Frais et parfumé, le taboulé est la star des salades estivales

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Frais et parfumé, le taboulé est la star des salades estivales
Gastronomie
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Le Matin Dimanche | 31 juillet 2016
Frais et parfumé, le taboulé
est la star des salades estivales
De saison Chaque été, il déboule dans les assiettes. Très végétal selon la recette libanaise, plus riche
en céréales dans sa version maghrébine, ce plat originaire des pays arabes est désormais universel.
Frédéric Rein
S
ous sa forme originelle, le
vert du persil et de la menthe prend nettement le dessus sur le brun du boulgour
(blé dur concassé), le rouge
des tomates et le blanc des
oignons. «Dans certaines
régions du Liban, comme dans mon restaurant, on ne met même pas de boulgour dans
le taboulé, précise d’emblée Fadi Helbawi,
patron et cuisinier du restaurant libanais La
Bohème, à Bienne (BE). Mais l’important
est vraiment de le réaliser à la minute, sous
peine de perdre la fraîcheur qui le caractérise, notamment liée à l’abondance de jus
de citron.»
Cette «salade assaisonnée» (traduction
littérale de l’arabe), star des mezze au
Moyen-Orient, connaît en effet de nombreux particularismes régionaux. Ainsi, en
Arménie, on ajoute de la laitue, en Palestine
du concombre, et dans d’autres régions encore des épices, comme de la cannelle.
Dans sa version dite orientale, que l’on
associe aux pays du Maghreb, le taboulé se
compose majoritairement de semoule de
blé dur (grains de couscous), alors que dans
le «qisir» turc, le boulgour prédomine et
s’associe à l’ail et au concentré de tomates.
«Comme souvent en cuisine, les recettes
sont différentes d’un pays à l’autre, et même
d’une localité à l’autre, souligne Toni Chidiac, chef du restaurant lausannois Obeirut Lebanese Cuisine. On le constate par
exemple aussi avec
les falafels, les
boulettes de
pois chiches.
Cette multiplicité de recettes représente une vraie richesse culinaire.»
protéines, comme de la viande, du poisson,
des œufs, du tofu, du fromage ou une association de céréales et de légumineuses.»
Des aliments que l’on peut très bien intégrer directement dans le taboulé. Certains
apprêtent en effet la semoule avec du saumon fumé et une sauce à l’aneth, d’autres
avec de la mangue, de l’avocat et de la
dinde. Bref, chacun peut réinventer la recette du taboulé selon ses goûts ou ce qu’il a
dans son réfrigérateur! A l’Auberge de Landecy, à Genève, la semoule est mariée aux
crevettes sauvages et au suc de tomate au
printemps et a été récemment servie en entrée du jour accompagnée de chair de crabe
et d’épices orientales. «Le chef remet régulièrement le taboulé à la carte, ce qui prouve
que c’est un plat qui marche bien, com-
«L’important
est de le
réaliser
à la minute,
sous peine
de perdre
la fraîcheur
qui le
caractérise»
Fadi Helbawi,
Restaurant
La Bohème,
Bienne (BE)
mente Denis Blanjot, maître d’hôtel de
l’établissement. Nous en avons aussi proposé à base de quinoa.»
Derrière l’appellation taboulé se cachent
désormais mille et une recettes. Grâce au
quinoa ou à la semoule de maïs, même les
personnes intolérantes au gluten peuvent
en manger. On peut aussi opter pour le taboulé de chou-fleur qui, une fois râpé,
prend la place de la céréale. En entrée, en
accompagnement ou en plat principal, au
restaurant comme à la maison ou en piquenique, le taboulé a toutes les caractéristiques d’un plat universel: facile à faire, assez
vite préparé, pas cher, adaptable à tous les
régimes alimentaires et délicieux. Pas étonnant que la plus populaire des salades du
monde arabe ait conquis l’Occident. U
Des valeurs
nutritives différentes
Si les ingrédients restent sensiblement
les mêmes, les proportions changent beaucoup, et avec elles les valeurs nutritives,
comme l’explique Roger Batalla, diététicien
HES à l’Espace Prévention Lausanne: «La
variante verte libanaise constitue assurément l’une des cinq portions de fruits et légumes quotidiennes, alors que celle centrée
sur la céréale est comptabilisée comme un
féculent. De fait, pour que le repas soit équilibré, il faudra compléter cette salade végétarienne avec la source nutritionnelle manquante. Et, dans les deux cas, ajouter des
Taboulé libanais
Ingrédients (pour 4 personnes)
300 g de persil plat
30 g de feuilles de menthe fraîche
200 g de tomates mûres
100 g d’oignons nouveaux
20 g de boulgour brun
3 dl de jus de citron frais
3 dl d’huile d’olive
15 g de sel
15 g de poivre
Préparation
Hacher fin les feuilles de persil et de menthe,
ciseler finement les oignons et couper
les tomates épépinées en dés. Pendant ce
temps, cuire le boulgour dans de l’eau salée.
Mélanger le tout, puis ajouter l’huile d’olive
et le jus de citron fraîchement pressé.
Saler et poivrer.
Recette de Toni Chidiac, du restaurant
et traiteur Obeirut Lebanese Cuisine,
à Lausanne (VD).
Persil et menthe
sont les premiers
ingrédients
du taboulé libanais
et lui donnent sa
belle couleur verte.
Nurra/Photocuisine
Un vin Le gamay
Gourmandises par Toni Chidiac
DR
Contrôle qualité
et de salades, aux saveurs
très différentes.»
Fraîcheur Le taboulé y tient
une place centrale. «Un bon
taboulé dépend du dosage
des ingrédients, qui doivent
toujours être très frais», note
le cuisinier. Aux côtés de cette
salade, on trouve notamment
le moutabal (caviar d’aubergine), le houmous (purée de pois
chiches), les feuilles de vigne
farcies, les sambousek (petits
chaussons de pâte brisée farcis
à la viande ou au fromage)
ou encore le fattouche, salade
à base de tomates, salade verte,
radis, concombre, oignon
et sumac, épice qui lui confère
un goût acidulé. A manger, bien
évidemment, avec du pain (non
levé) libanais, que l’on utilise
aussi pour saisir les aliments.
Qualité «Les trois quarts de
la réussite des plats libanais
dépendent de la qualité de la
matière première», ajoute-t-il,
évoquant aussi le très emblématique chawarma, cette
viande cuite à la broche. Un
voyage culinaire qui se termine,
comme il se doit, sur des
desserts aux saveurs d’Orient,
où se côtoient des notes de fleur
d’oranger, de pistache, de miel
et d’amande.
Obeirut Lebanese Cuisine,
rue Belle-Fontaine 2,
Lausanne (VD), 021 349 10 10,
www.obeirut.com
Maurice Zufferey,
vigneron-encaveur
en Valais,
conseille
ce rouge léger
avec le taboulé.
«Notre gamay Tsans
de la Lé a une belle
légèreté qui me semble
se marier à merveille
avec un taboulé,
qu’il soit fait à la mode
libanaise ou maghrébine. Assez vif en
bouche, il possède
des notes de sous-bois
et de fruits rouges,
DR
Dans le restaurant
lausannois Obeirut
Lebanese Cuisine,
le chef Toni Chidiac
concocte des plats
traditionnels du Liban,
son pays d’origine.
Goûter aux plats de Toni
Chidiac, c’est entamer
un voyage qui nous conduit
près de 2500 kilomètres plus
à l’est. Au Liban, précisément,
pays d’origine du chef
du restaurant lausannois
Obeirut Lebanese Cuisine,
qui joue aussi les traiteurs
et dispose d’un food truck.
«Nous proposons une cuisine
traditionnelle, festive
et authentique, incarnée par les
mezze, explique-t-il. Ces petits
mets (au Liban, il en existe une
trentaine, chauds ou froids, ndlr)
pourraient être comparés,
sur la forme, aux tapas
espagnoles. Ils se composent
surtout de plats végétariens
notamment de framboise,
qui s’accordent bien
avec la menthe et l’acidité
du citron d’une
telle salade.»
Et avec quels plats?
«Pas trop tannique
ni trop structuré, c’est
vraiment un vin d’été,
tout en fraîcheur,
que l’on pourra aussi
associer à des plats
comme un tajine
de veau ou un magret
de canard.»
Cave Maurice Zufferey,
chemin des Moulins 52,
Sierre (VS),
027 455 47 16,
www.mauricezufferey.ch