1 Le port de Gray et la Haute vallée de la Saône : entre

Transcription

1 Le port de Gray et la Haute vallée de la Saône : entre
Le port de Gray et la Haute vallée de la Saône : entre déconnexion et reconnexion
d’une interface entre l’espace méditerranéen et l’espace rhénan ?
Jean-Louis Mignot
Introduction :
Depuis le milieu du XXème siècle, le transport fluvial a été délaissé en France au profit des
infrastructures routières, ferroviaires ou encore aéroportuaires. En effet, les canaux au gabarit de
type Freycinet ne font plus l’objet d’un entretien rigoureux et sont même laissés à l’abandon pour la
plupart d’entre eux. Contrairement à l’Allemagne, la France ne dispose pas d’un réseau au gabarit
rhénan car les infrastructures aménagées au gabarit européen, comme par exemple la Saône, la
Moselle ou encore le Rhin dans l’Est de la France, constituent toutes des impasses. Toutefois,
depuis le début du XXIème siècle, les pouvoirs publics semblent s’intéresser de nouveau à la
problématique du transport fluvial comme le démontre la construction du canal Seine Nord 1.
Même si certaines liaisons se réalisent, suite à l’abandon du projet de « Grand Canal » en
1997, le maillon manquant permettant d’établir une liaison entre les espaces rhénan et
méditerranéen n’est toujours pas réalisé dans l’Est de la France. Néanmoins, un espace majeur de
passage dès l’Antiquité, mais délaissé à partir du milieu du XXème siècle par les infrastructures de
transports modernes, offre une solution et permettrait d’envisager à nouveau une liaison entre la
Mer du Nord et la Mer Méditerranée par voie fluviale. Il s’agit de la Haute vallée de la Saône.
1. La Haute-vallée de la Saône : un espace de carrefour :
La Haute vallée de la Saône peut être définie comme un espace s’étendant de Gray (70) à
Corre (70) correspondant au cours de la rivière dans le département de la Haute-Saône. Sa position
géographique stratégique, en raison de sa proximité avec les cours d’eau se dirigeant vers le Rhin,
en fait un lieu de passage incontournable pour les liaisons entre le Nord et le Sud de l’Europe.
1.1 Un espace de carrefour dès l’Antiquité :
Dès l’époque romaine, cet espace semble constituer un espace de transbordement pour les
productions arrivant par voie terrestre du Nord de l’Europe et qui sont expédiées par bateaux en
direction du Sud en utilisant la Saône comme semble le démontrer le projet de canalisation de la
1
Canal Seine Nord : Le but de ce canal est d’établir une liaison à grand gabarit entre la Seine et l’Escaut afin
de réaliser une liaison entre l’Ile-de-France et les ports les plus actifs de la Northern Range comme Rotterdam et
Anvers.
1
Saône et de la Moselle par les Romains afin de relier la Mer Méditerranée à la Mer du Nord en
empruntant la vallée du Coney (cf. figure n°1). L’utilisation du cours d’eau comme voie d’échanges
permet à la cité de Segobodium de se développer (cf. figure n°1). La situation de la ville permet le
passage d’une rive à l’autre de la Saône de la voie romaine reliant Besançon à Reims.
Figure 1 : CARTE DES PRINCIPALES VOIES ROMAINES DESSERVANT L’EST DE LA FRANCE
La principale voie romaine reliant Besançon à Reims franchit la Saône à Seveux. De même, l’axe méridien franchit entre
Besançon et Metz suit également la vallée de la Saône. Enfin un troisième et dernier axe important de direction est-ouest
franchit également la Saône au niveau de Jonvelle. Malgré une absence de détail, les recherches sur ce secteur ont démontré
qu’une multitude de voies secondaires partaient de ces routes principales pour desservir les implantations se situant le long
de la vallée de la Saône.
2
Mais l’invasion de la Gaule par les Barbares met un terme au développement de cet espace,
et il faudra attendre le Moyen-Age pour qu’il connaisse un nouveau développement. Toutefois, le
centre de commandement de la haute vallée de la Saône s’est déplacé de Seveux à Gray tout comme
le carrefour routier.
1.2 L’émergence de Gray :
Située sur un piémont rocheux, Gray se développe grâce à sa situation privilégiée de pont
sur la Saône et de carrefour de plusieurs routes (cf. figure n°2). Ainsi dès le Moyen-Âge, une
activité commerciale permettant la fondation d’une corporation de marchands se développe
rapidement au bord de la Saône. Mais l’essor n’a véritablement lieu qu’au XVIème siècle, au
moment où la Franche-Comté est une possession du royaume espagnol dominé par Charles Quint
s’étendant aussi en Flandre et aux Pays-Bas. Gray conforte son rôle de carrefour et de point de
rupture de charge pour les productions venant de l’Europe du Nord arrivant par voie terrestre d’où
elles sont réexpédiées par voie d’eau en direction du bassin méditerranéen. Ce développement
économique lié au transport fluvial s’arrête au XVIIème siècle en raison de l’invasion de la FrancheComté par la France avant de reprendre au XVIIIème siècle par l’aménagement des quais sur la
Saône. Toutefois, le véritable essor de la Haute vallée de la Saône et de Gray, ville qui la
commande, a lieu au XIXème siècle.
Figure 2 : La ville de Gray un véritable carrefour
Grâce à son
activité
fluviale, la ville
de Gray a su
attirer les
principales
infrastructures
de transport et
notamment
routière. Ainsi,
la ville est
devenue une
véritable
étoile.
3
2. Le développement des infrastructures de transport au XIXème : un rôle de rupture
de charge confirmé :
La France connaît son véritable essor économique au XIXème siècle, notamment sous le
règne de Napoléon III par la création et le développement des infrastructures de transport modernes
comme la canalisation des cours d’eau ou la création du chemin de fer. Au début, le chemin de fer
est perçu comme un moyen d’acheminer les marchandises vers la voie d’eau.
2.1.
La création du chemin de fer : le rôle de transbordement confirmé :
Afin de conforter le rôle de transbordement de Gray, les édiles de la ville s’intéressent au
chemin de fer. Dès 1829, ils demandent la création d’une ligne de chemin de fer. En effet, Gray est
devenue la ville la plus prospère économiquement de la Franche-Comté lui permettant de disputer le
titre de préfecture à Vesoul et même de rivaliser au niveau régional avec Besançon. D’ailleurs, cette
puissance est telle que la loi du 20 octobre 1830 lui confère la responsabilité de « port de régulateur
des grains ». En France seulement trois autres villes possèdent ce privilège Paris, Lyon Marseille.
Ainsi, le chemin de fer est vu par les Graylois comme un moyen de renforcer la position stratégique
de leur ville au sein des échanges.
Dès lors, ses édiles vont tout faire pour obtenir le passage de la ligne reliant Dijon à
Mulhouse dont ils n’obtiennent qu’un embranchement vers Auxonne. Toutefois, l’ensemble des
citations des partisans et des adversaires du tracé par Gray démontre sa puissance économique et
celle de son port, « (…) sa position qui en fait un lieu de transit pour tous les objets circulant entre
le Midi et les départements de la Marne, de la Haute-Marne, et de la Meurthe. (…) », comme celle
de Besançon hostile au tracé par la vallée de la Saône « Il s’agit donc pour Gray d’acquérir par
l’établissement du chemin de fer à travers la Haute- Saône une bonne part du mouvement
commercial de l’Est à l’Ouest et cela au préjudice de Besançon et en faisant violence aux habitudes
que la circulation a contracté. Il s’agit pour Besançon de conserver ce dont il est en possession
sans faire le moindre tort à la ville qui se constitue comme sa rivale. Nous espérons que le
gouvernement juge du débat, ne voudra pas sacrifier une cité populeuse et animée d’un excellent
esprit pour enrichir une autre cité dont la prospérité fondée sur sa position au point où la Saône
devient navigable, demeure dans cette circonstance à l’abri de toute atteinte. » Si Besançon
conteste la puissance de Gray, en contrepartie la ville haut-saônoise reçoit le soutien des Lorrains
« Quant à nous, Vosgiens, ce qu’il nous faut, c’est Gray, comme centre de grand commerce ; c’est
4
Vesoul comme point de jonction entre le chemin de la Méditerranée au Rhin et celui de Paris à
Strasbourg »
Néanmoins, cet échec n’empêche pas, la ville de devenir une importante étoile ferroviaire.
En effet, les principales relations méridiennes venant de Lorraine et du Nord convergent vers Gray
(cf. figure n°3). A cette époque, la gare de Gray devient la troisième gare du réseau de l’Est avec
plus de 400 personnes y travaillant. Toutefois, le rachat de la ligne Culmont-Chalindrey-Is-sur-Tille
par la Compagnie de l’Est entraîne le détournement du trafic méridien de Gray. Sentant que la ville
de Gray risque de se retrouver enclavée, les Graylois tentent une dernière fois d’obtenir une grande
ligne ferroviaire reliant Anvers à Milan.
La ville de Gray doit donc sa richesse à la Saône. Or, si avec la Saône la ville a su attirer les
principales relations ferroviaires méridiennes du Grand Est, il a été plus difficile de parvenir à la
canalisation de la Saône.
Figure 3 : L’étoile de Gray : un axe de passage obligatoire pour les liaisons méridiennes.
5
Grâce à l’activité de son port, la ville de Gray a réussi à attirer les axes ferroviaires méridiens les plus importants. Les lignes
Lille-Lyon-Marseille et Luxembourg-Metz-Nancy-Lyon-Marseille s’y rejoignent et font de la cité haut-saônoise un point de
passage obligé pour les échanges entre la Mer du Nord et la Mer Méditerranée.
2.2.
Le réseau fluvial :
Relier la Mer Méditerranée à la Mer du Nord par la vallée de la Saône est une idée très
ancienne. Ce projet est lié à la position stratégique de la Saône dont la source est proche des grands
cours d’eau de l’Est de la France qui se dirigent vers la Mer du Nord comme la Meuse, le Madon, la
Moselle. Comme, il a été vu ci-dessus, ce projet date des Romains. Il faut ensuite attendre la
Renaissance et le règne de François Ier pour que la création d’un canal entre la Mer du Nord et la
Mer Méditerranée soit à nouveau évoquée. Des études sont entreprises afin de réaliser un canal
entre la Loire et la Saône et entre la Meuse et la Saône, mais elles restent sans suite. Puis au
XVIIIème siècle, la liaison Saône-Meuse est évoquée dans le Duché de Lorraine. Finalement, le
projet de canal par la vallée de la Saône et celle du Coney se concrétise sous le règne de Louis XVI.
Cet itinéraire constitue « la voie la plus directe pour rejoindre sans interruption les cours d’eau du
versant de l’Océan et ceux qui dirigent leurs eaux vers la Méditerranée est la vallée du Coney, dans
les Vosges, où la chaîne de montagnes qui sépare les bassins de la Saône et de la Moselle présente
une forte dépression »2. Les études appuyées par Turgot débutent en 1773 et s’achèvent 20 ans plus
tard. En effet, les Révolutionnaires donnent la priorité à d’autres liaisons comme le canal RhinRhône. Finalement, le projet de canal entre la Saône et la Moselle par la vallée du Coney est décidé
lors de la Restauration. Mais au moment de sa réalisation, la guerre de 1870 éclate et la France perd
les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Outre, la perte de territoire, la défaite
se traduit par la perte de la seule liaison fluviale méridienne entre l’Europe du Nord avec celle du
Sud puisque les bateaux devaient suivre un trajet passant par le canal de la Marne au Rhin, puis le
Rhin et enfin le canal du Rhin au Rhône. Ainsi, afin de rétablir la liaison le plus rapidement
possible, l’Assemblée nationale décide de la création d’un canal entre la Moselle et la partie
navigable de la Saône par le cours supérieur de la Moselle et Epinal puis la canalisation de la Petite
Saône jusqu’à Gray.
Néanmoins pour rendre la rivière entièrement praticable par les péniches quelques sections
ont dues être aménagées (cf. figure n°4) donnant lieu parfois à la création d’ouvrages spectaculaires
comme le tunnel de Scey-sur-Saône ou de Savoyeux.
2
Viansson L, (1882), Histoire du Canal de l’Est 1874-1882, Nancy, Berger Levrault, 530 p.
6
Figure 4 : Le réseau fluvial avant et après la guerre de 1870
Avant la guerre de 1870, le trafic nord-sud s’effectuait par le canal de la Marne au Rhin, le Rhin et par le canal du Rhin au
Rhône. Mais ensuite, l’extrémité de ces canaux devient allemande. Dès lors, afin de rétablir le trafic nord-sud, la France
décide de construire un canal joignant la Moselle à la Saône et la Moselle à la Meuse. Ce canal a pris le nom de canal de l’Est,
branche-nord pour la partie longeant la Meuse et branche-sud pour la section liant la Moselle à la Saône.
7
Ainsi, au début du XXème siècle, Gray est devenue un véritable lieu d’échanges entre l’Europe du
Nord et celle du Sud notamment pour les marchandises.
3. La Haute vallée de la Saône, un espace entre déconnexion et reconnexion :
Ainsi à la fin du XIXème siècle, la haute vallée de la Saône est ainsi connectée aux espaces
dynamiques de la vallée du Rhône et de la vallée de la Moselle, qui, à cette époque concentrent la
majeure partie des industries françaises. Ainsi, dans une France reconfigurée territorialement, cet
espace est en phase de devenir un espace nodal important dans la géographie des voies fluviales.
3.1 Un espace nodal :
En cette fin de XIXème siècle, le bassin industriel du Nord de la Franche-Comté est isolé de son
homologue lorrain. Afin de remplacer le canal du Rhin au Rhône, un projet voit le jour entre la
Saône et le Doubs : c’est le canal de la Haute-Saône. Les travaux débutent juste après l’ouverture de
la Saône à la navigation des péniches de type Freycinet. Cette voie fluviale doit permettre d’offrir
un débouché aux productions du bassin industriel de Belfort-Montbéliard et au gisement houiller de
Ronchamp vers la Lorraine et en direction du bassin méditerranéen. Le canal devait rejoindre la
Saône aux environs de Port-sur-Saône. A la fin du XIXème fin et au début du XXème, la Haute vallée
de la Saône est en phase de devenir un véritable nœud fluvial dans les échanges entre les espaces
rhénan et méditerranéen. Ainsi en 1913, plus de 400 000 tonnes de charbon ont transité par la Petite
Saône. Néanmoins, la concurrence du mode ferroviaire combiné au développement d’un réseau
routier performant entraîne le déclin du transport fluvial. De même, la restructuration du réseau
ferroviaire liée aux conséquences de la guerre de 1870, la gestion territoriale des lignes par les
différentes compagnies associées au déclin économique de la région, entraînent également le déclin
du mode ferroviaire à Gray. Néanmoins les péniches sont, de nos jours, toujours utilisées pour
transporter des céréales depuis Corre ou Gray, malgré la non-modernisation du réseau fluvial.
Mais comme le transport de marchandises ne représente plus l’activité essentielle de la Saône, les
collectivités locales, voulant profiter des plaisanciers venus du Nord de l’Europe, investissent dans
le tourisme afin de ne pas laisser à l’abandon ces infrastructures. Ainsi, les communes de HauteSaône jouent cette carte et réhabilitent leur halte fluviale et mettent en valeur leur patrimoine.
3.2 L’avenir de la Haute vallée de la Saône :
Le tourisme semble être l’avenir des voies fluviales non modernisées comme pour la Haute vallée
de la Saône. Toutefois, avec le projet de canalisation à grand gabarit, la Haute vallée de la Saône
pourrait redevenir un axe de transit majeur pour les relations entre l’Europe du Nord et celle du Sud.
3.2.1 Le tourisme fluvial :
Cette activité a sans nul doute permis de sauver l’économie fluviale qui s’était largement développé
grâce au transport de marchandises. Elle a permis également de mettre en valeur le patrimoine local.
8
De nombreuses communes se sont lancées dans cette activité permettant ainsi de réhabiliter les
haltes et les ports. Ainsi, en Haute-Saône, il existe 9 haltes fluviales, 5 ports de plaisance et une
marina (cf. carte n°5).
Figure 5 : Les infrastructures de plaisance fluviale aménagée le long de la Saône
De nombreuses installations touristiques se sont développées sur la Petite-Saône, la plupart d’origine privée.
D’autres ont été créées par les collectivités territoriales d’où la gratuité de certaines installations. Les
infrastructures touristiques sont concentrées autour de Port-sur-Saône et de Gray. La marina de Corre se situe à
l’écart de ces deux pôles. La marina est un projet original dans un département rural et sur une rivière canalisée
car ce type d’infrastructure est plutôt réservé aux stations balnéaires accueillant une clientèle très aisée.
Cette marina de Corre est d’initiative privée. Elle est implantée sur 9 hectares en amont de la
confluence entre la Saône et le canal des Vosges, en rive gauche. Elle comprend 85 places réparties
dans deux ports ; le port n°1 comporte 32 places ; le port n°2 peut accueillir 53 bateaux. Les
parcelles de terrain constructibles, au nombre de 15, attenantes au port, ont une superficie de 1 000
mètres carrés et sont toutes vendues. Ce projet, qui a pu apparaître utopique à ses débuts, connaît un
certain succès, ce qui montre un véritable intérêt de la clientèle pour ce type d’installation. Cette
9
dernière est surtout composée de ressortissants allemands, néerlandais ou helvétiques. Au total, ces
diverses installations réparties tout au long de la Saône ont la capacité d’accueillir 439 bateaux.
Ainsi, le tourisme fluvial a pu se développer dans la vallée de la Saône parce qu’en HauteSaône, la rivière est assez large et présente des paysages et un patrimoine intéressants. En effet, au
sommet des versants de nombreux châteaux de type médiéval sont visibles et bien entretenus
comme à Ray-sur-Saône, à Rupt-sur-Saône. Les communes ont également beaucoup investi en
s’embellissant pour devenir plus attractives lors des haltes des plaisanciers. Mais tout ce
développement n’aurait pas pu avoir lieu sans l’implication de V.N.F. Lyon qui a également
aménagé les chemins de halage en circuits de promenade, proposant ainsi des boucles de
randonnées autour de la Saône canalisée comme par exemple à Savoyeux ou encore un itinéraire
touristique le long de la Saône dénommée « Rives de Saône ». Il s’agit de la réhabilitation, sur
environ 60 kilomètres, du chemin de halage entre Rigny et Port-sur-Saône. Une signalétique
particulière a été mise en place permettant de se repérer par rapport à la Petite Saône au bord de
laquelle sont disposés les logos de V.N.F. Lyon qui, à l’occasion, a créé un logo spécifique pour les
rives de Saône (cf. photo n°1)
Photo 1 : Aménagement des chemins de halage
Ce cliché présente un panneau touristique qui informe les personnes sur les différents sites touristiques situés le
long du chemin de halage et présente les aménagements du chemin de halage réalisés par V.N.F. en collaboration
avec les collectivités territoriales dont le département de la Haute-Saône et la région de Franche-Comté. On
constate ainsi la volonté de développer le tourisme au bord de la Saône.
10
Si le tourisme fluvial a permis à la Saône de conserver son statut d’axe privilégié, l’abandon
du projet de Grand canal entre le Rhin et le Rhône peut lui permettre de rejouer un rôle majeur dans
les échanges nord-sud par le projet de canal à grand gabarit entre la Saône et la Moselle.
3.2.2. Le projet Saône-Moselle :
Photo 2 : Gray et son port fluvial sur la Saône.
Ce cliché montre la Saône aménagée sur près de 2 kilomètres à Gray. On remarque le port de plaisance avec en arrière-plan
la ville avec sa basilique bâtie sur un piton rocheux qui domine la rivière. Avec les deux projets de liaisons fluviales à grand
gabarit entre la Saône, la Moselle et le Rhin, Gray pourrait redevenir une plaque tournante dans la distribution des
marchandises entre le bassin méditerranéen et la Mer du Nord
A la fin des années 1950, des projets de canalisation au gabarit de type rhénan sont à l’étude.
Ainsi, dans l’Est de la France, pour relier le bassin de la Mer du Nord au bassin méditerranéen, un
projet de réalisation d’un canal à grand gabarit est soutenu par une association réunissant les
collectivités territoriales. Ce projet se compose de deux branches, une reliant le Rhin au Rhône par
la vallée du Doubs et une autre reliant la Saône à la Moselle par la Haute vallée de la Saône. Mais
au début des années 1980, la branche lorraine est abandonnée au profit du canal Rhin-Rhône qui
sera également abandonné en 1997 par le gouvernement Jospin. De ce fait, aucune liaison entre le
bassin du Rhin et celui du Rhône n’existe. Afin de pallier au manque de ce barreau, le projet de
création d’un canal entre la Saône et la Moselle est étudié depuis le début des années 2000.
Plusieurs tracés sont étudiés dont deux empruntent la Haute vallée de la Saône. Son trafic, évalué à
plus de 15 millions de tonnes, en fait un projet réaliste. Mais son intérêt réside surtout dans le fait
qu’il permettrait de créer une liaison entre la Mer du Nord et la Méditerranée en raccourcissant les
11
distances entre Marseille et Rotterdam. Toutefois, les Alsaciens, craignant d’être isolés,
développent un projet permettant de rejoindre la Saône depuis le Rhin. Pour la Haute-Saône, ce
projet est intéressant car il permettrait à la Haute vallée de la Saône de devenir un axe de passage
essentiel dans les flux entre l’Europe du Nord et celle du Sud en lui permettant de redevenir un
véritable carrefour et nœud de communication (cf. figure n°6).
Figure 6 : La Haute vallée de la Saône : un éventuel carrefour des voies fluviales
Cette figure présente les projets de canal à gabarit rhénan dans le Grand-Est. Sans inventer de nouvelles
infrastructures au XXI siècle, elle permet de constater que les projets reprennent les itinéraires du XIX siècle.
Si ces projets se réalisent, la Haute-Saône pourrait tirer profit de sa situation géographique en étant au carrefour
des deux voies fluviales majeures reliant l’Europe rhénane à l’Europe méditerranéenne.
ème
ème
12
Conclusion :
La haute vallée de la Saône a toujours constitué un axe de passage essentiel entre l’Europe
du Nord et l’Europe Méditerranée. Mais ce n’est qu’au XIXème siècle, que la haute vallée de la
Saône prend de l’importance : le port de Gray permet à la ville d’attirer les principales voies ferrées.
Néanmoins, au cours du XXème siècle, la chute du trafic fluvial va entraîner une lente déconnexion
de cet espace des principaux axes de transport. Toutefois, le tourisme fluvial a permis de renforcer
le lien entre les territoires traversés et la rivière.
Mais le chaînon manquant pour réaliser la liaison fluviale à grand gabarit entre la Mer du
Nord et la Mer Méditerranée pourrait être le projet Saône-Moselle. Ainsi la Haute vallée de la
Saône pourrait redevenir un axe de passage majeur pour les échanges nord-sud et permettre et
renforcer les liens entre le territoire et la Saône.
Bibliographie :
Aménager la France de 2020, le Grand-Est, Paris, La documentation Française, 2002, 160 p.
Conseil national du tourisme, Le tourisme outil de revitalisation des territoires ruraux et de
développement durable? Paris, La documentation Française, 2005, p. 284.
BERION Pascal, VARLET Jean, VRAC Michel, Interrégionalité et réseaux de transports,
acte du colloque de la commission de géographie des transports, P.U.F.C., Besançon, 204
LAMARD Pierre et WOESSNER Raymond (dir.), Rhin-sud un territoire en devenir?,
Belfort, éditions de l’UTBM, 2007, 274 p. (Territoriales).
LECARD Laure, le canal de l’Est : un outil de développement local ?, 221 p., mémoire de
D.E.A, Université de Nancy 2, 2003.
MAUCLAIR Michel, Le chemin de fer en Haute-Saône 175 ans de transports en milieu
rural, Langres, Editions Dominque Guéniot, 2005,228 p., Vol. 2.
MAUCLAIR Michel, Le chemin de fer en Haute-Saône, 175 ans de transports en milieu
rural, Langres, Editions Dominque Guéniot, 2005, 232 p., Vol. 1.
13
RENOUARD Dominique, les transports de marchandises par fer, route et eau depuis 1850,
Paris, Armand Colin, 1960, 125 p.
REVERDY Georges, Atlas Historique des routes de France, Paris, Presses de l’école
nationale des Ponts et Chaussées, 2006, 182 p.
THULL Patrick, Demain, la lorraine, Nancy, Editions de l’Est, 2003, 221p.
VRAC Michel, France radiale contre france transversale?, Regards croisées sur la
constitution du réseau ferré français, 452 p, Thèse de Doctorat de Géographie, Université de Paris
IV Sorbonne, Paris, 2001.
BONNAFOUS Alain, Le projet de liaison Rhin-Rhône à gabarit européen ou les mystères
d’un pari. Annales de géographie. 1997, 593-594, pp. 107-128.
JP HUSSON, JP ROTHIOT, une frontière entre Saône et Meuse, Châtillon-sur-Saône,
Association Saône Lorraine, Nancy, 2002, p 243-261
MIGNOT Jean-Louis, les axes nord-sud en Haute-Saône: vers un retour de la région
Franche-Comté en position de carrefour?, Revue géographique de l’est, 2007, Vol. XLVII, 3, pp.
177-186.
WOESSNER Raymond, En Alsace, le transport fluvial à l’épreuve de la coopération
transfrontalière, actes du FIG, Saint-Dié, 2003
WOESSNER, Raymond, L’éternel retour du corridor Rhin-Rhône, Annales de géographie,
2006, 647, pp. 3-25.
14