Stratégies de développement et de promotion des industries

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Stratégies de développement et de promotion des industries
Stratégies de développement et de
promotion des industries culturelles en
Océanie
Jessie F. McComb, Consultante
Publié au titre du projet « Structuration du secteur culturel dans le Pacifique à des
fins de développement humain », financé par l’Union européenne et mis en
œuvre par le Département développement humain du Secrétariat général de la
Communauté du Pacifique
Secrétariat général de la Communauté du Pacifique
Suva (Fidji), 2012
© Secrétariat général de la Communauté du Pacifique (CPS), 2013
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Texte original : anglais
Secrétariat général de la Communauté du Pacifique, catalogage avant publication (CIP)
McComb, Jessie F.
Stratégies de développement et de promotion des industries culturelles en Océanie / Jessie F.
McComb
1.
2.
3.
Cultural property — Kiribati.
Cultural policy — Kiribati.
Culture diffusion — Kiribati.
I. McComb, Jessie F.
II. Titre III. Secrétariat général de la Communauté du Pacifique
344.0995
AACR2
ISBN : 978-982-00-0639-3
Secrétariat général de la Communauté
du Pacifique
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Table des matières
RÉSUMÉ ............................................................................................................................................................. 1
DESCRIPTION DE LA MÉTHODE................................................................................................................ 5
PRINCIPALES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS................................................................... 5
DÉBOUCHÉS NATIONAUX ET DIASPORAS ........................................................................................... 29
ANALYSE SWOT DES INDUSTRIES CULTURELLES ............................................................................. 30
MEILLEURES TECHNIQUES DE PROMOTION DES INDUSTRIES CULTURELLES ........................ 36
DEUXIEME PARTIE : POLITIQUES ET ACCORDS COMMERCIAUX APPLICABLES AUX
INDUSTRIES CULTURELLES ................................................................................................................... 42
POLITIQUES ET ACCORDS COMMERCIAUX ......................................................................................... 42
TROISIÈME PARTIE : DÉVELOPPEMENT ET PROMOTION DES INDUSTRIES CULTURELLES EN
OCÉANIE........................................................................................................................................................... 48
STRATÉGIE DE DÉVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L’ARTISANAT ................................. 48
STRATÉGIE DE DÉVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DES ARTS PLASTIQUES....................... 58
STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT DU SECTEUR DE LA MODE ...................................................... 68
STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT DE LA MUSIQUE .......................................................................... 76
STRATÉGIE DE DÉVELOPPEMENT DE LA DANSE ............................................................................... 88
CONCLUSION ................................................................................................................................................ 96
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 97
Annexe A – Descriptif de la méthode employée par la consultante ...................................................... 100
Annexe B – Liste des parties prenantes contactées ................................................................................... 101
LISTE DES MODÈLES DE PROMOTION
Figure 1: Méthode employée par la consultante ............................................................................................................ 5
Figure 2: Exportations 2008 en provenance d’Océanie et des PEID tous secteurs culturels confondus .............. 14
Figure 3: Exportations 2008 en provenance d’Océanie et des PEID pour le secteur du design ............................ 14
Figure 4: Matrice d’analyse SWOT des industries culturelles océaniennes ............................................................. 31
Figure 5: Diagramme de la chaîne de valeur commerciale de l’artisanat océanien ................................................ 48
Figure 6: Chaîne de valeur commerciale du secteur des arts plastiques en Océanie ............................................. 59
Figure 7: Chaîne de valeur créative du secteur des arts plastiques en Océanie. ..................................................... 62
Figure 8: Chaîne de valeur commerciale du secteur de la mode aux Fidji .............................................................. 68
Figure 9: Chaîne de valeur « créative » du secteur de la mode des Fidji ................................................................. 71
Figure 10: Chaîne de valeur commerciale du secteur de la musique dans le Pacifique ......................................... 77
Figure 11: Chaîne de valeur créative du secteur de la musique dans le Pacifique ................................................. 81
Figure 12: Chaîne de valeur créative du secteur de la danse en Océanie ................................................................. 88
LISTE DES MODÈLES DE PROMOTION
Premier modèle de promotion l’artisanat : design, formation et promotion au Ghana ......................................... 15
Deuxième modèle de promotion : les biennales nationales et à l’étranger .............................................................. 17
Troisième modèle de promotion : semaines de la mode, mannequins et célébrités ............................................... 20
Quatrième modèle de promotion : la Jamaïque et le reggae ...................................................................................... 22
Cinquième modèle de promotion : L’Afrique du Sud, un nouveau carrefour de la mode ................................... 36
Sixième modèle de promotion : L’opposition technologies/tradition dans la musique ....................................... 39
LISTE DES ABRÉVIATIONS ET ACRONYMES
A2IM
ACP
APE
ARIA
AusAID
CARICOM
CARIFORUM
CE
CNUCED
CPS
FAC
FCS
FIP
GATT
ITC
NCSMED
NZAID
OMC
ONG
PACER
PEID
PICTA
PIMA
PMA
PNUD
RFID
SPARTECA
SWOT
UE
USAID
USP
Société américaine de la musique indépendante
Groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique
Accord de partenariat économique
Association australienne des sociétés d’enregistrement
Agence australienne pour le développement international
Communauté des Caraïbes
Pays ACP membres du Forum des Caraïbes
Communauté européenne
Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement
Secrétariat général de la Communauté du Pacifique
Conseil des arts des Fidji
Société des métiers de l’artisanat des Fidji
Forum des îles du Pacifique
Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce
Centre du commerce international
Centre national pour le développement des PME des Fidji
Programme d’aide néo-zélandais
Organisation mondiale du commerce
Organisation non gouvernementale
Accord de rapprochement économique entre les pays océaniens
Petits États insulaires en développement
Accord commercial entre les pays insulaire du Pacifique
Association des musées des îles du Pacifique
Pays les moins avancés
Programme des Nations Unies pour le développement
Radio-identification
Accord régional de coopération commerciale et économique dans le Pacifique Sud
Forces, faiblesses, opportunités et menaces
Union européenne
Agence pour le développement international des États-Unis
Université du Pacifique Sud
RÉSUMÉ
En Océanie, les industries culturelles se nourrissent d’une très riche diversité de traditions, allant des
pratiques ancestrales aux expressions contemporaines de la culture. La présente étude a été commandée par
le Département développement humain du Secrétariat général de la Communauté du Pacifique (CPS) afin de
définir les modalités d’exploitation optimale de ces industries, pour que ces dernières deviennent de
véritables moteurs de la croissance économique et participent au développement durable et au bien-être des
populations. La présente étude vise à améliorer l’état des connaissances sur les marchés de la culture, les
exigences et les obstacles auxquels sont confrontés les secteurs des arts plastiques, de l’artisanat, de la mode,
de la musique et de la danse en Océanie, afin de contribuer à la commercialisation des biens et des services
des industries culturelles de la région. Le présent rapport propose des stratégies de développement et de
promotion commerciale pour chacun de ces cinq secteurs culturels, dans l’optique d’ériger des passerelles
entre, d’un côté, les compétences et les potentialités qu’ils recèlent et, de l’autre, les marchés qui leur sont les
plus réceptifs et accessibles, en mettant l’accent sur les marchés locaux, le tourisme et les marchés à
l’exportation dans la région.
De façon générale, l’artisanat et les arts plastiques sont les secteurs les plus porteurs et les mieux à même de
dynamiser la croissance économique à l’échelle de la région et des pays, l’industrie de la mode étant
particulièrement prometteuse aux Fidji. Dans ces secteurs, les producteurs nous offrent d’innombrables
produits et talents à l’état brut. Pourtant, ils n’exploitent pas suffisamment les marchés locaux, le tourisme
ou encore les marchés régionaux, ce qui laisse augurer un fort potentiel de croissance dans ces marchés très
accessibles. Pour séduire les marchés locaux et le marché touristique et se faire une vraie place sur les
marchés à l’exportation, il est toutefois nécessaire de mettre en place pour ces trois secteurs des programmes
de développement global axés sur l’amélioration de chacun des maillons de la chaîne de valeur, de la
production à la promotion commerciale. Par ailleurs, dans cette chaîne de valeur, on constate l’absence d’un
maillon important : la boucle de l’information, qui permet de faire circuler l’information sur les marchés
jusqu’aux producteurs sous la forme d’un soutien à la conception et au développement des produits. Cette
lacune, de même que d’autres, doit être comblée avant de cibler les marchés à l’exportation.
Alors que le monde de la musique compte de nombreux artistes dans toute la région, l’industrie musicale
est gravement mise en péril par le piratage systématique (CD gravés et partage de fichiers), au point d’être
aujourd’hui au bord de l’effondrement. La protection de la propriété intellectuelle doit faire l’objet d’une
législation de portée régionale plus stricte, afin que les droits des artistes soient protégés dans tous les pays
océaniens, quel que soit leur pays d’origine.
À l’instar des autres secteurs, la danse reste très cantonnée à la culture traditionnelle. Quelques troupes font
le choix de proposer des tableaux contemporains ou de danse fusion, et l’une d’entre elles au moins cherche à
assurer sa viabilité financière grâce à la diversification des produits. Néanmoins, à ce jour, aucune troupe
n’est parvenue à faire des bénéfices, ou même à rentrer dans ses frais, en se produisant à l’étranger. Pour que
la danse alimente les économies nationales, il faut que des mécènes privés externes financent les coûts de
production et de déplacement.
Voici quelques-unes des conclusions et recommandations du rapport :
Marchés cibles : La plupart des producteurs n’exploitent pas tout le potentiel que représentent les marchés
locaux, le tourisme, les diasporas et les marchés régionaux, et seule une poignée d’entre eux ont déjà exécuté
une commande standard pour le compte d’un grossiste en import/export. Sur les marchés à l’exportation, les
acheteurs en gros et les consommateurs ont des exigences spécifiques en termes de qualité des produits, de
stabilité de la capacité de production et d’actualité des créations. En Océanie, les producteurs des industries
1
culturelles doivent améliorer la qualité de leurs produits, accroître leur capacité de production et créer de
nouveaux produits, tandis que le secteur a besoin de structures spécialisées dans l’exportation. Compte tenu
de ce contexte, la consultante recommande aux producteurs de cibler dans un premier temps les marchés
locaux et touristiques, les diasporas et les marchés à l’exportation de la région. L’expérience qu’ils acquerront
en pénétrant ces marchés les préparera à partir à l’assaut des grands marchés à l’exportation.
Soutien des pouvoirs publics et coordination : En Océanie, les organismes publics chargés de la culture
ont concentré une grande partie de leurs efforts sur la conservation du patrimoine et la protection des
savoirs traditionnels en raison des risques importants, et bien réels, de disparition de certains aspects de la
culture et d’appropriation par des tiers. Il est rare que le concept de commercialisation éthique des produits
des industries culturelles soit étudié en profondeur, si bien que les pouvoirs publics sont mal préparés pour
embrasser ces nouvelles façons commerciales de penser les industries culturelles. Les stratégies à adopter
pour combler ces lacunes varient d’un pays à l’autre et toute décision relative au rôle éventuel des pouvoirs
publics dans la commercialisation de la culture doit naître d’une concertation bien encadrée entre les
pouvoirs publics, le secteur privé et les producteurs de chaque pays.
Mise en œuvre des politiques : En règle générale, les ministères et services de la culture sont mal informés
au sujet des différentes options de politique générale qui sont employées ou pourraient l’être pour faciliter
le commerce international. Une action d’éducation et de sensibilisation est nécessaire afin de montrer en
quoi les industries culturelles peuvent bénéficier des différentes mesures de politique générale
actuellement appliquées ou envisagées par les organismes publics chargés de la culture et du commerce.
De plus, il est nécessaire que les autorités chargées de la promotion des investissements et les ministères de
l’industrie aient une meilleure connaissance des besoins des industries culturelles de manière à intégrer des
solutions pertinentes à leurs nouvelles politiques.
Manque d’infrastructures : Dans l’ensemble, on constate un manque d’infrastructures propres aux
industries culturelles. Les artistes et les interprètes désireux de se former ou de poursuivre des études dans
des établissements officiels ont très peu de choix, ce qui freine leur avancement professionnel dans les
marchés à l’exportation et les empêche dans certains cas de maîtriser les techniques de base de leur art. Ce
manque d’infrastructures touche aussi le secteur de l’exportation, qui ne compte aucune structure privée
spécialisée dans l’export. Les pays de la région sont encouragés à investir dans un centre régional
proposant un enseignement officiel des arts. Pour bâtir cette infrastructure propice au développement des
arts dans la région, ils pourraient dans un premier temps appuyer la proposition visant à réintroduire un
programme d’études à vocation artistique dans l’offre de cours de l’Université du Pacifique Sud, aux Fidji.
Manque d’innovation dans la création : Partout en Océanie, on constate que le travail de conception des
industries culturelles manque cruellement d’innovation, en particulier dans les secteurs de l’artisanat et des
arts plastiques. Dans un système où les producteurs ne bénéficient d’aucun accompagnement de la part des
professionnels de la création, un grand nombre des produits proposés ne répondent pas aux exigences du
marché. Il est possible de mettre certains plasticiens en contact avec des artisans afin qu’ils créent des
produits bien conçus, mais ces apprentis en devenir ont besoin de connaître les marchés et d’être épaulés
pour se rapprocher de ces groupes de professionnels. Dans cette optique, un programme d’encadrement
des créateurs pourrait être mis en place afin de bâtir des passerelles entre les aspirants créateurs du
Pacifique et des créateurs reconnus dans les pays qui constituent un marché cible.
Forte concurrence des produits importés : Fabriqués en faibles quantités, de mauvaise qualité et peu
innovants, les produits locaux sont confrontés à une forte concurrence des produits importés sur les
marchés touristiques, en particulier dans les secteurs de l’artisanat et de la mode. Si les acheteurs se tournent
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vers les produits importés, essentiellement parce que les produits locaux ne sont pas adaptés et laissent à
désirer au niveau de l’exécution, il faut aussi souligner que les producteurs n’ont pas suffisamment de
compétences en gestion et en marketing pour frapper à la porte des détaillants locaux et établir avec eux de
bonnes relations professionnelles. À court terme, les règles relatives aux appellations d’origine et les
campagnes nationales de promotion des produits locaux peuvent conférer à ces derniers un avantage
concurrentiel, mais, à long terme, il est nécessaire de bien informer les producteurs et les grossistes.
Droits de propriété intellectuelle : L’absence de textes de loi astreignants et exécutoires sur la propriété
intellectuelle et le faible degré de coopération régionale ont permis la généralisation du piratage dans
l’industrie de la musique en Océanie. C’est une question urgente qu’il faut régler en priorité dans le secteur
de la musique avant de pouvoir prétendre cibler les marchés à l’exportation.
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PREMIERE PARTIE : ANALYSE DES MARCHÉS ET DES SECTEURS
INTÉRESSANT LES INDUSTRIES CULTURELLES DU PACIFIQUE
INTRODUCTION
Le Département développement humain de la CPS cherche à améliorer la commercialisation
des produits des industries culturelles du Pacifique afin de stimuler la croissance économique et
d’améliorer le développement humain dans la région. En se dotant de stratégies de développement et de
promotion adaptées, les parties prenantes des industries culturelles océaniennes peuvent accroître leurs
ventes de biens et de services sur les marchés locaux, régionaux et à l’exportation.
En Océanie, les industries culturelles se nourrissent d’une très riche diversité de traditions, allant des
pratiques ancestrales aux expressions contemporaines de la culture. Ces biens et services culturels peuvent
devenir d’importants moteurs de la croissance économique. Toutefois, le secteur est handicapé par un
manque de coordination et de communication entre les agents des marchés et les producteurs. Comme dans
beaucoup d’autres régions, en Océanie, les industries culturelles restent informelles et manquent de
structures, de sorte qu’elles ne sont pas en mesure de mettre à profit les possibilités d’expansion
commerciale qui s’offrent à elles.
Si elles parviennent à s’organiser et à se développer, les industries culturelles d’Océanie pourraient devenir
un moteur économique. Les producteurs pourraient alors faire fructifier leurs compétences et stimuler la
croissance au sein du secteur des micro, petites et moyennes entreprises. Si l’on parvient à améliorer la
circulation de l’information et les compétences en gestion, et à mettre en place un véritable soutien à la création
et des structures bien développées de commercialisation et d’exportation, les producteurs du secteur culturel
pourraient s’allier à des institutions culturelles, à des exploitants et au secteur privé et profiter des marchés
lucratifs que représentent le tourisme et les destinations à l’exportation. Ensemble, ces améliorations au sein du
secteur permettront de garantir le transfert des connaissances aux jeunes générations et de perpétuer,
longtemps encore, les savoirs et les traditions de la région.
Objectifs
Les objectifs fixés pour cette étude étaient initialement les suivants :
• améliorer l’état des connaissances sur les marchés de la culture, ainsi que sur les attentes
et les obstacles auxquels sont confrontés les biens et les services des secteurs culturels
d’Océanie ;
• favoriser la commercialisation des biens et des services proposés par les industries
culturelles océaniennes au sein de l’Union européenne (UE) et d’autres régions ; et
• mettre au point une stratégie de promotion commerciale pour cinq secteurs culturels du Pacifique,
afin d’améliorer la circulation des biens et des services du Pacifique vers l’UE et d’autres régions.
Néanmoins, sur la base d’études de terrain, la consultante a estimé qu’un grand nombre de secteurs n’étaient
pas suffisamment développés pour cibler les marchés à l’exportation de l’UE. Par conséquent, la consultante
esquisse ici des stratégies de développement et de promotion pour cinq secteurs culturels, afin d’ériger des
passerelles entre, d’un côté, les compétences et les potentialités qu’ils recèlent et, de l’autre, les marchés qui
leur sont les plus réceptifs et accessibles, en mettant l’accent sur les marchés locaux, le tourisme et les marchés
à l’exportation dans la région, et accessoirement sur les marchés à l’exportation des États-Unis et de l’UE.
4
DESCRIPTION DE LA MÉTHODE
La consultante s’est appuyée sur une méthode participative pour effectuer des recherches documentaires
et des études de terrain et formuler, sur cette base, des stratégies de développement et de promotion.
Elle a travaillé en étroite collaboration avec les intervenants de la CPS pour s’assurer que le projet serait
mené dans le prolongement des activités précédemment exécutées. Le cadre de la chaîne de valeur, établi
après un diagnostic de la situation, et les résultats de la consultation participative régionale ont jeté les
bases de ce travail.
Première phase :
Analyse des
marchés
Deuxième phase :
Politiques et
meilleures
pratiques au sein
de l’UE
Troisième phase :
Analyses
sectorielles
•Analyse des industries culturelles dans le contexte des
marchés mondiaux, européens et du bassin Pacifique
•Définition des possibilités et des obstacles
•Meilleures pratiques dans les pays en développement
•Analyse de l’approche commerciale appliquée par l’UE aux
industries culturelles
•Analyse des options, outils et meilleures pratiques actuels
et potentiels
• Analyse de terrain de secteurs donnés : artisanat, arts
plastiques, mode, musique et danse
•Rencontres avec les parties prenantes régionales et
évaluation des produits
•Rencontres avec les parties prenantes régionales et
évaluation des produits
Figure 1: Méthode employée par la consultante
Vous trouverez une description complète de la méthode employée à l’annexe A.
Pour la troisième phase, la consultante s’est rendue aux Fidji, aux Tonga, à Vanuatu et en PapouasieNouvelle-Guinée, afin de rencontrer les parties prenantes (voir liste des personnes contactées à l’annexe
B).
PRINCIPALES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
L’artisanat et les arts plastiques sont les secteurs les plus porteurs et les mieux à même de dynamiser la
croissance économique à l’échelle de la région et des pays, l’industrie de la mode étant particulièrement
prometteuse aux Fidji. Dans ces secteurs, les producteurs nous offrent d’innombrables produits et talents à
l’état brut. Pourtant, ils n’exploitent pas suffisamment les
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marchés locaux, le tourisme ou encore les marchés régionaux, ce qui laisse augurer un fort potentiel de
croissance dans ces marchés très accessibles. Pour séduire les marchés locaux et le marché touristique et se
faire une vraie place sur les marchés à l’exportation, il est toutefois nécessaire de mettre en place pour ces
trois secteurs des programmes de développement global axés sur l’amélioration de chacun des maillons de
la chaîne de valeur, de la production à la promotion commerciale. Par ailleurs, dans cette chaîne de valeur,
on constate l’absence d’un maillon important : la boucle de l’information, qui permet de faire circuler
l’information sur les marchés jusqu’aux producteurs sous la forme d’un soutien à la conception et au
développement des produits. Cette lacune, de même que d’autres, doit être comblée avant de cibler les
marchés à l’exportation.
Alors que le monde de la musique compte de nombreux artistes dans toute la région, l’industrie musicale
est gravement mise en péril par le piratage systématique (CD gravés et partage de fichiers), au point d’être
aujourd’hui au bord de l’effondrement. La protection de la propriété intellectuelle doit faire l’objet d’une
législation de portée régionale plus stricte, afin que les droits des artistes soient protégés dans tous les pays
océaniens, quel que soit leur pays d’origine. Il est nécessaire que les pouvoirs publics réservent des moyens
suffisants à la mise en œuvre des lois sur la propriété intellectuelle. Enfin, on constate une absence
généralisée de coordination au sein des secteurs culturels à l’échelon national (exception faite des Fidji) et
peu de pays se sont dotés d’organismes appropriés de perception de redevances pouvant défendre les
droits des musiciens. Ces questions doivent être réglées à l’échelon local et régional avant toute tentative de
pénétration des marchés à l’exportation.
À l’instar des autres secteurs, la danse reste très cantonnée à la culture traditionnelle. Quelques troupes,
surtout aux Fidji, font le choix de proposer des tableaux contemporains ou de danse fusion, et l’une d’entre
elles au moins (la troupe VOU) cherche à assurer sa viabilité financière grâce à la diversification des
produits (cours de danse, ventes de musique et de vidéos et une ligne de vêtements). Néanmoins, à ce jour,
aucune troupe n’est parvenue à faire des bénéfices, ou même à rentrer dans ses frais, en se produisant à
l’étranger. Pour que la danse alimente les économies nationales, il faut que des mécènes privés externes
financent les coûts de production et de déplacement. Les mécénats privés étant rares, la danse peut être
considérée davantage comme un outil de promotion du tourisme et des autres industries culturelles que
comme un produit en soi.
Voici quelques-unes des conclusions et recommandations du rapport :
Marchés cibles : En dépit de la taille et du volume du marché européen des biens et des services culturels,
la majorité des producteurs océaniens ne sont actuellement pas équipés pour s’y faire une place. En effet, la
plupart des producteurs n’exploitent déjà pas tout le potentiel que représentent les marchés locaux, le
tourisme, les diasporas et les marchés régionaux, et seule une poignée d’entre eux ont déjà exécuté une
commande standard pour le compte d’un grossiste en import/export.
Sur les marchés à l’exportation européens, les acheteurs en gros et les consommateurs ont des exigences
spécifiques en termes de qualité des produits, de stabilité de la capacité de production et d’actualité des
créations. En Océanie, les producteurs des industries culturelles doivent améliorer la qualité de leurs
produits en se conformant à des normes de contrôle de la qualité, accroître leur capacité de production en
améliorant leur efficacité économique et en créant de nouveaux produits, et faire appel à des spécialistes du
développement des produits afin de mettre au point des produits bien conçus et de fixer des prix
appropriés. En raison du nombre très limité de structures spécialisées dans l’exportation, les producteurs
doivent soit perfectionner leurs propres compétences en gestion pour devenir eux-mêmes grossistes
exportateurs, soit rechercher des partenariats avec le secteur public ou privé pour remplacer ce maillon
manquant de la chaîne de valeur.
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Compte tenu de ce contexte, la consultante recommande aux producteurs de cibler dans un premier temps
les marchés locaux et touristiques, les diasporas et les marchés à l’exportation de la région. L’expérience
qu’ils acquerront en pénétrant ces marchés les préparera à partir à l’assaut des grands marchés à
l’exportation, notamment les États-Unis. Ce n’est qu’en cas de capacité de production excédentaire que les
producteurs devraient envisager les marchés de l’UE. Des recommandations complètes sur les marchés
cibles et l’élaboration de stratégies par secteur sont proposées ci-après.
Soutien des pouvoirs publics et coordination : Les industries culturelles trouvent rarement leur
place logique dans les structures gouvernementales. En Océanie, les organismes publics chargés de la
culture ont concentré une grande partie de leurs efforts sur la conservation du patrimoine et la protection
des savoirs traditionnels en raison des risques importants, et bien réels, de disparition de certains aspects de
la culture et d’appropriation par des tiers. Il est rare que le concept de commercialisation éthique des
produits des industries culturelles soit étudié en profondeur, si bien que les pouvoirs publics sont mal
préparés pour embrasser ces nouvelles façons commerciales de penser les industries culturelles. Si l’on
observe un certain élan en faveur de la commercialisation du côté des autorités de promotion des
investissements ou des ministères de l’industrie, on constate aussi un manque de coordination et de partage
d’informations entre les organismes publics tournés vers le commerce, d’une part, et les services nationaux
de la culture, d’autre part. Les ministères du tourisme participent également à l’équation. Le potentiel
d’exploitation des marchés touristiques est énorme, mais les services nationaux de la culture entretiennent
actuellement très peu de relations avec les ministères du tourisme.
Chaque pays devra se doter d’une approche spécifique pour combler ces lacunes. Toute décision relative au
rôle éventuel des pouvoirs publics dans la commercialisation de la culture doit naître d’une concertation
bien encadrée entre les pouvoirs publics, le secteur privé et les producteurs de chaque pays. Voici quelquesunes des recommandations adressées spécifiquement aux pays :
Fidji : Le développement et la promotion des industries culturelles des Fidji sont actuellement placés sous la
houlette du Conseil des arts des Fidji (FAC) et de la Société des métiers de l’artisanat des Fidji (FCS). Ensemble,
les structures de ces organismes offrent une bonne combinaison de soutien au développement et à la
commercialisation, mais elles manquent d’effectifs et de ressources pour aider correctement tous les secteurs.
Par ailleurs, leurs employés ont besoin de renforcer leurs capacités dans les domaines de la gestion, de la
promotion, de la conception et du développement des produits, et de l’exportation. Les Fidji ont beaucoup à
gagner en établissant un programme global de développement de l’artisanat et des arts plastiques, où des
spécialistes internationaux des métiers de l’artisanat s’associeraient au FAC et à la FCS pour venir en aide aux
producteurs, tout en renforçant les capacités des organismes locaux.
Tonga : Aux Tonga, les métiers de l’artisanat représentent le secteur le plus prometteur. Il est toutefois
complètement inorganisé. Au moins cinq associations d’artisans se partagent les mêmes membres et dirigeants.
Un programme global de développement s’impose pour permettre une meilleure organisation du secteur et
appuyer son développement, en mettant particulièrement l’accent sur le développement et la conception des
produits.
Le ministère du travail a beaucoup amélioré son approche de la promotion commerciale, en particulier en
ciblant les diasporas lors de festivals et de foires commerciales, mais il a besoin d’un soutien supplémentaire.
Il serait nécessaire d’engager un coordonnateur à plein temps pour le secteur de l’artisanat afin de pousser
cette approche plus loin et de viser les marchés à l’exportation régionaux, plus lucratifs. Pour développer les
exportations du secteur privé, il convient également de mettre en place un plan et un soutien à long terme,
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dans l’optique, à l’avenir, de décharger le ministère du travail de cette mission de promotion commerciale et
de développement des produits.
Vanuatu : À Vanuatu, comme dans beaucoup d’autres pays, il n’existe pas d’organisme public chargé de
promouvoir la commercialisation éthique des produits des industries culturelles. Des associations privées, toutes
spécialisées dans un secteur particulier, ont fait avancer leurs secteurs respectifs, mais la plupart d’entre elles ont
besoin d’un soutien des pouvoirs publics, de fonds et de capacités renforcées pour développer plus avant les métiers
de l’art qu’elles défendent. S’agissant de l’artisanat et des arts plastiques, il est recommandé qu’un
programme global de développement soit mis en œuvre par des spécialistes ou organismes internationaux,
par le biais de partenaires privés, tels qu’ACTIV, une association dotée de réseaux bien établis et présente
depuis longtemps dans le pays.
Papouasie-Nouvelle-Guinée : L’Autorité de promotion des investissements s’intéresse de plus en plus à la
promotion et à l’exportation des biens culturels. Pour que le pays s’engage sur cette voie, un programme
global de développement doit être mis sur pied pour aider les producteurs des industries culturelles à
répondre aux exigences pointues des marchés. La Commission culturelle nationale n’est actuellement pas
équipée pour assumer cette responsabilité, et il convient d’établir un nouvel organisme pour élaborer et
piloter ce programme en coordination avec la Commission et l’Autorité de promotion des investissements.
La structure et le site d’implantation de ce nouvel organisme devront être décidés par les parties prenantes
des secteurs public et privé dans le cadre d’une concertation bien encadrée. Il est recommandé de faire appel
à une personne externe, spécialisée dans le développement et la commercialisation de l’artisanat, pour
animer cette concertation et éviter d’éventuels conflits.
Mise en œuvre des politiques : En règle générale, les ministères et services de la culture semblent
mal informés des différentes options de politique générale qui sont employées ou pourraient l’être pour
faciliter le commerce international. Au sein des autorités de promotion des investissements ou des
ministères du commerce, les chargés des relations commerciales connaissent ces options, mais il est rare
qu’ils s’interrogent sur leur application créative au profit des industries culturelles.
Une action d’éducation et de sensibilisation est nécessaire afin de montrer en quoi les industries
culturelles peuvent bénéficier des différentes mesures de politique générale actuellement appliquées ou
envisagées par les organismes publics chargés de la culture et du commerce. Il est nécessaire que les
services nationaux de la culture aient une meilleure lecture des différentes options disponibles et de la
façon dont elles peuvent étayer de nouvelles politiques visant à mieux répondre aux besoins du secteur.
De plus, il est nécessaire que les autorités chargées de la promotion des investissements et les ministères de
l’industrie aient une meilleure connaissance des besoins des industries culturelles de manière à intégrer des
solutions pertinentes à leurs nouvelles politiques. Une amélioration du partage de l’information et de la
coordination permettra aux organismes publics de mieux défendre des politiques adaptées aux industries
culturelles. C’est d’autant plus vrai dans les pays qui ont la possibilité de conclure un protocole de
coopération culturelle dans le cadre des nouveaux Accords de partenariat économique (APE).
Manque d’infrastructures : Dans l’ensemble, on constate un manque d’infrastructures propres aux
industries culturelles. Les artistes et les interprètes désireux de se former ou de poursuivre des études dans
des établissements officiels sont confrontés à un choix limité, ce qui freine leur avancement professionnel
dans les marchés à l’exportation et les empêche, dans certains cas, de maîtriser les techniques de base de
leur art. Ce manque d’infrastructures touche aussi le secteur de l’exportation, qui ne compte aucune
structure privée spécialisée dans l’export. Tant que cette lacune ne sera pas comblée, il ne sera pas possible
de créer des passerelles commerciales viables vers les grands marchés de l’UE.
8
Compte tenu de l’isolement géographique et de la faible densité démographique de nombreux pays de la
région, il ne serait pas judicieux de mettre en place des centres officiels de formation et d’enseignement
dans chaque pays. En revanche, les pays de la région sont encouragés à étudier la possibilité d’établir un
centre régional proposant un enseignement officiel des arts. Les Fidji se sont engagées sur cette voie dans le
secteur de la mode en mettant sur pied un programme de création de mode qui devrait bientôt être proposé
aux étudiants de l’Université nationale des Fidji. Depuis toujours, le campus fidjien de l’Université du
Pacifique Sud (USP) est un centre de promotion des arts, mais la fermeture du programme d’étude des arts
et expressions de la création a été un coup dur pour les industries culturelles. Pour bâtir une infrastructure
propice au développement des arts dans la région, les pays pourraient, dans un premier temps, appuyer la
proposition visant à réintroduire un programme à vocation artistique dans l’offre de cours de l’USP aux
Fidji. Il est important de préciser que tout programme officiel de formation aux métiers de l’art doit
comprendre des cours de gestion afin de promouvoir l’esprit d’entreprise et de permettre aux artistes et aux
producteurs d’acquérir une autonomie financière.
Manque d’innovation dans la création : Partout en Océanie, on constate que le travail de conception
des industries culturelles manque cruellement d’innovation, en particulier dans les secteurs de l’artisanat et
des arts plastiques. Une toute petite poignée de créateurs autoproclamés travaillent dans le secteur de
l’artisanat, par exemple, si bien qu’un grand nombre des produits proposés ne répondent pas aux
exigences du marché. Cette absence de produits bien conçus s’explique en partie par un désintérêt culturel
et sociétal pour l’innovation. Un grand nombre de cultures océaniennes accordent beaucoup d’importance à
la tradition, ce qui freine la création de nouveaux produits pouvant être compétitifs sur les marchés
touristiques et à l’exportation.
Il est possible de mettre certains plasticiens en contact avec des artisans afin qu’ils créent des produits bien
conçus, mais ces apprentis en devenir ont besoin de connaître les marchés et d’être épaulés pour se
rapprocher de ces groupes de professionnels. Dans cette optique, un programme d’encadrement des
créateurs pourrait être mis en place afin de bâtir des passerelles entre les aspirants créateurs du Pacifique et
des créateurs reconnus dans les pays qui constituent un marché cible (Australie, Nouvelle-Zélande et les
États-Unis par exemple). De cette façon, les créateurs locaux pourraient acquérir ou perfectionner leurs
compétences en matière d’étude de marché et de développement des produits, en partenariat avec des
créateurs très au fait des tendances des marchés cibles. Cette idée est expliquée plus en détail dans la partie
« Stratégies de développement et de promotion ».
Forte concurrence des produits importés : Fabriqués en faibles quantités, de mauvaise qualité et peu
innovants, les produits locaux sont confrontés à une forte concurrence des produits importés, en particulier
dans les secteurs de l’artisanat et de la mode. Ainsi, aux Fidji et à Vanuatu, les marchés touristiques sont le
théâtre d’une rude concurrence entre les objets d’artisanat locaux et les produits importés d’Indonésie, de
Malaisie et de Chine. Si les acheteurs se tournent vers les produits importés, essentiellement parce que les
produits locaux ne sont pas adaptés (en termes de conception et de qualité) et qu’ils laissent à désirer au
niveau de l’exécution, il faut aussi souligner que les producteurs n’ont pas suffisamment de compétences en
gestion et en marketing pour frapper à la porte des détaillants locaux et établir avec eux de bonnes relations
professionnelles. Par exemple, certains artistes et artisans ont cherché à vendre leurs produits à de grands
magasins de vente au détail destinés aux touristes, mais ont découvert qu’après réception des produits, ces
enseignes avaient envoyé leurs créations en Indonésie pour les faire copier.
Un programme global de développement, axé sur l’amélioration de la qualité des produits et de la capacité
de production et de création des artisans, pourrait apporter des éléments de solution à long terme. Les
producteurs ont également besoin de compétences solides en gestion, afin de connaître leurs droits et de
9
disposer des outils nécessaires à la fixation des prix et au choix des sources d’approvisionnement, ainsi qu’à
l’étude des questions liées au droit d’auteur. Cette idée est décrite intégralement dans la partie « Stratégies
de développement et de promotion ». À court terme, les règles relatives aux appellations d’origine et les
campagnes nationales de promotion des produits locaux peuvent conférer à ces derniers un avantage
concurrentiel. Cette idée est développée plus avant dans la partie « Stratégies de développement et de
promotion ».
Droits de propriété intellectuelle : Nous sommes au cœur d’une période charnière pour la protection
de la propriété intellectuelle dans le secteur de la musique. Bien qu’un certain nombre de lois aient été
promulguées, elles sont peu appliquées et la coopération régionale fait défaut. Le piratage systématique,
sous la forme de copies illégales sur CD gravés et sur périphériques externes, coûte des millions de dollars
aux producteurs, aux studios et aux musiciens. En l’absence de lois adaptées sur la propriété intellectuelle et
de moyens suffisants pour les faire appliquer, l’industrie océanienne de la musique se dirige doucement vers
une disparition certaine d’ici à cinq ans.
10
LA CULTURE ET L’ECONOMIE MONDIALE
Bien qu’elle soit difficile à définir, la culture tient une place fondamentale dans nos nations, nos économies et
notre quotidien. Les biens et les services culturels, englobés dans les termes industries culturelles ou de la
création 1, ont une valeur intrinsèque, puisqu’ils portent les traditions, les croyances et les expressions, et
acquièrent une valeur économique dès lors qu’ils sont échangés. D’après le Rapport sur l’économie créative
2010 (Creative Economy Report 2010), publié en anglais par la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le
développement (CNUCED), la valeur économique de ces biens et services s’élevait à 592 milliards de dollars
É.-U. dans l’économie mondiale en 2008. De 2002 à 2008, les industries de la création ont enregistré une
croissance régulière, au rythme de 14 % par an. Si la crise économique de 2008 continue de se faire sentir dans
l’éconosphère mondiale, les spécialistes prédisent une hausse ininterrompue de la demande de biens et de
services des industries de la création dans les années à venir. Dans les industries de la création, les biens
sont au centre de la grande majorité des échanges commerciaux internationaux ; ils ont rapporté
407 milliards de dollars É.-U. en 2008, un chiffre quasiment deux fois supérieur aux 205 milliards enregistrés
en 2002. Quant aux exportations de services du secteur de la création, elles ont connu une croissance saine au
cours de la même période, passant de 62 milliards de dollars É.-U. en 2002 à 185 milliards en 2008.
Dans les pays industrialisés, les industries de la création sont à la fois un moteur puissant capable de doper la
croissance économique et un marché potentiel pouvant accueillir des biens et des services culturels importés.
L’Europe est actuellement la première destination des exportations de biens des industries de la création, avec
184 milliards de dollars É.-U. en 2008, soit une hausse de 97 % par rapport aux 93 milliards de 2002. Les ÉtatsUnis, le Japon et le Canada représentent le deuxième plus gros marché à l’exportation dans les pays
industrialisés, leurs importations de biens culturels atteignant un total de 123 milliards de dollars É.-U. en
2008. Ces marchés ont connu un remarquable essor au cours des dix dernières années, la croissance moyenne
entre 2002 et 2008 s’établissant à 69 % toutes économies industrialisées confondues.
De façon générale, on assiste à une prise de conscience du rôle d’innovation des industries culturelles et de
leur contribution active aux économies nationales. La tendance est à l’élaboration de politiques de
développement prévoyant des incitations fiscales, des subventions publiques et des interventions sur le
marché en faveur des industries culturelles
afin de stimuler leur croissance (UNCTAD
2010: 20).
Le présent rapport confirme que les
industries créatives offrent un immense
potentiel aux pays en développement
désireux de diversifier leur économie, et
qu’elles sont en passe de devenir l’un des
secteurs les plus dynamiques de l’économie
mondiale.
- Rapport sur l’économie créative,
CNUCED
1
Dans la terminologie employée par la CNUCED, les industries culturelles sont un sous-ensemble des industries de la
création. Des analyses plus ciblées des secteurs compris dans les industries culturelles sont présentées plus loin dans le
présent rapport
11
Les industries culturelles dans les pays en développement
Le renforcement de l’accès aux technologies et la conclusion d’accords commerciaux améliorés ont permis aux
économies en développement de multiplier leurs débouchés commerciaux et de mieux pénétrer les marchés,
tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement. Les exportations tous biens confondus
en provenance des économies en développement sont passées de 1 400 milliards de dollars É.-U. à
6 100 milliards de dollars É.-U. entre 2002 et 2008. Au cours de la même période, les exportations des pays en
développement à destination d’autres pays en développement ont également grimpé, pour passer
de 828 à 3 000 milliards de dollars, traduisant une dynamisation du commerce et de l’économie des pays en
développement.
Bien qu’à l’échelle mondiale, les pays industrialisés tiennent le haut du pavé dans les importations et les
exportations de biens et de services des industries de la création, les pays en développement sont bien
présents dans le secteur depuis une dizaine d’années. Sur le marché mondial des industries de la création,
les pays en développement ont accru leurs parts de marché à un rythme plus rapide que les pays
industrialisés (UNCTAD 2012: 127). En effet, un taux de croissance annuelle de 13,5 % des exportations en
provenance des économies en développement entre 2002 et 2008 (UNCTAD 2010:136) représente 43 % des
exportations mondiales de biens des industries de la création.
Ces chiffres témoignent de la vigueur et du dynamisme du commerce dans les industries de la création dans
les pays en développement et soulignent leur potentiel de croissance. Alors que les industries de la création
pourraient constituer un outil économique au service du développement des nations, elles sont encore mal
comprises. Cette méconnaissance s’explique en partie par les limites des méthodes statistiques et le manque
d’information en provenance des pays les moins avancés (PMA) et des petits États insulaires en
développement (PEID). De surcroît, dans les nations en développement, la création a souvent sa place dans
l’économie non structurée, où les données statistiques sont rares ou inexactes.
Les industries culturelles et le Pacifique
En termes économiques, le Pacifique regroupe un certain nombre de PMA et de PEID. En conséquence, il est
souvent difficile de dégager des données spécifiques à la région océanienne. Par ailleurs, les données
disponibles pour ces catégories de pays sont encore très limitées. Le Pacifique appartient au groupe ACP
(groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique), qui réunit 79 États de ces trois régions. Là aussi, la
taille du groupe et sa grande diversité économique et culturelle ne permettent pas d’isoler aisément des
données propres à la région océanienne (UNCTAD 2010: 133). Cela dit, les données disponibles sur les trois
régions révèlent l’énorme importance des industries de la création et peuvent servir de référence pour
estimer le potentiel de ces industries dans le Pacifique.
La part totale que représentent les industries de la création des pays ACP sur le marché mondial reste
modeste (seulement 1,65 % en 2008). Toutefois, elles disposent d’une importante marge d’expansion, comme en
témoignent les exportations de biens qui ont plus que triplé entre 2002 et 2008, passant de 446 millions de dollars
É.-U. à 1,6 milliard de dollars É.-U. (UNCTAD 2010: 135-136). Des trois groupes, les PMA arrivent en
deuxième place des exportations (328 millions de dollars É.-U. en 2008). Encore une fois, si leur part de
marché reste assez minime sur le plan mondial, la croissance des exportations des PMA est stable, le taux
de croissance annuel moyen se chiffrant à 32 % pour la période 2002-2008. Les PEID arrivent en dernière
position, peut-être en raison d’une communication fragmentée et imprécise des données les concernant. Les
exportations de biens des industries de la création dans ces pays représentaient un total de 135 millions de
dollars É.-U. en 2008 et enregistrent un taux de croissance variable. La croissance moyenne annuelle,
estimée à 16 % entre 2002 et 2008, cache une importante variabilité interannuelle. Ainsi, les exportations du
groupe ont grimpé de 40 % entre 2002 et 2004, mais le taux de croissance a chuté à seulement 7 % entre 2004
12
et 2005, pour accuser une baisse spectaculaire à - 20 % entre 2005 et 2006, avant une embellie l’année
suivante à 13 % de croissance (UNCTAD 2010: 316).
Les pays océaniens qui ont communiqué leurs données ces dix dernières années sont les Îles Cook, les Fidji,
la Polynésie française, Kiribati, la Nouvelle-Calédonie, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et le Vanuatu. Leurs
rapports, sporadiques, ne reflètent pas toute l’importance des industries de la création dans la région.
Ensemble, ces pays ont déclaré avoir exporté en 2008 des biens « créatifs » pour une valeur de 27
millions de dollars É.-U., contre seulement 7 millions en 2002. Bien que cette croissance de 386 % s’explique
essentiellement par l’augmentation de la notification des données, en particulier de la Polynésie française
qui a commencé à envoyer ses rapports en 2004, la région a connu une croissance lente, mais régulière, de
15,76 % de ses exportations de biens « créatifs » entre 2002 et 2008 (UNCTAD, 2010: 352-353).
En 2008, dans le groupe Océanie/PEID2, le design arrive, avec 75 %, en tête des exportations des biens des
industries de la création, contre 6 % pour l’artisanat et 4 % pour les arts plastiques (voir figure 2). Dans la
catégorie « design », la joaillerie est de loin le secteur le plus porteur, représentant à lui seul 68 % des
exportations de biens « créatifs » de l’industrie du design en 2008 (voir figure 3). Les exportations de
produits de design ont connu une expansion régulière entre 2002 et 2008, totalisant 130 % par rapport aux
chiffres de 2002. Le secteur de l’artisanat est stable, les exportations ayant légèrement augmenté en 2005,
tandis que la croissance du secteur des arts plastiques est modeste, mais constante, sur la décennie. Les arts
du spectacle (y compris les CD et les musiques enregistrées) ont une place négligeable en termes de
recettes à l’exportation.
Malgré la progression des exportations des industries de la création dans le Pacifique, la région reste un
importateur net de biens culturels. D’après les données actuelles, en 2008, le Pacifique3 a importé des biens
« créatifs » pour une valeur de 184 millions de dollars É.-U., alors que ses exportations n’ont rapporté que
27 millions de dollars É.-U., ce qui constitue un déficit de 157 millions pour cette catégorie de biens dans la
région. Néanmoins, les importations ralentissent ces dernières années. Entre 2002 et 2008, les importations
se sont développées à un taux annuel de 7 %, mais entre 2004 et 2008, elles ont chuté de 24 % en moyenne
par an.
2
Les pays océaniens représentent plus de 40 % des PEID, mais seulement 10 % des PMA. Par
conséquent, la consultante s’est peu appuyée sur les données relatives aux PMA et a choisi d’utiliser
les données disponibles pour les pays repris dans les catégories Océanie et PEID pour compenser le
fait que la plupart des pays océaniens ne communiquent pas de données.
3
Les données concernent uniquement les pays qui transmettent leurs rapports de données : Îles Cook, Fidji, Polynésie
française, Kiribati, Nouvelle-Calédonie, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Vanuatu.
13
Exportations 2008 - Océanie et
PEID Design
Figure 2: Exportations 2008 en provenance d’Océanie
et des PEID tous secteurs culturels confondus
Exportations 2008 - Océanie et PEID
Figure 3: Exportations 2008 en provenance d’Océanie et
des PEID pour le secteur du design
14
Premier modèle de promotion l’artisanat :
design, formation et promotion au Ghana
Le Ghana possède une riche tradition
séculaire de l’artisanat. Ce savoir-faire
culturel ancestral et très vivant a toujours
joué un rôle fondamental dans la vie des
artisans ghanéens et est aujourd’hui une
source vitale de revenus. En 1993, Aid to
Artisans (ATA), une organisation non
gouvernementale (ONG) américaine sans
but lucratif, a lancé un projet sur cinq ans
avec les artisans du Ghana en vue
d’accroître les exportations du secteur. Ce
projet s’inscrivait dans le cadre d’un
programme plus vaste de promotion des
exportations non traditionnelles, financé
par l’Agence pour le développement
international des États-Unis (USAID).
Durant toute la durée du projet, l’ONG
s’est concentrée sur le développement du
secteur dans son ensemble, plutôt que de se
limiter à des activités de promotion. Onze
consultations ont été organisées pour aider
les artistes à développer et à concevoir leurs
produits, et une trentaine d’artisans chefs
d’entreprise ont été accompagnés pour
perfectionner leurs compétences en gestion.
Beaucoup ont assisté au Market Readiness
Program, formation dispensée par l’ONG
à New York. Grâce à cette approche
globale, les artisans se sont préparés à
participer à huit salons destinés aux
grossistes pendant la durée du projet.
ATA a également fait venir des acheteurs
sur place pour que les artisans aient un
contact direct avec des clients potentiels
capables de commenter leurs collections
et leurs produits.
À la fin du projet, les ventes cumulées
des artisans ont atteint 859 000 dollars É.U. et les exportations d’artisanat sont
passées de 160 000 dollars en 1989 à 11
millions de dollars en 2002. Les métiers de
l’artisanat font aujourd’hui vivre plus
d’une dizaine d’artisans-exportateurs, qui
voient dans le travail de création et de
formation d’ATA la clé de leur réussite. Si
la promotion à proprement parler a
contribué sensiblement à la vente des
produits ghanéens sur les marchés à
l’exportation, les conseils en matière de
design et la formation en gestion ont
permis aux produits et aux artisans de
s’imposer une fois en contact avec ces
marchés (Cockram 2005).
SECTEURS CULTURELS DES MARCHÉS
EUROPÉENS
La présente étude se concentre sur cinq secteurs culturels particuliers :
l’artisanat, la mode, les arts plastiques, la danse et la musique. Si tous
ces secteurs relèvent des industries culturelles, ils ont chacun des
caractéristiques spécifiques : tendances du marché, possibilités et
obstacles, et différents niveaux de demande sur le marché mondial. Le
présent résumé analytique fait la synthèse des recherches effectuées
sur chacun des secteurs dans le contexte européen.
Artisanat
L’artisanat est classé dans une multitude de secteurs sur le marché
mondial, dont les marchés à l’exportation pour la décoration
d’intérieur, les cadeaux, les accessoires de mode et l’ameublement. Ces
marchés se recoupent avec le marché de l’architecture d’intérieur et,
parfois, celui de l’architecture. La décoration d’intérieur et
l’ameublement représentent le marché le plus solide et ses ventes ont
pesé 418 milliards de dollars É.-U. en 2007 (Unity Marketing 2008). Les
marchés des accessoires de mode et des cadeaux/souvenirs sont un peu
plus difficiles à définir de par la très grande variété des produits. En
2009, les ventes d’accessoires de mode ont rapporté plus de 20 milliards
de dollars É.-U. Rien que dans les secteurs de la bijouterie fantaisie, des
sacs, des chaussettes et des lunettes solaires (Major Development 2011).
Quant au marché des cadeaux/souvenirs, qui va des cartes de vœux aux
paniers faits main, il pesait 21 milliards de dollars É.-U. Au milieu des
années 2000 (The Gail Group 2011).
Sur ces énormes marchés, l’artisanat doit toutefois rivaliser avec un large
éventail d’autres produits, dont les produits fabriqués à la main, en tout
ou partie, et les produits faits à la machine. Ainsi, aux salons des
grossistes, on trouve de tout, des paniers sud-africains tressés à la main
à partir de chutes de fils de téléphone, valant 500 dollars, aux portecartes en plastique d’une valeur de 0,5 dollar. Pour réduire la base
servant à l’estimation de la demande des marchés, la valeur du marché
des accessoires de maison a été choisie dans une étude de l’USAID en
2006 comme indicateur de la taille de la demande d’objets d’artisanat.
D’après l’étude, la valeur du marché mondial des accessoires de maison
était estimée à au moins 100 milliards de dollars É.-U. Les marchés
régionaux dominés par les États-Unis représentaient 67 milliards par
an, l’Europe arrivant en deuxième place avec environ 48 milliards par
an (USAID 2006: 17).
La classification des biens sur le marché européen nous renseigne un
peu plus sur le potentiel des marchés. En 2005, le marché européen
(Europe des 25) des cadeaux et articles de décoration a été estimé à
13 milliards de dollars É.-U. En 2003, les importations du marché
européen des textiles de maison et des tissus d’ameublement ont été
estimées à 6,3 milliards de dollars É.-U., dont 3,4 milliards en
15
provenance des pays en développement. La même année, les importations sur le marché européen de
l’ameublement ont représenté grossièrement 29 milliards de dollars É.-U., dont 5,6 milliards en provenance
des pays en développement (USAID 2006: 17).
La CNUCED fait également remarquer qu’au sein des industries culturelles, l’artisanat a affiché le meilleur
taux de pénétration des marchés mondiaux, en particulier dans les pays en développement. Il représentait
65 % de la part de marché mondial détenue par les pays en développement dans le secteur des industries
culturelles. Les produits de design en provenance de ces pays, notamment les bijoux, les articles de mode, la
verrerie, les objets de décoration d’intérieur et les jouets qui pourraient être classés parmi les produits
artisanaux, absorbaient 50 % de la demande mondiale en 2008 (UNCTAD 2010: 129).
Si la marge de progression de l’artisanat sur les marchés mondiaux est importante, les producteurs des
nations en développement se heurtent à un certain nombre d’obstacles. Le marché classique de l’artisanat
n’est pas intégré au marché du « commerce équitable », si bien que les exigences commerciales auxquelles
doivent répondre les producteurs sont élevées. Le marché laisse peu de place à la négociation sur la qualité
des produits, les prix et les délais d’exécution des commandes. Si, à la première commande, les producteurs
ne sont pas en mesure de l’exécuter correctement, cela peut fortement ternir leur réputation sur le marché
et mettre en péril leurs futures commandes. Sur le marché de l’artisanat, non seulement la concurrence est
rude, mais les droits de propriété intellectuelle sont peu protégés. Aussi est-il fréquent que les exportateurs
asiatiques s’approprient les créations artisanales pour les produire et les vendre à moindre coût au
prochain cycle du marché. De plus, la tendance actuelle est à la marchandisation croissante de l’artisanat,
caractérisée notamment par une diminution du cycle de vie des produits (en partie en raison de
l’appropriation des créations par des tiers) et un abandon progressif des créations traditionnelles au profit
d’un design contemporain/minimaliste. Pour que les artisans océaniens soient compétitifs, ils doivent se
distinguer en proposant des créations tendance avec beaucoup de personnalité et en adoptant des stratégies
dynamiques de promotion, alliant participation aux salons commerciaux classiques et présence en ligne.
Arts plastiques
Le secteur des arts plastiques repose sur quatre grandes formes artistiques : la photographie, la peinture, la
sculpture et les objets anciens. D’autres formes d’art émergentes, telles que les installations, sont incluses dans
ces catégories. D’après le Rapport sur l’économie créative 2010 de la CNUCED, le marché des arts plastiques
est solide, les importations s’élevant à 28,9 milliards de dollars É.-U. en 2008, contre 17 milliards en 2002
(UNCTAD 2010: 131). Cette croissance annuelle moyenne soutenue, chiffrée à 12,8 % entre 2002 et 2008,
traduit une demande stable et en hausse dans le secteur des arts plastiques de par le monde. Il est toutefois
important de préciser qu’en dépit d’une hausse des exportations des biens, la part du marché mondial de la
création détenue par les arts plastiques est restée quasiment identique sur cette même période (5,77 % en 2002,
contre 5,02 % en 2008) (UNCTAD 2010: 126).
Ce sont les ventes d’art contemporain et d’objets anciens qui dopent la croissance du secteur des arts
plastiques depuis quelques années. Sur le marché européen, les importations ont affiché une bonne santé ces
dix dernières années, passant de 7,5 milliards de dollars É.-U. en 2002 à 13 milliards en 2008. Dans le sillage
des tendances mondiales, la peinture arrive en tête du marché européen, avec 6 milliards de dollars É.-U. en
importations en 2008, suivie de la sculpture, avec 4 milliards de dollars d’importations. Les secteurs des
objets anciens et de la photographie se sont aussi développés entre 2002 et 2008, les importations
européennes se chiffrant respectivement à 2 milliards et à 818 millions de dollars É.-U. en 2008 (UNCTAD
2010: 134).
16
Les tableaux se sont exportés pour une valeur de 6,3 milliards de
dollars É.-U. en 2002, chiffre qui est passé à 15 milliards de dollars É.U. en 2008, soit environ la moitié de l’ensemble des exportations
d’arts plastiques pour cette année. Les exportations du secteur de la
sculpture, regroupant les œuvres traditionnelles d’ornement et les
sculptures contemporaines, ont atteint près de 9 milliards de dollars
É.-U. en 2008, soit une hausse spectaculaire par rapport aux
5 milliards de 2002. Fait impressionnant : près de la moitié de ces
exportations provenaient d’économies en développement. Ces économies
ont également tiré la croissance du marché des objets anciens, qui est
passé, entre 2002 et 2008, de 2,2 à 3,2 milliards de dollars É.-U. La bonne
santé des ventes en photographie s’est confirmée, les exportations
mondiales se montant à 2,5 milliards de dollars É.-U. pour
l’année 2008. Les pays en développement ont accru leur part
d’exportations pour passer de 8 % en 2002 à 17 % en 2008.
Néanmoins, les ventes tous supports plastiques confondus sont
souvent sous-estimées, car les données disponibles ne tiennent pas
compte des marchés non structurés ou touristiques (UNCTAD 2010:
148).
Sur le marché des arts plastiques, les pays en développement ont
accru leur présence : leurs exportations représentaient 7,1 milliards de
dollars É.-U. en 2008 contre 3,5 milliards en 2002 (UNCTAD 2010: 128).
Toutefois, leur pénétration reste assez modeste sur un marché
dominé par New York et Londres, où les ventes se sont élevées
respectivement à 4 milliards de dollars É.-U. et à 1,8 milliard de livres
en 2006 (Nurse 2006). En 2008, les exportations d’arts plastiques des
pays en développement ne représentaient que 23 % du total mondial,
soit une hausse négligeable par rapport aux 22 % de 2002 (UNCTAD
2010: 128). Toujours en 2008, les arts plastiques ne comptaient que
pour 11 % des exportations de biens « créatifs » des PMA et
seulement 4 % des chiffres combinés pour l’Océanie et les PEID. La
répartition des exportations entre les disciplines plastiques varie
sensiblement selon la catégorie de pays considérée (PMA, Océanie ou
PEID). En 2008, les objets anciens dominaient les exportations des
PMA (80 % du total pour les arts plastiques), alors que la peinture
représentait 57 % des exportations en provenance d’Océanie et des
PEID, suivie de la sculpture (29 %) et des objets anciens (14 %). La
photographie y tient une place négligeable.
D’après le rapport sur la diversité créatrice publié par l’UNESCO en
2009, ce sont les pays industrialisés qui gardent la mainmise sur les
arts plastiques, dont la peinture, la gravure, le tirage d’estampes et la
sculpture, la région océanienne ne contrôlant que 0,6 % du marché
mondial à l’exportation dans ce secteur (UNESCO 2009: 166).
Deuxième modèle de promotion : les
biennales nationales et à l’étranger
L’univers de l’art contemporain mondial
tourne autour des maisons de vente aux
enchères, des galeries et des biennales.
Alors qu’elles n’étaient jadis qu’une
dizaine, les biennales, qui dépassent
aujourd’hui la centaine, représentent des
artistes issus aussi bien des pays
industrialisés que des pays en
développement. Pour les artistes locaux,
elles constituent une fenêtre d’ouverture
sur le système mondial de l’art. En
participant à ces événements, les artistes
peuvent s’assurer une présence sur les
marchés et rencontrer d’autres artistes.
Pour un artiste originaire d’un pays en
développement, se faire connaître à
l’échelle mondiale lors d’une biennale
peut constituer un tremplin vers le
monde de l’art.
Une poignée d’artistes contemporains
caribéens excellent aux biennales
internationales. En 2003, Keith Morrison,
Albert Chong et Arthur Simms sont
devenus les premiers artistes jamaïcains à
pouvoir présenter leur travail à la
Biennale de Venise (la plus ancienne et
peut-être la plus importante du monde
de l’art). Simms a remporté le Prix de
Rome pendant l’exposition et a été invité
par le gouvernement italien à travailler en
résidence à Rome l’année suivante.
Les Caraïbes accueillent également l’une
des plus anciennes biennales instituées
dans un pays en développement. Fondée
en 1989, la Biennale de la Havane a vu le
jour pour donner un espace d’expression
aux artistes des pays en développement.
Elle vise non seulement à remettre en
question l’eurocentrisme du monde de
l’art, mais aussi à créer un espace
d’échanges horizontaux entre les artistes
des pays en développement. Si elle expose
aujourd’hui des artistes du monde entier,
la Biennale de la Havane reste un espace
privilégié d’expression et de
représentation des artistes issus des pays
en développement.
Bien que le marché international de l’art présente un potentiel pour
les artistes des pays en développement, ils ont bien du mal à y
accéder en raison d’un manque de transparence, d’une concurrence
féroce et du « plafond de verre » qui freine la pénétration des artistes
17
non occidentaux. Le marché est dominé par les États-Unis et le Royaume-Uni, à qui l’on attribue 47 % des
ventes internationales d’arts plastiques, qui transitent généralement par New York ou Londres. Ces deux
plaques tournantes sont suivies de Paris, Berlin, Genève et Tokyo (UNCTAD 2010: 148), la Russie, l’Asie et
le Moyen Orient figurant parmi les marchés émergents (UNESCO 2009: 166).
Souvent, les artistes des pays en développement ont même du mal à rivaliser dans leur propre pays. Par
exemple, les marchés locaux caribéens sont principalement constitués de galeries d’art commerciales centrées
sur la peinture à l’huile et les aquarelles de style anecdotique. On retrouve une tendance parallèle dans le
Pacifique, où la plupart des pays ne comptent aucun espace structuré et professionnel servant de galerie
d’exposition et de vente des œuvres d’art. Les artistes contemporains plus innovants, qui créent des œuvres
avant-gardistes, telles que les installations, ont du mal à positionner leur art sur les marchés locaux (Nurse
2006).
Aux États-Unis et au sein de l’Union européenne, la plupart des œuvres d’art sont vendues par
l’intermédiaire de sociétés de vente aux enchères, qui privilégient les artistes occidentaux déjà connus. En
2004, les deux grandes maisons Sotheby’s et Christie’s ont vendu au moins 378 œuvres, pour plus d’un
million de dollars la pièce (CRNM 2008). Les conditions de vente sont rarement divulguées et, pour chaque
enchère gagnante, les commissions des commissaires-priseurs peuvent atteindre 20 %, tant en commission
acheteur qu’en commission vendeur. Par ailleurs, l’identité des acheteurs et des vendeurs est souvent tenue
secrète, étouffant la circulation de l’information sur les marchés.
Les galeries sont également un acteur majeur de la vente d’objets d’art et sont souvent encore moins
transparentes que les sociétés de vente aux enchères. Les ventes s’appuient sur des collectionneurs et
informations privilégiés, et il est rare que les chiffres des ventes soient rendus publics. Les maisons de vente aux
enchères et les galeries peuvent travailler dans un climat commercial extrêmement opaque, car le secteur
est très peu réglementé et aucun agrément n’est obligatoire pour exploiter une galerie (UNCTAD 2010: 148).
Le marché en ligne est assez restreint et concerne essentiellement les dessins et estampes. Il est important de
noter que les enchères en ligne peuvent constituer un bon espace de vente pour les œuvres de moins de
50 000 dollars É.-U. (Nurse 2006).
Les artistes des pays en développement sont également confrontés à une hiérarchie bien ancrée dans le
marché de l’art. En 2003, sur les 87 artistes exposés au Centre Georges Pompidou à Paris, seuls 39 %
n’étaient pas des ressortissants européens et seuls 5,7 % venaient d’un pays en développement (Brésil, Chine
et République de Corée). On dresse le même constat pour la foire internationale d’art de Bâle (Allemagne),
extrêmement influente, où, tant en 2000 qu’en 2005, les principales nations représentées étaient l’Allemagne,
les États-Unis, la Suisse, la France, le Royaume-Uni et l’Italie (UNESCO 2009: 166). Dans le rapport de
recherche qui leur a été commandé par l’UNESCO en 2007, les commissaires d’exposition internationale,
curateurs et critiques d’art Okwui Enwezor et Jean Fischer soulignent qu’en dépit de la mondialisation et
d’une meilleure compréhension du relativisme culturel sur le marché international de l’art, les artistes des
pays en développement restent peu reconnus (Enwezor and Fisher 2007).
Pour ces artistes, d’autres obstacles sont à signaler, en particulier l’absence de systèmes structurés de
soutien, commerciaux ou publics, au sein de leur pays. En général, dans les pays en développement, le
secteur des arts plastiques est emmené par des chefs d’entreprise travaillant seuls, sans soutien appuyé des
pouvoirs publics et sans marché bien structuré. Les distributeurs, notamment les galeristes, les commerçants
des marchés aux puces et des magasins touristiques et les encadreurs, tirent en général plus de bénéfices que
les artistes eux-mêmes, car ce sont eux qui gèrent l’interface avec le client. Dans le monde, peu d’artistes
contemporains issus de pays en développement sont conviés aux biennales internationales, vitrines majeures
de l’expression artistique et étape obligée vers la reconnaissance internationale (UNCTAD 2010: 148).
18
Le caractère imprévisible du marché international de l’art est peut-être le principal obstacle à surmonter sur
la voie de la compétitivité. Toutes les industries de la création sont tributaires des goûts des clients ou de
l’attrait culturel de leurs produits. Toutefois, notre capacité à prédire l’évolution des tendances et des goûts
sur ce marché est pour le moins limitée. La demande et les tendances sont édictées par une petite poignée
de critiques d’art, de commissaires d’exposition et de galeristes, qui marquent de leur empreinte les
mouvements esthétiques, encadrent les artistes et prescrivent au bout du compte ce qui est tendance et ce qui
ne l’est pas. Par ailleurs, les artistes créent avec passion, faisant fi des tendances du marché. C’est ce que
Richard Caves, économiste d’Harvard, universitaire et spécialiste des industries de la création, appelle le
précepte de « l’art pour l’art ». Les artistes peuvent alors renoncer à la valeur commerciale de leurs œuvres,
si les conditions de vente ne sont pas en adéquation avec leurs convictions philosophiques et esthétiques.
Mode
L’industrie mondiale de la mode représente une source à la fois de débouchés et de difficultés pour la région
océanienne. Elle est segmentée de façon générale en trois catégories : la haute couture, le prêt-à-porter et la
mode grand public, ou streetwear. Les grands couturiers créent des vêtements, des chaussures, des parfums,
des bijoux et des accessoires de mode pour une même marque. Les ventes se font par l’intermédiaire de
grands événements de mode très influents et reposent sur l’identité des marques. Ce sont aussi les marques
qui déterminent les ventes des articles de prêt-à-porter, mais on les trouve également dans les magasins
conventionnels, et de plus en plus, sur les sites de vente en ligne. La mode grand public se vend par
l’intermédiaire des salons commerciaux spécialisés dans les différentes catégories de l’habillement (mode
féminine, chaussures, mariages, mode enfant) et, de plus en plus, via des ventes en gros et au détail sur
Internet. La mode grand public et les accessoires de mode faits main sont aussi vendus en ligne et via des
salons commerciaux (Fashion Marketing 3rd ed 2009).
En 2006, les recettes de l’industrie mondiale de l’habillement se sont montées à 1 252,7 milliards de dollars É.U. et devaient atteindre, d’après les prévisions, 1 781,7 milliards à la fin 2010 (total comprenant les
importations, la fabrication et les salaires). Ces données recouvrent toute la gamme de la mode haute
couture, prêt-à-porter et grand public, l’accent étant mis sur cette dernière catégorie. Les importations
d’articles de mode en Europe, qui traduisent de façon plus réaliste la valeur réelle du marché, se
chiffraient à 53,6 milliards de dollars É.-U. en 2006. Ce sont les magasins en dur de vente au détail qui ont la
haute main sur les circuits de vente au détail, avec 92,9 % du marché. Les ventes par correspondance et en
ligne ont représenté respectivement 3,9 % et 3,2 % des ventes (Fashionproducts.com 2011). Si les ventes en
ligne gagnent du terrain depuis le début des années 2000, il est important de noter que les magasins
traditionnels continueront de booster les ventes du secteur de l’habillement. En effet, chaque client a une
relation très personnalisée avec les articles vendus dans l’industrie de la mode (taille du vêtement, goûts
individuels, texture et coupe du tissu, etc.), si bien que le consommateur a, encore aujourd’hui, besoin de
toucher, de sentir et d’essayer un article avant de l’acheter.
19
Troisième modèle de promotion : semaines
de la mode, mannequins et célébrités
L’industrie de la mode caribéenne connaît
un bel essor depuis la première édition de la
Semaine de la Mode caribéenne en 2001. La
société Pulse Entertainment accueille et
promeut l’événement, en s’appuyant sur un
large éventail de méthodes de promotion.
Cette semaine de défilés, destinée à faire
connaître les créateurs de toute la région, a
finalement trouvé écho en 2005 dans
l’édition britannique du magazine Vogue,
où elle a été décrite comme l’une des voix
montantes de la scène internationale de la
mode. Cet événement a permis, non
seulement, d’alimenter la demande et de
faire connaître les créateurs caribéens, mais
aussi de promouvoir des mannequins
caribéens qui portent la mode régionale sur
la scène mondiale.
Pour les artistes caribéens, les grands
défilés régionaux et internationaux sont
un grand tremplin pour se faire connaître
mondialement. En présentant leurs
modèles à la Semaine de la Mode
caribéenne, les créateurs disposent d’une
vitrine internationale. Cette exposition
médiatique est encore plus forte lorsqu’ils
font appel à des mannequins connus
mondialement. Les mannequins ont
sensiblement contribué à la promotion
des créateurs de talent caribéens et à
l’émergence d’un nom pour la mode
caribéenne. La participation de top
models a placé la Semaine de la Mode
caribéenne sous le feu des projecteurs, et le
succès international récent de
mannequins caribéens, tels que Teresa
Lourenco et le modèle masculin Andre
Stewart, a permis à la région de se faire
une place de premier plan dans l’industrie
mondiale de la mode.
Le plébiscite de certaines célébrités a
également propulsé les créateurs caribéens
sur la scène mondiale de la mode. L’une
des créatrices caribéennes les plus connues,
Jessica Ogden, s’est faite un nom le jour où
l’actrice américaine Sarah Jessica Parker a
porté l’une de ses robes pour la couverture
de l’édition londonienne de Time Out en
2003. Jessica Ogden a par la suite été invitée
à la Fashion Week de Londres.
Le secteur de la mode grand public s’est toujours appuyé sur de la
main-d’œuvre bon marché pour entretenir son modèle commercial
de production de masse à faible valeur. L’Arrangement multifibres
(1974-2004) a restreint l’application de ce modèle en créant des
quotas pour les importations de textiles en provenance des nations
en développement, à l’exception des plus pauvres. À l’expiration de
l’Arrangement en 2005, les importations de certains articles textiles
chinois au sein de l’Union européenne ont connu une croissance
de près de 500 %, ce qui a poussé l’UE à fixer de nouvelles
restrictions pour les importations chinoises (BBC 2005). Encore
aujourd’hui, la Chine garde la mainmise des exportations de
vêtements et contrôle 50 % du marché (Fashionproducts.com 2011).
Par ailleurs, l’élasticité-prix de la demande des consommateurs sur
le marché de l’habillement incite les marques à emprunter le
chemin de la « déverticalisation » ou à consolider leur chaîne de
valeur. La compétitivité-prix est de plus en plus rude dans un
marché de l’habillement reposant sur la production de masse à
faible valeur, tributaire d’une main-d’œuvre bon marché. L’Océanie,
où les coûts de la main-d’œuvre sont plus élevés et les populations
plus petites, devrait adopter une approche globale de la création à la
production et cibler les segments moyen/haut de gamme du marché
de la mode, où la demande est moins sensible aux prix.
Dans le marché de la mode, la valeur des produits est déterminée par
la griffe unique du créateur, la qualité des matières premières et des
finitions et la marque. Il est essentiel de bâtir et d’entretenir une
marque pour être concurrentiel sur le marché haut de gamme.
Certaines marques, telles que Chanel, créent des produits et des
tendances depuis plus d’un siècle. Elles ont gagné la confiance des
acheteurs et le statut correspondant et peuvent se permettre de
demander des prix élevés. En termes de promotion, les semaines de
la mode contribuent sensiblement à l’avènement de nouvelles
marques et créateurs et à leur reconnaissance internationale
(UNCTAD 2010: 156). Les États-Unis accueillent le plus grand
nombre annuel d’événements de mode, mais ils ne sont pas aussi
prestigieux que les défilés européens. La mode européenne est
dynamisée par les événements annuels organisés à Paris et à Milan,
reconnues capitales européennes de la mode. Avec une tradition
historique de la mode sur le Vieux continent, les nouveaux créateurs
peuvent parfaire leur apprentissage dans de grandes maisons de
couture (comme Chanel ou Givenchy). Aux États-Unis, en revanche,
le secteur est soutenu par des financiers privés, tels que FTC
Commercial Corp, qui promeut les nouveaux créateurs et organise
des défilés régionaux.
Comme indiqué plus haut, la progression du commerce électronique
et la consolidation de la chaîne de valeur figurent parmi les
principales tendances du secteur. Cela dit, on voit actuellement se
dégager une tendance plus importante pour les pays en
20
développement, à savoir une transition vers l’écolo-chic promouvant un approvisionnement éthique, un
développement durable et des créations éco-responsables (UNCTAD 2010: 67). D’après une étude de TNS
Worldpanel réalisée en 2008, 72 % des consommateurs britanniques disaient accorder de l’importance à la
production éthique de vêtements, tandis que le spécialiste des études de marché Mintel estimait la même
année que le marché britannique de l’habillement éthique avait quadruplé au cours des cinq années
précédentes pour se chiffrer à 294 millions de dollars É.-U. (McAspurn 2009). Dans son rapport de 2005 sur le
consumérisme éthique, la banque britannique Co-operative Bank faisait état de tendances similaires dans la
consommation éthique au Royaume-Uni, et notamment d’une croissance ininterrompue pendant six années
consécutives. D’après ce rapport, la mode éthique était évaluée à 680 millions de livres en 2005 (Domeisen
2006).
Pour le Pacifique, cette tendance fait naître un défi, mais c’est aussi une chance à saisir. Si les créateurs et les
fabricants océaniens parviennent à mettre au cœur de leur production un respect des normes du travail
éthique et des matières premières écologiques, ils pourront tirer profit de cette tendance. Les fabricants
doivent se conformer à des normes du travail strictes, ce qui suppose toutefois des coûts de production plus
élevés.
Dans les pays en développement, les entreprises de la filière textile et habillement en quête de réussite
doivent penser de façon globale la mode. Le plus souvent, les pays en développement se concentrent sur la
création de fibres et produits textiles dans la chaîne de valeur du secteur de l’habillement (United Nations
Industrial Development Organization 2003). Toutefois, pour récolter une plus grande part du juteux marché de
la mode, ces pays doivent adopter une approche intégrée, incluant création, promotion et fabrication des textiles et
vêtements. Les pays en développement sont capables de tirer parti de leurs textiles ethniques uniques sur la scène
mondiale, mais, pour ce faire, ils doivent améliorer leur lecture des tendances actuelles et mettre au point une
marque forte.
Les pays en développement au potentiel le plus prometteur sont le Brésil, l’Afrique du Sud, les Émirats
arabes unis, Singapour, l’Inde et la Russie. Ces pays sont parvenus à se faire connaître sur la scène
internationale de la mode en organisant des événements salués dans le monde entier et en s’attachant
d’abord à créer et à entretenir un attrait pour les marques nationales sur les marchés nationaux (Grail
Research 2009). Si les pays océaniens veulent rivaliser avec ces étoiles montantes de la mode, ils auront
besoin d’un soutien adéquat des pouvoirs publics, de marques nationales fortes et d’événements de mode
reconnus mondialement.
Musique
Le marché mondial de la musique est immense et extrêmement diversifié. Il est difficile d’obtenir des
statistiques fiables et de comprendre ses complexes chaînes de valeur. Les ventes de musique sur support
matériel (CD, bandes, vinyles) ne sont qu’une des dimensions de la contribution de l’industrie à l’économie
mondiale. Il faut y ajouter les recettes des concerts et des ventes en ligne. Néanmoins, d’après les estimations
du rapport Global Entertainment and Media Outlook 2005–2009 publié par PricewaterhouseCoopers, le marché
mondial de la musique enregistrée pesait 33,6 milliards de dollars É.-U. en 2004. Si ces chiffres sont bons, ils
sont en baisse de 7,4 % par rapport aux chiffres de 2003, essentiellement en raison du piratage physique (CD et
cassettes) et sur Internet (PriceWaterhouseCoopers 2010).
21
L’absence de données sur les représentations en direct, les recettes
tirées du droit d’auteur et les transactions financières intra-entreprise
masque la véritable taille du marché. Par contre, les analystes savent
que, malgré une hausse de la consommation de musique dans le
monde, les revenus des compositeurs, des producteurs et des artistes
sont en baisse pour cause de contrats inéquitables avec les maisons de
disques et en raison de l’expansion des téléchargements et partages
illégaux de musique (UNCTAD 2010: 143)
Le marché de la musique a une structure d’oligopole à franges.
L’édition musicale est dominée par quatre grandes maisons de
disques, les « majors » : Warner Music, EMI, Sony Music et Universal
Music. Elles monopolisaient 80 % du marché mondial de la musique en
2008 (UNCTAD 2010: 144), contre 72 % en 2003 (IFPI 2005). Ces quatre
grands noms sont basés dans des pays industrialisés : trois sont
américains et un, britannique. Cela dit, l’industrie se compose aussi
de centaines de milliers, voire de millions, de musiciens, artistes et
compositeurs indépendants, qui exercent leur activité comme des
microentreprises de production. La musique indépendante connaît
son second souffle aux États-Unis, comme en témoigne la
multiplication des groupes qui décident de former leur propre label de
musique et d’enregistrer et de produire leur musique de façon
indépendante.
D’après la Société américaine de la musique indépendante (A2IM), en
2008, les labels indépendants représentaient 32 % des ventes cumulées
d’albums aux États-Unis, soit 1,5 % de plus qu’en 2007. En outre, les
radios du net et les diffusions de vidéos en direct sur Internet sont un
moteur de découverte de la musique indépendante, puisque 40 % des
morceaux diffusés sont enregistrés sous des labels indépendants
(Top40 Charts 2009). En Australie, la musique indépendante ne cesse
de gagner du terrain. L’Association australienne des labels
indépendants d’enregistrement est ainsi passée de seulement 25
membres au début des années 2000 à 350 membres actifs aujourd’hui
(AIR 2011). On a également assisté ces dernières années à la montée en
puissance des labels indépendants. Les sociétés Eleven: A Music
Company et Laughing Outlaw ont ainsi récemment signé de grands
artistes, en Australie et ailleurs (Australian Government 2007). Quoique
plus jeune et encore en plein développement, l’association Independent
Music New Zealand s’est aussi élargie ces dernières années et compte
aujourd’hui 80 membres représentant plus de 300 musiciens et artistes
néo-zélandais (IMNZ 2010).
Il est important de préciser que si ces musiciens ont accru leurs recettes
en termes de ventes de musique, un grand nombre d’entre eux
obtiennent leurs galons sur le marché en se produisant lors de
tournées et en participant à des festivals influents du secteur,
notamment South by Southwest, qui se tient chaque année à Austin,
dans l’État du Texas.
Quatrième modèle de promotion : la
Jamaïque et le reggae
Parmi les genres musicaux nés dans les
Caraïbes, le reggae est celui qui se vend le
mieux. À la fin des années 90, les ventes
mondiales de reggae se chiffraient à
1,2 milliard de dollars É.-U., dont
300 millions de recettes versés
directement aux producteurs, aux
musiciens et aux compositeurs jamaïcains.
En Jamaïque, les recettes de concerts
étaient estimées à 50 millions de dollars
É.-U. en 2006, chiffre qui illustre le poids
des représentations « live » dans
l’économie musicale du pays.
La mouvance reggae a connu la gloire à la
faveur du succès international de son
groupe phare, Bob Marley and the
Wailers. Bob Marley reste la référence du
genre, ses ventes d’albums caracolant encore
largement en tête des classements de reggae
chaque année. Si le nombre de musiciens
et de producteurs de reggae non
jamaïcains s’est multiplié, le berceau du
genre est parvenu à conserver sa place sur
le marché en promouvant l’industrie de
l’enregistrement. On compte plus de 200
studios d’enregistrement jamaïcains, dont
VP Records qui conserve une part
importante du marché du reggae aux
États-Unis. VP Records est classé depuis
plusieurs années numéro un des ventes
dans les catégories maison de disques
et/ou label reggae. Bien que les ventes de
reggae fléchissent à l’échelle mondiale, la
société doit son succès à sa collaboration
avec des stars internationales du reggae et
du hip hop et à l’édition d’albums de
compilations.
Aux antipodes du succès jamaïcain,
dans les autres îles caribéennes, seuls
les artistes solos sont parvenus à percer
dans des genres musicaux non
originaires des Caraïbes. Des styles tels
que le calypso n’attirent le public que
dans des concerts régionaux, et les
exportations se limitent aux festivals
organisés par les diasporas.
22
L’évolution des technologies numériques et de l’Internet a profondément transformé l’industrie musicale.
Grâce à la numérisation de la musique, la vente de morceaux et d’albums est aujourd’hui plus facile et plus
rapide, mais elle a favorisé le partage illégal de fichiers en pair à pair, qui vient grignoter les recettes de
l’industrie.
En 2007, les ventes de musique numérique représentaient 15 % du marché, les Internautes ayant téléchargé
légalement 1,7 milliard de morceaux, ce qui représente 2,9 milliards de dollars É.-U. de recettes pour les
sociétés d’enregistrement (IFPI 2008). Néanmoins, le piratage se généralise : on estime que 34 % des Internautes
âgés de 15 à 24 ans partagent illégalement de la musique. D’après la Fédération internationale de l’industrie
phonographique (IFPI), le partage illicite de fichiers en pair à pair est à l’origine de près de 95 % du total des
téléchargements de musique (IFPI 2008). Les ventes physiques (CD et cassettes) sont en baisse depuis 2005, et
l’écart ainsi créé n’a pas été comblé par les ventes de musique en ligne. À la fin 2008, les recettes des ventes
d’albums affichaient – 3,2 % par rapport à l’année précédente, perte qui n’a pas été compensée par la
croissance des ventes de formats numériques (IFPI 2008).
Fait important : le taux de piratage est d’au moins 50 % dans l’ensemble des pays d’Amérique latine et des
Caraïbes. La Communauté des Caraïbes (CARICOM) estime, dans son rapport The Cultural Industries in
CARICOM: Trade and Development Challenges (Les industries culturelles de la CARICOM : défis du commerce
et du développement), que la plupart des pays de la région enregistrent en fait un taux de piratage proche
de 80 % (Nurse 2006).
Certes, la numérisation de la musique a favorisé le partage illégal de fichiers et entraîné une baisse des
recettes provenant de la vente de morceaux, mais les musiciens ont aussi su exploiter la technologie à leur
avantage. Ils ont aujourd’hui accès à un plus large public, devenu plus éclectique. Les amateurs de musique
peuvent faire leur choix en ligne parmi une offre légale de plus de 6 millions de titres (UNCTAD 2010). En
outre, des groupes imaginatifs ont su utiliser Internet pour se propulser sur le devant de la scène
médiatique. En 2008, Das Racist, un groupe de rap américain, a fait le buzz sur Internet en diffusant sur
youtube.com son clip ‘Combination Pizza Hut and Taco Bell’ (voir Modèle de promotion en page 36 pour des
explications détaillées sur son utilisation créative de la technologie multimédia).
Les amateurs de musique n’ont pas attendu la technologie numérique et s’échangent de la musique depuis
des décennies. En raison de ce partage et des contrats inéquitables proposés par les grandes maisons de
disques, la plupart des musiciens tirent le plus gros de leurs revenus des interprétations en direct et des
produits dérivés. Dans le monde, les recettes des concerts et interprétations « live » ont dépassé
22,2 milliards de dollars É.-U. en 2010, contre 16,6 milliards en 2006 (eMarketer 2011). Au Royaume-Uni,
par exemple, en 2008, les ventes de musique enregistrée ont fléchi, tandis que les recettes des
représentations en direct sont passées à 490 millions de dollars É.-U. (Michaels 2009 ; Music Ally 2009).
Ce ne sont pas les artistes qui manquent dans l’industrie musicale des pays en développement. En revanche,
ils ont du mal à rivaliser sur le marché mondial, car il leur manque les technologies et les compétences
spécialisées à l’échelon local pour produire et distribuer de la musique. En général, l’édition musicale profite
par ailleurs très peu aux artistes des pays en développement, désavantagés par des contrats inéquitables
avec des grandes maisons de disques et par l’inefficacité des organismes chargés de relever les diffusions de
musique et de percevoir les droits à reverser aux artistes, quand ces organismes existent. Même l’Amérique
latine et les Caraïbes, pourtant riches en sons populaires, figurent étonnamment parmi les grands absents du
marché mondial de la musique. Le Mexique et l’Argentine sont les premiers exportateurs de musique dans la
région, tandis que le Brésil séduit un très grand marché national, mais un tout petit marché à l’exportation.
Alors que la musique brésilienne est très appréciée sur le marché international, les problèmes structurels qui
frappent la commercialisation et la distribution sont un obstacle à l’exportation (UNCTAD 2010: 146).
23
Le Pacifique est confronté à des difficultés similaires. Le Secrétariat général du Forum des Îles du Pacifique
(FIP) s’est intéressé dans une étude à l’absence de mécanisme régional de gestion collective et de droit
d’auteur pour la musique et la littérature. D’après l’étude, la protection des œuvres par le droit d’auteur et
la formation d’organisations de gestion collective permettraient aux industries musicale et littéraire du
Pacifique d’engranger dans un premier temps des recettes estimées à un demi-million de dollars É.-U.,
chiffre qui pourrait grimper à un million par an avec le temps. En outre, ces organismes de gestion
collective renforceraient la protection des cultures océaniennes et encourageraient l’innovation (Tiang
2003).
Les pratiques commerciales des grandes maisons de disques sont à l’origine des trois principaux obstacles
barrant l’accès des pays en développement au marché mondial. Premièrement, quelles que soient ses
origines culturelles, la musique est le plus souvent enregistrée dans des studios dans les pays
industrialisés où elle est éditée et distribuée. Cela s’explique en grande partie par le fait que les studios
d’enregistrement et les systèmes de distribution ne sont pas assez performants dans les pays en
développement, ainsi que par le souhait des maisons de disques de contrôler la production dans leurs
propres studios. Deuxièmement, comme les droits d’auteur sont perçus dans le pays où la musique est
produite, dans la pratique, les recettes à l’exportation sont réacheminées vers les pays industrialisés
possédant des studios de production de grande qualité (UNCTAD 2010: 146). Troisièmement, les
musiciens qui font une carrière internationale quittent généralement leur pays pour s’installer dans un
pays développé où les possibilités de se produire en direct et d’être reconnus sont plus nombreuses.
L’industrie de la musique, tant traditionnelle que moderne, est très vivante en Océanie, mais elle aura
besoin de bons studios d’enregistrement et d’une forte présence sur Internet pour être concurrentielle sur le
marché musical international. En plus des moyens traditionnels, les artistes en quête de succès devront avoir
recours à des stratégies de promotion novatrices et auront besoin de systèmes de soutien. Surtout, il est
essentiel d’élaborer des textes de loi énergiques sur la protection des droits de propriété intellectuelle et
d’affecter les moyens nécessaires pour les mettre en application, afin de protéger les marchés locaux et
régionaux qui alimentent actuellement l’industrie musicale océanienne.
Danse
On dispose de très peu de statistiques précises sur la taille du marché international de la danse, mais
l’industrie mondiale des arts du spectacle (théâtre, opéra et danse) pesait, d’après les estimations,
40 milliards de dollars É.-U. en recettes de billetterie en 2005. Les États-Unis et la France restent les deux
principaux marchés, avec des ventes chiffrées respectivement à 7 milliards de dollars É.-U. et à 1 milliard de
livres en 2005. Le mécénat public et privé vient compléter le tableau : en 2005, 6 milliards de dollars É.-U. ont
été injectés aux États-Unis contre 350 millions de livres en France (PriceWaterhouseCoopers 2005).
L’industrie de la danse est fragmentée et diversifiée, alliant spectacles conventionnels à succès, produits
dans des salles connues mondialement, et troupes de danse indépendantes et non conventionnelles qui ont
du mal à subsister. Au premier abord, l’industrie qui rassemble danseurs, chorégraphes et spectacles semble
petite. On peut toutefois voir la danse de façon plus globale et y inclure les festivals, la vie nocturne et les
cours de danse (UNCTAD 2010: 248).
Dans un marché international à la taille et à l’ampleur difficilement quantifiables, le spectacle Riverdance de
1995 se démarque par son immense succès. En tournée pendant plus de 15 ans, ce spectacle de danse
irlandaise a été vu par 18 millions de spectateurs et a rapporté plus d’un milliard de dollars É.-U. rien qu’en
recettes de billetterie pendant ses dix premières années d’existence. Les créateurs du spectacle, John
McColgan et Moya Doherty, ont financé seuls la quasi-totalité du spectacle et ont touché, en bénéfices bruts
annuels, 20 millions de dollars É.-U. (Lavery 2004). Riverdance fait toutefois figure d’exception sur la scène
24
mondiale. La plupart des danseurs et des troupes vivotent avec des salaires en-dessous de la moyenne, tant
dans les pays développés que dans les pays en développement.
Dans les deux catégories de pays, la phase de création et de production reste la plus délicate de la chaîne de
valeur. L’accès aux financements étant difficile, les artistes et les institutions artistiques des secteurs
structurés et non structurés doivent redoubler de créativité pour obtenir des fonds. Sans aide financière, le
parcours créatif de l’artiste s’arrête à la phase de création (Lebethe 2003). Dans les pays industrialisés, les arts
du spectacle, dont la danse, sont lourdement subventionnés par les pouvoirs publics et les mécénats privés.
En Australie, en 2007-2008, le gouvernement a subventionné les arts du spectacle à hauteur de 587,2 millions
de dollars australiens (chiffres incluant les subventions aux sociétés et salles de spectacle accueillant les
productions musicales, les pièces de théâtre, les spectacles de danse, les comédies musicales et les opéras)
(Australian Bureau of Statistics 2010b).
Expliquée en partie par l’absence de politiques astreignantes et la sous-utilisation des politiques en place par
les artistes, la faible protection des droits de propriété intellectuelle affecte la danse, comme la plupart des
autres industries de la création. Or, ce manque-à-gagner pourrait être réinvesti par les artistes pour appuyer
de nouveaux projets dans le secteur (Lebethe 2003).
Dans les pays en développement, l’industrie de la danse allie généralement les expressions dansées
traditionnelles (secteurs structurés et non structurés) et, souvent dans une plus large mesure, les expressions
actuelles (secteurs structurés). Parmi les arts scéniques non originaires d’Occident qui connaissent un succès
notable, on peut citer le théâtre balinais et le nô, art théâtral japonais, qui ont gagné en popularité sur les
marchés européens dans la première moitié du XXe siècle. Aujourd’hui, la danse Theyyam originaire du Kerala
(Inde) est en vogue dans les festivals culturels européens et asiatiques, tandis que l’opéra, un genre
essentiellement européen et américain, progresse sur les marchés asiatiques (UNESCO 2010: 165). Il est
important de signaler que c’est l’actualité géopolitique qui a favorisé l’émergence de ces productions
culturelles en Occident. Au début du XXe siècle, le Japon et la Grande-Bretagne mesurent leur amitié en
signant l’Alliance anglo-japonaise. Aujourd’hui, la croissance économique de l’Inde et son importance
grandissante sur l’échiquier politique mondial attirent l’attention politique et culturelle de l’Occident sur le
sous-continent. Ces événements politiques et économiques ont mis des pays étrangers sur le devant de la
scène médiatique, permettant aux publics occidentaux de porter aisément leur regard sur leurs cultures
uniques.
Les artistes connus contribuent aussi sensiblement à mettre la culture de toute une nation au centre de
l’attention du public. Les artistes locaux qui font une brillante carrière internationale en solo
galvanisent la demande de produits locaux et contribuent à dynamiser le marché intérieur. Le
spectacle Africa Footprint a été représenté en Afrique du Sud pendant 2 ans avant une tournée
internationale. Son succès international a attisé la demande locale (Lebethe 2003).
Voici quelques-uns des obstacles auxquels est confrontée l’industrie de la danse dans les pays en
développement :
• le manque souvent criant de mobilité des artistes des pays en développement, désireux de
s’exporter dans les pays industrialisés (UNCTAD 2010: 239) ;
• la tendance à la fragmentation des industries, couplée au manque de soutien financier, de
soutien public et de reconnaissance ;
• le fait que les productions scéniques dépendent souvent de l’aide financière des ONG et des
bailleurs internationaux ;
• la concentration de la chaîne de valeur, où l’on retrouve à chaque étape les mêmes agents
du marché ; et
• le manque fréquent de compétences en gestion artistique et financière au sein du secteur et au
sein des groupes et entreprises (Lebethe 2003: 22).
25
Le secteur sud-africain de la danse nous offre un exemple intéressant. Les industries culturelles sudafricaines figurent parmi les plus dynamiques d’Afrique et ont pu prospérer avec le soutien des pouvoirs
publics et du secteur privé. Si l’industrie de la danse sud-africaine est l’une des plus importantes du sud du
continent, on estime que les salles de spectacle ont connu une baisse d’affluence de plus de 50 % ces
dernières années. Les chercheurs l’expliquent en partie par une promotion et un marketing insuffisants des
arts du spectacle et l’évolution des préférences culturelles (Lebethe 2003: 25). Cet exemple illustre combien
il est difficile de tenir le public en haleine, même dans les pays où la danse est bien établie.
Non seulement les phases de démarrage et de production des spectacles sont fortement tributaires des
subventions publiques et privées, mais, dans de nombreux cas, le retour économique n’est même pas
suffisant pour rémunérer les investisseurs. Créé pour être présenté au carnaval national, le spectacle The
Brand New Lucky Diamond Horseshoe Club at a Glance, de la Trinité-et-Tobago, a bénéficié du concours du
programme Summerstage de l’Université de l’État d’Indiana, du Ministère de la culture, du développement
communautaire et de la condition féminine ainsi que d’autres partenaires privés. Les producteurs espéraient
que le spectacle marcherait et qu’ils pourraient rentrer dans leurs frais. Toutefois, bien que l’œuvre ait été
vue par deux à trois mille personnes pendant les deux semaines de représentation, les ventes de billetterie
n’ont rapporté que 460 000 dollars de la Trinité-et-Tobago, un chiffre bien en deçà des coûts de production
(1,3 million TT$) et de la paie hebdomadaire des artistes (2 000 TT$) (Nurse 2006). Pour combler cet écart
entre des coûts de production élevés et des recettes souvent faibles, les sociétés du spectacle sont tributaires
des mécènes publics et privés.
Les quelques troupes de danse caribéennes qui se sont produites dans le monde viennent principalement de
Jamaïque. Les compagnies L'Acadco, Ashe, National Dance Theatre Company, Area Youth Foundation et les
groupes de danse représentés au concours du festival annuel de la Commission du développement culturel
de la Jamaïque sont tous partis en tournée ou se sont produits à l’étranger. Toutefois, dans la plupart des
cas, les danseurs reçoivent une aide des pouvoirs publics : leurs frais de transport et leurs indemnités
journalières de subsistance sont prises en charge par l’État, mais les danseurs perçoivent rarement un
pourcentage des recettes de billetterie (Nurse 2006). Les recherches de terrain effectuées au cours de la
troisième phase de la présente étude montrent que ce constat vaut aussi pour les troupes de danse du
Pacifique.
Dans l’ensemble, les perspectives d’exportation de la danse océanienne sur le marché international sont
ténues. En raison de son isolement géographique et de son éclatement en un grand nombre de pays aux
régimes politiques divers, l’Océanie est mal connue sur la scène mondiale. À l’échelle internationale, la
viabilité des productions de danse est impensable sans d’importants fonds de démarrage et de
fonctionnement, sans oublier que la rémunération des investissements n’est en rien garantie. Par ailleurs, les
restrictions applicables aux voyages des artistes dans le monde viennent compliquer davantage encore une
situation déjà difficile sur le plan de la distribution et grevée par le coût d’exportation des productions
dansées.
Il serait plus judicieux sur le plan de la stratégie marketing de cibler le marché du tourisme international,
dans le but de faire connaître les danses d’Océanie à un public occidental. En ciblant les touristes, important
vecteur de devises étrangères dans les pays, on limite par ailleurs les coûts de fonctionnement et de
promotion. Avec un soutien financier approprié, le Pacifique pourrait concevoir une grande manifestation
qui ferait office de vitrine régionale de la danse auprès des touristes étrangers en visite dans la région. Si une
telle production séduisait le public et était soutenue, on pourrait ensuite envisager de l’exporter en
Australie, en Nouvelle-Zélande et aux États-Unis, les principaux marchés touristiques du Pacifique, et
ensuite en Europe.
26
POTENTIEL DU MARCHÉ DU BASSIN PACIFIQUE
Le bassin Pacifique regroupe les pays qui bordent l’océan Pacifique en Amérique du Nord et du Sud, en
Asie et en Océanie. En termes de débouchés potentiels pour les industries culturelles d’Océanie, les pays les
plus accessibles sont l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis, dont les marchés à l’importation sont
en très bonne santé dans le secteur des biens et des services culturels. Ainsi, la Nouvelle-Zélande a importé
pour 1,22 milliard de dollars É.-U. de biens culturels en 2008, et les États-Unis, un mirobolant 18,5 milliards
la même année (UNCTAD 2010). Ces deux pays peuvent offrir d’importants débouchés pour les biens
culturels, mais, pour les besoins de la présente étude, la consultante a choisi de concentrer son analyse sur
l’Australie. En effet, en plus d’être un exemple représentatif de marché du bassin Pacifique, l’Australie doit
être ciblée en priorité par les producteurs des industries culturelles océaniennes.
Étant donné que le présent rapport est axé sur les marchés européens des biens et des services culturels,
l’étude du marché australien présentée ici est de portée limitée. Cela dit, d’après des études de terrain
réalisées au cours de la troisième phase, la consultante a estimé que les marchés du bassin Pacifique
offraient de meilleures perspectives que les marchés européens aux producteurs culturels d’Océanie, en
raison de leur proximité, de leur connaissance de la région et des accords commerciaux et d’investissement
préférentiels déjà en vigueur ou en projet. La consultante préconise la réalisation d’une étude approfondie
des marchés du bassin Pacifique.
Australie
L’Australie est un marché accessible et en pleine croissance que peuvent ambitionner les producteurs
culturels du Pacifique. En Australie, les consommateurs sont friands de biens et services culturels variés,
comme en témoigne le fait que le pays continue d’importer plus de biens et services culturels qu’il n’en
exporte. En 2008-2009, les importations de biens culturels étaient cinq fois supérieures aux exportations (en
termes de valeur exprimée en dollars australiens) (Australian Bureau of Statistics, 2010a). En pratique,
l’Australie a importé pour plus de 7 milliards de dollars É.-U. de biens et services culturels en 2008, soit une
croissance de 12,3 % par rapport aux importations de 2002 (UNCTAD 2010). Les industries culturelles de
façon générale sont très appréciées dans le pays. L’Australie encourage depuis longtemps le concept de villes
créatives ; Melbourne a d’ailleurs été désignée Ville de Littérature au sein du Réseau des villes créatives de
l’UNESCO en 2008 et l’Australie a revendiqué la paternité du terme « industries créatives » en 1994. En 2008,
l’économie créative nationale valait 31 milliards de dollars australiens, employait quelque 5 % de la population
active et générait 7 % des richesses nationales (UNCTAD 2010: 30).
Artisanat
Bien que le Bureau australien de la statistique dispose de données sur les arts plastiques et les « métiers
de l’art et de l’artisanat », il est difficile d’obtenir des informations sur la valeur réelle de l’artisanat dans
le pays. En raison du nombre limité de données accessibles au public, il est difficile de quantifier la
véritable ampleur des marchés de la décoration d’intérieur, de l’ameublement, des accessoires de mode
et de l’architecture d’intérieur en Australie. Si nous connaissions la taille et la valeur de ces marchés,
nous aurions une idée plus précise des débouchés que représente l’Australie pour les produits de
design haut de gamme.
Faute de chiffres sur le secteur, on peut choisir comme valeur de référence la taille de l’industrie des articles
personnels et ménagers pour déterminer la valeur des segments du marché. En 2008-2009, le chiffre des
ventes au détail (grands magasins, habillement, biens non durables, biens ménagers et autres articles) a
dépassé 104 milliards de dollars australiens. Même en supposant que le segment de marché qui nous
intéresse n’en représente qu’un petit pourcentage, on parle toujours de plusieurs millions de dollars
(Australian Bureau of Statistics, 2010b).
27
En outre, d’après diverses sources, les marchés australiens de la décoration d’intérieur et du design sont en
très bonne santé. Le pays accueille chaque année plus de 35 salons grossistes et détaillants où les acheteurs
peuvent voir des articles de design et de décoration d’intérieur produits en Australie et à l’étranger. Par
ailleurs, l’Australian Gifts and Homewares Association, l’une des plus anciennes associations spécialisées dans
les articles de maison, compte plus de 3 000 membres et organise de façon indépendante deux salon
commerciaux grossistes chaque année (Australian Gifts & Homewares 2011).
D’après les données statistiques ainsi que d’autres sources, le marché australien de l’artisanat constitue un
débouché considérable pour les producteurs du Pacifique. La taille et la proximité du marché et les
accords commerciaux préférentiels en projet en font sans nul doute une destination de choix.
Arts plastiques
L’Australie est devenue un acteur incontournable des beaux-arts et de la culture ; elle est représentée par une
myriade d’artistes à d’importantes biennales et organise sa propre biennale à Sydney depuis 1973. La
demande d’œuvres de beaux-arts au sein du marché australien est solide, comme en témoignent les dépenses
annuelles engagées par les ménages dans les arts plastiques (peinture, gravure et sculpture) et la
photographie, à savoir 282 et 203 millions de dollars australiens respectivement (Australian Bureau of
Statistics 2010a).
Le pays compte plus de 500 galeries commerciales d’art, dont la grande majorité expose régulièrement les
artistes avec lesquels elle travaille. En 2000, les galeries ont déclaré 132 millions de dollars australiens de
recettes et 9 millions de dollars australiens de bénéfices d’exploitation (Australian Bureau of Statistics 2010a).
Outre les galeristes, les artistes, les sociétés de vente aux enchères, les musées, les grands magasins et les
commerçants sur les marchés participent aussi aux ventes du marché des arts plastiques australien, ce qui en
fait un marché diversifié et robuste.
Si le marché australien est très prometteur pour les artistes océaniens, certaines informations obtenues
d’artistes de Papouasie-Nouvelle-Guinée semblent indiquer que la discrimination anti-océanienne et la
concurrence de l’art aborigène pourraient freiner l’accès au marché. Les premières tentatives de pénétration
du marché néo-zélandais des beaux-arts ont été plus fructueuses.
Mode
En Australie, le secteur de la mode, de taille enviable, s’appuie sur des fournisseurs et des marques locaux
comme étrangers. Dans le secteur de l’habillement, le commerce de détail pesait 16,3 milliards de dollars
australiens en 2007, soit 4,5 % de plus qu’en 2006 (New Zealand Trade & Enterprise 2008). Alors que l’Australie
possède une vaste industrie de la mode locale et des marques nationales bien établies, plus de 40 % de la
demande est satisfaite par les importations directes. La mode féminine est en première place des ventes au
détail, avec 48 % des ventes au détail de vêtements, suivie de la mode masculine, avec 24 % (Hall
Chadwick, sans date).
Comme la plupart des grands marchés de la mode, le marché de détail australien est extrêmement
concurrentiel. Les principaux points de vente au détail sont les grands magasins, les grands magasins de
vente au rabais, les chaînes de magasins de détail et les petites boutiques. Les grands magasins totalisent 35
à 40 % de l’ensemble des ventes de vêtements pour femme et pour homme et occupent une position
dominante sur le marché. Si les petits exploitants indépendants n’assurent que 20 % des ventes au détail
d’articles d’habillement, cela représente quand même plus de 3 milliards de dollars australiens (Hall
Chadwick, sans date).
Sur fond d’accords commerciaux et d’investissement avantageux, le marché australien de la mode est, de
par sa taille et sa proximité, une bonne cible pour les créateurs du Pacifique. Si la concurrence est rude, la
28
vaste gamme d’acheteurs et de consommateurs dans le secteur du détail constitue, pour les créateurs de la
région, un bon tremplin vers le marché mondial.
Musique
Le marché australien de la musique se porte bien, les dépenses annuelles des ménages s’élevant à 665 millions
de dollars australiens dans ce secteur (Australian Bureau of Statistics 2010a). L’association australienne des
sociétés d’enregistrement (ARIA) indique que les ventes au gros de musique, y compris les enregistrements
sonores et les vidéos musicales, se sont chiffrées à 446,1 millions de dollars australiens en 2009, soit 5 % de
plus qu’en 2008. Si les ventes de supports physiques (CD) ont baissé sur la même période, les ventes de
vidéos musicales et de DVD musicaux sont bonnes et les ventes numériques sont en hausse, avec 18 % des
ventes totales de musique en 2009 (Australian Bureau of Statistics 2010a). Malgré ces bons chiffres et la
multiplication des ventes numériques, le partage illégal de fichiers en pair à pair n’épargne pas l’industrie musicale
australienne.
Plusieurs émissions radiophoniques, notamment Pacific Break sur Radio Australia, constituent des réseaux
de diffusion accessibles sur les marchés australiens. Par ailleurs, le fait que l’Australie soit proche sur le
plan géographique, accueille d’importantes diasporas océaniennes sur son territoire et connaisse la région
en fait un marché plus facile d’accès que les marchés européen et américain, en particulier pour les
musiciens océaniens désireux de partir en tournée et de se produire en direct contre rémunération.
Danse
Les marchés australiens de la danse et des arts du spectacle sont le miroir des tendances mondiales. Bien que
les ménages dépensent chaque année 644 millions de dollars australiens dans les arts du spectacle
(Australian Bureau of Statistics 2010a), la grande majorité des compagnies sont encore subventionnées et
encadrées par les pouvoirs publics et le secteur privé. D’après une enquête réalisée par la fédération
australienne des compagnies d’arts du spectacle (Australian Major Performing Arts Group, AMPAG), les
troupes basées en Australie ont reçu 48,7 millions de dollars australiens d’aide en 2009 (Australian Bureau of
Statistics 2010a). Ces importantes subventions publiques et privées avantagent les compagnies australiennes,
et les troupes océaniennes, privées de ces aides substantielles, ont bien du mal à rivaliser au sein du pays.
DÉBOUCHÉS NATIONAUX ET DIASPORAS
Quelle que soit l’industrie considérée, les producteurs et les chefs d’entreprise peuvent souvent se laisser
éblouir par la perspective prometteuse de pénétrer de vastes et passionnants marchés à l’exportation. Dans
cette quête, beaucoup négligent des marchés plus accessibles et, souvent, plus rentables, qui se trouvent à
leur portée immédiate. Bien qu’elle ne soit pas exhaustive, l’étude de marché présentée ci-dessous donne un
aperçu des marchés cibles potentiels, où les producteurs culturels pourraient mesurer leurs compétences et
leurs produits avant de viser les très exigeants marchés à l’exportation.
Touristes : Dans de nombreux pays du Pacifique, le tourisme est un secteur dynamique, et c’est d’ailleurs
la principale source de richesse (PIB) dans des pays comme Vanuatu, les Fidji, les Îles Cook et Palau (Jiang
et al 2010). En 2010, la région a accueilli 11,6 millions de touristes du monde entier et le secteur a rapporté
33,5 milliards de dollars É.-U. de recettes en 2009 (UNWTO 2011). En dépit du fort potentiel de ce marché,
de nombreux producteurs culturels ne disposent pas d’un accès fiable et de qualité au marché du tourisme
et ne sont pas équipés pour satisfaire à ses exigences. Les touristes sont généralement moins regardants sur
les normes de qualité, mais ont des besoins particuliers en termes de prix, de taille, de fonctionnalité et de
design.
Par ailleurs, les plasticiens et les artisans ont de fortes possibilités d’exploiter les marchés créneaux qu’offre
l’industrie du tourisme, notamment les mariages et lunes de miel dans le Pacifique. En créant des produits
29
particuliers adaptés à ces expériences et en les commercialisant via les complexes hôteliers et les agences
de voyages, les producteurs peuvent séduire de nouveaux consommateurs. Dans tous les secteurs
culturels, les producteurs doivent faire preuve de créativité pour mieux exploiter les marchés touristiques .
Tourisme d’affaires et événementiel : Le tourisme d’affaires et l’événementiel sont un marché touristique
créneau qui offre des débouchés aux producteurs culturels. À l’échelle mondiale, ce marché, regroupant
réunions d’entreprises, séminaires de motivation, congrès et autres événements, représente
environ 30 milliards de dollars É.-U. annuels (One Caribbean 2010). De nombreux offices nationaux du
tourisme visent ce marché pour diversifier et renforcer leur secteur touristique. Les producteurs des
industries culturelles doivent se préparer à commercialiser des produits et des expériences adaptés à ce
marché en plein essor.
Cadeaux d’entreprise/associations avec des entreprises : Comme le tourisme d’affaires, le secteur des
articles promotionnels et le mécénat privé représentent un fort potentiel dans le Pacifique. Les pays où sont
présentes de grandes sociétés d’exploitation des ressources naturelles, comme la Papouasie-NouvelleGuinée, doivent penser de façon créative à la façon d’accéder à ces marchés : cadeaux d’entreprise, articles
promotionnels, mécénat ou encore séminaires de motivation. Les producteurs doivent, néanmoins,
répondre à des exigences spécifiques et respecter des délais courts pour se faire une place sur ces marchés à
potentiel lucratif.
Résidents/Expatriés : Dans certains pays océaniens où sont implantées de grandes organisations bailleurs
de fonds et des organisations de coopération régionale, le nombre d’expatriés, déjà élevé, ne cesse de croître.
Ces consommateurs aiment acheter des produits locaux pour équiper leur maison et faire des cadeaux à leurs
amis et à leurs proches. Toutefois, comme nombre d’entre eux sont des férus de voyage, leurs attentes sont
élevées, que ce soit en termes de qualité ou de design.
Diaspora : Les diasporas océaniennes sont présentes partout dans le monde. L’Australie, la NouvelleZélande et la côte ouest des États-Unis sont la destination de nombreux Océaniens, qui gardent des liens
très forts avec leur terre natale. Certains pays insulaires, tels que les Tonga, exploitent déjà ce marché
lucratif lors de festivals et de voyages d’échanges, qui sont l’occasion pour les émigrés de revenir au pays
une fois par an. Toutefois, l’absence de structure du marché et le caractère ponctuel des ventes laissent
entrevoir une grande marge d’expansion. En tablant sur un développement intelligent des produits, un
renforcement de la promotion et des réseaux, et un perfectionnement des compétences de gestion (en
particulier en matière de fixation des prix), les producteurs peuvent espérer de meilleures recettes.
ANALYSE SWOT DES INDUSTRIES CULTURELLES
L’analyse SWOT, selon son acronyme anglais, est une méthode rigoureuse d’évaluation des forces (Strengths)
et faiblesses (Weaknesses) d’une industrie, ainsi que des opportunités (Opportunities) et menaces (Threats) qui
se profilent dans un secteur particulier. Les forces et les faiblesses désignent les facteurs endogènes, c’est-àdire ceux sur lesquels les acteurs de l’industrie peuvent agir. Quant aux opportunités et aux menaces, elles
correspondent aux facteurs exogènes avec lesquels l’industrie doit composer. La consultante a développé
une analyse SWOT des industries culturelles du Pacifique sur la base des informations présentées dans l’état
des lieux des industries culturelles de la région dressé par Helene George et Letila Mitchell (George and
Mitchell 2010), ainsi que des données qu’elle a elle-même collectées dans le cadre de ses travaux de recherche
documentaire et appliquée. Cet exercice a été réalisé afin de distinguer et de hiérarchiser d’une manière
systématique les éléments susceptibles de contribuer au développement des industries culturelles
océaniennes, et ceux qu’il convient de corriger en élaborant des programmes ou des politiques. L’analyse
30
n’est pas exhaustive, mais elle permet de mettre en évidence les principaux facteurs entrant en ligne de
compte dans chacune des catégories.
Figure 4: Matrice d’analyse SWOT des industries culturelles océaniennes
Forces des industries culturelles océaniennes
Diversité : L’Océanie est une région riche de diversité et de variété, qui recèle d’innombrables biens et
services culturels. Dans les secteurs de l’artisanat, de la musique, de la danse et d’autres pratiques culturelles,
ce potentiel de diversité pourrait se traduire par une large gamme de produits correspondant aux goûts des
acheteurs. Bien que cette diversité ne soit pas mise à profit pour le moment, elle est susceptible de favoriser
l’innovation dans le marchandisage des collections destinées à l’exportation, notamment des produits
artisanaux, qui, bien souvent, ont plus de succès lorsqu’ils font appel à la technologie multimédia et sont
commercialisés de manière judicieuse au sein de collections originales et fascinantes. Cela s’applique
également à l’industrie de la musique. La mondialisation a créé une demande pour des musiques plus
complexes, qui s’inspirent de diverses traditions. L’essor du mixage (qui consiste à mélanger des échantillons
de musique et à les mixer de façon à créer un titre original) a favorisé l’intégration des musiques du monde
dans le marché de la musique pop.
Richesse culturelle : Avec 22 pays, des milliers de langues et autant de traditions, l’Océanie se caractérise
par un patrimoine culturel très riche, dans lequel les artistes peuvent puiser leur inspiration. De fait, Albert
Wendt, un écrivain samoan, a noté que le Pacifique offre une plus grande diversité de cultures que les
autres régions du monde (Synexe Consulting 2010). Cette diversité favorise un environnement créatif dans
lequel les artistes peuvent constamment trouver de nouvelles inspirations. En l’a bsence d’une gestion
efficace de la propriété intellectuelle, les artistes doivent sans cesse innover et créer de nouveaux produits
pour survivre. Cette richesse culturelle de la région océanienne est un des grands atouts de l’industrie.
31
Tourisme : L’attrait touristique du Pacifique Sud constitue sans doute la plus grande force de la région.
Comme indiqué précédemment, la région a accueilli 11,6 millions de touristes étrangers en 2010, et le
secteur a généré 33,5 milliards de dollars des É.-U. de recettes en 2009. Ce sont les petites îles qui ont induit
cette croissance à l’échelon régional, nombre d’entre elles enregistrant une hausse des arrivées égale ou
supérieure à 10 % (UNWTO 2011). Bien qu’il ne s’agisse pas d’un marché d’exportation traditionnel, le
tourisme permet d’engranger des devises fortes dans la région. Il offre également un terrain pour tester des
produits et des pratiques, en vue d’évaluer leur potentiel sur les marchés d’exportation traditionnels. En
outre, lorsqu’ils sont bien conçus et de qualité, les souvenirs achetés en Océanie et ramenés par les touristes
dans leur pays d’origine sont susceptibles de favoriser la diffusion des produits océaniens sur les marchés à
l’exportation et, finalement, d’accroître la demande.
Diasporas : En Australie, en Nouvelle-Zélande et aux États-Unis, les diasporas offrent d’importants
débouchés aux producteurs culturels. Les produits traditionnels font recette auprès de ce type de
consommateurs, et la qualité et la conception du produit priment moins que sur les marchés d’exportation
traditionnels. Il est facile de toucher ces diasporas, car de nombreuses personnes rentrent dans leur pays
d’origine dans le but explicite d’acheter des biens culturels, qu’ils ramènent ensuite dans leur pays de
résidence. La mise en place de circuits de distribution bien structurés serait très profitable aux producteurs
culturels.
Entreprises pionnières : Bien que la majorité des industries culturelles commencent tout juste à exporter
leurs produits, une poignée d’entreprises compétitives ont déjà réussi à se faire une place sur les marchés à
l’exportation. C’est notamment le cas de TAV, une maison de couture des Îles Cook, qui imagine,
confectionne et exporte des lignes de vêtement. Dans le secteur de la musique, Laisa Vulakoro, une
chanteuse de pop fidjienne, s’est également fait connaître sur la scène internationale et a contribué à
accroître la popularité du vude, un genre musical originaire des Fidji, mêlant disco, rock, country et
musique insulaire.
Faiblesses des industries culturelles océaniennes
Irrégularité de la production : Malgré le nombre de producteurs culturels en Océanie, il est difficile de
maintenir des niveaux de production stables. Étant donné que bien des producteurs, en particulier dans le
secteur de l’artisanat, vivent dans des zones rurales, leurs activités sont rythmées par les traditions et la vie de
leur village. Un événement inattendu au sein du village peut interrompre la production, ce qui entraîne des
dépassements de délais et le mécontentement des acheteurs. L’absence de planification à long terme au
niveau des communautés rurales signifie que les producteurs ne voient pas forcément la nécessité d’accroître
leur production à l’approche de la haute saison. Ces efforts de planification pourraient permettre d’améliorer
la capacité de production, mais ils doivent être coordonnés par un gestionnaire chevronné.
Manque d’innovation dans la création : En règle générale, les industries culturelles, notamment les
secteurs de l’artisanat et des arts plastiques, souffrent d’un manque d’innovation dans la création. Les
producteurs ont aujourd’hui tendance à recréer toujours les mêmes produits, et les articles proposés se
ressemblent beaucoup d’un producteur à l’autre. Pour pouvoir se vendre sur n’importe quel marché
(touristique ou d’exportation), les produits artisanaux doivent être bien conçus et respecter les tendances
qui se dégagent sur les marchés cibles. La diversification des produits proposés (par les différents
producteurs) est la clé du succès. Dans le secteur du tourisme, les visiteurs auront davantage de chances
d’acheter plusieurs articles, si un choix de produits leur est proposé. Il en va de même sur le marché de
l’exportation. Les acheteurs en gros rechercheront des lignes et des collections variées, qui reflètent
l’éventail de compétences et de modèles que les producteurs ont à offrir.
32
Dans le secteur de l’artisanat, l’un des principaux facteurs qui induit le manque d’innovation dans la
création est le nombre limité de créateurs à l’échelon local. Il s’agit d’une lacune majeure dans la chaîne de
valeur du secteur artisanal océanien, qui doit être comblée afin de dynamiser les ventes sur les marchés
locaux et d’exportation de façon durable.
Dans le secteur des arts plastiques, il existe une quantité d’artistes qui créent une multitude de produits, mais
la plupart se concentrent sur la peinture ou le dessin en deux dimensions. L’avant-garde artistique est peu
développée, alors qu’elle est essentielle pour faire évoluer la perception de l’art océanien.
Frilosité à l’égard des risques : L’une des principales raisons qui expliquent l’irrégularité de la production
et le manque d’innovation dans la création en Océanie est que les gens n’ont généralement pas l’esprit
d’entreprise ou le goût du risque. Cette frilosité à l’égard du risque empêche les producteurs de prendre les
risques nécessaires pour développer leur activité. Lorsqu’il s’agit de contracter un emprunt, de participer à un
salon professionnel, d’acheter des matières premières ou d’essayer de nouveaux modèles n’ayant jamais été
testés, les producteurs refusent généralement de prendre un petit risque au départ, alors qu’il pourrait être
payant par la suite. Le manque d’esprit d’entreprise explique également l’absence de structure d’exportation
dans ce secteur et le manque de compétences professionnelles.
Absence de structure spécialisée dans l’exportation : La frilosité des Océaniens à l’égard du risque est
ce qui explique l’absence de structure d’exportation dans la chaîne de valeur des industries culturelles. À
quelques exceptions près (comme l’Art Street Gallery en Papouasie-Nouvelle-Guinée), il n’existe aucune
entreprise privée spécialisée dans l’exportation. Pour pouvoir pénétrer les marchés à l’exportation, il est
nécessaire de créer des entreprises locales capables de communiquer avec les acheteurs souhaitant importer,
de passer commande auprès des producteurs, de veiller au contrôle de la qualité, d’expédier les produits,
d’accomplir les formalités douanières et de percevoir et redistribuer l’argent. Tant que ce secteur ne sera pas
développé, les possibilités d’exportation à long terme resteront très faibles.
Manque de compétences professionnelles et de systèmes de soutien : Les marchés à l’exportation sont
complexes et concurrentiels, et les producteurs des pays développés doivent eux aussi prendre des risques
pour les pénétrer. Néanmoins, dans la plupart de ces pays, les chefs d’entreprise peuvent recourir à des
systèmes de soutien pour les aider dans cette voie. Dans les pays océaniens, tout comme dans la plupart des
pays en développement, les chefs d’entreprise des industries culturelles pâtissent d’un manque de soutien
approprié. Souvent, les producteurs eux-mêmes ne possèdent pas de compétences suffisantes en marketing,
gestion et finance, ce qui limite leur capacité de négocier des contrats, d’établir des lettres de crédit et de
dédouaner les produits. Ce problème se pose également dans le secteur du commerce électronique, dans
lequel les petites et moyennes entreprises (PME) se heurtent généralement à des incertitudes juridiques liées
aux échanges transfrontaliers.
De façon générale, l’accès aux financements peut être difficile, en particulier pour les musiciens, les créateurs
et les danseurs qui n’ont aucune garantie matérielle (International Trade Forum 2009). Ces difficultés sont
aggravées par la situation politique actuelle de pays tels que les Fidji, où les restrictions économiques ont
entraîné une réduction des financements en faveur des arts (Dyce 2008). Le manque de soutien dans le secteur
privé peut également freiner la croissance. En Afrique du Sud, par exemple, il existe peu de juristes spécialisés
en droit de la musique capables d’aider les musiciens à négocier des contrats, et le manque de capacités des
sociétés caribéennes de perception et de redistribution des droits engendre une perte de redevances pour les
artistes (Dyce 2008).
Droits de propriété intellectuelle : Même les producteurs des pays les plus développés doivent combler
des lacunes en matière de gestion et d’application des droits de propriété intellectuelle dans les industries
créatives. Pour les producteurs, et en particulier les micro-, petites et moyennes entreprises, ces lacunes ne se
33
traduisent pas seulement par un faible retour sur investissement, elles sont aussi un frein à la création de
nouveaux produits. Les producteurs culturels océaniens doivent remédier à l’inadéquation des politiques et
à la faible protection des droits de propriété intellectuelle, en innovant sans cesse.
Opportunités pour les industries culturelles océaniennes
Taille et croissance du marché : Les biens et les services culturels, qui s’inscrivent dans le champ des
industries créatives, représentent une formidable opportunité pour le Pacifique. En dépit de la crise
économique mondiale de 2008, la demande en biens et services culturels ne fléchit pas. Étant donné que les
distances continuent de se rétrécir sous l’effet de la mondialisation et du développement des
communications, les pratiques et les biens culturels uniques seront de plus en plus valorisés.
Débouchés offerts par le tourisme et les diasporas : Bien qu’à l’heure actuelle, l’accès aux marchés
européens à l’exportation soit encore trop difficile pour de nombreux producteurs océaniens, le tourisme et les
diasporas offrent beaucoup de débouchés. Sur ces marchés, il est en effet plus facile d’atteindre les
consommateurs, car ces derniers se rendent dans les pays d’origine des producteurs, parfois dans le but
spécifique d’acheter des produits culturels. Les touristes et les membres des diasporas ont tendance à être
moins exigeants quant à la conception et à la qualité des produits, et les producteurs n’ont pas besoin de
disposer de compétences professionnelles approfondies pour séduire ces consommateurs. Cependant, plus les
producteurs auront de compétences en marketing, conception de produits et gestion, plus ils auront de
chances de parvenir à pénétrer ces marchés et à en tirer profit.
Technologies : On s’est déjà longuement étendu sur le rôle des technologies dans les industries culturelles.
Si les technologies peuvent porter atteinte aux droits de propriété intellectuelle, elles offrent aussi aux
artistes de nombreux débouchés, notamment dans les pays en développement. L’une des opportunités les
plus attrayantes pour les artistes océaniens réside dans le fait de pouvoir obtenir facilement des
renseignements sur le marché, de promouvoir ou de distribuer des produits numérisés à bas prix et de
faire mieux connaître les cultures du Pacifique dans le monde entier.
Développement des micro-, petites et moyennes entreprises : En Océanie, le secteur des micro-,
petites et moyennes entreprises est très dynamique et joue un rôle moteur dans l’économie, surtout dans
les zones rurales. Dans les industries culturelles, ces entreprises présentent un fort potentiel, car elles
reçoivent un vrai soutien des pouvoirs publics et bénéficient, par conséquent, de conditions favorables et
d’un accès au capital.
Accès à l’aide au développement : Ces dernières années, les bailleurs de fonds internationaux
s’intéressent de plus en plus au potentiel de la culture comme outil de développement. L’Agence
australienne pour le développement international (AusAID), le Programme d’aide néo-zélandais (NZAID)
et l’Union européenne (UE) y ont tous trouvé un intérêt dans leur domaine, offrant aux pays océaniens la
possibilité de bénéficier du soutien de grands bailleurs de fonds et de financements en faveur du
développement des industries culturelles. L’AusAID a ainsi fait des dons à l’association ACTIV de Vanuatu
en vue de promouvoir le développement artisanal et a soutenu ce secteur au Laos, en partenariat avec la
Banque mondiale. La Nouvelle-Zélande a également soutenu des organisations œuvrant au développement
de l’artisanat au Samoa, ainsi qu’un vaste projet dans la soierie impliquant l’ensemble du secteur, au
Cambodge.
Menaces pour les industries culturelles océaniennes
Technologies : Les technologies restent l’une des principales menaces pour les industries culturelles, bien
qu’elles constituent aussi l’une des opportunités les plus intéressantes pour ce secteur. L’accès à Internet a
34
facilité le développement du commerce et du marketing en ligne, des techniques simples et peu coûteuses,
mais il a également favorisé la contrefaçon de produits, le recours à une main-d’œuvre bon marché et le
travail d’usine, ainsi que la vente de produits à bas prix. Par ailleurs, les technologies ont contribué à tirer les
prix vers le bas, ce qui, en fin de compte, est une bonne chose pour les consommateurs ; mais les
producteurs, notamment ceux qui proposent des produits faits main, ne tirent pas toujours profit de ce
modèle de production en série et à moindre coût.
Isolement géographique et fragmentation des marchés : Les superbes îles qui composent la région ainsi
que leur caractère « exotique » et lointain font du Pacifique une destination touristique de choix. Pourtant, ces
mêmes caractéristiques peuvent freiner la croissance du commerce d’exportation. L’isolement géographique des
pays de la région entraîne des coûts d’expédition élevés, car les produits doivent être acheminés par voie aérienne,
ce qui est très coûteux, ou maritime, ce qui prend beaucoup de temps. L’isolement géographique a également un
impact sur le rayonnement de la région à l’échelon mondial. À l’heure actuelle, l’Océanie est peu connue sur le
marché mondial, excepté dans le secteur du tourisme ou dans certains cas particuliers (comme Fiji Water).
L’éclatement de la région constitue un autre obstacle au développement de pôles créatifs stimulant l’innovation.
Les pôles créatifs sont le plus souvent des villes où le secteur des industries créatives est en pleine expansion et
très dynamique. Ces pôles contribuent à informer les producteurs et à tenir les artistes au fait des tendances du
marché.
Secteur guidé par les goûts des consommateurs : Les industries créatives se nourrissent du
dynamisme de la culture et de ses spécificités. Les producteurs mettent à profit ces éléments pour créer des
produits qui soient fonctionnels et esthétiques. C’est pourquoi les biens et les services culturels suscitent
chez le consommateur une réaction à la fois rationnelle et émotionnelle. C’est cette réaction émotionnelle
du consommateur face aux biens et aux services culturels qui donne toute leur force aux produits culturels
sur les marchés. Pourtant, elle constitue également le plus gros défi auquel se heurtent les producteurs
lorsqu’ils créent et commercialisent de tels produits. L’instabilité de la demande est une caractéristique
intrinsèque des industries culturelles. Ce secteur doit en effet satisfaire les goûts personnels et culturels des
consommateurs. Même si les tendances font l’objet d’analyses, il peut être difficile de savoir à l’avance
quels produits auront du succès et quels produits n’en auront pas (UNCTAD 2010: 87).
Courte durée de vie des produits : Étant donné que le secteur est guidé par les goûts des consommateurs,
la durée de vie des produits est généralement courte. Le renouvellement fréquent des produits exige que les
producteurs innovent sans cesse et créent de nouveaux produits. À titre d’exemple, la Recording Industry
Association of America estime que l’industrie musicale américaine investit au moins 15 % de ses bénéfices
dans la recherche et le développement chaque année, un investissement supérieur à celui réalisé par les
industries informatique, chimique et aérospatiale (Nurse 2006: 7). Bien souvent, les produits n’ont de succès
que s’ils sont mis sur le marché au bon moment. Le succès d’un nouvel album peut dépendre des tendances
du moment dans le monde, et son échec peut être lié à la sortie inopportune d’un album à succès ou très
attendu le même jour. Les entreprises doivent investir dans la création de produits, même si les tendances du
marché et le calendrier peuvent compromettre leur succès (UNCTAD 2010: 75).
Immigration : Bien que ce problème n’affecte généralement pas les secteurs de l’artisanat et de la mode, le
succès dans les industries musicale, chorégraphique et plastique peut souvent pousser les grands
producteurs culturels à s’expatrier. Étant donné que dans ces secteurs, la reconnaissance, les
interprétations ou exécutions en direct, ou l’accès aux lieux d’exposition sont importants, les musiciens, les
danseurs et les artistes à succès vont souvent s’établir ailleurs, là où les opportunités sont plus nombreuses
et les marchés, plus vastes. En s’expatriant, les producteurs culturels privent la région d’un fer de lance
créatif et d’un retour économique (UNCTAD 2010: 42).
35
Cinquième modèle de promotion :
L’Afrique du Sud, un nouveau carrefour
de la mode
En Afrique du Sud, l’industrie de la mode
pèse désormais plus de 4,3 milliards de
dollars É.-U. En 2008, le pays a accueilli
neuf défilés reconnus mondialement. Les
principaux facteurs qui ont permis à
l’Afrique du Sud de se faire une place dans
l’industrie mondiale de la mode sont le
soutien ciblé apporté par les pouvoirs
publics nationaux, la notoriété des marques
de mode sud-africaines sur le marché local
et la diversité des maisons de couture,
reflétant une multitude de cultures et de
styles.
Dans ce pays, l’industrie de la mode
bénéficie du soutien des pouvoirs publics,
au titre du programme national de
développement économique. Dans le but
spécifique et bien défini de faire de
Johannesburg un pôle créatif de renommée
internationale, le Service du
développement économique de la ville
s’est attaché à mener un certain nombre de
projets. Concrètement, il a créé un quartier
de la mode au sein de la ville et a organisé
des concours de mode pour stimuler la
création sur le marché. Dans cette ville,
l’industrie de la mode se nourrit de la
diversité des stylistes, qui s’établissent et
se dégagent, et encourage à la fois les
maisons de couture et les créateurs
individuels.
MEILLEURES TECHNIQUES DE PROMOTION
DES INDUSTRIES CULTURELLES
Les industries culturelles englobent une multitude d’activités
économiques et de produits dans le monde. Les paragraphes qui
suivent recensent quelques-unes des meilleures techniques de
promotion des industries culturelles utilisées dans les pays en
développement, et plus particulièrement dans les pays d’Afrique, des
Caraïbes et du Pacifique (ACP). La liste est loin d’être exhaustive,
mais elle donne une idée de la palette d’options qui s’offrent aux
acteurs des industries culturelles océaniennes.
Partenariats régionaux
Pour que le Pacifique soit compétitif dans un secteur culturel donné,
il est essentiel qu’un ensemble minimal de produits soit proposé aux
acheteurs, afin que ceux-ci aient le choix. Sur les marchés de la
décoration d’intérieur et de la mode notamment, les amateurs de
produits artisanaux apprécient les collections bien conçues de
produits faisant souvent appel à des techniques mixtes et dont la
conception nécessite tout un éventail de compétences. En
rassemblant des produits culturels venant de divers pays océaniens,
les entreprises peuvent créer des collections artisanales attrayantes,
qui permettront de capter l’attention de différents acheteurs
potentiels. Les musiciens et les chorégraphes qui s’inspirent des
différentes traditions de la région ont accès à un plus grand nombre
de marchés de niche, car ils s’adressent à une audience très
diversifiée. Dans un contexte plus large, le fait de relier les
entreprises de toute la région permettra de souligner l’abondance
des biens et des services culturels dans le Pacifique.
Les partenariats régionaux peuvent également permettre de structurer
les différents secteurs et d’intervenir au nom des producteurs
individuels. La Caribbean Copyright Link est un bon exemple de
fédération régionale visant à soutenir les musiciens et les
compositeurs. Ce projet commun regroupe quatre organismes de
gestion des droits d’auteur et a permis d’accroître les droits perçus de
1,2 million de dollars É.-U. en 1999 à 2,6 millions en 2005.
Enrichissement mutuel
Les partenariats régionaux sont source d’enrichissement mutuel, un
élément vital pour les industries créatives. Dans les industries
culturelles, on parle d’enrichissement mutuel lorsque deux
traditions, dessins, motifs ou autres éléments distincts sont réunis de
manière à former un nouveau bien ou service culturel. C’est de cette
façon que naissent la plupart des grands genres musicaux : le jazz
est issu d’un brassage de musique populaire américaine et de
rythmes africains, et le reggae est le fruit de l’évolution du ska et du
rocksteady.
36
La culture n’est pas immuable et son dynamisme dépend de ces possibilités d’enrichissement mutuel au
profit de l’innovation et du changement.
Bien que, la plupart du temps, cet enrichissement mutuel se fasse naturellement, les pouvoirs publics et les
organisations artistiques peuvent encourager le partage et l’échange d’idées culturelles. Les biennales
internationales d’art constituent, par exemple, des occasions de partager et d’échanger des idées de manière
systématique ainsi qu’un espace privilégié de promotion pour les artistes individuels. De même, pour le
Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le Festival panafricain de la danse
représente un moyen de promouvoir l’enrichissement mutuel en Afrique. Le PNUD a soutenu trois artistes
du Ballet national du Rwanda et deux artistes de l’Association des arts créatifs des lacs Victoria et Nyassa,
afin qu’ils travaillent avec des membres d’une ONG brésilienne. À l’issue de cette expérience, le groupe a
présenté le fruit de son travail dans le cadre du Forum culturel mondial et de la Conférence internationale
sur l’économie créative pour le développement, à Rio de Janeiro. Ensemble, ces artistes ont créé plus de
300 pièces, en utilisant diverses techniques de teinture par nœuds, de batik et de sérigraphie (UNCTAD
2010: 36). Ainsi, ils ont acquis différentes compétences et techniques, et ont profité de cette occasion pour
lancer leurs produits sur le marché.
Partenariats avec le secteur privé
Seule une petite poignée de marques venant des pays en développement sont capables d’entrer en
concurrence avec Louis Vuitton, Prada et Chanel. Cependant, avec le soutien et l’aide de ces sociétés
mondialement connues, les chefs d’entreprise des pays en développement peuvent utiliser les grandes
marques pour pénétrer les marchés internationaux. La collaboration entre Louis Vuitton et Edun, une maison
fondée par Bono, le chanteur du groupe U2, et sa femme, est un exemple de partenariat avec le secteur privé.
Ensemble, les deux marques ont tendu la main à Made, une société éthique qui regroupe des artistes kényans,
en vue de créer une nouvelle collection qui évoque les origines africaines de l’homme. Cette collection a
remporté un franc succès et a bénéficié de l’image de marque de Louis Vuitton ainsi que de la célébrité de
Bono.
Partenariats avec le secteur public
Les chefs d’entreprise des pays en développement n’ont pas tous la chance d’être choisis personnellement par
Bono. Néanmoins, un grand nombre d’organisations multilatérales de développement financent des
programmes visant à développer les industries culturelles. En 2008, le Centre du commerce international
(ITC), organisme conjoint de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et des Nations Unies, a fait appel
aux leaders de la mode européenne afin d’évaluer le potentiel commercial des producteurs africains de sacs et
d’accessoires. Max&Co, une maison de mode italienne, a utilisé des échantillons pour créer une collection de
sacs et de foulards provenant d’Ouganda et du Kenya. Cette collection a fait fureur, mais celle-ci n’aurait pu
voir le jour sans la collaboration et le soutien de l’ITC (l’ITC a également apporté aux producteurs des
compétences en matière de création d’entreprises) (Cipriani 2009).
Dans le monde, de nombreux organismes soutiennent le développement des PME et les industries
culturelles des nations en développement : le PNUD, la Banque mondiale, l’ITC, EuropeAid, le Secrétariat
du Commonwealth et l’USAID, pour n’en citer que quelques-uns. Cela dit, il est également important que
les industries culturelles bénéficient d’un soutien à l’échelon national. Les pouvoirs publics doivent mettre
en place des politiques de développement des industries culturelles et des exportations, pour stimuler le
secteur culturel dans leur pays. Dans le cas des six étoiles montantes de la mode (mentionnées
précédemment), le soutien public a joué un rôle de premier plan dans cinq pays. Dans l’industrie de la
mode sud-africaine, le soutien public a conditionné l’essor de ce pays en tant que carrefour de la mode
(voir Modèle de promotion ci-dessus pour plus de détails) (Grail Research 2009: 12).
37
Dans le cadre des partenariats avec les secteurs privé et public, les producteurs doivent passer par des
intermédiaires, qui les mettent en relation avec les grandes sociétés occidentales et renforcent leurs
compétences professionnelles. Ces intermédiaires apportent un capital social et financier aux partenariats en
faveur des entreprises des pays en développement.
Des marchés nationaux aux marchés à l’exportation
La croissance des marchés nationaux, notamment des marchés locaux et touristiques, est une étape essentielle
dans le développement de secteurs d’exportation profitables. Les marchés nationaux contribuent à financer la
production et permettent, par conséquent, d’absorber les produits qui ne marchent pas et de développer les
compétences professionnelles des producteurs, tout en présentant moins de risques que les marchés à
l’exportation. Par ailleurs, les marchés touristiques permettent aux producteurs de tester leurs produits en
investissant moins d’argent dans la distribution et de recueillir directement les réactions des consommateurs
des marchés d’exportation. Ils peuvent également permettre de renforcer la présence d’un pays sur les
marchés à l’exportation. Ce n’est qu’après que les marques de mode locales ont gagné en notoriété sur les
marchés nationaux que l’industrie de la mode sud-africaine a acquis une renommée internationale.
Festivals
Les festivals constituent un facteur déterminant de l’économie nationale. Au Brésil, en Colombie, à Cuba et à
la Trinité-et-Tobago, les carnavals génèrent des retombées économiques et culturelles à l’échelon national. Sur
le plan économique, les festivals ont des retombées considérables, notamment des avantages commerciaux
directs en ce qui concerne les interprétations ou exécutions en direct et enregistrées, ainsi que des avantages
indirects liés aux recettes touristiques. Sur le plan culturel, ils permettent de pousser les musiciens et les
danseurs de chaque pays sur le devant de la scène internationale. Les festivals tiennent également lieu
d’incubateur ou de banc d’essai en permettant aux artistes de tester de nouveaux produits, et aux chefs
d’entreprise, d’acquérir des compétences professionnelles. Au Brésil, le carnaval génère un chiffre d’affaires
annuel d’environ 600 millions de dollars É.-U. et constitue une source d’emploi pour près d’un demi-million
de personnes (UNCTAD 2010: 39). Cependant, pour que les festivals entraînent de telles retombées
économiques, il est nécessaire de les « vendre » de façon judicieuse et de proposer des produits culturels qui
répondent aux besoins des marchés cibles.
Stratégie de marque
La stratégie de marque reste le pilier de la promotion traditionnelle et joue un rôle de plus en plus
important dans la différenciation des produits et des entreprises dans toutes les industries. Un nombre
croissant de consommateurs font de plus en plus attention à leur statut et à la mesure dans laquelle les
produits et services peuvent contribuer à renforcer ce statut (une tendance appelée « statusphère » par
Trendwatching.com). Les marques de luxe, les marques écologiques, les marques locales et les marques de
l’information attisent toutes la volonté du consommateur de paraître riche, respectueux de
l’environnement, amateur de produits locaux ou constamment informé. Une stratégie de marque peut donc
permettre de pousser une petite entreprise peu connue sur le devant de la scène internationale.
La stratégie de marque peut être appliquée à différents échelons, notamment au niveau régional, national,
sectoriel ou entrepreneurial. La renommée d’une entreprise ou d’un secteur peut permettre de rehausser
l’image d’un pays, et vice-versa (UNCTAD 2010:50). Le Pacifique pourrait repenser et exploiter ses marques
touristiques pour se forger une image de région riche de diversité culturelle et d’intérêt. Il n’en reste pas
moins que la valorisation de la marque à tous les niveaux requiert un investissement considérable. L’image
de marque doit incarner l’essence de l’entreprise et non se contenter de décrire le produit. De plus, elle
devrait être considérée comme une promesse que l’entreprise fait au consommateur. C’est pourquoi les
sociétés devraient consacrer du temps à leur image de marque, de façon à formuler des promesses réalistes.
38
Stratégies de promotion innovantes
Bien que de nombreuses industries culturelles utilisent les circuits de
commercialisation traditionnels (encore aujourd’hui, 92,9 % des ventes
du secteur de l’habillement sont réalisées dans des magasins
traditionnels), il peut être profitable pour les producteurs d’associer
des méthodes de promotion traditionnelles et des stratégies
innovantes. Les points évoqués ci-après constituent des exemples de
stratégies de promotion innovantes qui ne peuvent être considérées
comme les meilleures techniques, car la plupart d’entre elles sont
encore trop récentes pour être évaluées. Il s’agit plutôt d’activités
pouvant éventuellement être intégrées dans des stratégies de
promotion plus traditionnelles.
Cocréation : Décelée par Trendwatching.com comme une tendance à
observer, la cocréation (aussi appelée customer-made) désigne une
approche unique selon laquelle les producteurs et les consommateurs
créent un produit ensemble. Voici la définition qu’en donne
Trendwatching.com :
Pratique commerciale consistant à créer des biens, des services
et des expériences, en étroite collaboration avec des
consommateurs avertis et créatifs, et à exploiter le capital
intellectuel de ces derniers, en leur donnant voix au chapitre (et
en les rémunérant) en échange de ce qui est réellement produit,
fabriqué, développé, conçu, proposé ou transformé
(Trendwatching.com 2011).
Les produits ainsi créés suscitent l’intérêt des consommateurs et
renforcent la notoriété de la marque et du produit final, grâce aux
réseaux sociaux et à la couverture médiatique. Le fait d’inclure les
consommateurs dans le projet permet également de vendre la marque et
le produit final via leurs propres circuits commerciaux et réseaux
sociaux.
Traçabilité affective : Dans l’ère de l’information, les consommateurs
sont désireux d’obtenir le maximum de renseignements sur les produits
et les expériences qui leur sont proposés. Ils désirent savoir qui a élaboré
leur repas, d’où viennent les aliments qui le composent et comment ceuxci ont été acheminés jusqu’à leurs magasins locaux. Dans les industries
culturelles, ce désir est encore plus vif. L’intérêt que suscitent les produits
et services culturels réside souvent dans la singularité du produit ou
l’histoire de l’artiste qui l’a créé. Cependant, lorsque les producteurs et les
biens sont séparés sur les marchés à l’exportation, il est plus difficile
d’obtenir ces renseignements. Pour remédier à cette situation, les
producteurs ont commencé à « marquer » leurs produits de leur
empreinte.
Sixième modèle de promotion :
L’opposition technologies/tradition dans
la musique
En dépit de la généralisation du piratage
sur Internet, un grand nombre de
musiciens utilisent le Web et les services
de musique en ligne pour se faire
connaître sur le marché. En 2008, Das
Racist, un groupe de rap de New York,
est devenu célèbre en diffusant sur
youtube.com son clip phare
‘Combination Pizza Hut and Taco Bell’.
La renommée qu’il a acquise sur Internet
a permis à ce groupe de distribuer deux
albums gratuitement en ligne, en 2010.
MTV a placé Das Racist parmi les
25 meilleurs nouveaux groupes du
monde et Rolling Stone Magazine a
classé le titre ‘Sit Down, Man‘parmi les
50 meilleurs singles de 2010. Le groupe
prévoyait de sortir son premier album
payant fin 2011, en ayant déjà une foule
de fans prêts à l’acheter.
En revanche, certains groupes préfèrent
utiliser des stratégies de promotion
traditionnelles pour acquérir une
popularité et se voir proposer un contrat
par une grande maison de disques.
Menwhopause, un groupe de rock
indien qui s’est formé en 2001, s’est fait
connaître petit à petit, en utilisant
essentiellement des méthodes de
promotion classiques. En 2007, le
groupe a assisté au festival South by
Southwest, le plus grand rendez-vous
des professionnels de l’industrie
musicale mondiale, participé à des
concours internationaux, ce qui lui a
valu le prix Jack Daniels du meilleur
groupe de l’année 2007, et effectué des
tournées en Inde et aux États-Unis. En
2008, le groupe a finalement signé un
contrat avec EMI/Virgin Records India,
qui a produit son second album et
parrainé sa première tournée nationale
en Inde. Le premier album du groupe,
financé et produit de façon
indépendante, a eu peu de succès, mais
le second, financé et enregistré sous le
label EMI/Virgin, est resté en tête du
hit-parade indien au cours des premiers
mois qui ont suivi sa sortie.
39
Les technologies contribuent pour beaucoup à rapprocher les producteurs des consommateurs, par le biais
de la traçabilité affective. En ayant recours à la radio-identification (RFID), au code-barres ou au code QR,
les producteurs ont la possibilité de mettre à la disposition des consommateurs des informations sur
l’histoire du produit. Ainsi, le groupe Borges attribue à chacune de ses bouteilles d’huile d’olive un numéro
de lot permettant au consommateur d’obtenir des renseignements sur l’origine géographique des olives, la
date de pression, le nom du producteur, le lieu de pression, ainsi que sur la dominante et les notes de
dégustation. Cette technique convient parfaitement aux industries culturelles, qui sont riches d’histoires
fascinantes au sujet des traditions, des producteurs, des lieux et des procédés. Les consommateurs
recherchent de plus en plus des produits authentiques et singuliers ayant une histoire. Le fait de leur donner
des explications sur l’histoire d’un produit culturel permettra d’accroître sa présence sur le marché et
l’intérêt qu’il suscite.
Par ailleurs, les producteurs culturels et les vendeurs peuvent créer des étiquettes radio, des codes-barres et
des codes QR uniques qui, lorsqu’ils sont lus (généralement à l’aide de lecteurs mobiles), permettent
d’orienter les acheteurs potentiels vers une page Web interactive sur le produit et ses producteurs. Ces codes
peuvent accompagner les supports de promotion touristiques, être affichés dans les restaurants, les hôtels ou
les sites touristiques, ou encore figurer sur des affiches, afin de faire mieux connaître les produits et les
producteurs culturels.
Services d’abonnement : Les abonnements aux magazines et les services de livraison à domicile ne sont pas des
stratégies nouvelles. C’est le fait de les associer qui est nouveau. Par exemple, Canadian Papirmasse livre une
reproduction artistique chaque mois à ses abonnés, tandis qu’Alula, une société implantée aux États-Unis,
propose à ses abonnés quatre œuvres d’art textiles en édition limitée par an. Turntable Kitchen, une société
américaine, a adopté une stratégie de promotion unique fondée sur des services d’abonnement, en faisant rimer
cuisine avec musique. Chaque mois, les consommateurs reçoivent une recette, des ingrédients sélectionnés et
emballés, ainsi qu’un accompagnement musical enregistré sur une clé USB. Cette technique permet de faire une
promotion croisée et de solliciter plusieurs des cinq sens des consommateurs (marketing sensoriel). Les associations
de produits dans les industries culturelles sont très nombreuses. Il est possible d’associer des musiques et des
reproductions artistiques et de les envoyer aux abonnés, afin de leur faire connaître plusieurs genres culturels
océaniens. Cette stratégie de promotion permet aux artistes et aux musiciens de conquérir de nouveaux marchés, tout
en conservant une source de revenus stable, alimentée par des produits plus modestes et moins coûteux.
Technologies : Bien que les technologies tiennent une place importante dans nombre de stratégies de promotion
innovantes mentionnées précédemment, elles peuvent être considérées comme une menace pour les industries
culturelles, en particulier pour le secteur musical. Pourtant, de nombreux musiciens finissent par s’y convertir. Le
partage illicite de fichiers musicaux constitue l’un des plus gros problèmes auxquels sont confrontés les musiciens.
Pour le contourner, Madonna a décidé de distribuer son dernier album gratuitement en ligne. Au lieu de continuer
à tirer l’essentiel de ses revenus de la vente d’albums, la chanteuse a mis un terme au contrat qu’elle avait signé
avec une maison de disques pour se tourner vers une société de production. Elle s’est alors attachée à organiser sa
tournée la plus grandiose. En distribuant leurs musiques gratuitement, les musiciens ont la possibilité d’embrasser
un marché plus large, tout en tirant leurs revenus des concerts, plutôt que de la vente d’albums.
Cette stratégie peut être mise en œuvre dans d’autres secteurs. Le site de style Kuvva.com acquiert des fonds
d’écran auprès de graphistes et d’artistes en vue d’habiller les comptes Twitter et les ordinateurs des
utilisateurs. Kuvva propose à ces derniers de s’inscrire pour pouvoir « styliser » leur ordinateur ou leur
compte Twitter. Ce site a été partagé par 1,6 million d’utilisateurs de Twitter et a vu sa taille quadrupler
depuis son lancement. Les artistes qui y apportent leur contribution ont de cette façon la possibilité d’acquérir
une notoriété au niveau mondial, notoriété qui pourrait déboucher sur des ventes dans le futur.
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Financement participatif : La création de produits et la promotion des biens culturels sont souvent des
processus coûteux et très longs. Pour supporter les coûts induits par la création et la promotion, les producteurs
créatifs se tournent de plus en plus vers le grand public. Le Web et des plateformes avantageuses telles que
Microfundo.com et Indiegogo.com ont effectivement permis à différents chefs d’entreprise d’entrer
personnellement en relation avec des particuliers prêts à investir. Les particuliers peuvent ainsi investir dans
de nouvelles entreprises par le biais d’une plateforme en ligne et partager les profits du projet. Parfois, un
chef d’entreprise sollicite l’avis et les conseils de ses investisseurs (voir Cocréation ci-dessus), créant ainsi des
liens directs entre entreprises et consommateurs4.
Kickstarter.com est l’un des plus grands sites de financement participatif essentiellement dédiés aux projets
créatifs. L’un de ces projets, appelé Rabbit Island, consistait à créer une résidence d’artistes sur une île du lac
Supérieur (États-Unis). Pour cela, ses fondateurs avaient besoin de bâtir les infrastructures de base requises
sur l’île, d’acheter un bateau et de couvrir les dépenses locales de fonctionnement. Alors que leur but était de
réunir seulement 12 500 dollars, ils ont récolté 14 840 dollars auprès de 189 mécènes. Les catégories de
contribution variaient de 10 dollars à 6 000 dollars, différentes contreparties ayant été accordées aux
investisseurs (du fourre-tout sérigraphié au choix du nom du bateau, en passant par l’octroi du statut de
membre campeur officiel) (Kickstarter.com 2011).
4
Pour tout complément d’information sur les sites de financement participatif et leurs conditions, veuillez consulter la
page suivante : http://blog.webdistortion.com/2010/07/18/9-crowdfunding-websites-to-help-you-change- the-world/
41
DEUXIEME PARTIE : POLITIQUES ET ACCORDS COMMERCIAUX
APPLICABLES AUX INDUSTRIES CULTURELLES
POLITIQUES ET ACCORDS COMMERCIAUX
Les politiques et les accords portant sur le commerce national, régional et international peuvent contribuer
sensiblement à l’essor des échanges commerciaux de biens et de services culturels au sein et au départ de la
région océanienne. Il existe dans le Pacifique trois accords commerciaux régionaux visant à intensifier le
commerce infrarégional : l’Accord commercial entre les pays insulaires du Pacifique (PICTA), l’Accord de
rapprochement économique entre les pays océaniens (PACER) et l’Accord régional de coopération commerciale et
économique dans le Pacifique Sud (SPARTECA). Les pays océaniens planchent actuellement sur PACER+, accord
qui inclut l’Australie et la Nouvelle-Zélande dans le but d’étendre le régime de libre-échange à toute la
région Pacifique. Par ailleurs, l’UE est depuis 2008 en pourparlers avec les pays du Pacifique dans l’optique
d’établir un Accord de partenariat économique (APE) en lieu et place de l’Accord de Cotonou/Convention
de Lomé.
La présente analyse vise à présenter sous un éclairage nouveau la façon dont on pourrait utiliser ces accords
en devenir pour promouvoir le commerce et le développement des industries culturelles dans le Pacifique. Il
faut toutefois préciser que les industries culturelles ne figurent généralement pas parmi les premiers secteurs
concernés par les accords commerciaux internationaux. Le plus souvent, les politiques nationales, les
analyses précises des marchés et la conception des produits jouent un rôle bien plus important dans la
réussite ou l’échec des industries culturelles qui tentent de percer sur les marchés à l’exportation.
Pour faciliter le commerce des biens et des services culturels, on dispose de deux grandes catégories de
mesures de politique générale : les mesures tarifaires et les mesures non tarifaires. La mise au point et l’application
de mesures non tarifaires restent une option importante pour les industries culturelles, et il convient d’en évaluer le
pour et le contre. Parmi les mesures non tarifaires, les prescriptions relatives au contenu d’origine locale, à l’étiquetage, à
la mise sur le marché, au conditionnement et aux droits de propriété intellectuelle peuvent influencer de façon décisive
l’application concrète d’un accord commercial dans les secteurs culturels.
Avant d’entrer dans le détail des politiques et accords commerciaux en vigueur et en projet, il convient de
réitérer que les politiques nationales jouent un rôle central dans le développement des industries
culturelles. L’existence de politiques nationales énergiques en faveur de la culture peut permettre de jeter
des bases solides et de bâtir l’infrastructure nécessaire pour que les industries culturelles prospèrent, y
compris via l’affectation directe ou indirecte de fonds publics à la stimulation du commerce culturel. Au
sein de l’UE, par exemple, les dépenses publiques engagées dans le secteur de la culture ont atteint quelque
50 milliards d’euros en 2008 (UNCTAD 2010:209). Dans le Pacifique, les politiques nationales doivent être
améliorées à plusieurs égards : augmentation des crédits affectés au développement des secteurs culturels,
accélération du dédouanement des marchandises d’exportation aux ports et aux douanes, accélération et
simplification des inspections et des formalités administratives, et recherche de solutions à la pénurie (ou
au coût prohibitif) des matières premières de qualité.
Approche du commerce dans les industries culturelles de l’UE
Depuis 1947, les relations économiques qu’entretient officiellement l’UE avec le reste du monde sont régies
par l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT). Les négociations et les accords
conclus à ce titre ont donné naissance en 1995 à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), créée pour
contribuer à réglementer le courant des échanges et superviser la mise en œuvre d’accords tels que le GATT
(World Trade Organization 2012). En 2000, l’UE et les pays ACP ont noué des relations privilégiées en
signant l’Accord de Cotonou, visant à développer et à libéraliser les échanges entre l’UE et les 79 États du
42
groupe ACP (European Commission 2011). En 2008, l’UE a décidé de remplacer l’Accord de Cotonou par
une multitude d’APE négociés individuellement avec les différents pays ACP ou collectivement avec des
sous-régions du groupe (Overseas Development Institute 2008).
Tels qu’ils s’appliquent aux industries culturelles, les APE offrent davantage de perspectives de
développement et une plus grande marge de manœuvre pour élaborer des politiques portant
spécifiquement sur les échanges commerciaux culturels. Toutefois, ils viennent substituer un régime
temporaire de libre-échange réciproque entre les pays océaniens et l’UE aux arrangements commerciaux
préférentiels nés de l’Accord de Cotonou. D’après l’UE, les avantages pour le Pacifique sont les suivants :
accès renforcé aux marchés de l’UE, amélioration de la capacité de production, possibilités de formation
et renforcement de la transparence politique. Les volets des APE intéressant les producteurs et les
prestataires de services des pays ACP sont notamment les suivants :
• accès en franchise de droits aux marchés de l’UE, sans restrictions quantitatives ni droits à
acquitter pour les exportations vers l’UE ;
• élargissement des marchés régionaux ;
• ouverture progressive des marchés des pays ACP aux importations de l’UE et protection
permanente de 20 % des marchandises dans les secteurs de l’économie les plus fragiles ;
• accroissement des possibilités offertes par l’UE en matière de développement lié au commerce ; et
• engagement de réformes plus vastes visant à renforcer les lois, à attirer les investisseurs locaux
et étrangers et à créer des conditions propices aux échanges commerciaux (European
Commission: Trade 2011).
Du côté des industries culturelles, les volets des APE revêtant le plus de pertinence et d’importance sont les
suivants :
• des règles d’origine simplifiées et plus souples, susceptibles de dynamiser sensiblement les
secteurs de l’artisanat, des arts plastiques et de la mode ;
• des dispositions mode 4 autorisant l’entrée et le séjour temporaire de personnes physiques au sein
de l’UE pour le lancement d’une activité commerciale (voir analyse CARIFORUM-UE ci-dessous
pour plus de détails) ;
• une réduction des tarifs applicables aux biens culturels (hormis ceux de l’audiovisuel) ; et
• un assouplissement des mesures non tarifaires, notamment des formalités administratives
pour les exportations et des prescriptions douanières et portuaires.
Bien que les APE aient été conçus pour accroître le commerce des pays en développement vers l’Europe, la
réduction progressive des tarifs applicables aux exportations européennes aura également une incidence
sur les économies des pays en développement. Certains pays craignent une inondation des marchés
nationaux par des marchandises importées d’Europe si le régime commercial préférentiel instauré par
l’Accord de Cotonou est abandonné au profit d’un régime de libre-échange. C’est d’autant plus
préoccupant pour les industries culturelles du Pacifique que la balance commerciale de la région reste
déficitaire dans les secteurs de la création (les importations sont supérieures aux exportations) et que les
consommateurs locaux préfèrent la mode et la musique occidentales. En outre, certains pays estiment que
la perte des recettes tarifaires découlant de la mise en place d’un APE aura des retombées néfastes sur leur
économie. Les effets particuliers que pourraient avoir les APE dans chacun des cinq secteurs concernés sont
décrits succinctement dans le tableau 1.
43
Tableau 1 : Effets possibles des APE sur les différentes industries culturelles du Pacifique
Effets possibles des APE sur les différentes industries culturelles du Pacifique
Secteur
Artisanat
Tarifs
• Prix réduits sur les
marchés de l’UE
• Marchés nationaux
potentiellement affectés
par des produits moins
chers en provenance de
l’UE
Mesures non
tarifaires
Mesuresdes
• Amélioration
procédures de
dédouanement
•Assouplissement des
règles d’origine
• Accès à des fonds, à
l’investissement et à la
formation
Importations
Mode 4
• Matériaux de
finition et
d’emballage
importés
moins chers
• Possibilité de
• Matières
• Possibilité de
bénéficier d’un régime
amélioré de libre
circulation des
personnes pour se
rendre à des foires
commerciales au sein
de l’UE
Arts
plastiques
• Le facteur prix
n’est généralement
pas déterminant
dans le secteur des
arts plastiques
• Amélioration des
Mode
• Prix réduits sur les
• Amélioration des
• Matières
• Possibilité de
marchés de l’UE
• Marchés nationaux
potentiellement affectés
par des produits moins
chers en provenance de
l’UE
procédures de
dédouanement
•Assouplissement des
règles d’origine
• Accès à des fonds, à
l’investissement et à la
formation
• Renforcement des
droits de propriété
intellectuelle
premières
importées
moins chères et
largement
distribuées
• Accès à de
nouvelles
matières
premières
bénéficier d’un régime
amélioré de libre
circulation des
personnes pour se
rendre à des
événements de mode
dans l’UE
• Nouvelles
possibilités d’étudier
dans les pays de l’UE
• Accès à des fonds, à
• Concurrence accrue
• Possibilité de
Danse
procédures de
dédouanement
•Assouplissement des
règles d’origine
• Accès à des fonds, à
l’investissement et à la
formation
• Renforcement des
droits de propriété
intellectuelle
l’investissement et à la
formation
• Accords de
coproduction
Musique
• Prix réduits sur les
marchés de l’UE
• Marchés nationaux
potentiellement affectés
par des produits moins
chers en provenance de
l’UE
• Accès à des fonds, à
l’investissement et à la
formation
• Accords de
coproduction
• Renforcement des
droits de propriété
intellectuelle
premières
importées
moins chères et
largement
distribuées
des productions
européennes
bénéficier d’un régime
amélioré de libre
circulation pour se
rendre à des biennales
et autres événements
au sein de l’UE
• Nouvelles possibilités
d’étudier dans les pays
de l’UE
bénéficier d’un régime
amélioré de libre
circulation des
personnes pour se
produire dans l’UE
• Nouvelles
possibilités d’étudier
dans les pays de l’UE
• Matériel
• Possibilité de
d’enregistrement
disponible à prix
réduits
• Concurrence accrue
de musique
enregistrée dans l’UE
• Diffusion dominée
par la musique de
l’UE
bénéficier d’un régime
amélioré de libre
circulation des
personnes pour se
produire dans l’UE
• Nécessité de réfléchir
à la façon d’inclure les
tournées autoorganisées
44
Accords commerciaux dans le Pacifique
PICTA
L’Accord commercial entre les pays insulaires du Pacifique (PICTA) a été élaboré pendant la période 2005-2006 dans
le but d’établir une zone de libre-échange entre les pays membres du Forum des Îles du Pacifique (FIP). Les 12 États
qui ont ratifié l’accord se sont engagés à supprimer les droits de douane applicables à la plupart des marchandises à
l’horizon 2012. S’agissant des biens culturels (les services sont exclus de l’accord), l’accord PICTA autorise les pays
signataires à appliquer des exceptions, excluant ainsi certaines marchandises spécifiques de l’accord (Pacific Island
Countries Trade Agreement 2001). Le seul élément de l’accord qui pourrait nuire au commerce des biens
culturels est l’exclusion des peintures à l’eau et à l’huile et des vernis-laques par la Papouasie-NouvelleGuinée, ce qui pourrait aggraver la pénurie de matières premières peu coûteuses dont souffrent les plasticiens
et entraver leur capacité de production et de vente. Au sein des services publics du pays, le chargé de la
culture devrait s’interroger sur les raisons de ces exclusions.
PACER
Entré en vigueur en 2001, l’Accord de rapprochement économique entre les pays océaniens (PACER) est un
accord-cadre entre les pays membres du FIP et l’Australie et la Nouvelle-Zélande. S’il jette les bases générales du
développement de la coopération commerciale dans la région, le texte ne contient aucune disposition de fond
quant à la libéralisation des échanges. En revanche, il expose une méthode étape par étape pour tendre à ce but,
qui se matérialise par des programmes de travail (Pacific Agreement on Closer Economic Relations 2001).
À ce jour, l’accord PACER a favorisé l’élaboration de l’accord PICTA, ainsi que de programmes d’assistance
au profit des pays membres du FIP dans les domaines de la facilitation des échanges et du renforcement
des capacités. Cette assistance leur est fournie par l’intermédiaire du FIP, de la CPS et de l’Organisation des
douanes d’Océanie.
PACER Plus
En cours d’élaboration, le projet d’accord PACER Plus se veut un accord de libre-échange entre les pays
membres du FIP et l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Les États océaniens devraient envisager d’inclure
dans cet accord commercial des mesures tarifaires et non tarifaires et s’inspirer de l’APE conclu entre les
Caraïbes et l’UE (décrit plus loin dans le rapport), étant donné que nombre des questions couvertes par
l’APE s’appliquent également aux accords commerciaux entre l’Océanie et ses voisins australien et néozélandais.
SPARTECA
L’Accord régional de coopération commerciale et économique dans le Pacifique Sud (SPARTECA) est un accord
commercial régional entre l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les pays insulaires en développement membres du
FIP. Cet accord préférentiel non réciproque donne à certains produits océaniens un accès en franchise de droits et
sans restriction aux marchés australien et néo-zélandais (Pacific Islands Forum Secretariat 1996). Cet instrument
a joué un rôle crucial dans le développement du secteur des textiles, de l’habillement et de la chaussure aux
Fidji. Ce régime d’accès ne s’applique qu’au commerce de marchandises, et plus particulièrement aux
produits satisfaisant aux prescriptions relatives aux règles d’origine contenues dans l’accord (Pacific Islands
Forum Secretariat 1996). Il est nécessaire que les producteurs des industries culturelles, notamment les
plasticiens, aient une meilleure compréhension de ces prescriptions pour tirer un meilleur parti de cet instrument.
45
Accords commerciaux s’appliquant aux industries culturelles des Caraïbes
En 2008, les négociations entamées par les 15 pays ACP membres du Forum des Caraïbes (CARIFORUM)
et les pays membres de la Communauté européenne (CE) ont abouti à l’adoption d’un Accord de
partenariat économique (APE) entre les deux groupes. Remplaçant l’Accord de Cotonou et doté d’un
champ d’application plus large, l’APE est un nouveau type d’accord commercial compatible avec les
règles de l’OMC. L’APE qui lie actuellement le CARIFORUM et la CE vise à libéraliser le commerce et
l’investissement et comprend, pour la première fois, un protocole de coopération culturelle, qui contient
des dispositions propres aux secteurs culturels. Bien que l’APE soit en partie inspiré de l’Accord de
Cotonou, il accorde une place privilégiée aux questions relatives à l’accès aux marchés.
L’APE est sous-tendu par un certain nombre de principes, notamment les suivants :
• « soutenir et mettre à profit le processus d’intégration régionale ;
• promouvoir les objectifs de développement des pays de la Région, dans le droit fil de
leurs stratégies de développement respectives ;
• reprendre le principe du traitement spécial et différencié, y compris en incluant des
dispositions allant au-delà des mesures proposées actuellement par l’OMC pour
éliminer les obstacles qui se posent aux économies vulnérables et de petite taille ;
• garder un régime suffisamment souple pour que chaque pays puisse adapter les modalités et
calendriers de mise en œuvre, en fonction du contexte national et dans le respect de l’objectif
d’intégration régionale ;
• intégrer et améliorer les acquis de Lomé et de Cotonou concernant l’accès aux marchés des
exportations traditionnelles et non traditionnelles caribéennes ; et
• s’engager, par un texte contraignant, à entamer des consultations sur toute question jugée
nécessaire afin de préserver les avantages prévus dans l’accord. » (CRNM 2011)
Pour ce qui est des industries « créatives » et culturelles, l’APE marque un tournant pour les États
caribéens. Dans ce nouveau texte, la CE ouvre son marché à tous les services de divertissement,
exception faite de l’audiovisuel. L’accord prévoit également la libre circulation des services
culturels, soit un régime de type mode 4. Cette disposition autorise l’entrée et le séjour
temporaire de personnes physiques au sein de la
CE, sous réserve de certaines restrictions
quantitatives et durant six mois au plus, pour la
fourniture de services culturels. Le marché est ainsi
ouvert aux prestataires de services de
divertissement, aux artistes et aux autres
professionnels de la culture caribéens, à la condition
qu’ils possèdent les qualifications requises et
répondent aux critères d’examen des besoins
économiques. Certains experts critiquent ces
exigences, arguant qu’elles limitent le champ
d’application des dispositions mode 4. Elles barrent
en effet l’accès de certains producteurs des
industries culturelles. Si un tel accord était appliqué
dans le Pacifique, les artistes pourraient rencontrer
les obstacles suivants :
Par principe, cet APE ne doit pas être
considéré comme un modèle générique, car
chaque accord doit être adapté aux besoins
spécifiques et aux priorités de la région
considérée. Néanmoins, l’Accord de
partenariat UE-CARIFORUM constitue un
précédent important, d’autant que la
coopération culturelle était quasiment
absente des précédents accords
commerciaux de l’UE.
Rapport sur l’économie créative 2010,
CNUCED
46

L’obligation pour le professionnel d’être employé par une entreprise du secteur
culturel ou de travailler à son compte peut exclure certains producteurs, étant donné
qu’en Océanie, la plupart des artistes et producteurs ne peuvent pas vivre de leur
art et occupent généralement un emploi à plein temps dans un autre secteur.
•
Il est possible que les producteurs ou artistes employés à plein temps dans d’autres
secteurs ne répondent pas aux critères d’examen des besoins économiques.
Dans certains cas, les producteurs culturels ou prestataires de services sont tenus de signer
un contrat avec une entreprise de l’UE pour obtenir un visa au titre du régime mode 4. Un
musicien a besoin de tourner en Europe pour se faire connaître sur le marché. Or, les
tournées auto-organisées ne répondent pas à ce critère.
Le régime mode 4 s’applique essentiellement aux professionnels qualifiés, la notion de
qualification étant généralement rattachée à une formation technique dans des structures
officielles. Étant donné que l’enseignement officiel des arts et de la culture est inexistant
dans la plupart des pays de la région, la majorité des artistes ne possèdent pas de
qualification officielle, ce qui pourrait faire de ce critère de qualification un facteur
d’exclusion.
•
•
S’ils couvrent désormais les industries culturelles, les APE en vigueur et en projet n’auront, selon les
prévisions de certains experts, qu’une incidence minime sur les droits tarifaires qui grèvent les
industries culturelles. D’après l’Overseas Development Institute, le régime d’accès en franchise de
droits et de tarifs institué par l’Accord de Cotonou a déjà fait économiser 1,4 milliard d’euros aux
pays ACP, régime qui sera prolongé au titre des APE (Stevens et al. 2010 and CRNM 2006). Les effets
du protocole de coopération culturelle, intégré à l’APE CARIFORUM-UE, se feront le plus sentir au
niveau des industries culturelles.
Le protocole de coopération culturelle vise à octroyer aux producteurs culturels et aux prestataires
de services caribéens des avantages en matière de développement et de commerce, en allant plus
loin que la disposition de l’Accord de Cotonou sur la coopération en faveur des industries
culturelles (CRNM 2006). Le protocole autorise et encourage la coopération bilatérale entre les
pays caribéens et européens dans le secteur culturel. Cette coopération peut prendre la forme
d’une assistance technique en matière de formation ou d’échanges d’informations, de savoir-faire
et d’expériences. Surtout, l’APE autorise les entreprises des deux régions à investir dans les
activités culturelles et de divertissement de l’autre région. Ces investissements peuvent se
matérialiser par la création de sociétés mixtes, avec notamment la conclusion d’accords de
coproduction, ainsi que de partenariats public-privé et privé-privé. Sachant que, dans le monde,
l’Union européenne est le premier bailleur de fonds pour la coopération technique, ce protocole
pourrait avoir des effets extrêmement positifs s’il est élaboré et exploité à bon escient (Anuradha
2009).
Bien que l’UE ait franchi une étape importante en intégrant à l’accord un protocole de
coopération culturelle, ce dernier n’est pas contraignant sur le plan juridique. L’UE n’a réservé
aucun crédit pour appuyer la mise en œuvre du protocole, tandis que les acteurs du secteur
culturel européen ne sont guère conscients de cette possibilité d’association avec leurs
homologues caribéens (KEA European Affairs 2011). Par conséquent, les États membres du
CARIFORUM doivent travailler avec les différents pays de l’UE pour mettre au point un
programme de travail qui leur permettra de bénéficier concrètement du protocole.
47
TROISIÈME PARTIE : DÉVELOPPEMENT ET PROMOTION DES
INDUSTRIES CULTURELLES EN OCÉANIE
STRATÉGIE DE DÉVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE
L’ARTISANAT
L’artisanat est le secteur qui affiche le plus fort potentiel de développement à l’exportation, en raison
de sa diversité et de son vaste périmètre. La capacité de production, l’excellence des savoir-faire et la
disponibilité des matières premières sont autant d’éléments favorables à la croissance de la filière.
Pour tirer parti de ces atouts, il reste cependant aux acteurs du secteur à surmonter plusieurs
obstacles majeurs
Le plus important d’entre eux réside dans le conflit opposant, au sein des cultures, des sociétés et
des pouvoirs publics océaniens, les tenants de la préservation de la culture à ceux de sa
commercialisation. Les services de la culture se concentrent depuis longtemps sur la préservation
de la culture et la protection du patrimoine et des savoirs traditionnels, et ne s’aventurent que
depuis peu, et avec grande prudence, sur la voie de la commercialisation. Or, le développement
de l’artisanat à l’exportation impose la conception de produits répondant aux attentes du marché
et l’adoption d’une véritable logique commerciale.
En outre, la chaîne de valeur commerciale du secteur accuse d’importantes lacunes (voir figure 5).
Dans la plupart des pays de la région, les artisans sont encore insuffisamment organisés et n’ont
pas connaissance des mesures d’accompagnement auxquelles ils peuvent prétendre. Il n’existe pas
de secteur de la création dont ils puissent s’inspirer pour la réalisation d’études de marché et la
conception de produits vendeurs. De surcroît, on ne trouve actuellement dans le secteur privé que
Figure 5: Diagramme de la chaîne de valeur commerciale de l’artisanat océanien
48
très peu d’exportateurs/grossistes disposant des connaissances et du capital nécessaires pour
conquérir les marchés d’exportation.
Le diagramme présente la situation actuelle du secteur (en bleu), ainsi que les maillons qu’il faut
ajouter à la chaîne de valeur pour parvenir à s’introduire sur les marchés d’exportation (en violet).
Non seulement il faut mettre en place, dans le secteur privé, des structures chargées de promouvoir
la vente en gros et l’exportation, mais le secteur dans son ensemble a besoin d’un éventail d’apports
(en orange). Il convient de créer ces compétences par le biais d’un programme global de
développement à long terme, destiné à faciliter l’accès des artistes aux marchés touristiques, locaux
et régionaux, et à prendre pied sur de nouveaux marchés à l’exportation.
Objectifs
La stratégie a pour objectif à long terme de développer la filière de l’artisanat océanien pour qu’elle
puisse conforter sa présence sur les marchés locaux, touristiques et régionaux et prendre pied sur de
nouveaux marchés d’exportation, grâce au renforcement des capacités locales en matière de
création, à une offre de produits plus adaptés au marché, à des compétences accrues dans le
domaine de la gestion et à des actions de promotion commerciale dignes de ce nom.
Description des produits
Les produits d’artisanat jouent un rôle de premier plan dans les traditions et la culture des
Océaniens. Que ce soit dans le cadre de cérémonies coutumières, dans la vie de tous les jours ou
pour des occasions spéciales, ils font partie intégrante de la culture océanienne depuis des
millénaires. Ces objets et ces coutumes définissent l’identité des producteurs et ont une grande
valeur culturelle. Cependant, la modernisation croissante dans certaines régions et la faible valeur
monétaire des produits d’artisanat menacent la survie de ces savoir-faire ancestraux. Un
renforcement de la commercialisation éthique des produits de l’artisanat sur un marché plus vaste
contribuera à préserver ces compétences culturelles essentielles pour les générations futures.
En dépit du nombre d’artisans en activité en Océanie et de l’abondance des matières
premières, la production de l’artisanat océanien est assez répétitive et peine à se renouveler. À
cause notamment du poids des traditions culturelles, la plupart des artisans hésitent à prendre
des risques en créant des produits plus en phase avec les exigences du marché. Lorsqu’un
producteur saute le pas malgré tout et parvient à séduire le marché avec une nouvelle création,
celle-ci est immédiatement copiée et le marché est bientôt inondé, privant par là-même le
produit de sa singularité. En outre, les artisans doivent améliorer le volume, la qualité et la
fiabilité de leur production, pour être à même d’exécuter les commandes passées par des
grossistes.
Dans la plupart des pays, la production locale est confrontée à la rude concurrence des produits
importés. Compte tenu de l’insuffisance de la capacité de production et du manque de compétences
en matière de fixation des prix et de création, beaucoup de détaillants travaillant sur le marché du
tourisme préfèrent importer des produits fabriqués à la main, en tout ou partie, d’Indonésie ou de
Chine. Ces produits s’inspirent souvent de la culture océanienne et sont parfois des copies conformes
d’objets traditionnels. En raison d’un étiquetage défaillant ou mensonger (« Souvenir des Fidji » par
exemple), les touristes qui en font l’acquisition sont persuadés qu’ils ont été fabriqués sur place.
49
Besoins du secteur
Comme indiqué plus haut, le secteur océanien de l’artisanat souffre d’un déficit global de
coordination et accuse des lacunes importantes en matière de distribution à l’exportation. On
constate ainsi l’absence quasi-totale de coordination entre les organismes publics à vocation
culturelle et ceux à vocation commerciale. Il n’existe la plupart du temps aucune coopération entre
les services de la culture et les autorités chargées de la promotion des investissements, le ministère
de l’industrie et du commerce ou le ministère du tourisme, par exemple. Or, de telles relations sont
indispensables à l’émergence d’un secteur de l’artisanat à vocation commerciale et à l’amélioration
des débouchés et de l’accès aux marchés.
Développement5 et création : Les artisans sont nombreux dans la plupart des pays de la
région, mais ils sont peu ou mal organisés, ce qui entrave la valorisation de leur savoir-faire. Dans la
plupart des cas, les artisans hésitent à prendre l’initiative d’expérimenter de nouveaux produits, car
ils ne peuvent s’appuyer sur des études de marché et des informations indispensables à la réussite
d’une telle aventure. En général, les groupes d’artisans manifestent peu d’esprit d’entreprise, voire
aucun, et rechignent à prendre les risques indispensables : investissement dans les matières
premières, expérimentation de nouvelles créations, constitution de stocks pendant la morte saison
pour les vendre pendant la haute saison, emprunts, etc. La conjugaison de ces facteurs débouche sur
un approvisionnement irrégulier et des produits impropres à séduire le marché.
Production : En matière de production, les artisans sont souvent dans l’incapacité de se procurer
des matières premières de qualité supérieure à un prix raisonnable, notamment pour la finition
(crochets et fermoirs en bijouterie, par exemple). Ce phénomène s’explique en partie par les droits à
l’importation et les marges bénéficiaires élevées appliquées aux produits importés.
Pour répondre aux exigences de qualité des marchés d’exportation, les grossistes doivent pouvoir
compter sur un approvisionnement plus régulier en produits de qualité supérieure. Les artisans
maîtrisent parfaitement les techniques traditionnelles, mais il faut qu’ils bénéficient de formations
leur permettant d’améliorer leur savoir-faire technique et la qualité de leurs produits, pour créer de
nouveaux produits vendeurs. Par ailleurs, des formations axées sur le renforcement de l’efficacité
pourraient leur permettre d’augmenter leur capacité de production.
Distribution : Actuellement, la distribution vers le consommateur final passe essentiellement par
les magasins de vente au détail, les marchés et les festivals, locaux ou internationaux. La majorité des
exportations sont réalisées à l’échelon régional, dans le cadre de festivals ou d’exportations
informelles, « à la valise ». Dans le commerce de détail local, on trouve deux grandes catégories
d’établissements : les magasins gérés par des ONG (organisations non gouvernementales) et les
entreprises commerciales. Les magasins des ONG, tels que Langafonua aux Tonga, entretiennent des
relations étroites avec leurs producteurs, mais leur assortiment dépend généralement de l’arrivage et
ils ne fournissent pas d’études de marché pratiques ou de conseils en matière de création aux artisans.
Les établissements à but lucratif, comme Jack’s aux Fidji, ont des relations de nature plus commerciale
et prédatrice avec les artisans. Ils achètent souvent des produits d’artisanat importés, appliquent des
5
Dans son état des lieux, la consultante a recommandé l’ajout du stade « Participant », afin de prendre en compte
la nature participative de la culture océanienne. Cependant, en optant plutôt pour un stade de
« Développement », on inclut la boucle essentielle du retour d’information, permettant aux créateurs d’obtenir
des informations sur le marché et aux nouveaux talents de créer des produits nouveaux et de meilleure qualité.
50
grilles de tarifs et des délais d’exécution des commandes stricts et ne prêtent que peu d’attention à la
protection de la propriété intellectuelle. Il faut cependant signaler qu’ils achètent immédiatement la
production des artisans, en leur versant généralement une avance pour l’acquisition de matières
premières.
Sur la quasi-totalité des marchés, les consommateurs sont confrontés aux contrôles douaniers et
phytosanitaires, ce qui peut avoir un effet fortement dissuasif, en particulier en Australie, en
Nouvelle-Zélande, ainsi que dans d’autres pays océaniens. Les artisans et les grossistes doivent
acquérir une meilleure connaissance de la réglementation douanière et phytosanitaire, afin de
fabriquer des produits conformes à la réglementation internationale. Quant aux consommateurs, les
touristes en particulier, ils doivent être mieux informés sur les réglementations et les possibilités de
fumigation des produits. En dernier lieu, les détaillants doivent prendre en charge les formalités
d’expédition pour les touristes désireux d’acquérir une grande quantité d’objets ou une pièce de
grande dimension. Si ces démarches sont facilitées, les touristes hésiteront moins à porter leur choix
sur des produits volumineux et plus chers.
En règle générale, tous les acteurs de la chaîne de valeur ont besoin de davantage d’informations, de
meilleures connaissances en gestion et d’un maillage intersectoriel plus développé. C’est là une
condition essentielle pour rapprocher les artisans et les vendeurs d’une part, et les revendeurs et les
consommateurs d’autre part.
Promotion : La plupart des produits artisanaux ne font l’objet d’aucune promotion, sauf lors des
festivals. Les budgets promotionnels des magasins des ONG sont souvent insuffisants, si bien qu’ils
ne sont pas en mesure de créer des supports de marketing ou d’investir dans la publicité ou des
stratégies s’appuyant sur les médias sociaux. Il y a cependant de multiples façons pour les
détaillants et les associations de renforcer leur présence sur le marché sans se ruiner pour autant
(voir la section Tactique de développement ci-dessous).
Marchés
Marchés actuels
Tourisme : Le tourisme est l’un des plus gros marchés de l’artisanat océanien. Les produits sont
généralement vendus dans des boutiques de souvenirs, sur les marchés ou dans la rue. Beaucoup
d’artisans sont tributaires de ce marché.
Marché local : Dans certains pays océaniens, il subsiste une forte demande locale pour les
produits artisanaux intervenant dans les traditions et les cérémonies culturelles. Sur ce marché, les
acheteurs sont moins regardants sur la qualité, mais ils privilégient les créations et les motifs
traditionnels.
Diasporas : Les relations informelles avec les marchés de la diaspora représentent également un
important volume de ventes pour les artisans. Les clients de la diaspora achètent des produits
d’artisanat intervenant dans les traditions et les cérémonies culturelles, mais aussi des cadeaux.
On peut classer ces ventes dans la catégorie des exportations « à la valise », car les consommateurs
achètent souvent des produits en grande quantité pour en revendre une partie à d’autres
membres de la diaspora, une fois de retour dans leur pays de résidence.
51
Festivals : Les festivals constituent actuellement l’unique filière d’exportation normalisée, mais ces
manifestations représentent un coût pour les pouvoirs publics, qui financent la participation des
artisans. Afin d’assurer la croissance de ce marché et de faire bénéficier les économies nationales des
ventes réalisées, les artisans doivent proposer des créations de meilleure qualité, plus adaptées au
marché, et les pouvoirs publics doivent évaluer la pérennité de leur participation financière à ces
manifestations6.
Collectionneurs : Dans les années 80, le marché des collectionneurs était très dynamique, notamment
en Papouasie-Nouvelle-Guinée, mais il accuse dernièrement une baisse de ses ventes. Une sélection
judicieuse des produits et une promotion commerciale adaptée peuvent laisser espérer une
résurrection de ce marché de niche.
Marchés à exploiter
Tourisme : S’il est vrai que les artisans sont déjà présents sur ce marché, il existe encore une marge
de progression pour l’exploiter pleinement. L’amélioration de la qualité du service dans les
magasins, l’offre de produits de meilleure qualité et une politique de marketing plus professionnelle
devraient permettre une meilleure exploitation du marché. De plus, l’établissement de relations
formelles avec les ministères du tourisme et les associations touristiques pourrait permettre aux
artisans de disposer de plus d’informations sur le marché.
Les artisans doivent également envisager de cibler d’autres segments du marché. Celui des
croisiéristes, par exemple, est très porteur, mais les artisans doivent proposer des produits adaptés et
les services chargés de la culture doivent les aider à organiser des marchés accessibles à ces
consommateurs. Les marchés du mariage et de la lune de miel sont également prometteurs, mais il
faut savoir proposer les bons produits et établir des relations de travail avec les hôtels et les
complexes de vacances.
Cadeaux d’entreprise, tourisme d’affaires et événementiel : Ces marchés sont actuellement laissés
en friche. Les artisans pourraient réfléchir à la possibilité de travailler avec des entreprises pour la
fabrication de cadeaux annuels ou spéciaux, ainsi que pour le segment du tourisme d’affaires et
événementiel, pour fournir classeurs, cadeaux, sacs, et autres accessoires à l’occasion des
conférences et manifestations. Les ministères du tourisme sont susceptibles de jouer un rôle
moteur sur ce marché, mais les artisans doivent être capables de proposer une gamme de produits
adaptés et d’exécuter les commandes dans de brefs délais.
Exportation dans la région : Certains artisans se sont déjà lancés sur les marchés d’exportation de
la région dans le cadre du projet Marketi Ples de PT&I. À condition qu’un soutien adéquat existe,
les marchés de la région, notamment ceux d’Australie et de Nouvelle-Zélande, peuvent offrir des
débouchés considérables aux artisans océaniens. Le secteur doit améliorer la qualité de ses
créations, promouvoir l’émergence de grossistes/exportateurs officiels et tisser peu à peu des liens
solides avec des grossistes/importateurs et des détaillants sur les marchés ciblés.
Exportation vers les États-Unis : En dehors des ventes réalisées au sein de la diaspora installée à
Hawaii, les ventes sur les marchés des États-Unis et de l’Amérique du Nord sont très limitées. Ce
marché lucratif recèle un fort potentiel, mais le secteur doit remédier à ses nombreuses imperfections
avant de se lancer à sa conquête.
6
L’organisation et la participation à des festivals s’accompagnent bien entendu de retombées non économiques
très importantes : échanges culturels, prise de conscience de la diversité des cultures océaniennes et renforcement
du sentiment de fierté nationale et régionale
52
Marché des arts populaires de Santa Fe (Santa Fe Folk Art Market) : Le marché des arts populaires
de Santa Fe7 est le plus grand marché de produits artistiques et culturels haut de gamme des ÉtatsUnis. Il se déroule dans l’État du Nouveau-Mexique, dans l’ouest du pays, et attire des acheteurs du
monde entier. Il permet en outre à des artistes d’exception de faire la démonstration de leur talent et
de leur savoir-faire. La région Asie-Pacifique n’y a jamais été représentée que par des artistes venus
d’Indonésie ou de Malaisie. La présentation de talents océaniens dans le cadre de cette
manifestation réservée aux meilleurs aiderait à renforcer la présence des arts plastiques océaniens
sur les marchés américains et européens. On trouvera sur le site Internet de cette manifestation
toutes les informations pour y participer.
Exportations vers l’Union européenne : Les producteurs parvenus à une exploitation optimale des
marchés locaux, touristiques, régionaux et des États-Unis peuvent envisager de tourner leur regard
vers l’Union européenne. Cependant, la distance géographique, le coût élevé du transport et la forte
concurrence qui caractérisent ce marché n’en font pas une cible idéale pour les artisans océaniens.
L’entrée sur ce marché doit être considérée comme un objectif à très long terme, réservé aux
producteurs déjà bien implantés ailleurs.
Tactique de développement
La tactique de développement de l’artisanat océanien doit comporter cinq grands éléments. Tout
d’abord, dans chaque pays, le secteur doit mieux s’organiser et désigner l’intervenant appelé à
jouer un rôle d’impulsion dans le développement commercial du secteur. Ensuite, dans le cadre
d’un programme de développement global à long terme, le secteur doit renforcer ses compétences
en matière de gestion, de conception des produits, de marketing et de promotion. Enfin, il est
absolument impératif de développer des capacités de création locales, pour que les artisans aient
accès à une source pérenne de créations, inspirées des attentes du marché.
Organisation du secteur
L’une des principales difficultés auxquelles se heurte le secteur océanien de l’artisanat est l’absence de
direction claire donnée à son développement commercial. Dans beaucoup de pays, les services
nationaux de la culture se concentrent depuis très longtemps sur la préservation du patrimoine et
n’ont pas toujours les compétences ou la volonté requises pour travailler avec le secteur de l’artisanat
dans une logique commerciale. Les autorités chargées de la promotion des investissements et les
ministères du commerce disposent quant à eux des compétences et des connaissances techniques
nécessaires au développement commercial du secteur, mais ne connaissent pas bien les métiers de
l’artisanat. Pour réussir à exporter l’artisanat océanien, il est nécessaire de lancer une passerelle entre
la connaissance de l’artisanat et celle de l’exportation.
L’organisation (existante ou à créer) appelée à jouer un rôle de chef de file dans le développement
de l’artisanat doit être désignée dans le cadre d’une démarche informée et participative. Dans la
plupart des cas, il faudra faire appel à un intervenant externe pour trouver la réponse à des
questions capitales, mais au bout du compte, la décision appartiendra aux acteurs des secteurs
public et privé de chaque pays. Une fois cette démarche accomplie, il conviendra de renforcer les
capacités de ces nouvelles organisations chefs de file, afin de les doter des compétences et des
connaissances leur permettant de développer le secteur comme il se doit.
7
www.folkartmarket.org
53
Développement des entreprises
Le secteur doit également améliorer les relations entre les échelons de la production et de la vente
au détail. Toutes les organisations et les entreprises représentées dans la chaîne de valeur doivent
améliorer leurs compétences et leurs connaissances en gestion, ainsi que les services qu’elles
offrent à leurs membres (s’il s’agit d’associations). Au nombre des domaines de formation
spécifiques on peut citer les suivants :
• élaboration de plans d’activités et de plans marketing ;
•
comptabilité et tenue des états financiers ;
•
établissement des coûts de revient et fixation des prix ;
•
politiques : ventes, élaboration d’échantillons, exécution des commandes ;
•
connaissance du secteur : circuits de distribution, tendances dans la création, fixation des
prix ;
• développement des services aux entreprises :
o
études de marché ;
o
conception et mise au point de produits ;
o
marketing et promotion ;
o
banques de matières premières (achat en gros de matières premières).
Il est essentiel pour les grossistes-exportateurs de maîtriser ces techniques avant de prendre pied sur
les marchés d’exportation. S’il est vrai que les pouvoirs publics peuvent faciliter les exportations par
le biais des autorités de promotion des investissements et des ministères du commerce, il est
indispensable d’encourager l’émergence d’exportateurs dans le secteur privé, afin d’établir des
relations durables avec les importateurs. Qu’il s’agisse de détaillants ou d’associations d’artisans
dynamiques, ces exportateurs en herbe auront besoin en amont d’un soutien en matière
d’investissement et de renforcement des connaissances.
Développement des produits
Pour que l’artisanat océanien se fasse une plus large place sur les marchés exploités actuellement et
parvienne à s’implanter sur de nouveaux marchés, il est indispensable d’améliorer la conception
des produits proposés. Il convient de réaliser des études de marché pour que les artisans soient
bien informés et puissent limiter les risques auxquels ils s’exposent (fonds consacré à la mise au
point d’échantillons par exemple). La conception des produits doit être placée sous la direction
d’un créateur professionnel ayant l’expérience du marché ciblé. Ainsi, pour les produits destinés
au marché touristique, on choisira un créateur australien, puisque la majorité des touristes
viennent d’Australie. Pour cibler le marché des États-Unis, on fera appel à un créateur possédant
une expérience du marché de la décoration d’intérieur et des accessoires de mode dans ce pays.
En outre, les artisans et les organisations chefs de file dans le développement du secteur doivent
réfléchir à des solutions innovantes pour dynamiser les ventes sur les marchés touristiques. De plus
en plus de touristes sont à la recherche d’authenticité et d’expériences enrichissantes pendant leurs
vacances. Les villages d’artisans, où les touristes peuvent découvrir les produits de l’artisanat et
même apprendre à les fabriquer, suscitent un engouement croissant. Il est crucial de travailler avec
les ministères du tourisme pour financer et promouvoir ces activités innovantes dans la conception
des produits.
54
Renforcement de la création locale
S’il est essentiel de travailler avec des créateurs internationaux pour s’introduire sur un nouveau
marché, cette coopération a un coût. Pour disposer à long terme de capacités de création pérennes,
l’organisation chef de file dans le développement du secteur doit œuvrer au renforcement des
capacités de création locales. Voici quelques-uns des modèles de renforcement de capacités ayant fait
leurs preuves :
• détection de créateurs en puissance (plasticiens, créateurs de mode, professeurs d’arts
plastiques, artisans talentueux, etc.) ;
• formation à la création et au développement de produits : réalisation d’études de marché,
transposition des études de marché dans la conception de produits, étude des tendances, et
établissement des coûts de revient et des prix ;
• mise en rapport de créateurs locaux avec des créateurs internationaux chevronnés
pour des actions de formation sur le terrain et des relations de mentorat de longue
durée.
Développement du marché
Tourisme : Les organisations chefs de file dans le développement du secteur doivent avant tout se
concentrer sur le développement du marché touristique, plus accessible et moins exigeant que les
marchés d’exportation. C’est également un moyen pour les artisans de s’introduire peu à peu sur
des marchés plus coriaces et de tester certains produits. Les principales stratégies de
développement sont les suivantes :
• mise au point de produits pour les marchés touristiques ;
•
formation des détaillants à la gestion, aux techniques de ventes, à la présentation des
produits et aux techniques marchandes ;
•
campagne de développement d’une marque nationale pour concurrencer les produits
importés ;
•
mise en place de services d’expédition pris en charge par un coordonateur central pour
éviter aux touristes d’avoir à effectuer eux-mêmes ces démarches ;
•
développement du marché des croisiéristes : création de produits, fixation des prix
(en dollars australiens), points de vente, formation aux techniques de vente (pour éviter
le harcèlement des touristes) et vente éventuelle de produits dans les magasins du bord ;
création de produits spécifiques pour le tourisme des mariages et des lunes de miel et
promotion de ces produits au travers des relations existant avec les hôtels, les complexes
de vacances, ainsi que les organisateurs de mariages et les spécialistes de l’événementiel ;
collaboration avec les voyagistes, les hôtels/complexes de vacances, les guides
touristiques et les sites Internet consacrés au voyage, pour faire mieux connaître les
points de vente de produits artisanaux, les festivals et autres manifestations.
•
•
Cadeaux d’entreprise, tourisme d’affaires et événementiel : Les ministères du tourisme de
nombreux pays de la région constatent un intérêt croissant pour le développement des marchés du
tourisme d’affaires et de l’événementiel en Océanie. Les artisans peuvent y trouver de nouveaux
débouchés, à condition d’être en mesure de proposer un éventail de produits répondant aux besoins
des consommateurs et d’être capables de fabriquer des produits sur mesure (en y faisant par
exemple figurer le titre et la date de la conférence en question). Il leur faudra en outre exécuter des
commandes dans de brefs délais et avec professionnalisme, pour se faire une bonne réputation.
55
Exportation dans la région : Une fois que les marchés locaux et touristiques seront pleinement
exploités, les organisations chefs de file du développement du secteur pourront commencer à
s’intéresser aux marchés d’exportation de la région, en ciblant d’abord l’Australie et la NouvelleZélande. Compte tenu de leur proximité géographique, du coût inférieur des transports maritimes et
des liens culturels existants, on ciblera d’abord ces deux pays avant de tenter une percée sur les
marchés des États-Unis ou de l’Union européenne.
S’appuyant sur de solides compétences en gestion et sur la mise en œuvre de la tactique exposée
ci-dessus, la stratégie de conquête des marchés d’exportation régionaux doit également comporter
les éléments suivants :
• conception de produits destinés aux marchés d’exportation en collaboration avec des
créateurs australiens/néo-zélandais ;
• élaboration de supports de marketing pour la vente en gros ;
•
participation à des salons professionnels :
o
Compte tenu de la situation actuelle du secteur océanien de l’artisanat, les
exportateurs auront sans doute besoin d’aide pour nouer des relations avec des
acheteurs potentiels, importateurs ou détaillants. Pour y parvenir, on peut
envisager la création d’une société d’importation sur le marché cible, afin de
participer à des salons de grossistes importateurs (qui revendent aux détaillants).
C’est l’occasion de présenter de nouveaux produits et d’enregistrer les premières
commandes pour amorcer la production. La participation à ces salons vise à
remplir les premiers carnets de commandes, et éventuellement à placer les
produits auprès d’autres exposants.
o Les sociétés d’importation nouvellement créées devront pouvoir prendre en charge
les commandes et travailler avec les exportateurs.
o De manière générale, les exportateurs devront participer à trois éditions d’un
salon consacré à l’exportation avant de gagner la confiance des acheteurs et
d’enregistrer des commandes substantielles.
• activités de promotion commerciale de suivi dans le prolongement des salons ;
• organisation de voyages d’études pour les acheteurs ;
• techniques de marketing innovantes : traçabilité affective des produits (leur « petite
histoire ») ;
• marketing sur les médias sociaux :
o
travail de relations publiques au travers de blogs et d’autres types de réseaux
sociaux ;
o
désignation d’ambassadeurs culturels chargés de maintenir le secteur sur le
devant de la scène, en intervenant régulièrement dans les réseaux sociaux.
Partenaires potentiels
Le secteur océanien de l’artisanat est actuellement désorganisé dans l’ensemble de la région. Il
importe de désigner un chef de file chargé de guider son développement, sachant que l’ensemble des
parties prenantes suivantes doivent également y participer :
• services nationaux de la culture ;
• spécialistes internationaux du développement de l’artisanat (consultants individuels, Aid to
Artisans, ByHand Consulting, TradeCraft, etc.) ;
• associations d’artisans et artisans individuels ;
• points de vente au détail locaux ;
56
• organisateurs de marchés ;
• créateurs potentiels, plasticiens par exemple ;
• universités ;
• Pacific Island Trade and Invest ;
• organisations patronales/chambres de commerce ;
• autorités chargées de la promotion des investissements.
Calendrier de développement du secteur océanien de l’artisanat
Activité
Année 1
Année 2
Année 3
Année 4
Année 5
Désignation de
l’organisme public chef
de file
Coordination du secteur public
Développement des
compétences en gestion
des artisans
Création de sociétés grossistes
Création de sociétés d’exportation
Développement des produits : marché
du tourisme
Renforcement des capacités de
création locales
Développement des produits : marché à l’exportation
régional
export
market du marché du
Développement
tourisme
Développement des marchés des
cadeaux d’entreprises, du tourisme
d’affaires et de l’événementiel
Développement du marché à l’exportation régional
Développement du marché des États-Unis
57
STRATÉGIE DE DÉVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DES ARTS
PLASTIQUES
En Océanie, le secteur des arts plastiques se caractérise par sa diversité et son dynamisme. Pourtant,
faute d'accompagnement éducatif, d’aide au marketing et de soutien de la part des pouvoirs publics,
le secteur est loin d’avoir atteint son plein potentiel. Le conflit qui oppose l’art contemporain et l’art
traditionnel est également à l’origine de pressions sociales qui freinent l’esprit d’innovation et
d’entreprise. Si, à titre individuel, les artistes actuels ont réussi à vaincre ces difficultés, le secteur des
arts océanien doit continuer à se battre pour surmonter collectivement ces obstacles et s’affirmer en
tant que pôle de création mondialement reconnu.
À l’échelon national, le secteur des arts plastiques est souvent désorganisé, et les rapports entre les
services de la culture et les artistes sont quasi-inexistants. La plupart des pays océaniens ne disposent
pas de galeries nationales dédiées à l’art moderne et contemporain. Bien qu’étant généralement à
vocation non commerciale, les galeries nationales permettent de dynamiser le secteur des arts
plastiques et de stimuler la demande locale dans ce domaine. Elles peuvent également servir de
centres de recherche pour les universitaires et les conservateurs s’intéressant à l’art océanien, et,
partant, convaincre les consommateurs réticents qu'acheter une œuvre d'art océanienne est un
investissement et non une lubie.
Rares sont les possibilités de suivre un enseignement dans le domaine des arts de la création, car
ceux-ci ne sont pas considérés comme une priorité par les pouvoirs publics. Les efforts déployés
récemment dans certains pays afin d’inclure l’enseignement artistique au programme des écoles
primaires doivent se poursuivre, et il convient de faire de même dans l’enseignement supérieur, en
offrant des cursus dans les domaines suivants : arts de la création, histoire de l’art, critique d’art et
gestion artistique. Ces cursus aideront à créer un potentiel en matière de conservation et de
recherche universitaire, lequel est indispensable pour permettre à l’art océanien de percer les
marchés internationaux.
S’agissant des débouchés commerciaux, la plupart des artistes promeuvent et vendent l’essentiel de
leur travail dans la rue et lors de festivals. Il existe peu d’agents commerciaux en art et encore moins
de galeries permanentes. De surcroît, les artistes n’ont généralement pas les moyens financiers ni les
compétences en marketing et en gestion pour assurer efficacement leur promotion. S’il est vrai que
quelques artistes ont réussi à se faire une place sur les marchés internationaux grâce aux festivals,
aux sites de vente en ligne et aux rares galeries locales existantes, il leur faut encore surmonter divers
problèmes liés aux douanes, au transport et aux paiements en devises étrangères.
58
Figure 6: Chaîne de valeur commerciale du secteur des arts plastiques en Océanie
Objectif
À long terme, l’objectif de la stratégie de développement et de promotion proposée est de
transformer l’Océanie en pépinière de plasticiens, reconnus localement et internationalement.
Description des produits
Les artistes océaniens utilisent divers supports d’expression, notamment la peinture (peinture à
l’huile, aquarelle, peinture acrylique, etc.), la photographie et les techniques mixtes. La peinture à
l’huile conventionnelle ou à l’acrylique sur toile devance largement les installations et l’art avantgardiste.
On distingue deux grands types de produits : les pièces uniques, de grande valeur, vendues dans un
cadre relativement formel (galeries d’art ou festivals, par exemple), et les pièces plus petites, moins
originales, produites par des artistes copistes et vendues sur les marchés touristiques. Les artistes
copistes font fi de l’innovation et de la créativité et n’ont d’autre but que de reproduire à la chaîne
des pièces à l’identique.
Besoins du secteur
Il est essentiel avant tout de mieux organiser le secteur à tous les niveaux. Les artistes eux-mêmes ont
tout intérêt à conjuguer leurs efforts dans le cadre d’associations officiellement constituées, de façon à
59
mieux faire entendre leur voix auprès des organismes publics de soutien, des conseils nationaux des
entreprises et des chambres de commerce. Les services de la culture doivent également s’employer à
mieux coordonner leurs activités avec les administrations, notamment les autorités nationales de
promotion des investissements et les offices de tourisme. Cette infrastructure de base permettra
d’améliorer les politiques et les investissements en faveur de la promotion des arts, d’accroître les
financements et le soutien des pouvoirs publics dans le secteur des arts et de créer des mécanismes de
partage d‘information.
Conception, création et production : Ce sont les artistes eux–mêmes qui prennent en charge
les phases de conception, de création et de production de l’œuvre artistique. Pour optimiser ces
différentes étapes de la chaîne de valeur créative, les pouvoirs publics et les associations artistiques
doivent s’atteler à des dossiers tels que l’éducation, l’innovation et l’accès aux matières premières.
Comme indiqué plus haut, les arts ne sont pas suffisamment représentés ni subventionnés dans
le système éducatif, qu’il s’agisse de l’enseignement primaire ou supérieur. Le soutien des
pouvoirs publics est essentiel à l’intégration précoce des arts dans le système éducatif. Ainsi, les
artistes en herbe pourront renforcer leurs compétences dès le plus jeune âge et seront encouragés
à envisager une carrière artistique. Des cursus universitaires doivent également être mis sur pied
afin d’aider les artistes à aiguiser leurs talents et à parfaire leurs connaissances sur les différents
mouvements artistiques recensés à travers le monde.
La mise en place de programmes structurés de formation est une première étape dans la promotion
de la créativité et de l’innovation. De tels programmes permettent aux artistes d’acquérir de
nouvelles compétences et de se confronter à de nouvelles tendances et à de nouveaux styles dont ils
peuvent ensuite s’inspirer. Cela est particulièrement important dans le contexte artistique océanien,
où se côtoient reproductions et œuvres originales. Il existe actuellement des tensions entre les
artistes qui créent des pièces uniques et ceux qui produisent à la chaîne des reproductions destinées
à la vente de masse ou aux marchés touristiques. S’il est vrai que ces deux catégories d’artistes
seront toujours amenées à cohabiter en Océanie, il convient néanmoins de les distinguer de manière
à faire émerger ce qu’il est convenu d’appeler « les beaux-arts ».
Enfin, il est primordial que les artistes océaniens puissent se procurer plus facilement des matières
premières, car force est de constater que celles que l’on trouve actuellement sont coûteuses et de
mauvaise qualité, et ce, pour diverses raisons (taxes à l’importation, frais d’expédition, prix de
détail élevés).
La plupart des commerçants n’étant pas des experts en fournitures artistiques, il est fréquent
qu’ils ne vendent pas les peintures ou le matériel dont les artistes ont besoin. Si les matières
premières coûtent cher ou sont impossibles à obtenir, les artistes se retrouvent dans
l’incapacité d’exprimer pleinement leur créativité ou d’expérimenter de nouveaux styles et de
nouvelles techniques.
Promotion : À ce jour, il n’existe qu’une poignée de galeristes dans le Pacifique, et seuls certains
d’entre eux jouissent de la confiance et du soutien des artistes locaux. La majorité des artistes sont
activement impliqués à tous les stades de la chaîne de valeur, notamment en réalisant leur propre
promotion, axée essentiellement sur le bouche à oreille et quasiment pas sur les activités en ligne.
Rares sont ceux qui ont les compétences requises en marketing et en gestion pour se montrer
efficaces dans leurs démarches.
60
Les possibilités de vente au détail et d'exposition sont peu nombreuses et doivent être améliorées.
Sauf dans les rares galeries professionnelles, la plupart des expositions se déroulent dans un cadre
informel et n’offrent pas d’interprétation des œuvres. Or, les collectionneurs et les acheteurs
s’intéressent autant aux explications et aux recherches théoriques qu’aux œuvres elles-mêmes.
Lorsqu’ils envisagent d’acheter une œuvre d’art océanienne, les collectionneurs ont en effet besoin
d'informations complémentaires pour être convaincus du bien-fondé de leur investissement. En
outre, les commissaires d’exposition ou les conservateurs de musée, soucieux de mettre en valeur les
œuvres exposées, ont besoin de s’appuyer sur des éléments leur permettant de choisir les solutions
les plus adaptées en termes d’agencement, d’installation, d’éclairage et de promotion.
En règle générale, les services de la culture souffrent d’un manque de moyens, financiers et humains,
associé à une organisation erratique. Partant, ils ne sont guère en mesure d’appuyer le
développement à grande échelle du secteur des arts. Nombre d’entre eux sont confrontés à une forte
rotation du personnel, laquelle met en péril la mémoire institutionnelle et la relation de confiance
avec les artistes. Les agents des services de la culture, plutôt anthropologues ou historiens de
formation, ont souvent un bagage insuffisant en commerce et en gestion. Ces lacunes dans le
domaine commercial expliquent le fait que de nombreux festivals et marchés parrainés par les
pouvoirs publics ne font pas l’objet d’études préalables destinées à assurer leur viabilité financière.
De plus, ces agents n’ont pas les capacités pour renforcer les compétences en commerce et en gestion
des intervenants du secteur.
Distribution : La plupart des ventes sont conclues directement par les artistes, tandis que la
distribution des œuvres se fait dans les points de vente au détail. Les artistes tirent essentiellement
profit des festivals et des marchés, qui représentent pour eux des espaces de vente privilégiés. Le
gros des ventes à l’international se déroule dans le cadre d’échanges frontaliers informels réalisés à
l’occasion de festivals et d’expositions à l’étranger. Il arrive fréquemment que les artistes peinent à
percevoir les paiements qui leur sont dus, et ce, en raison de difficultés liées aux opérations
bancaires internationales, à la conversion de devises étrangères ou à un défaut de paiement de la
part de leurs clients. Pour éviter ce genre de problèmes, il est impératif que les artistes comprennent
mieux les contrats de vente et les modalités de paiement qui leur sont proposés.
Pour pénétrer officiellement et régulièrement les marchés internationaux, les artistes, les agents
des services de la culture et les membres d’associations artistiques nouvellement constituées
doivent suivre des formations en commerce et en gestion, notamment en ce qui concerne les
régimes d’assurance, les protocoles d’expédition, la rédaction de contrats, les politiques générales
en vigueur et les transactions internationales. Les artistes doivent également apprendre à
déterminer la juste valeur de leurs œuvres en fonction du coût des matières premières utilisées, du
temps de réalisation de l’œuvre, des frais généraux encourus, des dépenses engagées aux fins de
promotion et de leur notoriété artistique.
61
Figure 7: Chaîne de valeur créative du secteur des arts plastiques en Océanie.
Bleu = Situation actuelle
Rouge = Situation possible et apports nécessaires
Marchés
À l’heure actuelle, les artistes visent le marché local et international, mais chaque artiste tend
à se charger seul et de façon peu systématique de la commercialisation et de la distribution.
Pour favoriser l’essor du secteur, les artistes doivent disposer de filières de distribution mieux
structurées afin de percer efficacement ces marchés.
Tourisme : Pour la plupart des artistes, le marché touristique reste incontournable et constitue un
tremplin. Toutefois, les espaces d’exposition sont rares et les structures officielles de promotion
insuffisantes, si bien que les artistes ne sont pas en mesure d’exploiter pleinement le potentiel du
marché touristique. À mesure que des espaces d’exposition apparaissent dans les complexes
touristiques et les aéroports, les artistes pourront tirer davantage profit de ce marché. En
s’appuyant sur une démarche de promotion officielle et des partenariats avec les administrations
publiques, les artistes pourraient s’intéresser aux marchés des croisières (expositions à bord), des
mariages à l’étranger (photographies, portraits et décors) et des lunes de miel (séances photo postmariage du type « Trash the Dress »).
62
À l’avenir, pour garantir une meilleure rentabilité sur le marché touristique et compléter la vente
d’œuvres d’art, toute nouvelle galerie devrait prévoir une diversification de son offre (produits
dérivés, souvenirs, et éventuellement services de restauration).
Marché local : Le marché local est limité, exception faite des produits vendus aux expatriés. Ces
derniers représentent un marché juteux, car ils sont généralement plus enclins à investir dans des
œuvres onéreuses et de grande dimension. En revanche, ils mettent plus de temps à se décider et
veulent comprendre une œuvre avant de l’acheter. Pour percer ce marché, il est donc important de
miser sur les explications fournies et les récits d’artistes.
Certains galeristes ont décidé de s’attaquer au marché local des entreprises, nationales ou
internationales, en leur louant des œuvres d’art. Pour ce faire, il faut disposer d’un stock solide,
d’un catalogue et de supports de vente professionnels, mais un tel marché peut s’avérer lucratif.
Avant de se lancer dans l’aventure, il faut toutefois savoir que les entreprises ne signeront aucun
contrat sans s’être assurées au préalable qu’elles ont affaire à un galeriste professionnel et
pointilleux sur la gestion.
Marché régional : La plupart des ventes à l’exportation se déroulent dans un cadre régional. Les
festivals jouent un rôle important. On peut citer à cet égard le Festival des arts du Pacifique, le
Festival des arts mélanésiens et le Festival The Dreaming. Par ailleurs, Pacific Trade and Invest (PT&I)
a accompagné des artistes régionaux dans leurs projets de développement sur le marché australien
(Marketi Ples).
Une partie des exportations régionales s’est effectuée dans un cadre plus formel, par le biais des
rares galeries commerciales existantes. Ainsi, Art Street Gallery, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, a
noué des relations professionnelles fructueuses avec des galeries néo-zélandaises. Pour parvenir à
ce résultat, il est essentiel de travailler en réseau et de mettre l’accent sur l’aspect commercial en
effectuant des visites de ventes et en élaborant des catalogues.
Marchés américain et européen : Des démarches ont d’ores et déjà été entreprises en vue de
conquérir le marché européen, essentiellement au travers de la participation à des festivals. Les Fidji
ont ainsi permis à deux artistes de participer à l’exposition organisée à Londres par la
Commonwealth Women’s Foundation, et Art Street Gallery s’emploie actuellement à percer le
marché européen, et plus particulièrement britannique, en renforçant sa présence sur la toile et en
consolidant ses réseaux de contacts. Pour augmenter les ventes sur ces marchés, il est nécessaire de
développer et de maintenir une démarche commerciale structurée et de participer, autant que faire
se peut, aux biennales et aux festivals européens et américains.
Marché des arts populaires de Santa Fe : Comme indiqué plus haut dans la section consacrée à la
stratégie de promotion des produits de l’artisanat, le marché des arts populaires de Santa Fe8 est
devenu un événement artistique et culturel incontournable aux États-Unis pour ce qui est de la
promotion des produits culturels haut de gamme. Pour l’heure, aucun pays océanien n’y est
représenté. Or, ce marché réputé serait l’occasion de braquer les projecteurs sur les plasticiens
océaniens et contribuerait à asseoir leur présence sur les marchés américain et européen. Pour
toute information concernant les modalités d’inscription, veuillez consulter le site Web consacré à
cet événement.
8
www.folkartmarket.org
63
Tactique de développement
La tactique de développement du secteur des arts plastiques en Océanie devrait s’articuler autour
des quatre volets suivants. Premièrement, les artistes ont besoin d’être soutenus dans la création
d’associations nationales pour bâtir l’infrastructure du secteur. Deuxièmement, la reconnaissance
du secteur au plan international passe par plus d’innovation et d’explications de la part des artistes
et des galeristes. Troisièmement, les artistes, les associations, les services de la culture et les
galeristes doivent impérativement renforcer leurs compétences en commerce et en gestion s’ils
souhaitent augmenter les ventes et mieux promouvoir les produits. Quatrièmement, dès lors que des
infrastructures solides seront mises en place, que les produits seront bien définis et que les
organismes concernés auront les connaissances requises, il appartiendra aux parties prenantes de
s’atteler au marketing et à la promotion.
Développement de l’infrastructure
• Bien que certains artistes s’y opposent, il est nécessaire de constituer des associations
artistiques auto-gérées, lesquelles pourraient contribuer à relayer les informations et les
préoccupations des intéressés auprès des services de la culture, tout en intensifiant les
opérations de marketing au profit de tous. Pour constituer ces associations, les artistes
auront besoin du soutien des services de la culture et d’experts en gestion artistique.
• En collaboration avec d’autres parties prenantes du secteur public, les services de la
culture doivent encourager la mise en place de programmes d’enseignement artistique
dans les écoles primaires, étape indispensable à l’émergence de la prochaine génération
d’artistes.
• Les services de la culture doivent également travailler avec les autorités nationales afin de
promouvoir le rétablissement ou la mise en place de programmes d’enseignement
artistique de niveau universitaire. Pour permettre à l’Océanie de s’affirmer en tant que
pépinière d’artistes talentueux et innovants, il convient de mettre l’accent à la fois sur le
perfectionnement des compétences techniques des artistes et sur la recherche théorique de
niveau universitaire. Ces programmes devront également comporter des cours de gestion
d’entreprises afin de permettre aux artistes d’acquérir les compétences nécessaires pour
promouvoir et vendre leurs œuvres.
• À terme, les services de la culture devront solliciter le concours financier des pouvoirs
publics en vue de l’ouverture de galeries nationales d’art, lesquelles favoriseront le
développement du secteur dans son ensemble.
Innovation et interprétation
Pour améliorer le professionnalisme et la réputation du secteur des arts océaniens, les artistes doivent
se concentrer sur l’innovation et les galeristes sur l’interprétation. Dans cette optique, on peut
imaginer diverses solutions :
• renforcement de la recherche universitaire sur les arts par des étudiants inscrits
dans des filières non artistiques (anthropologie ou sociologie, par exemple) ;
• organisation de manifestations avant-gardistes au cours desquelles les artistes sont invités à
présenter leurs œuvres les plus innovantes ;
•
implication des pouvoirs publics dans la mise en place de programmes d’échange destinés
plus particulièrement aux artistes, aux historiens de l’art, aux critiques d’art et aux
conservateurs (Fulbright Program, Marshall Fellowship, JICA, Peace Corps, Australian
Business Volunteers, par exemple) ;
64
•
•
mise en place de programmes de résidences d’artistes et de conservateurs permettant à
des artistes reconnus de séjourner dans le Pacifique et de travailler avec des artistes
océaniens ;
aide à la participation d’artistes océaniens à des programmes de résidences à l’étranger.
Perfectionnement des compétences en gestion
Tous les acteurs du secteur des arts doivent améliorer leurs compétences en gestion. Les services de
la culture négligent actuellement l’aspect commercial. Or, pour accompagner efficacement les
artistes, ils doivent commencer par renforcer leurs propres capacités en gestion d’entreprises et en
marketing. De plus, comme les artistes vendent souvent leurs œuvres sans intermédiaire, il est
important qu’ils sachent en calculer eux-mêmes le prix de revient et puissent en fixer le prix de
vente. Ils doivent également apprendre à déchiffrer les contrats et les polices d’assurance et à
négocier les modalités d’envoi et de paiement. Les associations artistiques nouvellement constituées
sont également invitées à renforcer leurs capacités dans ces domaines de façon à aider au mieux les
artistes par la suite.
Marketing et promotion
Une fois mises en place, les filières de distribution traditionnelles (galeries ou associations
artistiques) peuvent recourir à diverses tactiques de marketing :
• création de sites Web facilement référencés par les moteurs de recherche en vue de renforcer
leur présence sur Internet et de faciliter la conquête des marchés à l’exportation ;
•
•
développement d’une stratégie de marque et création de labels
d’authenticité/originalité permettant de différencier les œuvres uniques des
reproductions et d’augmenter la valeur des œuvres originales ;
avec le concours des services de la culture, création de books permettant aux artistes de
mieux se faire connaître et de mieux promouvoir leur travail ; on prévoira alors des
formations sur la création de books (utilisation d’un appareil photo numérique, mise en
page, impression, etc.) ;
•
diversification des produits, notamment au travers de contrats d’utilisation de leur
image sur les produits dérivés et les cartes postales ; on prévoira alors un
accompagnement des artistes pour l’examen des contrats et le respect des principes
régissant la protection de la propriété intellectuelle ;
• participation accrue des artistes aux biennales régionales telles que la Biennale d’art
contemporain de Nouméa, et organisation d’événements artistiques professionnels dans
tous les pays de la région ;
• participation accrue aux festivals régionaux et renforcement des compétences en matière
de conservation, d’interprétation et de gestion des œuvres artistiques (Art Summit
Australia, Festival The Dreaming, Festival des arts du Pacifique et Festival des arts
mélanésiens) ;
• renforcement de la coopération avec des institutions culturelles reconnues comme le Centre
culturel de Nouvelle-Calédonie ;
•
renforcement des actions de promotion auprès de l'industrie du tourisme au travers d’une
collaboration étroite avec les associations touristiques et les services du tourisme ; les
artistes doivent s'employer activement à intégrer leur activité artistique dans les projets de
développement touristique ;
65
• sensibilisation des pouvoirs publics à la nécessité de mettre en place des politiques
d’investissement visant à inciter ou à obliger les promoteurs du tourisme à passer
toute commande d’œuvres d’art décoratives auprès des artistes locaux ;
• création de partenariats avec les compagnies aériennes et les magazines à diffusion
régionale afin de favoriser les relations publiques et d’augmenter la couverture
médiatique de l’art océanien ;
• extension du Salon de l’orchidée en Papouasie-Nouvelle-Guinée (Orchid Show) afin
d’accorder une place accrue aux artistes régionaux, d’augmenter le professionnalisme (travaux
de recherche dans le domaine de la conservation et interprétation des œuvres artistiques) et de
se forger une bonne réputation ;
• recherche de financements en vue de l’organisation d’une exposition d’art océanien en
marge d’une biennale occidentale d’importance majeure : les galeries d’art ou les
associations artistiques pourront ainsi exposer les œuvres d’artistes non représentés et
tirer parti de la présence sur place d’acheteurs, de collectionneurs et de critiques d’art ;
• utilisation de stratégies de promotion innovantes, telles que les étiquettes radio, les
services d’abonnement, la promotion croisée et la cocréation, afin d’améliorer l’état des
connaissances et la réputation du secteur (voir plus haut la section consacrée aux
stratégies de promotion innovantes).
• prospection des marchés sud-africain et indien dans le domaine des arts plastiques.
Partenaires potentiels
À l’heure actuelle, le secteur des arts plastiques en Océanie est désorganisé et sous-représenté,
sauf peut-être en Nouvelle-Calédonie et au Samoa, où la consultante n’a pas eu le temps de se
rendre. Parmi les acteurs qui devraient, à ce stade, être impliqués dans le processus de
développement du secteur, on peut citer :
• Pacific Island Trade and Invest ;
• les autorités nationales de promotion des investissements ;
•
•
•
•
•
•
les conseils représentant les petites et moyennes entreprises ;
les services de la culture ;
l’Alliance Française ;
l’Association des musées des îles du Pacifique (PIMA) ;
les galeries privées ;
o Art Street Gallery (Papouasie-Nouvelle-Guinée) ; et
les artistes indépendants.
66
CALENDRIER DE DÉVELOPPEMENT DU SECTEUR DES ARTS PLASTIQUES
Activités
Année 1
Année 2
Année 3
Année 4
Création d’associations artistiques nationales
Année 5
Mise en réseau des associations artistiques nationales à
l’échelon régional
Renforcement de la coordination entre les
acteurs du secteur public
Intensification de l’enseignement artistique
dans les écoles primaires
Mise en place de cursus universitaires
Ouverture de galeries d’art et de musées nationaux
Intensification de la recherche
Organisation de manifestations avant-gardistes
Mise en place de programmes d’échange
Mise en place de programmes de résidences d’artistes
Inscription d’artistes à des programmes de
résidences
Perfectionnement des compétences en
gestion (formations)
Mise en place d’un programme consacré à la
stratégie de marque et à l’authenticité
Renforcement de la participation
officielle d’artistes aux festivals
Renforcement de la participation d’artistes aux biennales
Mise en place de partenariats régionaux aux fins de marketing
Établissement de liens avec les marchés touristiques
Organisation d’événements régionaux destinés aux professionnels
Intensification des actions de marketing/relations
publiques
Intensification du marketing créatif
67
STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT DU SECTEUR DE LA MODE
Porté par une poignée de créateurs reconnus et un nombre croissant de nouveaux jeunes créateurs,
le secteur de la mode, encore naissant dans le Pacifique, commence à prendre son envol. Autour
d’un centre névralgique situé aux Fidji et rassemblant nombre de créateurs et de confectionneurs de
vêtements, le secteur s’est peu à peu développé avec l’aide de la Semaine de la mode des Fidji et du
Conseil de la mode des Fidji. Ces organismes jouent un rôle important dans la promotion et l’essor
du secteur, mais ont besoin du soutien des pouvoirs publics et des investisseurs pour réaliser leur
ambition qui est de développer une industrie dynamique de la mode féminine dans le Pacifique.
Actuellement, la création et la production d’articles de mode se font au cas par cas. Certaines
enseignes sont reconnues, notamment Tahroro, Mena (marque samoane) et TAV qui se sont fait
connaître dans la région en exécutant des commandes prospectives destinées à l’exportation.
Toutefois, la majorité des jeunes designers créent au coup par coup, sans les compétences ni les
connaissances requises pour percer sur les marchés à l’exportation. Ces jeunes créateurs dessinent de
nouvelles pièces, qu’ils commercialisent ici et là sur des sites de vente en ligne ou via le bouche à
oreille.
Aux Fidji, les acteurs du secteur voient dans la mode féminine le segment le plus porteur. La mode
féminine haut de gamme repose certes sur des créations et des matières de qualité, mais les
quantités produites sont plus faibles. Cette stratégie d’écrémage (petit volume de production et prix
élevés) est adaptée à la faible capacité de production des Fidji et aux coûts élevés de la maind’œuvre (en particulier par rapport à la Chine et au Bangladesh).
Toutefois, comme l’illustre la chaîne de valeur ci-après, le maillon le plus important manque encore
au secteur de la mode : les maisons ou marques de mode. Les maisons de mode font office
d’incubateur de talents, facilitent la production, promeuvent et commercialisent les créations et
distribuent les produits aux points de vente finale. Si elles promeuvent leurs marques et leur griffe
unique, les maisons de mode basées dans le Pacifique peuvent faire de la région une plaque
tournante de la mode. Toutefois, pour encourager ce secteur déjà prometteur, les pouvoirs publics
doivent adopter une stratégie globale de développement.
Figure 8: Chaîne de valeur commerciale du secteur de la mode aux Fidji
68
Objectif
L’objectif de cette stratégie est d’orienter le développement du secteur naissant de la mode
fidjienne vers le marché de la mode féminine haut de gamme. À long terme, le but est de faire des
Fidji un centre de la mode, sous-tendu par des marques fortes, une production d’excellente qualité
et des créations innovantes.
Description des produits
La grande majorité des créateurs se concentrent sur la mode féminine haut de gamme, empreinte
d’influences occidentales, océaniennes et indiennes. La plupart des créateurs, à l’exception de TAV,
Mena et Tahroro, n’imaginent pas des collections avec un thème fédérateur, mais ont coutume de
créer au coup par coup. En règle générale, ils créent des vêtements de loisir, des tenues de tous les
jours et des tenues de soirée. Un petit nombre de créateurs et d’artistes dessinent aussi des
collections d’art-à-porter en édition limitée, mais le plus souvent, ces pièces connaissent un succès
éphémère sur le marché.
Besoins du secteur
Le secteur fidjien de la mode n’en est qu’à ses balbutiements. Avec le concours des pouvoirs publics
et d’organisations d’aide bilatérale et multilatérale, un programme de développement global doit
être mis en place pour améliorer tous les maillons de la chaîne de valeur créative.
Développement et création : Malgré leur talent, les jeunes créateurs fidjiens, de plus en plus
nombreux, n’ont pas les compétences nécessaires en termes de création et de maîtrise technique.
Faute de programme de formation officiel dans le pays, les jeunes designers manquent, pour la
plupart, de connaissances sur les qualités de base des tissus ou les techniques de réalisation des
patrons, et de compétences en couture et en apprêt. Par ailleurs, ils n’ont pas accès au matériel, aux
logiciels et aux matières premières, qui pourraient pourtant les aider à perfectionner leurs
compétences et à concevoir leurs collections. Ils ont aussi besoin d’assistance pour améliorer leurs
compétences en gestion, notamment pour la réalisation d’études de marché, l’élaboration d’un
projet d’entreprise et la promotion de l’investissement. En l’absence de maisons de mode ou de
studios de création de renom dans le pays, les jeunes créateurs sont privés d’un accès à un système
d’encadrement structuré qui leur permettrait d’apprendre, d’innover et de gagner en maturité
professionnelle.
La Semaine de la mode des Fidji contribue sensiblement à la montée des jeunes créateurs : la
participation à cette semaine annuelle de défilés est un encouragement à la création, cet
événement constitue un espace central de rencontres et de mise en réseaux des créateurs, et ces
derniers bénéficient d’une aide pour monter leur entreprise. Aux Fidji, le secteur de la mode se
développe sous l’impulsion de la Directrice de la Semaine de la mode, Ellen Whippy. Elle a
collaboré avec plusieurs enseignes reconnues, notamment Kookai et Mark Halabe chez Mark One
Apparel, pour mettre sur pied le Conseil de la mode des Fidji. Ces premières initiatives ont
permis d’apporter un soutien crucial au secteur des créateurs émergents.
Production : Étant donné que la plupart des créateurs sont à leur compte et que leurs ventes,
ponctuelles, répondent à une démarche de réaction, plutôt que d’anticipation, la confection est le plus
souvent assurée par le créateur lui-même ou un tailleur auquel il s’associe. Le développement de l’industrie
de la mode aux Fidji ne peut se faire sans la création de centres de production. Heureusement, le secteur
de la confection de vêtements, y compris les usines, est déjà bien développé dans le pays. Toutefois,
69
les confectionneurs doivent bénéficier de nouvelles formations pour pouvoir produire des
vêtements de qualité, répondant aux critères de vente de la mode féminine haut de gamme.
Il est aussi possible de développer un nouveau centre de confection de vêtements aux Fidji.
L’accord SPARTECA a créé un climat propice aux investissements dans la confection de
vêtements destinés à l’exportation. L’existence d’une zone franche et l’aide à l’exportation font de
la confection de vêtements un secteur très attrayant pour les nouveaux investisseurs. Cela dit, les
investisseurs devront tenir compte de l’absence de matières premières locales dans leur modèle
économique. À l’heure actuelle, les confectionneurs collaborent généralement uniquement avec
des clients capables de leur fournir des matières premières.
Promotion : La promotion du secteur n’est guère organisée pour le moment. Chaque créateur fait sa
propre promotion sur Internet (principalement sur Facebook.com), par le bouche à oreille et lors des
défilés de mode locaux. Les créateurs n’ont ni les connaissances, ni les fonds nécessaires pour assurer
une promotion plus conventionnelle de leurs produits. La Semaine de la mode des Fidji est la
principale fenêtre de promotion de beaucoup de jeunes designers, et la réussite du secteur repose
pour beaucoup sur le développement de cet événement. Pour mieux se promouvoir, le secteur doit
créer des maisons de mode/studios de création ou s’associer avec des noms déjà bien établis, qui
permettront de bâtir la marque de mode fidjienne. Par ailleurs, le fait de favoriser l’ascension internationale
de mannequins prometteurs pourrait contribuer sensiblement à la promotion du secteur.
Distribution : Pour l’heure, les produits sont distribués de façon peu systématique, via des ventes
en ligne et les magasins locaux de détail. On constate un certain élan vers une collaboration avec le
secteur du tourisme, mais il faut encore améliorer la qualité de la fabrication et de la création pour
consolider ce marché. Lorsque les marchés à l’exportation seront visés, il faudra mettre en place des
maisons de mode/studios de création pour orienter et développer la distribution. Des studios de
création visionnaires pourraient imaginer des méthodes d’expédition créatives pour faire baisser les
coûts élevés du transport de petits lots.
70
Figure 9: Chaîne de valeur « créative » du secteur de la mode des Fidji
Bleu = Situation actuelle
Rouge = Situation possible et apports nécessaires
Marchés
Marchés actuels
Dans ce secteur encore tout jeune, la plupart des marchés restent sous-développés.
Marché de l’habillement : L’industrie de l’habillement affiche une très bonne santé aux Fidji, l’Australie
achetant des petits lots de vêtements et uniformes, pour hommes essentiellement. La Nouvelle-Zélande et
Hawaii offrent également de petits débouchés, mais ont tendance à entretenir des relations capricieuses
avec les confectionneurs fidjiens et à aller voir ailleurs si le prix est plus intéressant.
Kookai : Entreprise de création française, Kookai a implanté en Australie une filiale et un studio de
création, où sont imaginés des vêtements pour femme haut de gamme. Depuis que la marque a
délocalisé sa production aux Fidji, elle peut montrer la voie au secteur de la mode et aux jeunes
créateurs du pays.
71
Diasporas : Au niveau des ventes, les jeunes créateurs connaissent un certain succès en ligne auprès
des diasporas installées en Australie, en Nouvelle-Zélande et à Hawaii. Le caractère non
systématique de ce marché est toutefois synonyme de distribution limitée.
Marchés à exploiter
Exportations vers l’Australie et la Nouvelle-Zélande : Le plan de développement exposé ci-après
vise essentiellement à aider le secteur de la mode des Fidji à séduire les marchés à l’exportation
australien et néo-zélandais des vêtements pour femme haut de gamme. La taille de ces marchés
et leur proximité géographique en font une cible de choix pour l’exportation.
Marché local : Dans le monde de la mode, le développement de secteurs jeunes repose souvent sur la
popularité des marques nationales sur le marché local. Le soutien du marché local aide les jeunes
créateurs à obtenir et à faire croître une source stable de revenus qu’ils peuvent investir dans la
promotion de leurs créations à l’étranger. Le développement du marché local reste une étape importante
à franchir pour atteindre les marchés à l’exportation.
Tourisme : Les vêtements de loisir et de bain ont un fort potentiel vendeur sur les marchés
touristiques de l’ensemble du Pacifique. Désireux de trouver des tenues et maillots de bain
incarnant les motifs et le style uniques du Pacifique, le touriste pourra s’attacher à la marque et
lui rester fidèle bien après son premier achat en tant que vacancier. Les créateurs fidjiens
peuvent exploiter ce marché lucratif en réunissant plusieurs conditions : créations adaptées,
matières premières d’excellente qualité, forte stratégie de marque, et réseaux de distribution
bien établis.
Exportations vers les États-Unis et l’UE : À plus long terme, les créateurs peuvent se tourner vers les
vastes marchés à l’exportation des États-Unis et de l’UE, où la concurrence par la qualité du design et
par les prix est rude. En conséquence, les créateurs doivent d’abord s’imposer dans la région avant de
s’aventurer sur ces marchés très concurrentiels.
Tactique de développement
La tactique de développement du secteur fidjien de la mode devrait s’articuler autour de quatre
grands volets. Premièrement, les intervenants du secteur, y compris les acteurs publics, doivent
s’entendre pour mettre au point de façon autonome une stratégie de développement, engageant
notamment les pouvoirs publics et d’autres bailleurs à dégager les ressources financières adéquates.
Deuxièmement, les différents intervenants doivent continuer de soutenir le développement de
l’infrastructure du secteur, pour permettre aux créateurs d’améliorer leurs compétences. Lorsque
cette infrastructure sera en place, les créateurs pourront perfectionner leurs compétences techniques
et en gestion. Enfin, le secteur doit accorder une place privilégiée au marketing et à la promotion.
Voici quelques-unes des activités recommandées :
Élaboration d’une stratégie
• Si les parties prenantes du secteur œuvrent au développement de la mode fidjienne depuis
environ cinq ans, elles ne disposent d’aucune stratégie nationale officielle. Le ministère
fidjien de l’Industrie et du Commerce s’est dit intéressé par l’élaboration d’une stratégie
de développement de l’industrie de la mode, mais il a besoin pour ce faire de ressources et
d’une assistance technique.
• Le Conseil de la mode des Fidji doit être considéré comme le représentant du secteur
privé. Toutefois, cette toute nouvelle organisation a besoin de soutien pour décoller. Une
72
assistance financière et technique devrait être fournie au conseil pour l’aider à se
constituer des bases solides.
• Il est également souhaitable que le Conseil de la mode des Fidji et la Semaine de la mode
des Fidji se mettent en relation avec la Fédération du commerce et des employeurs des
Fidji afin de l’aider dans ses démarches auprès des pouvoirs publics nationaux et d’obtenir
un soutien pour le secteur.
Développement de l’infrastructure
• La mise en place par le gouvernement de mesures d’incitation attrayantes et d’une
politique d’investissement inspirées de la stratégie de développement du ministère de
l’Industrie et du Commerce est nécessaire pour favoriser l’essor de l’industrie de la mode.
Les pouvoirs publics devraient étudier la possibilité d’obtenir un soutien de la Chine et de
l’Agence australienne pour le développement international (AusAID), qui ont déjà
manifesté leur intérêt pour le secteur.
• L’Université nationale des Fidji (FNU) est en train de mettre au point un programme
d’études en design de mode au niveau certificate et diploma. Le lancement de ce
programme d’enseignement est indispensable. Il est recommandé aux différentes parties
prenantes de tenir compte des éléments suivants lors de l’élaboration du programme de cours :
o veiller à ce que l’horaire et le programme des cours soient adaptés aux besoins
des étudiants et à leurs disponibilités (ex. : cours du soir, le week-end ou par
modules, si les étudiants travaillent) ;
o prévoir des formations en apprentissage et des stages pour permettre aux
étudiants de créer des réseaux et d’acquérir de l’expérience aux prémices de leur
carrière ;
o intégrer un cours de gestion et de marketing pour que les étudiants sachent
comment gérer leur entreprise ; et
o veiller à ce que le programme ne soit pas restrictif en termes de débouchés et
permette d’orienter aussi les élèves vers des professions de l’industrie de la mode
qui ne relèvent pas du design : critiques/journalistes, représentants commerciaux
et organisateurs de défilés de mode.
• Les lois fidjiennes relatives à la protection de la propriété intellectuelle dans le
domaine de la mode sont déjà assez solides, mais il est nécessaire de les examiner et de
les améliorer pour qu’elles soient adaptées au futur développement du secteur.
Perfectionnement des compétences techniques
Pour donner un coup de fouet au secteur de la mode des Fidji, il faut par-dessus tout parfaire la
maîtrise technique du secteur. La création d’un programme de cours à l’Université nationale des Fidji
est une première étape décisive en ce sens, mais d’autres actions peuvent être envisagées :
• association avec des créateurs australiens pour créer des maisons de mode implantées aux
Fidji et former les jeunes créateurs ;
• création d’un centre de documentation sur le design afin d’aider les jeunes créateurs à
rester au fait des tendances et à effectuer des études de marchés ;
• collaboration avec le Centre national pour le développement des PME des Fidji
(NCSMED) afin d’aider les jeunes chefs d’entreprise à former leur projet
d’entreprise et à perfectionner leurs compétences en gestion ; et
• établissement d’un incubateur d’entreprises de mode, projet qui intéresse le NCSMED,
mais pour lequel il a besoin d’une assistance technique et financière.
73
Marketing et promotion
Pendant la phase de développement du secteur, les créateurs ne doivent pas mettre entre parenthèses
la promotion de leurs produits. Toute forme de marketing, qu’elle soit périodique, ponctuelle ou
traditionnelle, contribuera au rayonnement international de la mode fidjienne. Voici quelques-unes des
actions recommandées :
• création d’un site Web « incubateur de talents », vitrine et site de vente qui seraient
accessibles à tous les créateurs. Un gros site Web fédérateur serait plus visible qu’une
multitude de sites individuels de créateurs.
• création d’un magasin de détail incubateur de projets de mode, qui serait géré de façon
autonome ou par une enseigne déjà établie (Jack’s, Tapoos, Prouds, etc.). Couplée au label
« Fabriqué aux Fidji », cette initiative pourrait contribuer à la promotion de produits de
confection locale. Bonnes techniques de vente, vitrines attrayantes, bonne présentation des
produits et vendeurs compétents seront alors autant d’éléments déterminants dans le
succès des points de vente sélectionnés.
• partenariat avec l’industrie du tourisme via l’Association fidjienne de l’hôtellerie et du
tourisme afin de commercialiser des lignes de vêtements de loisir et de bain dans les hôtels
et les magasins des complexes hôteliers.
• recherche de partenariats stratégiques avec une organisation multilatérale afin de soutenir
la mise en valeur des créateurs et leur participation à des expositions internationales,
telles que les festivals Pasifika et The Dreaming.
• poursuite de la politique de développement et de soutien en faveur de la Semaine de la
mode des Fidji, le principal événement de mode en Océanie.
Partenaires potentiels
Aujourd’hui, l’essor de la mode fidjienne suscite un certain engouement. De nombreuses parties
prenantes y voient un marché porteur, mais il leur manque les ressources ou le soutien technique
nécessaire pour passer à la vitesse supérieure. Les intervenants répertoriés ci-dessous ont tous
indiqué qu’ils souhaitaient prendre une part active dans le développement du secteur :
• Semaine de la mode des Fidji
• Conseil de la mode des Fidji
• Université nationale des Fidji
• créateurs océaniens et australiens du secteur privé :
o
Kookai
o
TAV
o
Tahroro
• fabriques privées de vêtements
o
Mark One Apparel
• Centre national pour le développement des PME des Fidji
• Association fidjienne de l’hôtellerie et du tourisme
• Fédération fidjienne du commerce et des employeurs
74
Calendrier de développement du secteur de la mode fidjien
Activité
Année 1
Année 2
Élaboration d’une stratégie
Institutionnalisation du Conseil
de la mode des Fidji
Investissements/achats
Offre de cours à la FNU
Renforcement des lois sur la propriété intellectuelle
Association avec des créateurs australiens
Année 3
Année 4
Année 5
Création d’un centre de
documentation sur le design
Incubateur de mode NCSMED
Site Web incubateur de talents
Magasin de détail incubateur de projets de
mode
Relation avec l’industrie du tourisme
Participation à des festivals internationaux
75
STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT DE LA MUSIQUE
Dans le Pacifique, l’industrie de la musique englobe un large éventail de genres musicaux, allant des
chansons et ballades traditionnelles aux musiques modernes, telles que le hip-hop et le rap. Cette
vaste gamme musicale offre un large choix aux marchés océaniens et une grande source
d’inspiration aux musiciens de la région. Actuellement, la majorité des musiciens océaniens vendent
leur musique sur les marchés locaux ainsi qu’aux diasporas, et affichent une faible présence sur les
marchés internationaux.
En dépit du nombre grandissant de musiciens qui cherchent à enrichir leurs connaissances et leur
talent, le secteur de la musique océanien est au bord de l’effondrement. Qu’il soit institutionnalisé
ou informel, le piratage a fait fondre les bénéfices des musiciens et des studios d’enregistrement,
à tel point que plusieurs studios ont fermé leurs portes ces trois dernières années, notamment à
Vanuatu et aux Fidji. D’autres, comme CHM en Papouasie-Nouvelle-Guinée, peinent à maintenir
leurs services de production musicale, malgré des années d’efforts pour limiter les atteintes à la
propriété intellectuelle dans le pays.
Les conséquences du piratage sur les ventes locales freinent également le développement des
marchés à l’exportation. Pour qu’un musicien océanien puisse se vendre sur les marchés à
l’exportation internationaux, il doit bénéficier du soutien d’un studio d’enregistrement professionnel,
capable d’éditer un album de qualité et de faciliter les négociations avec les distributeurs sur les
marchés cibles. Les studios d’enregistrement sont tributaires des ventes locales pour asseoir
financièrement leur activité et, dans certains cas, subventionner les tentatives de percée sur les
nouveaux marchés à l’exportation. En l’état actuel des choses, faute de marché local solide, les
studios d’enregistrement océaniens courent à leur perte et risquent d’entraîner dans leur chute
l’industrie tout entière.
La figure 10 décrit la chaîne de valeur commerciale applicable aux circuits de production et de
distribution du secteur de la musique océanien sur les marchés locaux. Le manque d’organisation
infrasectorielle est évident, au vu du nombre de circuits de vente. En effet, musiciens, studios
d’enregistrement, sites de vente en ligne, magasins et salles de spectacles s’échangent des produits
et les vendent aussi directement aux consommateurs. En outre, sur le marché local, la plupart des
consommateurs se procurent de la musique gratuitement ou à prix réduit. Le piratage
institutionnalisé est le fait des magasins locaux, qui font l’acquisition légale d’un album en un seul
exemplaire, qu’ils copient et vendent à un prix inférieur à sa valeur marchande. Depuis peu, on
observe également un phénomène nouveau : les magasins locaux commencent à vendre des
périphériques externes contenant de la musique numérique, à des prix bradés. Incapables de
rivaliser dans cette guerre des prix, les studios d’enregistrement et les artistes accusent ainsi un
sérieux manque à gagner. Par ailleurs, parce qu’il y a peu de sociétés efficaces de perception et de
distribution des droits dans le Pacifique, les musiciens et les studios d’enregistrement doivent
encore rajouter à ce manque à gagner la perte de leurs droits de diffusion en radio.
76
Figure 10: Chaîne de valeur commerciale du secteur de la musique dans le Pacifique
Objectifs
L’objectif de la stratégie de développement présentée ici est de sauver l’industrie de la musique
océanienne en lui rendant la part des ventes et des recettes qui lui revient de droit par le
renforcement de la protection de la propriété intellectuelle et la mise en place de sociétés de
perception des droits. L’objectif secondaire est d’élargir la présence des artistes sur les marchés à
l’exportation régionaux.
Description des produits
L’Océanie recèle une grande diversité de traditions, de cultures et de peuples, qui constituent une
riche source d’inspiration pour les musiciens. Sur fond de popularisation de la musique
occidentale dans la région, les musiciens peuvent explorer ces influences pour créer des sons
uniques. Les principaux genres musicaux écoutés dans le Pacifique sont la musique
traditionnelle, la musique fusion, le reggae, le hip-hop/rap et le rock, avec des mélanges de
genres chez certains musiciens. Toutefois, hormis quelques pays (Vanuatu, Papouasie-NouvelleGuinée, Nouvelle-Calédonie), la majorité des produits sont des reprises, ciblant principalement les
marchés locaux et les diasporas.
À l’exception de quelques grands studios d’enregistrement (comme CHM en Papouasie-NouvelleGuinée et Mango (sic) Productions en Nouvelle-Calédonie), la région manque cruellement de
studios professionnels. En conséquence, la qualité sonore et technique des albums, produits dans
des studios maison ou des studios professionnels sans technicien qualifié, laisse à désirer. Dans les
pays industrialisés, les studios d’enregistrement et les producteurs collaborent par ailleurs avec les
musiciens pour développer un produit adapté et donc commercialisable sur les marchés cibles.
77
Besoins du secteur
Dans le secteur de la musique océanien, la priorité absolue reste de légiférer de manière efficace sur la
protection des droits de propriété intellectuelle et de faire appliquer la loi. Le faible degré de
protection de ces droits dans le Pacifique s’explique en partie par l’absence d’organismes de défense
au sein du secteur. Rares sont les pays du Pacifique à disposer d’un organisme national représentant
les musiciens et les studios d’enregistrement, si bien que les acteurs du secteur n’ont aucun
interlocuteur officiel sur qui s’appuyer pour s’adresser aux organismes publics et faire entendre leurs
préoccupations sur ces enjeux importants.
Développement et création : Bien que les talents musicaux foisonnent dans le Pacifique,
l’offre de formation est limitée dans l’enseignement officiel. Il manque ainsi aux musiciens en herbe
une connaissance approfondie de la musique, ce qui peut freiner l’étape de création. Faute de
formation structurée et de recherches locales sur le secteur, les musiciens sont peu exposés aux
autres genres musicaux dont ils pourraient s’inspirer pour enrichir leur style.
L’avènement d’Internet dans la région a quelque peu changé la donne. Les musiciens ont
aujourd’hui accès à un large choix de musique, même s’ils n’ont pas les compétences pour la
recréer. Toutefois, le nombre limité de stations de radio locales et le penchant général pour la
musique « grand public » restreignent encore les rencontres du secteur avec des musiques nouvelles
et alternatives.
Enfin, dans la phase de création, les musiciens sont parfois handicapés par le manque d’accès aux
instruments, à du matériel d’enregistrement maison et à des lieux de répétition. Souvent, les
musiciens n’ont pas les moyens de s’acheter des instruments de très bonne qualité, dont le prix est
alourdi par des droits d’importation élevés et les grosses marges pratiquées par les détaillants. En
outre, dans certains pays, les artistes ne trouvent pas toujours de lieu confortable et sûr pour
répéter et faire évoluer leur musique.
Production : Comme indiqué plus haut, la région manque cruellement de studios
d’enregistrement et de production professionnels. Les quelques studios de grande qualité qui
persistent voient leurs bénéfices fondre et se pensent condamnés à fermer dans quelques années si
les droits de propriété intellectuelle ne sont pas mieux protégés. Le piratage a déjà contraint le
plus grand studio de Vanuatu, dont le propriétaire est Joe Tjiobang Bong, Président de la Vanuatu
Music Federation, et un certain nombre de studios fidjiens à fermer boutique. (Voir section sur la
distribution plus loin pour plus de détails sur le secteur de la musique du Vanuatu).
Aux quelques studios professionnels existants s’ajoutent des centaines de studios maison équipés
d’une large gamme de matériel élémentaire d’enregistrement et de mixage. L’amélioration des
technologies numériques et la démocratisation du numérique ont permis aux apprentis « ingénieurs
du son » d’expérimenter plus librement avec leur musique. Cela dit, la grande majorité d’entre eux
n’ont suivi aucune formation et ne sont pas en mesure de produire des albums de très grande
qualité, susceptibles d’intéresser les marchés internationaux. De surcroît, les propriétaires de
studios maison n’ont souvent pas les compétences requises en gestion et en marketing pour
vendre leurs produits. Par ailleurs, tant les studios maison que les studios professionnels ont besoin
d’un meilleur accès au matériel et aux matières premières (CD, boîtes, technologie d’impression des
jaquettes). En effet, le prix de certains équipements indispensables est prohibitif, du fait des droits
d’importation élevés et des grosses marges pratiquées par les détaillants.
78
Les studios d’enregistrement et de production resteront le plus grand obstacle à franchir pour
accéder aux marchés internationaux. Pour rivaliser avec les productions de qualité présentes sur
les marchés à l’exportation, les musiciens océaniens devront collaborer avec des ingénieurs du son
et des studios d’enregistrement professionnels. Si ces compétences ne sont pas disponibles en
Océanie, les artistes qui sortent du lot travailleront avec des studios en Australie et en NouvelleZélande, lesquels engrangeront les bénéfices des ventes d’albums.
Promotion : Comme indiqué dans la chaîne de valeur commerciale ci-dessus, un large éventail
d’agents du marché participent à la promotion de la musique. Les musiciens promeuvent leur
musique auprès des studios d’enregistrement, des grands sites de vente en ligne, des salles de
spectacle et des consommateurs. Cette multiplicité contraint les musiciens à consacrer une part
importante de leur temps à la commercialisation et à la promotion de leur musique. Les studios
d’enregistrement, quand ils existent, sont aussi confrontés à la multiplicité des circuits de
commercialisation, notamment les sites de vente en ligne, les magasins traditionnels et les stations
de radio. Ce sont généralement les studios qui prennent en main la promotion : publicités, relations
publiques et concerts ou tournées. Toutefois, parce que les ventes sont grignotées par le piratage, les
studios ont aujourd’hui des fonds limités à leur disposition pour assurer la promotion. Cela se
traduit, pour la plupart des musiciens et des studios d’enregistrement, par une présence anodine sur
Internet, ce qui limite leur visibilité sur les marchés à l’exportation. Les stations de radio locales
figurent parmi les principaux circuits de promotion, mais la musique locale doit rivaliser avec la
musique occidentale pour être diffusée à l’antenne.
Distribution : Encore une fois, comme indiqué dans la chaîne de valeur commerciale, les circuits
de distribution ne manquent pas. Les artistes distribuent leur musique via les ventes en ligne, les
studios d’enregistrement, les magasins locaux, les lieux de concert et les ventes directes aux
consommateurs. Les studios d’enregistrement ont également face à eux un large éventail de circuits
de distribution : ventes en ligne, magasins locaux, lieux de concert, distributeurs internationaux,
détaillants et, dans certains cas, ventes directes aux consommateurs. Cela dit, dès que la musique
est distribuée dans les magasins locaux ou sur les sites de vente en ligne, le secteur informel prend
le dessus. Les enseignes locales font l’acquisition d’une nouvelle sortie en un seul exemplaire et, en
l’espace de quelques heures, copient l’album sur des CD bon marché ou des périphériques externes,
pour les revendre à bas prix, en deçà de la valeur marchande du produit. Dans certains cas, les
stations de radio remettent aux disquaires des exemplaires de l’album avant même sa sortie dans
les bacs. En outre, les consommateurs qui achètent légalement un album partagent probablement
les fichiers numériques avec leurs amis, par le biais du partage en pair à pair, faisant encore baisser
les chiffres des ventes.
Le Vanuatu a récemment intensifié sa lutte contre le piratage musical en promulguant en février 2011
la loi n° 42 (2000) relative au droit d’auteur et aux droits connexes. La loi précise que toute vente au
détail de CD et de DVD de musique locale sans l’autorisation des propriétaires/studios de
production est désormais illégale. Toute marchandise illicite se trouvant en la possession d’un
détaillant sera immédiatement saisie et détruite, et le détenteur sera passible de sanctions pénales. Si
la loi porte un grand coup au trafic illicite, elle n’est pas sans faille. En l’absence d’accords de
coproduction, la loi ne produira que peu d’effets sur la musique océanienne produite en dehors du
territoire du Vanuatu. En effet, pour tomber sous le coup de la loi, un album océanien doit être
officiellement mis sur le marché au Vanuatu dans les trente jours suivant sa sortie originale. En outre,
la Vanuatu Music Federation se heurte à des difficultés de mise en œuvre des lois. Les pouvoirs
publics n’ont réservé aucun moyen financier ou autre pour garantir le plein respect de la loi, laissant
79
cette responsabilité aux musiciens et à la fédération. Joe Tjiobang Bong a beaucoup fait à titre
personnel pour faire respecter la loi, distribuant des avertissements 9 aux détaillants pour se voir
opposer une fin de non recevoir et devoir revenir avec un officier de police.
L’érosion de la protection de la propriété intellectuelle provoquera à terme la chute du secteur. S’ils
ne peuvent pas s’associer à des studios d’enregistrement et à des producteurs solides, les artistes
océaniens seront privés de l’encadrement technique, créatif et promotionnel dont ils ont besoin
pour accéder aux marchés locaux, régionaux et à l’exportation.
Même si la protection de la propriété intellectuelle est sensiblement renforcée, d’autres obstacles
interviennent à l’étape de la distribution. Parmi ces obstacles, on peut citer le fait qu’il y a peu de
juristes qualifiés et disponibles susceptibles d’aider les musiciens à décortiquer leur proposition
de contrat avec les studios, les radios et les agences de marketing externes. Dans le Pacifique,
comme dans le reste du monde, certains studios proposent aux artistes un versement au comptant
pour leur disque original (master), sans contrepartie financière sur le long terme. Souvent, les
musiciens n’ont pas conscience que les studios vampirisent leur produit et les privent
d’importantes recettes (droits de diffusion et ventes).
Même si la protection de la propriété intellectuelle est sensiblement renforcée, d’autres obstacles
interviennent à l’étape de la distribution. Parmi ces obstacles, on peut citer le fait qu’il y a peu de
juristes qualifiés et disponibles susceptibles d’aider les musiciens à décortiquer leur proposition
de contrat avec les studios, les radios et les agences de marketing externes. Dans le Pacifique,
comme dans le reste du monde, certains studios proposent aux artistes un versement au comptant
pour leur disque original (master), sans contrepartie financière sur le long terme. Souvent, les
musiciens n’ont pas conscience que les studios vampirisent leur produit et les privent
d’importantes recettes (droits de diffusion et ventes).
Consommation : Parmi les grands obstacles à la consommation, on peut citer le nombre limité de
lieux de spectacle correctement équipés et encadrés par des professionnels, voire sécurisés. Dans la
région, une partie des plus grands événements « live » sont organisés par CHM en PapouasieNouvelle-Guinée. CHM se charge de la promotion, de la billetterie, du recrutement du personnel et
du matériel son, ces services n’étant proposés dans aucun lieu de spectacle. Par ailleurs, la
concurrence des musiques occidentales importées est féroce, car elles sont disponibles à moindre coût
en raison du piratage institutionnalisé et informel.
9
Adressé à toute personne qui commet des actes illicites, un avertissement n’est pas un document juridique. Il
peut être rédigé par tout un chacun, en général avec l’aide d’un juriste. En gros, ce document prie le destinataire
de cesser les faits qui lui sont reprochés et de s’abstenir de les commettre à nouveau à l’avenir. Si la demande
reste sans réponse, le destinataire s’expose à des poursuites pénales ; il se verra alors remettre une ordonnance
d’interdiction (émanant d’un magistrat) ou sera arrêté par un agent de la force publique.
80
Figure 11: Chaîne de valeur créative du secteur de la musique dans le Pacifique
Bleu = Situation actuelle
Rouge = Situation possible et apports nécessaires
Marchés
Partout dans le monde, les bénéfices tirés de la musique enregistrée se réduisent comme peau de
chagrin sous l’effet du piratage. Dans l’industrie de la musique océanienne, les agents du marché
doivent garder cet élément à l’esprit s’ils décident de tenter une percée sur les marchés à
l’exportation.
Marchés actuels
Marché local : La musique océanienne séduit déjà un marché large et grandissant. Toutefois, cette assise
forte s’effrite sous l’effet du piratage institutionnalisé et informel. Le marché local est généralement
segmenté par âge. La musique traditionnelle s’adresse aux groupes plus âgés, tandis que les musiques
actuelles/fusion sont destinées aux jeunes générations. Dans certains pays, comme les Fidji où se
côtoient des Polynésiens, des Mélanésiens et des Indo-fidjiens, l’appartenance ethnique influence
considérablement le marché de la musique. Chaque groupe ethnique reste attaché à la musique
originaire de sa culture, les jeunes générations passant facilement d’un genre à l’autre.
81
Diasporas : La plupart des studios d’enregistrement professionnels visent les diasporas en organisant
des tournées informelles de ventes dans les pays d’accueil ou en établissant des relations officielles
avec les distributeurs/diffuseurs dans ces pays. Lorsque les membres des diasporas retournent au
pays, ils achètent également de la musique. Il est toutefois possible d’élargir ce marché en assurant une
promotion plus structurée.
Marchés à exploiter
Local : Pour retrouver prise sur le marché local, les pouvoirs publics nationaux doivent mettre en place
des lois énergiques sur la propriété intellectuelle, assorties de lourdes sanctions, et réserver des
moyens suffisants à la mise en œuvre des textes. Par ailleurs, il faut faire la chasse à la corruption
(surtout les pots-de-vin) afin d’éviter que les récidivistes n’échappent aux sanctions financières
et/ou aux arrestations. Si elle parvient à bien protéger les droits de propriété intellectuelle,
l’industrie de la musique océanienne récupérera son principal marché de base.
Sur le marché local, les concerts peuvent également fortement faire grimper les ventes. Malgré le
coût des tournées, même au niveau national et régional, les concerts représentent l’avenir de
l’industrie de la musique. Toutefois, pour qu’une tournée rapporte d’importants bénéfices dans le
Pacifique, il faut investir dans des lieux de spectacle adaptés et récolter des fonds ou investir dans
l’organisation de la tournée.
Diasporas : Si les artistes océaniens ont déjà un public parmi les diasporas, ils n’exploitent pas encore tout
le potentiel que représente ce marché. Les ventes pourraient être boostées par l’organisation de
tournées dans les régions où s’établissent les diasporas et la création de relations plus formelles avec
les magasins de vente au détail. Toutefois, les studios d’enregistrement ont besoin de fonds pour
pouvoir investir dans le développement des marchés.
Festivals : Les musiciens participent déjà à une série de festivals en Océanie, y compris le Festival des arts
du Pacifique, le Festival des arts mélanésiens et les festivals locaux. Toutefois, peu de musiciens arrivent à
tirer parti de ces événements, leur participation étant généralement subventionnée par le festival ou l’État
concerné. En outre, il est rare que ces manifestations locales et régionales attirent des consommateurs issus
de marchés plus vastes ou des découvreurs de talents. Les organisateurs de festivals ou les studios
d’enregistrement doivent étudier la possibilité d’utiliser les concerts produits lors de festivals comme
vitrine et espace de promotion des musiciens auprès des agents et des labels d’enregistrement
internationaux. Enfin, les pouvoirs publics nationaux doivent apporter une aide aux musiciens
désireux de participer à des festivals à visée commerciale sur les marchés ciblés pour l’exportation.
Tourisme : Les musiciens n’exploitent pas le marché touristique classique. Pour cibler les touristes,
on peut leur proposer des concerts et de la musique enregistrée. Toutefois, il faut s’adapter à la cible,
car, lorsqu’ils programment leurs vacances dans le Pacifique, peu de touristes s’imaginent acheter un CD
ou assister à un concert. Les musiciens doivent travailler avec des associations du secteur privé et les
offices du tourisme pour que leurs produits soient exposés dans des lieux de fréquentation touristique,
tels que les hôtels et les restaurants. En outre, les hôtels et les voyagistes devraient faire la promotion des
festivals et spectacles musicaux locaux.
Musiques du monde : Les musiques du monde sont un genre en plein essor, couplant musique
traditionnelle et musique fusion des quatre coins du monde. Malgré l’absence de chiffres précis sur la taille
de ce marché, la croissance qu’il affiche depuis quelques années laisse augurer d’importants débouchés
pour les musiciens océaniens. Les circuits de distribution des musiques du monde peuvent varier
quelque peu et tourner davantage autour des concerts et des festivals, où les adeptes de musique ont la
82
possibilité de découvrir de nouvelles musiques avant de les acheter. En plus de ces événements, il
peut rester nécessaire de diffuser et de commercialiser les œuvres musicales locales par
l’intermédiaire d’entreprises implantées un peu partout dans le monde, comme Real world music,
Lusafrica, Sonodisque, EPIC, Melt 2000, BMG ou EMI. Le plus souvent, ces sociétés, basées aux ÉtatsUnis ou au sein de l’UE, rapatrient les bénéfices et les nouveaux contrats d’enregistrement dans leur
pays, ce qui restreint la part de bénéfices qui revient dans le Pacifique.
Exportations : Les marchés à l’exportation traditionnels se heurtent aux mêmes difficultés et obstacles que
le marché des musiques du monde. La nécessité de s’associer avec des distributeurs internationaux
reconnus peut ressembler à une impasse pour les musiciens, car si cette association devient indispensable
pour une présence internationale, elle restreint aussi la capacité de l’industrie musicale régionale à bénéficier
des ventes internationales. En outre, si les studios d’enregistrement basés en Océanie veulent accéder seuls
aux marchés à l’exportation traditionnels, ils doivent investir des sommes considérables dans
l’organisation de tournées et la promotion dans les pays ciblés. Parce que leurs bénéfices sont
grignotés par le piratage sur le marché local, les studios d’enregistrement et les musiciens ont
aujourd’hui des fonds limités à leur disposition pour investir dans la conquête de nouveaux marchés.
Ventes en ligne : Si une poignée de musiciens et de studios d’enregistrement ont commencé à vendre
des morceaux sur iTunes et d’autres sites de vente de musique sur la toile, la marge de progression
est encore énorme. Les musiciens océaniens peuvent envisager plusieurs sites en ligne. Spotify.com
vient de s’implanter aux États-Unis et a déjà une large clientèle au sein de l’UE. Proposant des
téléchargements à moindre prix, la société américaine eMusic.com a gagné en popularité ces
dernières années. Wikipedia propose une liste pratique, mais incomplète, de magasins de musique
en ligne, en précisant les restrictions géographiques pour l’envoi des colis, le type de site et les genres
musicaux représentés : http://en.wikipedia.org/wiki/Comparison_of_online_music_stores
Tactique de développement
La tactique de développement de l’industrie de la musique océanienne devrait s’articuler autour de
quatre grands volets. Premièrement, dans l’immédiat, il faut développer l’infrastructure nationale
et régionale, en insistant sur les organisations du secteur à l’échelon national. Deuxièmement, les
pouvoirs publics doivent s’employer sérieusement et énergiquement à renforcer la protection de la
propriété intellectuelle et à dégager suffisamment de ressources pour garantir le respect des lois
y afférentes. Troisièmement, il convient d’améliorer le développement des produits et de
renforcer les compétences commerciales et les connaissances en gestion au sein même du
secteur. Quatrièmement, le secteur doit envisager des activités de marketing créatif à court terme
et élaborer des stratégies de marketing à long terme. Voici quelques-unes des actions
recommandées :
Développement de l’infrastructure
L’une des principales difficultés auxquelles se heurtent les musiciens réside dans le fait qu’ils ne sont
pas représentés par un organisme national entièrement consacré au soutien du secteur de la musique.
La plupart des pays disposent d’un service de la culture rattaché au gouvernement, mais sa mission
consiste rarement à promouvoir l’industrie musicale commerciale. En formant des associations du
secteur privé, les musiciens disposeront d’une voix plus forte pour faire entendre leurs
préoccupations auprès des pouvoirs publics nationaux et seront mieux à même de suivre les ventes et
les droits à reverser aux membres de l’association.
• Pour percevoir des droits de diffusion des stations de radio locales, régionales et
internationales, solliciter l’appui des pouvoirs publics afin de mettre en place des politiques
et des programmes d’investissement avantageux et créer des réseaux au sein du secteur, il
83
est nécessaire que chaque secteur national de la musique s’organise. Actuellement, les Fidji
sont le seul pays océanien à disposer d’un organisme national efficace de perception et de
redistribution des droits, l’Association de défense des intervenants du spectacle des Fidji.
Chaque pays doit se doter d’une association de musique pouvant percevoir les droits des
artistes et aider le secteur à se faire entendre auprès du gouvernement.
• Une fois que ces organismes nationaux seront en place, il conviendra de former une
fédération régionale chargée de contribuer à la coordination et à la création de réseaux à
travers toute la région. Cette association peut aider à la conclusion d’accords de
coproduction, à la protection de la propriété intellectuelle, et à l’élaboration de stratégies
de marketing créatives afin d’exploiter les produits et les fonds de chaque pays dans
l’intérêt de tous.
• Il serait également souhaitable que les associations nationales et régionales étudient les
régimes mode 4 déjà inclus ou envisagés dans certaines politiques ainsi que leurs
applications potentielles à l’organisation de tournées internationales.
Protection de la propriété intellectuelle
Une fois en place, les associations nationales de musique devront s’attacher en premier lieu à renforcer
la protection de la propriété intellectuelle et l’application des textes existants au sein de leur pays. Voici
quelques-unes des stratégies recommandées :
• Les associations nationales devraient solliciter l’appui des pouvoirs publics pour que des
lois astreignantes prévoyant de lourdes sanctions en cas de piratage soient adoptées.
Elles sont invitées à s’inspirer de textes de loi en vigueur dans la région, notamment au
Vanuatu. La législation du Vanuatu présente des avantages et des inconvénients dont
devraient tenir compte les pays qui cherchent à mettre en place une législation sur le
droit d’auteur. La loi doit énoncer clairement les dispositifs d’application et préciser à qui
incombe la responsabilité financière des enquêtes.
• Les associations nationales devraient constituer des groupes de réflexion sur la propriété
intellectuelle chargés de faire connaître la législation adoptée en la matière dans leurs
pays respectifs et d’assurer eux-mêmes l’exécution des textes de loi (avertissements). Ces
groupes de réflexion peuvent aussi collaborer avec les douanes ou l’autorité nationale de
régulation de l’audiovisuel afin d’instaurer des garde-fous au sein de l’industrie.
• Il sera nécessaire de former les pouvoirs publics et les forces de police aux modalités
adéquates d’élaboration et de mise en application des lois sur la propriété intellectuelle. Il
est par exemple possible de faire appel à l’Association australasienne de défense des
intervenants du spectacle (Australasian Performing Right Association, APRA) ou à la
Fédération internationale de l’industrie phonographique (IFPI) pour former les pouvoirs
publics nationaux aux modalités d’introduction et de mise en application d’un régime de
protection de la propriété intellectuelle.
• Il serait également souhaitable que les associations nationales envisagent de mettre au point
une stratégie de marque et une campagne de publicité pour sensibiliser tout un chacun aux
effets délétères des atteintes à la propriété intellectuelle. Il est possible de créer un label
d’authenticité afin d’aider le consommateur à distinguer les ventes légales de musique des
ventes illégales.
Développement des produits
• Si l’organisation du secteur et la protection de la propriété intellectuelle sont les deux
principaux enjeux, les musiciens doivent également aller plus loin dans le développement
des produits. Plus la gamme de produits disponible est diversifiée, plus le marché
84
accessible à la région sera large. En disposant d’une gamme de musiques plus vaste, le
Pacifique peut se convertir en une plateforme créative de la production musicale.
• Le développement des produits peut également aider les musiciens nouvellement arrivés
sur le marché à se faire une place sur les marchés à l’exportation. Proposer un remix de
musiques occidentales populaires sur les sites Internet où le contenu est généré par les
utilisateurs peut permettre aux artistes océaniens de gagner des followers (abonnés) sur les
marchés occidentaux.
• Les associations régionales devraient également chercher à s’associer avec le nouveau
studio d’enregistrement de l’USP afin de renforcer les compétences techniques du secteur
en ingénierie du son et en production. (L’USP a fait construire et est en train d’équiper son
studio d’enregistrement. Pour l’aider dans cette nouvelle aventure, elle a fait venir tout
spécialement le musicien et compositeur de renom Igelese Ete).
Perfectionnement des compétences en gestion
• Les musiciens doivent renforcer leurs compétences en matière de négociation de
contrats. Dans cette optique, des formations peuvent être proposées aux musiciens
et aux studios d’enregistrement.
• Les propriétaires de studios d’enregistrement maison et les musiciens ont besoin
d’acquérir des compétences élémentaires en gestion et en marketing. Pour ce faire, les
associations nationales peuvent organiser des formations.
Marketing et promotion
Le secteur de la musique doit s’attacher en priorité à retrouver prise sur les marchés locaux.
Voici quelques-unes des activités de marketing qui peuvent être conduites à moyen et à long
terme :
• Cibler les marchés touristiques en développant des produits créatifs et en nouant des
partenariats avec les hôtels, les associations représentant le secteur touristique privé et
les offices de tourisme.
o Les musiciens peuvent s’associer à des hôtels afin que leur musique soit
diffusée dans le hall de réception, les restaurants ou les chambres et qu’une
brochure bien conçue soit mise à disposition du client qui pourra y lire des
informations sur la musique diffusée et y trouver l’adresse du site Web où elle
est vendue. Dans les courriels de suivi qu’ils envoient à leur clientèle, les hôtels
peuvent insérer un lien vers le site de vente en ligne des musiques diffusées. Ils
peuvent également proposer à la vente des CD dans leurs magasins de
souvenirs.
o Les musiciens doivent veiller à faire la publicité de leurs concerts dans les
hôtels et chez les voyagistes, car peu de touristes entendront parler de leurs
scènes dans la presse locale.
o Les musiciens peuvent collaborer avec les offices de tourisme pour mettre au
point des produits adaptés à des marchés cibles, par exemple, les croisiéristes
et d’autres niches.
• Pour accéder aux marchés à l’exportation, les musiciens et les studios d’enregistrement
auront besoin que les pouvoirs publics investissent dans leurs projets afin de financer les
frais en amont et la promotion. Les pouvoirs publics nationaux devraient mettre en place
des programmes d’investissement, adaptés aux exigences des marchés à l’exportation et
régis par des critères pointus de sélection des artistes. L’investissement pourrait aider les
musiciens à financer leurs tournées ou leur promotion.
85
•
En s’appuyant sur une politique publique d’investissement et de soutien adaptée, les
associations nationales de musique pourraient proposer à leurs musiciens des expériences
novatrices en matière de marketing et de mise en réseaux afin de les aider à se faire
connaître à l’étranger.
o Par exemple, les associations nationales pourraient parrainer un concours de
reprises sur Internet autour des chansons d’un artiste reconnu sur la scène
mondiale. Le lauréat pourrait alors se voir offrir la possibilité de collaborer avec
cet artiste, avec, à la clé, des concerts organisés dans le pays d’origine de l’artiste
et du gagnant du concours. Permettre aux Internautes de voter pour leur reprise
préférée serait alors l’occasion d’élargir le public des participants dans le
Pacifique et sur les marchés à l’exportation ciblés, tandis que l’organisation de
concerts permettrait d’engranger des recettes.
 Si les musiciens océaniens participent déjà à des festivals régionaux et locaux, la marge de
progression est encore grande. Les festivals culturels et musicaux permettent aux musiciens
de se faire connaître sur les marchés, de vendre leurs produits et CD et, éventuellement, de
se faire remarquer par un agent international ou de conclure un contrat avec une grande
maison de disques. Pour participer aux grands festivals et scènes musicales en Australie et
aux États-Unis, les musiciens océaniens ont toutefois besoin de fonds considérables. Voici
une liste indicative de festivals où se rassemblent professionnels de l’industrie, agents et
grandes maisons de disques :
o APRA Song Summit ;
o Australian World Music Expo ;
o South by Southwest, Austin, Texas (États-Unis) ;
o CMJ Music Marathon, ville de New York (États-Unis) ;
o LeWeb, Paris (France) ;
o Like Minds, Exeter, Devon (Royaume-Uni) ;
o Surface Festival, à travers tout le Royaume-Uni et l’UE ;
o Gilles Peterson’s Worldwide Festival, partout dans le monde.
• De façon générale, les musiciens océaniens doivent accroître leur présence dans les
médias conventionnels et non conventionnels. Les associations nationales devraient
chercher à fournir certains services de promotion aux musiciens affiliés en nouant des
relations avec les parties prenantes suivantes :
o certains détaillants et distributeurs (visites de ventes et autres visites) ;
o stations de radio locales et régionales ;
o stations de radio australiennes ;
o stations de radio du Net ;
o émissions télévisées de clips musicaux.
• Les vidéos musicales sont devenues quasiment incontournables pour promouvoir la
musique à l’international. Les artistes océaniens devraient tirer parti des sites Internet
de diffusion de vidéos, tels que youtube.com et vimeo.com, pour présenter leur
musique à une audience mondiale. De nombreux groupes indépendants font leurs
débuts internationaux en postant des vidéos imaginatives qui font rapidement le buzz
sur youtube.com.
• Dès qu’elles seront établies et qu’elles auront engagé des agents commerciaux, les
associations nationales devraient envisager d’élaborer des stratégies adaptées de
marketing dans les médias sociaux. Souvent, ce sont des stratégies peu coûteuses mais
payantes, lorsqu’elles sont correctement mises en œuvre.
86
Partenaires potentiels
Le secteur de la musique est encore inorganisé tant à l’échelon régional qu’à l’échelon national.
Pour examiner et conduire les actions proposées plus haut, il faudra en premier lieu renforcer la
coordination et la communication entre les acteurs du secteur à l’échelon national et fédérer les
organisations nationales découlant de ce processus au sein d’un organisme régional. Voici
quelques-uns des importants partenaires pouvant s’associer à cette entreprise :
• services nationaux de la culture ;
• studios privés (CHM, Mangrove Productions, etc.) ;
o avec un soutien adéquat, CHM pourrait jouer un rôle de chef de file dans
la constitution d’une association nationale des musiciens de PapouasieNouvelle-Guinée ;
• Association de défense des intervenants du spectacle d’Australie ;
• Association de défense des intervenants du spectacle des Fidji ;
• Radio Australia – Pacific Break.
Calendrier de développement du secteur de la musique
Activité
Création d’associations nationales de
musique/organisations de gestion
collective
Année 1
Année 2
Année 3
Année 4
Année 5
Création d’une association régionale de musique
Création d’un groupe de réflexion sur
la propriété intellectuelle
Formation sur la propriété
intellectuelle
Élaborer/réviser les lois sur la
propriété intellectuelle
Élaboration de plans de protection de
la propriété intellectuelle
Élaboration et mise en œuvre d’une stratégie de marque
Politiques nationales
Développement continu des produits
Formation en gestion pour les
musiciens et les studios
d’enregistrement
Élaboration d’un plan de développement et de promotion des
produits touristiques
Démarches auprès des pouvoirs
publics pour un renforcement de
l’investissement dans le secteur
Participation à des festivals
Élaboration d’un plan régional de promotion
87
STRATÉGIE DE DÉVELOPPEMENT DE LA DANSE
Le secteur océanien de la danse est diversifié, fragmenté et embryonnaire. Creuset de milliers de
traditions, il conjugue la culture contemporaine et une gestuelle ancestrale pour produire des
expressions dansées nouvelles et fascinantes.
Dans chaque pays de la région, le secteur présente une image différente et, partant, une chaîne de
valeur qui lui est propre. Ceci étant, on peut dire que, de manière générale, le secteur se caractérise
par une structure écrasée, ce qui signifie que l’on retrouve les mêmes acteurs, dans des rôles
différents, à tous les niveaux de la chaîne. Au stade de la production, les mécènes et les techniciens
(éclairage, son, etc.) font cruellement défaut, tandis que le stade de la promotion souffre de l’absence
d’agences de marketing. Actuellement la diffusion se concentre d’abord sur les marchés locaux,
suivis des festivals à un degré moindre, et du marché international quand l’occasion se présente. Or,
dans la plupart des cas, la participation à un festival ou à une tournée internationale coûte de l’argent
aux troupes, qui n’engrangent que des recettes de billetterie négligeables. En règle générale, ces
spectacles sont subventionnés par les pouvoirs publics ou par les danseurs eux-mêmes. Par ailleurs,
faute de moyens techniques, promotionnels et financiers, il est rare que les spectacles soient filmés
pour en diffuser les enregistrements ou les proposer à la vente : les seuls « consommateurs » sont
donc les spectateurs qui assistent aux représentations. Enfin, il n’est pas facile de recueillir des
données sur le marché au stade du montage des spectacles. Il n’existe que peu de filières structurées
de formation à la danse, et les critiques et les écoles de danse se comptent sur les doigts de la main en
Océanie. Il est donc difficile pour les artistes et les chorégraphes de bien connaître leur marché et de
monter des productions susceptibles d’intéresser et d’interpeller le public.
Le diagramme ci-dessous représente l’état actuel de la chaîne de valeur du secteur de la danse en
Océanie, ainsi que son évolution potentielle.
Figure 12: Chaîne de valeur créative du secteur de la danse en Océanie
88
Objectifs
La stratégie de développement présentée ici a pour objectif de renforcer la présence de la danse
océanienne sur les marchés locaux et touristiques, tout en exploitant sa singularité et l’enthousiasme
qu’elle suscite pour promouvoir l’Océanie en tant que destination touristique et plaque tournante de
la création.
Produit
En Océanie, le secteur de la danse se décline en trois grands produits : la danse traditionnelle, la
danse occidentale et la danse fusion. La danse traditionnelle regroupe tout l’éventail des cultures
océaniennes et se divise en quatre catégories principales d’expression : mélanésienne,
polynésienne, micronésienne et indienne aux Fidji, en raison de l’importante population indofidjienne que compte le pays. Ces grandes catégories se décomposent à leur tour en milliers de
variations, qu’il s’agisse de danses exécutées à l’occasion d’événements culturels ou personnels, ou
à des fins de divertissement.
La plupart des compagnies de danse établies marient les techniques traditionnelles et occidentales
dans des spectacles de danse fusion. La troupe Oceania Dance Theatre travaille avec des
chorégraphes chevronnés pour se former aux techniques occidentales et actuelles, notamment à la
danse classique. L’entraînement nécessaire à la pratique des danses occidentales est fondamental
pour le développement global du secteur et permet de stimuler la créativité des chorégraphes de la
danse fusion.
La danse fusion, c’est la rencontre de traditions et de techniques d’une grande diversité d’où
surgissent de nouveaux mouvements dansés. Elle est pratiquée par une poignée de troupes en
Océanie. Le genre connaît un engouement particulier aux Fidji, où cohabitent les traditions
mélanésiennes, polynésiennes, occidentales et indiennes.
Besoins du secteur
Comme indiqué plus haut, le secteur se caractérise par une structure écrasée, ce qui explique
l’absence de certains maillons dans la chaîne de valeur. La section ci-après passe en revue les
paramètres à améliorer pour que la danse océanienne soit à même de conquérir les marchés à
l’exportation.
Développement et création : On ne peut nier que les rares compagnies de danse
professionnelles océaniennes débordent de créativité et d’énergie, mais il n’existe encore
pratiquement aucune filière de formation structurée dans la région. En outre, on constate un faible
niveau de reconnaissance sociale de la danse, aussi bien comme domaine d’étude que comme
orientation professionnelle. L’ensemble de ces éléments empêche le secteur d’exploiter pleinement
tout le potentiel créatif de ses danseurs et chorégraphes.
En raison du peu de soutien accordé par les pouvoirs publics aux industries culturelles, le secteur
de la danse n’a pas été encouragé à se structurer. Jusqu’à une date récente, l’USP aux Fidji était la
seule université à préparer à un diplôme des arts de la scène : or ce cursus n’est plus proposé.
L’OCACPS (Oceania Centre for Arts, Culture and Pacific Studies) de l’USP met l’accent sur la
scène, avec la troupe Oceania Dance Theatre qui fait partie de sa section des arts du spectacle
vivant, mais les danseurs ne sont pas salariés à temps plein et ne disposent pas de leur propre
89
espace scénique. Bien que l’OCACPS ait fait avancer la recherche universitaire sur la culture
océanienne et notamment sur la danse et d’autres arts de la scène, on doit déplorer l’absence de
travaux de recherche réalisés localement sur la danse océanienne. Dans la chaîne de valeur de la
danse, les chercheurs et les critiques professionnels sont des acteurs incontournables de l’étape du
développement, puisqu’ils transmettent aux chorégraphes et aux danseurs des informations sur le
marché qui se révèlent très utiles au stade de la création.
Production : Au stade de la production, danseurs et chorégraphes ne disposent pas de ressources
techniques suffisantes : techniciens son et lumière, scénographes et costumiers par exemple. En
raison de l’absence de formations structurées dans le domaine du spectacle vivant, on ne trouve
dans la région que très peu de techniciens correctement formés.
Plus grave encore, rares sont les compagnies à adopter une approche commerciale dans la
production de leurs spectacles. Beaucoup d’entre elles étant subventionnées par des fonds publics ou
des universités, elles ne sont pas perçues comme des structures à but lucratif, mais comme des outils
de marketing ou de représentation culturelle. Les pays souhaitant faire de la danse une industrie
culturelle à part entière devront commencer par apprendre à estimer correctement la valeur du
travail de leurs troupes de danse pour en faire de véritables entreprises commerciales. Cela signifie
qu’il faudra réaliser des études de marché et monter des spectacles répondant aux attentes du public.
Par ailleurs, les recettes de billetterie permettant rarement d’amortir les coûts de production, les
troupes de danse doivent élaborer des plans de parrainage sur mesure, pour renforcer la
contribution du mécénat et des bailleurs de fonds à leurs budgets.
Promotion : Actuellement, la promotion des spectacles est assurée par les lieux scéniques et les
compagnies elles-mêmes. On ne trouve quasiment aucune agence de promotion spécialisée dans le
spectacle vivant ou dans les troupes de danse ; ces dernières ne disposent par ailleurs que rarement
de moyens à consacrer à la promotion. Ceci limite automatiquement le nombre de spectateurs
potentiels, sachant par ailleurs que la population locale connaît et apprécie peu la discipline.
Les concours de danse font figure d’exception, notamment lorsqu’il s’agit de manifestations
destinées aux élèves des collèges et lycées. Au cours des cinq dernières années, ces concours n’ont
cessé de gagner en popularité et pourraient contribuer à améliorer l’image de la danse
professionnelle.
Diffusion : La diffusion souffre avant tout d’un manque de lieux scéniques et de salles
adéquates. Dans beaucoup de pays, il n’y a pas de scène nationale à même d’accueillir des
spectacles vivants et celles qui existent sont souvent mal adaptées à la danse contemporaine ou
aux autres danses actuelles. Ailleurs, notamment en Papouasie-Nouvelle-Guinée, la sécurité est
une préoccupation majeure pour les amateurs de spectacles, qui préfèrent souvent rester chez
eux plutôt que de s’aventurer au dehors le soir pour assister à une représentation. Il faut enfin
mentionner le temps et le coût nécessaires à l’obtention des visas pour les tournées
internationales, difficultés qui peuvent même en entraîner l’annulation.
Marchés
Les spectacles de danse se caractérisent par des coûts de production élevés et des recettes de
billetterie faibles, et ceci même sur les marchés des pays développés. Les compagnies doivent
prendre en compte ce paramètre dans le choix de leurs marchés cibles.
90
Marchés actuels
Marché touristique : Le marché touristique est actuellement ciblé par le biais des hôtels et concerne
surtout des spectacles de danse traditionnelle exécutés par des groupes d’amateurs venus des
villages voisins. De manière générale, les groupes de danseurs établis et professionnels ne ciblent
pas ce marché, pour des raisons logistiques ou par manque de produits et de stratégies de marketing
adaptés.
Marché local : Le marché local a certes un périmètre limité, mais il est actuellement en phase
d’expansion. Dans certains pays, on assiste à un véritable engouement des jeunes d’âge scolaire
pour les concours de danse et les spectacles de hip-hop. Ce phénomène a débouché sur la création
de quelques écoles de danse à but lucratif, qui initient enfants et adolescents à la danse. Il faut
encourager cette nouvelle prise de conscience sur le marché local, en travaillant avec les écoles, en
proposant des spectacles d’artistes reconnus et en adoptant une stratégie de promotion créative :
utilisation des réseaux sociaux, ambassadeurs de la danse et concours.
Marchés à exploiter
Marché touristique : Sur ce marché, la danse contemporaine et la danse fusion ont une marge de
progression considérable. Le soleil et la mer constituant les principaux arguments de vente de la
destination Océanie, on doit souvent déplorer le manque d’animations nocturnes proposées aux
touristes. En créant des spectacles spécifiques, les compagnies de danse établies ont la possibilité de
se faire une place sur ce marché lucratif.
Les troupes de danse doivent également envisager la création de produits plus interactifs,
permettant la participation des touristes. Ces derniers sont en effet de plus en plus souvent en
quête d’authenticité et d’interaction avec la population et la culture locales pendant leurs
vacances. Les industries culturelles peuvent leur fournir l’occasion unique d’apprendre à
connaître la culture océanienne au travers d’une expérience enrichissante. On peut imaginer par
exemple qu’une troupe propose des après-midi de cours de danse traditionnelle océanienne
pour les touristes et leurs enfants, dans les résidences hôtelières à vocation familiale.
Sur le marché touristique, les troupes de danse doivent aussi s’intéresser au segment des
croisiéristes, très porteur dans certains pays. Il s’agit de monter des spectacles répondant aux
attentes des responsables de l’animation à bord des paquebots et de travailler avec les associations
de tourisme locales et les offices de tourisme pour diffuser ces produits auprès des compagnies de
croisières.
Festivals : Bien que les troupes de danse se produisent dans les festivals depuis de nombreuses
années, rares sont celles qui ont pu en retirer des bénéfices substantiels. À l’inverse, la plupart
d’entre elles sont subventionnées par les festivals ou par le pays qu’elles représentent. Pour réaliser
des bénéfices lors de ces manifestations, les compagnies doivent diversifier leur offre. Voici
quelques idées d’activités rémunératrices :
• Création de plusieurs productions – En règle générale, les compagnies présentent au
moins une fois leur spectacle au cours du festival. Pour s’assurer des revenus
supplémentaires, elles doivent essayer de programmer d’autres représentations dans le
pays hôte, en dehors du cadre du festival, et en assurer la promotion séparément.
• Produits dérivés – Création de produits dérivés sur le thème du spectacle, vendus après
la représentation. Une étude de marché approfondie doit être réalisée pour définir les
produits et leur prix de vente.
91
• Enregistrements vidéo et musicaux – La vente d’enregistrements musicaux ou vidéo
constitue une autre source de revenus potentielle, même si elle nécessite un apport
financier pour la production d’enregistrements professionnels. Les troupes ne parvenant
pas à réunir les fonds nécessaires pourront choisir la solution « petit budget ». On peut
imaginer par exemple de filmer la première partie d’un spectacle avec une caméra
numérique et de copier ce fichier sur des clés USB bon marché pendant la deuxième partie
de la représentation. On pourra ainsi proposer les clés USB au public à la fin du spectacle.
On pourra inclure dans la clé USB un lien vers un site Internet où il sera possible de
télécharger, moyennant paiement, une vidéo de la deuxième partie de la représentation.
• Cours de danse et expériences formatrices – En dehors des représentations, les groupes
de danse peuvent proposer des cours de danse et d’autres expériences formatrices aux
festivaliers, sans que ces activités soient nécessairement incluses dans le programme du
festival.
Marché à l’exportation : Nombreuses sont les troupes à se produire sur des scènes étrangères ou
dans le cadre de festivals, mais rares sont celles à en retirer des bénéfices financiers. En l’état actuel
des choses, une exploitation rémunératrice des marchés d’exportation semble quasi impossible.
Pour percer sur ces marchés, les troupes devront créer des spectacles nouveaux sortant de
l’ordinaire, et mettre en place des plans de parrainage pour réunir les fonds nécessaires à des
productions de grande envergure.
Le Santa Fe Folk Art Market10 représente un débouché possible à l’exportation. Comme indiqué plus
haut, cette manifestation constitue un nouveau marché pour les producteurs des industries culturelles
océaniennes, et les troupes de danse de la région doivent s’efforcer de l’exploiter. On trouvera sur le
site Internet de cette manifestation toutes les informations pour y participer.
Tactique de développement
La tactique de développement du secteur océanien de la danse doit se construire autour de quatre
grands éléments. En premier lieu, il convient d’apporter au développement des infrastructures,
matérielles comme immatérielles, un soutien régional à long terme. À court terme, les compagnies
pourront mettre l’accent sur la création de produits destinés aux marchés ciblés, sur le renforcement
de leurs compétences en matière de gestion, ainsi que sur l’élaboration d’actions de marketing et de
promotion innovantes. Cette tactique de développement met en jeu les activités suivantes :
Développement de l’infrastructure
• L’USP doit bénéficier d’un soutien pour réintroduire un cursus diplômant en arts de la scène
(danse, théâtre, chorégraphie, etc.) adossé à des travaux de recherche universitaire.
• Les universités océaniennes doivent travailler avec leurs homologues d’Australie, de
Nouvelle-Zélande et d’Hawaii à la mise en place de programmes de formation structurés ou
d’échanges pour les techniciens du spectacle.
• Les services de la culture doivent œuvrer à l’organisation du secteur à l’échelon régional,
ouvrant ainsi la porte à la création de réseaux et d’échanges, ainsi qu’à la possibilité de
créer, à plus long terme, un produit régional exportable dans le domaine de la danse. La
structure ainsi créée devra axer son action sur la collecte de fonds à l’échelon régional, ainsi
10
www.folkartmarket.org
92
que sur l’organisation de tournées et de concours régionaux, afin de donner à la danse
océanienne une présence sur la scène internationale.
• Les services de la culture doivent faire pression sur leurs gouvernements pour que le
régime mode 4 (entrée et séjour temporaire des personnes physiques) soit pris en compte
dans les accords commerciaux régionaux et dans les APE, afin de veiller à y inclure les
danseurs n’ayant pas reçu de formation officielle.
• Les services de la culture doivent envisager d’accorder des dégrèvements fiscaux aux
entreprises effectuant des dons au profit d’institutions artistiques, et faire connaître cette
possibilité.
• Les pouvoirs publics doivent réserver des ressources à la création de lieux scéniques
adaptés à la danse et au théâtre.
Développement des produits
• Promotion des expérimentations créatives par le biais de résidences de
chorégraphes et/ou de danseurs.
• Création de programmes d’échanges avec des universités étrangères, pour donner
l’occasion aux danseurs de se familiariser avec des techniques et des genres nouveaux.
• Exploitation de la popularité des concours de danse : offres de stages et valorisation du
métier de danseur.

Les lauréats du prix de la meilleure danseuse et du meilleur danseur des Fiji Kula
Awards pourraient par exemple « gagner » un stage au sein de la troupe VOU
Dance, ce qui leur permettrait de recevoir des cours de danse gratuits. En échange
de quoi ils feraient office d’ambassadeurs de la danse et partageraient leur
expérience grâce à un blog vidéo.
• Réalisation d’études sur les marchés du tourisme et des croisiéristes, afin de créer des
productions adaptées à ces secteurs.
Renforcement des compétences en gestion
• Les compagnies de danse doivent inscrire leur organisation et leurs productions dans
une logique commerciale. Elles doivent se doter de plans d’activités et de marketing
définissant leurs marchés cibles et leurs perspectives financières. Chaque production doit
être examinée dans une optique financière pour en déterminer la rentabilité. (N.B. : La
consultante ne préconise pas l’abandon des productions déficitaires, puisqu’elles le sont
quasiment toutes. En revanche, elle recommande aux troupes d’établir précisément leurs
coûts et leurs bénéfices, afin de pouvoir équilibrer leur budget et collecter des fonds en
conséquence).
• Les troupes doivent se doter de plans de parrainage et de collecte de fonds sur la base de
leurs besoins et de leurs objectifs à court et à long terme, en ciblant les entreprises locales et
internationales, ainsi que les gouvernements étrangers.
Marketing et promotion
Dans leurs plans d’activités, les troupes doivent définir les marchés qu’elles ciblent et mettre au
point des stratégies de marketing en conséquence. En outre, elles doivent engager (à temps plein
ou à temps partiel) un responsable du marketing et de la promotion. Voici quelques idées de
marketing créatif :
• Marketing dans les médias sociaux – Les danseurs, les élèves des écoles de danse, ou
encore des spectateurs ou bénévoles motivés, peuvent faire office d’ambassadeurs de la
93
danse et se servir des médias sociaux pour créer l’événement autour des spectacles, en
tenant par exemple un blog mis à jour chaque semaine ou chaque mois, en intervenant
régulièrement sur les sites des médias sociaux et en ciblant la presse.
• Pour cibler le marché du tourisme, les troupes de danse doivent collaborer avec les
associations professionnelles et les représentants du secteur. En travaillant avec les
associations nationales du tourisme, de l’hôtellerie ou des complexes de vacances, les
groupes de danse peuvent voir s’ouvrir les portes de centaines d’entreprises du secteur.
• Les sociétés de croisières entretiennent généralement des relations avec les ministères du
tourisme. Les troupes de danse doivent frapper à la porte des services ministériels
chargés de l’élaboration des produits et du marketing, afin de déterminer l’intérêt du
segment pour la danse et de collaborer à la conception et à la commercialisation de
produits adaptés, dont la promotion pourra être assurée dans le cadre de salons
professionnels ou de tournées.
• Pour gagner en visibilité à l’échelon international, les compagnies doivent s’efforcer de
mobiliser des fonds publics ou privés pour participer à des concours de danse
internationaux, tels que le concours du International Theatre Institute, ou encore à la
Journée internationale de la danse (29 avril).
Partenaires potentiels
Le secteur océanien de la danse est actuellement désorganisé, tant à l’échelon régional que national.
Pour mettre en œuvre le plan exposé ici, il faut commencer par renforcer la coordination et la
coopération entre les acteurs du secteur. Voici quelques partenaires potentiels importants :
• Université du Pacifique Sud ;
• section groupe des arts de la scène du Oceania Theatre ;
•
•
•
•
•
ambassades de France et Alliances françaises ;
organisateurs de concours de danse nationaux ;
troupes nationales d’arts de la scène ;
agences de promotion des spectacles vivants (Bronitsky and Associates par exemple) ;
universités d’Australie, de Nouvelle-Zélande et d’Hawaii.
94
Calendrier du développement du secteur de la danse
Activité
Année 1
Année 2
Organisation à l’échelon
régional
Développement de cursus universitaires et de
programmes d’échanges
Élaboration d’une politique
générale
Année 3
Année 4
Année 5
Développement des lieux scéniques
Programmes de stages en résidence
Stages de danse
Ambassadeurs de la danse
Élaboration de plans
d’activités
Études de marché
Conception des produits
Élaboration de plans de
parrainage
Marketing dans les médias
sociaux
Création de réseaux sur le marché
(tourisme, bateaux de croisière)
Concours internationaux
95
CONCLUSION
Globalement, l’Océanie est bien placée pour valoriser ses industries culturelles si particulières et si
foisonnantes. Leur diversité constitue un atout qui doit permettre aux acteurs du secteur de
conquérir des marchés et de propulser les créateurs océaniens sur le devant de la scène planétaire.
À condition de bénéficier d’un soutien adéquat de spécialistes locaux et internationaux en matière
de développement et de marketing, la région a de fortes chances de voir ses compétences et ses
produits culturels engranger des retombées économiques substantielles.
L’artisanat et les arts plastiques affichent certes le plus fort potentiel de croissance, mais les
producteurs, tout comme les parties prenantes publiques et privées, doivent conjuguer leurs efforts
pour mettre à niveau la chaîne de valeur de ces secteurs. S’ils parviennent à combler leurs déficits
en matière de design et d’innovation, à renforcer leurs capacités de gestion et à mettre au point des
stratégies de marketing créatives et globales, ces secteurs seront à même de consolider leur
présence sur les marchés locaux et touristiques, puis de se lancer sur les marchés régionaux à
l’exportation, en conservant pour objectif à long terme la pénétration des marchés des États-Unis et
de l’Union européenne.
Bien qu’il n’en soit encore qu’à ses balbutiements, le secteur fidjien de la mode semble promis à un
bel avenir. Avec un soutien adapté de la part des pouvoirs publics, un niveau d’investissement
suffisant, un renforcement des compétences techniques des jeunes créateurs et le lancement d’un
diplôme de styliste à l’université FNU, les Fidji peuvent espérer devenir le centre névralgique de la
mode en Océanie.
Bien que les perspectives de croissance économique de la musique et de la danse soient moins
immédiates, ces vecteurs culturels ne doivent pas être négligés. Les pouvoirs publics doivent
promulguer et faire respecter des législations nationales et régionales en matière de propriété
intellectuelle, afin de protéger les œuvres des musiciens et des producteurs. Par ailleurs, le secteur
de la danse doit chercher à augmenter le niveau de l’aide publique et privée dont il bénéficie, afin
de gagner en liberté pour créer des productions nouvelles et innovantes.
Pour réaliser ces objectifs ambitieux, l’Océanie doit consacrer des ressources techniques et
financières au développement de ses secteurs culturels, tant à l’échelon national que régional. Les
pouvoirs publics doivent faire appel à des experts étrangers pour œuvrer, avec les parties prenantes
locales, au renforcement de leurs capacités, et pour veiller à ce que les industries culturelles aient les
compétences et les connaissances nécessaires pour s’inscrire dans une logique de croissance durable
sur le long terme. Une fois tous ces éléments réunis, les producteurs océaniens seront à même de
tirer parti des débouchés considérables présentés par les marchés locaux, régionaux et
internationaux.
96
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ligne le 2 janvier 2012.
99
Annexe A – Descriptif de la méthode employée par la consultante
Phase 1 : Analyse des industries culturelles sur le marché
Au cours de la première phase de l’étude, la consultante s’est attachée à définir le marché des
industries culturelles à l’échelle mondiale, en Europe et dans les pays du bassin Pacifique. Elle s’est
d’abord concentrée sur l’analyse des biens et des services culturels sur le marché mondial, tout en
mettant en évidence les débouchés existants et les entraves au commerce des biens et des services
culturels. Bien que la présente étude soit axée sur l’Océanie, la consultante a examiné les bonnes
pratiques appliquées par les industries culturelles d’autres régions en développement et a mis en
évidence des modèles de promotion commerciale des industries culturelles.
La consultante a également analysé le marché européen des industries culturelles, en se concentrant
sur les marchés cibles potentiels pour chacun des secteurs. Cependant, les études de terrain réalisées
au cours de la troisième phase ont amené la consultante à conclure que les marchés du bassin
Pacifique offraient de meilleures perspectives que ceux de l’Union européenne ; elle a donc déplacé
l’axe de la stratégie de marketing vers ces marchés.
Phase 2 : Analyse des politiques et des meilleures pratiques des industries
culturelles
La consultante a mené une analyse de la politique commerciale appliquée par l’Union européenne
aux industries culturelles, en s’intéressant plus particulièrement à certains accords conclus avec la
région et les pays océaniens. Chacun de ces textes a été examiné avec soin pour en déterminer les
points forts et les faiblesses. Dans un dernier temps, la consultante a passé en revue les bonnes
pratiques envisageables en matière d’accords commerciaux, ainsi que certaines initiatives
remarquables dans le domaine de l’exportation des biens et des services culturels : elle a notamment
mis en évidence les points forts et les faiblesses des accords commerciaux et du protocole de
coopération culturelle qui lient l’Union européenne et les États des Caraïbes.
Phase 3 : Analyse du secteur et voyage d’études dans la région
La dernière phase de l’étude a été consacrée à une analyse des biens et services culturels des
secteurs suivants : arts plastiques, artisanat, danse, mode et musique. Ce travail s’est fondé sur des
études réalisées précédemment par d’autres consultants, ainsi que sur une analyse réalisée par la
consultante elle-même. Le principal objectif était de déterminer la capacité de chacun des secteurs
étudiés de pénétrer sur les marchés cibles de l’Union européenne et de s’y maintenir. Pour chaque
secteur, la consultante a examiné les moyens d’améliorer la chaîne de valeur, en cernant les
possibilités et les contraintes propres à chacun de ses niveaux : création/design, production,
diffusion, distribution et promotion. Après avoir étudié ces maillons types de la chaîne de valeur, la
consultante s’est également penchée sur sa circularité. Pour apprécier la fluidité de la circulation de
l’information dans le secteur, elle a examiné la manière dont les données relatives au marché étaient
renvoyées le long de la chaîne de valeur et intégrées au processus de création/design. Ces
informations ont servi à l’élaboration des stratégies de développement et de marketing exposées
dans le présent rapport.
100
Annexe B – Liste des parties prenantes contactées
Secteur
Organisation
Nom
Titre
Fidji
Artisanat
Arts plastiques
Fiji Arts Council
Meretui Ratunabuabua
Conseillère et membre du
[email protected]
conseil d’administration du
Skype : meretui.ratunabuabua
FAC
28 juillet 2011
Fidji
Artisanat
Fiji Crafts Society
Seniloli Sovea
Présidente
28 juillet 2011
Fidji
Arts plastiques
Fiji National University
Jerry Wong, Miriama
Loanakadavu,
Namanda
Chargés de cours
Fidji
Arts plastiques
Artistes individuels
Artistes
Artistes
Fidji
Mode
Tahroro Investments
Rosie Emberson Semisi
Directrice générale et
styliste
Fidji
Artisanat
Magasin d’artisanat
public (aujourd’hui
fermé)
Lanieta Kula-Tanoa
Ancienne vendeuse
Fidji
Tous
Ministry of Industry and
Trade
Sangita Devi ;
M.Tamanitoakula
Économiste en chef
Fidji
Danse
Musique
Université du Pacifique
Sud
Igelese Ete
Fidji
Tous
Secrétariat général du
Forum des Îles du
Pacifique
Glynis Miller, Douveri
Henao
Directeur de la section du
spectacle vivant, Oceania
Center for Arts and
Culture
Chargée du
développement du
commerce ; Chargé
de la politique
commerciale
Coordonnées
Date de la
rencontre
Pays
[email protected]
28 juillet 2011
28 juillet 2011
[email protected]
[email protected]
28 juillet 2011
28 juillet 2011
[email protected]
[email protected]
29 juillet 2011
[email protected]
29 juillet 2011
[email protected]
[email protected]
29 juillet 2011
101
Department of National
Heritage, Culture and
Arts
Fidji
Tous
Fidji
Tous
Fidji
Musique
Fidji
Mode
Fidji
Musique
Fidji
Danse
Fidji
Danse
VOU
Fidji
Tous
Fidji
Artisanat
Fidji
Artisanat
Fidji
Arts plastiques
Danse
Musique
Fidji
Artisanat
Tonga
Artisanat
Fiji Commerce and
Employers Federation
Fiji Performing Arts
Rights Association
Maraia Vakasilimiratu ;
Sipiriano Nemani
Responsable du
développement des
entreprises culturelles,
Chargé de la politique
générale
[email protected]
29 juillet 2011
[email protected]
Nesbitt Hazelman
Directeur exécutif
[email protected]
29 juillet 2011
Laisa Vulakoro
Directrice
[email protected]
29 juillet 2011
Fiji Fashion Week
Ellen Whippy
Directrice
Conservatorium of
music
Oceania Dance Theatre
Danseurs
Ulaiasi Taoi ; Inise Selai
Kaisuni
Tulevu, Glen, Pretina,
Danseurs
Sangit, Asmita, Katalina
Co-directeurs
Edward Soro ; Joseph
[email protected]
30 juillet 2011
Fiji Hotel and Tourism
Association
Michael Wong
Directeur général
[email protected]
1er août 2011
PNUD
Jeff Liew
Ancien responsable du
projet artisanat
Ravi Chand
Spécialiste des entreprises
[email protected]
1er août 2011
Vilsoni Hereniko
Directeur et professeur
[email protected]
1er août 2011
[email protected]
1er août 2011
[email protected]
2 août 2011
National Center of Small
and Micro Enterprise
Development
Université du Pacifique
Sud - Oceania Center for
Arts and Culture, and
Pacific Studies
Secrétariat général de la
Communauté du
Pacifique
Langafonua
Lia Maka
Hauoli Vi
Directrice du Centre de
formation à l’éducation
communautaire
Présidente
[email protected]
30 juillet 2011
30 juillet 2011
30 juillet 2011
1er août 2011
102
Tous
Tonga
Tous
Tonga
Artisanat
Tonga
Musique
Indépendant
Tu'imala Kaho
Tonga
Artisanat
Art of Tonga
Ana Fehoko
Tonga
Arts plastiques
Indépendant
Tevita Pala'apu
Tonga
Artisanat
Langafonua
Taumosi Hemaloto
Gérante
Tonga
Tous
SPBD Microfinance
Amy Lofgren
Directrice générale
Tonga
Tous
John Cvetko
Directeur
Tonga
Artisanat
Tonga
Artisanat
Tonga
Artisanat
Tonga
Ministry of Tourism
Sakopo Lolohea
Chef de service/Directeur
du tourisme
Tonga
Ministry of Training
Sinama Faanunu
Education, Youth and
Sports
Catholic Women's League
Aivi S. Siale
- Handicraft Shop
Tonga Business
Enterprise Centre
Civil Society Forum of
Tonga
Tongatapu Handicraft
Association
Gérante
[email protected]
2 août 2011
[email protected]
2 août 2011
Portable : +676 879 8583 ; Tél. : +676
27 524
3 août 2011
Musicienne
Gérante
3 août 2011
[email protected]
3 août 2011
Artiste
Siale Ilolahia
Tuna
Présidente
Indépendant
Leiseli
Artisan
Artisanat
Ministry of Labour
Tevita Lautaha
Tonga
Arts plastiques
Danse
Musique
On the Spot
Ruha Fifita
Tonga
Artisanat
Mode
Ministry of Training,
Education, Youth and
Sports
Awards Ceremony
[email protected] ;
Tél. : +676 21014 ; Portable : +676 778
2036
[email protected]
4 août 2011
[email protected]
4 août 2011
[email protected] ; Tél. : +676 28282
4 août 2011
[email protected] ; Tél. : +676
24173 ; Mob :+676 773 7636
[email protected]
[email protected]
Co-fondatrice et artiste
3 août 2011
4 août 2011
4 août 2011
+676 773 6727
4 août 2011
+676 888 4789
5 août 2011
103
Tonga
Artisanat
Tonga
Tous
Tonga
Musique
Tonga
Tonga National Arts
and Handicraft
Association
Université du Pacifique
Sud
Viliami Leaaetoa
5 août 2011
Seu'ula Johansson Fua
Fellow. Research and
Leadership
Siloni's Musique & Elei
Co. Ltd
Emaloni 'Iongi
Artisanat
Tongatapu Handicraft
Association
Ofa Masila
Tonga
Artisanat
WISE
Robina
Tonga
Artisanat
Tonga Handicraft
Association
Tonga
Artisanat
Tonga
Artisanat
Tonga
Artisanat
Tonga
Artisanat
Vanuatu
Tous
Vanuatu
Arts plastiques
Mode
Tonga National Arts
and Handicraft
Association
Tonga National Arts
Association
Vava'u Handicraft
Association
Eua Island Handicraft
Association
Vanuatu Cultural
Center
Michoutouchkine
Creations
Vanuatu
Artisanat
Marché
Roy Thompson
Vanuatu
Tous
Chamber of Commerce
Alick Berry
Vanuatu
Artisanat
Arts plastiques
ACTIV
Sandrine Wallez
[email protected]
5 août 2011
Directeur général
[email protected] ;
[email protected]
5 août 2011
Conseillère technique
[email protected]
Pas de rencontre
Fondatrice
Pas de rencontre
Pas de rencontre
Pas de rencontre
Pas de rencontre
Pas de rencontre
Pas de rencontre
Abong Marcelin
Directeur
A. Pilioki
Artiste
[email protected]
8 août 2011
Artiste et propriétaire d’un
+678 567 1217
magasin
[email protected]
Directrice
8 août 2011
[email protected]
8 août 2011
9 août 2011
9 août 2011
104
[email protected]
Vanuatu
Artisanat
Peace Corps International Sara Lightner
Directrice pays par intérim
Vanuatu
Arts plastiques
Vanuatu Institute of
Technology
Directeur
[email protected]
Président
+678 554 7759
Vanuatu
Musique
Arts plastiques
Artisanat
Arts plastiques
Tous
Vanuatu
Artisanat
Ambrym Arts
Association (Wood
Carvers)
Vanuatu
Tous
Vanuatu
Vanuatu
Vanuatu
Kalbeo Kalpat
National Arts Association Joe Tjibong
Indépendant
Jean-Claude Toure
Gairae
Sébastien Bador
9 août 2011
10 août 2011
Artiste
[email protected]
10 août 2011
Richard Saksak
+678 775 0622
10 août 2011
Department of Industry
Chargée principale des
Merilyn Leona Temakon droits de la propriété
intellectuelle par intérim
[email protected]
10 août 2011
Tous
Department of Tourism
George Borugu
Directeur
Vanuatu
Musique
Music Federation
Michael Ligo
Membre et musicien
Vanuatu
Tous
Chercheur
Mackin Valia
Vanuatu
Musique
Danse
Won Smal Bag
Jo Walker
Fondatrice
Vanuatu
Artisanat
Port Vila Municipality
Jerry Aswan
Président du Conseil
Vanuatu
Tous
Hotel and Resort
Association
Tony Pittar
Président
Vanuatu
Tous
Department of Industry
Donald A Pelam Yavit
Chargé du marketing et de
[email protected]
la promotion
12 août 2011
Vanuatu
Artisanat
Bénévole du Peace Corps
(travaille avec un groupe Marycatherine
d’artisans)
Bénévole
12 août 2011
Vanuatu Tourism Office
Directeur du marketing
Sculpteur sur bois
9 août 2011
Chercheur
[email protected]
10 août 2011
[email protected]
Portable : +678 566 4637
10 août 2011
+678 563 7525
11 août 2011
[email protected]
+678 545 6470
[email protected] ; +678 556 5007
11 août 2011
12 août 2011
105
[email protected]
Vanuatu
Artisanat
Department of Industry
Astrid Boulekone
Vanuatu
Musique
Ministry of Justice
Ralph Regenvanu
Vanuatu
Tous
Alliance française
George Cumbo
Vanuatu
Tous
Alliance française
Mark Basker
Vanuatu
Tous
Vanuatu
Artisanat
Arts plastiques
Red Wave Association
Richard
Vanuatu
Artisanat
Shafer Arts
Sandy
Fidji
Artisanat
Namana
Tessa Campbell Miller
Propriétaire
Arts plastiques
Indépendant
Lemson Niru
Artiste
+675 710 23453
16 août 2011
Arts plastiques
Indépendant
Ratoos Haoapa Gary
Artiste
+675 732 17987
16 août 2011
Tous
Papua New Guinea Arts
Association
Pius Wasi
Fondateur
Musicien
[email protected] ;
+675 768 6175/733 77584
16 août 2011
Tous
Office of Tourism, Arts
and Culture
Stalin Jawa
Conseiller politique, arts et [email protected]
culture
+676 320 0270
Tous
Office of Tourism, Arts
and Culture
David Monai
Chargé de programme
[email protected]
16 août 2011
Tous
Office of Tourism, Arts
and Culture
Evelyn Ofasia
Chargée de la stratégie et
de la planification
[email protected]
16 août 2011
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
Ministre de la justice/
Responsable du festival de
musique
+678 774 5001
+678 22947
+678 28700
Ministry of Foreign Affairs Richard
12 août 2011
12 août 2011
Pas de rencontre
Pas de rencontre
Pas de rencontre
+678 535 6152
+678 565 5399
[email protected]
Pas de rencontre
Pas de rencontre
14 août 2011
16 août 2011
106
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
Tous
Office of Tourism, Arts
and Culture
Joybertina Piasinu
Chargé de programme
[email protected]
16 août 2011
Tous
Indépendant
Jeffery Feeger
Artiste
[email protected]
+675 726 70912
16 août 2011
Artisanat
Marché
Visite du marché
Tous
Office of Tourism, Arts
and Culture
Marianna Ellingson
Directrice générale
[email protected] ;
+675 320 0270
16 août 2011
Arts plastiques
Art Stret
Amanda Adams
Directrice
[email protected] ;
+675 325 0655
16 août 2011
Danse
National Performing Arts
John T. Doa
Troupe
Directeur
[email protected] ;
+675 53 21152
17 août 2011
Cinéma
National Film Institute
Robert Boleka & Fred
Isasar
[email protected]
17 août 2011
Artisanat
Jauke Bilum Products
Florence Jauke Kauel
Fondatrice
[email protected] ;
+675 715 30140
17 août 2011
Tous
PNG Tourism
Promotion Authority
Leith Isaac
Directeur du marketing
[email protected]
18 août 2011
Tous
Business Council of
Papua New Guinea
Goini Lydia Loko
Directrice générale
[email protected]
18 août 2011
Tous
Investment Promotion
Authority
Julienne Leka-Maliaki
et Paul Kone
Directrice par intérim du
marketing et adjointe du
chargé de l’investissement
[email protected] ;
[email protected]
19 août 2011
16 août 2011
107
PapouasieNouvelleGuinée
CHM
Richard Francisco,
Raymond Chin
Tous
National Cultural
Commission
Jon and David Taim
Artisanat
PNG Art
Joe D. Chan
Directeur
[email protected]
20 août 2011
Artisanat
Arts plastiques
The Gallery
Rhonda Purdy
Propriétaire
[email protected]
Pas de rencontre
Fidji
Tous
Fiji Arts Council
Master Laisiasa Veikoso
Fidji
Mode
Mark One Apparel
Mark Halabe
Fidji
Mode
Training and Productivity
Kelera Tukana
Authority
Fidji
Artisanat
Arts plastiques
Sigavou Studios
Maria Rova
Australie
Tous
Pacific Island Trade and
Invest
Ruth Choulai
Directrice de la section arts
créatifs
Fidji
Artisanat
Arts plastiques
Maria Rova
Maria Rova Studio
Propriétaire
Plasticienne
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
PapouasieNouvelleGuinée
Fidji
Artisanat
Arts plastiques
Directeur musique
Directeur général
[email protected] ;
[email protected] ;
[email protected]
Musique
19 août 2011
[email protected]
Directeur
Directeur du Fiji Fashion
Council
22 août 2011
[email protected]
22 août 2011
22 août 2011
Propriétaire et artiste
CreatiVITI
Lee Blake, Laisani
Malani, Harry William,
Ela Ravubale
[email protected]
[email protected]
[email protected]
Chargé du développement
de la formation,
[email protected] ;
Coordonatrice du Centre,
[email protected] ;
artistes plasticiens,
[email protected]
céramistes, potiers
traditionnels
26 août 2011
27 août 2011
26 août 2011
26 août 2011
108

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