Edwin Buzz Aldrin _ Histoire d`un Moonwalker par Jean Segura

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Edwin Buzz Aldrin _ Histoire d`un Moonwalker par Jean Segura
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Edwin "Buzz" ALDRIN
Histoire d'un Moonwalker
par Jean Segura
Buzz Aldrin dans les années 2000
Edwin Aldrin dans les années 1950
Edwin "Buzz" Aldrin, le 20 juillet 1969
© NASA
Samedi 18 juillet 2009
L'aventure fascine encore : il y a quarante ans, deux
hommes ont foulé le sol inviolé de la Lune : Neil
Armstrong et Buzz Aldrin. Si le premier, lassé des
honneurs, coule une discrète retraite dans son ranch de
l'Ohio, le second parcours encore la Terre pour faire
revivre cet instant unique dans l'histoire de l'humanité.
Portrait d'un homme qui a décroché la Lune.
Insigne de la mission Gemini 12
Mer de la Tranquillité, 20 juillet 1969 à 21h56, heure de Houston
(21 juillet, 3h56 à Paris): « C'est un petit pas pour un homme,
mais un bond de géant pour l'humanité ». Au moment où Neil
Armstrong prononce ces mots, à trois mètres au-dessus de lui, un
autre homme attend calmement, occupé à surveiller son compagnon
depuis la cabine d'Eagle, module lunaire (LM) de la mission
Apollo 11. Cette attente ne dure que 19 minutes.
Insigne de la mission Apollo 11
Eclaté de la capsule Gemini pouvant
embarquer deux astronautes
Le module lunaire (LM) Eagle
commence sa descente sur le sol.
La poussière de lune s'écrase sous
le pied des premiers hommes
Buzz Aldrin s'entrainant dans une
piscine aux sorties extravéhiculaire dans l'espace (EVA)
avant le lancement de Gemini 12
20 juillet 1969 : L'Eagle a aluni sur la Mer de Tranquillité et
Neil Armstrong foule le sol lunaire depuis déjà 19 minutes. Buzz
Aldrin s'apprête à le rejoindre.
Et pourtant, ce sont ces 19 petites minutes qui sépareront à
jamais Edwin « Buzz » Aldrin d'une gloire plus grande encore que
celle qu'il a vécue : « n'être que le deuxième homme à avoir posé
le pied sur la Lune ! ». Ce sentiment de gloire en demi-teinte,
Aldrin doit l'éprouver à chaque fois qu'il regarde la fameuse
photo de « l'homme sur la Lune ». Tenu par l'urgence des tâches à
accomplir pendant cette extraordinaire mission, Armstrong garde
sur lui l' Hasselblad chargé d'une pellicule 70 mm, et c'est
pourquoi on ne verra qu'Aldrin fouler le sol lunaire face à
l'objectif. Il est vrai que revêtus du même scaphandre blanc avec
le visage dissimulé derrière une visière, les deux hommes
semblent des jumeaux. Sur la visière protectrice recouverte d'une
mince couche d'or du casque d'Aldrin, seule le reflet de la
silhouette déformée du commandant de bord d'Apollo 11 se devine.
Alors sur cette image, symbolique avant tout, que l'on y
reconnaisse l'un ou l'autre, quelle importance ? Un détail qui a
n'a pas dû laisser Armstrong indifférent depuis. Avoir été le
premier homme sur la Lune, oui ! Mais sans en avoir conservé une
preuve visuelle aussi éclatante que cette image (celle de Buzz
Aldrin) que le monde entier va découvrir à la une des magazines
en juillet 1969 ; et qui, depuis quarante ans, continue de faire
le tour de la Terre, reproduite à des millions d'exemplaires dans
les livres, cartes postales, affiches, promotions publicitaires,
etc. Et pourtant, cette image n'y fera rien, car c'est le nom
d'Armstrong qui restera dans les mémoires comme celui d'un
Christophe Colomb du XXe siècle.
Buzz Aldrin et Jim Lovell,
accueillis sur un porte-avions de
l'US Navy, juste après l'amerissage
de la capusle Gemini 12
La technique des rendez-vous
orbitaux, développée par le PhD du
MIT Buzz Aldrin, et ici appliquée à
Est-ce de cette frustration - de ne pas avoir été le premier
homme sur la Lune - qu'Aldrin a puisé l'infatigable énergie qui
l'anime encore à 79 ans pour promouvoir partout où il va les
voyages spatiaux habités ? Passion qui l'a poussé à écrire
plusieurs livres dont une autobiographie, Return to Earth, en
1973 et Men From Earth en 1989, qui parle de son extraordinaire
odyssée et du rôle que l'Amérique doit encore jouer dans la
conquête spatiale. En 1996, il publie un roman de science
fiction, Encounter With Tiber,, écrit avec John Barnes dans
lequel il « envoie » des colons à la rencontre d'habitants d'une
autre planète ? Manière de s'évader une fois de plus de la terre.
Avec le même John Barnes, il poursuit avec The Return en 2000. Il
s'adresse aussi aux enfants avec deux livres illustrés par
Wendell Minor : Reaching the Moon en 2005 et Look at the Stars en
2009. Enfin il vient de publier en juin 2009 un dernier livre de
mémoires : Magnificient Desolation - The Long Road Home from the
Moon, avec Ken Abraham comme co-auteur.
Armstrong, Collins et Aldrin posant
devant la fusée Saturn V (à gauche)
qui va mettre leur vaisseau Apollo
11 en orbite autour de la terre.
Fusée Saturn V sur son pas de tir à
Cap Canaveral
la mission Gemini 7 Gemini 6
Armstrong, Aldrin et Collins au
moment de leur embarquement
Edwin Aldrin Jr dans les années 1950... déjà l'étoffe des héros.
Survol de l'Egypte et de la Mer
Rouge par Gemini 12
UN MILITANT DES VOLS HABITÉS
Aujourd'hui le Colonel Buzz Aldrin, 1,78 m, 75 kg, est un
monsieur toujours athlétique aux cheveux blancs, le regard bleu
minéral et une vague ressemblance avec Kirk Douglas, la fossette
et la tignasse en moins. On a beaucoup parlé de ses six années de
dépression alcoolique après qu'il eut quitté la NASA en 1971 et
l'US Air Force en 1972, de son divorce avec sa première femme
Joan (dont il a eu deux fils et une fille), et enfin de ses cures
de désintoxication. Mais depuis 31 ans, Aldrin est redevenu un
homme sain qui fait du ski et de la plongée sous marine. Son
esprit est toujours aussi riche et, bien que croyant lui-même,
s'il se veut un prosélyte, ce n'est pas en référence à Jésus
comme ses condisciples Charles Duke, né en 1935 (Apollo 16) ou le
défunt James Irwin (1930-1991, Apollo 15), mais celui de la
conquête spatiale. Il vit aujourd'hui à Los Angeles avec sa
deuxième femme, Loïs Driggs Cannon, qui l'accompagne dans chacun
de ses voyages.
Buzz Aldrin et Jim Lovell posant
dans leur capsule Gemini - Photo
officielle de la mission Gemini 12
Buzz Aldrin s'entrainant dans un
avion à gravité zéro aux sorties
extra-véhiculaire dans l'espace
(EVA) avant le lancement de Gemini
12
Car contrairement à Armstrong qui coule une discrète retraite
dans sa ferme de l'Ohio, Aldrin se montre partout, donnant des
conférences, notamment dans le cadre de la National Space
Society, passant à la télévision, présidant ou invité d'honneur
de maintes manifestations comme lors du Festival du Film Jules
Verne à Paris ou le Salon du Bourget, tournant aussi dans des
spots publicitaires, comme récemment celui de Louis Vuitton avec
son vieux camarade Jim Lovell. Lorsque l'ancien astronaute
d'Apollo 11 (dont le logo à l'Aigle orne encore les cartes de
visite) prend la parole devant un parterre admiratif, c'est pour
rappeler que l'aventure de l'homme sur la Lune doit être
poursuivie... et qu'il doit continuer à explorer l'espace. Un
message qu'il martèle depuis quarante ans, et qui commence à
porter ses fruits puisque la NASA prévoit maintenant de renvoyer
des hommes dans la Lune vers 2020. Deux sujets l'habitent plus
particulièrement : le voyage sur Mars et le tourisme spatial. Il
est par exemple l'inventeur du concept de Cycler, un dispositif
perpétuel de navette qui passerait successivement en orbite
autour de la Terre puis autour de Mars et permettrait de faire en
permanence des voyages vers la planète rouge. En 1993, il reçoit
un brevet pour la conception d'une station spatiale.
Décollage de la Fusée Saturn V sur
son pas de tir à Cap Canaveral le
16 juillet 1969 : les trois
astronautes de la mission Apollo
11sont en route vers la Lune
Neil Armstrong et Buzz Aldrin sur
la Lune le 20 juillet 1969. Photo
prise depuis le LM.
Plus récemment il a été à l'origine de la ShareSpace Foundation,
une organisation qui veut promouvoir le concept de tourisme dans
l'espace (voir ci-dessous). Alors Aldrin, « extra-terrestre »
égaré ou nostalgique de « l'étoffe des héros » dont le roman
éponyme de Tom Wolfe et le film de Philip Kaufman en 1983 ont
fait revivre l'épopée ? Une étoffe qui flottait certainement sur
le berceau d'Edwin Eugene Aldrin Junior, alias « Buzz », né le 20
janvier 1930 à Montclair (New Jersey) près de New York. Il est le
fils d'un autre héros, Edwin Eugene Aldrin Senior, colonel de
l'US Air Force, as des débuts de l'aviation qui avait eu comme
maître l'inventeur de fusées Robert Goddard, et fréquenté des
pionniers comme Orville Wright ou Charles Lindbergh, puis le
général Billy Mitchell, l'un des pères spirituels de l'US Air
Force dont il a été l'assistant. Sa mère, qui porte le nom
prédestiné de Marion Moon, ne verra jamais son fils sur l'astre
argenté et disparaît en 1968, un an avant l'aventure d'Apollo 11.
Mais comment Edwin Jr est-il devenu Buzz ?
Alors qu'ils étaient enfants, Fay, la plus jeune des deux soeurs
d'Edwin Jr, persiste à appeler son frère « Buzzer » (ayant du mal
à prononcer « brother »), puis « Buzz », un surnom qui lui plait,
et le distingue sans doute de son père Edwin Sr, puisqu'il le
transformera légalement en prénom en 1979. Et le gamin Buzz va
Armtrong, Collins et Aldrin dans la
très vite gagner ses ailes. Il n'a en effet que trois ans,
lorsqu'Aldrin père lui fait faire un long et premier voyage
jusqu'à Miami, lui-même aux commandes d'un monomoteur Lockheed
Vega. Sa voie semble alors tracée et s'engouffrant dans le
sillage de son pilote de père, Buzz incorpore des années après
l'Académie militaire de West Point. Il en sort troisième de sa
promotion en 1951 et choisit la carrière de pilote de chasse.
Pendant la guerre de Corée, il exécute 66 missions aux commandes
d'un F-86 Sabrejet et s'y distingue en abattant deux Mig 15.
Equipage de Gemini 12 dans la salle
blanche au moment de l'embarquement
capsule Apollo 11 au sol.
Puis, il poursuit sa carrière militaire en Allemagne où il fait
la connaissance d'Edward White (1930-1967), futur astronaute des
missions Gemini 4 et Apollo 1. White, sera, à bord de la capsule
Gemini 4, du 3 au 7 juin 1965, le premier astronaute américain à
accomplir une marche extra-véhiculaire dans l'espace (EVA) en
orbite autour de la terre, soit 77 jours après le Russe Leonov ;
les Soviétiques ayant encore de l'avance sur les Américains dans
la course à la conquête spatiale (notamment après les réussites
du lancement de Spoutnik le 4 octobre 1957, et la mise en orbite
du premier homme dans l'espace Youri Gagarine le 12 avril 1961).
White sera aussi l'une des premières victimes de cette course
effrénée lorsque, le 27 janvier 1967, il meurt brûlé lors d'un
essai au sol d'Apollo 1 aux côtés de ses co-équipiers Virgil
"Gus" Grissom et Roger Chaffee.
20 juillet 1969 : L'Eagle s'est
posé depuis 19 minutes. Buzz Aldrin
continue sa descente vers le sol
lunaire. © NASA
Fusée Titan au décollage pour la
mise en orbite la capsule Gemini 12
Le jeune officier Edwin Aldrin Jr, as de l'US Air Force.
Aldrin à l'entraînement devant une
maquette terrestre du module
lunaire d'Apollo 11.
L'ANTICHAMBRE DE LA LUNE
Capsule Gemini 12 en orbite autour
de la terre
C'est au contact de White en Allemagne qu'Aldrin
commence à penser rallier le programme spatial lancé
par la NASA. A la même époque, le 9 avril 1959, la
presse et le monde entier sont conviés à la
présentation
des
sept
astronautes
du
programme
Mercury qui va durer de 1959 à 1963. On y découvre
notamment Alan Shepard, le déjà nommé Virgil « Gus »
Grissom, John Glenn ou Gordon Cooper. Un autre homme
fait partie du groupe des Sept, c'est Donald « Deke »
Slayton (1924-1993) : cloué au sol pour des raisons
de santé, il deviendra responsable des astronautes
pour les programmes Gemini et Apollo et , à ce titre
, jouera un rôle essentiel dans la destinée de Buzz
Aldrin. Le 25 mai 1961, lorsque le président John F.
Kennedy prononce son second discours sur l'Etat de
l'Union qui donne le coup d'envoi à la conquête de la
Lune, Aldrin Jr perfectionne ses connaissances dans
le domaine spatial. Etudiant au MIT (Massachussetts
Institute of Technology) il prépare une thèse de
doctorat intitulée « Guidance for Manned Orbital
Rendez-vous » (Guide pour les rendez-vous orbitaux
habités). Or ce sujet, qu'il soutient en 1963, va
retenir l'attention des scientifiques de la NASA. Les
Aldrin sur la Lune saluant le
drapeau américain, photograzphié
par Neil Armstrong..
Buzz Aldrin lors d'une sortie
extra-véhiculaire dans l'espace
(EVA) pendant la mission Gemini 12
en nombre 1966.
Buzz Aldrin lors d'une sortie
extra-véhiculaire dans l'espace
(EVA) pendant la mission Gemini 12
en novembre 1966.
Buzz Aldrin lors d'une sortie
extra-véhiculaire dans l'espace
(EVA) pendant la mission Gemini 12
en novembre 1966.
idées d'Aldrin y font leur chemin et sa contribution
est officiellement reconnue dans un mémorandum rédigé
par Chris Kraft , ingénieur né en 1924, directeur des
six vols du programme Mercury et cité dans le livre
Premiers sur la Lune écrit au lendemain de la mission
Apollo 11. Daté du 4 avril 1966, ce mémorandum suit
de quatre mois le premier rendez-vous en orbite
réalisé en décembre 1965 entre les équipages des
vaisseaux Gemini 6 et Gemini 7, et de trois semaines
le premier arrimage réussi en mars 1966 par Neil
Armstrong et David Scott entre leur vaisseau Gemini 8
et la fusée sans pilote Agena. Voici ce que Kraft y
écrit : « Il serait difficile de trouver une personne
ayant apporté une contribution plus importante que le
major Aldrin dans les domaines des activités de
l'équipage et de la définition des conditions
auxquelles
doivent
répondre
les
systèmes
de
navigation. (...) Dans les premiers stades du
planning des missions de rendez-vous du programme
Gemini, le major Aldrin a, presque seul, conçu et
fait accepter certains concepts fondamentaux qui
furent incorporés au programme, et sans lesquels la
probabilité d'un succès de la mission eût été
indubitablement et considérablement réduite. »(...)
etc.
Quelques années avant de recevoir ce satisfecit,
Aldrin pose sa candidature à la NASA, et en octobre
1963, il est retenu par Deke Slayton avec treize
autres de ses congénères pour faire partie du
troisième groupe des astronautes. Michæl Collins (lui
aussi né en 1930, futur pilote du module de commande
d'Apollo 11) fait également partie de cette nouvelle
classe. Quant à Neil Armstrong (futur commandant de
la même mission), il a déjà été recruté dans le
deuxième groupe avec des hommes comme le déjà cité Ed
White, Frank Borman, Charles « Pete » Conrad ou James
Lovell. A l'époque où Aldrin devient officiellement
astronaute en 1963, le programme Mercury est en train
de s'achever et l'on prépare déjà la seconde étape
dans la course que l'Amérique a engagé pour arriver
sur la Lune avant les Russes. Intitulé « Gemini », ce
nouveau programme (douze missions dont dix habitées)
qui va durer de 1963 à 1966, est prévu pour emporter
deux hommes dans un même vaisseau, et doit permettre
de préparer les rendez-vous spatiaux en orbite. Or à
cette époque, Aldrin, seul astronaute dont le nom est
suivi du titre de Ph.D (docteur), se fait taquiner
par ses collègues du centre spatial de Houston qui
l'affublent du sobriquet de « Dr Rendezvous ». Car
Buzz donne volontiers à qui veut l'écouter un cours
sur les questions de mécanique orbitale ; et aucun ne
peut le supplanter sur ce terrain-là. Revers de la
médaille, cela lui donne aussi le sentiment d'être un
marginal dans le corps des astronautes, dominé par
des pilotes d'essais comme Armstrong, marines ou as
de l'aéronavale comme Alan Shepard. Certains d'entre
eux poussent même la raillerie en déclarant qu'il
n'est pas nécessaire d'être un théoricien pour savoir
voler. Mais bientôt le « Docteur Buzz » va faire ses
preuves.
Aldrin dans la cabine du module
lunaire Eagle.
Aldrin sur la Lune devant le LM
Eagle, photograzphié par Neil
Armstrong.
Aldrin et Collins avec le président
Richard Nixon.
Buzz Aldrin lors d'une sortie
extra-véhiculaire dans l'espace
(EVA) pendant la mission Gemini 12
Aldrin sur la Lune disposant un
collecteur de vent solaire lors de
la mission Apollo 11.
First on the Moon - A voyage with
Neil Armstrong Michael Collins -
Edwin E. Aldrin Jr - With Gene
Farmer & Dora Jane Hamblin,
Epilogue : Arthur Clarke. Ed.
Michael Joseph, London, 1970
Parade donnée en l'honneur des
astronautes d'Apollo 11, premiers
hommes sur la Lune.
Premiers sur la Lune avec Neil
Armstrong Michael Collins - Edwin
E. Aldrin Jr - Collectif, Epilogue
: Arthur Clarke. Ed. Robert
Laffont, Paris, 1970
Magnificient Desolation - The Long
Road Home from the Moon - Buzz
Aldrin & Ken Abraham -Ed Harmony 2009
&
Version Audio Patrick Egan (reader)
- Audiobook, CD Audio - Random
House Audio ,NY,2009.
Edwin Aldrin Jr, astronaute, pilote du module lunaire
de la mission Apollo 11
RECORD DE LA MARCHE DANS L'ESPACE
C'est au cours de la mission Gemini 12 (entre le 11
et le 15 novembre 1966) qu'Aldrin va prendre son
baptême de l'espace en étant le cinquième américain à
faire une sortie extra-véhiculaire (EVA), une mission
ô combien périlleuse qui sera aussi la plus longue de
toutes (cinq heures). À l'exception de White qui n'a
fait qu'une courte promenade lors de la mission
Gemini 4 en juin 1965, tous les autres astronautes
qui ont précédé Aldrin dans le vide spatial (Cernan,
Collins et Gordon respectivement sur Gemini 9, 10 et
11) ont d'énormes difficultés à se déplacer en
apesanteur hors de la cabine ; ce principalement à
cause de mauvaises prises pour les pieds et pour les
mains le long de la paroi externe de la coque du
vaisseau. En juin 1966, Gene Cernan va s'épuiser
pendant près d'une heure à franchir la distance de
cinq mètres dans le vide. Ruisselant de sueur et la
visière de son casque complètement embuée, il va
mettre sa vie en danger, risquant de faire échouer
complètement
la
mission
Gemini
9.
Nourri
de
l'expérience négative de ses prédécesseurs livrés aux
démons du vide spatial, Aldrin emporte plusieurs
dispositifs spéciaux tels que des cordons pour
poignets, des sabots et des prises portables qu'il
peut appliquer sur les parois du vaisseau, afin de
maîtriser au mieux les mouvements de son corps. Grâce
à cet appareillage et au chronométrage précis des
tâches à accomplir, Aldrin va exécuter trois sorties
EVA avec aisance tout en réduisant au maximum ses
efforts physiques, contribuant en beauté au succès de
la dernière des missions Gemini.
Mais le programme Apollo qui leur succède va offrir à
Aldrin une occasion encore plus spectaculaire de se
distinguer. Après ce bel exploit, il reste à Aldrin
moins de trois ans pour connaître, comme il le
raconte lui-même « ce qui va influencer tout le reste
de mon existence ». Après l'incendie au sol qui va
coûter la vie à l'équipage d'Apollo 1 pendant une
opération d'entraînement le 27 janvier 1967, il faut
plus d'un an avant que les missions habitées ne
reprennent. La mise en orbite et le retour sur terre
réussi d'Apollo 7 (avec trois hommes à son bord) en
octobre 1968 marque le vrai début de la dernière
ligne droite qui attend techniciens et astronautes de
la NASA : un peu plus de neuf mois les séparent
encore de l'astre tant convoité. Car le succès
d'Apollo 8 en décembre 1968, premier vaisseau à être
passé derrière la Lune, redonne confiance aux
responsables de la NASA qui décident d'accélérer le
mouvement. En janvier 1969, Deke Slayton convoque les
trois hommes désignés pour constituer l'équipage
Return to Earth - Buzz Aldrin &
Wayne Warga- Random House,NY,1973.
Men From Earth - Buzz Aldrin &
Malcolm McConnell- Bantam Books,
NY, 1989
d'Apollo 11 : si les missions 9 et 10 réussissent,
c'est à Armstrong (commandant de la mission) et à
Aldrin (pilote du module lunaire) que revient la
charge d'aller poser le LM sur la Lune et de revenir
sur
Terre
avec
Collins
(pilote
du
module
de
commande). Déjà doublures de l'équipage d'Apollo 8
(Borman, Lovell et Anders), Armstrong, Aldrin et
Collins travaillent déjà ensemble depuis de longs
mois : enfermés dans des simulateurs, ils passent
quelquefois de 10 à 14 heures par jour à répéter des
centaines de manoeuvres.
Encounter with Tiber - Buzz Aldrin
& John Barnes- Warner Books,
NY,1996.
Reaching the Moon - Buzz Aldrin Illustratrions Wendell Minor.
Harper Collins, 2005
Armstrong, Collins et Aldrin : photo officielle de
l'équipage d'Apollo 11
QUI SERA LE PREMIER ?
Look at the Stars - Buzz Aldrin
Illustratrions Wendell Minor.
Putnam Juvenile, 2009
On a longtemps glosé sur les raisons qui ont conduit
les huiles de la NASA (ou plus haut encore) à choisir
un homme plutôt qu'un autre pour une mission d'une
telle valeur symbolique. En réalité, c'est le hasard
qui a réuni Armstrong, Aldrin et Collins et il semble
que le choix de ces astronautes ait été approuvé,
comme ils s'en expliquent eux-mêmes dans leur livre
Premiers sur la Lune, « de la façon la plus
routinière ». Il aurait en fait suffi qu'une des
missions précédant celle d'Apollo 11 échoue pour que
la tâche d'aller se poser sur la Lune soit confiée
l'équipage suivant. Les critères de sélection de
Slayton étaient les mêmes pour tous les équipages
comme il le raconte dans son livre Ils voulaient la
Lune : « des hommes qui s'entendent bien, aux
compétences complémentaires et capables de former une
équipe soudée ». Des qualités, il en fallait :
Armstrong, un pilote hors pair qui avait réussi à
redresser son vaisseau d'une rotation folle qui
aurait pu être fatale à l'équipage de Gemini 8 en
mars
1966 ;
et
Aldrin,
un
spécialiste
de
la
navigation céleste qui s'était de surcroît montré
d'une grande habileté pour résoudre les problèmes de
marche dans l'espace pendant la mission Gemini 12.
D'une personnalité plus discrète, Collins, admiratif
de ses deux compagnons, était également un excellent
pilote et avait lui aussi une expérience de sortie
EVA, sur Gemini 10 (18 au 21 juillet 1966).
Restait à savoir qui allait être le premier sur la
Lune tandis que Collins resterait en orbite au-dessus
de leurs têtes : le commandant Armstrong ou bien le
pilote du module lunaire Aldrin ? « La notion fort
répandue selon laquelle Armstrong fut choisi pour
commander la mission d'alunissage parce qu'il était
un civil (Armstrong était pilote d'essai et Aldrin,
pilote de l'US Air Force, NDLR) est totalement dénuée
de fondement » diront les astronautes dans leur livre
Premiers sur la Lune publié un an plus tard. Une
théorie qui a pourtant la vie dure, puisqu'elle
continue quarante ans après d'être ressassée par les
médias. Théorie ou légende ? Si on avait dû respecter
le même protocole que lors des missions Gemini,
pendant lesquelles le commandant devait rester à bord
pour piloter le vaisseau tandis que le co-pilote
exécutait les EVA, alors Aldrin - d'ailleurs déjà
familier du vide spatial - aurait dû logiquement
sortir le premier ; ce d'autant qu'Armstrong n'était
pas un fanatique des exercices physiques. D'un autre
côté, une fois le LM posé (par Armstrong) sur le sol
ferme de la Lune, il serait comme un bateau à quai et
n'exigerait
plus
aucune
manoeuvre
particulière
jusqu'au
décollage.
En
outre,
compte
tenu
de
l'encombrement des combinaisons pressurisées (avec le
The Return - Buzz Aldrin & John
Barnes- Ed. Forge, NY,2000.
casque et l'élément dorsal de survie) que les deux
astronautes devaient porter dans la cabine de
l'Eagle, espace relativement exigu, l'avantage serait
à celui qui se trouve le plus près du haillon de
sortie, en l'occurrence Armstrong. Haillon ou pas,
c'est finalement Slayton qui leur va annoncer la
décision approuvée en haut lieu, comme le raconte
Andrew Chaikin dans son livre A Man on the Moon : «
Armstrong, en tant que commandant de la mission
Apollo 11 et astronaute vétéran (membre du deuxième
groupe), devrait être le premier homme à poser le
pied sur la Lune » . Cette décision aura plus tard
des conséquences psychologiques sur Aldrin : dans son
autobiographie Return to Earth, l'astronaute d'Apollo
11 raconte comment son intransigeant de père Aldrin
Senior n'avait pas admis qu'il ne fût pas choisi lui,
son fils, pour être le premier sur la Lune.
Buzz Aldrin dans les années 2000
ALDRIN VERS SA QUETE DE L'ESPACE
Le 20 juillet 1969 à 21 h 56, Neil Armstrong descend
le dernier échelon du LM, foule la poussière du sol
lunaire et prononce sa petite phrase. Il reste 19
minutes à Aldrin pour le rejoindre. Comment les
emploie-t-il ? S'il surveille l'évolution de son
compagnon depuis la fenêtre du LM, quelque chose lui
tient particulièrement à coeur. De sa trousse
personnelle, il sort une fiole de vin, un calice et
un passage de la Bible souvent cité par l'église
presbytérienne dont Aldrin est resté un fidèle : « Je
suis la vigne et tu es la branche... ». Après avoir
demandé le silence radio, Aldrin va communier sur la
Lune. « J'espérais, racontera-t-il par la suite, que
les hommes n'oublieraient pas de sitôt ce qui avait
été fait, et que, au-delà des détails secondaires et
de la réussite technique, ils y découvriraient une
signification plus profonde : un défi, une quête, le
besoin qu'a l'homme d'accomplir de telles actions »
(cité dans le livre Premiers sur la Lune). Après le
succès d'Apollo 11, Aldrin et ses compagnons vont
bien sûr connaître les honneurs d'un si bel exploit,
jamais accompli par aucun homme, et dont les médias
de l'époque, notamment la télévision, ont largement
rendu compte. Mais en décembre 1972, la mission
Apollo 17 viendra fermer le chapitre des expéditions
lunaires, jamais réouvert depuis.
Car aux yeux des décideurs de l'époque, le programme
a coûté très cher et ne présente qu'un intérêt
relatif sur le plan scientifique et nul sur le plan
économique. Sur le plan politique, les Américains ont
su montrer au monde, et surtout aux Soviétiques, leur
suprématie dans ce domaine, et c'était là le
principal. La Guerre Froide est terminée, la conquête
spatiale s'est concentrée sur la banlieue proche de
la Terre avec les missions de la navette spatiale et
la construction des stations orbitales Mir, puis
Internationale. Douze hommes auront marché sur la
Lune (voir encadré), pas un de plus. Trois de ces
héros sont déjà décédés : Irwin, Shepard et « Pete »
Conrad, mort d'un accident de moto le 8 juillet 1999,
il y a exactement dix ans. Mais pour le deuxième
d'entre eux, le Colonel Buzz Aldrin, ce chapitre
reste encore entrouvert : il n'a pas oublié son voeu
prononcé là-haut à 380 000 kilomètres de notre
planète. Quarante ans après, il relève toujours le
Buzz Aldrin dans les années 1990
défi et poursuit encore sa quête, celle d'un rêve
inachevé.
Jean SEGURA
Buzz Aldrin et Jean Segura à Santa Monica le 5 juin
2005
NOTES
Alan Shepard : 1923-1998, astronaute du groupe 1 de la Nasa,
premier Américain dans l’espace le 5 mai 1961 lors du vol
suborbital de la capsule Mercury Freedom 7, puis commandant de
la troisième mission habitée Apollo 14 sur la Lune en janvier
février 1971. Co-auteur en 1994 de Moonshot (Ils voulaient la
Lune, ed J'ai lu, 1997) avec Deke Slayton, lui aussi
astronaute du groupe 1. Incarné par Scott Glenn dans le film
L'Etoffe des héros de Philip Kaufman en 1983.
Virgil « Gus » Grissom : 1926-1967, astronaute du groupe 1 de
la Nasa, second vol suborbital Mercury Liberty Bell 7 le 21
juillet 1961, première mission habitée Gemini Molly Brown le
23 mars 1965. Le 27 janvier 1967, il meurt brûlé lors d’un
essai au sol d'Apollo 1 aux côtés de ses co-équipiers Edward
White et Roger Chaffee. Incarné par Fred Ward dans le film
L'Etoffe des héros de Philip Kaufman en 1983.
John Glenn : né en 1921, astronaute du groupe 1 de la Nasa,
premier américain en orbite terrestre le 20 février 1962 lors
de la troisième mission habitée Mercury Friendship 7. Devenu
sénateur républicain, il fera partie, à 77 ans, de l’équipage
de la navette Discovery le 29 octobre 1998. Incarné par Ed
Harris dans le film L'Etoffe des héros de Philip Kaufman en
1983.
Gordon Cooper : 1927-2004, astronaute du groupe 1 de la
sixième et dernière mission orbitale Mercury Faith 7 le
1963, et troisième mission habitée Gemini 5 du 21 au 29
1965.Incarné par Dennis Quaid dans le film L'Etoffe des
de Philip Kaufman en 1983.
Nasa,
15 mai
août
héros
Neil Armstrong : né en 1930 (comme Aldrin), astronaute du
groupe 2 de la Nasa, mission Gemini 8 du 16 au 17 mars 1966 et
commandant de la première mission habitée sur la Lune Apollo
11 du 16 au 24 juillet 1969.
David Scott : né en 1932, astronaute du groupe 3 de la Nasa
(comme Aldrin), mission Gemini 8 du 16 au 17 mars 1966,
troisième mission habitée Apollo 9 du 3 au 13 mars 1969 et
commandant de la quatrième mission habitée sur la Lune Apollo
15 du 26 juillet au 7 août 1971.
Frank Borman : né en 1928, astronaute du groupe 2 de la Nasa,
mission Gemini 7 du 4 au 18 décembre 1965, lors du rendez-vous
spatial avec Gemini 6, et commandant de la deuxième mission
habitée Apollo 8, premier vaisseau à faire le tour de la Lune
avant de revenir sur Terre, du 21 au 27 décembre 1968.
Charles « Pete » Conrad (1930-1999), astronaute du groupe 2 de
la Nasa, deuxième mission habitée Gemini 5 du 21 au 29 août
1965, mission Gemini 10 du 12 au 15 septembre 1966, commandant
de la deuxième mission habitée sur la Lune Apollo 12 du 16 au
24 juillet 1969, commandant de Skylab 1 (officiellement Skylab
2) du 25 mai au 22 juin 1973.
James Lovell : né en 1928, astronaute du groupe 2 de la Nasa,
mission Gemini 7 du 4 au 18 décembre 1965, lors du rendez-vous
spatial avec Gemini 6, dernière mission habitée Gemini 12, du
11 au 15 novembre 1966 (avec Aldrin), deuxième mission habitée
Apollo 8, premier vaisseau à faire le tour de la Lune avant de
revenir sur Terre, du 21 au 27 décembre 1968, et commandant de
la mission lunaire manquée d’Apollo 13 du 11 au 17 avril 1970.
Co-auteur de Apollo 13 avec Jeffrey Kluger (Robbert Laffont,
1995). Lovell est incarné par Tom Hanks dans le film Apollo 13
de Ron Howard en 1995.
Ils voulaient la Lune - Alan Shepard et Donald Slayton. Ed
J'ai lu, 1997, Paris.
A Man on the Moon - Andrew
York, Paris.
Chaikin, 1998, Penguin Books, New
Une version plus courte de cet article a été publiée
dans France-Soir du Mercredi 21 juillet 1999.
GAGNER UN VOYAGE ORBITAL AU LOTO
Le retour dans l’espace le 29 octobre 1998 du sénateur et astronaute
John Glenn, à l'âge de 77 ans, dans la navette Discovery a montré qu’il
était possible de faire voyager des personnes de presque tous les âges,
à condition qu’elles soient en bonne santé physique. Tout est alors
question de prix, et seuls des gens très fortunés pourraient se payer
un tel voyage (plusieurs dizaines de milliers de dollars). C’est là
qu’intervient l’idée de la ShareSpace Foundation, l'un des nombreux
projets de Buzz Aldrin : donner à chacun une chance en achetant son
voyage le prix … d’un billet de loto, disons quelques dizaines dollars.
Tout le monde ne pourrait pas partir, mais comme certains gagnent
aujourd’hui des fortunes au loto, d’autres pourraient conquérir le
droit de faire le tour de la Terre… en fusée.
DOUZE HOMMES POUR L’ETERNITE
De juillet 1969 à décembre 1972, lors de six missions Apollo menées à
leur terme, la NASA aura envoyé dix-huit astronautes vers la Lune dont
douze seulement auront foulé le sol lunaire. Chaque mission du
programme Apollo prévoyait en effet que le pilote du module de commande
reste en orbite autour de la Lune. Voici la liste de ces douze
pionniers avec les dates de séjours sur la Lune:
Apollo 11 : Neil Armstrong (1930-) et Edwin « Buzz » Aldrin (1930–) :
20-21 juillet 1969.
Apollo 12 : Charles « Pete » Conrad (1930-1999) et Alan Bean (1932-) :
19-20 novembre 1969.
Apollo 14 : Alan Shepard (1923-1998) et Edgar Mitchell (1930-) : 5-6
Février 1971
Apollo 15 : David Scott (1932-) et James Irwin (1930-1991) :
30 Juillet - 2 Août 1971
Apollo 16 : John Watts Young (1930-) et Charles Duke (1935-) : 20-23
avril 1972.
Apollo 17 : Eugene Cernan (1934-) et Harrison Schmitt (1935-) : 11-14
décembre 1972.
Photos : NASA, Jean Segura et DR
POUR EN SAVOIR PLUS
* Site officiel de Buzz Aldrin
* Fiche Wikipedia de Buzz Aldrin
* Blog avec informations détaillées sur la carrière de l’astronaute,
notamment après son départ de la NASA et de l’US Air Force.
* Corbis : Le commentaire de Buzz Aldrin sur la photo la plus célèbre
et la plus emblématique de la conquête de la Lune : « le lieu,
seulement le lieu ! »
* Nasa : Les plus belles photos de la mission Apollo 11
* Nasa : Dossier exhaustif en photos haute définition de la mission
Apollo 11
* Nasa : La première marche sur la Lune image par image avec
commentaires écrits de la Nasa
* Nasa : Dossier multimédia complet de la Nasa sur Apollo 11 et les
missions précédentes
* Nasa : Panoramas interactifs en 3D de la mission d’Apollo 11 sur la
Lune avec dialogues d’Armstrong, Aldrin, Collins et Bruce McCandless,
CAPCOM à la base de Houston. Attention, il faut patienter quelques
secondes pour le
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