Le cumul emploi / études chez les étudiants

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Le cumul emploi / études chez les étudiants
Les étudiants salariés des sciences de l'éducation.
Cumul des études et d'un travail salarié : quelles conséquences
sur la réussite au diplôme ? Sur l'efficacité de la formation ?
Coordination
Patrick Berteaux, Université de la Réunion, CIRCI
Françoise F. Laot, Université Paris Descartes, CERLIS
Nous proposons de prolonger et approfondir la journée d’étude proposée par l’Association des
enseignants et chercheurs en sciences de l’éducation du 17 mai 2008.
Lorsqu'elles se sont constituées en tant que discipline universitaire en 1967, les sciences de
l'éducation s'adressaient surtout à des salariés-étudiants : enseignants, travailleurs sociaux,
formateurs d'adultes. Avec la création des IUFM et le concours d'entrée au niveau Licence, le
public des départements universitaires des sciences de l'éducation a considérablement rajeuni.
Les "vrais" étudiants, en formation initiale, certains n'ayant aucune expérience professionnelle,
ont fait leur apparition, dans certains endroits de manière massive.
Depuis quelques années, une nouvelle tendance semble se dessiner, en sciences de l'éducation
comme dans d'autres disciplines, l'émergence d'un nouveau public d'étudiants salariés
cumulant études et emploi à temps partiel, voire à temps complet. Certains de ces emplois
n'ont rien à voir avec les questions d'éducation (restauration, caisses de supermarchés...).
D'autres, comme les emplois dans l'animation de centre de loisirs ou d'actions périscolaire ou
de soutien scolaire, voire de baby sitting, etc. sont, au contraire, très directement reliées à
certaines problématiques éducatives. Les étudiants pourraient alors être de fait mis en
situation de quasi alternance, mettant à l'épreuve théorique leurs pratiques professionnelles.
Que sait-on - que peut-on savoir - aujourd'hui des conditions de vie des étudiants de sciences
de l'éducation par rapport au travail, en termes quantitatifs, mais aussi qualitatifs (durée de
travail, types d'emploi, de pratiques professionnelles...) ? Comment se mixent ces différents
publics : salariés étudiants, étudiant à temps complet, étudiants salariés ? Comment "s'y
retrouvent-ils" ? Ont-ils tous les mêmes chances de parvenir au bout de leurs études ? En quoi,
à quelles conditions, un étudiant salarié peut-il tirer profit de son activité extra-universitaire ?
Que lui apporte cette expérience de travail salarié en matière d'insertion professionnelle ? Les
dispositifs de formation peuvent-ils être adaptés pour permettre à chacun d'aller au bout de
son projet de formation ?
C'est à examiner cet ensemble de question qu'invite le symposium, il devrait également
permettre d'aboutir à des propositions à faire aux responsables de l'observatoire de la vie
étudiante et à éventuellement d’autres institutions susceptibles de fournir des données, en ce
qui concerne la prise en compte de nouveaux indicateurs dans les enquêtes annuelles afin
d'affiner les données exploitables.
Mots clés : étudiants – salariés ; salariés – étudiants ; sciences de l’éducation ; emploi ; études
universitaires
Le cumul emploi / études chez les étudiants
Le cas des étudiants en sciences de l’éducation
Saeed Paivandi
ESSI-CRES (Centre de recherche sur l’enseignement supéieur)
Université Paris 8
La condition d’étudiant est souvent définie en rapport avec l’environnement et les pratiques
d’études mais aussi en prenant en compte le cadre de sa vie sociale et économique. Les
enquêtes sur la vie étudiante depuis les années 1980 tendent à associer la condition de vie et
d’études des étudiants avec leur parcours et leur performance universitaire. Cependant, les
indicateurs établis par le ministère se construisent en rapport avec les données purement
“scolaires” : la réussite universitaire se calcule à la fois au niveau final des études et au
rythme du parcours. Les étudiants les plus “performants” sont ceux qui parviennent au plus
vite au terme du parcours universitaire. Ces indicateurs de performance ne s’intéressent pas
souvent aux facteurs sociaux qui augmentent les risques d’échec ou d’abandon. Par exemple,
on connaît bien l’interférence entre l’exercice d’une activité rémunérée et les exigences des
études universitaires. Pour les étudiants qui exercent une activité rémunérée au cours de leurs
études, semblent être davantage exposés aux les phénomènes comme l’absentéisme,
l’interruption précoce des études ou leur prolongation. Ce qu’on appelle la « précarité »
étudiante est un facteur à prendre en considération dans le débat sur la performance
universitaire des étudiants. Les établissements de l’enseignement supérieur ou les différentes
filières d’études ne sont pas concernés de la même façon par ce phénomène de précarité
étudiante. Ma communication tente d’examiner le phénomène concernant le travail étudiant,
son ampleur, ses caractéristiques et ses impacts en s’appuyant sur le cas particulier des
étudiants inscrits en sciences de l’éducation. J’ai exploré l’enquête de l’OVE (2006) sur les
étudiants tout en m’appuyant sur les entretiens que j’ai réalisés dans le cadre de mon enquête
sur les étudiants entre 2002 et 2006.
Etudier à l’université et travailler
La lecture des différentes enquêtes récentes sur la vie étudiante permet de constater que parmi
les difficultés inhérentes aux conditions de vie étudiante, le problème financier demeure le
plus fréquemment cité par les étudiants. Dans cette perspective, exercer une activité
professionnelle, quelque soit sa durée et sa nature s’impose comme une solution souvent
inévitable pour financer ses études. Ce phénomène se développe un peu partout en Europe (M.
Wolbers, 2001) et ailleurs et le terme d’étudiant-travailleur ou d’étudiant-salarié est de plus en
plus utilisé dans la littérature sur les étudiants.
Le travail sur l’économie et le budget des étudiants (les dépenses, l’activité rémunérée, la
bourse, les aides familiales ou publiques) doit prendre en compte la particularité de cette
catégorie sociale. En effet, la spécificité de la vie étudiante et leur dépendance familiale
empêchent à assimiler leur condition aux catégories habituellement utilisées pour décrire
l’économie des ménages (le « budget », le « seuil de pauvreté »...). Cependant, depuis les
années 1980 les différentes enquêtes sur les étudiants révèlent les difficultés financières des
étudiants et la condition de vie déplorable de certains groupes d’étudiants qui ne peuvent pas
compter sur le soutien de leur famille. Elles montrent également qu’on est face à des
situations très contrastées variant entre la dépendance totale et l’autonomie relative ou totale.
Les différentes enquêtes sur la vie étudiante montrent bien que la famille des étudiants
participe très souvent au financement de leurs études. L’aide familiale peut prendre des
formes différentes et parfois son chiffrage pose un vrai problème. Un nombre important
d’étudiants continuent à cohabiter avec les parents et l’aide familiale constitue parfois
l’essentiel du budget étudiant. Les données de l’OVE 1 montrent également que cette
dépendance familiale tend à diminuer avec l’âge. On constate que la prise en charge familiale
est nettement plus significative au début du parcours supérieur. Inversement, la part des autres
sources financières comme le revenu de l’activité professionnelle augmente progressivement.
C’est à 23 ans que le revenu personnel devient supérieur à l’aide familiale (Grignon et Gruel,
2000, p. 164) ou C’est à 24 ans que les étudiants « cohabitant » deviennent minoritaires.
Cette analyse est particulièrement vraie pour les étudiants en formation initiale. En revanche,
les étudiants adultes en reprise d’études semblent être une catégorie tout à fait à part quant à
leurs conditions de vie et leur relation aux activités salariales ne ressemble pas souvent à celle
de leurs jeunes camarades assis à leur côté les bancs de l’université. Beaucoup de ces
étudiants adultes en reprise d’études associent tant bien que mal leur activité professionnelle
aux études supérieures. Certains se trouvent également en situation de rupture de l’activité
professionnelle tout en bénéficiant un dispositif financier (CIF…) de formation (Farzad et
Paivandi, 2000).
Dans l’ensemble, l’autonomie financière des étudiants est assez fragile et faible car une partie
de leurs sources proviennent de l’assistance et leur activité rémunérée est souvent précaire. Le
revenu de l’activité professionnelle est très variable selon le cas : on procure un « appoint » et
parfois il s’agit d’un simple argent de poche ou de financer une grande partie de ses dépenses.
Les enquêtes menées par l’OVE et l’INSEE montrent que la diversité notable des situations
dans le processus d’accès à l’autonomie financière renvoie souvent à l’origine sociale des
étudiants et à leur volonté de réduire la tutelle familiale. L’autofinancement des études semble
être un processus inégalement vécu par les uns et les autres. Cependant, le désir de
s’autofinancer dépasse le clivage des classes sociales. On voit que l’exercice d’une activité
professionnelle s’observe également chez les jeunes d’origine favorisée sans que son sens soit
le même, pour certains il s’agit d’un revenu pour « survivre » et pour les autres un revenu
d’appoint. De même, les activités salariées ne sont pas homogènes, et se distinguent par leur
durée hebdomadaire ou mensuelle, leur statut occasionnel ou régulier, leur degré de relation
avec les études et le montant des revenus qu'elles fournissent.
Les enquêtes triennales régulières de l'OVE (la première en 1994 et la dernière en 2006) font
un point chiffré et complet sur les conditions financières des étudiants. Elles montrent que,
d'une façon générale, les étudiants tendent à combiner en majorité plusieurs sources de
revenus afin d'assurer le financement de leurs études. Trois sources sont souvent mentionnées
par les étudiants : les revenus du travail salarié, l'aide familiale dans ses formes multiples et
les aides publiques directes. Le poids de chaque source varie selon la situation de chaque
groupe d'étudiants. Le mode de financement « unique », c'est à dire provenant exclusivement
d'une seule de ces sources, concerne une minorité d'étudiants.
Le rapport remis par l’OVE au Ministère de la jeunesse (Grignon, 2004), de l’Education
Nationale et de la Recherche qui repose sur les résultats de l’enquête réalisée par l’OVE en
2000 fait un point complet sur cette question. C’est l’actualisation du précédent rapport, dont
on a conservé pour l’essentiel le plan et le raisonnement ; la proportion des étudiants en
difficulté par rapport à l’ensemble des étudiants et leurs caractéristiques ont en effet assez peu
changé depuis 1997. Les étudiants qui n’exercent aucune activité rémunérée pendant l’année
universitaire (en dehors des vacances d’été) sont encore majoritaires (54,5%) , mais moins
qu’en 1997 (63%). La part des étudiants qui exercent une activité rémunérée pendant l’année
universitaire (en dehors des vacances d’été) augmente donc : 37,2% en 1997, 45,5% en 2000.
Il en va de même pour la part de ceux qui exercent une activité rémunérée régulière,
susceptible d’entrer en concurrence avec leurs études.
1
. Observatoire de la Vie Etudiante mène depuis 1994 les enquêtes régulières sur les conditions de vie étudiante
en France.
Parmi ceux qui ont une activité, les deux-tiers travaillent occasionnellement, 18,5% travaillent
au moins à mi-temps, au moins six mois par an (soit 8,5% de l’ensemble des étudiants),
15,5% travaillent à plein temps (7% de l’ensemble). Le rapport de l’OVE tente d’établir un
bilan de la concurrence entre le travail et les études, il faut évidemment mettre à part les
activités rémunérées qui sont intégrées aux études (par exemple les emplois d’ATER, de
professeur stagiaire ou d’élève professeur, de vacataire universitaire, d’interne ou d’externe
des hôpitaux) ; elles concernent 22% des étudiants qui travaillent (L’OVE se base sur un
travail au moins à mi-temps, au moins six mois par ans pour qualifier un contrat de «
concurrentiel ».), 10% de l’ensemble des étudiants. Les activités rémunérées sans rapport avec
les études vont de l’activité d’appoint traditionnelle au métier à plein temps, des tâches
d’exécution aux emplois qualifiés susceptibles de déboucher sur un recrutement. Les plus
fréquentes sont la garde d’enfants, les leçons particulières mais aussi les « jobs » d’employé
de commerce.
Selon le rapport, les données de l’enquête sous-estiment sans doute légèrement le poids des
étudiants exerçant une activité rémunérée non liée aux études. On doit donc dire qu’au moins
les trois quarts des étudiants exercent au moins un petit job pendant l’été et/ou l’année
universitaire. Parmi ceux qui exercent une activité rémunérée pendant l’année universitaire
(soit près de la moitié de l’ensemble des inscrits), 80% ont un emploi parallèle aux études ; les
autres ont une activité au moins en partie intégrée à leurs études (stage, vacation dans un
laboratoire, internat hospitalier, etc. ). Le rapport se réfère au chiffre concernant ceux qui ont
fait un travail d’été (29% du total) pour conclure que seulement un étudiant sur quatre n’a pas
exercé une activité professionnelle : 13% une activité parallèle au moins à mi-temps, 24% un
travail permanent et 9% une activité intégrée aux études.
Les dernières données concernant 2006 confirment les tendances observées par les enquêtes
précédentes. Selon les résultants de l’enquête 2006, plus de 75 % des étudiants exercent une
activité rémunérée. Parmi eux, 31 % ne sont concernés que par des jobs estivaux. Néanmoins,
restent 9 % dont la profession est intégrée aux études (l’apprentissage et les stages
conventionnés), 25 % ont un job, 10 % ont une activité qui concurrence les études. Ces
travails sont effectués à 14 % par des catégories sociales populaires contre 11,5 % pour les
enfants de cadres supérieurs. Selon le rapport de l’OVE, Le fait que le travail rémunéré
permet d’améliorer la condition financière ne signifie cependant pas qu’ils échappent à la
précarité (Grignon, 2004).
Les données de l’OVE montrent également que la proportion de ceux qui exercent une
activité rémunérée augmente avec l’âge. La dernière enquête de l’OVE (2006) montre que le
taux d’étudiants exerçant une activité rémunérée pendant l’année universitaire varie
considérablement entre 23% et 73% selon l’âge : près de 23% des étudiants ayant 18 ans en
2006 déclarent avoir une activité régulière contre 73%. Les activités sont également très
différentes selon l’âge. Les étudiants les plus jeunes tendent à exercer plus souvent des «
petits boulots » occasionnels sans grande incidence budgétaire et sans conséquences scolaires.
Leurs aînés pratiquent plus fréquemment des activités régulières mais, selon notamment le
type d'études suivies, le niveau d’études, l'origine sociale, ils ont des chances inégales
d'exercer ces activités dans le cadre de leur formation ou, au contraire, en concurrence avec
elle.
Les données publiées par l'INSEE sur le travail étudiant (2004-2006) indiquent un taux
d’activité nettement moins élevé (19 % ont un « emploi »). L'étude de l'INSEE montre que
depuis 1990 l'emploi étudiant augmente d'une manière régulière. Deux raisons sont avancées
pour expliquer ce phénomène : la massification de l'enseignement supérieur et la présence
plus importante des enfants d'origine défavorisée. La professionnalisation accrue des études a
largement participé à l'augmentation de ce type d'activité professionnelle chez les étudiants.
Selon cette étude, le taux d’emploi des étudiants tend à évoluer au cours de l’année en
fonction du calendrier scolaire. Il est plus faible en début d’année scolaire (17 %) et plus
intense au printemps en raison des stages (20 %) et surtout pendant les vacances d’été du fait
d’emplois occasionnels (24 %)2.
Comme on a déjà remarqué dans les enquêtes de l'OVE, les données de l'INSEE montrent
également que le cumul emploi / études chez les étudiants peut avoir des formes très
différentes. L’activité exercée peut être formellement associée aux études (stages,
apprentissage) et si celle-ci n’est pas intégrée aux études, elle sera exercée de manière
régulière au cours de l’année ou seulement occasionnellement. L’activité peut comprendre
une charge horaire relativement lourde (nombre d’heures travaillées par semaine, travail le
soir ou la nuit). L'enquête statistique de l'INSEE tente de saisir les trois dimensions de ce
phénomène : formes d’emploi, conditions d’emploi et adéquation avec les études. Celles-ci
contribuent à construire une typologie des emplois des étudiants. Les types d’emploi exercé
renvoient aux raisons qui conduisent un étudiant à travailler : organisation pédagogique du
cursus, besoins financiers ou encore étape vers la vie adulte. L'INSEE tente d'examiner à
partir des modèles économétriques « toutes choses égales par ailleurs » les effets des
caractéristiques socio-démographiques et scolaires sur le fait d’exercer ces types d’emploi.
On tente également d’effectuer une classification hiérarchique fondée sur les variables
suivantes : la forme d’emploi (régulier, occasionnel, stage, apprentissage), le nombre d’heures
travaillées par jour, le nombre de jours travaillés par semaine, l’adéquation de la profession
avec le domaine d’études, avec le niveau des études, le travail de nuit ou en soirée. La
typologie élaborée permet de trouver les éléments de réponse « qualitatifs » du travail étudiant
au cours de l'année.
Selon cette étude, la moitié des emplois des étudiants du supérieur a un lien direct avec leur
formation. Il existe deux types d’emploi directement « intégrés » dans le cursus :
l’apprentissage et les stages. Les stages sont moins présents au début du parcours et de plus en
plus fréquents avec l’avancée dans les études. L’apprentissage est beaucoup plus utilisé dans
les formations professionnelles courtes (STS, IUT), et dans une moindre mesure, dans les
écoles d’ingénieur et de commerce. La palette des professions exercées dans le cadre de
stages est beaucoup plus large. Elle inclut en particulier des métiers qualifiés du secteur public
(médecins, infirmiers, enseignants...) qui exigent un stage d’entrée. Il existe également
d'autres types d'emplois en rapport avec la formation suivie par l’étudiant sans prendre la
forme d'un stage. Ces emplois, qui sont qualifiés de « pré-insérés », concernent 13 % des
étudiants ayant une activité. Ils sont plus fréquents chez les étudiants de premier cycle
professionnalisant, et surtout chez les doctorants. Il s’agit principalement d’allocataires de
recherche ou de médecins (41 % de ces emplois à eux seuls).
L’enquête de l’INSEE indique qu’un tiers des étudiants du supérieur qui travaillent occupent
un emploi régulier ayant peu de lien avec leurs études. Au sein de ces emplois, trois groupes
peuvent être distingués. Les emplois « d’attente » présentent une charge horaire lourde : ils
sont exercés au moins trois jours par semaine pour en moyenne 28 heures hebdomadaires. A
la différence des emplois « pré-insérés », ces emplois à la qualification peu élevée ne sont pas
en accord avec le niveau d’études des étudiants (les vendeurs et les employés ou techniciens
administratifs). Ces emplois sont toutes choses égales par ailleurs plus souvent exercés par les
étudiants en sciences humaines (sciences sociales, économie, droit).
Les emplois considérés comme « concurrents » se caractérisent par des horaires lourds et une
absence de lien avec le niveau et le domaine d’études. Souvent exercés le soir ou la nuit, ils
sont susceptibles de peser encore plus fortement sur les études. L'enquête de l'INSEE révèle
que les étudiants de cette catégorie expriment plus souvent que les autres le souhait de
changer d’emploi. Les surveillants, les serveurs et les coursiers sont les professions typiques
2
. Insee, enquêtes Emploi, 2004-2006
de ce groupe. Toutes choses égales par ailleurs, les étudiants en éducation et en lettres
exercent plus souvent ce type d’emploi. Cette forme d’emploi est d’autant plus fréquente que
les étudiants sont âgés inscrits au niveau licence (L3) ou maîtrise (M1). Les enfants d'origine
populaire exercent plus que les autres ce type d'emploi.
Les « emplois d’appoint » sont souvent exercés de manière régulière, n’ont de lien ni avec le
niveau ni avec le domaine d’études. En revanche, ce sont des emplois à temps très partiel : un
ou deux jours par semaine, le plus souvent le week-end. Les vendeurs, les caissiers et les
surveillants y sont surreprésentés. Ces « emplois d’appoint » sont plus fréquents chez les
étudiants en lettres, et, dans une moindre mesure, chez ceux en sciences humaines et en
éducation. Tout comme les emplois concurrents, ces emplois, dont la motivation est sans
doute financière, sont moins répandus chez les jeunes dont le père est cadre ou indépendant.
L'enquête de l'INSEE montre que le fait d'avoir un emploi régulier pendant ses études
condition d’une plus grande autonomie. Les étudiants occupant de tels emplois sont
généralement plus âgés, ont plus souvent un logement indépendant ou encore vivent plus
souvent en couple. Un étudiant qui a son propre logement a deux fois plus souvent un emploi
régulier qu’un étudiant qui vit chez ses parents. On peut également penser qu’avoir son propre
logement impose de nouvelles charges financières poussant l’étudiant à travailler.
Enfin, les 20 % restants des étudiants du supérieur qui travaillent le font de manière
occasionnelle : un ou deux jours par semaine, souvent le week-end (« petits boulots »), le plus
souvent pendant la période estivale (« jobs d’été »). Les professions les plus concernées par
ces « petits boulots » sont les suivantes : les emplois d’employé administratif, d’ouvrier, de
vendeur, de serveur ou d’animateur.
Les étudiants salariés en sciences de l'éducation
L’enquête de 2006 de l’OVE a été réalisée sur un échantillon de 25952 étudiants dont 282
inscrits en sciences de l’éducation. Les femmes comprennent une large majorité de la souspopulation inscrite en sciences de l’éducation (83% contre 66% pour l’ensemble) et les
étudiants de moins de 25 ans sont nettement présents (62% contre 89% pour l’ensemble). Les
étrangers constituent seulement 7% de la population étudiante (près de 15% pour l’ensemble
d’étudiants inscrits à l’université). Les étudiants inscrits en sciences de l’éducation se
distinguent également par leur origine sociale. Comme on peut voir sur le tableau 1, près de
deux étudiants sur trois ont un père ouvrier, employé ou ayant une profession intermédiaire
(56% pour l’ensemble). A l’opposé, les étudiants en sciences de l’éducation ayant un père
parmi les cadres supérieurs et les professions libérales sont largement sous représentés. La
comparaison des étudiants de plusieurs filières selon leur origine sociale révèle que ceux qui
sont inscrits en sciences de l’éducation et en AES peuvent être considérés comme les plus
« défavorisés » de l’Université.
Tableau 1 : l’origine socio-professionnelle des étudiants selon la filière d’tudes (l’enquête 2006 de l’OVE)
Agriculteur
Artisan
Cadre
Profession Employé
commerçant supérieur intermédiaire
Ouvrier
Total
Lettres
1%
8%
31%
25%
13%
22%
100%
Langues
2%
10%
25%
25%
14%
24%
100%
Sociologie
3%
10%
26%
24%
13%
24%
100%
Psychologie
3%
9%
25%
27%
12%
23%
100%
Droit
3%
11%
36%
21%
12%
17%
100%
Math
informatique
4%
8%
31%
26%
12%
19%
100%
AES
4%
7%
22%
22%
15%
30%
100%
Autres
4%
9%
34%
24%
11%
19%
100%
Biologie
4%
8%
33%
25%
11%
19%
100%
Géo-histoire
4%
7%
29%
27%
12%
21%
100%
2%
10%
22%
26%
12%
28%
100%
4%
9%
32%
24%
12%
20%
100%
Sciences
l'éducation
Profil moyen
de
Les résultats de l’enquête de l’OVE révèlent que les étudiants inscrits en sciences de
l’éducation ont un taux d’activité professionnelle nettement supérieur à la moyenne : 85%
d’entre eux disent exercer une activité professionnelle au cours de l’année ou seulement
durant l’été (le profil moyen étant de 76%). Cette différente devient encore plus importante si
on se réfère uniquement à l’activité professionnelle exercée pendant l’année. Selon les
données de l’enquête 72% des étudiants inscrits en sciences de l’éducation déclarent exercer
une activité rémunérée en dehors de la période estivale contre seulement 45% pour l’ensemble
de la population étudiante enquêtée. Le même taux est nettement moins élevé pour les
étudiants de certaines filières comme la biologie (36% d’actifs au cours de l’année).
Le taux d’activité chez les étudiants en sciences de l’éducation montre que la poursuite
d’études supérieures pour eux est parfois strictement subordonnée à l’exercice d’activités
rémunérées régulières. Issus de familles défavorisées socio économiquement, ils reçoivent
très peu d’aides financières de la part de leurs parents. Pour faire face à l’ensemble des
dépenses de subsistance et d’études, ces étudiants sont dans l’obligation de travailler
régulièrement pour compléter le versement des aides publiques (bourse sur critères sociaux et
allocation pour le logement).
La comparaison des taux d’emploi parmi les étudiants des différentes filières montre que le
travail ne permet pas de poursuivre n’importe quel type d’études. Les filières les plus
« exigeantes » et les plus sélectives impose que la vie des étudiants soit tout entière organisée
autour des études. Celles-ci (CPGE, IUT, STS, Grandes écoles…) ne tolèrent pas la
concurrence d’une activité rémunérée régulière. Les étudiants que le manque de ressources
oblige à travailler en sont pratiquement exclus. C’est seulement dans les filières où
l’organisation pédagogique est moins « lourde », que l’on peut travailler pour poursuivre des
études.
Tableau 2 : l’exercice d’une activité professionnelle selon la filière d’études (l’enquête 2006 de l’OVE)
jobs
activité très
concurrente des
études
Lettres
23%
23%
5%
33%
17%
100%
660
Langues
23%
27%
4%
30%
15%
100%
1805
Sociologie
15%
24%
5%
35%
20%
100%
487
Psychologie
18%
29%
5%
29%
19%
100%
1259
Droit
Math
infomatique
23%
33%
6%
28%
11%
100%
2496
26%
30%
13%
22%
10%
100%
786
AES
22%
35%
2%
29%
11%
100%
619
activité uniquement
Pas d'activité
l'été
activité intégrée aux
études
Total
Effectifs
Autres
25%
32%
12%
23%
8%
100%
14911
Biologie
27%
37%
10%
20%
5%
100%
1210
Géo-histoire
Sciences de
l'éducation
17%
32%
6%
29%
15%
100%
1259
15%
13%
6%
28%
38%
100%
281
Profil moyen
24%
31%
9%
25%
10%
100%
25773
Comme on l’a déjà observé, les modalités de l'emploi étudiant sont très variées : certains ne
travaillent que pendant les périodes de vacances, ou de manière saisonnière, d'autres de façon
régulière sur l'année. Il peut s'agir d'un emploi intégré au cursus (stage, interne des hôpitaux,
allocataire de recherche...), ou proche du domaine étudié. Un autre indicateur révélateur des
étudiants inscrits en sciences de l’éducation est la forte proportion de ceux qui exercent une
activité concurrente des études. Ce taux est près de quatre fois plus important que le profil
moyen et huit fois plus élevé que celui des étudiants inscrits en biologie. Dans la typologie
élaborée par l’OVE, ce type d’activité, très souvent sans aucun rapport avec le domaine
d’études prend une place importante dans la vie étudiante. Dans la majorité des cas, les
étudiants occupent pourtant un emploi non qualifié, sur des bases de rémunération minimales
(parfois non déclaré). Les étudiants sont majoritairement employés à temps très partiels (mitemps et moins), un quart détenant d'un contrat à temps indéterminé. La durée de l’activité
rémunérée constitue un autre indicateur traduisant la même tendance : 30% des étudiants ont
une activité de plein temps (contre 15% pour l’ensemble et seulement 10% pour les étudiants
inscrits en AES). Avec un écart moins important, le taux des étudiants inscrits en sciences de
l’éducation exerçant une activité à mi-temps (29%) est plus élevé que celui des autres filières.
Au total, 59% des étudiants en sciences de l’éducation déclarent exercer une activité
rémunérée à mi-temps ou à plein temps. En revanche, ils sont nettement moins nombreux
d’avoir exercé occasionnellement une activité professionnelle ou une activité régulière dont la
durée est inférieure à mi-temps.
Ces deux tableaux illustrent bien la situation nettement différente des étudiants inscrits en
sciences de l’éducation en ce qui concerne l’exercice d’une activité professionnelle au cours
des études universitaires. L’activité professionnelle concurrence leurs études et loin d’être une
pratique marginale. Par ailleurs, exercer une activité à plein-temps ou à mi-temps varie
considérablement selon le cycle d’études. Les étudiants inscrits en troisième cycle ont très
massivement un emploi à plein temps (62%) ou à mi-temps (23%). Les étudiants en premier
cycle sont nettement moins engagés dans le monde professionnel : un peu plus d’un étudiant
sur deux exerce une activité à plein-temps ou à mi-temps.
Animateur
14%
Autres activitˇs
36%
Employˇ de
commerce
13%
Enseignant
16%
Surveillant
21%
Le type d’activité fréquentée est une autre variable intéressante dans l’enquête de l’OVE.
Comme on peut le constater sur le graphique 1, plus d’un étudiant sur deux exerce une activité
dans les trois secteurs qui sont en rapport avec l’éducation ou l’école (surveillance,
enseignement et animation). Cette donnée montre que 49% des étudiants enquêtés inscrits en
sciences de l’éducation sont actifs dans des secteurs non-éducatifs et probablement sans
rapport avec leur projet d’avenir.
La durée d’activité est corrélée avec la nature de l’activité professionnelle. Les étudiants de
sciences de l’éducation ayant une activité en rapport direct avec l’école (surveillance ou
enseignement) ont plus de chance de l’exercer à plein-temps ou à mi-temps. Les animateurs
tendent à pratiquer leur métier occasionnellement ou dans un cadre temporel limité (quelques
heures par semaine). Les étudiants exerçant une activité comme employé de commerce la font
à temps partiel (mi-temps ou moins). Ceux qui travaillent dans les autres secteurs ont
tendance à exercer leur activité à plein temps (42%).
L’analyse des différentes variables en relation avec les besoins financiers des étudiants
inscrits en sciences de l’éducation selon leur situation familiale montre que le fait d’exercer
une activité rémunérée ne revêt pas le même sens. Comme on l’a déjà souligné dans les autres
enquêtes, pour une partie d’entre eux le travail permet d’avoir un revenu pour « survivre ».
Pour une autre catégorie (souvent plus jeune et au début de leur parcours supérieur) l’exercice
d’une activité est destiné à améliorer ses conditions de vie. Il ne s’agit ni d’un revenu pour «
survivre », ni d’un revenu d’appoint. Logés souvent chez leurs parents tout en bénéficiant
l’aide financière de la famille, les étudiants de cette catégorie semblent vivre dans une
situation financière intermédiaire. La famille ne parvient pas à couvrir la totalité de leurs frais
et le revenu du travail sert à arrondir les fins de mois pour avoir plus de conforts et diminuer
la charge de la famille. Ces étudiants ne travaillent donc pas dans l’urgence financière, ce qui
leur permet d’avoir plus de liberté dans le choix du métier et de sa durée. Un certain nombre
d’étudiants travaillent de manière régulière, sur des petits mi-temps afin de ne pas gêner le
déroulement de leurs études. Travailler pour un revenu d’appoint est souvent destiné à
financer les loisirs ou les achats personnels complémentaires. Les activités choisies par ces
groupes d’étudiants sont plus souples et parfois sont en lien avec leurs études (animation). On
peut mentionner également les activités occupées occasionnellement et de très faibles
volumes horaires (baby-sitting par exemple).
Dans l’ensemble on peut dire que l’exercice d’une activité professionnelle durant les études
universitaires a avant tout un caractère « économique » servant à financer partiellement ou
entièrement la vie étudiante. Cependant, le fait que plus de 50% des étudiants enquêtés
exercent leur activité en rapport avec l’éducation ou l’animation peut devenir un élément
positif ou une expérience constructive s’ils visent à s’orienter vers un métier d’enseignement.
Cependant, les données de l’enquête ne permettent pas de trouver quelques éléments de
réponses relatifs aux salariés adultes en reprise d’études. Pour les étudiants jeunes en
formation initiale, l’activité professionnelle semble servir essentiellement à financer les études
entreprises à l’université. Les entretiens effectués dans le cadre d’une autre enquête montrent
que cette première expérience dans un domaine éducatif peut avoir la valeur de test pour ceux
qui éprouvent une incertitude en relation avec leur choix professionnel.
En revanche, les étudiants en reprise d’études peuvent être dans une logique différente. Le fait
d’exercer un métier dans un domaine non-éducatif n’est pas forcement le signe d’un
éloignement de l’activité professionnelle par rapport aux études en cours. Ces étudiants sont
souvent en situation de reconversion. Ils viennent à l’université sans quitter leur activité
actuelle (avec ou sans rapport avec l’éducation) en souhaitant changer leur situation. Plusieurs
enquêtes mettent en évidence l’existence de cette stratégie parmi les étudiants adultes en
reprise d’études inscrits en sciences de l’éducation.
Les effets de l’activité professionnelle
L’exercice d’une activité rémunérée au cours des études supérieures suscite beaucoup de
débats quant à son impact sur la performance des étudiants. Pour mesurer l’impact de
l’activité rémunérée on doit s’interroger sur les motivations des étudiants les poussant à la
faire. On a pu constater que le travail en cours d’études constitue avant tout une nécessité
financière indispensable à la poursuite des études ou parfois un revenu d’appoint permettant
d’accéder à une plus grande autonomie. En se référant aux recherches sur les étudiants, on
peut repérer les effets de ce salariat précoce qui sont multiples : il est susceptible d’entrer en
concurrence avec les études, de perturber le travail universitaire, de rendre plus difficile la
réussite et de favoriser l’absentéisme. On considère en même temps cette expérience comme
la préparation au monde du travail et une étape importante de la prise d'autonomie des jeunes.
Il est vrai qu’au-delà de la logique purement financière des activités rémunérées des étudiants,
l’exercice d’une activité professionnelle peut être une expérience formatrice. Deux lectures
sont souvent effectuées : Le travail étudiant, malgré son caractère souvent « nocif » pour les
études, revêt en effet des atouts certains, du point de vue de l’autonomie, de l’expérience et de
l’insertion professionnelle, qui mérite d’être valorisé.
Le caractère « positif » de l’expérience professionnelle des étudiants est évoqué dans certaines
enquêtes et j’ai pu observer dans mes propres entretiens avec ceux qui sont en sciences de
l’éducation. Pour certains auteurs l’exercice d’une activité professionnelle peut devenir un
élément positif quand il s’insère dans le cadre d’un cursus ou qu’il est compatible avec les
horaires d’études, puisqu’il permet d’acquérir de nouvelles compétences, de mieux
appréhender le monde professionnel. On souligne souvent les activités intégrées des étudiants
ou en rapport avec leurs études qui sont mieux rémunérées et participent à l’enrichissement de
leur curriculum. Mes entretiens montrent que c’est parfois l’exercice d’un emploi (l’animation,
les cours privés, le soutien scolaire associatif…) devient révélateur tout en contribuant à
l’élaboration d’un nouveau projet professionnel en rapport avec l’éducation. C. Béduwé et J.F Giret notent que si la plupart des étudiants considèrent les « petits boulots » comme
purement alimentaire, il n’en reste pas moins qu’ils leur permettent de découvrir le marché du
travail et le monde de l’entreprise et souvent d’acquérir de nouvelles compétences (2004).
Avoir une expérience précise dans un domaine lié à l’éducation devient l’occasion d’acquérir
des informations précises sur les métiers des secteurs éducatifs, de découvrir un univers
professionnel avec ses normes, ses avantages et ses contraintes. Certains étudiants diplômés
d’un BTS (sans aucun rapport avec l’éducation) poursuivant leurs études en licence de
sciences de l’éducation m’ont dit que ce premier contact « professionnel » avec le milieu
éducatif était à l’origine de leur réorientation. Cette expérience leur aurait permis de découvrir
leur goût pour le métier d’enseignant. Cette lecture « positive » de l’expérience
professionnelle ne signifie pas que les jobs d’étudiants constituent une étape directe de leur
insertion professionnelle. C’est l’aspect révélateur d’une expérience, la prise de conscience
personnelle ou la familiarité avec le milieu éducatif qui sont mis avant par certains étudiants.
Un autre élément « positif » de l’exercice d’un emploi rémunéré est sa dimension
émancipatrice des jeunes et l’apprentissage d’une vraie autonomie par rapport à la famille.
Exercer une activité professionnelle pour certains devient le point de départ pour mettre la fin
à la tutelle familiale.
Le troisième aspect « positif » de l’exercice d’une activité rémunérée concerne
l’apprentissage des « savoir-être » professionnel. L’expérience professionnelle, quelque soit
son domaine, peut devenir l’occasion de faire l’apprentissage de la rigueur, de l’endurance, du
sens de responsabilité, des relations hiérarchiques et interpersonnelles ou du travail en équipe.
La lecture « négative » de l’expérience professionnelle des étudiants renvoie effets
ambivalents et non négligeables sur le plan de la santé et des rythmes de vie, mais aussi en
matière de réussite scolaire. Dans l’ensemble les enquêtes sociologiques révèlent qu’un
emploi motivé uniquement par les raisons financières est difficilement compatible avec les
études. Les étudiants qui travaillent pendant leurs études pour les financer n’exercent que très
rarement des emplois intéressants. On tend à souligner les effets négatifs du travail étudiant
lorsqu’il est exercé avec une intensité préjudiciable au déroulement des études et aux
conditions de vie mêmes des étudiants.
Les enquêtes de l’OVE ont mis en évidence l’aspect « négatif » du fait de cumuler études et
emploi. Toutefois, « l’exercice régulier d’une activité rétribuée sans rapport avec les études
diminue les chances de réussite et va de pair avec le retard dans les études », souligne C.
Grignon, dans un rapport (2003), basé sur les chiffres de l’enquête de 2000. Selon ce rapport,
les horaires lourds et incompatibles, la désorganisation, la fatigue…dans certains cas, le job
étudiant devient un handicap pour les études. Le rapport de l’OVE considère que l’exercice
d’une activité de ce type est un obstacle à la réussite et à la poursuite des études. Les étudiants
qui sont dans ce cas sont en effet beaucoup moins nombreux proportionnellement que les
autres à avoir réussi la totalité des examens auxquels ils se sont présentés l’année précédant
l’enquête ; ils sont aussi moins nombreux à avoir obtenu une réussite partielle avec passage au
niveau supérieur, plus nombreux à avoir obtenu une réussite partielle mais sans passage au
niveau supérieur ; ils sont également plus nombreux à avoir abandonné les études dans
lesquelles ils s’étaient engagés ou à avoir échoué. L’échec, complet ou partiel, favorise en
retour l’exercice d’une activité rémunérée concurrente des études. Un étudiant, qui a vu se
solder l’année précédant l’enquête par une réussite partielle sans passage au niveau supérieur
ou par un échec ou un abandon, a une probabilité deux fois plus grande d’exercer une activité
rémunérée en concurrence avec ses études l’année suivante qu’un étudiant qui a obtenu une
réussite totale.
Selon Grignon et Gruel (2000), quelles que soient la filière et l’année d’étude, exercer un
travail rémunéré régulier diminue de 42% la probabilité de valider complètement l’année. Les
auteurs montrent lorsque les activités rémunérées ne sont pas intégrées aux etudes, sont
statistiquement associées à des parcours chaotiques, à de moindres chnces de réussite totale
aux examens, à de plus fortes probabilités d’être en retard (p. 186). Par opposition aux « petits
jobs » ou aux activités intégrées à la formation, les activités parallèles aux études exercées de
façon régulière affectent les performances scolaires : elles font diminuer de près de 30 % les
chances de réussite aux examens de premier et deuxième cycle.
R. Ennafaa et S. Paivandi (2008) dans leur enquête sur les étudiants étrangers en France
insiste sur l’impact négatif direct de l’exercice d’un job étudiant sur la performance
universitaire. Cette enquête sur les étudiants étrangers en 2005 révèle bien que la concurrence
entre les activités rémunérées et les études est réelle pour ces étudiants salariés. Ce
phénomène est accentué lorsque les emplois occupés ne sont pas en lien avec les études
entreprises. L’enchaînement rapide des périodes en emploi et en étude dans une même
journée ou au cours de la semaine n’est pas toujours « conciliable » et s’effectue au détriment
du travail universitaire.
Le travail sur l’enquête de 2006 de l’OVE en rapport avec les étudiants inscrits en sciences de
l’éducation révèle l’existence d’un lien statistique entre le fait d’exercer une activité
rémunérée et les phénomènes « négatifs » des études ou la « contre-performance » des
étudiants. Par exemple, le fait d’exercer une activité augmente 35% la chance d’être absent.
La performance universitaire est également influencée par l’exercice d’un emploi d’étudiant.
Les étudiants ayant partiellement validé leur année universitaire (avec ou sans passage au
niveau supérieur) sont plus nombreux parmi ceux qui exercent une activité au-delà d’un seuil
hebdomadaire estimé à environ 18 heures. Mes entretiens avec les étudiants invitent à la
prudence quant à l’interprétation de ces données statistiques. Certains étudiants salariés
choisissent un rythme « ralenti » pour étudier à l’université tout en travaillant à mi temps ou à
plein temps. Ce sont en réalité les étudiants à temps partiel qui ne sont pas pris en compte
dans les indicateurs de performance. Les données statistiques ne s’intéressent qu’à une figure
d’étudiant, celui qui est sensé à venir à l’université à plein temps. Or, il existe les étudiants
salariés ou les salariés étudiants qui consacrent une partie de leur temps aux études tout en
exerçant un métier.
Conclusion
Les étudiants « classiques », suivant leurs études sans exercer d’activité rémunérée ne
constituent plus la figure dominante d’étudiant. En effet, une proportion de plus en plus
élevée d'étudiants exerce des activités rémunérées durant les études. Le travail rémunéré est
un indicateur important à prendre en compte pour définir la condition étudiante. Les étudiants
qui exercent une activité professionnelle rencontrent souvent des difficultés plus ou moins
grandes, les ressources sont en permanence très insuffisantes. L’ampleur de ce phénomène et
son impact sont souvent évoqués dans les publications sur les étudiants depuis les années
1980. Les données de l’OVE comme les autres enquêtes sur la vie étudiante révèlent les effets
de l’exercice d’un métier aussi bien sur leur vie que sur leurs études. Néanmoins, malgré
l’ampleur de ce phénomène, la situation de ceux qui travaillent pendant leurs études est
insuffisamment prise en compte.
L’exercice d’un travail salarié pendant les études concerne aujourd’hui une part importante de
la population étudiante. L’activité rémunérée des étudiants au cours de l’année constitue une
réalité, qui reste toutefois mal connue, en raison de l’existence d’approches statistiques
différentes et l’absence des données « qualitatives » pour appréhender les impacts réels de
l’activité professionnelle sur la vie étudiante. Avec la massification, on voit de moins en
moins des étudiants logés chez leurs parents et aidés financièrement par ces derniers pour
payer l’intégralité des frais inhérents aux études.
Les enquêtes sur l’activité rémunérée des études tendent à soulever un ensemble d’enjeux
théoriques et pragmatiques dans le champ concernant la sociologie de l’étudiant. Elles
interpellent la figure de l’étudiant aujourd’hui. Les étudiants salariés ou les salariés étudiants
qui sont en situation de double statut étudiant / salarié peuvent avoir une manière différente de
se positionner par rapport aux études (Wolbers, 2001). Pour certains, les études peuvent être
« secondaires » par rapport à l’activité professionnelle exercée. Sur le plan pédagogique,
l’activité professionnelle en cours d’études interroge l’organisation des cursus d’enseignement
supérieur. On peut se demander comment l’organisation pédagogique peut prendre en
considération le cas de ces étudiants pour faciliter leur intégration mais aussi pour valoriser
cette expérience, en particulier lorsqu’elle est en rapport avec les études. Il s’agit dès lors de
proposer une organisation pédagogique notamment en termes d’horaires et de recours pour
faciliter l’avancement du parcours universitaire et un accompagnement d’une pédagogie
adaptée. En mettant en lumière à la fois les difficultés financières de certains étudiants
contraints de travailler pour poursuivre leurs études et la contribution des activités rémunérées
à la construction des projets professionnels, on interroge l’université sur la construction et la
reconnaissance des expériences professionnelles acquises en cours de formation initiale.
Quelles sont les modalités qui permettraient de mieux les prendre en compte tant à l’intérieur
des cursus qu’au moment des choix d’orientation (Cohen-Scali, 2004) ?
L’exercice d’une activité professionnelle par les étudiants interroge la façon dont on saisit la
performance universitaire des étudiants. Il montre l’impertinence des approches statistiques
qui écartent la condition de vie étudiante des résultats scolaires. Cette critique a un sens
particulier à l’époque où les pouvoirs publics exigent de la « productivité » des universités en
termes de résultats pédagogiques.
Bibliographie
Béduwé C., Giret J.-F. (2004). Le travail en cours d’études a-t-il une valeur professionnelle ?,
Economie et statistique, n°378-379.
Cohen-Scali V. (2004), Travailler en étudiant : les enjeux pour l’insertion professionnelle,
Cahier de recherche, Crédoc, n°199, juillet.
Grignon C. (2003). Les étudiants en difficulté. Pauvreté et précarité. Rapport au ministre de la
Jeunesse, de l’Education Nationale et de la Recherche. Paris : OVE.
Grignon C., Gruel L, Bensoussan B. (1996). Les conditions de vie des étudiants. Paris, La
Documentation française, Les cahiers de l’OVE.
Grignon C., Gruel L. (1999). La vie étudiante. Paris : PUF.
Grignon C., Gruel L., Bensoussan B. (2000). Les conditions de vie des étudiants. Paris : PUF.
Farzad M., Paivandi S. (2000). La reconnaissance et la validation des acquis en formation.
Paris : Anthrospos.
INSEE http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1204
Wolbers M. (2001). Learning and working : Double statuses in youth transitions within the
European Union. Working paper,.Research Centre for Education and the Labour Market,
Faculty of Economics and Business Administration, Maastricht University.
Les caractéristiques des étudiants de sciences de l’éducation
ont-elles évolué depuis 1997 ?
Catherine Agulhon, Maître de conférence, HDR,
Paris Descartes – Cerlis – Octobre 2008
Dans cette communication, nous mobiliserons des enquêtes faites en 1997, 2000, 1999 et
2007 pour scruter les profils et les trajectoires des étudiants de sciences de l’éducation. Nous
appuyant sur des données collectées à Paris Descartes, université au cœur de la capitale, nous
n’avons pas la prétention d’être exhaustif, nous cherchons cependant à donner des outils pour
discuter des évolutions que vit cette population dans la mouvance de l’ouverture de
l’université, des réformes de structure de Bologne et des tensions sur l’emploi et sur l’emploi
enseignant en particulier.
La population de sciences de l’éducation était à l’origine une population d’instituteurs et
d’enseignants du secondaire en formation continuée. C’était une population plutôt âgée, plutôt
diplômée, plutôt féminine. Les départements de sciences de l’éducation (au nombre de trente
aujourd’hui) créés à partir de 1967 n’avaient pas jugé bon de créer un DEUG pour une
population adulte et déjà titulaire de la fonction publique. La population a changé, ses
aspirations aussi, mais la création d’un DEUG est restée en suspens. En revanche, la création
des IUFM en 1991 a donné du relief aux sciences de l’éducation et a accru leur attractivité,
même si des contradictions entachent leurs relations avec l’Education nationale et parfois
avec d’autres disciplines. La prochaine masteurisation des étudiants aspirant à passer les
concours de l’éducation pourrait encore affermir la position de la discipline dans le champ de
l‘éducation. En parallèle, et comme pour bien d’autres disciplines, la multiplication des
masters professionnels attirent les étudiants et diversifient les objectifs et les débouchés de
cette discipline. Une fois encore ces transformations se conjuguent avec un renouvellement
des formes de concurrence entre les disciplines de sciences humaines qui visent souvent les
mêmes espaces professionnels : le monde la formation, celui de l’orientation, les collectivités
territoriales et la gestion des ressources humaines des entreprises.
Qui sont les étudiants en 1997, en 2000, en 2007 à Paris Descartes ? Y a-t-il eu des évolutions
dans les caractéristiques de cette population ces dernières années ?
A partir d’enquêtes menées à la rentrée en 1997 et en 2000, d’une enquête d’insertion menée
en 1999 et d’une enquête sur la population du département en 2008, nous proposons quelques
éléments de réflexion.
Nos données portent sur les étudiants de L3 et de M1 des années citées, elles permettent de
décrire des caractéristiques socio démographiques, de préciser les modes d’affiliation de la
population, ses modes de vie, ses projets et d’ouvrir sur quelques pistes quant à son insertion.
- Rajeunissement d’une population féminine
Répartition par sexe en 1997, 2000 et 2007 :
Licence - L3
Sexe/Année
1997
2000
2007
Masculin
18,4%
20,5
9,3
Féminin
81,6
79,5
90,7
Sexe/Année
1997
2000
2007
Masculin
18%
20%
22,2%
Féminin
82%
80%
77,8%
Maîtrise - M1
En 82-83, selon une enquête interne de S. Hermine, on comptait une proportion de 34,4%
d’hommes. La féminisation de la population n’a cessé de croître, plus encore en L qu’en M, et
dans tous les départements et rappelle celle de la population enseignante.
- Répartition par âge
Licence - L3
Age/Année
1997
2000
2007
20-23
42
59 ,3
62,7
24-26
21
14,6
17,8
27-30
11
6,8
10,2
+ 30 ans
25,7
19
8,5
Age/Année
1997
2000
2007
20-23
21,7
23
27
24-26
28,6
30
35
27-30
12,4
10
14,3
+ 30 ans
36,6
35
23,7
Maîtrise - M1
En licence, comme en maîtrise, on assiste également à un rajeunissement de la population lié
aux transformations des fonctions de la discipline. La part des personnels du monde de
l’éducation et de la formation en reprise d’études diminue au profit d’une formation initiale
pour des jeunes qui aspirent à entrer dans cette sphère. Après la vague de reprise d’études
enregistrée chez les instituteurs entre 1991 et 1998, on assiste à la disparition d’une
population qui a sans doute atteint son seuil de diplômation.
(En 1982 près de 50% de cette population avait entre 26 et 33 ans, aujourd’hui les plus jeunes
sont toujours plus nombreux.)
Le rapport de la CORESE de 1993 faisait les mêmes constats : en licence comme en maîtrise,
la population masculine est nettement plus âgée que la population féminine : 57% des
hommes en licence et en maîtrise ont plus de 26 ans, pour respectivement 32% et 47% des
femmes. La population de licence s’est rajeunie et féminisée, elle reste cependant atypique
par rapport à l’ensemble des seconds cycles universitaires.
- Origine sociale
Cette question a été posée dans l’enquête d’insertion de 2001 et dans celle auprès des
étudiants en 2007, c’est une question proprement sociologique, on sait que les étudiants sont
d’origine sociale plus aisée que l’ensemble de leur génération, on sait encore que ces origines
varient selon une hiérarchie des cursus et des formations, ce que rappelle chaque année
l’enquête de la DEPP.
Origine sociale des étudiants de L3 et de M1 en 2007
Profession du père et de la mère
CSP
Père FI
Père FC
Total
Mère FI
Mère
FC
Total
CI CS
33,8
37,7
34,6
20,5
18
19,6
Enseignant
7,3
9,8
7,9
7 ,9
16,4
10,3
Ouvrier
employé
36,4
24,6
32,7
45
31,1
40,7
Commerçant
12,6
16,4
14
7,3
3,3
6,5
Autre
4
9,8
5,6
16,6
29,5
20,1
NR
6
1,6
5,1
2,6
1,6
2,8
Total
100
100
100
100
100
Origine sociale des étudiants de L3 et de M1 de 1994 (interrogés en 1999)
Total
F.I.
F.C.
Cadres (I. et sup.)
45,1 %
47,2%
42%
Dont Sans diplôme
Baccalauréat
+ que le bac
Enseignants
48
13
39
7,4 %
55
12
31,7
5,7%
40
14,5
45
8,7%
Dont Sans diplôme
7
Profession du père
Baccalauréat
+ que le bac
Commerçants
Dont Sans diplôme
Baccalauréat
+ que le bac
Ouvriers-employés
Dont Sans diplôme
Baccalauréat
+ que le bac
28,5
64,3
90 (9)
41
47
8,8 %
7,5 %
10,3 %
79
77 (10)
80
28 %
27%
27,2%
96,3
2,7
95
96
(Nous ne reportons pas les NR et nous avons rapporté pour chaque CSP, la distribution des
diplômes des pères)
La répartition des origines sociales des étudiants semble assez proche de celle énoncée par O.
Galland (1995) ou O. Piriou (1999). Cependant, les jeunes de FI dans l’enquête postale auprès
des sortants de 1994 semblent de catégorie supérieure à ceux enquêtés sur place en 2007. Estce à dire que ceux qui nous ont répondu, outre le fait qu’ils sont plus souvent diplômés, plus
souvent en emploi dans l’éducation, sont aussi d’origine sociale moins modeste, renforçant le
rôle des catégories sociales dans la réussite sociale et professionnelle ? C’est possible sans
être certain, ces questions n’obtiennent pas toujours des réponses très claires.
L’approche par les diplômes des parents classe ces étudiants dans ces premières générations
entrant à l’université (75% d’entre eux). Seul un quart des pères a un diplôme supérieur au
bac et 15% des mères. 60% des pères déclarés « cadres » n’ont pas de diplôme de
l’enseignement supérieur. Les effets de générations jouent sur ces données, la prolongation
récente des scolarités transforme la structure des diplômes. Ces déclarations restent à manier
avec une certaine prudence. Ignorance des catégorisations et volonté d’assimilation aux
classes moyennes et supérieures peuvent les avoir biaisées. En revanche et selon les
traitements effectués, les diplômes détenus ou non par les parents ne semblent pas avoir
d’incidence notable sur la réussite des étudiants.
En 1999, nous demandions également la profession du conjoint (les deux tiers des adultes en
reprise d’études vivaient en couple et la moitié des plus jeunes). La profession d’enseignante
est une fonction de classe moyenne, cela est-il corroboré par les professions des conjoints de
nos anciens étudiants dont une grande part était dans l’éducation en 1999 ? Tous les individus
en couple nous ont répondu.
Profession du conjoint
Total
47%
F.I.
44,3%
F.C.
47,6%
Enseignants
16,9%
9,3%
23%
Ouvriers Employés
21,3%
28,8%
16%
Autres
% en colonne sur les répondants
13,4%
14,4%
13%
Profession conjoint
Cadres
L’homogamie reste une caractéristique de nos sociétés démocratiques. Elle est ici assez
évidente. Seuls 21% des conjoints sont employés ou ouvriers. L’homogamie enseignante est
semblable à celle observée dans d’autres enquêtes, (A. Leger note qu’elle est de 23% pour les
femmes et de 46% pour les hommes). Déjà Ida Berger (1979) constatait des alliances vers le
haut chez les institutrices de la région parisienne, que nous retrouvons ici dans la mesure où
47% de ces enseignantes ont un conjoint cadre.
- Origine universitaire
Licence - L3
Dernier
diplôme/Année
1997
2000
2007
DEUG
40,6
47,3
36
BTS
9,5
15
18
DUT
12,4
11,6
11
L3-M1
11,7
12
17
autre
23,5
13,5
18
Total
100
100
100
Ce qui spécifie cette population, c’est bien la variété de ses origines et la complexité des
trajectoires puisqu’il n’y a pas de DEUG dans la discipline. On observe une stagnation de la
population venant de DEUG et une montée en puissance de celle venant de BTS. Cela
s’explique en partie par le fait que les licences disciplinaires ont une meilleure valeur ajoutée
pour l’entrée en IUFM, d’une part, par l’attrait des métiers de l’éducation pour les jeunes des
filières techniques qui ne trouvent pas à se réaliser dans les emplois intermédiaires du secteur
privé, d’autre part. Ces jeunes opèrent une réorientation parfois douloureuse vers les sciences
humaines (qu’ils connaissent peu). Ce mode de recrutement est un objet de débat et de
conflits où se jouent l’image de la discipline, mais aussi la démocratisation de l’université,
dans un lieu qui se fait le porteur de cet idéal et en a fait par ailleurs un thème d’enseignement.
Se maintient, en outre, une population en reprise d’études qui vient d’horizons divers et par
des chemins détournés (DU, VAE..). Mais, cette population s’est amenuisée, puisqu’elle
rassemblait 47% des effectifs en 1982, 20% aujourd’hui.
Maîtrise - M1
Dernier
diplôme/Année
1997
2000
2007
DEUG
9,3
10
1,6
L3
70,8
65
74,6
M1
-
-
9,5
Autre
11,7
25
11
En maîtrise, ou M1, cette fonction de formation continuée des personnels du monde éducatif
s’est également atténuée au profit de la formation initiale. En 2007, ce sont 74% des effectifs
qui viennent de licence. On a par ailleurs de nombreuses mobilités à ce niveau, puisque seuls
50% de nos effectifs viennent de Paris Descartes. L’offre en master sur la région et même sur
la France redistribue les effectifs de M1 en fonction des aspirations des étudiants. Les projets
des étudiants qui se maintiennent en formation évoluent, ceux qui voulaient entrer en IUFM
reportent ce projet pour entreprendre un master qu’ils aient évolué ou qu’ils n’aient pas été
admis en IUFM.
- Discipline antérieure (licence)
Discipline
Sciences de l’éducation
Socio-psycho
autres lettres et S.H.
Sciences
Tertiaires
Médico-social
Autres
N.R.
97
20,6
27,9
7,6
15,8
7,6
2000
13,2
28,8
10,1
18,4
5,3
8,7
16,2
19
Cette question n’a pas été posée en 2007, elle ne l’a pas été non plus en 1997 en maîtrise.
Mais ce tableau montre une prédominance des DEUG de sciences humaines, 48,5% en 1997
et 43% en 2000. Ce tableau permet encore de souligner la diversité des cursus, les étudiants
viennent des sciences, des sciences médico-sociales ou encore de filières tertiaires (BTS et de
DUT).
En 2007, il était demandé aux étudiants s’ils étaient à Paris Descartes en 2006-2007 :
Paris Descartes
Ailleurs
NR
L3
25,4
67,8
6,8
M1
50,8
39,7
9,5
Ce tableau ne permet pas d’évaluer les taux de réussite ou de redoublement, en revanche, il
donne une idée des mobilités de cette population étudiante, forte en L3, non négligeable en
M1.
Quelles raisons poussent les étudiants à choisir les sciences de l’éducation et quels sont
leurs projets ?
Dans cette période où l’on nous enjoint de professionnaliser les cursus, où les étudiants ont
plus que jamais une attitude plutôt utilitariste ou consumériste vis-à-vis de la formation, ces
questions présentent un intérêt pour des enseignants qui ont à réfléchir sur les évolutions des
contenus.
Nous posions deux questions l’une plus immédiate sur le choix de Paris Descartes, l’autre sur
les projets professionnels. Pour certains étudiants ces deux questions se télescopent, c’est pour
entrer à l’IUFM qu’ils sont venus à Paris Descartes, ils ne distinguent pas vraiment les
départements de la région ou ne pensent pas avoir eu le choix.
- Raisons d’entrer en sciences de l’éducation
Licence L3
Visées
IUFM
Autre métier E.N.
Compétences
1997
48,2
12,6
17,7
Théories
9,8
Autres
11,3
2000
46,1
26
16,7
2007
64
20
10,6
Maîtrise M1
Visées
IUFM
Autre métier E.N.
Compétences
Théories
Autres
1997
28,6
19,9
21,1
14,9
15,6
2000
25
30
28
9
8
2007
13
20
La licence de sciences de l’éducation est souvent perçue comme l’antichambre de l’IUFM,
par des jeunes du technique court et par ceux qui fuient leur discipline d’origine (DEUG). Les
étudiants de formation initiale viennent préparer les concours de l’éducation nationale. Ils
aspirent à embrasser une carrière enseignante. Les étudiants en reprise d’études viennent
plutôt réfléchir sur leurs pratiques, ils peuvent aussi viser une promotion dans leur domaine
(santé, formation).
En revanche, l’engouement pour l’entrée en IUFM s’atténue fortement en maîtrise, M1, sans
que l’on puisse vraiment dire s’il s’agit d’un renoncement à ce projet ou seulement de
l’évaporation de la population concernée par l’IUFM. Cette population de maîtrise est
globalement plus âgée et sans doute dans une autre phase de sa trajectoire. Son projet
professionnel évolue.
En 2007 les étudiants ont distingué les deux questions, ils sont venus pour la formation
proposée (32%), pour sa situation géographique (24,3%), pour la qualité de l’enseignement
(14,5%), l’un d’eux ajoute « quand on voit certains noms sur les brochures, on est bien sûr
attiré par ce département ». Pour les autres (24%), la question ne fait pas sens.
En complément, reprenons les résultats à la même question dans l’enquête auprès des
étudiants sortis de formation en 1994 et interrogés en 1999
- Choix des sciences de l’éducation
Raisons
Total
F .I.
F.C
Intérêt
Projet
Projet P.E.
35,5
18,3
35,2
23,1
15,5
54
45,5
22,5
19,5
Autres*
11
7,4
12,5
* Autres : formation d’adultes,
Les jeunes ont en priorité le projet professionnel de devenir Professeur des écoles, quand les
plus âgés reviennent plutôt pour se distancier de leurs pratiques. Cette opposition des objectifs
aura une incidence non négligeable sur les modes d’adaptation et d’adhésion de ces différents
étudiants aux contenus de la formation.
Ces données peuvent encore alimenter d’autres réflexions. Elles stimulent les interrogations
sur l’orientation, sur les enjeux des aménagements des cursus, sur les finalités et sur les
relations qui peuvent s’établir entre les formations et les emplois. L’instigation du Ministère à
créer des licences professionnelles a d’ailleurs ravivé ce débat sur les relations entre savoirs
théoriques et savoirs professionnels, formations généralistes ou formations spécialisées.
- Projets d’avenir
Cette deuxième question est plus centrée sur des projets qui évoluent entre la première et la
deuxième année.
Licence L3
Projet
1997
2000
2007
professeur des écoles
autre métier E.N.
Progression
santé
34,6
15,8
46,1
12,7
54,2
14,4
4,1
Educateurs 15,2
Autres *
3,1
36
9,3
N.R.
42,2
5,3
6,7
* En 2000 et 2007 les étudiants visent les MP Coopération et formation d’adultes
Maîtrise M1
Projet
1997
2000
professeur des écoles
21,1
25
autre métier E.N.
26,6
3
Progression
18
Santé - éducateurs
0,6
Autres *
5,6
46
N.R.
46
* En 2000 et 2007 les étudiants visent les MP Coopération et formation d’adultes
2007
20,6
9,5
14,2
36,5
19
Cette deuxième question corrobore la précédente. En licence en dehors de l’éducation
nationale, les projets sont flous et peu ciblés. Les étudiants méconnaissent la filière de
formation des adultes qui s’est développée depuis 1971, mais leur est peu visible, ils
privilégient ce qu’ils connaissent et aspirent au statut (oh ! combien sécurisant !) de
fonctionnaire.
En 2007, les deux tiers des étudiants de L3 précisent qu’ils ne se réinscriront pas à Paris
Descartes, ils comptent bien arrêter leurs études universitaires à la licence. A l’inverse, en M1
73% déclarent souhaiter se réinscrire l’année suivante, ils ont clairement opté pour un master
en deux ans, les effets du LMD, de la rénovation de l’architecture des formations s’expriment
très clairement dans cette dichotomie.
Ainsi, en M1, les projets de ceux qui ont poursuivi s’affirment, ils souhaitent faire un master
professionnel (certains sont venus à Paris Descartes pour cela) ou faire un M2R et entrer en
thèse. Mais 20% sont encore dans le flou.
Travail et Etudes : une conjonction de plus en plus fréquente
Ces dernières années, les étudiants sont de plus en plus nombreux à travailler. La prolongation
de la scolarité s’est accompagnée d’une transformation des modes de vie étudiants et d’une
plus forte inscription dans la vie active avec toutefois de grandes variations selon le type
d’études, l’origine sociale, l’âge et le niveau d’études, comme l’ont montré O Galland et C.
Grignon. Si les héritiers (Bourdieu, 1970) sont relativement moins nombreux, on est loin
d’une homogénéité de la population étudiante. Les conditions de vie sont diversifiées et
inégalitaires. De nombreuses enquêtes en rendent compte (Fondeur et Minni, 2006). Les
résultats varient cependant selon les enquêtes, 10% travaillent selon l’enquête Emploi, 50%
selon l’OVE (Beduwé et Giret, 2008). 80% déclarent avoir travaillé pendant leurs études au
moins une fois, selon les enquêtes du CEREQ. Pour certains, cette activité est intégrée à leurs
études (10 à 20% font des stages ou un apprentissage), d’autres ont un « job » à côté. Et pour
la moitié, ce sont des jobs d’été. Seuls 15% des étudiants travaillent toute l’année. Et plus les
étudiants vieillissent, plus ils vivent de leurs rémunérations. Les étudiants des universités
travaillent plus souvent que ceux des écoles dont les horaires et les contraintes sont plus fortes.
Béduwé et Giret (2008) essaient encore d’évaluer l’impact de ces emplois sur les études, plus
de 15 h par semaine peuvent mener à l’échec. Et sur l’insertion. Quatre types d’emplois
n’auront pas les mêmes effets. Pour 39% des étudiants travailleurs, ces emplois à temps
partiel et peu qualifiés sont perturbants, pour 11% ces activités sont intégrées aux études, pour
21% ces emplois sont très prenants et perturbants et enfin pour 22%, ces emplois en fin
d’études sont une préinsertion. Ces auteurs concluent que les effets du travail sont ambigus, il
donne des compétences, mais ralentit la réussite dans les études.
En 1997 et 2000, nous posions deux questions pour distinguer les jobs étudiants, des emplois
définitifs de la population adulte en activité. Mais des éducateurs, par exemple, peuvent se
considérer étudiants s’ils continuent leurs études dans la foulée ou en reprise d’études, s’ils
ont interrompu quelques temps ces études. Les distinctions entre ces deux populations sont
arbitraires et ne reflètent pas une réalité complexe.
- Travail à temps plein ou à temps partiel
Licence
Type de travail
1997
2000
NR
Temps plein
Enseignant
Educateur et formateur
Infirmier
autre
Sous total
Temps partiel
32,4%
27,6
11,1
9,2
2,5
4,5
27,5
8,3
4
1
4,5
17,8
Surveillant
éducateur, formateur
Autre*
demandeurs d’emploi
Sous total
•
9,8
14,9
9,9
4,4
39
10,5
12,7
13,6
36,8
En 2000, « autres » comprend aussi bien les formateurs que des individus travaillant dans
le privé.
Maîtrise M1
Type de travail
•
1997
2000
NR
16,1
26
Temps plein
Enseignant
20,5
24
Educateur et formateur
11,2
4
Infirmier
1,2
6
autre
6,8
4
Sous total
39,7
38
Temps partiel
Surveillant
14,9
15
éducateur, formateur
14,9
12
Autre*
9,3
10
demandeur d’emploi
5
Sous total
39,1
37
En 2000, « autres » comprend aussi bien les formateurs que des individus travaillant dans le privé.
En sciences de l’éducation, les étudiants semblent travailler plus que les autres, puisque les
deux tiers en licence travaillent et 80% en maîtrise (65% sur l’ensemble en 2007). Ce tableau
confirme en outre la régression de la présence des enseignants, même s’ils sont encore assez
nombreux en maîtrise. Ces évolutions se retrouvent à Lille, par exemple, où les salariés
étaient 94% en 86-87, 63% en 92-93, à Grenoble 75% en 88-89, 60% en 92-93, comme à
Paris 5, 58,3%, dont 50% d’instituteurs, en 1990 (selon A. Leger).
Mais ce qui caractérise aussi les étudiants de sciences de l’éducation, c’est qu’une majorité
d’entre eux occupe des emplois en rapport avec l’éducation : assistant d’éducation bien sûr,
mais aussi animateur, éducateur, formateur, cours à domicile. Leur projection dans l’avenir
influe, peut-on dire, sur leurs choix en termes de « jobs » Cet engagement dans le secteur
aura une incidence sur leur insertion définitive et sur la construction d’une identité autour des
problèmes d’éducation qui s’harmonise avec leur formation.
En 2007, 65% des étudiants travaillent, 10% à plein temps, 16% à mi-temps et 39% à temps
partiel. 6,5% sont enseignants, 25% dans le secteur privé et 25% dans le secteur éducatif, 12%
gardent des enfants, job étudiante par excellence.
Quelles sont les disciplines qui intéressent a priori les étudiants de licence en septembre
2000 ?
En licence
Discipline
Psychologie
Sociologie
Didactique
Histoire
Philosophie
Non réponse
Premier choix
32
27,2
19,3
6,1
2,6
12,7
Deuxième choix
25,2
21,5
22,4
7
6,1
17,5
Premier choix
32
38
12
6
7
5
Deuxième choix
38
23
19
8
6
5
En Maîtrise
Discipline
Psychologie
Sociologie
Didactique
Histoire
Philosophie
Non réponse
Ces questions sont posées pendant les inscriptions pédagogiques et sont plus ou moins
précodées. Cela n’entache en rien l’engouement pour la psychologie en licence et
secondairement pour la sociologie. Cela est-il prédictif d’une adhésion des plus jeunes à un
enseignement qui leur apparaît aujourd’hui plus qu’hier loin de leurs aspirations et de leurs
objectifs immédiats : les concours d’enseignement ? Ce n’est pas sûr. Dans l’enquête
Insertion que nous avons menée en 1999, les anciens étudiants étaient unanimes a posteriori
pour demander des stages, une ouverture sur le monde du travail et des contenus plus
concrets.
En maîtrise, l’intérêt pour la sociologie et la psychologie ne s’est pas relâché, il est corroboré
par les choix de discipline de mémoire : 42% en sociologie, 26% en psychologie, 14% en
didactique et 3% en histoire et en philosophie.
Quels regards portent ces anciens étudiants sur leur cursus trois ou quatre ans après
leur sortie de formation ?
Les individus qui ont répondu à l’enquête d’insertion de 1999, ont certainement plus que
d’autres gardé un bon souvenir de leur passage à Paris V. 80% des plus âgés se disent
satisfaits, voir très satisfaits (29%) de leur formation, 68% des plus jeunes (15% très
satisfaits). On observe une relative incidence des effets de la formation sur les points de vue.
Ceux qui n’ont pas eu la licence, ceux qui n’ont pas réussi les concours, ceux qui ont des
emplois précaires, sont les moins satisfaits (50% pour 80% des professeurs des écoles).
Ce sont encore les jeunes qui font le plus souvent des suggestions d’amélioration de la
formation à partir de deux questions ouvertes que nous avons recodées. 48 % souhaitent
l’introduction de stages et 27% une ouverture plus concrète sur le monde du travail, Il est
donc bien principalement des attentes en termes d’insertion et d’accès à des emplois identifiés
chez les étudiants de formation initiale. Ils s’inscrivent dans cette quête de
professionnalisation des formations auquel le Ministère semble vouloir répondre aujourd’hui.
Par ailleurs, 25% suggèrent des aménagements de l’organisation de l’enseignement :
diversification des contenus et création d’options, aménagement des horaires et encadrement
des étudiants. Ils critiquent ainsi implicitement les conditions de travail qui leur sont offertes
et qui sont effectivement difficiles à supporter (sureffectifs et faible encadrement, moyens de
travail insuffisants). Des rénovations sont en question (tutorat et équipement), elles sont
défendues tant par les syndicats d’enseignants que par des chercheurs comme A. Coulon.
Devenir professionnel
Les enquêtes d’insertion faites localement pèchent par bien des imperfections. Les
populations touchées sont réduites, la représentativité est faible. La question des non
répondants reste entière. Est-ce une population spécifique ? A-t-elle une insertion médiocre
par rapport aux répondants.
Par exemple, pour fêter ses dix ans d’existence, les responsables de la licence de sciences de
l’éducation de Brest ont fait une enquête de ce type. Ils obtiennent des résultats très positifs,
mais omettent de donner leur taux de réponses et de traiter leurs résultats par génération. On
ne peut donc en déduire le temps d’insertion et de réussite aux concours. Toujours est-il qu’ils
déclarent 50% de titulaires professeurs des écoles et 30% en formation en IUFM ou CFP
(formations des écoles privées).
A Paris Descartes, le taux d’accès aux fonctions enseignantes est plus faible. Selon l’enquête
réalisée en 1999 sur la population en études en 1994, seuls 45% des jeunes de FI sont dans
l’enseignement comme le dévoilent les résultats suivants.
Conditions de l’enquête de 1999
Cette enquête a été menée en juin 1999 auprès des inscrits en licence et maîtrise de sciences
de l’éducation de 1994, année qui a connu un pic de fréquentation. Ils étaient 1359, 377 nous
ont répondu, soit 27,7%. 399 (29,3%), avaient changé d’adresse (retour par la poste, n’habite
plus à l’adresse indiqué) ce qui nous permet de relever notre taux net (étudiants ayant reçu le
questionnaire) de réponses à 39,3%. Aucune relance n’a été menée. On peut estimer que la
population répondante est stable et inscrite dans une démarche de réussite, le taux de réussite
à la licence (85%) en est un premier indice. On peut s’interroger sur les trajectoires des nonrépondants, sans être en mesure d’apporter de réponse concrète, ni même d’avancer
d’hypothèse à leur sujet.
A cette époque et à Paris V, les effectifs de licence étaient trois fois plus importants que ceux
de la maîtrise (600 étudiants en licence pour 200 en maîtrise, en 1998-1999). En DEA, on ne
comptait plus que 10% des entrants en licence. Il nous est difficile d’estimer la réussite
annuelle aux examens puisque nombreux sont les étudiants qui mènent leur formation en deux
ou trois années. Ces premières assertions sont corroborées par les enquêtes menées dans
d’autres universités (Paris VIII, Grenoble et Lyon).
Caractéristiques de la population
D’emblée nous posions cette question d’une formation initiale ou continue (reprise d’études)
34
. C’est donc à partir des réponses des étudiants eux-mêmes que nous organisons cette
3
Selon une enquête d’insertion des étudiants menée par le CEREQ (Cohorte 84, interrogée en 87), les deux tiers
des étudiants de sciences de l’éducation avaient un emploi avant d’entrer en formation, ce qui n’était le cas que
partition. Si elle recouvre une réalité en termes d’âge, de parcours scolaire, universitaire et
professionnel, certains étudiants (de 27 et 32 ans) se sont classés de manière inattendue.
N
174
195
8
377
Cursus
Formation initiale
Formation continue
NR
Total
%
46,2%
51,7%
2,1
100
La surreprésentation des adultes dans notre corpus renforce l’hypothèse que nous avons
affaire à la frange de la population la plus stable, qui ne sera donc pas absolument
représentative de l’ensemble des étudiants et devra conduire à des conclusions nuancées.
Diplôme préparé en 1994
Diplôme
Licence
Maîtrise
NR
Total
260 (69%)
102 (27%)
15 (4%)
F.I.
126 (72,4%)
40 (23%)
8 (4,6%)
F.C.
129 (66,2%)
61 (31,3%)
5 (2,5%)
Cette partition entre Licence et maîtrise est proche de la réalité des effectifs de l’époque. Seul
un tiers des étudiants entreprend une maîtrise, les autres (les plus jeunes) préfèrent préparer
directement les concours d’accès à l’enseignement.
Age en 1999
Age
- de 30 ans
30 ans et +
Total
176 (46,5%)
196 (52%)
F.I.
152 (86,4%)
21 (12,1%)
F.C.
24 (10,6%)
175 (87,7%)
(Les 5 NR ont été exclues du tableau)
Nous avons donc bien affaire à deux populations distinctes, l’une jeune issue de formation
initiale qui n’a pas connu d’interruption d’études, l’autre plus âgée, déjà engagée dans la vie
professionnelle, en reprise d’études après une interruption de 2 à 10 ans. La sur-représentation
des plus âgées est un effet de l’enquête.
Plus de 70% des répondants sont originaires de la région parisienne où ils ont fait leurs études
et trouvé un emploi.15% habitent les régions limitrophes (Marne, Picardie, Champagne et
Normandie). Seuls,15% d’entre eux sont partis dans des régions plus éloignées.
Diplôme le plus élevé
Diplôme en 1999
Premier cycle
Licence
Maîtrise
Troisième cycle
Autre
Total
5
48,5
30,5
8,5
4,2
F.I.
4
58,5
26,4
7,5
1,7
F.C.
6,1
39,5
35,5
8,7
6,2
Les NR sont exclus du tableau
de 22% de l’ensemble des étudiants. A. Charlot et F. Pottier “ Dix ans d’insertion des diplômés universitaires ”
Formation-Emploi, n° 25, 1989
4
Selon une enquête menée par le département de sciences de l’éducation de Grenoble, leurs étudiants en reprise
d’études représentaient encore 50% des étudiants en 1994
Les répondants se caractérisent bien par leur réussite aux diplômes. Cette distorsion, produit
de l’enquête, entache la représentativité de l’échantillon. Soulignons la concentration des plus
jeunes sur la licence, voie d’accès aux concours d’enseignement. On peut insister encore sur
l’instrumentalisation de la formation par ces populations de classe moyenne dont les
aspirations peuvent apparaître limitées.
L’emploi
a) L’emploi pendant la formation
Comme précédemment, ces étudiants travaillent. Seuls, 18% déclarent ne pas avoir eu
d’emploi pendant leur formation, 36% ont un emploi “ étudiant ” et 45% sont insérés dans la
vie active.
Job étudiant
Surveillant
Animateur
Educateur
Autre public
Privé
Garde d’enfant
Total
F.I.
10,3
21,8
0,6
4
16,1
6,9
59,8
Emploi temps plein
Instituteur
Formateur
Enseignant secondaire
Social
Infirmier
Privé
Autre
Total
FC
40,5
7 ,2
4,1
4,1
2,1
2,6
13,8
74,4
b) Entrée dans la vie active
Cette enquête avait pour principal objectif d’évaluer les modes d’insertion à l’issue de nos
formations. Les enquêtes du CEREQ montrent qu’aujourd’hui une insertion définitive ou
stable s’amorce après quelques années d’errance sur le marché du travail. Les trajectoires des
jeunes n’en sont pas pour autant homogènes et se différencient selon le cursus et le niveau de
sortie, selon l’âge, le sexe et l’origine sociale, selon encore les secteurs d’activités et les zones
géographiques.
Les résultats de l’enquête 1987 du CEREQ sur la population de sciences de l’éducation sont
semblables aux nôtres. Les deux tiers des étudiants ont un emploi avant d’entrer dans le
cursus et 95% ont un emploi en moins d’un an après la formation (67% direct et stable, 22%
indirect et stable, 10% précaire), 5% sont au chômage depuis plus d’un an. Or, 20% des
sociologues, et 18% des psychologues connaissent le chômage, 48% des sociologues et 31%
des psychologues ont un emploi précaire. Les jeunes de Se s’en sortent donc mieux.
En 1999, nos étudiants recherchent avant tout un emploi dans l’enseignement. 60% déclarent
avoir présenté un concours de la fonction publique (professeur des écoles en majorité) et
30% avoir cherché un emploi. Là encore, nos deux sous-populations ont des trajectoires
bien distinctes.
Recherche d’emploi et durée de la recherche
Recherche
oui
Total
29%
F.I.
42%
F.C.
18,5%
Total
45 (13,2)
24 (6,4)
14(3,7)
77%
F.I.
30 (17,2)
13 (7,5)
10 (5,7)
69,5%
F.C.
15 (7,7)
10 (5,1)
4 (2,1)
85%
Durée de la recherche
- de 6 mois
6 mois – un an
+ d’un an
NR
Non seulement ces anciens étudiants ne sont pas nombreux à chercher du travail, mais encore
ils n’en cherchent pas longtemps. Seuls 3% déclarent en avoir cherché plus d’un an.
Concours de la fonction publique
Ces étudiants aspirent à entrer dans la fonction publique ou à y progresser, ils passent les
concours.
76% des jeunes en formation initiale présentent un concours (132 sur 174). Et la plupart
présentent le concours de professeur des écoles (101 sur 132). 58% de ces derniers l’ont
réussi. D’autres ont tenté le concours de CPE (11 individus), ou un autre concours de la
fonction publique. Les jeunes qui ont poursuivi en maîtrise ne réussissent pas mieux ces
concours (43% pour 56% des licenciés).
Les jeunes qui ont exprimé ce projet fort du professorat des écoles, persistent dans ce projet et
réussissent le concours. Ceux qui ont échoué, ont des emplois d’attente et tentent plusieurs
fois le concours.
Les étudiants en reprise d’études sont plus souvent déjà enseignants. 48,7% présentent un
concours dont 61% le concours de professeur des écoles et 10% le concours de CPE, les
autres n’ont pas précisé la nature du concours. Sur ceux qui se présentent 73% réussissent ce
concours. La maturité et l’expérience leur donnent ainsi plus de chance de réussite. Certains,
déjà instituteurs tentent le passage d’instituteurs à Professeurs des écoles. Nombre d’entre eux
réussissent cette transition qu’ils ne considèrent cependant pas comme une promotion.
Concours
Professeur Ecoles
Réussite
autres
Réussite
Total postulants
Total
F.I.
101 (58)
57 (56,4)
31 (17,8)
13 (42)
132(75,8)
174
F.C.
58(29,7)
47 (81)
37 (19)
23 (62)
95(48,7)
195
Entrer dans l’Education nationale, rechercher une promotion (directeur d’écoles, Conseiller
principal d’éducation, Inspecteur) sont des mobiles qui animent plus des deux tiers de nos
étudiants. Et, plus d’un tiers d’entre eux atteint cet objectif dans les trois ou quatre années qui
suivent la formation.
Situation en 1999
Situation en 99
Emploi
Emploi-Etudes
Chômage
Inactivité
NR
Total
290 (77,7)
39 (10,9)
13 (3,4)
6 (1,6)
24 (5,2)
F.I.
132 (75,9)
26 (14,9)
9 (5,2)
2 (1,1)
5 (2,9)
F.C.
158 (81)
13 (6,6)
4 (1,9)
4 (1,9)
16 (8,2)
90% des répondants ont un emploi, 10% poursuivent également des études. Le CEREQ
annonce un taux de chômage de 14% pour les étudiants de second cycle des sciences
humaines, les nôtres semblent très en deçà de cette estimation. L’ouverture vers la fonction
publique et l’enseignement est l’atout de notre filière et explique une bonne partie de ces
résultats. Cependant ils rejoignent ceux du CEREQ (Martinelli, 1999) quand ils montrent
qu’en dehors de l’enseignement, les recrutements sont plutôt déclassés (employés) et plutôt
précaires (CDD).
Comparaison des emplois à la sortie de formation et en 1999
Emplois
Total
1° emploi
déclaré
104 (27,6)
Total
Emploi en 1999
F.I.
F.C.
Professeur des
145(38,5)
62 (35,6)
80 (41)
écoles
Directeur
4 (1,1)
10 (2,7)
10 (5,1)
d’école
Autre
35 (9,2)
46 (12,2)
15 (8,6)
30(15,3)
enseignant
Educateur
29 (7,7)
33 (8,8)
15 (8,6)
18 (9,2)
Employé
47 (12,4)
60 (15,9)
20 (10,2)
40 (22,9)
(Public-Privé)
vacataires
40 (10,6)
18 (4,8)
14 (8,1)
2 (1)
Autres*
18 (4,8)
5 (2,9)
13 (6,7)
NR
83 (22)
47 (12,5)
23 (13,2)
17 (10,5)
* “ Autres ” recouvre les infirmiers et les employés de la fonction territoriale
Ce tableau nous permet d’identifier les positions des individus à la sortie de la formation, puis
deux ou trois ans plus tard. Il permet encore de comparer les positions des plus jeunes et des
plus âgés, 44% des premiers et plus de 60% des seconds sont dans l’enseignement (en
particulier professeurs des écoles).
Le poids des éducateurs interroge d’autant que cet emploi fait suite à une formation spécifique.
On assiste à une transformation du mode d’accès à ces emplois. Nombre de jeunes font une
licence avant d’accéder à une école d’éducateur, et nombre d’autres jeunes font une licence
pour compléter leur formation d’éducateur. On est là au cœur des contradictions qui
travaillent l’enseignement supérieur et reflètent les concurrences entre catégories de
formations et de diplômes dans un contexte de difficultés d’insertion.
Les autres n’ont pas été mis à l’abri des formes de déclassement à l’embauche, observées par
le CEREQ puisque 21% sont employés ou vacataires (30% des plus jeunes), on rejoint ici les
estimations faites par Martinelli (1999) sur la cohorte de 1996 qui compte également 30%
d’employés issus des formations de sciences humaines. En revanche le poids du chômage et
de l’inactivité est faible au regard d’une population féminine. Plus on s’élève dans la
hiérarchie des diplômes, plus les femmes travaillent (C. Marry, 1998).
Enfin, le décalage entre les emplois des jeunes et des salariés en reprise d’études n’est
pas négligeable : 53% des premiers sont enseignants ou éducateurs, pour 70% des
seconds.
Salaire
Salaire
9000 F et +
Total
187 (49,6)
F.I.
62 (35,6)
F.C.
122 (62,6)
Les salaires sont un bon indicateur de la position des individus et de la rentabilité des
diplômes. Ceux des plus jeunes sont modestes et reflètent leurs difficultés d’insertion,
Deux populations, deux types de trajectoires
Les jeunes étudiants de notre enquête appartiennent à ces générations qui prolongent leurs
études et sont les premiers dans leur environnement familial à entrer à l’Université. Ils
proviennent pour 60% d’entre eux d’un DEUG de sciences humaines et pour 30% d’une
formation supérieure technologique tertiaire. Ils ont le projet de passer les concours de
l’enseignement (professeur des écoles en majorité). Ils présentent ce concours dès qu’ils ont
obtenu la licence (souvent en un an). 40% sont ainsi entrés dans l’enseignement, 8% sont
éducateurs, les autres (30%) ont cherché du travail et sont employés du privé ou du public,
certains sont vacataires dans la fonction publique et continuent de présenter le concours PE.
Ces anciens étudiants se disent d’autant plus satisfaits de la formation qu’ils ont atteint leur
objectif. Ils souhaitent cependant une formation plus concrète, plus tournée vers les emplois
sur lesquels ils se projettent ou sur les concours qu’ils veulent tenter. Ils souhaitent le
développement de stages (50%) pour maîtriser ce monde du travail qui leur échappe. Les
jeunes des filières technologiques n’ont pas des trajectoires plus chaotiques que les autres, au
contraire ils réussissent aussi bien examens et concours que les jeunes de DEUG. En
revanche, la population qui tente la poursuite en maîtrise passe moins souvent les concours,
sans doute ont-ils entr’aperçu d’autres perspectives, ceux qui présentent les concours ont
plutôt une moins bonne réussite que les licenciés. Enfin, les jeunes qui s’engagent dans un
DEA ou un DESS, ne passent plus les concours et peuvent avoir du mal à négocier leur
diplôme sur un marché moins ciblé, plus ouvert et plus concurrentiel.
La population en reprise d’études s’oppose par son profil et ses aspirations aux plus jeunes.
Ils reprennent des études pour l’intérêt qu’elles portent. Ils sont le plus souvent déjà insérés
dans l’enseignement ou le social. Cependant 50% d’entre eux déclarent préparer un concours,
anciens instituteurs, ils veulent passer professeurs des écoles, conseillers pédagogiques,
directeurs d’école, inspecteurs. Assistantes sociales ou infirmiers, ils veulent également entrer
dans l’enseignement. Ils obtiennent leur licence en deux ans quand ils travaillent mais
poursuivent en maîtrise et l’obtiennent plus souvent que les plus jeunes. Ils sont plus satisfaits
encore que les précédents de la formation (plus de 80%) et n’ont pas de demande de stage ou
de contenus plus concrets, ils sont au contraire venus quérir des théories éducatives. Ils
souhaitent en revanche des aménagements horaires compatibles avec leur emploi. Enfin, peu
considèrent que ces études ont été facteur de promotion, ce qui sous-entend que le passage au
professorat des écoles (question de statut et de grille indiciaire) leur apparaît comme un
reclassement légitime. Seule, la minorité qui accède à un nouvel emploi (inspecteur, directeur
d’école, conseiller pédagogique) a un sentiment de promotion.
En conclusion, le rajeunissement de la population étudiante en sciences de l’éducation
s’accompagne d’une demande de professionnalisation et d’ouverture immédiate sur le marché
du travail « éducatif ». En licence, les jeunes veulent préparer les concours de l’enseignement.
En maîtrise, les attentes des étudiants sont plus variées, certains finissent leur licence, d’autres
s’engagent vers un cursus long (thèse), d’autres souhaitent accéder au niveau bac +5 qui leur
apparaît plus efficace sur le marché du travail. A partir, de 2002, la masteurisation (puisque ce
terme entre dans notre langage) recompose les cursus, précipite les choix et engage les
départements d’une même région dans une concurrence pour attirer les étudiants par leur offre
et leur spécialisation.
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L’approche interculturelle dans l’étude de la vie des étudiants
en Sciences de l’éducation
Patrick Berteaux – Docteur en Sciences de l’Education
Université Rennes 2 – Centre de Recherche sur l’Education, les Apprentissages et la
Didactique
[email protected]
Résumé :
Exposées à une mondialisation croissante et à un développement accéléré des flux migratoires,
nos sociétés font l’objet de profondes mutations sociales, humaines et technologiques qui
bouleversent le monde éducatif. La diversification de la population étudiante, l’évolution des
comportements sociaux et des rapports entretenus avec le temps, l’espace et le savoir, sont
autant d’éléments qui invitent à prendre en compte l’approche interculturelle pour
l’observation de la vie étudiante. C’est dans cette perspective que nous présentons ici des
éléments conceptuels et méthodologiques qui alimenteront le débat sur les pratiques de la
recherche en éducation.
Mots-clés :
Études transculturelles ; Étudiants ; Méthodologie ; Recherche
Après plusieurs décennies d’ethnocentrisme occidental, les sciences humaines et
sociales reconnaissent aujourd’hui la diversité culturelle dans le comportement humain, dans
le développement de l’individu et dans l’éducation. L’enjeu est de taille du fait de la
mondialisation et de l’évolution des phénomènes migratoires. Le développement des sociétés
multiculturelles pose de façon récurrente la question de l’intégration d’individus d’origines
culturelles variées dans les dispositifs d’éducation, de formation et d’insertion. Dans ce
contexte et alors que 2008 est pour l’Union européenne l’« Année du dialogue interculturel »,
nous proposons dans un premier temps de faire le point sur le paradigme occidental de la
recherche en éducation. Nous développons ensuite des pistes de réflexion quant à la prise en
compte de la dimension interculturelle dans les travaux à venir.
I.
L’ethnocentrisme occidental
Le paradigme occidental de recherche se fonde sur une vision ethnocentrée du monde
en limitant son épistémologie à ses origines grecques. Cette posture s’ancre profondément au
XIXe siècle lorsque les philosophes veulent trouver à l’Europe une origine dans l’hellénisme.
Ils réduisent alors le rôle de la civilisation arabo-musulmane à celui d’une simple transmission
via la traduction des textes de l’Antiquité. C’est ainsi que les Arabes et les Juifs sont exclus de
la filiation entre les rationalités européenne et grecque et que se développe une vision
universelle de l’homme et de son développement. D'après cette idéologie moniste, le
développement humain est envisagé selon une norme unique en considérant l’individu comme
indépendant de son contexte social, culturel et environnemental. Cette posture absolutiste
amène à considérer fondamentalement que les théories et les méthodes élaborées en occident
sont valables et applicables partout. Ce processus universel de jugement d’autrui à partir de
ses propres valeurs et schèmes de pensée que nous nommons aujourd’hui ethnocentrisme
constitue la forme socialisée de l’égocentrisme. S’il est le produit de la construction des
identités culturelles, il est aussi à l’origine du racisme, de la xénophobie et de nombreuses
formes de discrimination.
Appliqué à la recherche, le paradigme ethnocentriste prend notamment corps dans les
tentatives d’expliquer des comportements sociaux sous l’aune de processus psychologiques.
Or l’établissement d’une relation entre un fait social et un élément de psychologie, c’est-àdire entre deux champs non homogènes, n’est pas une démarche forcément objective. On
notera en effet d’une part que les processus mentaux ne sont pas observables directement,
d’autre part que leur capacité d’expliquer des comportements sociaux n’est pas évidente.
Avant de nous exprimer sur l’observation des processus mentaux, attardons-nous sur leur
caractère explicatif des phénomènes sociaux. Commençons par nous décentrer en considérant
l’exemple classique des Indiens Kamayura du Brésil qui, ne possédant pas dans leur lexique
deux mots différents permettant de faire la distinction entre le vert et le bleu, désignent ces
couleurs par le même terme qui signifie « la couleur de la perruche ». C’est à partir de ce
comportement observé que Werner conclut en 1961 à un déficit au niveau des capacités
perceptives en argumentant en termes de « construction conceptuelle diffuse dans le domaine
des couleurs » et de « confusion des couleurs ». Nous conviendrons aisément qu’il eût été
possible de considérer que les Indiens Kamayura percevaient bien une différence chromatique
entre le bleu et le vert mais ne disposaient pas d’un lexique permettant d’exprimer cette
différence. Il ne s’agirait alors pas dans ce cas d’un phénomène perceptif relevant de la
cognition, mais d’un problème de précision du langage. Un autre exemple est celui des
Indiens Hopi, qui ne disposent que d’un seul terme pour désigner toutes les choses qui volent
et qui ne sont pas des oiseaux, mais qui possèdent par contre un vocabulaire très précis pour
désigner les différentes espèces d’oiseaux. Sous prétexte qu’un Indien Hopi utilise le même
terme pour désigner un moustique, un avion ou un aviateur, peut-on conclure qu’il n’est pas
capable de distinguer perceptivement ou conceptuellement ces trois éléments ? Nous voyons
bien ici le danger de vouloir expliquer un fait social par une théorie relevant d’un autre champ
scientifique.
Les processus psychologiques n’étant pas directement observables, il nous faut
maintenant considérer deux éléments dans notre réflexion. Le premier est relatif au fait que,
loin d’être objective, la science reflèterait et incorporerait les idéologies dominantes et les
relations de pouvoir de la culture (Stengers, 2006). Il en est effectivement ainsi depuis
l’Antiquité, avec la dualité entre l’idéalisme et le matérialisme qui, dès les VIe et Ve siècles
avant J.-C., oppose les défenseurs du primat de l’esprit par rapport au monde à ceux qui
attribuent nos idées à notre expérience du monde extérieur. C’est à partir de cette différence
fondamentale entre les deux courants de pensée quant au rapport entre sujet et objet qu’au
XVIIIe siècle se cristalliseront deux idéologies opposées : l’idéalisme, sorte d’humanisme
moral lié à la religion ; le matérialisme, lié au développement scientifique et favorisé par la
révolution mécaniste. Cette dichotomie liée à la relation de causalité entre l’individu et les
faits sociaux a largement inspiré la philosophie et la sociologie modernes. Il faut cependant
reconnaître les efforts faits dans chaque discipline scientifique, parfois très tôt, pour réduire la
fracture entre les deux courants de pensée. On retiendra par exemple la position de Bachelard
qui défendra la nécessaire fusion entre raison et expérience en déclarant que « toute pensée
scientifique s’interprète à la fois dans le langage réaliste et dans le langage rationaliste »
(1968, p.3). Nous retiendrons également les apports de Castoriadis, dont les travaux ont
consisté notamment à établir les interactions réciproques entre l’individuel et le collectif.
Dans le même ordre d’idée, nous ne pouvons omettre de citer Margaret Mead et Ruth
Benedict qui, en intégrant les apports du freudisme et du courant de la psychologie sociale,
s’intéressent aux problèmes de la personnalité et de la culture, créant ainsi des liens entre la
sociologie et la psychologie. Leurs travaux ont certainement été à la base des développements
des psychologies culturelle et interculturelle que nous connaissons aujourd’hui.
Le second élément de notre réflexion est relatif à l’intermédiaire, à l’artifice permettant
de décliner des processus non observables en procédures évaluables. Il s’agit là de considérer
la validité des enquêtes et tests conçus et étalonnés par et pour des Occidentaux, « en
conjonction étroite avec les programmes et les méthodes d’enseignement d’Europe et
d’Amérique du Nord » (Thành Khôi, 1981, p. 187). Ceux-ci sont utilisés sans guère de
précaution en considérant l’être humain dans un modèle de rationalité unique. Au regard de la
profusion de ce genre d’outils d’évaluation, on peut se demander si la science est réellement
indépendante des intérêts politiques, économiques et financiers qui prévalent dans notre
société (Stengers, 2006). L’introduction récente de la dimension interculturelle dans la
recherche en éducation paraît ainsi être soumise à des contraintes historiquement ancrées que
seul un changement profond de paradigme pourrait soulever.
II.
La recherche interculturelle
L’introduction de l’interculturalité dans les sciences humaines invite aujourd’hui les
chercheurs à reconsidérer les positions acquises historiquement et à envisager le relativisme
culturel dans leurs travaux. Il s’agit de tenir compte de toute la diversité culturelle que l’on
peut trouver dans le développement et le comportement de l’homme ainsi que dans
l’éducation, entendue alors comme la transmission culturelle d’une génération à l’autre.
Comme l’indiquent Dasen et de Ribaupierre (1987), la démarche interculturelle suppose de se
centrer conjointement sur les comportements individuels et leurs spécificités, en rapport avec
les caractéristiques socioculturelles telles qu’elles sont étudiées en anthropologie et sociologie.
La recherche interculturelle peut alors poursuivre deux objectifs distincts (Dasen et
Retschitzki, 1989 ; Dasen, 2000, 2001a, 2001b ; Troadec, 2007) :
− l’étude des similarités et des différences culturelles entre groupes homogènes avec ou
sans comparaison explicite entre les cultures ;
− l’étude des phénomènes de contact observés lors de la rencontre entre groupes
culturels différents.
L’enjeu n’est pas d’aboutir à une psychologie et une éducation spécifique à chaque
société, ce qui correspondrait à un relativisme extrême. Il s’agit plutôt de distinguer ce qui est
commun à plusieurs sociétés de ce qui est culturellement spécifique (Dasen, 2007), soit une
approche transculturelle. En d’autres termes, la démarche interculturelle propose de se placer
dans une position intermédiaire entre absolutisme et relativisme que Berry et ses collègues
nomment universalisme (Berry et al., 2002). Pour ces auteurs ces trois paradigmes
correspondent respectivement à trois types d’approche appelés « étique imposée », « émique »
et « émique dérivée ».
Une approche étique imposée revient à considérer que les théories et les modèles
retenus sont applicables partout. Dans cette optique, un matériel expérimental tel qu’un test
d’intelligence ou un questionnaire d’enquête peut être utilisé partout tel quel avec
éventuellement une traduction dans les langues respectives. Dans le cas des tests
d’intelligence, cette approche conduit souvent à interpréter des différences de score individuel
comme des différences dans le degré d’intelligence, voire des déficiences cognitives. Aux
différences de scores moyens sont attribuées des différences génétiques et cette approche ne
satisfait évidemment pas aux exigences de l’interculturalité telle que nous l’entendons.
A l’opposé, une approche émique consiste à utiliser des théories et des modèles sur la
base des conceptions, des valeurs et des pratiques locales (Dasen, 2007). Cette posture
relativiste nécessite que le chercheur se décentre de sa propre culture, qu’il sorte de la scène
pour mieux la voir. Si l’intégration par le scientifique des conceptions et des valeurs d’une
culture autre que la sienne est difficile voire impossible, le travail avec des chercheurs
appartenant à la culture étudiée peut aisément réduire cette limite. Mais une telle démarche
relativiste présente l’inconvénient de limiter les comparaisons potentielles entre groupes
culturels différents et donc d’exclure la possibilité de trouver des points communs ou des
caractéristiques universelles. C’est pourquoi Berry et al. (2002) proposent de nommer émique
imposée l’approche médiane « universaliste » consistant à rechercher ce qui est commun à
l’ensemble de l’humanité, ce qui n’exclut nullement de relever les variations observées et
éventuellement les différences fondamentales.
L’inscription dans une démarche émique (imposée ou pas) suppose de tenir compte d’un
ensemble de variables afin de cerner la complexité du système culturel. Le cadre théorique
proposé par Dasen (2003, 2004, 2007) et élaboré notamment à partir de la combinaison
synthétique des schémas de Berry concernant le cadre éco-culturel (Berry, Poortinga, Segall
et Dasen, 2002 ; Segall, Dasen, Berry et Poortinga, 1999), de Super et Harkness (1997) sur la
niche développementale, et de Bronnfenbrenner (1989) sur les systèmes écologiques, permet
d’en avoir une vue générale. (Cf. : Figure 1 ci-dessous).
Figure 1 : Cadre théorique pour l’étude interculturelle du développement humain
(Dasen, 2004, p. 24)
Selon ce modèle théorique, l’individu se développe dans un microsystème constitué par
la niche développementale. Celle-ci est composée des contextes physiques et sociaux, des
pratiques éducatives et des ethnothéories parentales. Elle constitue un système ouvert, en
interaction avec un macrosystème par l’intermédiaire des processus d’un mésosystème. Le
macrosystème comprend le contexte écologique et le contexte socio-politique. La culture est
ici considérée comme une adaptation à ces contextes, parallèlement et interactivement avec
l’adaptation biologique (Dasen, 2004). Outre ces contextes écologique et socio-politique, le
macrosystème comprend également les cosmologies, les religions et les valeurs qui tiennent
également une place importante dans le système développemental de l’individu comme nous
le verrons plus en avant.
Au-delà de l’abondance des variables à considérer pour une approche interculturelle, ce
cadre théorique montre de multiples interactions entre les différents niveaux et les différentes
composantes du système. Cette complexité impose au chercheur une approche globale et
ouverte. Il s’agit non seulement d’intégrer les dimensions sociologiques, psychologiques et
anthropologiques dans une analyse complexe mais également d’aboutir à une « rationalité
ouverte et plurielle » (Abdallah-Pretceille, 2005, p. 60). Cela conduit à réinterroger notre
modèle de croyance scientifique et à reconnaître d’autres formes de penser et d’organiser le
monde. En effet, si dans son sens anthropologique la notion de culture désigne les modes de
vie et d’action d’un groupe social, elle le circonscrit également par une perception et une
conception du monde qui lui est propre (Ladmiral et Lipiansky, 1989). Outre sa détermination
par un ensemble commun d’éléments matériels et/ou symboliques, la culture est en effet
définie fondamentalement par un sens donné aux échanges d’un groupe avec son
environnement, « un sens propre, dérivé de son histoire passée ou en train de se faire, sens
qui n’est pas partagé par d’autres groupes » (Thành Khôi, 1991, p.39).
Dans cette perspective axiologique, considérant que le mot « culte » est inclus dans le
terme « culture », Mayol (2003, p. 35) nous entraîne sur la piste des idéologies, des mythes
fondateurs religieux et moraux. Ceux-ci composent des « cadres de référence » (op. cit., pp.
33-39) permettant de caractériser une société par rapport à d’autres. En plus de leurs fonctions
de légitimation de telle ou telle foi religieuse et d’explicitation d’une réalité perçue, les
mythes constituent de puissants éléments structurant du temps et de l’espace. Dans le système
d’intelligibilité du réel visible et invisible, ils constituent des explicatifs de la place de
l’homme dans son environnement et inscrivent le sujet dans une temporalité relative au sens
donné à l’existence humaine. Illustrons notre propos en considérant comparativement les
structurations spatio-temporelles proposées par les mythes religieux musulmans et chrétiens.
Alors que l’Islam conçoit le temps comme une altération du sujet et propose une
structuration du temps tournée vers l’origine, le Christianisme conçoit le temps comme un
progrès géniteur de projets d’avenir structurés en termes d’objectifs. Le temps est perçu dans
la culture arabo-musulmane comme un espace clos alors qu’il apparaît comme un espace
ouvert en Occident. Nous voyons là la relativité culturelle de la notion de temps. Comme le
souligne Servier (1994), la structuration de l’espace présente également des oppositions dans
la conception scientifique de l’homme et de son environnement : « La science occidentale
pose un moi et un non-moi : un sujet pensant et un objet pensé. La science dans les
civilisations traditionnelles pose au contraire un monde-en-moi et un moi-dans-le-monde.
Pour nous seuls, Occidentaux, l’épiderme sépare deux régions hétérogènes : le monde et le
moi. Dans ces civilisations traditionnelles, il n’y a pas d’effort pour joindre les deux termes :
si le monde est en moi, j’en possède la connaissance et si je suis dans le monde, je n’ai pas à
y tailler ma place puisqu’elle y a été préparée, faisant de moi un élément de l’harmonie du
monde. » (p. 215). Nous sommes en présence de deux « mondes » diamétralement opposés
dans leur façon de rendre intelligible le réel. Découlant de la structuration spatio-temporelle
propre à chaque système, cette dichotomie est notamment visible dans le rapport à l’écrit,
dans les pratiques d’enculturation scolaire et dans les schémas de socialisation.
Cet exemple illustre la nécessité pour le chercheur d’une perspective émique qui intègre
de façon fondamentale le mode d’intelligibilité du réel de la population étudiée. Comme
l’indique Abdallah-Pretceille (2005), l’axe méthodologique doit s’appuyer sur une démarche
compréhensive et dépasser la simple description ou la prolifération de visions partielles qui
scléroseraient l’analyse. « Comprendre les cultures, ce n’est pas accumuler des connaissances
et des savoirs, mais c’est opérer une démarche, un mouvement, une reconnaissance
réciproque de l’homme par l’homme, c’est apprendre à penser l’Autre sans l’anéantir, sans
entrer dans un discours de maîtrise afin de sortir du primat de l’identification et du
marquage. » (op. cit., pp. 61-62).
L’intégration du relativisme culturel dans la méthodologie de recherche impose alors
certaines conditions (Abdallah-Pretceille, 2005) :
− une approche globale et pluridimensionnelle qui rend compte de la complexité
des dynamiques culturelles ;
− une démarche interactionniste qui intègre les conceptions symboliques et
représentationnelles que se font les acteurs de leur culture et des situations
étudiées ;
− une perspective situationnelle qui interroge l’environnement, les conditions et
les circonstances dans l’étude des faits observés ;
− une analyse pluricausale afin de ne négliger aucune variable dans l’élaboration
des hypothèses.
La poursuite d’études comparatives exige de prendre quelques précautions en plus des
conditions générales énoncées ci-dessus. Dans un souci de rigueur méthodologique, il
convient tout d’abord de respecter la règle de Campbell qui stipule que « toute hypothèse
interculturelle devrait conduire à la comparaison d’au moins trois groupes culturels
différents » (1961 in Bril, B.& Lehalle, H., 1988, p. 22). Mais il faut considérer que « toute
culture est un mélange, un métissage élaboré au fil des siècles et qui a peu à peu conquis son
originalité, sa définition, ses spécificités » (Abdallah-Pretceille & Porcher, 2001, p. 19). Aussi,
le chercheur est amené à éviter une catégorisation et l’affectation d’attributs sociaux trop figés
dans la segmentation de la population. Cette pratique ne pourrait en effet rendre compte des
dynamiques de contact interculturel et de la potentielle intégration de différents systèmes
culturels dans la sédimentation identitaire.
Dans la perspective d’une démarche émique, le découpage du tissu social nécessite d’être
adapté à celui des groupes culturels étudiés. Mais cette condition ne peut être remplie au
regard de l’hétérogénéité des groupes étudiés dans une recherche interculturelle. Aussi, on
préfèrera une démarche ouverte consistant à caractériser les échantillons en prenant soin
d’intégrer un maximum de variables culturelles dans le modèle d’analyse. On pourra
s’appuyer sur les travaux de Mishra, Sinha et Berry (1996) pour la définition de critères
d’acculturation adaptés aux objectifs poursuivis. Enfin, les résultats d’une étude quantitative
seront toujours enrichis par une approche qualitative explorant les systèmes symboliques et
représentationnels des sujets considérés.
C’est au prix de cette ouverture et de cette rigueur méthodologiques que nous pourrons
observer et analyser efficacement la vie des étudiants en sciences de l’éducation.
III.
Conclusion
Comme le soulignent Dasen et Perregaux (2007), les Sciences de l’éducation ne peuvent faire
l’économie des approches interculturelles. Par la richesse des ouvertures et des remises en
question qu’elle propose, la démarche interculturelle bouscule nos modèles et nos
représentations. Avec l’altérité, elle réinterroge notre identité et notre culture, permettant une
prise de conscience et une compréhension de notre relation à l’autre en tant que
culturellement différent. La prise de recul et la décentration qu’elle induit favorisent l’étude
des problématiques sous des angles différents, enrichissant ainsi l’analyse et la
compréhension.
Prendre en compte la dimension interculturelle dans la recherche en éducation, c’est favoriser
l’échange des connaissances et des pratiques. Les perspectives de développement sont
multiples mais y accéder suppose probablement un remaniement de certains paradigmes
existants. Comme l’énonce Sénèque 5, « à quoi sert de voyager si l’on s’emmène avec soi ;
c’est d’âme qu’il faut changer, non de climat ». Il s’agit bien là d’un projet existentiel pour la
recherche en éducation.
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