Grand Angle Incentive
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Grand Angle Incentive
GRAND ANGLE INCENTIVE AFRIQUE du SUD Au bout de la savane, la post modernité Il y a la ville du Cap, son ambiance unique dont on ne sait pas très bien si elle est faite d’Europe, de Californie ou tout simplement d’Afrique. Il y a l’atmosphère du Cap de Bonne-Espérance, son plateau battu par les vents et son nez pointant vers le pôle Sud. Il y a Johannesburg, mégalopole Parlement (Le Cap) en pleine mutation qui découvre la post-modernité en tirant la langue aux anciennes lois de l’apartheid… Il y a tout cela en Afrique du Sud. Et il y a aussi d’extraordinaires réserves animalières qui font les beaux jours du tourisme d’affaires. Reportage Serge Barret C Dernier arrêt avant les glaces de l’Artique : le Cap de Bonne-Espérance ponctue le continent africain par un plateau à la végétation rase tombant à pic dans l’océan. Une ambiance touchante de bout du monde. Photos Alain Parinet ela fait bien trois fois en une heure que cette Ferrari décapotable passe et repasse – jamais avec la même fille côté passager – devant la terrasse du Blues, le café hype parmi tous les cafés hypes qui bordent la plus grande plage de Cape Town, dans le quartier des millionnaires de Camps Bay. C’est là où il faut voir et être vu, c’est là que la jeunesse dorée de la ville se donne rendez-vous. Et pour être dorée, la jeunesse, elle est dorée. Finalement, à part quelques balayeurs et chanteurs de rue, elle est presque exclusivement blanche ; ce qui, même prévenu, fait tout de même un drôle d’effet en Afrique. Bref, on déjeune prolongé, on balade sa nonchalance façon Pamela Anderson ou Arnold Schwarzenegger, on jogge torse nu et court vêtu, on promène – c’est selon – son chien de race ou sa jaguar… Comme ils sont loin les bidonvilles, ces fameux townships, entrevus derrière la fenêtre du bus ou du taxi au sortir de l’aéroport. Sur la rocaille VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 des collines voisines, le long du serpentin de bitume regagnant le centre-ville façon Côte d’Azur années 60, des maisons somptueuses surplombent un Atlantique qui se met au diapason en se donnant des airs de Méditerranée. “Nous en louons quelquesunes, à des particuliers ou à des petits groupes exclusifs, dit Denise van Blerk de l’agence IconVillas. Elles sont toutes très luxueuses, toutes de style contemporain et toutes décorées par des stylistes. L’une d’elles, la Llandudno Beach Villa, est une maison de l’architecte de renom Johann Slee, tandis qu’une autre, sur trois étages, peut accueillir jusqu’à 20 personnes. Si l’on compte le cuisinier, le maître d’hôtel, le chauffeur et toutes sortes de services à la demande, cela revient moins cher par tête qu’un grand hôtel de luxe. On peut même en privatiser certaines le temps d’un cocktail ultra chic.” Après s’être arrêté au Grand Café & Beach, caférestaurant de plage où il est de bon ton de déjeuner léger les pieds dans le sable, quittons ce monde >>> 65 INCENTIVE GRAND ANGLE AFRIQUE DU SUD 1 à ciel ouvert… Le tout est réparti autour d’un vrai port, avec grues et bassins accueillant cargos et chalutiers. Et puis, il y a les otaries… qui jouent, se poursuivent, ondulent en souplesse et n’hésitent pas à grimper sur les pontons pour paresser au soleil. L’une d’elles, baptisée Oscar, est même devenue la mascotte de l’hôtel The Table Bay. Ce Waterfront, c’est aussi l’occasion de rencontrer les Capetoniens de toutes conditions, couleurs ou confessions, les systèmes de sécurité particulièrement efficaces autorisant la vraie flânerie. Au sujet de la violence, juste un mot : c’est vrai que lorsqu’on débarque en Afrique du Sud, les murs électrifiés qui entourent les maisons et les lotissements n’augurent guère d’un quotidien vécu en toute décontraction… De même, plus tard, on se fatiguera des anecdotes qu’aiment à raconter les Sud-africains à propos de la délinquance. Qu’on ne peut certes nier à la lecture de statistiques monstrueuses… Pour autant, un peu prévenu, un peu vigilant, on peut se promener dans les quartiers fréquentés par les étrangers sans grand risque. Surtout en groupe. Bien sûr, si d’aventure on baguenaude nez au vent, la nuit dans un township, collier de perles au cou, bracelet Cartier au poignet et appareil photo en bandoulière… là, on s’en doute, il y a risque… Mais comme le dit Élodie Bonnefon, de l’agence Akilanga DMC & Events, “l’Afrique du Sud, ce n’est quand même pas le far-west.” 2 3 4 Il y a aussi, tout en haut du quartier, des jardins superbes, six hectares de frangipaniers, de tulipiers ou d’aloès qui ont remplacé l’immense potager servant autrefois à ravitailler les bateaux de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales. Quasiment sans transition, à une ou deux rues de là, on passe dans le quartier hors normes de Bo-Kapp, habité par des descendants d’esclave et de prisonniers politiques musulmans originaires de Malaisie, du Sri Lanka, d’Indonésie ou d’Inde. Un feu d’artifice de couleurs grimpe le long de la colline de Signal Hill ; un déluge bariolé de maisons basses bleues, rouges, jaunes ou violettes, presque toutes construites au XIXe siècle, simplissimes dans leurs lignes, ponctuées par la présence d’une ou deux petites mosquées, elles aussi joyeusement colorées. Presque personne dans les ruelles tortueuses, il règne ici un calme VRAI DÉCOR DE CINÉMA 1 et 4 — Des villas de milliardaires à louer en bord de mer, un studio photo très couru pour des shootings de mode avec la montagne de la Table en toile de fond : Le Cap et ses environs offre des lieux privatisables inoubliables, le temps d’une soirée, ou mieux, pour quelques nuits à jouer les stars d’Hollywood. 2 — Les bobos investissent le quartier de Woodstock, viennent faire leur marché du samedi, flânant dans les boutiques branchées de l’Old Biscuit Mill, usine réhabilitée et dédiée à l’art et l’artisanat local de la meilleure facture. 3 — De sublimes immeubles aux balcons de fer forgé s’alignent sur Long Street, rue principale de la partie historique de la ville. >>> de cinéma, cet Hollywood exporté dans l’hémi- sphère sud, pour rejoindre le centre-ville, à une petite dizaine de kilomètres. Car Cape Town cache bien son jeu : sous des airs de petite cité californienne, elle s’étend sur des dizaines de kilomètres et se compose de véritables villes dans la ville. Des distances qu’ignorent les visiteurs, se contentant généralement des plages, du centre-ville historique, du quartier arty de Woodstock avec ses anciens ateliers et ses lofts, le tout couronné par le complexe rénové de la Old Biscuit Mill et le restaurant Test Kitchen. Autre attraction touristique : son port totalement réhabilité, très populaire chez les Capetoniens, qu’on appelle aujourd’hui le Victoria and Alfred 66 Waterfront. Et côté réhabilitation, on n’y est pas allé de main morte… Entrepôts réinvestis, capitainerie tout de rouge repeinte, hôtel de luxe néovictorien où descendent les stars, les chefs d’état de passage et accessoirement les groupes incentive, mais aussi un giga centre commercial haut de gamme proposant toutes les grandes marques internationales, un nombre hallucinant de restaurants et des bars, dont certains valent vraiment le détour comme ce bar à whisky, La Bascule, proposant plus de 500 marques… À cela, il faut ajouter une grande roue de fête foraine et des boutiques de souvenirs à la pelle, des groupes de jazz ou de musique sud-africaine de très grande qualité se produisant gratuitement dans l’amphithéâtre VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 Remontons Long Street, dans le quartier historique de City Bowl dominé par la célèbre montagne de la Table (1086 m) que l’on gravira plus tard grâce à un téléphérique rejoignant son sommet… Une bien belle rue, en vérité. Qui décline un je-ne-saisquoi de douceur de vivre, passant de la dentelle de fer forgé victorienne à de véritables chefs d’œuvre Art déco, une sorte de studio de cinéma largement exploité par les réalisateurs en mal d’années 30. Le tout est repeint avec beaucoup de goût dans des tons généralement assez légers et reconverti en d’innombrables boutiques de mode, d’antiquités, de cafés, de restaurants et de discothèques. On l’aura compris, le City Bowl est le quartier favori de la jeunesse internationale, qui investit des hôtels bon marché, sirote une bière locale et s’étourdit de musique jusqu’à très tard dans la nuit. Et puis, quartier historique oblige, ses rues, qui se coupent à angle droit, commencent aux marches du château de Bonne-Espérance, une forteresse érigée par les Hollandais au milieu du XVIIe siècle. Outre Greenmarket Square, investi par d’innombrables boutiques ambulantes où l’on fera provision de souvenirs africains – sculptures, tissus, bijoux, peaux de chèvres… – , ces rues accueillent à peu près tout ce que la ville compte de musées. VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 absolu, sans doute justifié par une totale absence de commerce. Mais aussi belle soit la ville, aussi attachante soit elle, on ne se rendra pas tout en bas de l’Afrique sans consacrer au moins une journée à ses environs proches, avec en figure de proue, le Cap de Bonne-Espérance, Cape of Good Hope comme on dit là-bas, à une centaine de kilomètres de là. Bien sûr, on empruntera la route de la côte sud ouest de la péninsule, celle qui s’accroche spectaculairement à la falaise en à pic sur l’océan et qui découvre au détour d’un virage en épingle tantôt une plage infinie enjolivée par d’aimables cabines de plage multicolores, tantôt un petit port de pêche où batifolent des otaries. Le long des plages flottent des drapeaux figurant des requins. Qui sont blancs dans le coin, et s’attablent volontiers à la planche de quelques appétissants surfeurs. On a aussi planté un peu partout des pancartes >>> En route vers le Cap de Bonne Espérance, Muizenberg, et sa plage de sable blanc à n’en plus finir, fut la première station balnéaire du pays, très fréquentée par la bourgeoisie capetonienne au tournant du XXe siècle. Mémoire de ce temps, des cabines de bain victoriennes tout en couleurs regardent les surfeurs dompter les eaux froides de l’océan. Pour les prévenir des requins, des guetteurs passent leur journée à lire la mer. 67 INCENTIVE GRAND ANGLE AFRIQUE DU SUD >>> priant de se méfier des babouins. Au début, cela fait rire et prendre quelques amusantes photos souvenirs. Et puis on comprend. Car ils sont aussi nombreux que culottés, ces babouins. Et prompts, et voleurs, et pas commodes avec ça… Gare aux vitres des voitures laissées entrouvertes, aux sacs posés à terre et aux paniers pique-nique. Mais ils ont des excuses. Car ce sont les hommes qui, par jeu, leur ont fourni de la nourriture, les habituant petit à petit à un marché facile de chips, de fruits, de hamburgers, de tout et n’importe quoi. On dit même que certains habitants de la presqu’île déménagent, lassés de devoir vivre enfermés à cause des descentes de babouins jusque dans leurs réfrigérateurs. Un peu plus loin, des manchots, pour leur part très plan-plan, remportent un franc succès. Ils sont là, sur la plage, droits dans leurs bottes, à se 1 — Depuis sa réhabilitation à la fin des années 80, le Victoria & Alfred Waterfront concentre ce que Cape Town a de mieux à offrir en matière de loisirs. La tour de l’Horloge, l’ancienne capitainerie devenue l’un des symboles de la ville, témoigne d’une activité portuaire intense à l’époque, soutenue par le commerce de l’or et des diamants. Aujourd’hui, bateaux de pêche et cargos continuent encore de s’y amarrer. 2 — Une colonie de manchots dandine sa nonchalance sur Boulders Beach, près du Cap de BonneEspérance. 3 — Tranquillement adossées à la colline de Signal Hill, les maisons chatoyantes de Bo-Kaap égaient ce quartier malais, plein de calme et de douceur. 68 1 2 chauffer aux rayons d’un soleil généreux. Ils sont ravissants, mais ont eux aussi leur petit défaut : ils sentent mauvais… Vraiment très mauvais. Et comme ils ne rechignent pas à s’aventurer, via les tuyaux d’évacuation des eaux de pluie, jusque dans les jardins, ils ne sont pas non plus dans les petits papiers des particuliers. “À la saison des amours, ils arrivent autour des maisons, font un potin du diable et se baignent dans les piscines, s’amuse Andrée Segall, guide professionnelle. Et c’est vrai qu’ils ne sentent pas le Guerlain ! C’est véritablement épouvantable. Du coup, les gens déménagent.” Et puis, l’herbe se fait rase, les arbres s’abstiennent, la lande se piquette de bruyères rose pâle… On atteint alors la réserve naturelle de la pointe sud de la péninsule, paradis des antilopes. D’un seul coup, on est au bout de l’Afrique avec ce rocher de Bonne Espérance très photogénique et d’ail- leurs mille fois photographié et qui, au passage n’est pas le dernier point de terre entre l’Afrique et le pôle Sud, puisqu’il s’agit, un peu plus loin du Cap des Anguilles. Mais c’est le plus spectaculaire, le plus beau, le plus émouvant aussi. Avec des à-pics démesurés, des flots rageurs battant la roche, des vents violents sifflant sur la paroi et des histoires de naufrages ou de fantômes n’ayant jamais pu s’extirper de ces brumes-là. AU BOUT DU BOUT DU CONTINENT Pour mieux profiter de la vue sur le rocher mythique, on a construit sur une colline qui le surplombe un restaurant que l’on peut en partie privatiser. Un parfait endroit pour une pause aussi festive que contemplative avant de prendre l’avion pour gagner la capitale économique du pays. Johannesburg donc, ou Jo’burg, ou encore Jozi 3 comme ses habitants la surnomment. “À mon sens, dit André Laget, directeur de l’agence réceptive Akilanga, deux jours et une nuit suffisent largement pour visiter la ville. Il y a évidemment quelques centres d’intérêt incontournables, le temps de revoir ses idées reçues, mais l’un dans l’autre, Jo’burg n’est ni Paris, ni Londres, ni New York. Même si la scène culturelle et artistique est ici en pleine mutation.” Et tout de go, avant un city tour et la découverte de lieux qu’on jurerait installés au bord de l’Hudson River, rendons-nous au musée de l’apartheid. Admirable, poignant, extraordinairement muséographié… des salles et des salles interactives remplies de photos, de textes ou de vidéos racontant les cauchemardesques années de discriminations raciales 1948-1994. On ne sort pas indemne de là, on garde généralement le silence, tant est forte l’émotion. En fait, on éprouve le besoin de retour- >>> VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 Décor très apprécié par les studios de cinéma, le City Bowl joue les stars d’autrefois. On comprend facilement pourquoi en regardant la grâce de ces maisons victoriennes, qui symbolisent à travers l’architecture l’empreinte des Britanniques sur la ville, succédant au style Cape Dutch, décliné par les Hollandais. Mais le quartier central de Cape Town, c’est aussi le rendez-vous de la jeunesse avec ses bistrots animés, ses boîtes de nuit branchées et ses hôtels bon marché. VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 69 INCENTIVE GRAND ANGLE AFRIQUE DU SUD >>> ner aussi vite que possible à la vraie vie. Et c’est ce qu’on va faire en prenant la direction du quartier de Braamfontein, quelques rues à angle droit, joliment arborées, en contrebas de Mandela Bridge. C’est bien simple, on se croirait dans l’East Village de New York dans les années 70-80 : ambiance bourgeois-bohème, jeunesse certaine d’un avenir radieux, vieux pubs sans âge, bistrots branchés… et même, le samedi matin, un marché, le Neighbourgoods Market, installé au premier étage d’un ancien parking années 50. Le processus de gentrification du quartier de Maboneng a été lancé par l’ouverture en 2009 du Arts on Main, complexe créatif tout en briques rouges rempli de galeries d’art, de boutiques de mode et d’espaces événementiels. SUR LE TOIT D’UN PARKING Bistrots branchés, convialité sophistiquée, esthétique moderne : un esprit d’avant-garde souffle sur le quartier de Braamfontein, alors que la jeunesse bohème commence à redécouvrir le centre-ville de Johannesburg. C’est au fond une ré-interprétation de la place de village, et tout ce qui va avec de potins colportés, mais aussi un lieu de convivialité où il est de bon ton de faire ses provisions de produits rares, chers et sophistiqués provenant de partout dans le monde, y compris de France. Pour y goûter, on s’installe à la bonne franquette à l’une ou l’autre des grandes tables de bois et on s’attaque, qui à une assiette d’huîtres arrosée de champagne, qui à un plateau de charcuterie et qui à un pancake nappé de miel… Le tout sur fond de jazz live. Comme elle est loin, l’ambiance du centre-ville… Car en fait de centre-ville, de downtown comme on dit en Amérique, à part quelques sièges sociaux de banques qui ont tenu bon, tout le monde est parti après la fin de l’apartheid. Du coup, ce ne sont pas des petits immeubles qui sont abandonnés, mais des gratte-ciel entiers, à l’image de l’ex-Carlton aux vitres tristement brisées. C’est certain, il faut aimer l’esthétique destroy pour se plaire ici. Et encore, la journée, il y a foule autour des marchands ambulants ou dans les habituelles boutiques de quartier qui ne roulent pas sur l’or. Mais la nuit : personne, personne, personne… Juste quelques silhouettes inquiétantes qu’on n’a guère envie de croiser et qu’on ne risquera pas de croiser, parce que la nuit, on ne se rendra tout simplement pas dans ces rues là. Il n’y a d’ailleurs rien à y faire, pour le moment en tout cas, car il est ici fortement question de réhabilitation. UN AIR DE NEW YORK DESTROY En attendant, on lui préférera le quartier de Maboneng Precinct, là encore un Soho New-Yorkais à ses débuts, un quartier en devenir de lofts et d’anciens entrepôts réinvestis par des stylistes de mode, des galeries de design, des ensembles de briques rouges fort décontractés à l’image du Arts on Main, organisé autour d’une cour intérieure accueillant boutique de mode, librairie et restaurant avec terrasse sous les oliviers… Les marques de luxe du monde entier raffolent de ces lieux là, plantés dans des rues improbables, mais qui, vu les plans d’urbanisme en cours, devraient très bientôt devenir le top du chic des Jobourgeois 1 2 ne saurait tarder d’héberger créatifs et webmasters en vogue, pour déboucher sur un immense espace, le Randlords, pourvu d’un bar gigantesque, une sorte de loft à ciel ouvert pouvant accueillir jusqu’à 450 personnes les soirs de fête. Avec orchestre, il va sans dire. “Nous organisons des cocktails bien sûr, dit Trevor Latimer, mais aussi des dîners assis hyper stylés, des défilés de mode et des événements corporate. Le décor est ‘urban-creative’ , mais c’est surtout la vue sublime sur un Jo’burg inattendu qui fait son succès.” Et c’est vrai que les haubans du pont Mandela, illuminés tour à tour aux couleurs de la rainbow nation – bleu, vert, blanc, noir, jaune, rouge –, que les gratte-ciel au loin du nouveau quartier des affaires de Sandton, que les trains qui fendent la nuit au pied du building, que ces rubans de phares de voitures qui s’étirent en rouge ou en blanc le long des avenues, et ces millions d’ampoules qui 3 1 — Jeune avocat, Gandhi passa une vingtaine d’années en Afrique du Sud. Simple et restée dans son jus, la maison qu’il occupa à Johannesburg – privatisable aujourd’hui – dégage une vraie sérénité. 2 — Un air de jazz live accompagne les badauds bobos venus faire leurs courses au neighbourgoods market, incontournable rendezvous des samedis de Braamfontein. à la pointe de la modernité. Ce qui les changera sensiblement de ces innombrables shopping malls aseptisés, sans grande recherche architecturale – voire carrément kitsch pour ne citer que l’inénarrable Montecasino, un essai de reconstitution de village toscan – , tous bourrés de caméras et de vigiles, et qui font les beaux week-ends désœuvrés de cette drôle de ville qui, sur le fond, ressemble à une immense banlieue verte. Il suffit de prendre un peu de hauteur pour s’en apercevoir : des arbres et des toits, des toits et encore des arbres, les gratte-ciel du downtown et encore des arbres… C’est fou ce que cette mégalopole aime la verdure… On en prend vraiment conscience en passant le pont pour s’en retourner au coucher du soleil dans le quartier de Braamfontein. Alors, on grimpe jusqu’au 22e étage d’un immeuble qui 1 — Plus haute tour d’Asie du Sud-Est avec ses 247 mètres, la State Tower, sans avoir l’élégance des gratte-ciel de Hong Knéanmoins la réalité économique d’un pays ambitieux. 2 — Des designers belges, des maîtres du bronze et des ébénistes thaïs : la création “sans fronrontière” est à l’honneur au showroom à l’esprit loft – et privatisable – de Cross-Cultural Créations.tière” est à l’honneur au showroom à l’esprit loft – et privatisable – de CrossCultural Créations. 3 — Partie de Bruxelles et évidemment présente à Bangkok, l’enseigne de restauration Blue Elephant, lancée par l’antiquaire Karl Steppé et son épouse Khun Nooror Somany, est devenue l’ambassadrice de la cuisine royale thaïe de par le monde. 70 VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 trouent le noir des espaces arborés… c’est vrai que devant un tel décor, cette toile de fond hyper contemporaine, on se demande bien où est l’Afrique faite de savanes bourrées d’animaux ; celle qui fait rêver les grands enfants et que l’on voit généralement sur les affiches des métros de toutes les capitales du monde. TOUS LES ANIMAUX DU MONDE Elle n’est pourtant pas si loin, cette Afrique des origines, à peine à trois heures de bus de cette urbanité en devenir, dans cette réserve de Marakele National Park, un paradis de 100 000 ha au pied des falaises rouges du Waterberg, la plus ancienne montagne du monde qui s’offre en bouquet final d’une opération réussie. Et ça commence dès l’arrivée dans la réserve. On laisse à la barrière >>> 3 — Retraite design construite à l’origine pour Douw Steyn, capitaine d’industrie local, le Saxon est le symbole de l’élégance à l’africaine, mêlant art ethnique et luxe discret. L’hôtel est devenu une institution, notamment parce que Nelson Mandela y séjourna à sa sortie de prison, trouvant l’inspiration pour y écrire sa biographie A long walk to freedom. 71 INCENTIVE GRAND ANGLE AFRIQUE DU SUD >>> de protection les moyens de transport “civils” pour grimper dans des land rovers adaptées et rejoindre en 20 minutes le lodge qu’on ne peut imaginer autrement que construit dans un style Out of Africa. En attendant, le festival “animaux sauvages” commence tout de go avec des impalas – plus tard, on en verra tant et tant qu’on finira presque par les ignorer – qui cavalent devant le pare-choc de la puissante voiture de brousse. ARISTOCRATIE DE LA SAVANE Les gnous et les phacochères, nettement plus timides, ne sont aperçus que de loin. Mais ils ne perdent rien pour attendre, on les retrouvera eux aussi un peu partout. Au détour du chemin de sable, perché au sommet d’une butte et bien caché dans la végétation : le lodge de Marataba, c'est-à-dire une unité centrale et une quinzaine de bungalows. Un enchantement africa-chic, des objets ethniques détournés, des murs de pierre sèche, un restaurant surplombant une petite rivière où viennent s’abreuver les éléphants, des lanternes accrochées le soir dans les arbres, un feu de camp allumé sur l’esplanade de gazon et une cuisine divine menée par Jesse Wollenschlaeger, une chef qui a fait ses classes au Cap et en ANDRÉ LAGET, directeur de l’agence réceptive Akilanga DMC & Events France. Les bungalows, mi-durs, mi-toile, sont à l’image de l’unité centrale : sophistiqués, mais sans préciosité, juste ce qu’il faut d’urbanité pour ne point jurer avec l’environnement. Trois jours et deux nuits de total dépaysement, de bruits exclusivement naturels, pour se remettre de la richesse du voyage avant le retour. Et quels jours ! Sauf intempéries, ce qui est rarissime l’été, le programme est immuable. On attaque le premier safari au lever du soleil, car c’est là que les animaux sont les plus actifs, puis, de retour au lodge dans une matinée déjà bien avancée, on se retrouve autour d’un petit déjeuner pantagruélique. Discussions de salon autour de la faune sauvage, déjeuner, sieste ou farniente au bord de la petite piscine, et en fin d’après midi, second safari au coucher du soleil. Le lendemain, idem. Entre Les montagnes rouges du Waterberg, doyen des massifs qui porte beau ses deux milliards d’années, dominent une savane aux herbes rases ponctuée de conifères et de fougères arborecentes. Protégée par l’Unesco, cette réserve de biosphère abrite le Marakele National Park, paradis des big five et de toute la faune africaine. RENCONTRE “NOUS PROPOSONS DES ANGLES DIFFÉRENTS, TRÈS CONTEMPORAINS” L’Afrique du Sud, c’est vaste… Quels sont les spots choisis par les groupes ? André Laget – Johannesburg n’est pas vraiment une destination en elle–même. C’est pour cela que nous proposons des combinés tels Johannesburg-Sun City, ou Johannesburg et une réserve animalière, etc. Nous essayons de proposer des angles différents, quelque chose de très urbain, très contemporain, comme la privatisation de lieux réhabilités, d’anciennes fabriques par exemple. Nous faisons venir des groupes de musique, nous organisons des défilés de mode… Mais nous n’oublions pas les incontournables tels le musée de l’apartheid ou une visite guidée de Soweto. Et puis, bien sûr, il y a Cape Town, son glamour et son côté historique. Toujours un très gros succès. 72 Du côté du Cap, précisément, quel est le programme type ? A. L. – C’est le plus grand terrain de jeux qui soit. Il y a de la culture, de l’histoire, de la nature, de la mer, de la montagne… Il y a aussi le Cap de Bonne-Espérance, les pingouins, les phoques… On propose des choses interactives. Par exemple, sur la route des vins parcourue en voitures de collection, on fait chercher aux participants des fromages, de l’huile d’olive, etc. Ensuite, ils se mettent aux fourneaux et cuisinent avec un chef africain. Combien de groupes avez-vous accueillis l’an dernier ? A. L. – Une dizaine de groupes, une petite année donc. Les bonnes, nous en faisons une trentaine. En revanche, l’année 2013 ne s’annonce pas si mal. Quelle est la durée moyenne d’un séjour incentive ? A. L. – En général, c’est cinq jours. Et sans décalage horaire. Ce qui est un réel avantage. Au milieu de la brousse, le lodge Marataba joue la carte africa-chic, sans ostentation, ayant le bon goût de se mettre en retrait du spectacle naturel qui se joue à sa porte. temps, on aura chargé ses cartes mémoire de centaines de photos, car, il faut bien le dire, la faune est particulièrement dense dans cette réserve. Et pas franchement bégueule puisqu’elle se montre assez facilement. Il y a de tout, les big five évidemment, c'est-à-dire les lions, léopards, éléphants, rhinocéros et buffles qui constituent l’aristocratie de la savane, mais aussi des girafes, des phacochères, des gnous, des impalas, des zèbres, des hyènes, des autruches, des singes… En gros, à peu près tout ce que le continent compte d’animaux sauvages. Ah, non ! il n’y a pas de crocodile. Mais ça, qui s’en plaindra ? Cela dit, sous des dehors de grand calme, entre les hautes herbes ondulant au vent, sous ces arbres solitaires poussés au petit bonheur la chance et qui font les beaux paysages d’Afrique, la vie n’est pas si simple. C’est à qui croquera qui, qui croquera qui, qui croquera qui… Il n’y a guère que l’éléphant qui n’ait pas de prédateur. Et encore, lorsqu’il est adulte. Mais c’est alors que ses belles défenses font les convoitises des hommes. Noirs ou blancs de peau. Il n’y a pas de différence. Mais ça, on le savait déjà. VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 Des gnous grégaires se suivent à la queue leu leu vers le plus proche point d’eau, troublant à peine la marche sur talons hauts d’une girafe indifférente ; un éléphant regarde le train des visiteurs en 4x4 sans trop se soucier de cette présence familière ; un lion sortant de sa sieste digestive et de graciles impalas peu au fait d’être surnommés “Mc Do” par leurs prédateurs, tant la proie est facile : le festival des animaux conclut merveilleusement une opération au bout de l’Afrique. VOYAGES D’AFFAIRES — N°136 73