que faisais-tu au départ de ton activité ?
DGM : De la peinture, de la peinture abstraite, durant deux ans. Ensuite, en 1992, j’ai eu l’occasion de
participer à une exposition qui s’appelait « Un lieu un jour ». Beaucoup d’artistes de toutes générations, tous
issus d’écoles d’art sont venus exposer dans un champ. Pour moi, il me paraissait difficile de mettre de la
peinture dans un pré, en extérieur. L’installation s’est donc imposée à ce moment-là. Un espace m’était offert,
il fallait investir cet espace. Je n’ai pas trouvé la solution avec la peinture, j’ai donc créé un tableau en trois
dimensions.
FB : La situation est beaucoup plus importante que le texte affirmait Michel Bouquet. C’est donc à ce momentlà, en 1992, que tu abordes la sculpture installation, et te diriges sur une thématique précise, l’animalité. Dans
l’histoire de l’art contemporain, on voit déjà un certain nombre d’artistes qui ont abordé ce thème, je pense à
Thomas Grünfeld, Jan Fabre ou Oleg Kulik parmi d’autres. Mais la peinture n’est pas en reste avec Paul
Rebeyrolle par exemple, Fabrice Hyber ou Philippe Cognée à leurs débuts… En fait, le bestiaire est un thème
courant de l’art, mais tout de même peu utilisé en ces débuts des années 1990. Comment et pourquoi ce choix
s’est-il prononcé ?
DGM : C’était ma première exposition en extérieur, dans un espace ouvert. Avec le taureau de combat, la
corrida, je m’approchais de ces thèmes-là. On peut dire que tout a commencé pour moi avec cette première
exposition, il y a dix-huit ans. Effectivement je n’ai pas le souvenir d’avoir rencontré beaucoup d’œuvres sur
cette thématique, aujourd’hui c’est un thème plus en vu.
FB : Si avec le néoclassicisme on pense à Jean Honoré Fragonard et « Le Taureau Blanc », le taureau est aussi
un sujet dramatique pour Francisco Goya avec se série de 33 gravures, La Tauromaquia, qu’il termina à
Bordeaux, sourd et quasi aveugle. De même pour « Le petit Goya », comme appelait Picasso, les critiques de
son époque, le taureau l’inspira, avec le singe peintre pour une variation plus décontracté du métier. Aux
XVIIIème et XIXème siècles, Jean-Baptiste Siméon Chardin ou Alexandre Gabriel Decamps firent brillamment la
démonstration de cette distance qu’il savait prendre aussi.
DGM : Oui, et aujourd’hui beaucoup de philosophes se sont emparés de ce sujet animalier, dont Florence
Burgat…
FB : En psychologie cognitive aussi avec Dominique Lestel… Et puis, on remarque encore un intérêt croissant sur
les grottes rupestres et leurs représentations animalières. Pensons à « La grande salle des taureaux » à Lascaux.
DGM : Il existe un livre curieux sur les recherches d’un archéologue, Marc Azéma, « Préhistoire de la bande
dessinée et du dessin animé ». Il fait une lecture de l’art pariétal, donc essentiellement animalier, à l’instar du
dessin animé, du cinéma, avec des plans et des histoires, des superpositions, des évocations de mouvements,
des écrans multiples…
FB : Le grand mystère de l’art pariétal, c’est la qualité plastique de cet art quand l’humanité balbutiait. Que ce
soit la grotte de Blombos en Afrique du Sud datée de 75.000 ans avant J.C., ou celles plus récentes en France
de Chauvet, de Niaux ou de Lascaux, le rendu esthétique et l’adresse plastique de ces premiers artistes,
hommes femmes ou pourquoi pas enfants, on ne sait, sont époustouflants. Le relief des parois est utilisé ainsi
que des « pierres de rêve » chinoises, pierres zoomorphes, voire « pierres à images » dont la peinture et les
traits font chanter les volumes. La problématique du regard, l’association des motifs, la scène multiple, et des
scènes s’exprimant d’un point de vue précis, représentent autant de propositions que l’on retrouve dans ton
art. En même temps, avec les chasseurs-cueilleurs, se pose la question de cette nécessité d’agir, de se
dépenser dans un acte délibéré, quand à priori survivre était essentiel. Alors, dans ces conditions, dans quel but
8
peindre ? Pour quelles causes et quelles fonctions ? Pour exprimer ou se soulager de quoi ? Pour s’adresser à
qui ? Pour créer quels liens avec la nature ou le groupe ? Les ethnologues commencent à s’interroger sur les
origines de la conscience humaine à partir de cette disposition à se représenter son monde, un monde sombre
et irrationnel, aux vertus magiques et peuplé d’animaux. Tout cela pose aussi interrogation sur la différence et
la différenciation réelle entre l’homme et l’animal, entre ce qui les lie, les rejoint et les sépare. Plus les
recherches avancent, plus des réponses sont données, plus les questions sont à reposer, que ce soit sur l’origine
de la conscience humaine, le sens de la pensée irrationnelle, le sacré d’un monde souterrain ou les croyances
d’une cosmogonie à étages. C’est ce qui fait peut-être que cette thématique s’affirme dans l’art actuel, hors
de sa caverne duchampienne. Mais le thème du taureau invite aussi à d’autres réflexions.
DGM : En fait, ce thème s’est imposé à moi très simplement. C’est ensuite que je me suis posée des questions.
Dans un champ fermé, l’animal que je pouvais représenter entre nature et culture, c’était le taureau de
combat. Dans le champ, le « campo », il est l’animal inapprivoisé par excellence, le fauve, l’animal vierge de
tout contact humain. Dans l’arène, il se retrouve en situation inversée : on va le tester, le dominer, il va danser
avec le torero… Il y a finalement cette inversion, l’homme prend le dessus sur la nature sauvage dans l’espace
domestique qu’il a choisi, et un territoire qu’il a délimité. C’est sur ces contradictions que j’ai joué, dans un
espace fermé dans lequel l’animal se trouve dominé, contraint. C’est là que l’homme accorde à l’animal de la
bravoure, de la beauté, de la force. Dans un espace illimité, territoire inconnu, c’est-à-dire la nature en
général, l’animal n’a rien à prouver : le taureau est libre dans sa puissance entière. C’étaient ces critères
intervertis, ces repères inversifs qui m’intéressaient.
FB : Dans cette hypothèse, l’espace détermine la force animale. L’espace restreint agirait tel un ressort, une
force qui se tendrait dans une réalité augmentée. Il renvoie par l’espace clos, face au torero, non plus un
animal, mais une pure bête de combat. Souvent en effet, les animaux, tels que tu les représentes dans tes
installations, se confrontent à un environnement, ils buttent sur les limites d’un espace. Quand tu utilises le
cinéma d’animation, voire en sculpture un animal naturalisé, la bête vient violemment se heurter à une
surface, mur de lumière projetée, vitrine de verre, fil barbelé, obstacle cloisonné de pierre ou de ciment. Et
puis cette indication réversible dont tu parles, celle de la perception animale, une perception qui n’a rien à
voir avec la nôtre, et que tu viens surajouter à la nôtre, ce qui fait toute l’originalité de ton approche sensible
du sujet.
DGM : En effet, j’ai pris beaucoup de plaisir à être dans ce champ, dans l’espace, dans ce territoire.
Finalement, j’ai fait comme l’animal, et j’ai agi comme un homme, j’ai délimité mon territoire, mon territoire
d’action plastique, et dans celui-ci j’ai imaginé une histoire, une création artistique. En fait chaque fois que je
vois un lieu, ou que je suis invitée à exposer dans celui-ci, je délimite en priorité un territoire. […]
[…]
FB : Le cinéma d’animation, en ce qui te concerne, est un dessin vivant noir sur blanc, et que tu incorpores
dans tes environnements dans des dispositifs simples et efficaces. Tu affectionnes le trait du dessin, un trait
stylisé, anguleux et hachuré, et tu l’exploites dans sa technique dans un défilement ponctué en trois temps.
Dans « La rôtisserie de la reine Pédauque », ces films visionnent des oiseaux libres en vol, puis les volatiles
buttent brutalement sur un mur invisible, et chutent inexorablement sur le sol, le tout dans une répétition sans
fin. L’ensemble forme une chorégraphie cyclique et captivante : scandant vol et chute, mouvement et fixité,
dans un temps synchronisé à une succession graphique. Pour moi, ces dessins ne sont pas sans rapport avec une
série de sculptures réalisée plus tardivement, figurant des oiseaux morts, et réalisés à l’Ecole Supérieure d’Art
et de Céramique de Tarbes où tu enseignes. Celles-ci suggèrent des fantômes réifiés, des volatiles gelés dans
leurs corps disloqués. La matière de porcelaine dont ils sont faits est délicate, fine et si fragile. Elles font
penser à des dessins extraits du film qui se seraient solidifiés en volume de concrétion. Alors entre la terre
cuite et le sujet cruel, entre le dessin figé et le cinéma d’animation, entre l’animal mort et l’humain vivant,
que cherches-tu à exprimer ?
DGM : Notre conception habituelle de la vie donne l’impression d’être dans des mondes parallèles. Peut-être
que l’on vit dans deux bulles mentales à la fois : une bulle de l’homme et une bulle de l’animal. On vit côte à
côte, sans se connaître, avec des incompréhensions de communication et de langage. La seule possibilité que
nous trouvons pour appréhender l’animal, et l’emmener dans notre bulle, c’est de le tuer pour se le rendre
disponible, et satisfaire ainsi notre envie profonde de l’incorporer. C’est une des méthodes dont l’homme
dispose pour posséder, une position certes étrange. Mais c’est sa manière de prendre l’animal, de l’emmener
dans sa sphère individuelle, c’est une logique que je développe dans la totalité de son cycle implacable, et qui
inclut l’utilisation totale de ses organes, et même ses rejets. Si je le tue, je le mange, je décortique sa chair,
j’utilise son sang, je prends sa peau, ses poils, ses plumes, son bec. Tout son corps va me servir, tout entrera
dans ma sphère, tout en lui rejoindra mon monde, et ceci d’une manière ritualisée, avec une application
artistique matérielle, conceptuelle, gestuelle, gustative, olfactive, émotionnelle. Oui je le conçois, c’est une
démarche cruelle. Cruelle, et sans culpabilité moderne ! C’est une façon « ogresse » de voir le monde, et en
même temps c’est une plongée dans un autre mental, plus animal.
9
FB : C’est une dimension quasi animiste qui va au-delà du besoin nutritif, une appropriation de la force
animale, avec quelque chose de spirituel en arrière. Contrairement à Martin Heidegger, tu ne sembles pas
considérer que l’œil du taureau est vide. Tu évoques la force respectueuse qui en émane, et en arrière le
langage de la chair, une matière à saisir et à se dessaisir.
DGM : C’est exact, et c‘est encore une fois tout le cycle qui m’intéresse. Il en est ainsi de la sculpture du
« Chevreuil qui vomit sa forêt ». L’action, le besoin de vomir, la digestion même entre dans mon travail. Manger,
absorber toute la matière, suppose la nécessité de sa déjection par quelques voies que ce soit.
FB : C’est aussi une forme à la fois d’acceptation et de répulsion de l’acceptation d’une animalité en soi, voire
par extension la conscience d’un en-soi dans un mécanisme organique et chimique. C’est la pensée humaine qui
s’exerce par le ventre et par la chair.
DGM : Probablement, et c’est en vivant avec ces contradictions que l’on se connaît et que l’on se voit bien.
Cette conscience nécessite de l’honnêteté, celle de s’accepter tel qu’on est effectivement, et tel que l’autre
l’est également. Or, sous les prétentions, les désirs, les aspirations, les ambitions, il demeure cette évidence, la
part animale qui se retrouve dans des besoins naturels et culturels, est il ne faut pas oublier, la part culturelle
de l’animalité !
FB : L’homme est un animal sociable disait Montesquieu. Ton travail célèbre la disposition animale de l’humain,
une disposition qui s’exerce avec une certaine forme crue, comme ces somptueux oiseaux, grandes ailes
ouvertes, traversés par le cul et par le bec. Pourtant, tes vernissages retournent le propos dans le rituel d’une
rhétorique festive, comme pour célébrer cette essence animale tout en relevant une dimension complice par le
vernissage.
DGM : Une exposition se crée, se prépare, se montre. Elle s’ouvre au public à une date et heure précises. Des
gens se déplacent, parfois de loin, ils viennent uniquement pour l’exposition. Alors c’est naturel que je sois là
pour les accueillir : « Nous vous attendions, vous êtes là, entrez, regardez, prenez un verre ». Pourtant, on
n’est pas entre amis, on est dans un dispositif qui crée un fort lien social, on est dans un réservoir humain qui
ressent et qui réagit. C’est donc pour moi un moment qui comporte une certaine violence, c’est le temps de la
rupture avec la pièce que je viens de faire, et des personnes que j’ai impliquées dans ce projet. La coupure est
donc brutale, et je me relâche de la tension que tout le processus de travail a généré, même si je me relâche
avec une certaine tristesse. Cette violence dont je parle peut se ressentir dans le public, autant par ce rituel
que par l’exposition elle-même. Elle renvoie aux spectateurs une image, des impressions, des émotions fortes
et contradictoires. Mais pour moi s’il ne s’agit pas d’une performance, ce n’est pas non plus un acte gratuit, je
ne le conçois pas ainsi du moins, même si des invités pourront être choqués de ce qu’ils vivent. Par exemple, en
effet, avec « La rôtisserie de la reine Pédauque », des oies embrochées suspendues au plafond tournent sur
elles-mêmes, tandis que les convives se retrouvent avec d’autres visiteurs comme des oiseaux qui se bousculent
autour d’une mangeoire. Tous se délectent pourtant de ces bonnes rillettes d’oie qui tournent juste au-dessus
de leurs têtes !
FB : Que veux-tu prouver dans ce décalage de joie et de cruauté ?
DGM : Qu’il y a dans le cruel aussi quelque chose de généreux, ce sont ces petites choses dans la vie que l’on ne
voit pas, et qui sont là, mises à nu.
FB : Dans cette logique alors, la mort serait le point le plus extrême de la générosité.
DGM : C’est en tous les cas une autre approche de la mort. Celle qui viendra et celle que l’on est capable de
donner.
FB : Dans une installation présentée à la galerie Métropolis à Paris en 2009, « j’aime les nuages… Là-bas, les
merveilleux nuages », tu utilisais des barbelés.
DGM : Des nuages de barbelés, oui.
FB : C’est à nouveau une allégorie à double tranchant : d’un côté la beauté immatérielle du nuage, le gazeux,
le volubile, l’immatérialité, la forme mouvante, le ciel, l’impalpable, et en même temps la frontière, l’interdit,
le blessant, la meurtrissure, l’espace à ne pas enfreindre.
DGM : Parce qu’on ne sait pas si les oiseaux peuvent ou non atterrir, descendre sur terre, ou décoller. Ils tentent
de voler… et l’animal se retrouve prisonnier dans un espace.
10
FB : C’est une forme de rapport à la liberté, le mythe d’Icare, le désir de l’homme de s’envoler, de se dépasser,
de franchir ses limites, de s’élever de sa condition, et à la fois le danger de l’entreprendre.
DGM : Ou le ridicule qu’il y a à le faire. […]
[…]
FB : Tes projets demandent aussi de faire appel à des compétences.
DGM : Il y a évidemment beaucoup de compétences que je n’ai pas, la taxidermie, certains mécanismes ou
l’utilisation de moteurs particuliers appellent des gens du métier. Je vais chercher les personnes qui ont ces
compétences et avec qui le travail se fera dans le dialogue. En fait, je travaille souvent avec les mêmes
personnes, ainsi se construisent des liens forts et de confiance.
FB : Pourtant, il y a des moments où tu te retrouves isolée avec ta feuille de papier.
DGM : Certes, et c’est encore l’essentiel de ma vie professionnelle. Quand j’ai une image mentale (si je parle
de vision, cela va être très vite référencé, mais c’est un peu cela) les choses se passent comme je les ai
décrites tout à l’heure. Je viens voir un lieu, j’ai plus ou moins mon monde, un bagage à moi et je fais jouer
mes impressions, et de là apparaît dans ma boîte en os une image, une vision qui est déjà bien en place… Tout
le problème est de faire sortir cette image dans la réalité, cette image fantasmée.
FB : Tu veux dire que tu as une prescience de ce qui va se passer ?
DGM : Oui et tout le travail est là, dans cette partie la plus intéressante du passage de rêve, d’image rêvée à la
matière physique réelle. C’est là qu’il faut être le moins paresseux !
FB : Et c’est là où tu devras t’investir…
DGM : En effet, comment faire pour que les oies tiennent en l’air ? Pourquoi leurs fermer les yeux ? Etc. Etc.
Cela va du petit détail (qui n’en est pas un) à la chose la plus technique : comment faire tourner un axe de 11
mètres pendant 3 mois avec une oie embrochée dessus ? Comment accrocher, comme en lévitation des
fenêtres, comment faire une installation vidéo dans une grotte humide ? Il y a l’approche intellectuelle bien
sûr, et aussi la conception, et le rendu d’ordre plastique aussi… Tout cela est étroitement lié, tout cela
fabrique l’image. Et puis il y a cette part qui m’échappe… Par exemple dans « La rôtissoire de la reine
Pédauque », je savais qu’il y aurait des ombres, des reflets de vidéo sur les vitres, mais je ne peux pas
l’anticiper pleinement. C’est au moment du montage que surgit tout cela, c’est aussi ce qui rend ce temps fort
et entier. J’attends beaucoup à ce moment-là et les « choses » émergent alors, peu à peu.
FB : Une véritable sorcière qui apprend à tenir son balai…
DGM : Ou une sorcière qui se passe de balai de la balayette et du balai-brosse !
FB : Arrive-t-il que tu ne ressentes rien d’un lieu où il te faut intervenir ?
DGM : Cela peut arriver, mais mon expérience acquise me permet de trouver d’autres chemins pour parvenir à
la création de cette image mentale. Mon parcours artistique a beaucoup favorisé ces rencontres avec des lieux
étranges et forts… Des caves, des tours, des greniers, des grottes, des champs… Ces expériences et exercices
dans des lieux complexes et chargés ont éveillé, chez moi, beaucoup d’enthousiasme, de désirs et de capacité
de travail.
FB : Lorsque tu es arrivée au musée de l'Abbaye Sainte-Croix des Sables d’Olonne, autrement dit « le paradis »
après le Creux de l’Enfer, environnement de plage, bord de mer, lumière chaude, et il faut rappeler cette
grande charpente avec un grenier remarquable, ces constructions qui n’étaient pas faites pour être vues mais
dont la beauté toujours étonne.
DGM : C’est d’ailleurs le point de départ du projet : le grenier qui se juxtapose aux grandes étendues des
plages… Qui « appellent » au vide… Vide paradoxal, chargé d’angoisse et d’apaisement… L’image qui m’est
immédiatement venue est celle du bateau renversé et du naufrage.
FB : Je crois savoir d’ailleurs que c’étaient les mêmes artisans qui faisaient les coques de bateaux et les
charpentes d’architecture, d’où des structures similaires.
DGM : Ce qui a déclenché en moi une image mentale ! C’est en effet le point de départ d’un travail qui n’est
pas encore finalisé, mais qui apparaît dans cet entretien, comme justement le point initial. On aura ce moment
11
presque magique dont tu parles à la construction de ma pensée dans ce projet, tel qu’il va se faire au musée
des Sables d’Olonne. Je travaille à la manière d’un sculpteur devant son bloc de matière, par retrait, par
soustraction mentale. J’ai au départ une image simple et précise. Plus je réactive cette représentation
psychique, plus elle devient complexe et difficile. Il me faut alors agir dans l’autre sens pour revenir à ma
vision initiale, et il me faut aussi retirer certaines choses, être vigilante à la forme en prenant garde par
exemple de ne pas tomber dans un maniérisme. Un véritable jeu de ping-pong mental entre ce que je veux, ce
que je vois, ce que je suis capable de faire, tel ce jeu dans ce dialogue entre nous. […]
12
Texte de Emmanuel Latreille, Le rêve de la femme du pêcheur
in catalogue mémoires minuscules. Delphine Gigoux-Martin,
éditions Liénart, février 2011
And past the sailor’s home.
James Joyce, Ulysses
Appelons-moi Pénélope mais c’était plutôt un marin comme marin pêcheur forme proche semble proche le mot
dans la langue étrangère à moins qu’effet d’une ignorance d’un oubli d’une condensation plus ou moins
volontaire qui sait où commence et s’arrête le sens dans cette vieille idée stoïque des degrés ou plutôt de
l’absence de degrés de la réalité soit une porte est ouverte ou fermée soit on est pêcheur ou on ne l’est pas
juste marin cela voudrait dire qu’il y a eu ceusse qui rament ou tirent les cordes drisses et veillent au grain et
ceusse qui fricottent avec la plantaille aquatique c’est à quoi j’tic parce qu’entre les zunzélézautres il ne
faudrait pas mélanger les torchons avec les serviettes et qu’ainsi soit-il je ne verrais pas comment mon gars
pourrait faire une chose sans l’autre idem la popote et pas la plonge ou juste les courses attends attends je lui
dis quand je le vois prêt à déguerpir en loucédé à la fin des agapes y’a encore à béqueter je dis et alors il se
tape gentiment de ranger son assiette en grès hé ho on n’est plus au temps des gréco-romaines où bobones fait
tout parce que là d’un coup tout le monde est okay pour cesser de mettre des limites oublier les distinguos
savants et tu peux les chercher un moment les rois de l’analyse des tâches ménagères toute leur vie à ranger
des œuvres d’art ils disent les catégories ne sont plus ce qu’elles étaient hélas le bon vieux temps des concepts
alors quoi marin ou pêcheur c’est comme tomber de Charybde en Scylla si on veut en tout cas moi je veux c’est
très bien les torchons il en faut pour éponger les poulpes et les serviettes pour les lèvres ceci dit c’est quoi les
lèvres on dit lèvres pour notre chose à nous et aussi on dit crevette ou moule donc c’est bien ce que je pense le
marin est dans le pêcheur et vice et versa et toutencamion le sale air de la peur ah oui vas-y sisi tu me secoues
trop j’vais essploser je vais mouuuurir continue roule moi bien je me dissous je me disperse en tous sens plus de
cadre de barrière de point à la ligne oh c’est sûr j’aimais tellement ça s’il pouvait encore me faire le truc
poulpe lèvres moule beau gros violet gober le violet c’est le meilleur dans le bouche le fond de l’océan envahit
les papilles les asperge le sel coule dans la gorge formid’ extra c’est extra en redemande encore un et un et un
et un et un hein tout pêcheur qu’il est se fatigue avant moi faut être honnête c’est pas celle qu’on croit qui
bosse le plus dans l’affaire mais qui aussi pour les poulpes ensuite silence radio comme toujours et poulpe et
poulpe et poulpe chacun dans son petit œuf un œuf tout neuf sarcophage on dirait bien sûr la même chose le
début et la fin sont des bornes infranchissables dix ratons comme de ce rien d’où émerge ma tricaillerie ce joli
blanc formés de ces bords et marges limites trompeuse des aiguilles croisées au point d’ouverture fermeture
aussitôt d’un coup de mes doigts agiles attention que je ne l’allonge pas de trop ou bien tu vois ma fille ton
Martin avec un pull jusqu’aux chaussettes il pourra toujours en faire une muleta si ça lui chante il attrape des
ciseaux et tchac bien au milieu comme un coup de corne bien net dans le flan du gamin aïe des fous ces garçons
ou taper un œuf sur le bord d’une poêle sans trembler alors on garde un peu le jaune intact par pour longtemps
à partir de là tout bouge tout change tout roule tout tangue la cuisine de poisson c’est le pire le poulpe y
faudrait le garder comme chez le poissonnier un poulpe c’est une sculpture naturelle un bijou bisou genou j’en
ferais bien des petites porcelaines si j’avais la technique et sans technique l’art n’est rien qu’une sale manie un
vice ha ha un vice l’art mon œil m’a dit l’autre jour mon petit poulain avec son air pédant polisson tu connais
l’italien hein porcellana petite cochonne hé oui incroyable c’est le chose de la truie et voilà on y revient et ni
moi ni personne n’y peut rien si le coquillage qu’on broie pour changer sa nacre en porcelaine fait penser au
sexe des truies donc on fait une pâte qu’y m’a dit mon poulain toute douce et fraîche et après les poulpes tu les
trempes dans la substance liquide et une fois séchés tu les mets à cuire à plus de mille quatre cents degrés
chouffe chouffe il m’a dit j’ai rien dit quand il était mais en moi fichtre une double analogie ce coquillage
l’anal logis sous la petite cochonne at homerde tiens voilà du boudin mon poulain il trotte plus qu’il ne galope
en tout cas pas les deux en même temps ne jamais s’emballer le vrai savoir c’est de garder le rythme alors
pense ce que tu veux ma jolie mais n’accélère pas tu n’es pas aux pièces un deux trois quatre à trois cents et tu
poses ton fuseau tranquille sur l’océan tu sors de la capsule et tu fais coucou les gars me revoilà j’avais pas
l’intention de vous manquer plus faites pas cette gueule de faux-derche la cuisson m’a carrément dissoute pfuit
je suis un fantôme d’ailleurs je ne me fais au cû n’illusion sur l’emploi du temps de la belle Hélène quand je
tricote y ‘en a qui tripotent etri etra ezri ezra et quand on va sur la lune mieux vaut pas regarder ce qui se
passe sur terre qui m’a soufflé que personne n’a jamais été sur la belle rousse toute vierge encore la charmante
propagande amerloque pour mater les bolchos qui m’a dit qu’on voit gros comme une maison le câble télé en
plein dans l’image bien grossière la blague un très bon coup de com de came montre moi qui tu es je te dirai je
ne te crois pas penche-toi pour me voir là lève la tête non par ici lève la allez arrête j’ai pas le temps aïe aïe
mais lâche-moi tu me fais mal idiote t’es pas folle j’ai une crampe et tu dois terminer maintenant tu n’as plus
le droit de con ti nu ton crédit é puisé té arrivé chrrri chriii tut tut chriiii j’t’tut tut ai dit pas tut plus de chriii
quatremillesepcentquarente signes.
13
Visuels pour la presse
1
2
4
3
5
6
8
7
9
10
11
14
Légendes des visuels
1 et
2
De la fin du vol, 2008 (détail)
Installation vidéo
Dessins au fusain et pigeons en porcelaine
3
Sans titre, 2011
Installation vidéo
Dessin animé, moteur électrique et rames
4 et
5
Le rêve de la femme du pêcheur, 2008
Dessins au fusain
6 et
7
Le rêve de la femme du pêcheur, 2008
Vitrines en acier, verre, néons et poulpes en porcelaine
8
Féroces infirmes, 2010
Installation vidéo
Dessin animé et souris blanches naturalisées
9 et
10
La mégère apprivoisée, 2011
Installation vidéo
Dessin au fusain, moteur électrique et perruche naturalisée
11
La vague de l’océan, 2011
Dessin au fusain et renards naturalisés
15
Informations pratiques
Musée de l’Abbaye Sainte-Croix – Rue de Verdun – 85100 Les Sables d’Olonne
Tél. 02 51 32 01 16 – [email protected]
www.lemasc.fr
Conservatrice du patrimoine, musée de l'Abbaye Sainte-Croix
Gaëlle Rageot-Deshayes
Contact presse
Michelle Massuyeau : [email protected]
Un catalogue de l’exposition « mémoires minuscules. Delphine Gigoux-Martin » sera publié aux éditions
Liénart.
100 pages
Prix public : 25 €
Parution prévue fin février 2011.
Horaires de 14 h 30 à 17 h 30
Fermé les lundis et jours fériés
Visites guidées
Les samedi 19 février, samedi 19 et dimanche 20 mars, samedi 16 avril à 15 heures, samedi 14 mai à
19 heures et 21heures
Performance dansée sur une chorégraphie de Sidi Graoui
« Nous ne sommes pas des bêtes … bien que nous soyons des animaux »
Le samedi 19 mars à 17 heures
Entrée libre
Conférence organisée en partenariat avec l’association des Amis du MASC
Le jeudi 24 février 2011 à 18 h 30, Delphine Gigoux-Martin viendra parler de son travail.
Entrée libre
Animations spécifiques
Stéphanie Kervella, service des publics : 02 51 32 21 75
Le service éducatif met en place des animations en concertation avec les enseignants ou les responsables
de structures pour enfants.
La documentation, riche de 20.000 ouvrages, est à votre disposition sur rendez-vous.
Tarifs
Normal : 5,10 €
Réduit : 2,55 €
Gratuité le 1er dimanche de chaque mois pour tous, pour les jeunes de moins de 18 ans, les demandeurs
d’emploi, les bénéficiaires des minima sociaux.
16
Eléments biographiques
Delphine Gigoux-Martin est née en 1972
Elle vit et travaille à Durtol
2001
• Transhumance en Haute-Loire, Champagnac-leVieux et La Haye, échange franco-néerlandais
• Les enfants de Bonfils n° 2, Ventabren Art
Contemporain
• 9 bis hors les murs, Clermont-Ferrand, Les mars de
l’art contemporain
• She’s lost control, Saint-Etienne, galerie 9 bis
(création d’un livre d’artiste, textes d’Emmanuelle
Pireyre)
2002
• La copal, Chagny (exposition personnelle)
• Contre-plongée, Clermont-Ferrand
• La clef de voûte, Château de Lamothe, exposition
franco-néerlandaise
• La nature de l’art, Saint-Nectaire
• Les impromptus, Brest, Centre d’art contemporain
La Passerelle
• Galerie Gastaud underground, Clermont-Ferrand,
Les mars de l’art contemporain
• Salon de la jeune création, Paris, Parc de la
Villette
• Annecy, école des Beaux-Arts, workshop
• Lions à la vue perçante et chiens aveugles,
Grenoble, La Nouvelle Galerie (exposition
personnelle)
• Lapins zeppelins, Bordeaux, galerie Decimus
Magnus
• Art, Jean-François Dumont (exposition personnelle)
• Performance avec le collectif ODMA, ClermontFerrand (vidéoformes)
2006
• Nancy, Intervention à l’école des Beaux-Arts
(conférence et atelier)
• Absolumental, Toulouse, Centre d’art les Abattoirs
• Les dessous chics, Clermont-Ferrand, workshop
franco-allemand-turc et suisse
• Chauffe Marcel : le sourire de Mona, Château de
Jau, FRAC Languedoc-Roussillon
• J’avais accoutumé…, Taurines, Château (exposition
personnelle)
• Performance avec le collectif ODMA, Madrid
(Espagne), Centre Culturel français
• Voyage en Andalousie (Espagne) (vidéos sur les
taureaux)
• Festival XXI vidéoformes, Clermont-Ferrand
2007
• La rôtisserie de la reine Pédauque, Thiers, Centre
2003
• 1 Lieu, 1 jour, Riom, Les Abattoirs
• Performance avec le collectif Perséphone,
Clermont-Ferrand, Festival Musiques démesurées
• Workshop Tator, échange franco-allemand avec
l’école des Beaux-Arts de Kiel (Allemagne)
2004
• Festival Arborescence, Aix-en-Provence, Ecole
supérieure d’art
• Production d’une vidéo, Hanovre, Medienhaus
(Allemagne)
• Performance avec le collectif Perséphone,
Clermont-Ferrand, Festival Musiques démesurées
• Sylv’art, Theix
• La clef, Saint-Germain en Laye (exposition
personnelle)
• Darkroom, Hanovre (Allemagne), workshop, Kunst
in Kontact
• Primakunst, Kiel (Allemagne) (exposition
personnelle)
• La Nouvelle Galerie, Grenoble
2005
• Looping, Clermont-Ferrand, FRAC Auvergne
• Diary hotel, Izmir (Turquie), workshop
• Voyage en Norvège, Iles Lofoten (vidéos sur les
orques)
• Rendez-vous 2005, Lyon, galerie des Terreaux
• Faire rêver les chevaux, Vichy, Centre Culturel
Valéry Larbaud
• Nature, Milhaud, galerie Esca
• Au bord du paysages, Farges
• + si affinité, Paris, FIAC
d’art contemporain Le Creux de l’Enfer
• J’aime les nuages, là-bas…, Paris, galerie
Métropolis
• Merveilleux, Manderen, Château de Malbrouk,
Luxembourg 2007
• Œuvres 2007 / 2009, Lyon, galerie Métropolis
• Enseignante à l’Ecole supérieure d’art et
céramique de Tarbes
2008
• Lorient, Ecole des Beaux-Arts (exposition
personnelle)
• Scénographie pour le danseur Sidi Graoui,
compagnie Airfood
• De la fin du vol, Paris, galerie Métropolis
(exposition personnelle)
• De Markten, Bruxelles
• Dreamland, Domaine de Chamarande
• Weisse Nachte, Kiel (Allemagne), Bunker
• Rencontre d’un roi et d’un empereur en île
sonnante, Aigues-Mortes, dans le cadre de « La
Dégelée Rabelais »
• Du dessin à l’animation du dessein, Paris, Centre
Culturel Wallonie-Bruxelles
• Ici Même, Clermont-Ferrand, In extenso
2009
• Les yeux bien ouverts, Paris, galerie Métropolis
(exposition personnelle)
• Féroces infirmes, Nîmes, galerie Artelinéa
(exposition personnelle)
• Dreamtime, le temps du rêve, Toulouse, Les
Abattoirs et grotte du Mas d’Azil
17
• Ce que j’aimais…, Montélimar, Château des
Adhémar (exposition personnelle)
2010
• De telles choses sont-elles possibles ?, Liège,
Centre d’art Les Brasseurs (exposition personnelle)
• Du danger…, Saint-Gaudens, Chapelle SaintJacques (exposition personnelle)
• Wilderness, Casanova, Vallon-le-Villaret, FRAC
Languedoc-Roussillon (exposition personnelle)
• J’ai vu, Tarbes, galerie associative Omnibus
(exposition personnelle)
• En mai fait ce qu’il te plait, Nîmes, PPCM
• Morceaux choisis, Grenoble, Centre d’art Bastille
(exposition personnelle)
• Jeunes pousses, Montpellier, FRAC LanguedocRoussillon
• Dreamtime, Toulouse, Les Abattoirs (acquisitions)
2011
• Commande du CNAP pour l’édition d’une
lithographie (atelier Woolworth)
• Les Sables d’Olonne, musée de l'Abbaye SainteCroix (exposition personnelle)
• Salses, forteresse, CMN, juin (exposition
personnelle)
• Paris, La Conciergerie, CMN, octobre (exposition
personnelle)
Prix / Bourses / Achats FRAC
• Le rêve de la femme du pêcheur, FRAC Languedoc-
Roussillon (achat)
Bibliographie
2000
• Morceaux choisis, catalogue d’exposition
• Un, Deux… Quatre, arts et cultures, n° 195, mars
• Art Actuel, n° 7, mars / avril
• Art Actuel, n° 10, septembre / octobre
2001
• Un, Deux… Quatre, arts et cultures, n° 201,
février / mars
• Les enfants des Bonfils n° 2, catalogue
d’exposition, Ventabren Art Contemporain,
printemps
2002
• Fanfare, n° 14, avril
• Au bord du paysage, catalogue d’exposition,
juillet (texte de Marie-Odile Andrade)
• Un, Deux… Quatre, arts et cultures, n° 207,
septembre
2004
• JOUHANEL (Cécile).- Un, Deux… Quatre, arts et
cultures, n° 212, septembre
• La voix du regard, revue littéraire sur les arts de
l’image, novembre
• BASS-FABIANI (Sophie).- Delphine Gigoux-Martin,
2000
• DRAC Auvergne, Bourse d’aide individuelle à la
création
2001
• Strasbourg, Bibliothèque Centrale (achat)
2003
• Luxembourg, Bibliothèque Nationale (achat)
• DRAC Auvergne, Bourse d’aide à l’atelier et au
matériel
catalogue d’exposition
2005
• ARNAUDET (Didier).- Art Press, avril
• + si affinité, catalogue d’exposition
• PONS (Gilbert).- Turbulences vidéo
2006
• ARNAUDEAU (Audrey).- Multiprise, juin
• Chauffe Marcel, catalogue d’exposition, Château
de Jau, FRAC Languedoc-Roussillon, juin
• BOUGLE (Frédéric).- Vous êtes ici, catalogue
2004
• Vichy, Salon de la Jeune Création H20, Prix du
Jury
d’exposition, novembre
• PIQUE (Pascal) et DUMONT (Jean-François).-
J’avais accoutumé…, catalogue d’exposition,
Château de Taurines
2005
• On ne mange pas toujours ce qui est sur la table,
2007
FRAC Auvergne (achat)
• DRAC Auvergne, Bourse d’aide individuelle à la
création
• Clermont Communauté, Bourse d’aide à la création
• DEBIZE (Christian).- Merveilleux, d’après nature,
septembre
• Cimaise.
2006
• Don’t believe in Christmas, Toulouse, Les Abattoirs
(achat)
2008
• Ici même, éditions In extenso, février
• ROUSSEL (Frédérique).- Rabelais, menu copieux,
Libération, 25 juin
2009
• Voyage autour de mon crâne II, Toulouse, Les
Abattoirs (achat)
2009
• Rabelais, catalogue d’exposition, FRAC LanguedocRoussillon.
18
Œuvres exposées
1.
De la fin du vol, 2008
Dessin au fusain et pigeons en porcelaine
2.
Le rêve de la femme du pêcheur, 2008
Vitrines en acier, verre, néons et poulpes en porcelaine
3.
Ce fut une épopée de géants, 2008
Installation vidéo
Dessins animés
4.
Féroces infirmes, 2010
Installation vidéo
Dessin animé, vitres et souris blanches naturalisées
5.
Cosmos, 2010
Dessin au fusain et mouches séchées
6.
Un décor approprié, 2010
Installation vidéo
Dessin animé et champignons en porcelaine
7.
Sans titre, 2011
Installation vidéo
Dessin animé, moteur électrique et rames
8.
La vague de l’océan, 2011
Dessin au fusain et renards naturalisés
9.
La mégère apprivoisée, 2011
Dessin au fusain, moteur électrique et perruche naturalisée
19
20