Immigrés, ils enrichissent notre région
Transcription
Immigrés, ils enrichissent notre région
patrimoines en région Revue d’éducation aux patrimoines en Languedoc-Roussillon N°18 Dossier Immigrés, ils enrichissent notre région PATRIMOINES EN RéGION / Revue d’éducation aux patrimoines en Languedoc-Roussillon / GRATUIT / N° 18 : HIVER 2012-2013 www.bernardduplanbdb.fr . Bureau d’études . Menuiserie N°18 - Hiver 2012-2013 - ISSN 1952-3025 - Dépôt légal à parution ÉDITEUR : Le Passe Muraille association - Homme et Patrimoine 510 A, avenue de Barcelone « Le Jupiter » 34080 Montpellier Tél. : 04 67 06 96 04 - Fax : 04 67 52 78 44 E-mail : [email protected] - www.lepassemuraille.org Comité de direction : Philippe Quentin, Pierre Plancheron Conseil scientifique et éducatif : Yann Abonneau, Martine Ambert, Benjamin Assié, Patricia Beaudouin, Jean-Pierre Besombes-Vailhé, Fred Chauvet, Nathalie Colin, Luc David, Véronique Delattre, Véronique Ferhmin, Philippe Hammel, François Icher, Christian Jacquelin, Vincent Larbey, Elisabeth Le Bris, Régine Mazauric, Denys Michel, Jean-Michel Phéline (†), Pierre Plancheron, Philippe Quentin, Claude Raynaud, Federico Russo, Sabine Sutour, Nelly Viala Directeur de la publication : Pierre Plancheron Rédacteur en chef : René Lechon Secrétaire de rédaction : Julie Savy Ont également participé à ce numéro : Michèle Bouis, Catherine Barrière, Nicolas Bricas, Chantal Delmas, René Domergue, Suzana Dukic, Solange de Fréminville, Michael Iancu, Jean-Jacques Jordi, Elisabeth Le Bris, Khadra Ouadoud, Pierre Plancheron Remerciements : Vincent Albert et les Boukakes, Les Archives départementales de l’Hérault (médiation culturelle), Abdou Bayou et le collège les Escholiers de la Mosson, Christian Bernadac et l’association Port-Vendres Paquebots, Chantal Ciglia et l’APAJ – centre gitan de Montpellier, Tifenn Hamonic et l’association Génériques, Geneviève Moralès et la Mairie de Mauguio Carnon, Fabienne Muddu et la Cité nationale de l’histoire de l’immigration, Florian Pascual et la Maison des Sciences de l’Homme de Montpellier, la SAIF, Étienne Schwarcz et La Chapelle Gély Iconographie : Charlotte Ducrot, René Lechon, Julie Savy Maquette - Suivi de fabrication : Charlotte Ducrot Photo de couverture : La Romeria © Mairie de Mauguio Carnon Abonnements et diffusion : Mathilde Grimal Publicité : Culture.Com Impression : LPJ Hippocampe, Montpellier Contact rédaction : [email protected] Contact annonceurs : [email protected] des Contact abonnements : [email protected] Languedoc - Roussillon Photos : tous droits réservés. La reproduction totale ou partielle des articles et illustrations de Patrimoines en région est interdite (sauf accord de la rédaction). Carrefour Patrimoines . Ferronerie Carrefour des Patrimoines . Ensembles mécaniques et automatisés Rencontres pour une éducation à la citoyenneté La revue Patrimoines en région est éditée dans le cadre du Carrefour des Patrimoines. Ce réseau compte plus de 350 structures et acteurs en Languedoc-Roussillon impliqués dans l’éducation et la sensibilisation aux patrimoines culturel, naturel et bâti. Au-delà de cette initiation au territoire, ce projet commun implique une réelle éducation à la citoyenneté. Le Carrefour des Patrimoines est aujourd’hui porté par : Homme et Patrimoine BDB Chemin de l’ancienne gare 34660 Cournonterral Tél. : 06 74 63 16 35 - Fax : 04 67 79 76 61 E-mail : [email protected] Le Passe Muraille 510 A, avenue de Barcelone « Le Jupiter » 34080 Montpellier Tél. : 04 67 06 96 04 - Fax : 04 67 52 78 44 E-mail : [email protected] www.lepassemuraille.org CEMEA Languedoc-Roussillon 501 rue Métairie de Saysset 34070 Montpellier Tél. : 04 67 04 35 60 E-mail : [email protected] www.cemealr.org édito En couverture : Dans les années 1920, des immigrants espagnols, originaires de la région de Murcia, fuient leur pays et s’installent définitivement à Mauguio, dans l’Hérault. Cette communauté marquera de son empreinte l’identité du village. La Romeria del Encuentro, littéralement « Le pèlerinage de la rencontre », début juin, est une fête typiquement andalouse. Elle permet aux Espagnols installés à Mauguio de renouer avec leurs racines culturelles, et à tous les habitants de mieux connaître ces traditions. © Mairie de Mauguio Carnon Immigration, patrimoine et vivre-ensemble L ’association Le Passe Muraille, qui porte la revue Patrimoines en région, fête cette année ses quinze ans. Et la concordance entre cet anniversaire et le sujet de ce dossier consacré aux enrichissements migratoires ne nous laisse pas indifférents… En effet, notre installation sur un quartier associé à l’immigration, avec ses composantes dans le temps, pieds-noirs, populations du Maghreb, familles gitanes, africaines ou du Sud-Est asiatique nous place quotidiennement en observateurs privilégiés de cette diversité. Le quartier de la Paillade, à Montpellier, peut s’enorgueillir de faire vivre ensemble plus de quarante nationalités ! Les immigrés habitants de ce quartier ne font pas partie des plus fortunés de nos concitoyens, mais ils contribuent pourtant à enrichir notre région économiquement, culturellement, démographiquement… Loin des lieux communs qui abaissent la qualité du débat politique à l’approche de chaque élection, nous abordons le thème de l’immigration avec l’aide des sciences humaines et sans tabous. Et si nous prenons le temps d’y réfléchir sous l’angle patrimonial, nous sommes assez vite convaincus que l’immigration rime avec enrichissement de notre territoire. Espérons que ce dossier fera aussi méditer ceux qui en douteraient encore. Le patrimoine est un vecteur privilégié d’éducation à la citoyenneté. C’est notre devise ! L’histoire de l’immigration en est une magnifique illustration et peut servir de support au monde de l’éducation. Le niveau d’expertise des contributeurs de ce numéro, associations, universitaires, chercheurs, écrivains, est à la hauteur des enjeux d’un sujet qui rassemble ceux qui défendent le « vivre-ensemble » comme une valeur fondamentale de notre république. À l’approche de notre vingtième numéro, je voudrais enfin rappeler la place réelle prise désormais par la revue Patrimoines en région dans le paysage médiatique et intellectuel de la région. En ce sens, vos soutiens et vos réactions nombreuses sont précieuses et nous encouragent. Agenda.............................................................. 4 Dossier.............................................................. 6 Immigrés, ils enrichissent notre région Cogito................................................................ 19 Xénophobie, aujourd’hui et hier par Solange de Fréminville L’œil de l’artiste - Lozère................................... 20 Sophie Palisson, peintre Architecture et urbanisme................................. 22 L’avenir des terres agricoles Zoom - Aude...................................................... 24 L’association Péniche Carabosse Mon métier........................................................ 27 Lissier Lire, regarder & écouter..................................... 28 Commandez nos anciens numéros ...................... 29 Vie du Carrefour des Patrimoines, Courrier des lecteurs......................................... 30 Pierre Plancheron Directeur de la publication Retrouvez Patrimoines en région sur : www.carrefour-des-patrimoines.net PEFC / 10-31-1319 Imprimé sur papier issu de forêts gérées durablement. PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 3 Agenda La presse locale ancienne sauvegardée Languedoc-Roussillon livre et lecture a remis en septembre à la Région les disques durs contenant plus de 600 000 pages de 70 titres de la presse ancienne régionale et locale. Ces documents constituent des témoignages uniques sur la vie de la région entre 1804 et 1940. Pour faciliter la consultation et la diffusion de ce patrimoine, la Région a lancé un programme de numérisation avec la Bibliothèque nationale de France. Languedoc-Roussillon livre et lecture coordonne cette initiative qui concerne dix établissements patrimoniaux de la région. Les données seront bientôt disponibles sur le portail culturel de la Région LanguedocRoussillon. Une grande exposition numérique verra le jour en 2013/2014 pour valoriser ces fonds auprès des publics. Ce projet mettra en exergue une sélection d’articles des 70 titres de presse ancienne numérisés. Le thème des transports a été retenu comme le symbole du développement des territoires à travers les âges. Des liens avec des établissements patrimoniaux, bibliothèques et archives, associations, partenaires privés et aussi avec le monde de l’éducation nationale seront développés. Sur Internet Tais-toi et mange catalan ! Qu’est-ce que le rancio sec, comment est élevée la chèvre catalane, quelle est la recette de la rousquille ? Des réponses apportées par le travail d’actualisation de quinze produits et recettes réalisé par les élèves de terminale Bac pro Services en milieu rural du LPA Claude Simon de Rivesaltes, dans les Pyrénées-Orientales. Ce projet, complété d’une série photographique, a pour objectif de faire découvrir le patrimoine culinaire et alimentaire oublié du LanguedocRoussillon. Il est soutenu par le ministère en charge de l’agriculture dans le cadre du programme national pour !taistoietmange l’alimentation. http://taistoietmangecatalan.tumblr.com Le bassin de Thau en images Le concours photo ExploraThau, initié par le Syndicat mixte du bassin de Thau, a rencontré un vif succès auprès du public, rassemblant plus de 1200 photos prises par les habi- 4 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 tants qui racontent « leur » lagune de Thau. Les clichés sont visibles en ligne, classés par thématique : « Nature insolite », « Nature exotique », « Nature poétique » et « Plus jamais à Thau ! ». http://concours-explorathausmbt.fr Tout sur l’art contemporain Une plateforme d’actualité et d’information consacrée à l’art contemporain en Languedoc-Roussillon vient de voir le jour sur Internet ! La DRAC et de la Région Languedoc-Roussillon ont confié la mise en place de cet outil de promotion de l’art et des artistes au FRAC Languedoc-Roussillon. Mais que trouve t-on exactement en ligne ? Tout d’abord un annuaire et un agenda qui répertorient l’ensemble des lieux dédiés à l’art contemporain (galeries, écoles, institutions, lieux privés…) et les événements. Mais aussi des actualités pour les professionnels, des parutions, et un répertoire des artistes en LanguedocRoussillon. www.artcontemporainlanguedocroussillon.fr Éducation à l’environnement L’association Demain la Terre ! a créé un site dédié à l’éducation à l’environnement et au développement durable (EEDD) en Cœur d’Hérault. Ce site participatif gratuit et accessible à tous permet de présenter des lieux à découvrir, des personnes ressources ou des actualités. Un espace « projets » est à la disposition des enseignants et animateurs qui souhaitent valoriser leurs projets d’EEDD. www.eedd.fr La biodiversité dans mon jardin L’association Noé vient de lancer la plateforme web « Jardins de Noé » qui invite tous les jardiniers amateurs et professionnels (collectivités, entreprises) à préserver la biodiversité de proximité en adoptant des pratiques simples et respectueuses de l’environnement. Dix gestes constituent la Charte des Jardins de Noé pour guider les jardiniers : favoriser les plantes locales, faire son compost, réduire la consommation d’eau, éviter les pesticides, etc. Chacun peut également présenter son jardin en ligne et partager ses expériences et savoirs avec les autres jardiniers. www.jardinsdenoe.org Au cœur de la restauration d’une église La ville de Baillargues lance sur son site internet une mini-série de reportages sur les secrets de chantier de l’église St-Julien. Depuis plusieurs mois, la municipalité a entrepris la restauration de l’intérieur de l’église se trouvant au centre du village. De nombreux artisans passionnés œuvrent pour rendre tout son caractère et son authenticité à ce monument incontournable du patrimoine. Cette nouvelle mini-série invite le public à découvrir l’envers du décor. Trois épisodes sont déjà en ligne. Dans le premier, Hubert Fabritius, Adjoint délégué à l’urbanisme, aux transports et à la gestion du patrimoine, présente le projet de restauration. Le second est dédié au travail du restaurateur/peintre-déco14/11/12 12:22 rateur M. Paillard-Boyer qui évoque son métier d’artisan et les particularités de l’église Saint-Julien. Enfin le dernier épisode, tourné à l’occasion des Journées européennes du Patrimoine, met en scène M. Berhault, Architecte en charge de la restauration de l’église. À venir, un quatrième épisode consacré au métier de tailleur de pierre. Découvrez les vidéos sur www.demain-baillargues.fr (rubrique Patrimoine et Culture) Conférences Débats & Les Cafés patrimoine & architectures À Montpellier au Café Riche Tout au long de l’année, l’association Patrimoine & Architectures organise des rencontres conviviales autour du paysage, de l’urbanisme et du patrimoine. En ce début d’année, vous pourrez ainsi échanger avec Corinne Castel-Norgette le 23 janvier autour du thème « Aux premiers temps de l’urbanisme », Phillipe Coignet, paysagiste, le 6 février « D’un extrême à l’autre » et Patrick Bouchain, architecte, le 20 mars « Le domaine des possibles ». Gratuit. Contact : 04 67 69 37 27 ou 06 87 85 62 48 www.patrimoine-architectures.com Événements culturels Une expo qui décoiffe Du 13 décembre au 13 avril à Béziers (34) Le Musée du Biterrois, musée d’histoire, d’archéologie et d’ethnologie de Béziers, présente l’exposition « Ça décoiffe au musée ! coiffes a découpé la mémoire de l’abbaye en plusieurs strates dont les tags et les fouilles archéologiques sont les signes les plus visibles. Son exposition Fugue en sol mineur est le fil conducteur de la programmation pluridisciplinaire « Aniane In Motus : l’histoire en mouvement » qui compte également des lectures, projections cinématographiques, représentations théâtrales, concerts et rencontres. Gratuit, sur réservation. Contact : Office de Tourisme Intercommunal, 04 67 57 58 83 Des estampes méconnues d’expos Jusqu’au 19 janvier à Carcassonne (11) Les fonds du musée des beaux-arts de Carcassonne révèlent une collection d’estampes méconnue du public. En effet, ces œuvres sur papier sont rarement montrées en raison de leur fragilité. L’exposition « L’estampe dans les collections du musée » est l’occasion de découvrir des pièces de graveurs de premier plan. Pour prolonger votre découverte, participez aux conférences qui accompagnent l’exposition : « Jacob Jordaens et l’antique (1593-1678) » le mercredi 16 janvier à 14h30 avec Marie-Paule Botte ; « Les animaux à travers l’art » le lundi 4 février à 15h avec Chantal Caillard. Gratuit. Contact : 04 68 77 73 70 www.carcassonne.org Une appropriation de la nature Jusqu’au 24 février au MRAC de Sérignan (34) Exposition de Guillaume Leblon. Conversation avec l’artiste et le critique d’art François Piron le 15 février à 15h. Tarifs : 5€/3€/gratuit Le PNC expose Exposition Vivre en Uzège il y a 4000 ans Vive les maths ! Jusqu’au 20 décembre à Montpellier L’Université Montpellier 2 organise la venue de l’exposition « Pourquoi les Mathématiques ? » pour sensibiliser le grand public à l’importance des mathématiques et mettre en évidence leur implication dans tous les domaines de la vie. Cette installation conçue et réalisée par le Centre des Sciences d’Orléans à l’initiative de l’Unesco tourne dans le monde entier depuis 2004. Elle est exceptionnellement visible à Montpellier à la Bibliothèque Universitaire de l’Université Montpellier 2 (campus Triolet). Très interactive, l’exposition s’adresse aussi bien au grand public qu’aux élèves de tous niveaux : école primaire, collège, lycée, université. Gratuit. Tous les renseignements sur www.math.univ-montp2.fr/plm Jusqu’au 30 décembre à Uzès (30) Depuis une vingtaine d’années, des fouilles menées dans la région d’Uzès ont permis de trouver la trace des habitants d’il y a 4000 ans. Comment vivaient-ils au quotidien ? Et quelles étaient les caractéristiques de leur culture, dite de Fontbouïsse (2800 à 2400 av. J.-C.) ? Faisant un clin d’œil aux magazines d’architecture et de décoration, cette exposition mettra en vedette une « maison-témoin » préhistorique fouillée par l’association Archéa à La Capelle et Masmolène, avec les nombreuses céramiques qui en proviennent, dont un étonnant fourneau. Tarifs : 3€/1,5€/gratuit pour les scolaires. Visites guidées sur réservation. Contact : Musée Georges Borias, 04 66 22 40 23 http://uzesmusee.blogspot.com Aniane In Motus : l’histoire en mouvement Jusqu’au 23 décembre à Aniane (34) Le photographe Philippe Bertin explore la notion d’enfermement mais aussi d’évasion et d’ouverture dans le site de l’Abbaye d’Aniane. L’artiste © Musée Georges Borias, Uzès Jusqu’au 31 janvier à Florac (48) Le Parc national des Cévennes vous convie au château de Florac pour découvrir une exposition de quarantehuit clichés réalisés par dix agents photographes du Parc. Faune, flore, paysages… redécouvrez ce patrimoine exceptionnel en images. Gratuit. Contact : Maison du Parc, 04 66 49 53 00 www.cevennes-parcnational.fr Guillaume Leblon, Chrysocale # 3, 2005. Zineb Guérout, vingt ans de peinture, 1992-2012 Jusqu’au 30 décembre à l’Espace Riquet, Béziers (34) Tarifs : 3,10€/2,10€ © JP Malafosse © Philippe Bertin Le « Maître de Llupia » © François Doury. Collection privée. et couvre-chefs » réunissant une collection de coiffes de femmes de la région, du XVIIIe siècle à la mi-XXe, ainsi que le fonds d’atelier (formes, feutre et chapeaux) de M. Malart, dernier chapelier de Béziers. Loin d’être de simples vêtements, les coiffes de femmes et les chapeaux d’hommes tenaient à la fois de la parure et du symbole d’une appartenance sociale, devenant des éléments identitaires majeurs liés au costume régional. Un catalogue viendra compléter l’exposition. Gratuit. Vernissage le 17 janvier 2013 à 19h. Contact : Musée du Biterrois, 04 67 36 81 61 Jusqu’au 2 février à Perpignan (66) La Chapelle Notre-Dame des Anges à Perpignan accueille l’exposition « Le Maître de LLupia », un peintre en Roussillon au début du XVIe siècle, évoqué dans notre n°17. Lors d’une mission de conservation sur le retable baroque du maître autel de l’église paroissiale Saint-Thomas de Llupia en 1998, on découvre cinq panneaux datant du début du XVIe siècle. Attribués à un nouveau peintre, le Maître de Llupia, ils représentent, pour partie, les rares scènes peintes connues au monde de la légende de Saint Thomas. En parallèle de l’exposition, un cycle de conférences est en cours jusqu’au 26 janvier. Gratuit. Contact : 04 68 51 77 10 Plus d’informations sur www.cg66.fr Questions d’images (visages de sable) Jusqu’au 31 décembre au Carré d’art – Musée d’art contemporain de Nîmes (30) Expo photo programmée dans le cadre des 30 ans du FRAC Languedoc-Roussillon. Gratuit. Fiorenza Menini, Empire (2011) Plus d’événements sur www.carrefour-des-patrimoines.net PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 5 Immigrés, ils enrichissent notre région U n titre étonnant, direz-vous, au regard des relents racistes, xénophobes et antisémites du moment. Oui, nous avons voulu mettre en valeur ces Italiens, ces Espagnols ou ces Marocains, pieds-noirs, juifs ou même nordiques, on le sait moins, qui, au fil des siècles, ont élu, par choix ou forcés, le Languedoc-Roussillon. Dans un souci de cohérence avec nos objectifs, dans cette revue et dans l’association qui la porte, Le Passe Muraille, nous avons délibérément souhaité retenir cet « angle ». En pensant aux enseignants et à leurs élèves, aux éducateurs de façon générale, et à un public plus large, ouvert à l’altérité et aux richesses d’autres peuples (leurs langues, leurs chansons, leurs habitudes alimentaires, leur histoire), qui sont venus enrichir cette région. Quand on vient habiter chez un autre, on le fait souvent en pensant à soi, à sa famille, parfois à sa survie. Par la suite, on peut rester en repli ou entrer en dialogue avec celui qui accueille. Quand cela arrive, c’est la fécondité des relations qui gagne à coup sûr. Écoutez ces groupes de musique métissée qui offrent des sons et des paroles nouvelles. Celui qui accueille peut, n’oublions pas, adopter aussi ces deux postures : l’acceptation ou le rejet. Dans le Cogito, nous revenons sur cet épisode évoqué récemment au dernier festival Cinemed, le massacre des Italiens à Aigues-Mortes. Plus inattendu mais bien réel, nous le verrons, dès l’école parfois, le rejet peut encore provenir de l’intérieur d’une famille immigrée, répétant, reproduisant ou mimant des attitudes emportées avec soi de son pays d’origine : « N’oublie pas, t’es de Fès, moi de Casablanca. » Sans être naïfs ni angéliques - la rencontre n’est jamais exempte de conflits -, osons à contre-courant le regard constructif ! Apprenons donc à découvrir toutes les richesses des mouvements migratoires successifs. L’information et la connaissance là encore sont primordiales. Ainsi les derniers rapports de l’INSEE nous apprennent-ils, par exemple, qu’en Lozère, la première communauté étrangère est la portugaise(1). Ou encore que les Asiatiques sont en train d’adopter notre région. Ainsi va la marche du monde avec sa diversité. Après tout, la tour de Babel avant d’être l’expression d’un charivari n’était-elle pas d’abord une forme de distinction des langues, de différenciation, source de richesses et de découvertes ? (1) www.insee.fr/fr/insee_regions/languedoc/themes/dossiers/atlas_immi/SYN0408_LOC1.pdf 6 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 1- © Charlotte Ducrot Le groupe de rock oriental Les Boukakes explore le métissage méditerranéen depuis 1998. Leur musique mêle rock, percussions, instruments à cordes traditionnels et sonorités électroniques. Le nom « boukake » est né de la contraction de « bougnoule » et « macaque », ou quand deux insultes donnent naissance à une troisième… Prenant le contre-pied, la vingtaine de musiciens et chanteurs méditerranéens qui ont participé à l’aventure des Boukakes depuis la création du groupe ont prouvé que le mariage de l’Orient et de l’Occident est possible, prolifique et même heureux ! Nouvel album : Punky Halal (oct. 2012) www.boukakes.com PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 7 Dossier : Immigrés, ils enrichissent notre région Languedoc-Roussillon E Les jalons de l’histoire de l’immigration n matière d’immigration, la région Languedoc-Roussillon présente des singularités fortes : le poids décisif de l’agriculture, notamment la viticulture, dans l’immigration de travail ; le phénomène simultané et croisé des immigrations étrangères et des émigrations régionales liées à l’exode rural ; la prépondérance de l’immigration outrepyrénéenne durant près de cent cinquante ans ; l’importance des vagues migratoires en provenance d’Algérie puis du Maroc ; enfin, des formes récentes de migrations nord-européennes liées à l’héliotropisme qui côtoient d’autres mouvements migratoires liés au travail, au regroupement familial et à l’asile. Aujourd’hui, ce passé, longtemps occulté, fait l’objet d’un intérêt nouveau mais ces relectures ne sont pas sans risque accru sur les processus d’ethnicisation(1) des rapports sociaux. Retour sur six grandes tendances d’une histoire de l’immigration languedocienne. Mobilités d’antan Dès le Moyen Âge et durant l’Ancien Régime, des étrangers, armateurs, commerçants, diplomates, ingénieurs ou savants, en provenance du bassin méditerranéen et d’Europe du Nord, viennent en petit nombre, dans l’espace régional qui constitue aujourd’hui la région LanguedocRoussillon, commercer ou proposer des savoirfaire rares. Au côté de ces migrants hautement qualifiés demeurent des étrangers, peu formés et poussés par le dénuement, qui viennent pour s’embaucher dans la région, essentiellement dans les secteurs agricole, de la pêche et de la domesticité. Tout au long du XIXe siècle, les migrants, le plus souvent saisonniers, qu’ils soient venus du Massif central ou d’Espagne, sont tout autant considérés comme des étrangers par les populations locales que les Gavachs, venus du Biterrois trouver du travail dans la plaine viticole. Mais la montée progressive du sentiment national français se manifeste dans la région par des agressions xénophobes et des rixes collectives, dont le massacre des Italiens d’Aigues-Mortes en 1893 est la plus violente illustration. 8 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 Marseille mars 1988, arrivée du ferry boat « Le Liberté » en provenance d’Alger © Jacques Windenberger, SAIF / Musée national de l’histoire et des cultures de l’immigration, CNHI, 2012 Un pôle national d’immigration (1ère moitié du XXe siècle) Si l’espace régional est traversé jusqu’alors par des courants migratoires de faible ampleur, elle devient, à l’ère des grandes migrations poli- tiques et de travail, un des plus importants pôles nationaux d’immigration. Longtemps de voisinage, majoritairement espagnole, l’immigration a joué un rôle majeur dans le développement de la viticulture. En 1911, les cinq départements qui composent la région (Aude, Gard, Hérault, Pyrénées-Orientales et Lozère) comptent au total près de 35 000 ressortissants espagnols employés dans le secteur viticole en plein développement mais également réfugiés en France pour des motifs politiques (guerres carlistes, fin de l’empire colonial espagnol en 1898) -, soit un tiers des effectifs au niveau national. Au lendemain de la Première guerre mondiale, la France est la destination privilégiée des Européens à la recherche de travail et/ou fuyant les persécutions politiques. Dans ce contexte, la région devient rapidement un des pôles nationaux d’immigration, avec 10% de la population régionale de nationalité étrangère en 1931. Les Espagnols et les Italiens, majoritairement employés dans le secteur agricole, sont les plus nombreux. Dans une moindre mesure, la venue de Polonais, de Tchèques ou de travailleurs indigènes est organisée par les pouvoirs publics et le patronat en vue de pallier la pénurie de maind’œuvre, dans les mines du Gard notamment. Cette main d’œuvre sert de variable d’ajustement durant la crise économique des années 1930 et les pouvoirs publics n’hésitent pas, lorsqu’ils le jugent nécessaire, à la renvoyer dans son pays d’origine. Exil des Républicains espagnols, persécutions des étrangers et résistance durant la Seconde guerre mondiale (1936-1945) Le climat xénophobe qui se développe au cours des années 1930 explique en partie « l’asile à cœur » faits aux Républicains espagnols, lors de la Retirada, après la chute de la Catalogne, en janvier 1939. En effet, ceux-ci sont triés et internés, dans des camps construits à la hâte, parfois par les internés eux-mêmes (Saint-Cyprien, Argelès), ou des camps déjà existants comme à Rivesaltes. Puis, la politique du régime de Vichy se caractérise par une mise au travail forcé et des internements « des étrangers indésirables » et des déportations vers les camps de la mort, notamment Auschwitz, de juifs étrangers. Dès 1940, les étrangers jouent un rôle actif dans la Résistance au nazisme et lors de la Libération, notamment depuis les maquis des Cévennes. Des mutations profondes dans la composition de la population régionale après 1945 Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, la région connaît de profondes modifications dans la composition de sa population, tant du point de vue de sa structure démographique que de ses caractéristiques sociologiques : les conséquences de la guerre d’Algérie voient l’afflux de pieds-noirs et de harkis à partir de 1962, des accords de mains-d’œuvre conclus au niveau national entraînent de nouvelles vagues migratoires dans la région, notamment en provenance de la péninsule ibérique à partir de 1955, mais aussi du Portugal, d’Algérie et du Maroc. À partir des années 1970, si l’immigration de travail est officiellement suspendue, les arrivées d’immigrants se poursuivent, notamment au travers du regroupement familial. L’apparente stabilité des chiffres de l’immigration régionale cache de nouvelles évolutions dans la composition de la population immigrée (importance de l’immigration maghrébine et étiolement des vagues migratoires espagnoles, naturalisations, féminisation, vieillissement). Dans le contexte de crise qui met fin à la période dite des « Trente glorieuses », les travailleurs étrangers sont plus durement frappés par le chômage que les Français, et le Languedoc-Roussillon plus durement touché que les autres régions françaises. L’activité économique régionale se structure autour du secteur tertiaire délaissant peu à peu les secteurs d’activité traditionnels des travailleurs immigrés (agriculture, bâtiment et travaux publics). Les dynamiques migratoires d’aujourd’hui : héliotropisme, asile et précarité Les formes classiques de l’immigration du travail et du regroupement familial cohabitent avec des formes d’immigration nouvelles, lié à l’héliotropisme, à l’asile et à la pauvreté. Si on prend en compte la catégorie « immigrés » des statistiques créée en 1995, le Languedoc-Roussillon en compte 234 000 en 2009. Cela concerne donc 9% de la population régionale plaçant la région Languedoc-Roussillon au sixième rang des régions françaises. La période récente se caractérise également par la diversification des provenances et le passage d’une immigration majoritairement ibérique à une immigration algérienne puis marocaine, en raison des effets combinés des nouvelles arrivées, des décès et des naturalisations. Les effets identitaires de la reconnaissance de « la richesse » de l’immigration Depuis quelques années, l’on assiste, à l’instar d’autres régions, à une relecture du passé qui valorise ces présences immigrées. Ce numéro de Patrimoines en région témoigne également de cette prise en compte. Pour autant que cette relecture se veuille attentive à « la diversité » des apports de population, elle n’est pas sans risque et sans effets sur les recompositions identitaires. D’un côté, la multiplication des projets de patrimonialisation(2) de mémoires immigrées alimente, inconsciemment le plus souvent, l’illusion d’une inscription « naturelle » quoique tardive, des vagues migratoires concernées dans le creuset régional, omettant que la « communauté de destins » ou les « racines communes » aujourd’hui valorisées sont le produit de l’activité mémorielle et donc le résultat d’un processus politique actif. De l’autre, l’expression artistique de populations « issues de l’immigration » ne suffit pas à fonder le « commun ». En découle, dans un cas comme dans l’autre, un risque accru d’exposition aux logiques ethnicisantes, alors même que les intentions initiales étaient contraires. Suzana Dukic, historienne, co-responsable de l’ISCRA-Méditerranée, institut de recherche en sciences sociales, Montpellier www.iscra.org Les travaux de Suzana Dukic portent sur l’histoire de l’immigration et les politiques publiques de lutte contre les discriminations. Un ouvrage portant sur l’histoire de l’immigration en Languedoc-Roussillon est à paraître en 2013 aux éditions Trabucaïre. (1) L’ethnicisation des rapports sociaux est « l’imputation de l’altérité ethnique à autrui » (F. Lorcerie). Elle repose sur une croyance qu’ont les individus qu’ils appartiennent ou que d’autres appartiennent à une communauté d’origine. Il s’appuie sur une partition entre « eux » et « nous » sur la base d’une catégorisation ethno-raciale. (2) La patrimonialisation est un processus d’identification, de sélection (classement symbolique) et de sauvegarde (sanctionné par une procédure juridique ou règlementaire) d’héritages matériels ou immatériels. Elle est marquée par des enjeux identitaires et de mémoires collectives. PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 9 Dossier : Immigrés, ils enrichissent notre région Grèves et syndicats : la participation active des étrangers L’image de l’étranger, « concurrent déloyal et docile », a volé en éclats en 1903-1904, quand ouvriers italiens et espagnols ont participé à un vaste mouvement de grèves dans la viticulture. Une mobilisation massive et visible. C ’est en décembre 1903 que commence, pour la première fois, un mouvement massif de grèves dans la viticulture du Bas-Languedoc et du Roussillon. À la grande surprise des observateurs, qui croient la xénophobie bien ancrée dans les milieux populaires, les ouvriers agricoles italiens et espagnols sont invités à participer aux grèves et à adhérer aux syndicats, ce qu’ils font massivement. « À Sérignan, où ils étaient très nombreux et où, chose remarquable, ils étaient alors combattus par le syndicat, ils se trouvèrent parmi les plus déterminés ; il fallut dans les réunions publiques traduire en italien les décisions prises par le comité de grève », relate Michel Augé-Laribé, qui est alors un spécialiste de la viticulture languedocienne. Ouvriers français et étrangers combattent ainsi côte à côte jusqu’en 1905, pour obtenir des augmentations de salaire et l’amélioration de leurs conditions de travail. Le 6 décembre 1904, à Narbonne, alors que la grève générale est déclarée, l’arrestation d’un gréviste espagnol, accusé d’avoir menacé de son bâton des non-grévistes, donne lieu à une vaste manifestation pour réclamer sa libération. Mobilisations Cet élan internationaliste se répand dans le bâtiment, les travaux publics et l’industrie. Non sans difficultés et dissensions, car de nombreux propriétaires viticoles et des patrons combattent ces mobilisations, notamment en faisant appel à des nouveaux-venus, recrutés dans l’arrière-pays ou en Espagne, pour remplacer les grévistes. 10 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 En réalité, ce n’est pas la première fois que les ouvriers étrangers participent à des grèves ou même en prennent la tête. En BasLanguedoc et en Roussillon, la nouveauté tient au caractère massif de cette participation et, plus encore, à sa visibilité dans l’espace public. La Fédération des travailleurs agricoles du Midi, fondée à Béziers en août 1903 par des syndicalistes révolutionnaires, est à l’origine de cette stratégie ouvertement unitaire, qui fonde le succès du mouvement de grèves sur la participation de tous les ouvriers, quels que soient leur statut (journaliers, domestiques logés dans les domaines, petits propriétaires) ou leur origine (natifs, montagnards venus de l’arrière-pays, étrangers). Des journalistes sont envoyés sur place pour couvrir cet événement inédit. Gabriel-Ellen Prévot est ainsi chargé par La Dépêche, quotidien populaire radical né à Toulouse en 1870, de faire le récit des mobilisations. Il en souligne « le caractère international » : « Quant aux ouvriers étrangers, j’ai dit déjà que, sur bien des points, ils ont entraîné les ouvriers indigènes et (…) soutenu l’ardeur des grévistes. » Quelques années après, la plupart des ouvriers étrangers installés dans les villages du Midi viticole adhèrent toujours aux organisations syndicales et participent à des grèves. À Perpignan, les Espagnols se montrent très actifs dans les syndicats ouvriers du bâtiment. La Bourse du travail affiche sa volonté de leur ouvrir plus largement ses portes en février 1914 en publiant un premier article en langue espagnole dans son journal syndical. Même dynamique à Nîmes, où les étrangers participent au mouvement ouvrier. Depuis, bien que les historiens se soient très peu intéressés à la question en Languedoc-Roussillon, les traces de l’implication des syndicalistes étrangers sont nombreuses dans les mobilisations collectives, malgré arrestations et expulsions qui en ont découragé certains. Solange de Fréminville, Historienne Les apports démographiques et économiques E n 1931, près de 160 000 étrangers, en majorité espagnols, résident en Languedoc-Roussillon, soit plus de 10 % de la population totale. C’est le point culminant d’une immigration qui a commencé au milieu du XIXe siècle et a pris de l’ampleur à partir des années 1910. Ils sont alors recrutés massivement dans la viticulture comme ouvriers agricoles, mais aussi dans les terrassements et la construction. Dans les années 1960, ils sont encore très nombreux, répartis entre l’agriculture et le bâtiment. Pour les vendanges, 20 000 à 30 000 saisonniers espagnols viennent chaque fin d’été. Depuis, le nombre des étrangers décroît. Les Algériens et les Marocains, devenus majoritaires, travaillent principalement dans l’agriculture et le secteur du B.T.P. Un apport toujours essentiel. Une étude menée dans les années 1990 montre qu’un Héraultais (et un habitant des Pyrénées-Orientales) sur quatre et un Languedocien sur cinq a un ascendant espagnol. Aujourd’hui encore, des habitants de Mauguio et Sète célèbrent la mémoire des immigrants espagnols ou italiens. À gauche : Non au racisme, aux expulsions. Montpellier El Assifa, Mouvement des travailleurs arabes (MTA), collection Saïd Bouziri, 1975 © Génériques Ci-dessus : Environs de Nîmes, route de Saint-Gilles, travailleurs marocains et espagnols dans les vergers, 1981 © Jacques Windenberger, SAIF / Musée national de l’histoire et des cultures de l’immigration, CNHI, 2012 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 11 Dossier : Immigrés, ils enrichissent notre région Les petits-enfants de l’immigration Mémoire d’Escholiers Se pencher sur l’histoire de ses ancêtres peut devenir un long voyage dans l’histoire de sa propre famille, mais aussi dans la sienne. Récit d’un atelier fort riche au collège des Escholiers de la Mosson, à Montpellier. L eïla, Aziza et Myriam se penchent en cette journée de 2008 sur l’une des cartes géographiques proposées par l’enseignant. Le document signale les lieux de départ d’Espagne dans les années d’avant-guerre vers la commune héraultaise de Bédarieux. L’exercice consiste à repérer le chemin accompli par une famille espagnole venue de Valence. Deuxième question : « Détectez les éléments concernant les raisons économiques, politiques ou autres ayant poussé ces travailleurs à émigrer chez nous ». Dans cette classe de troisième, l’atelier réunit les vingt-et-un élèves tout au long de l’année, une fois par mois. Toute une équipe s’est ainsi retrouvée autour du Conseiller principal d’éducation du collège et responsable de la vie scolaire, Abdou Bayou et de deux enseignants mobilisés sur l’action. Révéler l’humain Il y a aussi les Archives départementales de l’Hérault avec Philippe Secondy et Brigitte Rambal, médiateurs culturels, qui offrent l’indispensable sous-bassement historique, avec documents et photos : « Nous avons donc proposé aux élèves des textes illustrant différentes vagues migratoires dans l’Hérault de la fin du XIXe au milieu du XXe siècle ; nous avons eu à cœur de choisir des textes qui révèlent “l’humain” derrière les mots, facilitant ainsi une certaine proximité pour les élèves : les Archives sont vivantes. » Parallèlement, pour l’enseignant, « sachant que le public de la classe concernée est composé presque à 100% de jeunes issus de différentes immigrations, en particulier maghrébine, tout le travail d’une telle action consiste à encourager la prise de conscience de la pluralité en évitant le communautarisme. Il faut mettre en avant les principes et les valeurs 12 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 sur lesquelles se fonde le pacte républicain. Ce sera aussi l’occasion de s’exprimer dans le cadre d’une démarche pédagogique. » Il y encore l’association Uni-Sons, organisatrice du festival Arabesques et un conteur Ali Merghache. Car tout ce travail d’une année doit déboucher sur un spectacle reprenant les découvertes des jeunes et offert dans le cadre du festival, en mai, c’està-dire presque à la fin de l’année scolaire. Il y a enfin l’Adoma de Montpellier, ex-Sonacotra, le foyer des travailleurs migrants du Maghreb. Le plus important, bien sûr, reste cette découverte de la vie autour de l’émigration souvent tragique de leurs parents ou grands-parents. Au cours de l’année, les élèves sont invités à aller interroger l’un d’eux sur son trajet jusqu’en France. « C’est important, reprend Abdou Bayou, car la première génération n’a jamais raconté “sa vraie France”. » Elle est partie à la fin des années 1950, a connu les trente glorieuses et le statut du père, ici, comme dans son pays d’origine, se résumait à une formule lapidaire : « Je travaille en France. » Mais la crise est venue dans les années 1970, la famille a rejoint le travailleur resté seul ici. Dans l’atelier du collège, quelqu’un raconte un jour l’histoire d’un grand-père espagnol parti clandestinement à travers les Pyrénées, ses peurs, ses angoisses, la faim et la misère qu’il a trouvée sur place. Beaucoup d’émotion se dégage alors au sein du groupe : chacun revoit à travers le témoignage son propre ancêtre et toute sa peine… « Nous ne sommes pas pareils ! » « Cette action d’éducation territoriale intitulée “Migrations méditerranéennes et mémoires d’adolescentes”, portée par le Conseil général, pose aussi à ce public jeune la question de l’altérité en général, précise Abdou Bayou. Pour eux-mêmes, au sein du collège, les conflits et difficultés ressentis s’écrivent au présent. Car dans le collège, implanté dans un quartier à majorité maghrébine, gitane et espagnole, les cours de récré sont parfois agitées. Simplement parce que chacun veut dire à l’autre qui il est, dans sa différence. » « Le professeur est déjà un médiateur à l’intérieur de la classe, rappelle le CPE. Comment alors aborder la question du racisme quand déjà un régionalisme importé fait question : “Toi tu es de Fès et moi de Casablanca, nous ne sommes pas pareils !” » Lors du spectacle de fin d’année pris très aussi sérieux par les élèves, Abdou Bayou en a vu beaucoup pleurer au bout de ce parcours de la mémoire : « Je me suis surpris à espérer, dit-il, qu’à défaut d’être réconciliés avec leurs camarades de classe, ils avaient commencé un chemin de réconciliation avec eux-mêmes. » Car, comme le dit le projet d’orientation de l’atelier 2012-2013 (voir encadré ci-contre) : « L’immigration en tant que thème d’étude fait la différence entre ce qui relève de l’histoire de l’immigration et de la gestion effective des élèves issus de l’immigration. » Nos grands-pères les « Chibanis » L’atelier évoqué s’est déroulé dans une première phase au cours de l’année scolaire 2008-2009 dans une classe de Troisième du collège des Escholiers de la Mosson à Montpellier. L‘expérience est en train de se renouveler depuis la rentrée 2012. Cette fois, on ira plus loin encore dans la rencontre de l’autre. Le CPE a souhaité lancer l’atelier en binôme avec le collège Abdellah Ibnou Yassine de Medina Fès au Maroc sur le thème « Histoire et mémoire : nos grands-pères les “Chibanis” », évoquant ainsi l’histoire de ces immigrés à qui l’on refuse aujourd’hui encore le droit à la retraite. L’équipe pédagogique du coup est doublée. Les partenaires restent pratiquement les mêmes. Un spectacle est prévu, comme en 2008, et une visite à Paris. Voix sauvées avec l’association Pacim Quand la Mosson était La Paillade E n Janvier 2010, l’association Passeurs de cultures, passeurs d’images a initié un projet (soutenu alors par la Région Languedoc-Roussillon, la DRAC LanguedocRoussillon et la CAF de l’Hérault) de collecte de récits de vie des habitants et des migrants du quartier des Hauts de Massane à l’aide d’un magnétophone. Genèse et mémoire de la naissance d’un quartier. Le travail de collecte auprès des aînés a été conduit sans difficulté particulière et nous avons pu obtenir quarante-quatre récits de vie traçant des trajectoires géographiques et culturelles fort variées et apportant des renseignements précis sur les étapes de construction du quartier. Ainsi nous avons pu rencontrer Paul Salamand, qui a conduit fin 1964 les premiers travaux de décaissement et d’implantation des voies de l’ensemble du quartier qui s’appelait alors la Paillade : « On a tout débroussaillé, raconte-t-il, ça faisait comme une piste, on se croyait au désert. Si vous avez assisté à la naissance de Malbosc, c’était la même chose en un peu plus grand ! » Plusieurs enseignants qui ont participé à l’ouverture des écoles primaires « les Troubadours » en 1970 et les « Ménestrels » en 1973 ont évoqué la répartition de la population du haut de la Paillade (rebaptisée « Hauts de Massane » en 1990) : « Au début, les populations primo-arrivantes étaient installées à Phobos, à la résidence du lac et au Xerès et leurs enfants étaient scolarisés aux Ménestrels. En revanche, les cinq tours des Tritons sorties de terre au tout début des années 1970 accueillaient une population relativement diversifiée. On avait beaucoup de migrants d’origine maghré- Carnet de voyage bine, des rapatriés d’Algérie, des petits fonctionnaires, des gens du CHU, des chercheurs, des chimistes, beaucoup de professeurs, tous étaient bien logés dans les tours qui offraient de vastes appartements. L’ambiance était très sereine et n’a commencé à se dégrader que dans les années 2000 sur cette partie du quartier. » « Confier des paroles… » Au cours de notre travail de collecte, les échanges avec les populations nouvellement arrivées et avec certaines familles d’origine maghrébine ont été plus lents à se concrétiser, en raison d’un certain étonnement devant cette démarche de récolte de paroles. Peu familiarisées avec l’entretien ethnologique, certaines habitantes ont reconnu qu’elles craignaient de confier des paroles, dont elles ne pourraient pas maîtriser les retentissements au cas où des membres de leur famille ou de leur communauté viendraient à savoir qu’elles avaient « parlé ». Mais cette difficulté à s’exprimer peut sans doute être mise en rapport avec le fait que les migrantes maghrébines, arrivant adultes en France pour rejoindre leur mari dans le cadre du regroupement familial, restent majoritairement en retrait de la vie sociale en France. Elles taisent souvent le sentiment douloureux d’avoir le cœur entre deux rives. Comme le confie l’une d’elles : « J’ai toujours le sentiment que je suis arrivée hier, je vis en France et en même temps je songe constamment au Maroc ! Je me rends malade de penser à ma famille restée là-bas. » Cette souffrance de l’exil paraît transcendée chez les hommes migrants, tout occupés à s’investir dans des itinéraires professionnels et à satisfaire aux mieux les besoins financiers et logistiques des familles qui les rejoignent. Ces premières pistes d’analyse nous exhortent à développer notre compréhension du vécu migratoire dans ses divers aspects, économique, géographique, psychologique, culturel et social. Nous envisageons notamment de travailler auprès des publics féminins des associations de quartier, au moyen d’ateliers de photolangage et d’ateliers ethnocréatifs qui permettront aux acteurs d’origines émigrées de s’exprimer de diverses manières et de rendre compte de la complexité de leur expérience dans un climat de confiance. Catherine Barrière, anthropologue Contact : Passeurs de cultures, passeurs d’images (PACIM), Catherine Barrière, 06 25 77 01 45 ou [email protected] PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 13 Dossier : Immigrés, ils enrichissent notre région Les pieds-noirs Une présence active dans la société languedocienne Jean-Jacques Jordi, historien de la colonisation et de la décolonisation, revient sur un exode et sur ses nombreux apports dans tous les domaines de la société. Interview. Les rapatriés s’entassent dans les entreponts - Collection Port-Vendres des Paquebots rablement transformé à Montpellier - mais les apports sont tout aussi nets dans l’agriculture, le bâtiment. Enfin, ils ont poussé les maires à moderniser leurs villes mais aussi certaines administrations de l’État comme les PTT par exemple. P.E.R. Cinquante ans après, peut-on encore parler de « population pied-noire » en Languedoc-Roussillon ? J-J J. Le Languedoc-Roussillon est une région majeure dans le rapatriement de 1962. Si Marseille avec son port et son aéroport accueille la très grande partie de ce flot humain, le deuxième port d’arrivée est Port-Vendres qui voit passer plusieurs dizaines de milliers de rapatriés. Ces derniers sont très rapidement envoyés sur d’autres villes de France mais il ne fait pas de doute que Perpignan, Montpellier, Nîmes, Béziers et Sète en captent une bonne partie. Avec près de 50 000 rapatriés, l’Hérault est le quatrième département d’accueil des rapatriés, les Pyrénées-Orientales treizième et le Gard quatorzième avec respectivement 20 000 et 19 000 rapatriés. Ceux qui arrivent recherchent avant tout les grandes villes situées sur le littoral maritime. De fait, si cinquante ans ont passé, et si la population pied-noire fait désormais partie de l’histoire du Languedoc-Roussillon, il n’en reste pas moins qu’elle « anime » à sa façon des villes comme Perpignan avec le Centre dédié à l’Algérie du temps de la France ou comme Montpellier avec la Maison des Rapatriés et bientôt le Musée de l’histoire de l’Algérie française, sans compter les multiples associations de rapatriés qui organisent de grandes manifestations. Patrimoines en région. Quand on vous dit « apports migratoires des pieds-noirs », à quoi pensez-vous ? Jean-Jacques Jordi. Il faut d’abord entendre l’apport démographique. Comme tout exode, celui de 1962 est familial. L’étude des dossiers des rapatriés de 1962 met en évidence la « jeunesse » de cette migration originale. Les 0-19 ans représentent plus de 31% des rapatriés contre 28% en métropole, les 20-39 ans 27,43% des rapatriés pour 24,7% chez les métropolitains. En revanche, les plus de 65 ans ne représentent que 16% des rapatriés pour 20% chez les métropolitains. Sur Montpellier, l’arrivée des pieds-noirs correspond à sept années de croissance démographique et comme il s’agit d’une population plus jeune que la population montpelliéraine, elle a davantage d’enfants. Il ne faut pas non plus oublier les apports culturels, économiques - songeons au petit commerce qui s’est considé14 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 P.E.R. Cependant, pourquoi l’évocation des événements de 1962, le travail de mémoire, le projet d’un musée de l’Algérie… entraînent-ils toujours aujourd’hui la réouverture de certaines plaies, des confrontations encore virulentes et passionnelles ? J-J J. Parce que les pieds-noirs ont le sentiment d’avoir été et d’être toujours « maltraités » par l’histoire, par les différents gouvernements et par les médias. Leurs souffrances, il est vrai, n’ont pas toujours été évaluées à leur juste valeur quand elles n’ont pas été déniées ! Et leur place dans l’histoire reste celle des « colons » alors que les colons proprement dits représentaient moins de 10 % de la population européenne. Sortir de cette vision manichéenne entre les méchants qu’ils seraient et les bons qui seraient les Algériens, apaiserait sans doute beaucoup de tensions. Le dernier ouvrage de Jean-Jacques Jordi : Les pieds-noirs, coll. Idées Reçues, Éd. Le Cavalier Bleu Le Mahzor (fin XIVe, début XVe), trésor patrimonial juif montpelliérain médiéval. © Hugues Rubio, Ville de Montpellier La communauté juive en Languedoc-Roussillon Sur les traces de l’internationale andalouse… L es déracinés sépharades, contraints de s’adapter à des contrées, méditerranéennes certes, mais différentes à bien des égards, apportent en héritage la chaleur de l’Orient, mâtinée d’un rigorisme rituel. Leur judaïsme revivifia le groupe communautaire exsangue d’après-guerre. La mosaïque locale (6000 âmes) offre aujourd’hui un judaïsme pluriel. Et, ici, ils ont pu retrouver leurs racines. En effet, Montpellier a la chance de posséder un vestige archéologique exceptionnel : le Mikvé, bain rituel juif daté du XIIe siècle, retrouvé et restauré l’année du millénaire de la ville en 1985. L’Espace cultuel hébraïque médiéval où est basé l’Institut Maïmonide, est classé « Monument Historique » et fait l’objet de fouilles archéologiques afin de mettre au jour une synagogue, des maisons de l’aumône et d’étude, composantes de la Schola Judeorum selon les sources latines chrétiennes et les documents hébraïques. La cité a conservé dans la partie aragonaise, le support matériel de la pratique religieuse de sa collectivité juive : mille individus au temps de son âge d’or vers 1300. Un institut d’études juives Un autre vestige juif médiéval, livresque, seul manuscrit connu du rite local, dit « Mahzor Montpellier », est venu enrichir les trésors patrimoniaux municipaux. Rédigé dès l’expulsion des Juifs de Montpellier (XIVe s.) au début de l’exil dans le Comtat Venaissin, ce manuscrit en dialecte séfarade provençal de l’hébreu, appartenait à la communauté juive de Modène à la fin du XVIIe. Un recueil qui narre la liturgie de la communauté et les derniers instants de son existence. La Ville de Montpellier a récupéré cet héritage, lors d’une vente aux enchères à Londres en 2008. L’Institut, pour son dixième anniversaire, a organisé l’exposition Écritures sacrées hébraïques. SoferScribe, Archives de la Ville, 2010, qui s’est articulée autour du Mahzor. La création de l’Institut Maïmonide participe d’une volonté commune, manifestée en 2000 par Georges Frêche et l’ancien Grand Rabbin de France, René-Samuel Sirat, tous deux universitaires. Doter la ville d’une structure chargée d’œuvrer sur le Montpellier originel aux racines hébraïques avérées en créant un institut d’études juives dans la « Ville du Mont », Ir ha-har, l’une des appellations hébraïques de Montpellier au Moyen Âge. Car cette dernière a représenté une oasis de tolérance (Édit de Guilhem VIII) : accueil aux individus et ouverture aux sciences. Le programme de la licence en 1309 juxtapose les médecines antique (Galien), arabe (Avicenne, Razès), et juive d’expression arabe (Israeli). Le Languedoc a été une terre d’accueil pour les Juifs d’Andalousie, fuyant les Almohades. Cette « internationale andalouse » véhicula en Occident la culture andalouse d’expression arabe nourrie aux sciences antiques. Les Juifs occitans ont été le trait d’union entre l’Ibérie musulmane et la chrétienté féodale. À Narbonne, les Kimhi ont véhiculé un savoir exégétique ; à Lunel et Montpellier, le lignage Tibbonnides a été à l’origine d’une vaste entreprise de traduction de l’arabe en hébreu : Jacob ibn Tibbon (en occitan Don Profiat) échangera des recettes médicinales avec Armengaud Blaise, neveu d’Arnaud de Villeneuve et traduira avec ce dernier son propre travail de l’hébreu au latin par le biais de la langue vernaculaire. Michael Iancu, Docteur en histoire et Directeur de l’Institut Maïmonide PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 15 Dossier : Immigrés, ils enrichissent notre région L’arrivée des gavachs en pays de garrigue L’équipe de foot où les fils gavots se retrouvent mêlés aux enfants des vieilles familles du village, ainsi va l’intégration – 1921. DR P our désigner ces immigrés de l’intérieur, les Gardois disent gavot. Du côté de l’Hérault, le mot gavach (ou gabatch) est préféré. Désormais le terme est peu utilisé, et si l’on se moque de quelqu’un en le traitant de gavot ou de gavach, c’est généralement sur le mode de la plaisanterie. Mais jusque dans les années 1960-1970, le terme est franchement péjoratif, il désigne des attardés, des rustres venus de la montagne. Pourtant cette population a joué un rôle significatif dans le développement économique de la zone d’immigration. Au début du XXe siècle, les enfants mâles des riches familles villageoises étaient incités à suivre des études pour devenir médecin, pharmacien, notaire ou autre profession prestigieuse. Des domaines viticoles se trouvaient sans homme pour prendre la relève. Le phénomène se répand au lendemain de la guerre de 14-18. Les propriétés s’abourissaient (étaient à l’abandon). Les travailleurs arrivés de la montagne comme ouvriers agricoles trouvaient là une grande opportunité de devenir fermiers. Les terres pouvaient même leur être vendues, payables sur plusieurs années. De même, des ouvriers maçons sont devenus maçons, des bergers ont eu leur propre troupeau et sont devenus bouchers. Si l’apport économique est visible, l’apport en terme culturel l’est beaucoup moins. Les gavots/ gavachs arrivaient en situation de dominés, leur façon de s’habiller, leur démarche, leurs manières, leur langage était raillés. « Tu sembles un gavot » : Tu es habillé comme un plouc. Un « travail de gavot » qualifie un travail grossier. Il faut dire que les montagnards n’avaient jamais conduit un cheval, jamais travaillé la vigne, alors au début ils faisaient des « virouns » (sinuosités) en labourant, ils ne paraient pas (ils ne coupaient pas bien au ras de la souche) lorsqu’ils taillaient les sarments. Le seul impact culturel indéniable semble l’arrivée de catholiques dans des zones protestantes comme la Vaunage avec, à la clef, des conflits autour du mariage mixte. Voilà en raccourci une histoire qui rappelle celle de bien d’autres mouvements migratoires. René Domergue Professeur agrégé de sciences sociales, auteur de La Parole de l’estranger (Éd. L’Harmattan) Travail de gavot Concernant les villages de garrigue et des « terres basses », il faut savoir que l’arrivée des « montagnards » a constitué un apport considérable de population au XIXe siècle et jusque dans les environs de 1920, voire 1930 dans certains cas. À cette époque, la vigne occupait de vastes territoires et l’essentiel du travail se faisait « à bras ». Les montagnards hommes, femmes et enfants venaient faire les vendanges. Des hommes étaient recrutés comme ouvriers agricoles. D’autres étaient aussi embauchés comme bergers, comme ouvriers maçons, ou comme cantonniers. Les hommes avaient la réputation de chourler (picoler), mais c’était vrai surtout pour les vendangeurs. Il faut dire qu’à l’époque, les travailleurs de force buvaient facilement leurs trois litres de vin par jour. Les gavots/gavachs avaient surtout la réputation d’être durs à la tâche, qualité essentielle du point de vue des employeurs. 16 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 En savoir plus : www.renedomergue.com Gavot : homme grossier, rustre (...) Sobriquet que l’on donne en Provence aux Montagnards des Alpes et dans le Languedoc à ceux de Lozère. Frédéric Mistral, Lou Tresor dóu Felibrige, dictionnaire provençal-français. Voir aussi le Dictionnaire étymologique des langues d’Oc : www.etymologie-occitane.fr Témoignage Mes amis les Gitans Elle n’a jamais cessé de fréquenter le monde gitan depuis ses premières années d’étudiante à Montpellier. Chantal Delmas, ancienne présidente de l’APAJ*, le connaît bien. Elle revient sur ce qu’elle a découvert en fréquentant des familles, de Montpellier à Perpignan et même dans le Vaucluse. Histoire d’une fidélité… réciproque. «M on premier contact avec les Gitans remonte à l’année 1955 dans le bidonville des “Barques”, un amoncellement de baraques près d’un vieux bâtiment en ruine dit “le château”, au bord du Lez. Avec d’autres étudiants, nous vivons alors des rencontres régulières avec une quarantaine de familles. L’univers est insolite : elles sont installées dans la boue avec les nombreux petits enfants mais nous vivons des soirées amicales autour d’un feu avec quelques guitaristes issus des familles présentes, et parfois, cerise sur le gâteau, avec Manitas de Plata venu voir sa mère. Ensemble, étudiants et familles se sont épaulés pour trouver un autre habitat qui deviendra la cité de transit de Celleneuve près de la cave coopérative, grâce à la participation très active de la Caisse d’Allocations Familiales. Parallèlement, de 1959 à 1961, à l’École Gitane de Figuerolles, nous préparons une vingtaine de jeunes filles au certificat d’études acquis par plus de 60% du groupe. Les années suivantes s’édifient des maisons en dur assez sommaires à Celleneuve. Accueil sans réserves 1- Avec l’APAJ, nous offrons un appui aux familles pour les aider à intégrer l’école de Celleneuve. Dans les années 2000, les mêmes familles se sont agrandies et implantées aussi désormais à la Paillade, à Montaubérou et Marels, à Gély et Figuerolles… Retour vers des moments de vie ensemble : animations diverses, fêtes, participation à des temps de deuil, etc. Au cours de toutes ces années, ce que les Gitans m’ont apporté de plus significatif, c’est un accueil sans réserves grâce à la connaissance et au respect mutuels. C’est la découverte de qualités créatives multiples : dans la musique, la danse, les solutions à trouver pour manger tous les jours, rafistoler la voiture, la caravane ou l’appartement – une solidarité familiale qui s’étend à celui qui vit près d’eux –, le courage de résister aux représentations courantes : voleurs de poules, fainéants, délinquants… Du chemin reste à faire pour se comprendre et s’apprécier tout en reconnaissant les insuffisances et les qualités des uns et des autres. » « Lili - guinguettes gitanes / la Chapelle » © eitan.S Cette photo fait partie de la collection « mémoires gitanes » qui restitue des instants de vie et les donne à voir pour partager, découvrir, se questionner… sur sa propre identité. Deux photographes, deux hommes, deux regards, deux périodes contemporaines se croisent, se rencontrent à travers les images multiples de la communauté gitane montpelliéraine. Les prises de vue se focalisent sur le quotidien sans oublier le temps de l’évasion, l’instantané des fugues : vacances, célébrations, transitions, fêtes traditionnelles et rassemblements familiaux. *Accompagnement de Parcours Adultes et Jeunes APAJ - centre gitan, 6 rue Dom Vaissette à Montpellier PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 17 Dossier : Immigrés, ils enrichissent notre région Cuisines du monde : échangeons nos recettes ! Italiens, Espagnols, juifs d’Algérie, Gitans ou Africains, ils ont apporté ici leurs saveurs et leur savoir-faire culinaire. Petit tour des tables et habitudes alimentaires. Et si on échangeait plats et saveurs… Les haricots « moungettes » en cassoulet Chantal Ciglia et ses amies gitanes ont pris beaucoup de plaisir à rédiger Tous à table, les gitanes aux fourneaux. Au centre gitan de la rue Dom Vaissette, à Montpellier, elles testent les recettes à la cantine. Mais aimeraient le faire aussi avec les « payous » (les non-gitans). En voici une, tirée de l’ouvrage. Pour 10 personnes Faire tremper 1 kg de « moungettes » (haricots secs) la veille. Les faire cuire avec un os de jambon. Lorsque le tout entre en ébullition, remuer avec une cuillère en bois. Écumer régulièrement et laisser cuire 3/4 d’heure à feu moyen. Faire revenir, à part, un poulet découpé en morceaux, 500 g de saucisse avec de l’ail et un oignon. À coloration, ajouter une boîte de concentré de tomate et une grosse boîte de tomates pelées. Ajouter sel, poivre, thym et laurier. Noyer avec de l’eau et laisser mijoter à feu doux 20 mn. Égoutter les haricots, les ajouter à la sauce, ajuster l’assaisonnement Servir bien chaud. Tous à table, les gitanes aux fourneaux, Salvaje productions et A.P.A.J. centre gitan, 10 €. Afrique : vive le poulet yassa La cuisine des pays d’Afrique noire est moins connue des Français. Ces pays sont des destinations peu touristiques et les rares restaurants africains en France n’attirent que les connaisseurs ou les nostalgiques qui ont vécu au sud du Sahara. Peut-être l’image d’un continent affamé n’attire pas les profanes. Pourtant le patrimoine culinaire africain est riche et quelques uns de ses plats se diffusent dans le monde. Le poulet yassa, mariné dans le citron, grillé puis cuit avec beaucoup d’oignons, est facile à cuisiner et les palais novices s’en accommodent facilement. Les bananes plantain, à cuire ou mieux, à frire, les ignames et les patates douces à cuisiner comme les pommes de terre, se trouvent maintenant chez de nombreux primeurs, signe que ces produits typiquement africains gagnent les 18 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 cuisines domestiques. N’oublions pas non plus que l’huile d’arachide vendue en France vient majoritairement du Sénégal où la culture de la cacahuète a été introduite par les colons à partir de 1850. Le carcadet (feuilles séchées d’hibiscus), aussi appelé bissap en Afrique où il est très consommé, commence à apparaître servi en boisson fraîche dans la restauration. Une entreprise dont le siège est à Montpellier, Racines SA, s’est spécialisée dans l’importation en France, et même en Europe, de produits alimentaires africains. On retrouve ces produits dans les épiceries africaines ou internationales. Nicolas Bricas, socio-économiste - Cirad Montpellier Maghreb : le tajine de pommes de terre aux olives Pour 4 personnes Prévoir 500 g d’agneau (pour tajine), 3 gros oignons, 3 échalotes, 500 g de pommes de terre, 3 carottes, 2 cubes pot-au-feu dégraissés, 1 cuillerée à café de cumin, 1 sachet de safran colorant, un citron, 100 g d’olives vertes. Dans une marmite, faire revenir avec 4 cuillères à soupe d’huile d’olive les morceaux d’agneau (préalablement saupoudrés des cubes de pot-au-feu dégraissés émiettés ainsi que du cumin et du safran) avec les oignons et les échalotes coupés en fines lamelles. Poser le couvercle et laisser mijoter à feu très doux pendant 45 mn en prenant soin de remuer de temps en temps et, si nécessaire, ajouter un peu d’eau (sans excès). Verser les pommes de terre et les carottes ainsi qu’un citron coupé en rondelles et les olives vertes. Ajouter un verre d’eau (25 cl) et laisser cuire environ vingt-cinq à trente minutes à feu doux. À l’aide d’une fourchette, assurez-vous que les pommes de terre et les carottes sont cuites. Et bon appétit ! Khadra Ouadoud D’autres goûts encore… Dégustez aussi la coca à la frita des pieds-noirs, la Hallah des juifs (brioche de shabbat), le minestrone italien. Hum… c’est délicieux ! dùpariq:JÙ Cogito Xénophobie, aujourd’hui et hier Par Solange de Fréminville, Historienne À Aigues-Mortes, dans la nuit du 4 au 5 août 2012, un couple a pourchassé de jeunes Français à coups de fusil en les traitant d’« Arabes ». Cela, juste après la victoire du Front National aux législatives dans le sud du Gard, et alors que, depuis des années, des discours politiques et médiatiques exaltent « l’identité nationale », légitiment l’expression de la haine de l’Autre et stigmatisent les enfants d’immigrés… Comment expliquer le phénomène xénophobe ? C’est à la fin du XIXe siècle, qu’en France, l’hostilité aux étrangers s’exacerbe fortement. L’incident le plus sanglant se produit à Aigues-Mortes : le 17 août 1893, au cours d’une émeute, des ouvriers français agressent et tuent des saisonniers italiens employés à la récolte du sel. Bilan officiel : huit morts et une cinquantaine de blessés(1). Dans ce qui s’appelle aujourd’hui la région Languedoc-Roussillon, se sont produits au total une cinquantaine de faits xénophobes de 1882 à 1914, violences collectives, rixes, réunions publiques, manifestations, pétitions (2). Ainsi, sur le port de Sète, en 1888, des centaines d’ouvriers réclament le renvoi des Italiens. À Belvèze (Aude), le 30 avril 1894, le chantier de chemin de fer est le lieu d’un vaste rassemblement pour chasser les Espagnols. À Perpignan, le 16 avril 1900, deux marchands espagnols sont lynchés par de jeunes Français, à la suite d’une violente bagarre. Ces faits, parmi d’autres, illustrent l’ampleur de la xénophobie, également observée par les historiens dans d’autres régions, du nord jusqu’au sud-est de la France(3). Le rejet de « l’étranger », qu’il soit d’une autre région ou d’une autre nation, n’est pas alors un phénomène nouveau. Et la crise économique majeure, des années 1870 jusqu’au milieu des années 1890, aggravée par les ravages du Petit Méridional et La Dépêche, qui sont les outils de la conquête électorale réussie du territoire par les radicaux, célèbrent la nation. Ils militent en faveur de la protection du travail national et se posent en défenseurs des ouvriers français face à la « concurrence étrangère ». Comme la plupart des journaux, alors en pleine expansion en France, ils véhiculent également la figure de l’étranger criminel, incarnée par « l’Italien au couteau », l’espion allemand, ou l’assassin espagnol. Cela Le 17 août 1893, au cours d’une peut expliquer, dès lors, que, émeute, des ouvriers français pour dire leur colère et leurs revendications, des ouvriers agressent et tuent des saisonniers croient légitime de clamer italiens à Aigues-Mortes. leur identité nationale et de s’en prendre aux « non nationaux ». phylloxéra dans la viticulture, explique le fort mécontentement populaire, lié à la dégradation de la situation sociale et à l’obligation pour nombre de paysans, d’artisans et d’ouvriers qualifiés, d’accepter des emplois non qualifiés, mal payés, notamment sur les chantiers, où sont également embauchés des étrangers. Cependant, ces deux facteurs ne suffisent pas à expliquer la montée de la xénophobie, qui s’est prolongée jusqu’en 1914. D’autant que l’immigration est relativement faible en Bas-Languedoc et en Roussillon au cours de la seconde moitié du XIXe siècle. Entrent également en jeu les profondes mutations politiques et sociales liées à la naissance de la IIIe République. L’État-nation intègre alors pour la première fois l’ensemble de la population de paysans et d’ouvriers, désormais citoyens français, appelés à voter, à s’informer en lisant les journaux, à bénéficier de l’instruction publique et de lois sociales... En Bas-Languedoc et en Roussillon, les quotidiens populaires, Le (1) L’historien Gérard Noiriel a retracé très précisément et expliqué ce « pogrom » dans Le massacre des Italiens. Aigues-Mortes, 17 août 1893, Fayard, 2010. (2) Solange de Fréminville, La xénophobie dans le Midi viticole (1880-1914), thèse d’histoire, EHESS, 2011. (3) Laurent Dornel, La France hostile : sociohistoire de la xénophobie (1870-1914), Hachette Littératures, 2004. PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 19 L’œil de l’artiste | Lozère Sophie Palisson peintre © René Lechon La terre… et la vie O n ne peut pas découvrir la peinture de Sophie Palisson, installée à La Canourgue, en Lozère, sans commencer par un tour du marché sur la place au Blé en sa compagnie, le mardi. Les commerçants la connaissent. Le boulanger ce jour-là lui offre une tranche de fougasse. Puis direction la galerie d’Art du centre-ville, où deux de ses œuvres sont exposées. Enfin, pas très loin, on entre dans son atelier, ouvert à la lumière. « C’est vrai que l’art est pour moi vecteur d’émotion et de partage, explique-t-elle. Ces gens que nous venons de croiser, je les connais. Il m’est arrivé, pour l’un ou l’autre, d’en faire le portrait, comme pour ce vieux Lozérien au chapeau, avec qui nous avons passé de longues heures à échanger… » Il est là, dans son salon, sur une toile qui porte l’empreinte de la terre, sa terre de Lozère : « Je travaille avec la terre, dit-elle, en remuant dans des sachets de belles couleurs de terre en poudre : ocre, terre de Sienne, vert, jaune… Ensuite, au couteau ou à la brosse, je commence par une couche épaisse en bas. En remontant sur la toile, les tons vont s’éclaircir. J’utilise au moins cinq terres différentes. Puis, je fais confiance à mon tableau, j’attends et me laisse surprendre. » Toutes ses œuvres portent ainsi la marque de tons doux où l’on perçoit lumière, chaleur et effectivement une forte empreinte de terre travaillée. Les sujets, eux, laissent transparaître ses thèmes de prédilection : le fantastique, l’imaginaire, la féérie, le merveilleux… Classes patrimoine Cette Aveyronnaise de quarante-deux ans, qui a étudié la peinture à Paris, est intervenante en arts plastiques dans les collèges et lycées d’alentour : « Avec le plaisir, le jeu et un éveil de la curiosité, on peut tout transmettre », selon elle. Elle le fait grâce à l’utilisation de divers matériaux - comme la terre, toujours - et pratique avec eux des détournements d’outils, par exemple. La plasticienne anime parfois des classes patrimoine comme à Sainte-Colombe-de-Peyre, en lien avec le site de Javols, travaille avec des personnes en situation de handicap ou, comme avec l’atelier des sansonnets, à Aumont-Aubrac, elle provoque, autour de l’art, des rencontres entre générations. « Je commence juste à pouvoir vendre quelques toiles, avoue cette artiste, mère de deux enfants, qui vient d’être honorée dans une exposition en Touraine pour la toile “ Double Monde ”. Ce n’est pas suffisant. Voilà pourquoi je travaille en plus à tiers-temps dans le transport ambulancier. » Encore de nouvelles occasions d’échanges… qui déboucheront peut-être sur d’autres toiles. L’art et la vie ne font qu’un, chez Sophie Palisson. Contact : 06 77 36 59 73 Ci-contre : Sans Titre © Sophie Palisson 20 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 21 Architecture et urbanisme L’avenir des terres agricoles La carotte ou le… béton ? Pas un jour sans qu’un article de presse ne nous abreuve de chiffres et de démonstrations éloquentes sur la dramatique disparition des terres agricoles au profit de l’urbanisation. Pourtant, malgré cette indignation déclarée, le phénomène poursuit sa progression. État des lieux. Le cadre de vie offert par la majorité des lotissements : des espaces publics de bitume à l’usage exclusif de la voiture, une juxtaposition de parcelles bâties étrangères les unes aux autres et à leur environnement, des rues sans attraits. DR L ’afflux permanent de nouveaux habitants dans notre région et la diminution du nombre de candidats à la reprise d’exploitations agricoles ont engendré une situation alarmante. Politiques et citoyens, nous sommes tous concernés et impliqués ! En amont, les élus donnent le ton par le biais de décisions politiques traduites dans les documents d’urbanisme. Où urbaniser ? Comment urbaniser ? Comment préserver la terre pour un futur relativement proche ? En 2050, la perspective d’une population mondiale qui atteindra 9 milliards d’habitants* pose la question de nos ressources alimentaires. Si les échéances mondiales ne semblent pas nous toucher directement, localement l’épuisement des ressources est déjà notable et la préservation du 22 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 capital agricole ne peut passer que par une volonté politique forte. Les conséquences de la crise des filières agricoles ne devraient pas se traduire par un droit à urbaniser les terres délaissées ! Celles-ci pourraient, un jour prochain, accueillir à nouveau des cultures. Pour aider aux choix politiques, des chercheurs ont mis au point des outils très performants pour éclairer les élus sur les options d’urbanisation des territoires, en proposant une connaissance précise des potentialités des sols**. Mais les choix urbanistiques ne sont pas seuls en cause, ils sont le reflet des sollicitations des sociétés. Exprimant toujours un goût prononcé pour les nappes de lotissements qui consomment souvent les terres les plus fertiles, les citoyens ont aussi leur part de responsabilité. Il est parfois bon de retrouver les fondamentaux : réserver les bons sols aux cultures et bâtir sur les terres pauvres ou incultivables. Tous les villages et hameaux anciens de nos contrées en sont l’illustration. Ici Vieussan (34) s’adosse contre le versant sud d’un coteau qui le protège des vents froids et profite d’un ensoleillement optimal alors que les cultures s’étendent dans la plaine. DR Combien adhèrent toujours au modèle idéalisé de la villa au milieu de la parcelle ? Aujourd’hui, le prix du carburant, la durée des déplacements et bien d’autres effets négatifs révèlent un piège grave qui s’amplifie chaque jour. En réaction, mais assez récemment, d’autres modes d’habiter sont explorés et expérimentés, un urbanisme aux espaces publics généreux, des petits collectifs financièrement abordables, des habitats participatifs, des compositions de quartiers offrant des possibilités de partage et de convivialité, les écosystèmes respectés et, bien sûr, des espaces agricoles préservés et valorisés. L’habitat méditerranéen, dans toutes ses composantes revues à l’aune des progrès technologiques, pourrait ainsi se renouveler, portant toujours les vertus sociales et climatiques dont il est pétri. Michèle Bouis, architecte-urbaniste, CAUE de l’Hérault * Au dernier recensement, la population du Languedoc-Roussillon atteignait 2,6 millions d’habitants, elle affiche la croissance la plus élevée de France. L’Hérault connaît la plus forte augmentation avec 5% de hausse en 10 ans (Source Insee). ** Contacts : Service Régional des Territoires et du Développement Rural, 04 67 10 18 91 Association Climatique de l’Hérault (ACH), 04 67 04 03 20 - www.ach34.fr Pour en savoir plus Les carnets Habiter sans s’étaler du CAUE de l’Hérault téléchargeables sur le site : www.caue-lr.org, rubrique documentation. Carnet 1 : « L’habitat individuel autrement – Pour une maîtrise du développement urbain dans l’Hérault » Carnet 2 : « Les lotissements résidentiels – Pour une composition urbaine et paysagère de qualité dans l’Hérault » Carnet 3 : « L’habitat individuel à qualité environnementale en Méditerranée – Pour une construction bioclimatique et innovante dans l’Hérault » PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 23 Zoom | Aude Sur le Canal du Midi Embarquez sur la péniche Carabosse «T enez-vous prêts les enfants… Tous sur bâbord. Chacun tient son morceau de pain ? Alors, à trois, visez bien la bouche de l’ermite. » Et c’est ainsi que les enfants embarqués à bord de la péniche Carabosse reconstituent une scène de légende, sorte de conjuration du mauvais sort pratiqué par les mariniers d’antan quand ils franchissaient le tunnel du Malpas. Récit d’une immersion peu commune... Des classes primaires nombreuses à bord au printemps, des groupes de jeunes en été : tous se familiarisent avec cet environnement si particulier offert par le Canal du Midi. Rencontres au tunnel du Malpas, à Capestang, à Sallèles d’Aude, au Somail, ani- 24 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 mations mises en place par des structures locales apportent tout un savoir au sujet du Canal du Midi. On visite le patrimoine historique proche du canal : les villes, les villages, les sites archéologiques. On parcourt le patrimoine naturel traversé par le canal : le milieu maritime, les fleuves, les étangs, la lagune, la sansouïre, découvrant ainsi au passage l’importance de l’eau et de sa préservation. On découvre la culture de la vigne, les vergers, la garrigue et récemment les céréales, la faune et la flore tellement riches en ces lieux. Ainsi se révèle peu à peu le canal de Riquet dans toute sa splendeur, et aussi, aujourd’hui encore, le travail des hommes qui l’entretiennent pour permettre une navigation harmonieuse et sans dan- ger. Le jeune public s’approche, jour après jour, de cet ouvrage exceptionnel. Sous des dizaines de regards émerveillés défilent les ouvrages d’art. La voie d’eau « royale » dévoile ses secrets et répond à tous les « pourquoi » des enfants. Souvenirs inoubliables Pour cette découverte en « immersion », le meilleur outil est la péniche elle-même, aménagée pour la circonstance. Les jeunes navigateurs vont monter à bord et y vivre durant une semaine. Ici, vie collective intensive, temps d’écoute et de travail vont alterner avec les moments de jeux à terre. Réflexion et discussion à bord sont par ailleurs À bord de la péniche Carabosse ou à terre, les enfants découvrent le patrimoine culturel et naturel du Canal du Midi (DR) suivies de visites et de rencontres à terre. Le bruit du moteur le matin donne le signal : on va larguer les amarres. L’équipage du bord a à cœur de communiquer et d’expliquer le déroulement de la journée à venir. Cette itinérance quotidienne, la lenteur du déplacement, les silences de la nuit et cette vie collective laisseront à la fin de l’expédition des souvenirs forts dans la mémoire des enfants et de leurs professeurs. L’avis d’un professeur « Ce grand bateau, par sa capacité à accueillir un groupe d’enfants et l’enseignant, met d’emblée l’accent sur des valeurs de plus en plus pertinentes de nos jours : partage, économie, respect d’autrui, autant de bases humaines de l’écocitoyenneté. Toute l’année, nous préparons la classe pour ce moment précis, tout y est discuté : où, quand, comment, avec qui, pourquoi… Les parents soutiennent le projet et une fois les autorisations acquises, arrive enfin le jour J ! “ C’est grand… C’est petit… On n’y rentrera jamais tous…, c’est comme dans une vraie maison… ” Il faut voir les expressions des enfants lors du premier contact avec la péniche à quai. Ensuite, tout ce petit monde monte à bord et cela va très vite. En quelques heures les mesures de prudence et de sécurité sont prises, les repères aussi. On peut commencer à vivre un temps d’exception. » w C de la pénic arte d’identité he Carabosse mètres de Normandie, 30 en n io ct tru ns 1934 : Date de co e. larg dans les long, 5 mètres de diverses jusque s se di an ch ar m s A transporté de . Toulouse à Sète tuels et de 70 19 années s propriétaires ac le r pa e ch ni pé la ouverte des 1978 : Achat de s éclusiers. Déc le , rs ie in ar m s le rencontres avec du Midi. al an aménageC du 240 km de la péniche et at ét en e is m teau 1983 : Grande re s groupes à bord en tant que « ba de ir ment pour recevo ur 30 personnes. ne de l’huà passagers » po Midi au Patrimoi du al an C du t 1996 : Classemen niche Caramanité l’association pé s, an 30 t tô en s découvrir 2013 : Depuis bi enfants et adulte e èn m em ge pa ui bosse et son éq nes. d’histoires humai s he ric ux ea des Associagère la péniche. se os ab ar C e ch ni n nationale, L’association pé rément Éducatio ag un nu te ob a européen lui tion loi 1901, elle communautaire is rm pe le et t compte, à Jeunesse et spor passagers. Elle s de r rte po ns , PSC1, surpermettant de tra és, BAFA, BAFD ôm pl di s, rié la de bateau à l’année, trois sa at de conduite fic rti ce et de na veillant de baig passagers. PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 25 Publi-rédactionnel Ils ont du caractère, ces villages ! C onjuguer patrimoine historique et séjour touristique dans de jolis villages de moins de 2000 habitants, c’est un devoir bien agréable quand on traverse le département du Gard. Zoom aujourd’hui sur le label « Village de Caractère » mis en place par le Conseil général avec le soutien de la région Languedoc-Roussillon pour valoriser les villages typiques de l’arrière-pays : Barjac, Lussan et Vézénobres sont les pionniers de cette démarche exemplaire témoignant des efforts entrepris en faveur du patrimoine et de l’accueil touristique dans des contextes souvent complexes liés au cadre de vie, à l’urbanisme, à l’économie et au développement durable. À Lussan, allez voir son rempart et son château médiéval en mettant vos pas dans ceux de la famille Gide. Continuez par Vézénobres, magnifiquement perché au dessus de l’ancienne voie romaine de la Régordane. Découvrez Barjac, belle cité « Renaissance » qui signe une histoire forte insoupçonnée. Outre les aménagements effectués sur le circuit de découverte intra muros avec quelques requalifications de places, rues et aires de vie, les villages se dotent progressivement d’une signalétique d’interprétation patrimoniale et de dépliants de visite tout en proposant de plus en plus régulièrement des visites guidées ainsi que des manifestations en lien avec l’identité culturelle du village. Ces villages ont une âme et y tiennent ! Faire goûter la saveur du patrimoine, mieux accueillir le visiteur, favoriser la découverte des richesses alentour, impulser la montée en gamme des prestations offertes sur place, ceci sans trahir la vie authentique du village, est un souci partagé également par l’Association des Plus Beaux Villages de France. C’est pourquoi les promoteurs des deux labels, accompagnés par le secteur Études du Passe Muraille et DVT Conseil, se mobilisent en ce moment en région pour capitaliser les acquis en faveur de la notoriété de la destination touristique Languedoc-Roussillon. Renseignements Agence de Développement Touristique du Gard Sabine Sutour [email protected] www.tourismegard.com De haut en bas : Lussan, Château-Mairie ; Barjac, chapelle des Capucins ; Vézénobres, verger et château Girard. Mon métier | Lissier © René Lechon À la Manufacture de Lodève © René Lechon Donner « son âme » à un tapis U Comment n nouveau tapis vient d’être mis en place sur l’un des grands métiers à tisser de la Savonnerie à Lodève : « C’est toujours un événement, commente Christophe Péllissier, responsable de l’atelier et lissier lui-même. Tout comme, à l’autre bout, la “tombée d’un tapis”, célébrée toujours avec faste. » Il faut en effet plusieurs années pour confectionner une de ces œuvres qui iront embellir les palais de la République, de l’Élysée aux salons des préfectures. À Lodève, l’atelier relève de l’administration générale du Mobilier national et des manufactures des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie, elle-même rattachée depuis 1966 au ministère de la Culture et de la Communication. Au sein de ces prestigieuses institutions, l’atelier possède une histoire unique. Unique parce qu’il est le seul à travailler avec la technique dite de la Savonnerie, en référence au lieu créé par Louis XIII près d’une ancienne usine à savons. Unique aussi par son histoire. En septembre 1964, il accueille en effet une soixantaine de femmes de harkis rapatriées d’Algérie. Aujourd’hui, seules quatre lissières ont pu bénéficier du recrutement familial. Désormais, pour intégrer l’établissement, il faut suivre une formation à Paris au sein de la Manufacture des Gobelins (voir encadré). « Notre métier est aujourd’hui plus complexe, raconte Christophe Péllissier. Certes, nous travaillons la laine, mais nous interprétons en même temps l’œuvre d’un grand artiste avec lequel nous avons échangé, dans un jeu d’aller-retour sur la future œuvre inspirée de son dessin initial. Ces dernières années, nous avons ainsi collaboré avec François Morellet, Nathalie Junaud-Ponsard, Matali Crasset ou encore le coréen Ung No Lee… » Quatre ans sur un tapis Ensuite le lissier s’embarque dans un long voyage : on peut rester jusqu’à quatre ans sur un tapis ! Il faut donc tout prévoir pour l’ « itinéraire » : les kilos de laine - 127 pour le dernier tapis -, les broches, le ciseau courbe, le tranche-fil. Il importe de bien choisir le métier le mieux adapté et l’équipe (deux, trois ou quatre lissiers) engagée sur le projet. « Ils auront l’ouvrage en charge, reprend le responsable de l’atelier, chacun sur sa partie et en même temps, en pleine harmonie. Il faut être d’accord sur ses tâches respectives. Pas toujours le ciel bleu entre nous, bien sûr… mais quand il y a incompréhension, on parle et le travail repart. » Avec son œil averti, le chef d’atelier remarque immédiatement si tel tapis « tourne dans le bon sens ou non ». Car on évoque ici « l’âme d’un tapis », c’est-à-dire cette touche particulière où l’artiste et les lissiers ont ensemble mené à terme une œuvre d’art. Ceux qui viendront les admirer, ou ceux qui vivront « avec » lui, doivent le ressentir au premier coup d’oeil. devenir lissier ? Apprendre le nœud turc et toute la variété des points du tissage, maîtriser les diverses opérations : tasser, démêler, tondre les extrémités. Pour devenir lissier (on écrit aussi licier), il faut bien sûr connaître chacune des étapes du travail de lisse. Pour les tapis du quotidien, on fait appel aujourd’hui à des machines. Pour ceux du Mobilier national, il faut obligatoirement suivre une formation de quatre ans à Paris, à la Manufacture des Gobelins, précisément. L’administration recrute en ce moment des élèves âgés de 16 à 23 ans. En quatre ans, ils devront acquérir la maîtrise technique et artistique et pourront exercer les métiers de lissier et restaurateur de tapis et tapisseries. Inscription aux tests de sélection avant la mi-juin précédant la rentrée scolaire. Renseignements : 01 44 08 52 06 PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 27 Lire, regarder & écouter L’éloge du thé et du vin : carnets de voyage, catalogue de l’exposition, Éd. Presses pierresvives, 20 €. Le bâtiment pierresvives, Cité des savoirs et du sport pour tous, a été inauguré à Montpellier en septembre dernier. À cette occasion, les Archives départementales de l’Hérault, installées dans ce nouveau bâtiment, ont présenté l’exposition « L’éloge du thé et du vin : carnets de voyage ». Le voyage et les liens entre la France et la Chine sont au cœur de ce catalogue. Tout d’abord l’aventure de Jules Itier, douanier daguerréotypiste dans la Chine des Qing. De 1843 à 1846, il photographie pour la première fois paysages, bâtiments et populations de Macao et de Canton, tel un vrai photo-reporter. En écho contemporain, la photographe française Sylvie Goussopoulos a parcouru les plantations de thé de la province du Fujian, tandis que le photographe chinois Chen Shi Zhe a découvert l’univers viticole de l’Hérault. Vous retrouverez dans ce catalogue les regards croisés de ces trois artistes autour du vin et du thé, deux boissons ancestrales synonymes de partage. L’ouvrage est en vente à l’accueil de pierresvives, contact : 04 67 67 30 00 www.pierresvives.herault.fr Le petit dico du Pays d’Oc, Joanda, Éd. Trabucaire, 17 €. « Je dirais que la table mesure deux mètres, a bisto de nas », « C’est un gentil pitchou », « Il y a quelque chose qui me tarabuste », « Mon voisin fait du 28 / HIVER 2012-2013 PATRIMOINES EN RéGIONEN/ 18 PATRIMOINES RéGION / 15 / HIVER 2011-2012 en terre d’Aude boucan »… On ne compte plus les termes occitans employés dans la parole de tous les jours. Joanda, acteur du mouvement culturel occitan et auteurcompositeur-interprète, mais aussi chroniqueur et professeur de langue occitane, nous livre quelques unes de ces expressions hautes en couleurs dans ce « glossaire du parlé en Pays d’Oc ». Plus précisément, ce recueil rassemble une série de chroniques de l’auteur, diffusées en radio sur France Bleu et publiées dans l’hebdomadaire La Gazette de Montpellier. www.trabucaire.com Balades et légendes en terre d’Aude, textes Véronique Barrau, illustrations Philippe Archer, Éditions du Cabardès, 13,5 €. Permettre à toute la famille s& e d de découvrir la la a B s ende Légrr e richesse d’un e d’Aud te en département sous forme ludique, les Éditions du Cabardès nous y ont habitués. Cet ouvrage ne déroge pas à la règle et nous mène dans tous les coins de l’Aude, de la Haute-Vallée au Lauragais, en passant pas le Carcassonnais, les Corbières-Minervois et le Narbonnais. Chemin faisant, les légendes audoises et les illustrations originales nous content l’histoire du pays, présentant de curieux personnages comme l’abbé Saunière et son fameux trésor de Rennesle-Château, la grenouille de bénitier de Narbonne, Dame Carcas ou encore l’abbé de Cucugnan. www.editions-du-cabardes.fr Vér oniq ue Phil ippe Bar rau • Arc her des Balades & Légen Quand naissait le Train Jaune, tome 1 Jean-Louis Blanchon et Pierre Cazenove, Éd. Talaia, 20 €. En 1974, JeanLouis Blanchon, un instituteur de Palau-de-Cerdagne, passionné par l’histoire de la Cerdagne et la réalisation de la ligne du Train Jaune, se lance le défi de rassembler des témoignages et anecdotes, des articles de presse et des plans relatifs à la ligne électrique de Cerdagne. Dans sa lignée, Pierre Cazenove décide d’approfondir le sujet et récolte de nombreux documents iconographiques inédits. Le fruit du travail de ces deux auteurs donne vie à cet ouvrage, premier de la collection « Les Carnets du Train Jaune » qui comportera quatre tomes. À paraître : tome 2 La construction du pont Gisclard ; tome 3 Les Bouillouses : l’hydroélectricité et le génie des hommes. www.editions-talaia.com L’Univers des cartes. La carte et le cartographe, Jean-Paul Bord, Éd. Belin, 25 €. Note de l’éditeur : Qu’est-ce qu’une carte aujourd’hui ? Révolutionnée par la mise en ligne de l’imagerie en 2005 avec Google Earth, la carte ne perd-elle pas le Nord ? Cet ouvrage se propose d’apporter quelques pistes pour s’y retrouver. Son auteur Jean-Paul Bord est professeur à l’Université Paul-Valéry Montpellier III, géographe et cartographe, responsable du master « Géomatique », membre de l’UMR GRED, « Gouvernance, Risque, Environnement, Développement ». www.editions-belin.com Livre CD La Canso, Chanson de la Croisade contre les Albigeois ou Cathares (1208-1219), Éd. Christian Salès, 29 €. Cette nouvelle publication, à la fois œuvre littéraire, document historique, livre d’art et création musicale, promet une belle immersion au cœur du Moyen Âge. Elle présente des textes originaux de La Canso, chef d’œuvre de la littérature médiévale occitane, annotés par Anne Brenon (avec traduction en français et en anglais). Le texte est accompagné d’illustrations du XIIIe siècle et d’une partition musicale originale, la symphonie occitane Paratge, spécialement composée pour l’occasion par Christian Salès qui s’est entouré de l’Orchestre national de Budapest pour l’enregistrement. www.ocmusic.org Revue Ruixat, revue transdisciplinaire en sciences sociales, ouvrage collectif sous la direction de Dominique Sistach, Éd. Trabucaire, 13 €. On ne peut que se réjouir de la naissance d’un nouveau magazine dans notre région. Et voilà justement que paraît le premier numéro de Ruixat, revue créée par l’éditeur catalan Trabucaire. L’ambition est claire, décrypter les enjeux sociaux et penser la Cité. Les thèmes abordés ? Social, mixité, travail, identités, frontière, immigration, économie, etc. Cette première édition se centre sur « Perpignan vu d’ici et d’ailleurs » avec les contributions de plusieurs auteurs dont Jean-Paul Carrère « Intervention sociale dans les quartiers populaires de Perpignan 1972-2012 : un regard d’acteur », Jean-Luc Paznek « Déclin de la mixité sociale dans les établissements scolaires perpignanais » ou encore David Giband « Dépasser la frontière ou quand l’espace frontalier se rêve territoire ». Au total, neuf articles pour centtrente-neuf pages de questionnements passionnants. www.trabucaire.com La collection « DUO » s’enrichit La Direction Régionale des Affaires Culturelles du Languedoc-Roussillon (Conservation régionale des Monuments Historiques) est très active en matière d’édition et a cette année étoffé sa collection « DUO » de cinq nouveaux ouvrages : . Les monuments historiques et la pierre . La chaise à porteurs du château de Marsillargues . Le campus de la faculté des Lettres et Sciences humaines de Montpellier . Armand Pellier, architecte, de la pierre du Pont du Gard à la modernité . La cathédrale Saint-Michel de Carcassonne Tous les titres de la collection « Duo » sont disponibles gratuitement à l’accueil de la DRAC du Languedoc– Roussillon, 5 rue de la salle l’Évêque à Montpellier. Demandes par téléphone au 04 67 02 35 29. " commandez nos anciens numéros ! Vous êtes nombreux à suivre avec intérêt la revue Patrimoines en région, mais peut-être vous manque t-il certains numéros ? Pour commander les anciens numéros, rien de plus simple : complétez le bulletin ci-dessous ! isé épu p #0 p#1 p#3 p#2 p#5 p #4 isé épu é uis ép p#6 p #7 p#8 p#9 p # 11 p # 10 isé épu p # 12 p # 13 p # 14 p # 15 p # 16 p # 17 Une participation financière vous sera demandée pour les frais de traitement et d’expédition Je commande les anciens numéros de Patrimoines en région Nombre de numéros commandés : ………………………………………… X 3 € = …………………………… € Cochez ci-dessus les numéros que vous souhaitez recevoir. Nom : ...................................................................................... Prénom : ................................................................................ Nom de la structure : ...................................................................................................................................................................... Adresse : ......................................................................................................................................................................................... Code postal : ........................................... Ville : ................................................................................................................ Tél. : ....................................................... E-mail : ............................................................................................................ Joindre à ce bulletin un chèque établi à l’ordre de : Association Le Passe Muraille Bon de commande à envoyer à : Association Le Passe Muraille - 510A avenue de Barcelone « Le Jupiter », 34080 Montpellier 29 Vie du Carrefour des Patrimoines Rencontres d’acteurs N DR ous vous proposons de démarrer l’année 2013 par une rencontre d’acteurs du Carrefour des Patrimoines dès le mois de février. Celle-ci sera accueillie par l’équipe des Archives départementales de l’Hérault dans leurs nouveaux locaux au cœur de pierresvives, à Montpellier. En relation avec le dossier central de ce numéro de Patrimoines en région, la journée sera consacrée aux enrichissements migratoires en Languedoc-Roussillon. Elle permettra aux acteurs du terrain, professionnels ou bénévoles, animateurs, éducateurs, enseignants, guides et administrateurs de se retrouver autour d’animations ou de visites le matin, et d’ateliers de réflexion l’après-midi. La participation à cette journée est gratuite. Dès le début du mois de janvier, vous trouverez la date et le programme complet de ces rencontres d’acteurs sur le site www.carrefour-des-patrimoines.net Pour toute information complémentaire, vous pouvez nous contacter par mail : [email protected] Elisabeth Le Bris, CEMEA Languedoc-Roussillon Photo souvenir V DR ous aurez certainement reconnu sur la photo Zaha Hadid, la célèbre architecte irako-britannique, qui a donné vie au non moins célèbre bâtiment pierresvives, qui abrite depuis le mois de septembre les Archives départementales de l’Hérault, la médiathèque départementale et Hérault sport. C’est lors de l’inauguration de la Cité des savoirs et du sport pour tous que notre rédacteur en chef René Lechon a pu rencontrer Zaha Hadid, et lui présenter la revue Patrimoines en région, comme en témoigne cette photo prise le 13 septembre 2012. Courrier des lecteurs Cette rubrique est une tribune ouverte à vos avis, recherches et questionnements autour des patrimoines, qu’ils soient culturels, naturels ou immatériels. Merci aux lecteurs qui nous ont écrit, avec l’envie d’apprendre et d’échanger. Voici une petite sélection des courriers reçus récemment à la rédaction : Les collégiens d’aujourd’hui connaissent-ils Bobby Lapointe ? J’ai apprécié votre article dans le numéro 17 sur Bobby Lapointe. Je me suis cependant demandé si des jeunes de 14-15 ans connaissaient l’humoriste... Peut-être votre article aurait-il dû être complété par un petit historique reprenant deux ou trois détails de la vie de l’acteur-chanteur originaire de Pézenas. Merci. Une lectrice de Pézenas Plus de revues ! Nous recevons la revue Patrimoines en région et la découvrons à chaque fois avec plaisir. Nous serions très contents d’en recevoir davantage car elle rencontre un vif succès auprès des publics. Vanessa E. (Musée de la Maison romane de Saint-Gilles) Patrimoines en région est vraiment très intéressante et attractive, les exemplaires que nous recevons partent vite, je veux bien en recevoir un peu plus ! Maïté W. (Office de tourisme Cévennes-Garrigue, Saint-Hippolyte-du-Fort) 30 PATRIMOINES AUTOMNE 2012 PATRIMOINES EN EN RéGION RéGION // 17 18 // HIVER 2012-2013 La rédaction : De nombreuses structures recevant Patrimoines en région nous ont communiqué leur envie de diffuser plus largement cette revue gratuite et d’utilité publique. Nous les remercions vivement de la faire connaître à toujours plus de lecteurs et c’est avec plaisir que nous avons répondu à leurs demandes. Si vous souhaitez vous aussi devenir lieu de dépôt, n’hésitez pas à nous contacter. Nous répondrons au mieux à vos demandes, dans la limite des quantités disponibles. Envoyez-nous vos courriers pour le prochain numéro ! Patrimoines en région Courrier des lecteurs 510A avenue de Barcelone « Le Jupiter » 34080 Montpellier [email protected] www.feSTATrAIL.COm - LO T N I A S PIC UP 120km 4km2 17 . 18 . 19 mai 2013 TOUr DU PIC SAINT-LOUP 875m D+/- 1km7 TOUr DU PIC SAINT-LOUP by night 875m D+/- 1km2 CéCéLIeNNe (course féminine) 300m D+/- e . 8 km 1&km3 u mArATHON De L’HOrTUS 1800m D+/- (ind. ou relais 2 coureurs) 1km7 by night SAINT-mATHIeU-De-TrévIerS HérAULT ULTrA DrAILLe 6000m D+/- feSTA PArADe (course déguisée) PITCHOU’PIC (course enfant) PATRIMOINES EN RéGION / 18 / HIVER 2012-2013 31