« Man on High Heels », revolver et lingerie fine
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« Man on High Heels », revolver et lingerie fine
LE FIGARO mercredi 20 juillet 2016 CULTURE « Man on High Heels », revolver et lingerie fine Les autres films ■ « FARGO » (REPRISE), de Joel et Ethan Coen. 1 h 38 Ce film de 1996, qui ressort en salle cet été, n’a pas pris une ride. Il a même été décliné en série. Une merveille d’humour noir avec l’interprétation géniale de Frances McDormand. NATHALIE SIMON ■ CINÉMA À la frontière du mélodrame, le polar es mains sont des lames de couteau. Ou presque. Le policier Ji-wook est un puriste. Il dédaigne les armes à feu, préférant le corps-à-corps et les ustensiles de cuisine (baguettes, cure-dents…). Quand il s’invite au banquet d’un mafieux, il monte sur la table et pimente le dîner de quelques acrobaties violentes et spectaculaires. Une lame plantée dans le dos le fait à peine sourciller. De retour au commissariat, Ji-wook se fait un peu houspiller par son chef pour ses méthodes expéditives. Mais on sent surtout de l’admiration pour ce flic bardé de cicatrices. Un homme, un vrai. Les truands ne cachent pas non plus leur respect pour ce super-agent sans pitié. On est en terrain connu. Les codes du polar coréen sont respectés. Sauf, que d’habitude, la police, présentée comme ridicule et incompétente, n’est pas à la fête. Ji-wook n’est pas un enquêteur comme les autres. Au détour d’une conversation avec une femme médecin, on comprend qu’il suit un traitement hormonal. Les piqûres semblent sans effet. Sa pomme d’Adam et ses muscles MAJESTIC/VAZ PALMA/REZO sont toujours aussi saillants. Il faut envisager une opération chirurgicale. Le dialogue est enrobé de quelques notes de piano mélancoliques. Ji-wook veut changer de sexe. Le (sur)homme veut devenir une femme. Ses collègues ne donnent pas l’impression d’une grande ouverture d’esprit. Il n’a pas d’autre choix que de garder son secret pour lui en attendant de démissionner. Reconstitution minutieuse du camp allemand Colonia Dignidad au Chili, à la fois secte et centre de torture sous Pinochet. Avec Emma Watson et Daniel Brühl (lire nos éditions du 19 juillet). Scènes de combat virtuoses Le polar urbain prend des accents mélodramatiques. Un peu comme si Pedro Almodovar avait récupéré les rushes d’un film de Bong Joon-ho (Memories of Murder, The Host, Mother) ou de Na Hong-jin (The Chaser, The Murder et The Strangers) pour y glisser des sentiments et du rouge à lèvres. Jang Jin, dont aucun des films précédents n’a été distribué en France, transgresse les règles avec une fausse candeur formidable. Celles de la pureté du genre en mêlant revolvers et lingerie fine. Celles d’une société sudcoréenne machiste et intolérante. L’intrigue policière est ainsi trouée de flashback, retour nostalgique vers un passé ensoleillé, montrant le héros adolescent attendri par un camarade de classe. Le présent est plus sombre. Dans un Séoul noyé sous la pluie, Ji-wook soumet son ■ Ji-wook (Cha Seung-won) super-flic et transsexuel en puissance. corps à rude épreuve, affrontant des criminels le plus souvent armés de parapluie – des scènes de combat virtuoses, très graphiques, superbement chorégraphiées. Et comme dans tout mélodrame, il faut un amour contrarié. Une jeune femme tombe amoureuse de Ji-wook au moment où le transsexuel en puissance trouve le courage de surmonter sa culpabilité, sa haine de soi. Il chausse des talons hauts, enfile une robe, pousse timidement la porte d’une boîte trans. L’un de ses collègues finira par percer son secret : « Tu n’es pas “l’homme qui valait ZOOTROPE FILMS 3 milliards”, tu es “Super Jaimie” ! » Après The Strangers et avant Dernier Train pour Busan, Man on High Heels, grand prix et prix de la critique au dernier Festival international du film policier de Beaune, confirme les ressources inépuisables du cinéma coréen. ■ « Man on High Heels » Polar de Jang Jin Avec Cha Seung-won Durée 2 h 05 ■ L’avis du Figaro : ○○○¡ FESTIVAL « Le Radeau de la Méduse » et « Place des héros » offrent à Avignon du théâtre pur. CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE/FESTIVAL D’AVIGNON ENVOYÉE SPÉCIALE À AVIGNON D eux pièces de très grands écrivains de langue allemande. Le Radeau de la Méduse de Georg Kaiser (1878-1945), Place des héros de Thomas Bernhard (1931-1989). Deux productions extraordinairement puissantes venues d’horizons différents mais qui frappent par leur cohérence, l’art profond qu’elles reflètent. Bref, du très grand théâtre comme Avignon nous en offre cet été. Le Radeau de la Méduse est une pièce méconnue. Kaiser, désigné comme « dégénéré » par les nazis, avait été frappé par un fait divers de la Deuxième Guerre mondiale. Le torpillage par un sous-marin allemand d’un navire transportant des enfants jusqu’aux États-Unis. Trois ans durant, il compose ce drame très étrange. Treize enfants sont sur une embarcation de fortune. De la solidarité au Le Radeau de la Méduse, pièce méconnue de Kaiser qui frappe par sa cohérence. surgissement de la cruauté, de l’espérance au désespoir, le cœur de l’homme, aussi jeune fût-il, est rapidement gagné par la folie, ici soutenue par des interpré- Mingun MANDALAY Monywa Yandabo BAGAN Croisière réservée aux lecteurs du Figaro À l’autre bout du spectre, le maître du théâtre européen, le Polonais Krystian Lupa, qui avait enthousiasmé le festival 2015 avec Des arbres à abattre, de Thomas ■ L’avis du Figaro : ○○¡¡ N. S. Bernhard, revient à son auteur de prédilection. Il a dirigé des comédiens lituaniens dans Place des héros. Trois parties, de très longs monologues, mais une pièce dans laquelle chacun des dix personnages existe fortement. Décors à la fois monumentaux et légers, jeu dense et subtil, très bons surtitrages (traduction de Claude Porcell), tout subjugue dans cette mise en scène stricte, précise, lumineuse. C’est, en 1988, l’ultime pièce de Bernhard. On est d’abord dans l’appartement d’un grand professeur qui devait quitter Vienne et la place des Héros pour Oxford. Le piano, les meubles sont déjà partis. Mais il s’est jeté par la fenêtre. C’est le jour de son enterrement. Sa femme, « Madame », n’apparaît qu’à la fin : elle entend toujours des clameurs effrayantes venues de cette place, Heldenplatz, qui fut celle de l’Anschluss, l’annexion de l’Autriche au IIIe Reich, le 15 mars 1938. Mais c’est d’aujourd’hui que l’on nous parle. De haine, de racisme, de vies perdues, malgré l’amour de la littérature… (Vedène jusqu’au 24 juillet). ■ de James DeMonaco. 1 h 50 Morts violentes, rues jonchées de cadavres sanguinolents… La « purge » annuelle revient, et cette fois une sénatrice blonde comme Hillary Clinton est sauvée par un Noir et un Mexicain. Après la tuerie de Nice, des images plus traumatiques que cathartiques. ■ L’avis du Figaro : ○○¡¡ É. S. ■ « INDEPENDENCE DAY : RESURGENCE », de Roland Emmerich. 2 h 01 On prend les mêmes (sauf Will Smith) et on recommence dans ce Top Gun qui oppose des pilotes américains et des aliens. Seule nouveauté, un chef de guerre africain qui trucide les bestioles à la machette. É. S. ■ L’avis du Figaro : ○¡¡¡ 12 JOURS / 11 NUITS à bord du R/V Paukan Lac Inle à partir de 4 985 €/pers. * Golfe du Bengale Mer d‘Andaman Mise en scène précise ■ « PARENTHÈSE », de Bernard Tanguy. 1 h 34 Amis de longue date, Raphaël (Vincent Winterhalter), Patrick (Éric Viellard) et Alain (Gilles Gaston-Dreyfus) s’offrent une virée en voilier avec trois jeunes filles. Pour son premier long-métrage, Bernard Tanguy s’interroge sur le passage de la cinquantaine, le couple et le sens de la vie. Si le rythme est un peu inégal, le ton est juste, tendre. Et la lumière des îles du Var magnifique. Un genre de Cœur des hommes dans un bateau. BIRMANIE (Myanmar) Heho MontPopa tations religieuses délirantes. Thomas Jolly dirige la promotion sortante de l’École du TNS. À tous les postes – jeu, décor, costumes, musique, lumières –, des élèves. Un travail d’une rigueur et d’une richesse profondes qui exige de la plupart de ces jeunes beaucoup d’abnégation car ils sont peu à avoir des rôles saillants. Disciplinés, chantant ensemble magnifiquement, littéralement embarqués - le décor, une grosse barque, la brume, la haute mer, tout est représenté magiquement -, ils donnent une idée de l’excellence de leur établissement. Et Thomas Jolly, s’appuyant sur la traduction d’Huguette et de René Radrizzani, prouve qu’il est un très grand metteur en scène. (Gymnase du lycée Saint-Joseph jusqu’à aujourd’hui, reprise à Strasbourg, du 1er au 15 juin 2017 et à l’Odéon, du 15 au 30 juin 2017). É. S. ■ « AMERICAN NIGHTMARE 3 : ELECTIONS », Jolly et Lupa, le temps des maîtres ARMELLE HÉLIOT [email protected] L’avis du Figaro : ○○○¡ 20TH CENTURY FOX S L’avis du Figaro : ○○○○ ■ « COLONIA », de Florian Gallenberger. 1 h 50 sud-coréen de Jang Jin est une réussite. ÉTIENNE SORIN [email protected] 13 Rangoon RANGOON (Yangon) (Yangon) RENSEIGNEMENTS ET RÉSERVATION au 01 83 96 83 45 du lundi au vendredi de 9 heures à 18 heures www.lefigaro.fr/birmanie Précisez le code : FIGBIRM16 CROISIÈRE AU COEUR DE LA BIRMANIE DU 12 AU 23 NOVEMBRE 2016 e e e e e e e e ee e e e e e A e e