Le public ne sait pas à quel point je suis réservé

Transcription

Le public ne sait pas à quel point je suis réservé
t moi qui pose
C’esles
questions!
Je connais Réal depuis 24 ans, et nous avons
tout partagé, excepté nos lits et nos blondes!
Sérieusement, imaginez-vous en train d’interviewer
une personne que vous considérez comme votre
propre frère. Doutes, hésitations… Puis soudain,
l’évidence: comment refuser l’occasion de connaître
davantage quelqu’un qu’on estime et qui nous
fascine autant?
PAR STÉPHANE LEFEBVRE / PHOTOS: PHILIPPE CASGRAIN
PROPOS RECUEILLIS PAR CAROLYN RICHARD
M
a rigueur professionnelle me dictait de préparer mes questions avant
d’arriver au lieu de
notre rencontre, le Café Dépôt de
Rosemère. Heureusement, je me
suis ravisé: quand on a la chance
d’interviewer un as de l’impro, aussi
bien laisser venir les questions…
spontanément!
Personnellement, j’aimerais mieux
passer inaperçu partout où je vais.
SL I Je sais bien des choses sur
toi et je me demande jusqu’à
quel point je peux les dévoiler.
RB I Justement, fais attention
parce que je vais demander à
Samedi Magazine de t’interviewer
à mon tour pour me venger. (Rires)
Ça se joue à deux, Stéphane!
Stéphane Lefebvre
STÉPHANE LEFEBVRE I Réal,
quelles questions attends-tu
de moi?
RÉAL BÉLAND I Je n’en ai vraiment
aucune idée, et ça me fait peur!
(Rires) Mais comme tu me connais
bien et que tu sais que je suis la personne qui déteste le plus faire des
entrevues, ce sont des questions
que je ne me suis pas fait poser
souvent.
SL I (Rires) Bon, ça commence
bien! Réal, qu’est-ce que les
gens ne savent pas de toi?
RB I Je pense que le public ne sait
pas à quel point je suis réservé,
voire sauvage. Je trouve difficile de
composer avec mon métier, qui est
de créer et de divertir. Et l’autre
facette, celle d’être connu, je
n’aime pas ça.
SL I Et pourtant, les deux sont
connexes...
RB I Je sais, la notoriété, c’est le prix
à payer pour faire ce que j’aime.
SL I (Rires) C’est beau, je vais
faire attention. Je crois que tu
fais partie des 100 plus grands
fans du Canadien de Montréal.
Je me trompe?
RB I Ah! Je suis dans le top 50 des
fans du Canadien. Je ne suis pas du
genre collectionneur, mais je connais absolument tout sur les vies
professionnelles des athlètes du
tricolore.
SL I Es-tu amateur des
tribunes téléphoniques sur
le sujet?
RB I Oui, j’écoute de deux à trois
heures de tribunes téléphoniques
par jour.
SL I Pourquoi?
RB I Parce que j’aurais aimé faire
carrière dans le hockey, mais je
n’ai pas une bonne vision. Je vois
seulement à 10 % de la capacité
de mon œil gauche. J’aurais probablement été gardien de but.
SL I Malgré ça, tu as quand
même joué plusieurs années
au hockey.
RB I Oui, j’ai été gardien de but
jusqu’à l’âge de 17 ans. J’ai arrêté
parce que je savais que je n’avais
pas d’avenir dans ce métier à cause
de mon œil.
SL I Je me souviens qu’il y a
deux ans, tu as défendu Alex
Kovalev en ondes.
RB I Absolument. Il avait une mauvaise saison; tout le monde parlait
de l’échanger et ça brassait pas
mal. J’ai téléphoné à Ron Fournier
et je suis allé à son émission pour
défendre Alex pendant trois
SL I Dans le futur?
RB I Je te donne un exemple. Dans
un mois, je pars en vacances avec
ma famille et j’aimerais être tout
de suite là.
SL I Je comprends. On
travaille ensemble depuis
plusieurs années;
qu’aimerais-tu qu’on
explore ensemble?
RB I Honnêtement, j’aimerais
travailler à un projet où l’on aurait
carte blanche. Une espèce de
Wayne’s World 2009.
SL I Et si tu avais écrit une
chanson populaire quétaine,
ce serait laquelle?
RB I (Éclat de rire) Probablement
Fidélité de Fidel Lachance. J’invite
tout le monde à aller voir ça sur
YouTube. (Réal se met à chanter de
façon douteuse.)
SL I Tu es actuellement en
train de te faire tatouer un
peu partout sur le corps.
Pourquoi?
RB I En fait, j’ai débuté avec un
à Réal Béland
“Le public ne sait pas à
quel point je suis réservé”
heures. Finalement, j’ai eu raison
de le défendre, parce que l’année
suivante, il a connu une saison
incroyable.
SL I Tu as certainement
trippé à jouer dans la série
Les Boys.
RB I Tripper, tu dis? J’ai capoté!
C’était tellement l’fun de faire ça.
SL I Quel rapport
entretiens-tu avec le temps?
RB I Avec le temps? C’est drôle, s’il
y a une chose que je ne suis pas
capable de faire, c’est de vivre le
moment présent. Depuis que mon
père est décédé, j’ai tendance à
vivre dans le passé parce que
j’aimerais qu’il soit encore là. Mais
je vis aussi dans le futur...
petit tatouage pour ma fille, Béatrice, qu’on est allé chercher en
Chine. Ça faisait longtemps que
j’avais envie de me faire tatouer et
là, j’en ai un peu partout, j’aime ça!
SL I Justement, pour bien des
gens, tu es un éternel ado.
Dirais-tu que tu entretiens
cette image? Je sais qu’à 14
ans, tu vivais presque une vie
d’adulte et aujourd’hui, ça
semble être le contraire…
RB I Non, je crois que je vis selon
mon âge. Il ne faut pas me confondre avec mes personnages.
Dans la vraie vie, j’ai trois enfants
et une blonde, et je ne sors
presque pas. J’ai vraiment une vie
tranquille.
¡
“Le plus
important,
c’est ma vie
de famille;
c’est ce qui
me rend
heureux”
SL I Que penses-tu de l’arrivée de
Barack Obama?
RB I Sérieusement, depuis le référendum
de 95, c’était la première fois que je m’intéressais à la politique. Je pense que
Barack Obama est très important pour
l’Amérique. Son attitude et l’image qu’il
projette sont inspirantes. Il ne fera peutêtre pas de grandes choses, mais le seul
fait qu’il soit là est un changement positif. Il est là pour rassurer les gens et faire
avancer les choses.
SL I Est-ce que tu t’intéresses
beaucoup à la politique?
RB I J’ai étudié en politique, mais je ne
crois pas à la politique du Québec ni à
celle du Canada. Je crois que la politique
d’ici n’est pas encore arrivée à notre
18 SAMEDI - 18 avril 2008
époque. Quand on regarde Internet et le
iPhone et que l’on compare avec ce qui se
passe au Parlement canadien, on se
croirait au Moyen-Âge.
SL I Es-tu optimiste quant à l’avenir
de notre planète?
RB I Malheureusement, non, surtout sur le
plan écologique. Je suis allé en Inde et j’ai
vu à quel point il n’y a aucun respect de l’écologie là-bas… Quand on pense que le
quart de la population de notre planète vit
dans ce pays, ce n’est pas encourageant.
SL I J’imagine que tu as vu toutes
sortes de choses là-bas?
RB I C’était incroyable! Chaque jour,
après le souper, les gens brûlent leurs
vidanges. Ça sent le feu de forêt partout.
Je me suis promené dans les villages.
C’est le chaos total.
SL I Réal, en terminant,
comment décrirais-tu ta
vie en ce moment?
RB I (Réal réfléchit avant de répondre.)
Honnêtement, je te dirais qu’artistiquement, je pense avoir fait le tour de ce que
je voulais faire. Je commence à trouver
difficile d’innover pour surprendre les
gens. D’un autre côté, ce qui est le plus
important, c’est ma vie de famille, c’est
ce qui me rend heureux.
Réal Béland sera au théâtre
St-Denis les 29 et 30 mai. Pour
toutes les dates de son spectacle,
Simplicité volontaire, visitez le:
www.realbeland.com