Présenter les causes de la Seconde Guerre Mondiale

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Présenter les causes de la Seconde Guerre Mondiale
Chap. 3 LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE ET SES CONSEQUENCES
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Présenter les causes de la Seconde Guerre Mondiale
Décrire le déroulement de la guerre
Analyser les conséquences.
INTRODUCTION
La Seconde Guerre mondiale fut la plus dévastatrice de l’histoire en termes de vies humaines
et de destructions matérielles. Elle éclata en 1939 sous la forme d’un conflit européen
opposant principalement l’Allemagne à la coalition franco-britannique, mais se généralisa
bientôt, impliquant presque toutes les nations du globe. Quand la guerre s’acheva, en 1945, le
monde, doté d’un équilibre nouveau, était dominé par les États-Unis et par l’Union des
républiques socialistes soviétiques (URSS).
I. LES CAUSES DE LA GUERRE
Il faut distinguer les causes profondes et lointaines de la cause immédiate.
A- Les héritages de la Première Guerre mondiale
À la conférence de la Paix réunie à Paris, de janvier à mai 1919, le "conseil des quatre"
(France, Royaume-Uni, Italie et États-Unis) avait imposé la volonté des vainqueurs aux
vaincus, respectant peu les principes annoncés dans les Quatorze Points du président Thomas
Wilson. Ainsi, les rancœurs furent nombreuses et alimentèrent les problèmes des relations
internationales de l’entre-deux-guerres. L’Allemagne, considérée comme responsable du
conflit, était non seulement amputée territorialement, mais aussi désarmée et, surtout, soumise
au paiement, pour des décennies, d’énormes réparations. Elle jugea que le traité de
Versailles qui lui était imposé était inadmissible. Fleurissent donc en Allemagne des
organisations d’extrême-droite dès 1919 dont le parti national nazi qui développe un
programme de 25 points en 1920 comportant des dispositions expansionnistes1.
L’Europe centrale et orientale se retrouvait morcelée : la disparition de l’Autriche-Hongrie se
traduisant par la création de nombreux petits États souvent très fragiles, mécontents de
frontières qui ne tenaient que fort peu compte des problèmes de nationalités — autant de
germes potentiels pour de nouveaux conflits. Les vainqueurs s’étaient surtout préoccupés de
construire "un cordon sanitaire" contre l’extension de l’idéologie révolutionnaire hors de
l’URSS. L’Italie, bien que victorieuse, était elle aussi mécontente de son sort, estimant la
victoire "mutilée", car ses revendications territoriales en Dalmatie et en Albanie n’étaient pas
satisfaites. Ainsi, le parti national fasciste formé en 1919, développe-t-il des ambitions
annexionnistes dans son programme.2Le Japon jugeait très insuffisantes ses acquisitions en
Asie.
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- « 1- Nous demandons la constitution d’une Grande Allemagne, réunissant tous les allemands sur la base du
droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
2- Nous demandons l’égalité des droits du peuple allemand au regard des autres nations, l’abrogation des traité
de Versailles et de Saint-Germain.
3- Nous demandons de la terre et des colonies pour nourrir notre peuple et résorber notre surpopulation. […] »
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L’Italie doit réaffirmer son droit à réaliser sa pleine unité historique et géographique, même là où elle ne l’a pas
encore réalisée ; elle doit remplir sa fonction de bastion de la civilisation latine dans la Méditerranée ; elle doit
La France, le Royaume-Uni et les États-Unis avaient plus ou moins atteint leurs objectifs de
guerre; ils avaient anéanti l’arsenal militaire allemand, réorganisé l’Europe et, en 1920,
institué la Société des Nations (SDN), dont l’objectif était de garantir la sécurité et la paix.
Cependant, très vite, leurs politiques divergèrent. La France, dirigée par Georges Clemenceau,
n’avait pas obtenu les garanties qu’elle demandait contre l’Allemagne!; elle se heurta au
Royaume-Uni, qui, avec Lloyd George, prônait une politique plus modérée à l’égard des
vaincus. Les États-Unis, quant à eux, étaient retournés dès 1919 à leur
politique isolationniste traditionnelle; le Sénat, désavouant Wilson, refusa de ratifier les
traités.
Par ailleurs le Traité de Versailles, signé le 28 juin 1919 et qui concernait l’Allemagne, a été
désigné comme l’acte qui risquait d’ « achever » la ruine de la vie économique européenne.
En effet, affirme John Maynard Keynes, « avant 1914, le système économique européen se
groupait autour de l’Allemagne, qui était le meilleur client et le fournisseur de la Russie, de
l’Autriche-Hongrie, de l’Italie, de la Belgique et de la Suisse. […] Or le traité de paix a privé
l’Allemagne de tous ses navires marchands de haute mer, de toutes ses colonies… il lui a
enlevé les houillères de la Sarre, et le minerai de fer de la partie de la Lorraine qui avait été
annexée en 1871 ; il va peut-être lui faire perdre la Silésie. Or il veut lui imposer pourtant le
paiement de réparations, qu’elle ne pourrait acquitter qu’en développant ses exportations de
produits industriels. Que le redressement économique de l’Allemagne soit nécessaire à la
reconstruction européenne, les auteurs du traité ne l’ont pas compris. »
B- Le rôle de la crise économique de 1929
La paralysie du système monétaire international, l’effondrement des échanges commerciaux
accentuent les clivages entre les « nations nanties » -Etats-Unis, Royaume-Uni, France- et
celles qui affirment être « prolétaires » : Allemagne, Italie, Japon. Les premières disposent de
réserves d’or ; elles peuvent compter sur leurs empires coloniaux. Chez les autres, la crise est
catastrophique. Dès 1931, par exemple, l’Allemagne n’est plus en mesure d’assurer le
règlement de ses échanges extérieurs. En Allemagne et au Japon, la conquête d’un « espace
vital » est présentée par les nationalistes comme la première nécessité. La lutte contre le
chômage s’appuie sur le réarmement. La Seconde Guerre Mondiale plonge donc ses racines
dans l’âpreté des antagonismes économiques. Par ailleurs, la crise affaiblit les démocraties qui
sont désormais incapables de stopper les menaces de guerre que les régimes fascistes font
peser sur le monde.
C- L’échec des efforts de paix à travers la sécurité collective
Après l’hécatombe de la Première Guerre Mondiale, beaucoup souhaitent qu’à l’avenir la paix
dépende plus de l’équilibre fragile créé par la force, mais de valeurs intangibles, comme la
justice, le droit, la fraternité dont la défense est confiée à la Société des Nations. Dans les
principes wilsoniens, la SDN a pour objet de régler pacifiquement les conflits par la « sécurité
collective » et l’arbitrage, et de conduire à un désarmement général que préfigurent ceux
imposées à l’Allemagne par le traité de Versailles et à ses alliés par les autres traités.
imposer de façon solide et stable l’empire de la loi sur les peuples de nationalité différente annexés à l’Italie ;
[…]
Seulement, la nouvelle ère ainsi inaugurée ne tarda pas à être brisée. La SDN et la sécurité
collective n’ont pu réaliser leur objectif de paix et de désarmement pour plusieurs raisons :
1- Des vices structurels de la SDN
 L’abstention des Etats-Unis. Le traité de Versailles et le pacte de la SDN qui y est
incorporé n’ont pas été ratifiés par le sénat américain. Les Etats-Unis ne sont donc pas
membres de cette organisation à la création de laquelle ils avaient contribué. Aussi, la
SDN perd son principal soutien politique et militaire.
 L’exclusion provisoire des Etats vaincus et la mise à l’écart de la Russie ne peuvent
qu’affaiblir l’autorité morale et l’efficacité de l’institution. L’opinion publique
allemande, en particulier, ressent la SDN comme une machination contre l’Allemagne
vaincue, dépouillée de ses colonies au profit des vainqueurs, sous le couvert
des « mandats » confiés par la SDN. Celle-ci prend ainsi l’allure d’un instrument
politique au service des alliés, hypocritement abrités derrière de grands principes
généreux pour mieux écraser les vaincus. Quant à la Russie, elle ne peut aucunement
éprouver le désir de défendre un ordre international défini en dehors d’elle et souvent
contre ses intérêts.
 L’absence de toute force armée capable de faire respecter les décisions de la SDN, une
fois celles-ci votées à l’unanimité.
2- Les différences d’objectifs
On a d’un côté les partisans de l’application des traités (France et Etats nés des
traités : Pologne, Tchécoslovaquie, mais aussi Yougoslavie et Roumanie. De l’autre
on a les révisionnistes : les Etats vaincus (Turquie, Italie Allemagne) mais aussi
certains des vainqueurs. Il y a donc des coups de force opérés par les et les autres
entre 1920 et 1921 auxquels la SDN ne parvient pas à s’opposer.
3- L’échec du désarmement dû aux divergences de conceptions entre les démocraties,
l’Allemagne et l’URSS.3 En février 1932 à Genève, tous les plans de désarmement
successivement présentés sont rejetés l’un après l’autre. La conférence ne tarde pas à
s’enliser. En octobre 1933, l’Allemagne annonce son retrait de la conférence et de la SDN
puisque le désarmement n’aboutit pas. En avril 1934, la France déclare qu’elle assurera
désormais elle-même sa sécurité.
4- Division, pacifisme4 et faiblesse des démocraties libérales.
a) Scandalisée par le montant exorbitant, à ses yeux, de la somme réclamée 5, l’Allemagne
refuse d’obtempérer. Il faut un véritable ultimatum franco-britannique pour la contraindre à
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La France, puissance terrestre, n’envisage de désarmer qu’une fois la sécurité collective assurée. Le RoyaumeUni et les Etats-Unis, abrités derrière de profonds glacis maritimes, ne redoutent aucune invasion et ne disposent
que d’armées réduites ; ils préconisent un désarmement immédiat et inconditionnel pour les armements
terrestres ; non pour les armements navals qui leur tiennent plus à cœur. L’Urss préconise un désarment total,
mais s’oppose à tout contrôle. Quant à l’Allemagne, elle réclame l’égalité des droits avec ses partenaires.
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Courant de pensée préconisant la recherche de la paix internationale par la négociation, le désarmement, la nonviolence.
accepter. Mais, il est clair qu’au cours du règlement de ses dettes, l’Allemagne résistera pied à
pied. Dès lors, deux solutions sont possibles : la politique de conciliation lui accordant des
facilités, préconisée par l’Angleterre, ou la politique d’exécution, l’obligeant par la force à
honorer ses engagements. De concert, Paris et Londres essaient d’abord la première tactique.
Le PM anglais, Llyod George, et le président du conseil français, Aristide Briand, réunis à
Cannes en janvier 1922, décident d’organiser au printemps une « conférence économique » à
Gênes. En la présence des délégués allemands et russes, la reconstruction économique de
l’Europe et un assouplissement des réparations devaient faire l’objet d’un examen
d’ensemble. Briand obtient alors de Llyod George la promesse d’un traité de garantie
analogue à celui qui avait été prévu dans la paix de Versailles et que les anglais avaient refusé
de ratifier à la suite de l’attitude isolationniste américaine. Pour la France, c’est la fin de son
isolement né de la « mésentente cordiale » entre les alliés d’hier. Seulement, Briand est accusé
d’abandon et voit se dresser contre lui le Président de la République, A. Millerand, plusieurs
ministres et la grande majorité de l’opinion. Contraint à la démission, il est remplacé par
Poincarré, partisan au contraire de la fermeté. Le nouveau président du conseil fait donc
échouer la conférence de Gênes (avril-mai 1922) et, du même coup, l’idée du traité de
garantie qui aurait consolidé l’amitié franco-anglaise. Plus tard, Londres va s’opposer à
l’occupation par les troupes franco-belges, le 11 janvier 1923, du bassin de la Ruhr qui est
présenté par la France comme un « gage productif » de sa créance contre l’Allemagne.
b) Avec l’adoption des plans Dawes6, à la conférence de Londres de juillet à août 1924, et
Young7, à la conférence de La Haye en août 1929, ainsi que du traité de Locarno8, à la
conférence d’octobre 1925, on croit la détente amorcée entre les démocraties elles-mêmes et
entre celles-ci et l’Allemagne. Et grâce à l’influence américaine, la France abandonne sa
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A la conférence de Spa (juillet 1920), les alliés fixèrent le pourcentage des réparations qui seront attribuées aux
nations victimes des puissances centrales. Présenté ayu printemps de 1921, l’ »Etat de paiements » fixe enfin le
montant des réparations à 132 milliards de marks-or, payables en annuités.
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Dès octobre 1923, les Etats-Unis font une proposition de rediscuter sur un plan international le problème des
réparations, ce que Poincarré accepte afin d’obtenir notamment le soutien des banques anglo-saxonnes pour
enrayer la chute du franc avant les législatives. Le plan Dawes, valable pour cinq ans seulement, est adopté par
toutes les parties (France, Angleterre, Allemagne et Russie). Il ne modifie pas le montant théorique des
réparations, mais les annuités progressives fixées pour 1924-1929 sont inférieures à celles arrêtées en 1921. Un
prêt américain doit aider l’Allemagne à faire les premiers versements. De plus, le plan prévoit la possibilité pour
l’Allemagne de s’acquitter en marchandises et services.
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Toujours sous égide américaine, un nouveau plan est élaboré à l’expiration du plan Dawes. Un comité
d’experts présidé par l’américain Young établit un plan définitif et plus avantageux pour l’Allemagne : les
annuités, qui devront être versées jusqu’en 1988, sont inférieures à celles du plan Dawes ; en cas de difficultés,
l’Allemagne peut même suspendre une partie de ses paiements ; la commission des réparations supprimée, elle
recouvre sa pleine autonomie financière. Sur la demande de Stresemann (ministre des affaires étrangères
allemand), les deux dernières zones occupées militairement en Rhénanie qui, en vertu du traité de Versailles,
auraient dû être évacuées successivement en 1930 et 1935, le sont toutes deux en 1930.
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Dès 1924, Briand et Stresemann sont persuadés de la nécessité d’un rapprochement franco-allemand car ils
espèrent œuvrer à la paix définitive. Washington et Londres encouragent cet esprit. Sur l’initiative allemande,
une conférence se réunit en octobre 1925 à Locarno en Italie. Mussolini, Briand, Stresemann et Austen
Chamberlain (chef du Foreign Office) signent une série d’accords. Le traité principal, ou pacte de Locarno,
établit une garantie mutuelle de frontières entre l’Allemagne et deux de ses voisins occidentaux, la France et la
Belgique, ainsi que la promesse réciproque de recourir à l’arbitrage en cas de conflit. Ainsi, pour la France,
l’Allemagne reconnait le traité de Versailles ; elle renonce à l’Alsace-Lorraine ; elle promet de na pas
remilitariser la Rhénanie.
politique de fermeté dont elle n’a pas les moyens financiers. Seulement des équivoques
subsistent entre français et allemands9.
c) Les divisions entre démocraties vont persister au sujet de la sécurité collective. Pour
Briand, le rapprochement franco-allemand prélude à l’établissement de la paix définitive par
le désarmement. Mais, avant de désarmer, il s’agit d’assurer la sécurité collective, et donc de
renforcer la SDN. Vers 1924, le moment paraît propice : la prospérité économique à ses
débuts calme les nationalismes exacerbés ; parvenue à régler une vingtaine de conflits
secondaires, la SDN jouit de plus de prestige, et la gauche au pouvoir en France et en GrandeBretagne entend accroitre son influence. Soutenu par Herriot, le ministre des affaires
étrangères tchécoslovaque, Edouard Benès, présente à Genève en 1924 un projet d’accord
général. Ce « protocole de Genève » préconise un arbitrage obligatoire des différends, assorti
de sanctions, non seulement économiques et financières, mais aussi militaires. Nouveauté
essentielle : la création d’une armée internationale est, en effet, prévue. Les sanctions seraient
décidées non plus à l’unanimité du conseil, mais à la majorité des deux tiers. Mais les
conservateurs britanniques, parvenus au pouvoir en novembre 1924, rejettent le protocole.
Puissance navale et financière, le Royaume-Uni redoute d’avoir à contribuer lourdement à
l’application des sanctions ; il est d’ailleurs rebelle envers tout engagement contraignant en
Europe. Ce véritable isolationnisme britannique est un échec sensible pour la sécurité
collective et l’ « esprit de Genève ». Le « pacte Briand-Kellog » du 27 août 1927 ne permettra
non plus la réussite de la sécurité collective car il ne noue que des liens de pure forme ;
aucune sanction n’étant prévue pour les contrevenants. De même, lorsqu’il, préconise le 5
septembre 1929, à la tribune de la SDN, une fédération européenne, l’affaire reste sans suite.
C’est la preuve de la puissance des égoïsmes nationaux que la crise mondiale des années 30
viendra exacerber.
d) La passivité des puissances démocratiques se révèle lors de l’attaque japonaise sur la Chine
en 1930. Dès cette année, le Japon ressent durement les effets de la crise. Avec la chute des
exportations, il craint de ne pouvoir financer l’achat du ravitaillement et des matières
premières indispensables. Le chômage dans les villes et la misère des campagnes, consécutive
à l’effondrement des cours agricoles, favorisent la propagande nationaliste qui prône comme
solution à la crise un politique de conquête. En septembre 1931, un attentat sur le chemin de
fer mandchourien, provocation montée de toutes pièces, sert de prétexte au déclenchement
d’une vaste opération de conquête ; toute la Mandchourie et les provinces frontières chinoises
du Jehol et du Tchahar sont occupées. Par son attaque contre la Chine, le Japon s’est livré à
une agression qui viole le pacte de la SDN dont les deux pays sont membres et le pacte
Briand-Kellog de 1928. En principe, la condamnation du Japon par la SDN, à laquelle la
Chine s’est empressée de faire appel, comme l’opposition des Etats-Unis, ne font aucun
doute. Mais la requête présentée au Japon par la SDN de procéder au repli de ses troupes
dans la zone du chemin de fer se heurte à un refus qui prend de court la plupart des hommes
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L’interprétation du traité de Locarno est différente entre la France, qui veut croire que l’Allemagne a reconnu
explicitement les frontières occidentales pour toujours, et implicitement les frontières orientales, et l’Allemagne,
pour laquelle Locarno n’empêche nullement une modification pacifique des frontières allemandes, y compris les
frontières occidentales. La position de la France est encore plus ambiguë : dans cette même année 1925, elle
resserre aussi ses « alliances militaires de revers » avec la Pologne et la Tchécoslovaquie.
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politiques. La SDN, dès lors, ne sait plus que faire ; elle n’ose ni appliquer des sanctions, ni
même déclarer le Japon coupable d’agression. Le 17 mars 1933, le Japon, qui n’avait adhéré à
la SDN qu’avec beaucoup d’hésitation et sur l’insistance de Wilson, s’abrite derrière le
premier prétexte venu pour annoncer, à la stupéfaction générale, qu’il quitte la SDN. Quant
aux Etats-Unis, où la crise renforce l’isolationnisme, ils se bornent à une condamnation
morale de l’agression nippone. Le prestige de la SDN est ruiné. Le Japon est encouragé à
pousser son avantage. La conquête de la Chine du Nord se poursuit discrètement, et , au début
de 1933, les troupes de Tokyo, menacent Pékin. Mais le 7 juillet 1937, le Japon saisit le
prétexte d’un incident près de Pékin pour déclencher une offensive générale. Son but est de
contrôler toute la « Chine utile », c’est-à-dire les régions les plus actives de l’Est, les vallées
très peuplées, les villes, les ports. Couper la Chine du monde extérieur et de l’aide qu’elle
pourrait en recevoir – soviétique jusqu’en 1938, américaine ensuite- est réalisé à la fin de
1938. Par leur retrait coup sur coup de la SDN et leurs premiers coups de force, le Japon et
l’Allemagne sonnent le glas de la sécurité collective. Désormais la SDN en est réduite à
vivoter ; la politique de la force, plus discrète entre 1925 et 1930, revient au-devant de la
scène entre 1931 et 1933. Et ce n’est qu’un début.
e) Passivité et division entre démocraties font jour lorsque l’Allemagne annonce le 16 mars
1936 rétablissement di service militaire obligatoire de deux ans en Allemagne et la création
d’une aviation militaire la Luftwaffe, confiée à Goering. C’est une violation évidente di traité
de Versailles. La première réaction des puissances est faible : Paris, Londres et Rome
protestent mais n’interrompent pas les relations diplomatiques avec Berlin ; la SDN
condamne une Allemagne qui n’en a cure. L’accord de Stresa, signé le 14 avril 1935 en Italie,
a semblé établir une communauté de vues entre la France, l’Italie et l’Angleterre11. Mais, dès
juin 1935, cette communauté de vues est ébranlée par une initiative anglaise : sans avertir ses
partenaires, Londres conclut avec l’Allemagne un accord naval, l’autorisant à se doter d’une
marine de guerre égale à 35% de la flotte britannique et comportant des sous-marins.
f) La remilitarisation de la Rhénanie met encore en lumière la faiblesse et la division des
démocraties. Le 2 mai 1935, un traité franco-soviétique d’aide et d’assistance « immédiate »
en cas d’agression contre l’un des deux signataires et d’incapacité de la SDN est signé sans
aucune convention militaire ne prolonge ce traité. La ratification par le parlement français de
ce traité sert de prétexte à Hitler : selon lui, ce traité viole le pacte de Locarno. Hitler
dénonce, le 7 mars 1936, ce pacte ; aussitôt, 30 000 soldats allemands pénètrent dans la zone
démilitarisée. La construction de la « ligne Siegfried », face à la ligne Maginot, est
immédiatement entreprise. En France, le gouvernement Sarraut semble décidé à réagir. Mais
ce sont des velléités : le ministre de la guerre, et le chef d’état-major, le général Gamelin,
surestiment la force de l’armée allemande ; pour l’attaquer, il faut, selon eux, soit disposer du
soutien britannique, soit procéder à une large mobilisation. Or, Londres refuse son appui
formel, et à deux mois des élections législatives, le cabinet français ne peut se résoudre à une
mesure aussi impopulaire que la mobilisation. Il se contente d’en appeler à nouveau à la SDN
impuissante ; Hitler a gagné son pari. Les démocraties ont laissé passer la dernière occasion
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Voir cours précédent sur l’affaiblissement des démocraties libérales.
Les trois pays affirment leur fidélité au pacte de Locarno et leur souci de préserver le statu quo en Europe.
d’arrêter Hitler, et peut-être même d’en finir avec son régime. Il s’agit là d’un aveu de
faiblesse de Paris qui l’éloigne de ses alliés : la Yougoslavie et la Roumanie se rapprochent
de l’Allemagne et la Belgique dénonce la convention militaire de 1920.
g) Devant le soutien apporté par l’Italie et l’Allemagne à Franco en Espagne en juillet et août
1936, les démocraties se dérobent une fois de plus.
h) Molles protestations des alliés devant l’Anschluss. En novembre 1937, Hitler projette
l’annexion prochaine de l’Autriche et des Sudètes. En février 1938, Hitler prend lui-même le
commandement suprême de l’armée. Depuis la conclusion de l’axe Rome-Berlin et l’adhésion
de Mussolini au pacte anti-Komintern, l’Italie ne s’oppose plus à l’Anschluss : la Duce a
renoncé à ses prétentions danubiennes pour se consacrer à la Méditerranée. Après avoir
rencontré Hitler le 12 février 1938, le chancelier autrichien Schluschnigg se voit signifier un
ultimatum exigeant la nomination de Seyss-Inquart au poste de ministre de l’intérieur. Le
chancelier accepte, mais décide d’organiser un plébiscite sur ce thème ; ce qui déplait à Hitler
qui fait pleuvoir le 11 mars une série d’ultimatums qui somment l’Autriche de renoncer au
plébiscite et le chancelier de démissionner. Seyss-Inquart, devenu chancelier à sa place,
appelle dans la nuit les troupes allemandes. L’Anschluss proclamé le 13 mars est plébiscité
par 97% des allemands et des autrichiens. Comme le Führer l’a prévu, les démocraties se
bornent à protester mollement.
i) La Tchécoslovaquie et la conférence de Munich. En septembre 1938, Hitler menaça
d’annexer par la force la zone frontalière de la Tchécoslovaquie, la région des Sudètes, où
vivaient 3 millions d’habitants d’origine allemande12. Le Premier ministre britannique Neville
Chamberlain entama des négociations qui débouchèrent sur une conférence à quatre (luimême, Hitler, Mussolini, et Daladier pour la France13); ni la Tchécoslovaquie ni l’URSS
n’étaient représentées. Le 29 septembre 1938 furent signés les accords de Munich, par
lesquels les Tchèques, sous la pression des Britanniques et des Français, cédèrent la région
des Sudètes à l’Allemagne, contre la promesse d’Hitler de ne pas s’emparer d’une plus grande
partie du territoire tchèque. L’intégrité de la Tchécoslovaquie avait été sacrifiée par ses alliés,
pour sauvegarder la paix. Munich fut le symbole de la passivité des démocraties. L’Europe fut
soulagée : les Britanniques, partisans affirmés de la politique d’apaisement, pensaient avoir
obtenu "!la paix pour notre époque!", les Français étaient plus perplexes; certains, très
critiques, condamnèrent cette reculade, d’autres estimèrent qu’elle permettrait de gagner du
temps pour se préparer à une guerre jugée inéluctable. Mais Hitler ne s’arrête pas là. Il exige
que les revendications hongroise et polonaises en Tchécoslovaquie soient satisfaites : en
octobre 1938, Varsovie s’empare de la, zone de Teschen en Silésie, tandis que la Hongrie
acquiert en novembre, le Sud de la Slovaquie ; Budapest réclame en outre la Ruthénie
subcarpathique. De leur côté, les slovaques exigent l’autonomie, voire l’indépendance. La
désintégration de la Tchécoslovaquie est donc amorcée. Estimant que l’existence d’un etat
tchèque, même diminué, lui barre l’accès de l’Europe centrale, et notamment du précieux
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Et dont il accuse la Tchécoslovaquie de menacer.
Depuis 1924 la Tchécoslovaquie dispose d’une alliance avec la France et depuis 1935 avec l’Urss. Depuis
1938, Daladier, président du conseil français, et son ministre des affaires étrangères, Georges Bonnet, ont, à,
maintes reprises, assuré Benès, le président tchécoslovaque, que la France tiendraient ses engagements.
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pétrole roumain, Hitler somme, le 14 mars 1939, le nouveau président tchécoslovaque, Hacha,
d’appeler l’armée allemande à Prague, sous peine de voir sa capitale bombardée. Le 15, sans
coup férir, la wehrmacht pénètre en Bohême et Moravie, immédiatement réduites à l’état de
protectorat allemand, tandis que la Slovaquie, érigée en Etat indépendant, n’est en réalité
qu’un satellite. Hitler vient d’entamer la conquête du Lebensraum en annexant les populations
non allemandes. Dès le 22 mars , d’ailleurs, il contraint la Lituanie à céder le port de Memel.
Mussolini, jaloux des succès hitlériens, s’empare en avril de l’Albanie. LA Pologne contre
laquelle la presse allemande se déchaine est la prochaine victime désignée. Chamberlain
estime donc la guerre préférable à toute nouvelle capitulation. La France adopte les nouvelles
positions anglaises. Les deux démocraties activent donc leur réarmement tout en multipliant
les préparatifs diplomatiques.
D- L’ultime course aux alliances
En rupture avec ses traditions diplomatiques, le Royaume-Uni s’engage à maintenir
l’équilibre de l’Europe centrale et balkanique jugé particulièrement menacé. Le 31 mars 1939,
Chamberlain garantit solennellement l’intégrité du territoire polonais ; en août, il signe avec
Varsovie un traité d’alliance. Dès le 13 avril 1939, la France confirme son alliance de 1921
avec la Pologne. En outre les deux démocraties accordent leur garantie à la Roumanie et à la
Grèce et concluent une alliance avec la Turquie.
De son côté Hitler conclut une véritable alliance avec l’Italie le 22 mai 1939 : le « pacte
d’acier », alliance défensive et offensive. Le 23 août, un pacte de non-agression est signé avec
l’Urss. En effet, Staline, inquiet de l’attitude des démocraties qu’il soupçonne de vouloir
détourner vers l’Urss l’expansionnisme allemand, songe à se rapprocher de l’Allemagne pour
laisser l’Urss en dehors du conflit menaçant. Le pacte prévoit un futur partage de la Pologne
et permet à Staline de récupérer les territoires abandonnés par Lénine à Brest-Litovsk en
1918. Pour les démocraties, c’est une catastrophe. On devine l’agression contre la Pologne
imminente.
E- Le déclenchement de la Guerre en Europe : l’attaque de la Pologne
Le 1er septembre à l’aube, après un dernier incident frontalier mis en scène par les allemands
eux-mêmes, Hitler lance son armée sur la Pologne après avoir fait bombarder toutes les bases
de son aviation militaire. Malgré leur résistance, les troupes polonaises sont rapidement
écrasées et l’entrée des soviétiques en Pologne, le 17 septembre, leur donne le coup de grâce.
Après une ultime tentative de conciliation, le 3 septembre, l’Angleterre, à 11 heures, et la
France, déclarent la guerre à l’Allemagne. La France cantonne cependant ses troupes sur la
ligne Maginot. C’est le début de ce qu’on a appelé la « drôle de guerre ». C’est donc par une
dernière reculade que les démocraties entrent dans la Seconde Guerre Mondiale. Ils vont
connaitre des débuts difficiles.
II. LES GRANDES PHASES MILITAIRES
Voir pages 44-46, Histoire Géographie Education civique 3e, Formule Brevet, Sylvie Borrely
et al., Vuibert
Les opérations militaires, qui se sont étalées sur 6 ans, n’ont été possibles que grâce à l’accent
mis sur le vecteur économique surtout lors du déroulement de la guerre.
III. L’ECONOMIE POUR SOUTENIR LES OPERATIONS MILITAIRES : L’ECONOMIE
DE GUERRE
Le vecteur économique est intervenu sous un double angle : celui de « guerre économique »
qui renvoie aux efforts des protagonistes pour utiliser l’arme économique (blocus,
bombardements d’objectifs industriels, etc.) au service de la guerre classique ; celui
d’ « économie de guerre », lequel impose l’étude des stratégies internes utilisées par les
nations engagées pour financer l’effort de guerre, assurer la bonne marche des industries –
voire leur reconversion- promouvoir le ravitaillement, mobiliser le corps social, etc.
Mais, la guerre économique, allemande ou alliée, n’a eu que des résultats limités, même
quand elle visait à la conquête des voies d’accès aux matières premières ou à des accords
commerciaux avec les pays neutres. Le blocus, le contrôle allié des exportations des pays
neutres, la préemption des matières premières, les bombardements sur la Ruhr n’ont affaibli
l’Allemagne qu’à la fin de la guerre. Elle-même n’est pas parvenue gagner la bataille de
l’Atlantique destinée à isoler l’Angleterre des ressources américaines.
Seul le choix d’une « économie de guerre » efficace s’est avéré déterminant comme en
témoigne la victoire des Alliés occidentaux.
A- L’économie de guerre en France
Jusqu’à Dunkerque, la France s’en tient à une stratégie défensive. Mais, très vite on constate
la mise en place rapide d’une économie de guerre : pouvoirs spéciaux confiés au parlement ;
instauration d’un ministère de l’approvisionnement outre-Manche. La création d’un comité de
coordination franco-anglais, dirigé par Jean Monnet, traduit la volonté de coordonner les
développements industriels des deux pays. Mais, il n’y aura pas de réelle collaboration durant
la « drôle de guerre ». Des deux côtés, on s’attache surtout à soutenir la monnaie. Ni
rationnement, ni réglementation des importations, ni mobilisation de la main-d’œuvre : on
berce l’opinion de l’espoir d’une guerre à long terme.
B- L’économie de guerre en Angleterre
Avec la défaite de la France prend fin l’attentisme14 en Grande-Bretagne et on assiste à une
mobilisation économique totale. Dans un premier temps sont prises des mesures d’urgence,
comme la production exclusive de cinq types d’avions, essentiellement des chasseurs. Elles
sont suivies de dispositions plus larges : rationnement, réglementation des importations,
fiscalité accrue, élaboration, sous la direction de l’économiste Keynes, d’un « livre blanc » sur
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Tendance à attendre les évènements avant d’agir, de parler ; opportunisme.
les revenus et les dépenses de la nation, mise en place d’un groupe ministériel restreint chargé
de rationaliser et d’administrer l’effort économique, chasse aux superprofits industriels par
l’adoption d’une législation drastique. En décembre 1941, un décret sur le service national
ordonne la « conscription15 industrielle » : au milieu de 1944, 33% de la main-d’œuvre
britannique travaille pour la guerre.
C- Les Etats-Unis : l’arsenal des démocraties
Avant l’entrée en guerre des Etats-Unis, Roosevelt s’est efforcé d’aider les Alliés européens
en prenant des dispositions juridiques comme la loi du Prêt-bail (mars 1941) qui autorisait le
gouvernement américain à prêter du matériel de guerre à un pays dont la défense lui parait
nécessaire à la sécurité américaine. Après Pearl Harbour (décembre 1941), une grande
industrie de guerre doit être improvisée à l’aide d’un dirigisme souple. On met en place des
« agences spéciales » pour la répartition des matières premières et l’on instaure un « conseil
des ressources de guerre » pour organiser la production. Ce victory program aboutit à un
« boom » économique considérable : le nombre de bateaux de commerce construits – les
Liberty Ships tankers- passe de 746 en 1942 à 2242 en 1943. Au total, le quart de la
production peut être envoyé aux Alliés. Pour financer ce programme tout en jugulant
l’inflation, on émet des emprunts à intérêts peu élevés tout en instaurant des impôts pour la
« victoire ».
D- La « grande guerre patriotique » de l’URSS
Voir page 40, Serge Berstein et Pierre Milza, Histoire du vingtième siècle 1939-1953, Hatier.
E- De l’économie de la guerre éclair à l’économie de la guerre totale en Allemagne
Voir page 40-42, Serge Berstein et Pierre Milza, Histoire du vingtième siècle 1939-1953,
Hatier.
Toute cette mobilisation des hommes et des ressources n’est pas restée sans conséquences.
IV- LE BILAN DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE
Il y a des pertes humaines et matérielles. Mais, à côté, un bilan politique doit être dressé.
A- Un bilan humain effroyable
Voir p50, Histoire Géographie Education civique 3e, Formule Brevet, Sylvie Borrely et al.,
Vuibert et pages109-110, Serge Berstein et Pierre Milza, Histoire du vingtième siècle 19391953, Hatier.
B- Un monde sous le choc
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Système de recrutement militaire fondé sur l’appel annuel du contingent.
Voir page 50, Histoire Géographie Education civique 3e, Formule Brevet, Sylvie Borrely et
al., Vuibert
C- Bilan matériel et financier
Voir pages 111-113, Serge Berstein et Pierre Milza, Histoire du vingtième siècle 1939-1953,
Hatier.
D- Le déclin de l’Europe et la montée en puissance des deux « Grands »
Voir page 51, Histoire Géographie Education civique 3e, Formule Brevet, Sylvie Borrely et
al., Vuibert
E- Un nouvel ordre mondial
Voir page 51, Histoire Géographie Education civique 3e, Formule Brevet, Sylvie Borrelly et
al. Vuibert
CONCLUSION
A la suite d’une conjonction de facteurs, l’Europe, l’Amérique et l’Asie ont été plongées dans
une guerre longue et dévastatrice. Plus encore que les conflits précédents, la Seconde Guerre
mondiale impliqua la mobilisation de la totalité des ressources humaines et économiques des
nations engagées, le mépris de la distinction entre soldats et civils, et l’extension du champ de
bataille à l’ensemble du territoire ennemi. Elle fut caractérisée par des atrocités sans précédent
contre les populations civiles et, surtout, par le génocide auquel se livrèrent les nazis, en
pratiquant la déportation et l’élimination systématique des Juifs, des Tsiganes et des Slaves
dans des camps de concentration. La victoire fut déterminée par les capacités de mobilisation
humaine et industrielle des forces de la Grande Alliance. Celles-ci ont été du reste soutenues
dans leurs efforts par l’Afrique et le Cameroun.