Tatouage et piercing
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Tatouage et piercing
BULLETIN D'INFORMATION N°08/2006 Août 2006 Tatouages et piercings ne sont pas seulement un phénomène de mode mais plutôt un phénomène culturel. Sensuels ou élégants pour les uns, provocateurs pour les autres… les motivations de chacun et chacune sont aussi multiples que l’endroit où l’on peut se faire percer la peau ou dessiner un motif artistique ou autre. Le mot tatouage vient du tahitien « tataus » qui signifie marquer ou dessiner. Le mot fut par la suite francisé et devint « tatouage ». Historiquement, le fait de se faire tatouer est aussi vieux que l’humanité. Il est très difficile de situer avec précision le début de cette pratique. Le fait de tatouer est une pratique attestée depuis la préhistoire. En effet, l’homme des glaces « Ötzi » découvert gelé et momifié le 19-09-1991 suite à la fonte importante du glacier dans le massif alpin de Otz (Dolomites italiennes) est mort vers 3.500 avant J-C. Il arbore des tatouages à fonction thérapeutiques (petits traits parallèles le long des lombaires et des jambes). Avant cette découverte, une momie égyptienne datant de 2.000 avant J-C constituait la trace la plus ancienne de tatouages à motifs décoratifs et à but plutôt sacré et religieux. Les européens ont redécouvert le tatouage lors des explorations dans le Pacifique sud (Polynésie, Iles Marquises, Nouvelle-Zélande, Japon…) avec le capitaine James Cook dans les années 1770 et les marins en particulier étaient identifiés avec ces marques dans la culture européenne jusqu’après la seconde guerre mondiale. Partout où le tatouage s’est manifesté, il a contribué à marginaliser ses adeptes d’une certaine façon : il servait à distinguer les classes sociales, à marquer le passage d’un état à un autre, à identifier les esclaves ou les criminels, à symboliser une forme de virilité chez l’homme, à, malheureusement, identifier de force les victimes des tortionnaires nazis dans les camps de concentration (ka-tzetnik)… Après un passage du côté des truands et des marginaux et par la suite, du côté des milieux ouvriers, le retour du tatouage à large échelle en Occident s’est fait dans les années 60 et 70. D’abord chez les motards avec les Hell’s Angels puis, par le mouvement hippie, les punks l’ont ensuite complété avec le piercing, et enfin presque tout le monde s’y est mis joyeusement. Aujourd’hui, le tatouage est une affirmation d’individualité mêlée à une petite goutte de tribalisme, de rêve… Le piercing ou body-piercing est un terme anglo-saxon ne possédant pas d’équivalent français, il signifie littéralement perçage (piercing) corporel (body). Le piercing, abréviation plus couramment utilisée, est l’opération qui consiste à percer l’épiderme, les muqueuses, les tissus sous-jacents ou les cartilages, en vue d’y placer un objet ornemental. Différents endroits sont susceptibles d’accueillir un piercing : visage, seins, nombril, organes génitaux…). L’origine du piercing est également très ancienne, la technique se pratique sur l’ensemble du globe depuis des milliers d’années sous forme de rites socioculturels ou religieux comme en témoignent les dernières tribus primitives subsistant en Amérique du Sud, Océanie ou Afrique. Le tatouage et le piercing sont les nouveaux « bijoux » de notre société. Ce sont des manières d’embellir, de modifier notre corps comme il y a des manières de se coiffer ou d’avoir des boucles d’oreilles (aspect esthétique), d’érotiser le corps dans certains cas (pratiques sexuelles, masochisme), de marquer son appartenance à un groupe particulier, de se différencier (opposition aux parents, à la société, affirmation de soi, de s’exprimer et de se construire…), de pratiquer un certain rite (passage pour certains adolescents à l’âge adulte)… Certains milieux artistiques (chanteurs, comédiens…) et sportifs (football, tennis…) ont permis de diffuser davantage cette forme de culture. Les jeunes générations masculines et féminines ont fait du tatouage et du piercing l’emblème de leur classe d’âge. Si le tatouage et le piercing sont un art, ils sont aussi un acte quasi-médical qui n’est pas sans risque et qui par conséquent doivent être pratiqués selon certains critères concernant les conditions d’exercice sur le plan professionnel, certaines règles d’hygiène, certaines normes matérielles, certaines normes relatives aux locaux et au mobilier… En Belgique, un Arrêté Royal du 25-11-05 (MB du 21-12-05) réglemente les techniques de tatouage et de piercing. Le tatouage implique une effraction cutanée consistant à injecter de manière intradermique des produits colorants afin de créer sur la peau une marque permanente et/ou durable, un dessin permanent et/ou durable. Ce procédé s’effectue à l’aide d’aiguilles et constitue une porte d’entrée potentielle pour les agents infectieux, au moment de la réalisation du geste (une infection peut se développer à cause des micro-organismes microbiens présents plus ou moins habituellement à la surface de la peau) mais également durant la période de cicatrisation qui suit. Sur ce dernier point, la personne tatouée suivra les soins indiqués par le tatoueur. Le piercing consiste à placer de manière définitive ou non un objet en matière métallique ou autre au travers par exemple de la peau… Le tatouage et le piercing effectué dans de mauvaises conditions comportent des risques pour la santé. On relèvera notamment les risques suivants : - des infections bactériennes : des infections de la peau ou du cartilage (par exemple par le staphylococcus aureus), le tétanos… des infections virales : les hépatites, l’herpès, le sida… Les données scientifiques disponibles sur le sujet sont très rares et le risque de transmission est mal évalué pour le VHB (hépatite B), le VHC (hépatite C), encore moins pour le VIH (sida). La possibilité d’une contamination par le VHB et le VHC est tout de même solidement établie. La possibilité de transmission du VIH semble très peu probable (fragilité du virus à l’air libre). Des infections dues à d’autres micro-organismes peuvent plus rarement survenir comme les virus herpès ou le papillomavirus (responsable des verrues). - des réactions allergiques notamment contre des ingrédients présents dans les encres, les colorants et les objets insérés. des cicatrisations pathologiques (cicatrices chéloïdes) sont également possibles chez des personnes prédisposées. Le tatoueur s’expose lui aussi à un risque lors de blessures accidentelles avec un instrument piquant ou tranchant. C’est d’ailleurs pourquoi le port de gants stériles et la vaccination contre l’hépatite B est recommandée pour les tatoueurs. Certains problèmes médicaux contre-indiquent la pratique du tatouage (prévention des infections, impossibilité de tatouer, cicatrisation difficile…). Le tatouage et le piercing sont déconseillés, et même proscrit, aux personnes atteintes de certaines affections médicales. Dans ces cas spécifiques, une visite chez le médecin traitant est fortement conseillées voire obligatoire. Il s’agit notamment des personnes souffrant : - d’hémophilie ou qui prennent des médicaments pouvant interférer avec la coagulation du sang et la formation d’un caillot. d’une diminution du système immunitaire ou d’infections à répétition. d’affection cutanée, cardiaque, d’allergie, d’épilepsie, de diabète… Le tatouage est également déconseillé aux femmes enceintes, qui présentent des différences de poids pouvant avoir des conséquences sur l’aspect du motif (peau distendue notamment). Par ailleurs, leur état fragilise leur organisme pour une séance et pour une bonne cicatrisation. Mieux vaut garder son énergie pour le bébé ! Les tatouages et les piercings ne peuvent bien évidemment pas être effectués sur des personnes qui sont sous l’influence de l’alcool, de drogues, de médicaments qui perturbent leur capacité de décision. Le professionnel doit s’assurer du fait que le client souhaitant se faire tatouer ou désirant la mise en place d’un piercing est en état moral, notamment en ce qui concerne la maturité, et physique de subir l’acte et le cas échéant, ne pas accomplir l’acte. Un temps de réflexion doit être accordé avec la possibilité de revenir ultérieurement pour effectuer le tatouage ou le piercing. On pourra par exemple, dissuader les adolescents, dont la croissance n’est pas achevée, de se faire tatouer. A noter que la plupart des professionnels exigent une autorisation parentale, voire la présence de l’un des parents, pour tatouer un mineur. Certains refusent de tatouer les personnes mineures. Préalablement à la séance de tatouage ou de piercing, un document établi en double, doit être signé. Un exemplaire est remis au client et atteste qu’il marque son consentement. Cet écrit doit mentionner de manière claire les risques liés au tatouage et/ou piercing, les cas dans lesquels une visite préalable chez le médecin est demandée, les soins nécessaires à apporter pendant la cicatrisation, les précautions particulières, les contreindications et les complications. L’écrit mentionne également le type d’acte, la date, la marque et le numéro de lot des produits utilisés. Concernant les dons de sang, une contre-indication temporaire de 4 mois est appliquée après la réalisation d’un tatouage ou d’un piercing. Tout passage de la barrière cutanée par des aiguilles ou par des objets tranchants représente un risque de transmission de virus ou de bactéries, ce risque est d’autant plus important que les instruments utilisés servent pour plusieurs personnes. Si l’on n’est pas absolument certain des conditions de stérilisation des aiguilles et des instruments utilisés, on peut considérer qu’il s’agit d’une situation à risque élevé de contracter un virus tel que le virus de l’hépatite C. Pour pouvoir détecter le virus, il faut que celui-ci une fois passé dans l’organisme, ait fabriqué des anticorps détectables par les tests. Actuellement, nous ne savons déterminer avec certitude que quatre mois après l’exposition au virus, s’il y a eu transmission : le test est alors positif. Wowo 08-2006