Article de Henry Plée censuré par “ Karaté Bushido ”
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Article de Henry Plée censuré par “ Karaté Bushido ”
Article de Henry Plée censuré par “ Karaté Bushido ” Et ce, malgré les précisions ( ci-dessous en italique ) de l’auteur, adressées au rédacteur en chef du magazine, P.Lombardo. 12.000 caractères seulement POUR REPRODUIRE LA “TOUR DE BABEL” Sois gentil, ne supprime plus jamais rien, je peux assumer. Il est très désagréable... que l’on me juge incapable de savoir ce que je dois dire, et j’ai le sentiment de dire ce qu’il faut quand il faut. Si tu le veux, fais un petit encadré pour dégager la responsabilité de la Revue. Garde Bordas et mon stage d’été s’il te plaît. “TIENS, VOILA DU BIDON, NOM DE NOM !“... A PROPOS DES PROPOS DU MAITRE HATSUMI JUGEANT L’ENSEIGNEMENT DU BUDO La Revue KARATE-Bushido a publié dans son numéro de Mars 99, une interview du Maître Masaaki HATSU MI, sous-titrée “LES ARTS MARTIAUX SONT-ILS BIDONS ? ” et, le Rédacteur en Chef “Adjoint” Patrick Lombardo m’a demandé d’exprimer mon point de vue dans une Chronique... ce qui m’a inspiré un titre “à la légionnaire”. On ne va pas pleurer, quand même ! Encore que... 1 Il me faut, en effet, au minimum une Chronique pour émettre mon opinion sur un sujet aussi délicat, dans un monde où prime le “touche pas à mon Budo”. Aussi vais-je m’efforcer d’être clair à “propos des propos” du Maître Hatsumi critiquant, non pas les Budo, mais l’enseignement et insistant sur le fait que lorsque l’on enseigne un Art de Guerre... l’essentiel est d’apprendre à ne pas se faire tuer. A moins d’être en période de déprime suicidaire, je me demande bien quel “Budoka” peut ne pas être d’accord avec cette évidence. Et ne pas approuver, lorsqu’il est dit que “un style figé met des vies en jeu”. Que “un Art Martial ne peut s’enseigner comme une autre matière”. Que “sorties du contexte de l’entraînement sportif et éducatif du Dojo... beaucoup de techniques enseignées sont inapplicables en combat réel” et qu’alors “ce qu’un Professeur enseigne sur le tatami ou sur le parquet peut même devenir dangereux pour ses élèves en dehors du Dojo”. Que “ne privilégier que la puissance musculaire ou la rapidité de mouvement est un passe-temps intéressant, un défouloir, pour jeunes sportif”, mais que “avec le temps, en prenant de l’âge, ce sportif perdra son efficacité et arrêtera alors que l’on doit pouvoir pratiquer l’Art Martial jusqu’à la fin de sa vie, parce que l’Art Martial c’est la vie”. Que la vie c’est “être naturel dans ses comportements, fluide, sans rigidité ni dans le corps ni dans l’esprit, et rester néanmoins stable et solide”. Que “ce qui compte le plus, ce n’est pas seulement de développer les points forts, mais surtout de faire attention à nos points faibles. Parce que ce sont eux qui nous feront tuer”. ... Vous voyez une “polémique” dans ces pensées de grands Maîtres? Moi pas. Mon successeur de fils non plus. C’est du pur bon sens. Non? Certains critiquent la Revue KARATE-Bushido parce qu’elle parle aussi des sports de combat “affinitaires” avec contact. Mais saviez-vous que c’est la seule en Europe (et probablement au monde) qui laisse la parole à des Maîtres qui ne sont pas “politiquement corrects” en Budo?. L’interview de Maître Hatsumi avait été présentée à toutes les revues “bien pensantes”, qui refusèrent de la publier. Seule la Revue KARATE-Bushido accepta. Chapeau bas... même si, faute de place, environ le 1/5ème seulement de ce que j’avais lu il y a six mois a été publié 2 Je dois vous dire, aussi, que bien que n’étant pas Ninja je connais les grands Maîtres de Ninjutsu actuels, dont le Maître Hatsumi (15è DAN Ninpo), et son élève français Bernard Bordas (lOè Dan Ninpo). Ce dernier a eu le courage d’abréger son séjour au Japon pour participer à mon Stage de juillet 98, en Bretagne. Ce stage était une préparation au Stage que je donnerai du 11 au 16 juillet 99 et qui sera à la fois le dernier de ma carrière martiale (ce qui ne veut pas dire que je cesserai d’aider) et le dernier du deuxième millénaire. Les enseignements oraux et les débats auront lieu l’après-midi, mais le matin je ferai pratiquer ce qui avait été caché en Budo, sur le sable ferme d’une grande plage à marée basse. Sans les contraintes du Dojo et quasiment dans l’ambiance du champ de bataille... mais sans ses inconvénients, je pourrai (entre autres) faire pratiquer d’une façon dynamique et martiale, les techniques doubles (pratiquement imparables) et les vitalités (qui rendent presque intouchable). Attendu que la polémique soulevée par le Maître Hatsumi risque de dévier, j’ai demandé à mon ami Lombardo de publier, ci-joint, la “Tour de Babel” dessinée pour illustrer les enseignements Okuden de ce Stage d’été 99, parce que je veux que l’on comprenne clairement ce que veut dire le Maître Hatsumi. Jusqu’à présent, l’allégorie de la “Tour de Babel” était restée quasi secrète. En ce qui me concerne, le Kakuto-Bujutsu et le Budo étant devenus deux mondes parallèles, avec des valeurs différentes, j’avais estimé pendant un peu plus de vingt ans qu’il ne serait pas bon de dire ici... la vérité, avant qu’un nombre suffisant de lecteurs soit en mesure de la comprendre. D’ailleurs je n’écrivais mes Chroniques que dans le but d’entretenir “le feu sous le chaudron” (11è Kyokun de Maître Funakoshi). Le moment est venu. Il est fort probable que ceux qui écriront leurs “réactions” n’auront pas connu ni le Maître Hatsumi ni Bernard Bordas, et qu’ils commettront la même erreur que celle que je commis durant l’été 98, en ce qui concerne Bernard Bordas. Ce que ce dernier m’écrivait était intéressant et lucide, cependant j’avais quelque part le préjugé habituel que l’on a envers les “Ninjas” occidentaux... généralement plus ou moins farfelus. J’appréciais son “Savoir”. Mais, puisqu’il était haut gradé en Ninpo et qu’il me faisait l’honneur de venir humblement participer à mon stage, j’étais intéressé de voir son “Faire”. Lorsque les stagiaires appliquèrent ce que je leur révélais (à propos, s’entraîner avec d’autres styles fut une révélation pour de nombreux stagiaires), j’ai regardé Bordas du coin de l’oeil et sa “ forme de corps ” m’a paru trop “yin”, trop “fluide” pour ma conception “virile” de l’Art Martial. Puis, de jour en jour, j’ai constaté... et ses adversaires également, que ce n’était pas de la fluidité “Yin” mais un “naturel” dynamique typique en Ninjutsu. Le naturel dont parle le Maître Hatsumi. Comme vous le voyez, pour faire ce constat, non seulement il faut “vider sa tasse”, mais on ne peut juger la différence par simple lecture ou en quelques minutes d’observation. Sinon, 3 bourré de certitudes, on ne réalise pas l’importance du “naturel” en question dans le combat de survie. Un “naturel” que, paradoxe, il faut redécouvrir et que l’on ne peut pas acquérir seul. D’ailleurs, comme TOUT est dit, partout, le Maître Funakoshi le dit dans son 17è Kyokun du Kakuto-Karaté-Jutsu “Prendre la garde est utile pour le débutant, mais plus tard tout doit partir de la posture naturelle Vous vous demandez peut être, ce “plus tard” c’est quand? “. Jetez un coup d’oeil à la “Tour de Babel”. Ce “plus tard” se situe dans le dernier tiers du premier niveau. Celui que n’enseignent jamais les Budo. Comment voulez-vous qu’il n’y ait pas incompréhension ? C’est comme si les études scolaires s’arrêtaient au Primaire, et que l’on cache qu’il existe, aussi, les études du Secondaire et les études Universitaires. Parce qu’ils stagnent au 2è tiers du premier niveau, et parce que les DAN ne concernent que ce “deux tiers”, les Budokas “gradés” ont habituellement une opinion erronée du KakutoBujutsu. C’est bien normal. Il en est de même au Japon. Avant de se passionner pour le Ninjutsu, le Maître Hatsumi, comme c’est le cas pour la totalité des autres Maîtres de Ninpo, sans exception, avait pratiqué dans sa jeunesse le Judo, le Karaté, le Jiu-Jitsu et le Kendo jusqu’à un niveau élevé (entre 4è et 6è Dan selon la discipline). Cette connaissance encyclopédiquement Budo, si j’ose dire, est extrêmement rare au Pays du Soleil Levant (on n’y fait allusion, avec un drapeau spécial à rayons, qu’en cas de guerre) où la spécialisation est très estimée. En règle générale, au Japon, où 1 à 2 % seulement des jeunes s’intéressent aux Budo (deux fois moins qu’en Occident, un comble !), on ne pratique sérieusement qu’un seul Budo, rarement deux... parce que, esprit “secte” oblige, c’est toujours très mal vu et que l’on est alors effroyablement brimé dans les deux Dojos. C’est pourquoi la quasi totalité des Maîtres de Karaté japonais venus en Occident, ont souvent des notions scolaires en Judo et en Kendo, mais ne connaissent que le “Gendai-Budo” (“Gendai” = actuel, moderne). Puisque le Maître Hatsumi y fait allusion, sans s’y arrêter, je pense utile de préciser, dans un encadré, l’évolution.., descendante des Bu-Jutsu et des Budo. Encadré Les “Arts Martiaux” se sont succédés (ou dégradés), au cours des siècles et des années, de la façon suivante et sous les appellations suivantes 4 - - - - - SHO-BU-JUTSU (sho = authentique, de 1.000 à 1500 env.): KO-BU-JUTSU (ko = traditionnel, de 1600 à 1800 env.) SHIN-BU-JUTSU et SHIN-BU-DO (shin = “moderne”, de 1870 à 1945 env.) GENDAI-BUDO (gendai = actuel, 1945 aux catégories de poids de 1965) UNDO-BUDO (undo = sportif, depuis les catégories de poids...). Le KAKUTO-BU-JUTSU (Kakuto = réel, à mort) a existé de tous temps, mais uniquement dans certains milieux fermés après la période féodale japonaise (et fermés surtout aux Occidentaux... depuis la Capitulation de 1945). La différence est plutôt une question d’état d’esprit que de technique. Mais il ne fait aucun doute que le manque de “moments de vérité” permettant la sophistication et l’état d’esprit de moins en moins martial et de plus en plus sportif influa sur les techniques, ne serait-ce qu’en faisant interdire les techniques qui, trop efficaces, risquaient de provoquer des accidents... regrettables surtout pour la diffusion des Budo-sportifs en Occident. - - - - En critiquant les “Budo” le Maître Hatsumi critiquait surtout les “hauts gradés” du Budo. Car je sais qu’il reconnaît l’intérêt des Budo en tant que premières marches (...“Dan” en japonais) pour l’escalade vers le sommet, vers la réalité objective et l’Éveil. Encore faut-il se décider à gravir les autres marches. Il n’est pas donné à tout le monde d’avoir le talent de se remettre en question humblement. Les Budo, c’est absolument sûr, ont leur intérêt. Sans les Budo vous n’auriez pas lu les propos du Maître Hatsumi... ni ma Chronique. Et ce dernier, n’étant pas d’une famille Ninja (aucun Maître héritier d’une famille de Ninpo n’enseigne à des Occidentaux), il n’aurait probablement pas été intéressé par le Ninjutsu s’il n’avait été déjà avancé dans plusieurs Budo, et en final il n’aurait pas été accepté par le Maître Toshitsugu Takamatsu (qui, lui, était de famille Ninja plusieurs fois centenaire). N’empêche que ce que dit le, Maître Hatsumi... est exact. A mes yeux il n’y a pas de polémique. Comparer les Kakuto-Bujutsu et les Budo est aussi 5 déraisonnable que de comparer... la trompette avec le violon ou les cymbales, sous prétexte que tous trois font “de la musique”. Mais, pour être et faire ce que dit le Maître Hatsumi, il faut un talent spécial et une volonté hors du commun. N’est pas vrai guerrier qui veut. Les films, les cassettes de Ultimate Fightings et de Vale Tudo, les Championnats peuvent fausser votre compréhension de ce qu’est le KakutoBujutsu. En combat réel de survie (le tiers manquant du premier niveau et le second niveau), il n’est plus question d’un “shiai” arbitré, conventionnel, où l’on dispose de 5 minutes pour “gagner” et où, si l’on perd, on aura d’autres “chances”. En combat de survie on ne dispose pas de quelques minutes, pas même de quelques secondes, c’est encore trop long. C’est dans l’instant que tout se joue : pile (je t’élimine) ou face (je suis tué). Et, satané ego ou sacré subconscient, on oublie systématiquement que nos ennemis potentiels peuvent être aussi expérimentés que nous, voire plus... et nombreux. ... Il ne sert à rien de réagir comme la petite grenouille du Kohan Zen, née au fond du puits où étaient tombés, il y a très longtemps, ses ancêtres. Elle n’avait jamais rien vu d’autre que l’eau et les murs de son puits... et niait, àune autre petite grenouille qui venait juste de tomber dans le puits, qu’un autre monde puisse exister “en haut”. Ce n’est pas parce que vous allez les nier que les niveaux supérieurs du vrai combat de survie n’existent pas. Et en combat réel dans la Nature, ce sont rarement les plus malins qui disparaissent les premiers... si vous voyez ce que je veux dire. Les agressions se font de moins en moins “à la loyale”. LA PENSÉE DU MOIS La chance est comme un cheval au galop... il faut savoir sauter dessus lorsqu’elle passe. Mencius 6