La problématique du logement en Brabant wallon : Tanguy malgré eux
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La problématique du logement en Brabant wallon : Tanguy malgré eux
Question de point de vue Rue de Gembloux, 48 - 5002 Saint-Servais Tél : 081/73.40.86 - Fax : 081/74.28.33 [email protected] Cette analyse est téléchargeable sur : www.equipespopulaires.be La problématique du logement en Brabant wallon : Tanguy malgré eux ! Avec le soutien de Octobre 2011 Auteure : Laurence Delperdange, animatrice aux Equipes Populaires du Brabant wallon En Brabant wallon, beaucoup de jeunes, en âge de « voler de leurs propres ailes », éprouvent des difficultés à trouver un nid dont le coût corresponde à leurs moyens financiers. Attachés à leur ville dans laquelle ils ont tissé, au fil des années, un réseau social et souhaitant y demeurer, il n’est pas rare pourtant que, prospection faite, ils se tournent, à contrecœur, vers d’autres provinces… Selon une étude réalisée en 2008 par le Centre de recherche en démographie et sociétés de l’UCL1, en 50 ans, le nombre d’habitants a pratiquement doublé en Brabant wallon. La province concentre environ 52,5% de la croissance démographique de la Wallonie. On y assiste à une ségrégation sociodémographique de plus en plus grande. Une sélection sociale est en marche. Il en résulte une surreprésentation de couples avec enfants et une sous-représentation de ménages monoparentaux et d’isolés. Autres caractéristiques du logement en Brabant wallon : une augmentation plus rapide qu’ailleurs du prix des logements, la rareté et le coût élevé des logements locatifs (peu à moins de 500 euros/mois). Quant au prix de vente des maisons, il est, en moyenne, supérieur de 40% à la moyenne wallonne. Le prix des terrains est, en moyenne, trois fois plus élevé que dans les autres provinces. La part réservée aux logements sociaux est de 4,3% contre 7% en Wallonie. En 2004, en Brabant wallon, un logement social était construit pour 9 logements construits par le secteur privé. A noter que Nivelles est une exception avec environ 10% de logements sociaux. Néanmoins, 500 personnes sont en attente d’un logement social à Nivelles. L’étude révèle que depuis 1970 l’arrondissement de Nivelles bénéficie d’une attractivité migratoire très positive, globalement la plus élevée de Belgique. Les habitants de Bruxelles gagnent peu à peu la périphérie verte. Qui sont ces nouveaux venus ? En grande partie « des personnes âgées de 30 à 45 ans qui se caractérisent par une stabilité familiale et professionnelle et qui disposent de revenus confortables ». Depuis les années 90, beaucoup moins de 25-30 ans s’établissent en Brabant wallon qui semble plus attractif pour les 30-55 ans. Bon nombre de jeunes Brabançons âgés de 20 à 25 ans s’installent à Bruxelles. On constate une dynamique de vases communicants entre Bruxelles et le Brabant wallon. En ce qui concerne les Agences Immobilières Sociales (A.I.S.), elles comptabilisent 160 logements répartis dans 22 communes. 1 Thierry Eggerickx, L’évolution démographique du Brabant wallon, Le coût social de la périurbanisation, Centre de recherche en démographie et sociétés, UCL, 2008. 1 Les jeunes qui ne souhaitent pas quitter Nivelles mais sont forcés de le faire, se tournent vers le Hainaut. Par exemple, un jeune couple qui, en fonction de ses revenus, ne peut emprunter une somme supérieure à 130 000 euros, ne pourra acquérir une maison sans l’aide financière de sa famille. A moins d’en arriver à un système, pratiqué déjà dans certains pays où des emprunts sont contractés pour une durée de 60 et 70 ans. Ce qui amène à transférer la dette sur ses enfants. Impossible ensuite pour ceux-ci d’aider leurs enfants à leur tour. Eviter la fuite des jeunes vers Bruxelles Diagnostic notarial… Interrogé sur la question, le notaire François Noé constate qu’il y a une grande offre en immeubles neufs. La plupart des logements en Brabant wallon sont des villas quatre façades, des maisons de maître, des maisons de rapport. Le rêve de beaucoup de personnes, explique-t-il, est d’acquérir une villa quatre façades en périphérie. Les centres-villes sont occupés par des personnes qui ont de faibles revenus qui ne vivent pas toujours dans des logements décents. Côté chiffres, la répartition des logements se fait entre : 33% de ménages à une personne et 17% de familles monoparentales. 25% d’adultes sans enfants et 25% de familles avec enfants. Il faudrait développer de petits logements pour les personnes seules, prévoir des logements adaptés aux différentes situations que l’on peut connaître au cours de sa vie car les situations évoluent… On assiste à un grand turn over au niveau des maisons qui changent de propriétaires en moyenne tous les sept ans. Pour répondre à ces jeunes qui désespèrent de trouver un jour un logement qui réponde à leurs attentes (à Nivelles ou dans ses environs, à un prix correspondant à leurs capacités financières actuelles), François Noé donne quelques éléments utiles. Un logement vendu par les propriétaires sans passer par une agence sera peut-être vendu à un prix plus raisonnable. Car, en général, cela signifie que le propriétaire ne cherche pas à vendre à un prix excessif. On peut aussi demander pour démarrer le remboursement du crédit de manière différée. Il est aussi prudent d’opter pour un prêt à un taux fixe. La réponse du politique L’aspect énergétique d’un logement représente un coût caché au départ mais non négligeable, surtout dans des villes comme Nivelles où l’habitat est ancien et mal isolé. Des maisons construites dans les années 60 ne tenaient absolument pas compte de cet aspect, étant donné le prix bas du mazout à l’époque. L’idéal est d’opter pour la mitoyenneté. Ce que font beaucoup de jeunes. Mais le prix moyen de ces maisons « deux façades » est de 264 000 euros à l’achat. Quant aux appartements, leur prix moyen est de 200 000 euros. La plupart des jeunes couples ne peuvent acheter à ces prix même avec les taux de remboursement d’emprunts assez « bas » que nous connaissons actuellement et qui avoisinent les 4%. En y ajoutant frais de notaire et frais d’actes, on atteint des sommes très élevées. Tous ces aspects ont des répercussions au niveau social et font la part belle aux spéculateurs. Mais, cela n’est pas une fatalité. On peut voir que d’autres pays fonctionnent sur d’autres bases. En ce qui concerne les locations, certains ont, par exemple, opté pour un plafonnement des loyers. Bernard Monnier, chef de cabinet adjoint du ministre wallon du logement Nollet, pointe la situation atypique du Brabant wallon par rapport à la situation de la Wallonie. La difficulté des jeunes à trouver un logement à louer voire à acheter dans cette province est une réalité. Il est aussi surprenant de constater que c’est sur les bas loyers que les hausses ont été les plus importantes. L’indice santé n’a pas été pris en compte dans ce calcul des loyers. Le système actuel avantage les propriétaires, lesquels peuvent déduire des remboursements de leur crédit hypothécaire sur le plan fiscal. Il y a peut-être lieu de revoir cela. La Région wallonne a mis en place des dispositifs pour lutter contre ces difficultés d’accès au logement. Par exemple, elle injecte chaque année 300 millions d’euros pour les politiques du logement public. Actuellement, on dénombre environ 100 000 logements sociaux en Wallonie. Parmi les 30% de logements locatifs, on compte un quart de logements sociaux dans le secteur public et un quart dans le secteur privé locatif. Mais si l’époque du clientélisme est heureusement révolue, le délai d’attente pour entrer dans un logement social est malgré tout 2 très long dans certaines régions. En outre, il faut remarquer que certains de ces logements dits « sociaux » ne sont plus accessibles, ayant été rachetés par leurs locataires. Opter pour un droit de préemption serait peut-être une piste permettant d’éviter que ceux qui ont acheté ces maisons les revendent très cher, rendant impossible leur rachat par les sociétés d’habitations sociales. On peut aussi se demander s’il est normal qu’une habitation sociale ait été attribuée à vie. - construire - en cette matière, le coût de la construction est plus ou moins identique dans toutes les régions mais c’est le prix du terrain qui fait la différence -, - dissocier l’accès à la propriété de la maison à la propriété du terrain. C’est la pratique du droit emphytéotique qui se pratique par exemple à Louvain-la-Neuve, - acheter des parts d’une société coopérative. Cela demande un changement des mentalités : la maison est vue comme un investissement. On récupère ses parts quand on le souhaite. - développer davantage les formules d’habitat groupé. L’habitat kangourou est une formule qui semble intéresser de plus en plus de personnes. Le principe ? Une personne âgée cohabite avec des jeunes dans sa maison devenue trop grande pour y vivre seule. La loi sur les baux à loyer et la régulation des loyers relève jusqu’ici du niveau fédéral mais des négociations sont en cours pour un transfert vers les Régions. Cela va peut-être permettre de mieux définir des politiques adaptées aux réalités régionales. L’idéal serait bien sûr de réguler le prix des locations de manière à ne plus louer à n’importe quel prix des logements en piètre état. Les allocations de loyer n’ont que peu d’effets si ces mesures ne s’accompagnent pas d’une régulation des prix. Très longtemps, on a laissé le marché jouer à plein sans cadrer les choses. En matière d’accès à la propriété, la Société wallonne du crédit social (voir l’adresse cidessous) offre des prêts à faibles taux d’intérêts. Mais, l’accès à la propriété n’est sans doute pas la voie unique. Vigilance citoyenne L’accès au logement et la régulation du logement font partie des responsabilités du législateur et il existe une volonté politique derrière toute décision prise en la matière. Ainsi certaines communes comme Lasne exigent, qu’en cas de construction, le bâti occupe une faible proportion du terrain. Dans ce cas, seuls les très hauts revenus ont accès à la propriété ou à la location. Il importe donc que les citoyens soient attentifs, en tant que citoyens, souligne Thierry Toussaint, qu’ils s’informent pour réagir s’ils estiment que la majorité en place dans une commune n’a pas tenu ses engagements en matière de logement. Il est important aussi de s’informer du programme des partis au moment des élections communales. En ce qui concerne le public des jeunes candidats à la location ou à l’achat, il est évident qu’il y a un problème. La pratique actuelle du statut de cohabitant n’arrange pas les choses. Les allocataires sociaux ont tout intérêt à se déclarer isolés. Au niveau communal, des choses peuvent être mises en place. Les pouvoirs publics et notamment les CPAS disposent de réserves foncières qu’ils pourraient réserver uniquement à l’habitat. On pourrait aussi mettre une règle qui impose aux promoteurs de réserver une part significative de logement public dans leurs projets. La taxation des logements inoccupés peut être une manière de lutter contre les logements vides et d’étendre l’offre de ces logements pour la location. Une mesure telle que celle-là inciterait les propriétaires à louer leurs biens quitte à faire appel à la loi de réquisition douce qui permet aux pouvoirs publics de remettre eux-mêmes sur le marché un bien tout en versant le loyer perçu au propriétaire. Certaines politiques ont pour but de lutter contre les marchands de sommeil en refusant la mise en appartements de maisons de ville. Néanmoins, cela peut produire des effets pervers. En limitant les logements de petites Pour quelle formule opter ? Aujourd’hui, on considère la maison comme un transfert de capital vers les générations qui nous suivent. Mais il y aurait peut-être lieu de changer ces visions. Ainsi, parmi les alternatives possibles : - acheter en copropriété, 3 surfaces disponibles sur le marché, les personnes isolées à bas revenus ont moins de possibilité de pouvoir se loger. La régulation doit donc être plus adéquate en instaurant par exemple un loyer maximal en fonction de la dimension et du confort du bâti. Se pose aussi la question de la discrimination. Par exemple un jeune émargeant au CPAS ne trouvera pas facilement un propriétaire qui accepte de lui louer un appartement. Il est possible d’empêcher ce genre de comportements. des différentes tranches d’âges, des réalités familiales différentes, des besoins spécifiques à chacune d’entre elles. Des alternatives Habiter dans un quartier durable. Pratiques et stratégies d’action pour un nouvel ancrage local du logement. Jean-Michel Degraeve, architecte. A l’initiative du Ministre wallon du développement durable Les Agences Immobilières Sociales (A.I.S.) : des associations qui agissent comme intermédiaire entre les propriétaires bailleurs et les locataires à la recherche d’un logement. Leur objectif principal : favoriser la mise à disposition (en location) d’immeubles issus du parc privé ou public en vue de répondre à la demande de logements de qualité pour des ménages à revenus modestes qui ne trouvent pas une habitation salubre dont le loyer est compatible avec leurs revenus. Néanmoins, certains freins existent. Ainsi, Bernard Monnier souligne à quel point il est difficile, en Brabant wallon, de plaider pour les personnes vivant dans la précarité. En effet, l’image d’une province riche dans laquelle les citoyens s’en sortent plutôt bien, est bien ancrée. Et faire entendre que ce n’est pas le cas pour tous est une entreprise à laquelle il faut constamment s’atteler. Infos : A.I.S.B.W. : Parc des Collines, Avenue Einstein 4 à 1300 Wavre - Tél. : 010/23 60 87 - Fax: 010/68 66 19 Pour conclure… On l’a vu, avant d’acheter ou de louer un logement, des informations sont nécessaires. Or, peu de choses sont organisées pour fournir ces informations aux citoyens. Habitat kangourou : « Concrètement, la personne âgée s’installe au rez-de-chaussée d’un habitat tandis qu’un jeune ménage ou une famille occupe le reste de la maison. Dans la plupart des cas, la personne âgée est la propriétaire ou le bailleur des lieux et il est prévu un contrat qui précise les modalités de la relation de services et le loyer modique payé par la famille. Cette formule d’habitat simple et efficace permet aux personnes âgées de mieux vivre chez elles grâce à un voisinage bienveillant.» Conseil aux jeunes candidats à l’achat ? Bien établir les critères à privilégier lors du choix de l’endroit où l’on a envie de vivre. Cela, en tenant compte des aspects liés aux déplacements domicile-travail, à l’environnement social, familial, aux services de proximité, aux écoles… Et se tenir à ses choix en considérant que s’éloigner entraîne d’autres coûts cachés… D’après la brochure Habitat kangourou éditée par l’asbl Question Santé. Site Internet : Et puis, une chose est sûre : les communes ont une responsabilité en matière de logement sur leur territoire. Aux citoyens à être attentifs pour que l’urbanisation prenne en compte les intérêts www.questionsante.be/outils/habitat_kangourou.pdf Adresses utiles Service de la Région wallonne compétent en matière de salubrité des logements : Salubrité logement - 081/33 23 28. Crédit social de la Province du Brabant wallon, rue de Namur, 38 à Wavre - 010/22 41 56 Société coopérative des habitations sociales du Roman Païs, allée des Aubépines, 2 à 1400 Nivelles - 067/88 84 84 www.romanpais.be Droits quotidiens asbl - 081/39 06 20 - Courriel : [email protected] Info conseils logement, Espace Wallonie, rue de Namur, 67 à Nivelles - 067/41 16 70 Le prêt jeune (- de 35 ans) : voir Région wallonne, division logement : http://mrw.wallonie.be/dgatlp La fédération du notariat belge : www.notaire.be 4