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magsacem
n° 88
Le magazine
des sociétaires
Sacem
octobre-décembre
2013
La France créative
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lmnopqrscd
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million d’emplois :
des industries qui ont du poids
Dossier > Page 06
12 > Décryptage
Crowdfunding
Quand le public finance la création
20 > Coulisses
Délégation
À Nancy, en passant par la Sacem…
02 Échos | à la une | Décryptage | Portrait | Musique story | Rencontre | coulisses | Agenda
L’ édito
Échos 03
Copie privée
É
lu par le Conseil d’administration, le 19 juin, président de
notre société, je suis particulièrement heureux de pouvoir vous
rappeler quelques bonnes nouvelles
récentes.
La Cour de justice de l’Union européenne a confirmé, le 11 juillet, la
possibilité de financer des actions
culturelles par notre prélèvement de
25 % sur la copie privée. Le système français est donc ainsi
approuvé, malgré les attaques d’adversaires toujours aussi
obstinés ! À cela s’ajoute l’exception culturelle préservée
avec l’appui du Gouvernement français, exception que nous
avons soutenue activement par une pétition signée par plus
de quatre mille créateurs. Belle leçon, qui montre, s’il en
était besoin, que « les seuls combats perdus sont ceux que
l’on ne mène pas ». D’autre part, malgré la crise économique que subit l’Europe, le premier semestre de collecte
de notre Sacem semble maintenir nos droits dans une
bonne perspective.
La Cour de justice
de l’UE dit oui aux 25 %
Résidence auprès de l’artiste Sophie Gallet dans le
cadre des FrancoSessions de Spa (Belgique).
Cinglant revers pour les importateurs d’appareils
d’enregistrement (clés USB, disques durs, tablettes,
smartphones…), qui mènent une guerre judiciaire dans
toute l’Europe contre la copie privée. Le 11 juillet dernier,
dans l’affaire opposant la société de gestion collective
Austro-Mechana au groupe Amazon, la Cour de justice
de l’Union européenne a reconnu qu’une partie des
sommes perçues au titre de la rémunération pour copie
privée pouvait être affectée à des actions sociales et
culturelles. Une décision majeure, qui valide et légitime
le système mis en place en France dès 1985. La loi Lang
prévoit que 25 % des sommes collectées pour la copie
privée doivent être consacrées « à des actions d’aides
à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des
actions de formation d’artistes ». Chaque année, la copie
privée soutient ainsi cinq mille manifestations culturelles de
tous les genres et secteurs culturels, partout en France.
Vos droits
Formation des créateurs
Besoin de vous perfectionner sur des logiciels, envie
d’acquérir de nouvelles compétences, de vous reconvertir
ou simple désir de découvrir de nouvelles techniques
de création ? La formation continue est désormais ouverte
aux auteurs et compositeurs. Profitez-en !
Longtemps, les auteurs et les
compositeurs sont restés les seuls, en
France, à être privés du droit précieux
de se former tout au long de la vie par
absence de financement. Depuis
le 28 décembre 2011, le législateur a
changé la donne, en mettant en place
un fonds de formation professionnelle
pour les artistes auteurs.
Malgré ces quelques éclaircies dans un ciel toujours nuageux, le droit d’auteur reste un combat que je mènerai avec
vigueur, avec notre directeur général Jean-Noël Tronc et le
Conseil d’administration, pendant ce mandat.
Permettez-moi aussi de souhaiter une bonne année de
« sommeil » à mon ami Laurent Petitgirard, à qui je succède. Son travail et son engagement dans la défense de
nos droits et dans l’organisation de notre société sont un
exemple que je m’efforcerai de suivre.
Enfin, je profite de cette tribune pour saluer amicalement
nos salariés, sans lesquels les mots de collecte et de répartition ne seraient que principes, sans réalité.
•
Jean-Claude Petit,
compositeur, président du Conseil d’administration
de la Sacem
Qui peut en bénéficier ?
Pour pouvoir en bénéficier, il convient
d’être affilié à l’Agessa ou à la Maison
des artistes ou bien être assujetti et
justifier d’un montant de recettes
cumulées de 9 000 euros minimum
sur les trois dernières années.
C’est donc un signe fort que la Cour de justice
de l’Union européenne a lancé aux auteurs, artistesinterprètes, producteurs et éditeurs des œuvres
musicales, de l’audiovisuel, de l’écrit et des arts visuels.
Ces derniers suivent de près les négociations autour
de la proposition de rapport d’initiative relatif à la copie
privée menées par la députée européenne Françoise
Castex, qui se doit d’être le relais politique de la
jurisprudence récente de la Cour de justice européenne
consolidant et renforçant le bien-fondé et la légitimité
de ce mécanisme de rémunération et de soutien
aux créateurs.
•
magsacem | | Le magazine des sociétaires Sacem | Directeur de la publication : Jean-Noël Tronc | Directrice de la rédaction : Catherine Boissière | Comité de
rédaction : François Besson, Laurence Bony, Olivia Brillaud, Louis Diringer, David El Sayeg, Jean Fauque, Patrick Fontana, Claude Gaillard, Claire Giraudin, Claude Lemesle,
Bruno Lion, Karine Mauris, Dominique Pankratoff, Jean-Claude Petit, Cécile Rap Veber, Véronique Sinclair et Christophe Waignier | Signatures : Sandrine Bajos, Philippe
Barbot, Romain Bigay, Éléonore Colin, Laurent Coulon et Éloïse Dufour | Ont collaboré à ce numéro : Bernadette Bombardieri, Aline Jelen, Frédéric Kocourec, Sophie
N’Guyen, Nicolas Pribile et Bruno Quillet | Direction artistique : Jessica Couty et Marie-Christine Fhrepsiadis | Maquette et mise en pages : Agence 21 x 29,7 |
Impression : Corlet Roto – BP 46 – 14110 Condé-sur-Noireau | Magazine imprimé sur du papier recyclé | Le magazine des sociétaires Sacem est publié tous les quatre mois
| No ISSN 2108-8802 | Sacem – Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique | Société civile à capital variable immatriculée au registre du commerce
et des sociétés de Nanterre sous le numéro D 775 675 739 | Siège social : Sacem – Département relations professionnelles et communication – 225, avenue Charles-deGaulle – 92528 Neuilly-sur-Seine Cedex | Tél. : 01 47 15 47 15 | Couverture : © 21x29,7 et Thinkstock | 4e de couverture : © Philippe Lebruman, Richard Dumas, Luc Valigny,
Caroline Doutre, Eric Garrault, Virginie Georges, Hadrien Denoyelle, Yann Orhan, Nathalie Guillermic, Torquato Neto, Julien Cauvin, Gassian, Dati Bendo, DR |
magsacem # 88
© Lionel Pagès – Gisselbrecht/Andia
\ POUR EN SAVOIR PLUS : WWW.COPIEPRIVEE.ORG.
Quel en est le coût ?
Depuis le 1er juillet 2012, une
cotisation est prélevée directement
sur vos droits d’auteur. Elle s’élève
à 0,35 % du montant brut des droits
reçus par les auteurs et les
compositeurs, et apparaît aux côtés
des autres cotisations sociales sur
vos relevés. La Sacem participe au
financement de ce fonds de formation,
notamment via les 25 % de la
rémunération pour la copie privée.
Les diffuseurs contribuent également
à ce fonds à hauteur de 0,1 % des
sommes qu’ils versent aux auteurs
et aux compositeurs. Chaque auteur
ou compositeur éligible peut
demander le financement d’une
Répartition du 4 octobre 2013
Tendance
générale
Vendredi 4 octobre dernier, la Sacem
a réparti 89 M€ à ses auteurs,
compositeurs et éditeurs. Un montant qui
croît de 16,5 % par rapport à octobre
2012. Cette belle évolution s’explique,
notamment, par la plus-value de 7,9 M€
qu’a enregistrée le secteur de
l’exploitation en ligne, mais aussi par
la mise en répartition des 5 premiers mois
d’exploitation 2013 d’iTunes. Les droits
en provenance de l’étranger
représentent près de 30,3 % de
ce montant total. Le secteur des
exploitations vidéographiques
progresse de 10,5 %. La copie privée
enregistre une hausse de 45,4 %, dont
77,4 % pour la copie privée audiovisuelle
(régularisations de l’opérateur Free).
Les droits phonographiques, en
revanche, baissent de 21,1 %, en raison
de la diminution des droits en provenance
des contrats types producteurs et des
autorisations œuvre par œuvre. Enfin,
cette répartition comprend les droits des
réalisateurs de vidéoclips diffusés sur
YouTube de 2010 à 2012, et dont la part
musicale a été répartie en juillet 2013.
•
ou plusieurs formations dans la limite
de 7 200 euros par an.
Qui assure ces formations ?
L’Afdas, fonds d’assurance formation
des secteurs de la culture, de la
communication et des loisirs, prend
en charge le financement de
ces nouvelles formations. Plus
précisément, un Conseil de gestion
des auteurs a été nommé par arrêté
du ministère de la Culture et de la
Communication. Il est composé
d’organisations professionnelles et
de sociétés d’auteurs, parmi lesquelles
la Sacem, et détermine les budgets,
les conditions d’accès et définit
les priorités. L’offre de formation et les
organismes agréés sont choisis par
des commissions professionnelles.
Quelle est l’offre de formation ?
Toutes les formations sont présentées
sur le site internet de l’Afdas. Certaines
sont transversales à tous les secteurs
d’activité, d’autres sont plus
spécifiques au métier d’auteur.
Vous pouvez les consulter en ligne et
télécharger une demande de prise en
charge (à remplir et adresser à l’Afdas).
Si, toutefois, la formation dont vous
avez besoin n’existe pas, n’hésitez pas
à nous faire part de vos attentes en
nous adressant un courriel à l’adresse :
[email protected].
•
\ POUR EN SAVOIR PLUS : WWW.Afdas.com.
octobre-décembre 2013
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\Prochaines répartitions : lundi 6 janvier
2014, vendredi 4 avril 2014. \\Informations
sur les répartitions précédentes : sacem.fr
> Mon espace > Ma répartition > Données
des répartitions.
Télex
\ Facebook, Twitter, forums… la Sacem
est présente sur les réseaux sociaux.
Afin de renforcer encore un peu plus le
lien avec les internautes, la Société des
auteurs, compositeurs et éditeurs de musique a recruté un animateur de communautés, Fréderic Neff, qui répond à toutes
les questions ou remarques ayant trait au
droit d’auteur et à la Sacem.
© DR
Éclaircies
04 Échos | à la une | Décryptage | Portrait | Musique story | Rencontre | coulisses | Agenda
Échos 05
VOS DÉMARCHES
Le mot du directeur général
Sacem Plus
Une palette
d’avantages
Lancé fin juin, le programme Sacem Plus
a déjà séduit plus de trois mille sept cents
sociétaires. Il offre un large panel de
services et d’avantages, parmi lesquels un
kit carrière pour développer son réseau et
se faire connaître auprès du public et des
professionnels (Ulule 1, DBTH, Irma…) ou
encore des promotions chez les fabricants
et vendeurs de matériel et d’instruments
(Apple, Star Music, Musikia, Paul Beuscher,
Buffet-Crampon 2…), des facilités sur les
transports (Sixt), l’hébergement et l’accès à
des lieux de répétition, des accès privilégiés
à des événements de référence (Go & Rec,
Francofolies, MaMA, festival de la Fiction
TV…). Entièrement gratuit, ce programme
est accessible à tous les auteurs,
compositeurs et éditeurs membres de la
Sacem. Pour en profiter, rendez-vous dans
votre espace réservé sur sacem.fr et activez
votre programme en quelques clics.
•
\EN SAVOIR PLUS : SACEM.FR > ACCÈS RÉSERVÉ
1 Voir aussi pages 12 à 14. 2 Voir aussi page 19.
Télex
Simplifier toujours un peu plus vos
démarches : telle est l’ambition du
site internet Sacem.fr, qui propose
désormais un service de déclaration
de programmes en ligne.
En vous connectant sur votre
espace réservé, vous pouvez ainsi
enregistrer la liste des œuvres
que vous jouez régulièrement pour
vos concerts, galas ou récitals,
que vous en soyez l’auteur,
le compositeur ou simplement
l’interprète. À chaque déclaration de
programme-type, un numéro vous
sera attribué. Vous pouvez en avoir
plusieurs, il suffit de leur donner
un titre pour bien les identifier.
À chaque fois que vous jouerez l’un
de ces programmes, vous n’aurez
plus qu’à reporter le numéro
correspondant sur votre attestation
« programme spectacle ». Cette
attestation est ensuite à remettre
à l’organisateur du spectacle afin
qu’il la signe et l’envoie à l’une des
délégations régionales de la Sacem.
Une démarche simple et rapide,
directement en ligne, qui accélère
le traitement des données par
la Sacem et permet une répartition
au plus juste des droits d’auteur
collectés.
•
Ils ont dit
J’ai passé l’été avec
Sacem Plus. Première
expérience : Sixt !
30 % de remise sur
les locations de voiture parce que je
suis éditrice de musique membre de
la Sacem. Ça, c’est classe ! Je réserve
en ligne, et j’y cours. » Isabelle Dacheux, éditrice.
\Un témoignage à retrouver en intégralité sur sacem.fr
\ Le 18 juin dernier, c’était l’appel aux urnes : l’Assemblée générale de la Sacem a élu son nouveau Conseil d’administration.
Le compositeur Jean-Claude Petit succède à Laurent Petitgirard à la présidence. Jean-Marie Moreau, Bruno Lion et Alain Chamfort
ont été nommés à la vice-présidence. Retrouvez toute la composition du nouveau Conseil d’administration sur sacem.fr. \\
Hommage. La Sacem a appris avec une immense tristesse la disparition de Bernard Chérèze, des suites d’une longue maladie.
Véritable amoureux de la musique, Bernard Chérèze était un homme généreux, passionné et doté d’une grande clairvoyance.
Tout au long de sa vie, il aura mis son énergie au service de la création et des jeunes talents. Pour en savoir plus : sacem.fr > communiqués de presse 2013. \\\ La Sacem et Creative Commons ont reconduit leur accord, signé le 9 janvier 2012. Cet accord
permet aux auteurs compositeurs membres de la Sacem de promouvoir leurs œuvres dans un cadre non
commercial, notamment sur Internet. Il allie de manière innovante, et dans le cadre d’une expérience pilote, l’utilisation
de licences non commerciales proposées par les Creative Commons et les modes de collecte et de répartition des droits d’auteur
de la Sacem. \\\\ Le rapport annuel 2012 est sorti. Chiffres de la collecte et de la répartition, stratégie, projets, temps forts de
l’année, classement des succès… Retrouvez l’intégralité de ce rapport d’activité sur sacem.fr > la sacem > rapports d’activité.
magsacem # 88
La France créative
C
e Magsacem a pour thème
principal le Panorama
des industries culturelles
et créatives, qui vient de paraître
et dont la Sacem est à l’origine.
Cette étude offre pour la première fois un chiffrage précis
de ce que pèsent les industries
culturelles en France : musique,
arts graphiques, spectacle vivant, cinéma, presse, édition
littéraire, télévision, radio et jeux vidéo, ces neuf secteurs
représentent 1,2 million d’emplois et pèsent plus de 74 milliards d’euros, soit plus que l’industrie automobile.
Le Panorama révèle que la musique est le troisième employeur du secteur culturel avec plus de 240 000 emplois
et un chiffre d’affaires total de plus de 8 milliards d’euros.
C’est un secteur dynamique, présent sur tout le territoire,
qui attire les jeunes.
L’étude identifie quatre pôles pour notre secteur : les métiers
de la création (auteurs, compositeurs, éditeurs, artiste interprètes, musiciens, techniciens et fabricant d’instruments)
auxquels s’ajoute l’enseignement avec les conservatoires,
générant une valeur de 1,5 milliard d’euros ; le pôle de la
production et la distribution de musique enregistrée (1,5 milliard d’euros) ; celui du spectacle vivant musical (2,5 milliards
d’euros) et un ensemble regroupant la diffusion et l’écoute
de musique (les radios musicales, les télévisions musicales,
les discothèques, mais aussi les ventes de matériel audio et
la presse spécialisée) pour un total de 3 milliards d’euros.
L’idée d’une telle étude est née il y a un an du double constat
qui m’a frappé au moment de prendre la direction de notre
Sacem : d’une part, le rôle important de nos secteurs pour
l’emploi et la croissance, mais aussi pour le rayonnement
mondial de la France, est largement méconnu ; d’autre part,
le soutien politique aux principes qui, comme le droit d’auteur, permettent qu’existent des industries culturelles et des
créateurs, s’est fortement affaibli depuis dix ans.
Ce Panorama ne pourra bien sûr pas changer, à lui seul,
cette situation. Mais il doit contribuer à redonner du sens
à ce que nous sommes. En effet, pour que soient défendus
les créateurs, le droit d’auteur et la gestion collective, il faut
changer le regard sur les secteurs culturels. Ces dix dernières
années, ceux-ci ont trop souvent été présentés comme voués
à un inexorable déclin, marginalisés par la révolution d’Internet, ou dépendant d’aides publiques de plus en plus
contestées.
Notre discours, parfois défensif et négatif, de même que
nos divisions ont fait le jeu de tous les adversaires du droit
d’auteur et de la création. Nous avons donc regroupé nos
forces et réuni douze acteurs clés des industries culturelles
pour produire ensemble ce Panorama et constituer une
plateforme commune baptisée « France Créative ».
À ceux qui tirent prétexte des évolutions technologiques
pour mettre à bas le droit des auteurs, il faut rappeler que
dans l’univers numérique, l’avantage comparatif de la France
et de l’Europe est dans les contenus, dans cette créativité
mondialement reconnue qui part de nos créateurs. Notre
répertoire musical est le plus diffusé au monde après le
répertoire anglo-américain et la France compte plusieurs
champions mondiaux dans le secteur : la première entreprise
de production musicale au monde avec Universal ; la deuxième plus grande société d’auteurs au monde avec la Sacem
et un des leaders mondiaux de l’écoute de musique en
streaming avec Deezer.
Outre le haut patronage du président de la République,
nous avons obtenu un engagement de nombreuses personnalités pour illustrer l’importance de la culture. La tribune
signée d’anciens ministres de la Culture de gauche et de
droite vise à rappeler que, dans notre pays, le combat pour
la culture a souvent su transcender les différences politiques.
À partir de ce travail d’explication, nous préparons les prochaines étapes avec, pour le premier semestre 2014, le
projet d’une initiative européenne des créateurs. Il s’agirait
d’appeler à ce que le Parlement européen et la Commission
européenne qui sortiront des élections de mai 2014 accordent
aux industries culturelles au moins la même importance
qu’à d’autres secteurs pourtant presque disparus d’Europe,
comme l’industrie informatique ou des télécommunications.
Pour cela, il nous faudra aussi faire des propositions nouvelles. Nous en reparlerons dans un prochain Magsacem.
Pour le moment, le travail de pédagogie est essentiel et doit
viser tous les publics. Je vous invite donc, chères et chers
sociétaires, à relayer tous les messages du Panorama autant
que possible autour de vous. Pour cela, vous pouvez utiliser
le site internet www.francecreative.fr qui s’enrichira d’autres
témoignages et études. N’hésitez pas d’ailleurs à nous
proposer des idées.
•
Jean-Noël Tronc,
directeur général de la Sacem
octobre-décembre 2013
© Jean-Baptiste Millot
Déclarez vos programmes en ligne
Échos |
à la une | Décryptage | Portrait | Musique story | Rencontre | coulisses | AgendA
À la une 07
La France créative
1,2 million
d’emplois :
des industries
qui ont du poids
Une première. Des experts se sont penchés sur le poids éco­
nomique des industries culturelles et créatives dans l’Hexagone.
Contrairement aux idées trop souvent répandues, la culture
française se porte bien et séduit à l’étranger. Forte de ses
1,2 million d’emplois et de ses 74,6 milliards d’euros de chiffre
d’affaires, c’est une filière clé du rayonnement et de la compé­
ti­ti­vi­té de la France.
U
niversal, Deezer, Vivendi, UbiSoft, TF1, Hachette, Dargaud, le
magazine Elle… quel secteur, en France, peut se prévaloir d’avoir
à son actif une aussi jolie palette de marques, dont la plupart
rayonnent hors de nos frontières ? Pourtant, crise économique
oblige, les petites phrases telles que «La musique se meurt du
piratage », « Internet a tué la presse » ou encore « Bientôt, il n’y aura plus de
livres » fleurissent dans les médias. À croire que le secteur de la culture n’en
finit pas de compter ses malades !
Cependant, à y regarder de plus près, le tableau est loin d’être si sombre.
Au contraire, les industries culturelles et créatives – musique, spectacle
vivant, cinéma, télévision, radio, jeux vidéo, édition, presse, arts graphiques
et plastiques – tirent plutôt bien leur épingle du jeu dans un monde bouleversé par une crise économique et financière qui s’éternise. C’est en tout
cas ce qui ressort du panorama économique des industries culturelles et
créatives réalisé par le cabinet EY (à retrouver sur www.francecreative.fr).
•••
magsacem # 88
octobre-décembre 2013
© Simon Dubois/Fastimage
06
08
Échos |
à la une | Décryptage | Portrait | Musique story | Rencontre | coulisses | AgendA
À la une 09
•••
l’Américain a introduit avec succès l’acte d’achat
d’une chanson ou d’un album sur la Toile.
Le streaming redonne
des couleurs à la musique
Combien savent qu’avec 61 milliards
d’euros de chiffre d’affaires,
les industries culturelles et créatives
se placent loin devant le so french
secteur du luxe ? Le Français, un « gros »
consommateur de biens
culturels
8,6
milliards
d’euros,
c’est le poids économique
du secteur de la musique.
magsacem # 88
Musique, film, livre, concert, radio, théâtre… en
moyenne, le Français « consomme » neuf heures
par jour des contenus culturels et il n’hésite pas à
consacrer 8,4 % de son budget à des biens culturels
et à des loisirs. La réalité économique de ces industries – omniprésentes au quotidien, essentielles
au lien social, à la vitalité et à la diversité culturelle
de la France – reste paradoxalement méconnue. Et
donc sous-estimée. « On oublie trop souvent que leurs
productions sont aussi une source considérable d’emplois et de richesses pour notre territoire », écrit en
introduction Marc Lhermitte, associé du cabinet
EY, en charge de ce panorama. Combien savent
qu’avec 61,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires,
elles se placent loin devant le so french secteur du
luxe (52,5 milliards d’euros) et avoisinent le si « in »
secteur des télécommunications (66,2 milliards
d’euros) ? Le vaste secteur des arts graphiques et
plastiques (voir encadré en page de droite) est celui
qui génère le plus gros chiffre d’affaires (19,8 milliards d’euros), loin devant la télévision (14,9 milliards d’euros) et l’édition presse magazines
(10,7 milliards d’euros). Mais le monde de la musique n’a pas à rougir. Son poids économique, en
France, est estimé à 8,6 milliards d’euros, sans
compter les 8,4 milliards du spectacle vivant.
Emplois non délocalisables
Les industries culturelles et créatives emploient
plus de 1,2 million de personnes, soit 5 % de l’emploi intérieur total français. Avec 307 716 emplois
« made in France », les arts graphiques et plastiques
arrivent logiquement en tête, suivis de près par le
spectacle vivant (267 713) et la musique (240 874),
qui font pratiquement jeu égal. Emplois qualifiés
ou non, de l’ingénieur du son au dessinateur en
passant par le webmaster d’un festival, les industries culturelles recrutent beaucoup de jeunes.
Situées au carrefour de l’art, du monde de l’entreprise et de la technologie, les industries culturelles
et créatives offrent un large spectre de métiers
aisément accessibles.
Enfin, les emplois proposés irriguent l’ensemble
du territoire français. Et prouvent que, contrairement aux idées reçues selon lesquelles tout se passe
à Paris, la décentralisation culturelle est bel et bien
une réalité. En témoigne le succès du musée le
Louvre-Lens, du Centre Pompidou-Metz ou, dans
un autre registre, cet enregistrement du dernier
album de Thomas Fersen dans le minuscule village
breton de Loguivy-Plougras.
Nouveaux modèles
économiques
Avec la révolution numérique en général et Internet
en particulier, les industries culturelles se sont retrouvées face à un consommateur « hyperconnecté,
hypermobile, hyperexigeant ». 44,4 % des enfants
âgés de 11 ans possèdent déjà un smartphone et
18,4 % des foyers français sont désormais équipés
en tablette, soit un taux d’équipement des ménages
qui a bondi de 132 % en un an (source Mobile Mar-
© Marc Chesneau
Pour la première fois, chiffres et témoignages à
l’appui, une étude dessine les contours économiques de ces industries et montre à quel point
elles sont porteuses de croissance, de compétitivité et d’innovation.
•••
> Plus de 300 000 artistes « visuels »
Designer, marchand d’art, sculpteur, peintre, photographe,
conservateur, céramiste, architecte… des professions issues
d’univers parfois très différents mais toutes regroupées au sein du
vaste secteur des arts graphiques et plastiques. Premier employeur
des industries culturelles avec presque 308 000 personnes
concernées, ce secteur, dit également « des arts visuels », représente
à lui seul 19,8 milliards d’euros.
Le marché de l’art français profite lui aussi du fameux « made in
France » pour rayonner à l’international : il est quatrième au monde,
loin derrière les États-Unis et la Chine, mais devant l’Allemagne et
la Suisse. Six Français se retrouvent parmi le top 100 des artistes
mondiaux au classement. Artindex 2013, le marché de l’art (vente
aux enchères, galeries), s’exporte bien et les entreprises françaises
de design réalisent 20 % de leur activité à l’étranger.
Sur le terrain, les Français sont attachés à leur patrimoine culturel,
comme le prouvent les records de fréquentation enregistrés par les
1 210 musées français, à Paris comme en province, qui ont dépassé
les 56 millions de billets en 2010. De même, les foires d’art
contemporain, comme la Fiac de Paris ou la Biennale de Lyon,
séduisent de plus en plus de fidèles et les 1 144 galeries d’art
françaises (dont 52 % sont installées en région) ont dégagé l’an
dernier un chiffre d’affaires record de plus de 620 millions d’euros.
Le monde de l’entreprise n’est pas en reste, avec un mécénat au
profit du secteur de la culture et du patrimoine qui atteint 361 millions
d’euros, soit 19 % du mécénat total en France.
octobre-décembre 2013
© Francesco Acerbis/Signatures
Les ventes de livres
numériques ont atteint
81 millions d’euros en 2012
(chiffres SNE).
keting Association). Musique, livres, billets d’exposition ou de concert, articles de presse… l’acte d’achat
s’effectue de plus en plus sur la Toile et de moins
en moins en magasin. Le piratage, d’un côté, et
Apple et iTunes, de l’autre, ont mis KO pendant
quelques années le secteur du disque. La presse
écrite a dû faire face à l’explosion des sites d’information gratuite (rue89, Slate, Atlantico…) et, surtout,
à un Google plus puissant que jamais qui pioche
sans complexe dans les sites des journaux pour
alimenter son moteur de recherche. Bien qu’échaudée par les aventures du disque, l’édition a dû elle
aussi batailler face aux géants américains, Amazon
en tête, désireux de prendre leur part de gâteau du
futur marché du livre numérique.
D’abord sonnées, les industries culturelles se sont
relevées et ont inventé de nouveaux modèles économiques en intégrant les technologies numériques dans leurs modes de production comme
dans leurs offres de services. La production de
films, de musiques enregistrées ou encore l’édition
sont, depuis des années, entièrement numériques,
tout comme la diffusion de films : 88 % des écrans
de cinéma français sont aujourd’hui équipés de
projecteurs numériques et 75 % des films français
sont tournés en numérique. La radio surfe avec
succès sur les podcasts, et la télévision s’est lancée
avec frénésie dans la « social TV », toujours en quête
d’accroître sa communauté de fidèles. Bien que le
Français semble plus attaché qu’on ne le pensait
au papier (en particulier pour les romans), tous les
livres sortent désormais en version numérique et
les éditeurs français ont réussi à faire plier les
mastodontes américains en gardant le contrôle de
leurs droits.
Mais, surtout, face à une nouvelle génération biberonnée au gratuit, les éditeurs de musique, de jeux
ou de presse, veulent changer les règles du jeu.
Faire payer ses articles n’est désormais plus un
tabou en presse écrite comme en témoignent les
offres payantes des journaux. Dans la musique, si
Apple, avec iTunes, a assommé plus d’un acteur du
secteur, il faut reconnaître que face au piratage,
Du côté de la musique, « Les producteurs de musique
ont eux aussi accompli leur révolution numérique »,
estime Stéphane Bourdoiseau, président de l’Union
des producteurs phonographiques français indépendants (Upfi), qui donne en exemple la numérisation des catalogues, la construction d’un marché
de la musique en ligne avec de nombreux modèles
respectueux des consommateurs ou encore des
Échos |
à la une | Décryptage | Portrait |
À la une 11
•••
nouvelles relations contractuelles avec les artistes.
En termes de consommation proprement dite, le
téléchargement légal, mais surtout le streaming,
ont redonné des couleurs à un secteur qui n’en finissait pas de voir ses ventes physiques baisser année
après année. Un des leaders mondiaux du streaming
n’est autre que le Français Deezer, au coude à coude
avec le Suédois Spotify pour la place de numéro 1.
« Deezer, c’est l’histoire du réinventeur de la musique
(…), le premier à proposer une solution alternative efficace face au piratage : un service gratuit et légal », se
félicite son PDG Axel Dauchez. Faut-il voir dans
les derniers chiffres du secteur présentés par le
Snep, en septembre dernier, un signe sérieux de
guérison de la musique ? Après une décennie de
crise, elle a dégagé, pour le premier semestre 2013,
un chiffre d’affaires en croissance. Si ce bon résultat est certes porté par le succès du dernier album
du groupe français Daft Punk, il tend à prouver que
la musique a trouvé son modèle économique. Et
notamment grâce au streaming par abonnement
– donc payant –, qui affiche désormais un million
d’abonnés au compteur.
Une french touch culturelle
reconnue à l’international
La french touch se retrouve dans pra­ti­quement tous
les pans de l’économie culturelle. Citons, par
exemple, Universal Musique (Vivendi), première
entreprise de production musicale au monde, ou
Hachette Livre (Lagardère), numéro 2 mondial de
l’édition, sans parler de TF1, première chaîne privée
Focus
La musique et son volume
Le jeu vidéo français : un
champion à l’exportation.
Pour
en savoir +
Retrouvez
le panorama
dans son
intégralité,
des infographies
et des
témoignages sur
la plateforme
francecreative.fr.
C’est l’une des pratiques préférées des Français. Les chiffres sont là pour le prouver : chaque
Français écoute en moyenne 53 minutes de musique dans sa journée. Loin de se limiter au
marché du disque, la filière musicale fait pour la première fois l’objet d’une étude économique
approfondie. Résultat : elle pèse 8,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires et emploie plus
de 240 700 de personnes en France. Zoom sur un écosystème dynamique.
européenne, ou d’Ubisoft, troisième éditeur de
jeux vidéo derrière les Américains Activision et
Electronic Arts. C’est ce rayon­nement international
qui permet à la balance commerciale des biens
culturels en France d’afficher, en 2011, un excédent
de plus de 300 millions d’euros. À titre d’exemple,
avec plus de 80 % de son chiffre d’affaires réalisés
à l’étranger, le secteur des jeux vidéo français possède le plus haut taux d’exportations parmi l’ensemble des secteurs culturels marchands. Le septième art français rayonne à l’international, tenant
tête à Hollywood, signe que l’exception culturelle
défendue avec ardeur par la France produit de réels
effets. Elle reste un combat majeur, qui fait partie
de l’agenda créatif européen.
Enfin, pour la France, l’exportation de produits culturels est l’un des moyens les plus efficaces de poursuivre une politique d’influence au niveau mondial,
notamment par le biais de la francophonie. Il ne
faut pas oublier que 220 millions de personnes dans
le monde parlent le français et parmi eux, 115 millions
comme langue maternelle.
Création
200 000 Français
concourent, par leur métier, à la création
musicale.
564
 millions d’euros : c’est le
chiffre d’affaires généré par les industries
de fabrication d’instruments.
Production et distribution
de musique enregistrée
4 000 emplois permanents dans
la production phonographique.
879 
millions d’euros de chiffre d’affaires
ont été générés grâce aux ventes d’albums (format
•
physique ou numérique) en 2011.
Spectacle vivant musical
> Marsatac
2,4 milliards
d’euros :
c’est le poids économique des concerts de
Le festival des musiques nouvelles qui a tout d’un grand
magsacem # 88
chaque année, Marsatac remplit parfaitement sa feuille
de route. Avec un budget de près de 1,8 million d’euros,
le festival est devenu « un acteur important de l’économie
culturelle locale », souligne sa directrice. « Il déploie sur
l’année près de 15 000 heures de travail, structurées autour
d’une équipe de 5 permanents à temps plein et le renfort
de plus de 100 salariés ponctuels (dont 80 %
d’intermittents du spectacle) et plus de 150 bénévoles.
92 % des salariés sont recrutés sur le territoire régional »,
détaille-t-elle. L’ économie du spectacle vivant demeure
fragile par nature, car ses biens sont non reproductibles et
éphémères, mais ses retombées économiques sont loin
de se limiter à son seul chiffre d’affaires : elles s’étendent
sur tout un territoire.
musiques actuelles et de musique classique.
16 000 emplois permanents
et 60 000 intermittents du spectacle pour
les concerts de musiques actuelles.
Diffusion, découverte, écoute
491
 millions d’euros et 2 600 emplois :
c’est la valeur économique des radios musicales.
1 milliard d’euros de chiffre d’affaires
sont générés par les discothèques, qui emploient
5 400 personnes.
1,3 milliard
d’euros générés par les
ventes réalisées en équipement audio (baladeurs, casques,
autoradios…) en 2011.
Un secteur qui compte plus de 5 000 employés.
octobre-décembre 2013
© Marc Chesneau
Moins connu que ses aînés le Printemps de Bourges ou
celui des Vieilles charrues, le festival électro-rap Marsatac
a désormais tout d’un grand. « Il s’est progressivement
installé comme un rendez-vous clé de la rentrée musicale,
et plus globalement comme un moment important de la
vivacité des cultures urbaines et électroniques », se félicite
sa directrice, Béatrice Desgranges. Le festival qui a fêté
ses 15 ans l’an dernier, affiche à son compteur plus
de 250 000 festivaliers (dont 35 000 en 2012) et plus de
500 artistes. Et la jeune femme de mettre en avant
« une programmation exigeante axée sur la découverte
artistique avec près de 80 % des artistes programmés
signés sur des labels indépendants ». Quant aux retombées
économiques pour la région de Marseille, où il s’installe
© Marc Chesneau
010
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décryptage 13
Crowdfunding
Quand le public
finance la création
Le financement participatif, ou crowdfunding, est de plus en plus mobilisé par les artistes.
À l’heure des réseaux sociaux triomphants, est-ce un simple effet de mode, ou une solution
alternative durable à la baisse des financements qui va modifier l’économie de la création ?
Eiffel.
magsacem # 88
Q
uel est le point commun entre la biographie d’Eiffel, le merchandising des Blérots
de Ravel, le workshop du label Infiné et le premier disque de nombre
d’artistes en démarrage ? Ces projets ont tous eu recours au financement participatif, ou crowdfunding. Un système qui repose sur la
mise en relation d’un porteur de
projet et d’investisseurs particuliers
par le biais d’une plateforme en
ligne : KissKissBankBank, MyMajorCompany, TousCoProd, Ulule…
Ou comment les petits ruisseaux
font les grandes rivières. Le fonctionnement est simple : atteindre un
montant fixé en amont en un temps
donné. En échange de leur participation, les financeurs reçoivent des
contreparties. Si tout type de projet
peut être soumis, « La musique est
rapidement devenue l’une des catégories les plus importantes. Elle
représente environ 600 des 2 900
projets financés », derrière l’audiovisuel et devant le spectacle vivant,
confie Alexandre Boucherot, fondateur d’Ulule.
Un vieil outil dopé
à la modernité des réseaux
Avatar 2.0 du mécénat populaire,
l’appel au public pour développer
un projet n’a rien de nouveau. En
leur temps, la Sagrada Familia­
ou la statue de la Liberté ont
été financées par la foule. Mais
l’omniprésence des appareils
connectés, couplée aux leviers de
mobilisation que sont les réseaux
sociaux et les communautés en
ligne, rend facile et peu coûteux
de joindre un grand nombre de
personnes désireuses de soutenir des projets, démultipliant les
possibilités en la matière. Ainsi,
comme le précise Adrien Aumont,
fondateur de KissKissBankBank,
« Aujourd’hui, on peut créer de la
musique, communiquer et lever
des fonds depuis son studio, en allant au-delà du cercle des proches
et des fans ».
600
projets musicaux
sont financés via
le crowdfunding
sur la plateforme
Ulule.
Un bouleversement
de l’économie de la musique ?
Les difficultés du secteur musical,
accentuées par la crise économique,
entraînent une baisse des sources
de financement traditionnel. L’heure
est à la mutation. Après la démocratisation des moyens de production (avec les home studios), la
multiplication des canaux de communication numériques, ne manquait que la dimension financière
pour que les projets artistiques
soient potentiellement autosuffisants. Signe des temps, certains
vont jusqu’à distribuer leurs albums
directement via des sites de vente
en ligne, comme Alain Chamfort, sur
Venteprivee.com. Pour Alexandre
Boucherot, « les outils sociaux et
communautaires vont être au cœur
des évolutions dans le secteur de la
musique dans les prochaines années. En ce qui concerne le financement participatif, le dé­
ve­
lop­
pement actuel est exponentiel et rien
n’indique un ralentissement ». De là
à se passer des intermédiaires professionnels, il y a un grand pas qui
n’est pas non plus près d’être
franchi. Un label n’est pas qu’une
source financière. De même qu’avoir
un home studio ne confère pas
automatiquement les compétences
d’un ingénieur du son professionnel,
disposer d’outils de levée de fonds
ne permet pas systèmatiquement
de devenir producteur. Ces moyens
de financement viendront s’ajouter,
sans se substituer, aux sources traditionnelles. Pour Adrien Aumont,
l’avenir n’est pas à la disparition des
maisons de disques : « Les labels
eux-mêmes vont se mettre au crowdfunding pour produire leurs artistes ».
Tout le monde dit
crowdfunding ?
Un balayage des plateformes permet de se faire une idée des projets
présentés. Premiers à s’être emparés du système, les artistes autoproduits, en majorité pour l’enregistrement d’un premier disque. Mais
Monsieur et Madame Toutlemonde
sont aussi sollicités pour l’organisation de concerts ou de festivals, du
merchandising, la réalisation d’un
clip… Les labels et les artistes indépendants établis s’y mettent, même
s’il ne s’agit pas de financer la production à proprement parler. Pour
Les Blérots de Ravel, qui, depuis
leurs débuts, font appel à la souscription, le recours au crowdfunding
s’est imposé pour renouveler, en
cours de tournée, le stock de t-shirts
à leur effigie. Groupe autoproduit,
leur trésorerie ne permettait pas
d’avancer les frais. En un mois,
2 626 euros obtenus ont financé la
fabrication de 200 t-shirts. Pour le
label Infiné, l’organisation de leur
workshop annuel a été l’occasion
d’une levée de fonds de 20 000 euros. Pour Nicolas Antoine, auteur de
la biographie du groupe Eiffel, « Les
plateformes offrent un avantage
énorme : elles facilitent la gestion.
•••
« En ce qui concerne le financement
participatif, le développement actuel
est exponentiel et rien n’indique
un ralentissement. »
Alexandre Boucherot, fondateur d’Ulule.
octobre-décembre 2013
© Franck Loriou
12
Décryptage | Portrait | Musique story | Rencontre | coulisses | AgendA
artistes établis délaissés par leur maison de disques faire appel aux plateformes », prophétise Alexandre
Boucherot. Leur notoriété serait un
avantage pour la levée de fonds, mais
l’impression d’une opération opportuniste pour surfer sur la tendance
pourrait entraîner une réaction néfaste des fans.
•••
Contrairement aux souscriptions
classiques, même si l’on n’atteint
pas l’objectif, on ne gère pas les
retours et remboursements. Pour
les donateurs, c’est simple, rapide
et sécurisé ».
Les artistes à plus forte notoriété
sont peu nombreux à avoir franchi le
pas, bénéficiant de moyens suffisants via leurs maisons de disques.
« Si le développement est le même
que pour l’audiovisuel, cela viendra.
On a commencé par n’avoir que des
films d’étudiants, des courts-métrages. Aujourd’hui, on trouve aussi
du long-métrage. Dans la musique,
le crowdfunding a déjà été adopté
par des artistes de moyenne notoriété. Nous verrons bientôt des side
projects d’artistes connus, ou des
Les Blérots
de Ravel.
Effets secondaires
Une campagne de crowdfunding,
c’est un outil de communication
active. Pour Nicolas Antoine, « Les
fans sont en demande. Ils participent à l’aventure du groupe, en
échange de contenu ou d’objets
exclusifs. Ils entrent ainsi dans une
relation privilégiée ». C’est aussi ce
qu’explique Johann, 30 ans, passionné de musique et plusieurs fois
cofinanceur : « Pourquoi financer ?
Pour retrouver la proximité, en cassant le côté star system, avec des
artistes lointains et intouchables. Le
rapport change : on est partie prenante de leur aventure. Du coup, on
va avoir envie de les suivre : liker leur
page Facebook, se tenir au courant
de leur actualité, aller les voir en
concert… Et puis je me dis : depuis
quand je n’ai pas acheté un disque
ou fais un acte d’achat autre que
payer un accès à une plateforme
de streaming ? Il y a peut-être là un
rachat de conscience… ».
Pour un label, a fortiori s’il a
construit une identité et une communauté, c’est aussi un moyen
de travailler l’image de marque.
Échos 15
Trois questions à…
Marion Delemazure, qui a mené
la campagne pour le workshop
Infiné, explique : « On ne s’attendait
pas à ce que les retombées soient
aussi fortes. C’est presque notre
meilleure opération de communication. Nous avons touché une
audience large et diversifiée, qu’il
aurait été plus difficile d’atteindre
via les relais classiques comme la
presse spécialisée ou l’achat d’espace publicitaire ». François Besson,
directeur de l’Action culturelle de la Sacem
Vous avez travaillé pour Universal Music, Sony Music, France Inter et
Disney avant de créer votre agence de communication spécialisée dans
la musique classique. Pourquoi avoir choisi de rejoindre la Sacem ?
Pendant quinze ans dans le disque et les médias, j’ai été au contact direct des
créateurs. Dix années dans l’entertainment et le marketing m’ont permis ensuite de cerner la question des publics et les enjeux économiques de la création. Fonder une agence dédiée au développement de carrières était le pro­lon­
gement de ce parcours. Rejoindre la Sacem signifiait rejoindre le premier
acteur de la musique en France et, ce que l’on sait moins, le premier financeur
et mécène de la musique. C’était donc, pour moi, l’opportunité d’œuvrer pour
les créateurs à un tout autre niveau.
Le crowdfunding, une solution
miracle ?
On pourrait le penser, mais l’opération nécessite un engagement pas
toujours mesuré par les porteurs de
projet. « On ne s’attend pas à l’implication que cela demande. Cela doit
être construit, s’inclure dans une
stratégie, être planifié. C’est un travail à temps plein », explique Marion
Delemazure. Et au-delà des projets
à petit budget, il faut tout de même
bénéficier d’une base de fans déjà
constituée. La simple présence
sur une plateforme ne la crée pas
d’office. Le fi­nan­cement participatif
ne peut rai­son­na­blement être envisagé que comme un complément­.
Le contraire pourrait être problématique, comme l’explique Lisa Belangeon : « Le public ne peut pas tout
financer. Et surtout pas choisir seul
ce qui mérite ou non d’être produit.
À chacun son rôle. Cela ne doit
pas remplacer les aides professionnelles ; la diversité pourrait en
souffrir ». Et le public se lasser…
L’action culturelle
de la Sacem
est déterminante
pour la vitalité
de la culture,
en France
et en Europe.
Quelles sont
vos priorités ?
Déterminante est le
mot ! Plus de quinze
mille projets soutenus, plus de cent millions d’euros apportés ces dix dernières
années. Nous nous
appuyons sur une
équipe experte dans
tous les genres musicaux et une présence unique sur l’ensemble du territoire. Parallèlement aux soutiens à la production, à la diffusion et à la professionnalisation, notre action a un
rôle à jouer dans ce que j’appellerai « l’accessibilité » : faciliter l’accès de tous les
publics à tous les répertoires, aux concerts via les retransmissions live au cinéma
et sur les terminaux mobiles, médiatiser les nouvelles formes de concerts, encourager le déploiement d’initiatives locales sur l’ensemble du territoire.
Pouvez-vous déjà lever un coin du voile sur vos intentions pour 2014 ?
De nouveaux projets ?
Regrouper certains dispositifs d’aide pour en renforcer l’impact, permettre aux
porteurs de projet de nous solliciter tout au long de l’année, susciter des synergies et jeter des passerelles entre créateurs et structures, intégrer le digital dans
nos programmes de professionnalisation… tout en restant particulièrement
attentifs à la pérennité de la copie privée, qui reste le nerf de la guerre.
•
Le prébooking :
le crowdfunding appliqué au spectacle vivant
Permettre aux organisateurs de
concerts de conditionner la tenue
d’un événement à la collecte d’un
nombre suffisant de préréservations
payantes, c’est ce que propose
Plemi, via son service Koalitick.
Au carrefour de la billetterie,
de l’achat groupé et du financement
participatif, c’est, pour Romain
Guillot, son fondateur, « Une
magsacem # 88
approche radicalement nouvelle de la
production, dans laquelle le public
peut avoir une influence directe
sur la programmation. Elle permet
aux producteurs et responsables de
lieux de limiter fortement la prise de
risque, et les incite à développer les
artistes émergents ». Là encore, le
principe est simple : les porteurs de
projet se présentent sur le site, sont
mis en relation avec des salles,
et les souscripteurs préréservent
leurs places, mais ne sont débités
que si le concert a bien lieu. Autre
service proposé : avec Beelivers,
le public demande à un artiste de
venir faire un concert dans sa ville.
Les Fatals Picards, François Staal,
le label Roy Music ont déjà tenté
l’expérience.
•
\EN SAVOIR PLUS : SACEM.FR > LA SACEM > DERNIERS COMMUNIQUÉS 2013
Télex
Les coups de cœur de…
Thierry Lecamp
journaliste et animateur radio
(On connaît la musique, Europe 1).
Album
La femme mangeuse
des nuages du ciel
Anouk Aïata
Il est rare de se retrouver face à un tel
charisme. On sent poindre au fil des titres
une sensibilité, une poésie et une douce
folie salvatrice. Anouk Aïata a du chien,
un répertoire qui raconte des histoires,
met en scène des personnages colorés,
entre hargne et tendresse exacerbées.
Concert
Saint Michel au Nouveau Casino
Voilà un duo prometteur capable de
transposer ses bidouillages studio sur
scène en réinventant le son électro
cristallin. Planant et énergique, il mélange
sur scène machines et instruments
acoustiques ou électriques avec puissance
et élégance. Pas besoin d’être clubber
pour apprécier : les mélodies prennent le
dessus face à deux artistes sans artifices.
Découverte
Yucca Velux
Ce jeune groupe français a le chic pour
trouver des mélodies entêtantes. Entre pop
anglaise et chanson française, Mélo,
la chanteuse, à la voix imparable, distille des
textes vénéneux et ironiques avec un aplomb
saisissant ! Et c’est valable aussi bien dans
leur premier EP que sur scène.
•
\ Le Prix du documentaire musical 2013 de la Sacem a été décerné à Thierry Augé pour son film Quand les mains murmurent (La Huit Productions). Il a été remis par Jean-Louis Agobet, compositeur membre de la Commission de la musique
symphonique, lors des États généraux du film documentaire de Lussas. L’œuvre de Thierry Augé est également sélectionnée
pour la compétition internationale du festival Jean-Rouch et sera projetée le 14 novembre à la Maison des cultures du monde, à
Paris. \\ Le dernier numéro du MagSacem consacrait son dossier aux réseaux sociaux. Petit clin d’œil à un sociétaire de renom :
David Guetta, qui est l’artiste le plus suivi sur Spotify, avec plus de 4,6 millions de fans. \\\ Une commission Mémoire a été
créée par le Conseil d’administration de la Sacem en juin dernier. Composée de neuf administrateurs issus des trois collèges
(auteurs, compositeurs, éditeurs), elle vise à mettre en place une véritable politique patrimoniale au sein de la Sacem.
octobre-décembre 2013
© Marc Chesneau – Julien LUtt/StorYBox-photo
Échos | à la une |
© Adeline Poulain
14
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portrait 17
« Je n’ai pas
la prétention
de changer
le monde,
mais j’essaie
de faire avancer
les choses. »
1983
Exil à Paris, découverte
du jazz, rencontre avec
Jean Hebrail.
1996
Sortie de l’album Fifa, ses
rythmiques béninoises et son duo
Naïma avec Carlos Santana.
Première mission à
l’Unesco, concert au Prix
Nobel de la Paix.
2007 et 2008
Deux Grammy Awards du
Meilleur album de musique
contemporaine.
Angélique Kidjo
Flamme de l’Afrique
Ambassadrice de l’Unicef et vice-présidente de la Cisac, la diva béninoise fera son retour en grâce début
2014 avec un nouvel album, Ève, et une biographie, Spirit Rising. Portrait d’une femme accomplie.
D
ame de cœur, vocaliste virtuose, artiste engagée…
Angélique­Kidjo a déjà connu
mille vies. Depuis cinq décennies, la chanteuse béninoise aux deux Grammy Awards rayonne
d’un continent à l’autre dans toutes les langues. Fon, français, yoruba, anglais, brésilien, swahili… Si le Time Magazine l’a
consacrée « Première Diva d’Afrique » en
2011, l’ambassadrice de bonne volonté de
l’Unicef culminait l’an passé au top 100
des personnalités les plus influentes du
continent selon Forbes. Son aura semble
infinie. « Je n’ai pas la prétention de changer
le monde, mais j’essaie de faire avancer les
choses. Mon père m’a toujours répété “Tant
que tu rêves grand, tout est possible” »,
précise cette conteuse née doublée d’une
forte tête, qui dirige également la Fondation Batonga pour soutenir l’éducation
des filles africaines.
Œuvre cosmopolite
Au fond, sa musique reflète son âme :
universaliste, mais fière de ses racines,
transgenres, explosive, ardente. Soit l’alchimie parfaite entre afro-pop, funk,
salsa, jazz, rumba congolaise, souk, makossa ou gospel.
« Tous ces courants viennent d’Afrique ! Un
jour, j’ai convaincu mon oncle qu’on pouvait
tout jouer sur du James Brown. Il a appelé des
percussionnistes, je me suis mise à chanter et
ça collait parfaitement ! » De fait, son œuvre
cosmopolite fourmille de collaborations
fertiles avec Herbie Hancock, Carlos
Santana­
, Manu Dibango, Quincy Jones,
Toumani Diabate… Ses hymnes Agolo et
We We ont même été remixés par Tricky et
le producteur électro Norman Cook, alias
Fatboy Slim, gage de leur profonde moder-
magsacem # 88
2002
nité. Deux ans après le lumineux Spirit Rising, Angélique Kidjo s’apprête à livrer Ève.
« Ève », comme le surnom de sa maman
Yvonne, qui l’accompagne sur le duo Bana.
« Ma mère et mes deux grands-mères m’ont
transmis la force et l’indépendance qui m’habitent aujourd’hui. Ève rend hommage à
toutes les femmes africaines, à leur beauté, leur
courage et leur résilience. Elles sont la colonne
vertébrale de l’Afrique. Sans elles, le continent
serait à genoux. » C’est à Merti, un village
massaï du Kenya, que son dixième album a
vu le jour. « J’étais en mission avec l’Unicef,
car il y a un taux très élevé de malnutrition
ri­
sévère de l’enfant. Ce fléau menace ter­
blement le développement du cerveau de zéro à
deux ans. Hélas, personne n’en parle. »
L’année 2014 marque, encore, la publication des mémoires d’Angélique Kidjo : un
gros pavé intitulé Spirit Rising. Il n’en fallait pas moins pour dérouler le fil de son
existence foisonnante. Cheveux peroxydés, sourire inaltérable, la pétulante quinquagénaire a fait ses premières gammes à
l’âge de 6 ans… Née un 14 juillet à Ouidah,
petite ville portuaire du sud du Bénin,
Angélique Kidjo­Kpasseloko Hinto Hounsino Kandjo Manta Zogbin (traduire « Le
sang d’une lanterne ne peut allumer une
flammèche ») grandit à Cotonou au sein
d’une famille de dix enfants. Chorégraphe,
sa mère dirige une troupe de théâtre et
son père, fonctionnaire des postes, joue du
banjo. La fillette rejoint très tôt l’ensemble
familial, puis découvre la soul et le
rythm’n’blues avec ses frères – le Kidjo
Brothers Band – et les textes engagés de la
chanteuse sud-africaine Miriam Makeba,
son idole absolue. Révoltée dans l’âme, elle
écrira une chanson sur Winnie Mandela
en 1979, avant d’enregistrer le disque Pretty, à Paris. Angélique a 20 ans. Mais de
octobre-décembre 2013
retour au Bénin, la petite étoile africaine
déchante. Depuis le coup d’État militaire
de 1974 qui a installé au pouvoir Mathieu­
Kérékou, l’oppression gangrène le pays et
les artistes sont priés d’exalter le régime
marxiste-léniniste en place. « Soit je partais
d’ici, soit je finissais en prison, car je ne comptais pas la fermer. En 1983, j’ai profité du
mariage d’une cousine qui vivait près de l’aéroport pour embarquer en douce dans un
avion ». Une extraction rocambolesque
qui la mène à nouveau à Paris.
Étudiante au Cim, prestigieuse école de
jazz, Angélique Kidjo fera la connaissance
de son futur époux, le bassiste Jean Hebrail­.
En 1989, après quelques albums enregistrés au sein du groupe Pili Pili, elle va synthétiser en solo ses influences sur Parakou.
Femme du monde
Les décennies suivantes seront couronnées
par le prix RFI-Sacem (Logozo), un retour
aux sources béninoises (Fifa), la naissance
de sa fille Naïma, un dé­
mé­
na­
gement à
New York et une trilogie d’albums qui retrace les routes de l’esclavage (Oremi, Black
Ivory Soul, Oyaya !). Décidément sur tous
les fronts, Angélique Kidjo vient d’être élue
vice-présidente de la Cisac (Confédération
internationale des sociétés d’auteurs et
compositeurs) pour représenter l’Afrique.
« La plupart des jeunes artistes ne sont pas rétribués. Je défends leur droit à la propriété intellectuelle, assène-t-elle. À l’heure du téléchargement illégal, il faudrait que tous les pays
du monde signent une charte pour que toute
œuvre d’art soit rémunérée. » Femme du
monde, femme à poigne, Angélique­Kidjo
se veut surtout une femme libre. Ses chansons s’érigent en modèle d’émancipation et
d’ouverture culturelle. Humanistes, profondément engagées.
•
© Alexei Hay/Jed Root
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Bio
16
Musique story | Rencontre | coulisses | Agenda
Rencontre 19
Buffet-Crampon, le souffle du vent
Un homme heureux
« J’ai tiré le fil et le texte est né. »
Un grand bâtiment blanc
niché en périphérie
de Mantes-la-Ville, dans le
département des Yvelines,
à une cinquantaine de
kilomètres à l’ouest de Paris.
C’est là que Buffet-Crampon,
l’un des plus prestigieux
fabricants d’instruments
à vent, a installé son siège
social dès 1850. C’est là
aussi, au milieu des deux cent
cinquante techniciens
qui s’affairent dans cette
gigantesque usine, qu’officie
depuis trente-quatre ans
Sylvain Benoist.
Si les gens qui s’aiment sont toujours un peu les mêmes, ils sont nombreux, les gens qui aiment la
chanson de William Sheller : Un homme heureux, enregistrée presque à la sauvette, tout au bout d’un
album live piano-voix en 1991, et couronnée d’une Victoire de la musique l’année suivante, fait partie
des fleurons du répertoire de M. William. À l’heure où son créateur prépare un nouvel album, retour
sur la genèse d’un chef-d’œuvre.
Magsacem : Un homme heureux
est sans doute votre chanson la
plus populaire. Comment est-elle
née ?
William Sheller : C’est toujours un
peu mystérieux, la façon dont
viennent les chansons. Parfois, elles
naissent de situations très banales.
Pour celle-là, je me souviens qu’au
tout début, je suis parti un matin manger des huîtres à Deauville, avec une
amie. Quand je suis revenu dans
l’après-midi, un peu pompette, j’avais
en tête un vague petit bout de mélodie, je me suis mis au piano et petit
à petit, toute la mélodie est venue. Je
l’ai gardée pendant deux ans, en y
revenant régulièrement.
Et le texte ?
Les textes, c’est mon éternel problème. Depuis quarante ans que j’écris
des chansons, j’ai toujours l’impression
que j’ai déjà tout dit, ou que quelqu’un
magsacem # 88
Ci-dessus :
Extrait de la
partition originale
déposée
à la Sacem ;
William Sheller.
3
reprises en
langues étrangères
(anglais, espagnol
et italien).
Plus de
500 000
albums Sheller en
solitaire vendus.
24 000
visionnages
en streaming.
d’autre l’a déjà dit mieux que moi…
Je ne trouvais pas d’idée, j’avais juste
la phrase « je veux être un homme
heureux ». Et puis je suis tombé sur un
article de journal qui disait que les
vieux couples, ceux qui arrivaient à
vivre ensemble jusqu’à la vieillesse,
finissaient par se ressembler physiquement. Moi, je vivais une période de
solitude, je me demandais pourquoi
ce qu’il y a de bon n’arrivait qu’aux
autres… J’ai tiré le fil et le texte est
né. Après, on compte sur ses doigts
pour les syllabes et on essaie de faire
un truc qui se tienne, c’est un travail
d’horlogerie.
À l’époque, la chanson figurait sur
l’album Sheller en solitaire. C’était
même le tout dernier titre du
disque. Vous cherchiez à ce
qu’elle passe inaperçue ?
Je l’ai placée en dernier parce que le
disque était en public et que les gens
ne la connaissaient pas. Je ne pensais
pas qu’une chanson sur un album
enregistré seul au piano aurait un tel
impact. D’ailleurs, personne n’y croyait ;
ma maison de disques pensait que ça
ne marcherait jamais parce que c’était
une chanson triste. Mais au contraire,
c’est une chanson pleine d’espoir.
E
ntré dans l’entreprise à l’âge
de 16 ans, Sylvain a vécu
toutes les étapes d’un métier
aussi complexe que passionnant : fabriquer, au rythme
d’une centaine par jour, les clarinettes
et bassons qui enchanteront les musiciens du monde entier. Du traitement
du bois d’ébène venu d’Afrique à l’assemblage de l’instrument final, en passant par la fabrication des touches et
des clés métalliques, c’est toute une
chaîne qui exige minutie et précision.
Aviez-vous conscience que vous
teniez là quelque chose d’exceptionnel ?
Quand, à chaque concert, les gens se
lèvent à la fin de la chanson et la redemandent, on se dit qu’il se passe
quelque chose. Mais je ne pensais pas
qu’elle allait devenir l’arbre qui cache
le jardin…
Justement, aujourd’hui, comment
la considérez-vous ?
C’est parfois gênant parce qu’elle est
devenue une sorte de référence ; on
peut avoir l’impression que j’ai
commen­cé ma carrière avec cette
chanson. Sur scène, je suis évidemment obligé de la chanter. Mais je sais
qu’elle fait désormais partie de la vie
des gens, de leurs souvenirs. C’est ce
qu’il y a de plus émouvant pour un
auteur de chansons.
•
Facteur plutôt que luthier
Quand on lui demande de définir son
métier, Sylvain dit qu’il préfère la dénomination de facteur à celle de luthier.
Lui qui a débuté sa carrière avec un
CAP de chaudronnier, a vite été tenté
par l’univers de l’atelier dans lequel travaillait déjà une partie de sa famille :
« Ils en parlaient avec tant d’enthousiasme que je me suis dit que c’était fait
pour moi aussi. Même si je n’ai bénéficié
d’aucune éducation musicale, j’ai appris
sur le tas comment régler les instruments,
ce qu’étaient les doigtés, comment fonctionnaient les clés. Aujourd’hui, c’est une
véritable passion, je n’imaginerais pas
faire un autre métier ».
Engagé en février 1980, Sylvain a suivi
deux années d’apprentissage et a travaillé une quinzaine d’années en atelier de production avant d’être nommé
responsable de la clarinette Prestige
(l’un des fleurons du catalogue BuffetCrampon), puis chef de l’équipe de finissage : « Chez nous, à chaque étape, les
gens sont conscients de l’importance et de
la qualité de ce qu’ils fabriquent. Le produit final doit être irréprochable, et c’est la
raison pour laquelle nous sommes connus
mondialement ».
Aujourd’hui, la société Buffet Group,
leader dans le monde de la clarinette
professionnelle, a diversifié ses activités avec la fabrication de hautbois, de
cors anglais et de saxophones, et multiplié les showrooms entre New York et
Tokyo.
Quant à Sylvain, depuis le printemps
dernier, il œuvre dans l’atelier de réparation : « Je reçois les clients qui veulent
faire réviser ou régler leur instrument.
C’est un travail relationnel ; il faut prendre
le temps de discuter avec eux pour
comprendre­ce qu’ils désirent. Récemment­,
octobre-décembre 2013
j’ai dû adapter les clés d’une clarinette
pour un soliste dont le doigté était très spécifique. Les musiciens sont amoureux de
leur instrument, et nous sommes là pour
leur faire plaisir ».
L’une des tâches de Sylvain, et non la
moindre, est aussi de former les apprentis, qui deviendront les luthiers de
demain. « La transmission du savoir, c’est
quelque chose de très important dans
notre métier : apprendre aux nouveaux ce
que les anciens nous ont enseigné, pour
que la vie continue. »
•
« Récemment, j’ai dû
adapter les clés d’une
clarinette pour un
soliste dont le doigté
était très spécifique. »
Sylvain Benoist.
© Marc Chesneau
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© Lisa Roze
18
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coulisses | Agenda
Délégation. Défendre les droits des auteurs, compositeurs et éditeurs, membres de la Sacem,
est un travail de chaque instant. Dans toutes les régions de France, les délégués et leurs équipes
s’attachent à collecter ces droits. Des métiers de terrain au service de la création.
Coulisses 21
70
délégations de la Sacem
partout en France.
À Nancy, en passant par la Sacem…
— Nancy, sa néoclassique place Stanislas
dite « la place Stan », ses saveurs lorraines,
son dynamisme culturel… ici comme dans
soixante-dix communes françaises, la
Sacem est implantée depuis des décennies.
Au cœur d’un quartier en plein renouveau,
dans un immeuble récent, les locaux de la
délégation sont flambant neufs, tout en
élégance et modernité. Les visages des
lauréats des Grands prix Sacem ornent les
murs immaculés, aux côtés d’affiches qui
rappellent les chiffres clés et l’histoire de
cette société qui a plus de 150 ans. « L’espace
est ouvert, en transparence. Il favorise les
échanges et le travail collectif. À l’image de ce
que nous voulons faire », précise d’emblée
Bruno Quillet, délégué de la région de
Nancy. Aujourd’hui, comme tous les jours,
ce juriste de formation est arrivé au bureau
à l’aube. Il consacre ses premiers gestes à
la lecture rapide de la presse locale, avant
d’ouvrir un à un tous les courriers reçus
pendant le week-end. « J’en ai cent cinquante, ce matin ! Bordereau de recette, an-
magsacem # 88
nonce d’une manifestation, résiliation d’un
contrat, fermeture d’une boutique, attestations
de sociétaires… Je les lis tous attentivement.
Ils reflètent la diversité de nos missions »,
commente Bruno Quillet. Ces courriers
seront traités dans la journée par ses collaboratrices. Les dossiers plus sensibles
restent sur son bureau. Il les étudiera seul
ou avec son adjoint, Sébastien. À Nancy,
ils sont huit à faire vivre la Sacem sur le
terrain. Deux chargés de clientèle, Julien
et Jean-Marc, arpentent les rues nancéiennes et se rendent dans les différentes
communes de la région à la recherche de
nouveaux clients ou à la rencontre de celles
et ceux dont la situation doit être régularisée. « Nous préparons notre feuille de route
le lundi matin, nous faisons le bilan le vendredi après-midi. Le reste du temps, et parfois
le week-end, nous sommes à l’extérieur. Cafés,
magasins, restaurants, discothèques, salles
des fêtes… Nous allons partout, sans a priori,
et nous sommes presque toujours bien accueillis. C’est parfois difficile, mais il suffit d’être
courtois et pédagogue », confie Julien, particulièrement vigilant sur l’image de la
Sacem qu’il véhicule quotidiennement.
Au bureau, trois chargées de clientèle assurent la gestion des dossiers, le conseil
aux clients, les contrats… « Nous sommes
dans une démarche de mutualisation des
missions. La recherche de manifestations dans
les journaux, le traitement des courriers, les
appels… Tout le monde touche à tout », explique Bruno Quillet avant de nuancer :
« Certains de nos clients ont leurs interlocutrices privilégiées. Sylvie est bien identifiée
par la mairie de Nancy, Virginie par les compagnies de théâtre, par exemple ». Toutes et
tous ont en commun leur engagement et
leur attachement viscéral au droit d’auteur.
L’atout proximité
— Être délégué de la Sacem, c’est aussi
tenir une place particulière dans le paysage
institutionnel local. Bruno Quillet ne fait
pas exception. « Je rencontre souvent les élus
du territoire, nous avons de très bons rap-
700
employés de la Sacem travaillent
dans les délégations régionales.
14
délégations sont implantées
dans le Nord-Est de la France.
De gauche à droite : réunion d’équipe ; Marie-José Paquatte et Julien Elfassy, chargés de
clientèle ; Sylvie Isabelle-Monod, chargée de clientèle ; Luna Gritt sur scène en première
partie de Jacques Higelin, à Nancy.
« Je ne suis pas producteur, ni un révélateur
de talents, mais je peux Braquer un coup
de projecteur sur un créateur lorsque
je suis sensible à son professionnalisme. »
— Bruno Quillet, délégué de la région de Nancy
ports », assure-t-il. Détail amusant : un des
députés de Meurthe-et-Moselle est luimême sociétaire. S’il en avait le temps,
Bruno Quillet pourrait être toutes les semaines aux rendez-vous municipaux. Il
fait partie de ceux que l’on n’oublie jamais
d’inviter. « Je suis présent aux ouvertures de
saison ou de festival. Mais mon métier est
surtout fait de nombreuses rencontres informelles », explique-t-il en souriant. Régulièrement, Bruno Quillet fait des présentations sur la Sacem et le droit d’auteur :
« J’interviens à l’Opéra de Nancy, à L’autre
Canal – une salle de musiques actuelles –, à
Music Academy International… Je participe
aussi à des tables rondes ou colloques ». Un
lien précieux qu’il tisse au jour le jour et
qui serait impossible sans ce maillage
territorial, qui fait de la Sacem la société
d’auteurs la plus performante au monde.
La Maison des créateurs
— La région de Nancy compte près de
neuf cents sociétaires. La délégation est
leur maison commune : l’endroit où ils
peuvent venir se renseigner sur leurs
droits ou obtenir des conseils pour leur
carrière. Un jour, SEdd, auteur et compo­
si­teur, a poussé la porte. Il a discuté avec
Bruno, qu’il avait déjà souvent croisé, et
octobre-décembre 2013
lui a laissé son album. « Je ne suis pas
producteur, ni un révélateur de talents, mais
je peux braquer un coup de projecteur sur
un créateur lorsque je suis sensible à son
professionnalisme », explique le délégué,
qui n’a pas hésité à parler du groupe de
SEdd et Claire V., Luna Gritt, lors d’une
réunion à la mairie de Nancy. Un coup
de pouce qui leur a permis de se produire
devant plus de mille cinq cents personnes
en première partie de Jacques Higelin,
cet été. Un moment magique. « Sans ce
concert, sans l’aide de la Sacem, nous n’aurions jamais été repérés pour participer au
Nancy Jazz Pulsation­. Cela nous a apporté visibilité et crédibilité », confie avec modestie SEdd, qui vient de décrocher une
bourse d’écriture de la Sacem. Il ajoute :
« Nous nous sentons ici chez nous. Il faut
d’ailleurs que je revienne voir Bruno au
sujet de mes droits et au sujet du nouveau
programme Sacem Plus. J’ai quelques questions ! ». Bruno lui rappelle alors que les
portes sont ici toujours ouvertes.
•
© Éloïse Dufour – Jean-Claude Fourez
20
Agenda
agenda 23
de jeunes cinéastes venus
des quatre coins de la planète.
Parallèlement à la compétition,
la Sacem et le CNC organisent
un atelier musique du 26 au
30 novembre, au cours duquel les
compositeurs David Reyes, Julie
Roué, Fabien Cali et Nigji Sanges
iront à la rencontre de jeunes
réalisateurs travaillant sur leur
premier film post-école.
FESTIVALs
>
Concerts \
Musique d’aujourd’hui
Hommage
>
d’une collaboration artistique avec
Ibrahim Maalouf, qui l’avait repérée
dans un club de jazz parisien. La
chanteuse, qui rafle des prix de jazz
un peu partout dans le monde avec
son groupe Isabelsörlingfarvel, sera
en concert le 10 décembre prochain
au New Morning à Paris.
> Paris, 10 décembre
Cinéma
>
Cinémathèque \
Toute la mémoire
du monde
Du récital intimiste au grand concert
d’orchestre, le festival de Musique
actuelle Nice Côte d’Azur (Manca)
offre chaque année une
programmation d’une belle diversité.
L’édition 2013 ne déroge pas à la
règle avec, notamment, un concert
de l’ensemble Plural en présence
des compositeurs F. Tanada,
Y. Robin, F. Panisello et
V. Tarnopolski (le 24 novembre) ou
encore l’opéra de chambre dédié au
jeune public, La maison qui chante,
de Betsy Jolas, par l’ensemble
instrumental Ars Nova et le Carosse
d’Or (le 30 novembre). De nombreux
temps d’échange seront également
proposés : rencontres avec
les professionnels de la musique
contemporaine, ateliers d’initiation,
master-class d’instruments,
rendez-vous interdisciplinaires…
> Nice, 19 novembre-1er décembre
www.cirm-manca.org
Rencontres \
Compositeurs
et réalisateurs
Les rencontres internationales
Henri-Langlois accueillent chaque
année depuis déjà trente-six ans, à
Poitiers, le meilleur du jeune cinéma.
Le festival y sélectionne une
quarantaine d’œuvres réalisées par
magsacem # 88
Ils aborderont concrètement avec
eux la composante musicale de
leurs projets. À l’issue de cet atelier,
le film Les Chiens, d’Angèle Chiodo,
dont la musique a été composée
par Julie Roué, sera projeté : une
collaboration née lors de la première
édition de l’atelier musique, en 2012.
Histoire d’un explorateur
> 29 novembre-8 décembre
Éclectique, décalé, parfois mordant… Nino Ferrer fait chanter la France
depuis le début des années 60 avec des compositions aux accents jazz,
swing, blues et Rythm and Blues. Quinze ans après sa disparition, la
Sacem lui rend hommage.
Le 23 septembre dernier, l’auditorium Debussy-Ravel (Sacem) était bondé
pour la soirée hommage à Nino Ferrer, en présence de son épouse, Kinou, et
de ses deux fils, Pierre et Arthur Ferrari. Auteur, compositeur, interprète, musicien,
peintre… Nino Ferrer était un homme accompli, aux centres d’intérêt multiples :
diplômé d’ethnologie et d’archéologie préhistorique, il aurait voulu être explorateur.
Cet amoureux des voyages, né à Gênes et ayant grandi en Nouvelle-Calédonie, est
ainsi parti à la découverte du monde à bord d’un cargo. Très rapidement, la musique
devient son champ d’exploration privilégié. Il écrit et compose près de deux cents
chansons, parmi lesquelles Mirza, Les cornichons, Le téléfon ou encore Le Sud, qui
ont connu un véritable succès. Le titre C’est irréparable, devenu Un año de amor, sera
utilisé par Pedro Almodovar dans son film Talons aiguilles. Nino Ferrer est célèbre
pour son allure de dandy et son ton plein d’humour. Mais trop peu nombreux sont
ceux qui connaissent l’homme discret, profond et cultivé, qui n’a jamais cédé aux sirènes
du show-business parisien. À l’occasion du quinzième anniversaire de sa disparition,
plusieurs événements vous permettront de mieux connaître l’homme et l’œuvre de
Nino Ferrer : la sortie de trois albums (l’Intégrale, Nino Swingue et Nino Kids) et la très
riche exposition « Nino Ferrer, il était une fois l’homme… » à la Médiathèque JoséCabanis, à Toulouse.
> Toulouse, 14 novembre 2013-14 février 2014
> www.nino-ferrer.com
www.rihl.org
Créations
>
Talent Jazz \
Isabelle Sörling
Elle fait partie
de ces rares
chanteuses que l’on
reconnaît dès les
premières notes.
Ces virtuoses à la voix inimitable.
Isabelle Sörling, jeune talent jazz
soutenu par la Sacem, sort son
premier album, Something came
with the sun, début novembre. Teinté
d’influences diverses, cet album au
folk fragile et nordique est le fruit
Dédié à la découverte des films du
passé, le festival « Toute la mémoire
du monde » repousse les limites de
notre connaissance du cinéma et
permet de renouveler le regard que
nous portons sur lui. Ce festival est
né du désir de montrer des films
récemment restaurés à travers le
monde et de faire comprendre les
enjeux historiques, techniques et
esthétiques de la restauration grâce
à un accompagnement scientifique
original. Ainsi devient-il possible de
susciter un nouveau rapport à des
œuvres anciennes, classiques ou
incunables. Partenaire privilégié
de cet événement, le Fonds culturel
franco-américain renouvelle son
soutien à cette deuxième édition, qui
rendra hommage à la cinémathèque
de Bologne.
Tournée
>
Scène Sacem \
Les jeunes talents
taillent la route
Maillage inédit et original entre formation et diffusion,
la tournée du Chantier des Francos est née d’une
collaboration étroite entre la Sacem, les Francofolies
et les salles de musiques actuelles. Objectif : valoriser
les créations de jeunes artistes qui bénéficient
d’une formation au sein du Chantier des Francos,
à La Rochelle, pendant plusieurs mois. La tournée est
un prolongement nécessaire pour leur insertion
professionnelle, puisque la scène est l’endroit idéal pour
progresser. Forte de son succès, la tournée est accueillie
chaque année par six prestigieuses scènes, partout
en France. Les 2 et 3 octobre derniers, c’est à
La Maroquinerie, à Paris, que la 4e édition de la Tournée
du Chantier des Francos a commencé. Le principe est
toujours le même : au programme du premier soir,
showcase de trois artistes régionaux. Le lendemain
matin, coaching artistique par l’équipe pédagogique du
Chantier des Francos et des professionnels de la filière
musicale, permettant un retour sur le concert de la veille.
Enfin, le deuxième soir, le concert public de trois artistes
du Chantier des Francos. Des moments forts de création
et de partage.
L’occasion, aussi, pour ce Fonds
d’organiser une projection du
célèbre film de Renoir, Une partie de
campagne, dans sa dernière version,
restaurée cette année.
> Prochaines dates : 13-14 novembre au Théâtre Luc Donat,
> Paris, Cinémathèque française,
13-14 décembre au VIP, à Saint-Nazaire.
3-8 décembre
> En savoir plus : sacem.fr > actions culturelles
sur L’île de la Réunion, 21-22 novembre au Rocher de Palmer,
à Cenon, 28-29 novembre au Fil, à Saint-Étienne,
Les manifestations culturelles soutenues par la Sacem sont réalisées, notamment, grâce au financement issu
des ressources de la copie privée. Consultez toutes les informations dans l’espace Actions culturelles sur
sacem.fr.
octobre-décembre 2013
© Juju Music – Walker EP – Stephany Dray – Magali Boyer – Sarah Bastin – Polas – Emma Picq – Maxime Raimond
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© P. Pascuttini
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