Exil de Soi

Transcription

Exil de Soi
Gimenez dans « Fluide Glacial »
Du déni des autres à l’exil de soi
Sans-abri d’ici et d’ailleurs
L. Thelen
Terrains en Belgique, en France et au portugal
SYNOPSIS DE LA PRESENTATION
1.
Bref historique du projet de recherche
2.
La question méthodologique
3.
Les terrains :
- Nanterre – l’institution totalitaire inassumée
- Lisbonne – la cloche plutôt que la honte
- Bruxelles – ne pas espérer pour ne pas désespérer
4.
Du déni des autres à…
5.
… L’exil de soi
6.
Quelques schémas assez obscurs
1. Bref historique de la recherche
1. A la base, un projet assez classique
2. Chercheur,stagiaire, volontaire : les premiers
terrains avec les sans-abri de long-terme
3. le sentiment d’incomplétude
4. La réponse : l’expérience incorporée
5. Problèmes éthiques de la recherche « en tant
que »
2. Question éthique
•
•
La question qui s’est vraiment
posée consiste à savoir si doit-on
délaisser tout un pan de
l’organisation sociale de notre
société sous le prétexte que l’on
ne saurait décemment l’étudier
en y déclinant notre véritable
identité ?
ASA versus AAA:
•
Despite the paramount importance of
consent, sociologists may seek
waivers of this standard when (1) the
research involves no more than
minimal risk for research participants,
and (2) the research could not
practicably be carried out were
informed consent to be required
•
Laud Humphreys, Philippe
Bourgois & Erving Goffman
3. Les terrains
 a. Nanterre ou l’institution totalitaire
imparfaite

L’abri de nuit de Nanterre : un exempletype d’une institution qui est censée
prendre en charge tous les pans de la vie
du sans-abri mais dont le rôle se confine,
dans les faits, à fournir logement et
nourriture.

Dans ce cadre, institution et rue se
confondent puisque l’angoisse et la
violence ne sont en rien atténués - au sein
du monde de la rue comme de celui de
l’abri - ce sont les deux facettes d’un
champ totalitaire qui s’impose avec
force aux personnes qui y sont plongées
de permanente manière.
3. Les terrains
•
b. Lisbonne ou la cloche plutôt
que la honte
•
Le sans-abrisme à Lisbonne se
caractérise par le fait que :
•
1. pour les personnes non-qualifiées –
les salaires sont très bas ;
2. L’exode rural est encore en cours
au Portugal ;
3. La politique sociale est largement
laissée aux associations caritatives
•
•
Cela conduit les personnes
précarisées à faire des choix
drastiques entre se loger et … le reste.
D’où le recours aux abris de nuit
d’urgence allié au refus de retourner
dans leur région d’origine
3. Les terrains
 c. Bruxelles ou ne pas espérer
pour éviter de désespérer
 En explorant les pratiques des
travailleurs de rue ainsi que de
diverses associations, il a été possible
de mettre au jour que :
 1. Les personnes les plus
désocialisées ne sont plus à même
d’aller vers les services à même de les
aider ;
 2. La stratégie de subsistance la plus
performante consiste à éviter autrui
 3. Dès lors, l’aide se doit aller à eux et
ce, sans aucun espoir préalable de
« réinsertion »
En effet, tout espoir serait rapidement
anéanti tant les rechutes sont
fréquentes et à répétition. La seule
manière pour les professionnels de
continuer à travailler est de ne pas
espérer…
La carrière du SDF
4. Le déni des autres
a.
L'inaffectivité
La survie et ce, dès l'enfance
La violence intra-familiale
La reproduction
Le foyer familial comme rempart
contre le sans-abrisme
b.
Humiliation
Le regard d’autrui
Les précautions oratoires
La combine institutionnalisée
Confisquer jusqu’à l’inaliénable :
l’attente
Le discours et la temporalité de la
combine comme implicites
conditionnels de l'assistance sociale
c.
Stratégie de survie : chacun pour soi
et tous contre tous
5. L’Exil de soi
a. Temporalités
b. Le souci de soi du sans-abri
oubli du corps et habitus dynamique
un habitus dynamique
c. Le darwinisme neuronal
le rapport au corps comme référence contextuelle
l’image du corps du sans-abri
d. Victor Turner ou la formation permanente du Soi
e. Habitus et cadre deux poles complémentaires
f. D’un cadre unilatéralisé à un habitus de survie
g. De la mort sociale à la mort ontologique
Page suivantes : processus de structuration de
l’expérience de la vie sociale en 7 points :
. chez la personne dite « normale »
. chez la personne sans-abri ou souffrant d’exil de
soi
PROCESSUS NORMAL DE SOCIALISATION: “DE L’INDIVIDU A LA PERSONNE”
7
SOI
1
6
Habitus
5
CC
PERCEPTIONS
4
3
CS
EMOTIONS
CE
C Sy
2
CADRE
INTERACTIONNEL
EC
GC
EC: Environnement cadré
CS: Contexte
PROCESSUS ANORMAL DE SOCIALISATION: “L’INDIVIDU DESOCIALISE”
L’équilibre du Soi - qui est
normalement assuré par le
processus de socialisation - est
mis en danger
SOI
7
1
6
5
PERCEPTIONS
a.
Par l’unicité du champ totalitaire
ainsi que par
b.
La perversion du souci de soi
chez le sans-abri
Proto-Soi
Habitus de survie dans
un champ totalitaire
EMOTIONS
Capital de
Survie
4
3
2
Unilatéralisation du
CADRE
INTERACTIONNEL
Due au souci de soi du SDF
EC
GC
EC: Environnement cadré
CS
CS: Contexte
Conclusion

Sans aucun doute le point qui s'avère le plus fascinant
de toute la recherche tient en la mise au jour de cette
capacité que possède l'être humain à littéralement se
“morpher” autour de situations extrêmement périlleuses
et, de la sorte, survivre. Ainsi que le décrit Sebastião
Salgado, reporter-photographe pendant la guerre en
Bosnie et lors des massacres au Rwanda : “(...) la vraie
intelligence de l'être humain, c'est sa capacité
d'adaptation. Les hommes se font à tout y compris au
pire. En Bosnie, les enfants partaient chaque jour pour
l'école sous les bombardements, presque comme mon
fils va à l'école chaque matin. Ils s'étaient adaptés à la
guerre. Au Rwanda, j'ai vu un père jeter son enfant mort
sur un tas où gisaient 10000 corps, puis s'en aller boire
un thé comme si de rien n'était. Lui aussi s'était adapté.
C'est cela qui me bouleverse : l'incroyable capacité que
possède l'être humain pour survivre...” (Salgado, 2000 :
110).