fiche pédagogique - Cartographie des dispositifs d`éducation

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fiche pédagogique - Cartographie des dispositifs d`éducation
FICHE PÉDAGOGIQUE
Falaise de la Hague – Jean-François Millet
Auteur : François-Raphaël Loffredo
Contexte
Jean-François Millet réveille l’intérêt du public pour
le monde rural, l’âpreté du travail des paysans et les
valeurs humaines héritées de la terre. Il transmet une
nouvelle vision du monde de la terre réaliste à l’opposé de
l’idéalisation, dont les acteurs, les paysans pauvres, sont
peints comme les véritables héros du temps.
Ses premières peintures sont des portraits de notables
mais, dès 1848, avec Le Vanneur, exposé au Salon,
Millet montre ses intentions sociales qui le rapprochent
du courant réaliste moderne. Courbet peint deux ans
plus tard Un enterrement à Ornans (musée d’Orsay), Les
Cribleuses de blé en 1854 (musée des Beaux-Arts de
Nantes) et prend la tête du mouvement. Les deux artistes
prônent une rupture radicale, s’éloignant du beau en
faveur du vrai.
Peintre réaliste, Millet ouvre aussi la voie aux peintres de
l’école de Barbizon. Il s’y installe dès1849.
Sans être un « préimpressionniste », Millet s’inscrit dans
la lignée des peintres qui renouvellent le paysage de la
seconde moitié du xixe siècle par leur sens naturaliste, leur
appétence à la peinture de plein air, une attention sensible
aux jeux de lumière et effets atmosphériques dans le
traitement des paysages. Il exerce une forte ascendance
auprès de jeunes peintres en quête de vérité et de nature.
Titre : Falaise de la Hague
Artiste : Jean-François Millet (Gréville, 1814 –
Barbizon, 1875)
Date : 1844
Dimensions : H. 28 cm ; L. 37 cm
Technique : Huile sur papier marouflé sur toile
Lieu de conservation : Musée Thomas-Henry,
Cherbourg (Inv. MTH, 2006.0.207)
© Musée Thomas-Henry
Lieu de création : Rocher Castel-Vendon
Analyse de l’œuvre
ette œuvre datée de 1844 est très précoce dans la carrière de Millet
C
qui débute au Salon en 1842. L’Angélus n’est terminé qu’en 1859. Le
peintre trouve son sujet près du hameau Gruchy, son village natal. Sa
famille possédait des champs de labour proches des falaises. Le CastelVendon est situé à la pointe de la Hague sur la commune de GrévilleHague. Les blocs escarpés sont visibles en se dirigeant vers la mer du
hameau de Gruchy. En contrebas du rocher se profile le chemin des
douaniers. L’endroit fut fréquenté par le jeune Millet. Sa peinture est un
hommage rendu à la majesté du lieu, au roc personnifié et mis en scène.
Millet a le souci de la vérité de la représentation du site. Il privilégie la
vision synthétique d’ensemble au détriment du pittoresque du détail.
La terre et le ciel sont également partagés par une longue diagonale ascendante de gauche à droite. Un fort contraste
est généré par la lumière rasante du soleil jouant, à gauche, avec des nuages noirs et la partie plus sombre de la roche
à droite dotée, par endroits, d’un éclairage latéral venant de droite. Tout concourt à une dramatisation du paysage
naturel traité comme sujet dans la tradition des romantiques (Delacroix, Gudin, Isabey). Ce qui tranche ici, c’est la
vision très synthétique, le traitement spécifique des volumes rocheux, leur simplification, la peinture par aplats, quasi
géométrique, un peu à la manière d’un sculpteur. L’œuvre ouvre des horizons nouveaux et rejoint à plus d’un titre les
vues de la montagne Sainte-Victoire peintes plus tard par Paul Cézanne.
CRDP de Basse-Normandie
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Pistes pédagogiques
Niveaux : Cycles 1, 2, 3
Disciplines : Pratiques artistiques/arts visuels – Français – Histoire – Géographie
Thématiques : L’œuvre d’art et la place du corps et de l’homme dans le monde et la nature
L’œuvre d’art et sa composition
Pratiques artistiques/arts visuels
Le paysage
Cycle 3
Millet travaille « sur le motif ». L’œuvre a donc pu être réalisée soit directement en pleine nature, soit exécutée d’après
des croquis préparatoires, à l’atelier. Les musées (Louvre, Cherbourg) conservent des dessins préparatoires de
paysages localisés des environs de Barbizon et en particulier de la Hague (l’un, Les Falaises de Gréville, est mis au
carreau, musée Thomas-Henry).
L’œuvre de Millet peut servir de support à un travail sur le paysage soit traité directement lors d’une sortie à l’extérieur,
soit réalisé en deux temps : études préparatoires suivies d’un travail en classe.
Le dessin préparatoire d’après nature
1) Repérage : choisir en vue large un panorama accessible près de l’école pour une séquence de croquis de paysage
en plein air.
Dessiner d’après nature : muni de papier et crayon, à l’aide d’un cadre préalablement découpé dans une feuille de
papier cartonné A4, balayer la vue pour choisir son angle de vision à la façon d’un photographe, indiquer au crayon sur
le croquis, les couleurs, les effets de ciel et de lumière (contraste, intensité).
Une aide : la mise au carreau
Le procédé permet la transposition exacte d’un dessin sur un autre support en gardant les proportions initiales. Il faut
tracer sur la feuille comprenant le paysage d’après nature un quadrillage au crayon qui permettra un report précis du
paysage choisi sur le support définitif ou son agrandissement selon les dimensions souhaitées.
2) De retour en classe au cours d’une seconde séquence : le croquis/crayon peut servir de ressource pour un travail
de mise en couleurs à la gouache ou à l’acrylique.
Matériel : papier, crayons, peinture à l’eau.
La notion de contraste
Cycle 3
Une image est plus ou moins contrastée en fonction de la lumière, de son intensité, de sa direction. On observe dans le
tableau de Millet une source lumineuse frontale rasante venant du soleil levant et une autre, latérale, venant d’en haut
à droite. Par ces variations lumineuses, Millet théâtralise le paysage et fait le « portrait » du roc.
Contrôler les contrastes, constater les effets induits
1) Repérer les zones contrastées
En classe : regrouper quelques objets et les éclairer à l’aide d’un spot lumineux, varier l’intensité lumineuse.
On peut accentuer ou adoucir les ombres et les lumières en variant l’intensité lumineuse et son orientation. Les reliefs
ou volumes sont plus ou moins accentués. Les détails sont plus ou moins visibles. L’impression visuelle change.
2) En extérieur : dessiner un paysage en tentant de moduler le contraste
Travail au pastel de deux couleurs différentes : le noir et le blanc.
Comment parvenir à adoucir ou forcer le contraste ?
Repérer la source lumineuse – le jeu des ombres et lumières –, essayer de forcer les ombres en accentuant les traits
de pastel ou, au contraire, tenter d’éclaircir en retirant la matière pigmentaire avec un chiffon, homogénéiser les zones
en frottant le support avec le doigt.
Matériel : papier Canson gris A4, pastels noirs et blancs.
3) En classe : familiariser les élèves avec la notion de contraste par l’utilisation d’un logiciel de retouche d’image/
niveaux de gris/réglages.
CRDP de Basse-Normandie
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À partir de l’image scannée des paysages réalisés par les élèves : faire évoluer les contrastes dans les niveaux de gris
jusqu’à l’obtention du résultat souhaité.
Matériel : équipement informatique et logiciel de retouche d’image.
4) Exposition collective des œuvres sur pastel et des images retouchées.
Verbalisation : décrire les images réalisées et expliciter le processus de création.
L’œuvre de Millet, par le traitement plastique qu’il réserve aux roches, peut constituer le point de départ d’un travail sur
le volume.
Réaliser un paysage en volume
Il peut s’agir d’une vue réelle, accessible près de l’école, de la représentation d’un paysage tiré d’une lecture étudiée en
classe ou d’une création (un village par exemple) entièrement imaginée par les enfants. Prévoir plusieurs séquences.
Pour obtenir une œuvre collective, il est nécessaire d’aborder la notion d’échelle. On doit définir une référence. Par
exemple, la taille d’un personnage. On peut imaginer un personnage de 5 cm et construire un décor à son échelle.
Matériel : cartonnage, papier plan, papier mâché, colle, peinture, terre d’argile, pâte à sel, bois, fil de fer, grillage, tissu,
sable, béton cellulaire…
Répartir les élèves par atelier/matériau selon leur choix et les amener à pratiquer chaque atelier.
Français
Étude d’un texte descriptif
Cycle 3
Millet décrit dans un texte d’une vingtaine de lignes son village natal :
Mon village se trouve dans un petit pli de terrain aboutissant à la mer, vis-à-vis du nord. Cette espèce de petit vallon, si peu
creux qu’il soit, l’est suffisamment pour empêcher un passant étranger de soupçonner qu’il y a un village ; et d’autant que
le chemin qui y arrive du côté de la terre est très creux et d’une largeur (comme du reste ceux du pays) que strictement ce
qu’il faut pour qu’une charrette puisse y passer. On a donc, ou à peu près, connaissance de ce village, quand on se trouve
dedans. Il ne contient guère que 20 à 25 feux.
Les maisons sont presque bâties à hauteur de chambre et, à l’exception d’une maison couverte en ardoises, toutes sont
couvertes en chaume.
La maçonnerie de ces maisons est en pierre brute, mais les jambages des portes et des fenêtres avec leurs linteaux sont
en granit qu’on trouve dans l’endroit.
C’est une chose bien rare de voir dans ce village, quelqu’un n’étant pas de l’endroit. Ce lieu est si solitaire et tranquille que
le cri d’une oie ou le caquet d’une poule y prennent une importance immense.
La vue est là, toute naturellement bordée par les maisons, et ce n’est qu’en arrivant par le bout qui est près de la mer qu’on
a d’un seul coup, face à soi, la grande vue marine, et l’horizon sans bornes.
Auprès de la maison, on voit un vieil orme, qui se dresse sur le vide infini. Depuis combien d’années, ce pauvre arbre est-il
battu par le vent du nord ? J’ai ouï dire par les anciens du village qu’ils l’ont toujours connu comme je l’ai vu. […]
Étude de la description de Jean-François Millet
Produire un texte original : décrire en quelques lignes son village, son quartier, sa ville.
Travail individuel ou par groupe ; lecture orale possible.
Langage/vocabulaire
Lecture d’image
Cycles 1, 2, 3
Décrire le tableau de Millet de la manière la plus précise possible.
Procéder par questionnement : Quoi ? Où ? Qui ? Comment ?
Relever les termes de vocabulaire descriptif.
Selon le cycle, le travail sur le langage peut donner lieu à une production écrite ou purement orale.
Outil d’aide à la lecture d’image
À partir de la vue panoramique interactive du rocher Castel-Vendon, chercher le cadrage choisi par le peintre et relever
les changements par rapport au tableau, les expliciter.
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Cycles 1 et 2
Support interactif
Reconstituer le puzzle à 12 pièces.
Différents modes possibles : avec ou sans l’image préalable du tableau ; à l’aide de la
numérotation des pièces.
Support interactif
Reconstituer le puzzle à 49 pièces.
Différents modes possibles : avec ou sans l’image préalable du tableau ; à l’aide de la
numérotation des pièces.
Comparer l’œuvre de Millet à celles d’autres peintures de falaises (Courbet, Falaise d’Étretat après l’orage ; Boudin,
Plage à Étretat ; Cals, Falaises de Villerville ; Monet, Étretat, La Manneporte, Reflets dur l’eau…).
Outil d’aide à la lecture d’image
Cycle 3
Lecture d’image sur un mode ludique
Amener les élèves à un travail d’observation précis d’une image.
Faire construire et enrichir un vocabulaire de référence utilisé pour la description.
Faire découvrir le tableau : atmosphère, émotion ressentie.
Une séquence
Matériel : loupes à disposition pour chaque groupe, fiche puzzle à découper
(photocopies A4 et A3 multiples pour un travail individuel et par groupe), enveloppes.
1. Observer les fragments du tableau. Les élèves se répartissent par groupe (3 ou
4 enfants par groupe). Chaque groupe reçoit dans une enveloppe un élément du
puzzle de manière à ce que chacun des groupes ignore les morceaux du puzzle
reçu par les autres. Tous les morceaux du puzzle sont distribués sauf un. Chaque
groupe d’élèves observe attentivement le fragment reçu (agrandi en A3).
2. Demander aux groupes de réaliser une fiche descriptive la plus détaillée possible.
On peut suggérer que la description pourrait être destinée à une personne
malvoyante.
3. Mise en commun : chaque groupe d’enfants désigne un porte-parole qui donne oralement les indicateurs
descriptifs du fragment de puzzle rassemblés par son groupe. Les éléments de la description de chaque groupe
sont notés au tableau. Insister pour obtenir des mots descripteurs précis et inscrire les verbes employés.
4. Les groupes n’ont pour l’instant pas vu les autres morceaux du puzzle. Afficher au tableau les fragments du puzzle
et demander de faire correspondre chaque pièce à sa description. La demande est destinée à tous, excepté les
auteurs de la description.
5. Questionnement : les éléments descriptifs essentiels étaient-ils suffisants ? Que manquait-il ? Pour chaque
comparaison, rechercher ou apporter les mots de vocabulaire nécessaires à la description : format, sens, sujet,
ligne, premier, moyen, arrière-plan, droite, centre, gauche, partie supérieure, inférieure, couleurs, orientation,
large, long, angle, côté, carré, rectangle, profil, face… Lister les verbes utilisés pour dire ce que l’on voit : voir,
remarquer, apercevoir, noter, repérer, deviner, visualiser…
6. L’élément manquant. Questionnement au grand groupe pour formuler des hypothèses précises sur l’élément
manquant du puzzle. En faire l’esquisse au tableau selon la description orale des élèves.
7. Distribuer aux élèves la photocopie de l’ensemble du tableau (A4). Les hypothèses sont-elles vérifiées ? Tous les
éléments sont-ils sur l’esquisse ? Quels oublis ?
8. Distribuer le puzzle (A4) : découper, assembler et coller l’ensemble du puzzle sur une feuille.
9. Le vocabulaire descriptif acquis peut être développé par d’autres séquences et les mots inscrits dans un carnet.
En fonction des possibilités, l’emploi de photocopies couleurs permet un travail encore plus riche.
Selon le cycle, le travail sur le langage peut donner lieu à une production écrite ou purement orale.
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Géographie
Cycle 3
Recherche documentaire sur la Hague : géologie, population, économie, port de Cherbourg, voies de communication.
En illustration, Paul dans sa vie, film de Rémi Mauger (2006).
Histoire
Cycle 3
L’œuvre de Millet est datée de 1844.
La fin de la monarchie de Juillet et la révolution de 1848 : la Seconde République (1848/1851).
Crise économique – misère urbaine – émeutes rurales – Louis Blanc – Raspail – Ledru-Rollin – du suffrage censitaire
à l’élection du président de la République au suffrage universel masculin – l’abolition de l’esclavage.
Quelle est la condition paysanne à l’époque de Millet ?
La région du Nord-Cotentin vécut jusque tardivement dans un isolement relatif. Elle est parsemée de petits villages
ainsi que de châteaux et manoirs-fermes parfois fortifiés. L’un des fils de Millet représente d’ailleurs l’un d’eux, le
manoir de la Tourp à Omonville, proche de Gréville.
À partir d’exemples d’anciens manoirs, châteaux, église, petites maisons paysannes, relever la thématique de la
condition paysanne au xixe siècle.
Sur un autre plan, le grand nombre de manoirs répartis dans cette région peut servir de point de départ à l’illustration
du thème de la féodalité.
Prolongements possibles
Les œuvres de George Sand sont à l’origine du regain d’intérêt pour le monde paysan au xixe siècle. Lire des extraits
de La Mare au diable, roman (1846).
La poésie de Jacques Prévert, autre habitant célèbre de la Hague : L’École des beaux-arts, L’Amiral, Pour faire le
portrait d’un oiseau…
Projet classe verte
Visite de la Hague, port Racine, phare de Goury, nez de Jobourg, maison de Jacques Prévert à Omonville-la-Petite,
maison natale de Jean-François Millet à Gréville et son église peinte par l’artiste (l’œuvre est au musée d’Orsay), le
planétarium Ludiver à Tonneville.
Ressources
• Texte de Millet : http://www.ville-cherbourg.fr/fr/cherbourg_octeville/culture/musees_et_arts/musee_thomas_henry/
jean-francois_millet.asp
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