L`Abitur en Allemagne et l`ABIBAC L`Abitur, abrégé en Abi (1), est le

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L`Abitur en Allemagne et l`ABIBAC L`Abitur, abrégé en Abi (1), est le
Éducation et Sociétés Plurilingues n°30-juin 2011
L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
Odile SCHNEIDER-MIZONY
Il contributo riprende la storia del baccalaureato tedesco, l'Abitur, dalla sua creazione
(fine 18° secolo) fino all'epoca contemporanea. La panoramica si fa più circostanziata a
partire dal 1945: fra quest'anno e il 2010, i licei tedeschi sono stati scossi due volte da
importanti riforme; inoltre, le mutazioni storiche (divisione e poi riunificazione della
Germania) hanno reso necessarie diverse ristrutturazioni. Il posizionamento delle lingue
in tale contesto scolastico e nel loro esame in generale presenta una
ripartizione differente rispetto a quella del sistema francese, con l'inglese a dominare la
scena, francese e latino che lottano per il secondo posto, e a seguire una rappresentanza
di altre lingue europee ed extraeuropee. In tale contesto, l'ABIBAC regge egregiamente
la buona posizione del francese, senza poter rivaleggiare con l'inglese, né avendo
bisogno, allo stato attuale, di distinguersi nei confronti di altre lingue che potrebbero
farle concorrenza.
Der Beitrag zeichnet die Geschichte des deutschen Abiturs seit seiner Gründung im
späten 18. Jahrhundert bis zur Gegenwart nach. Die Übersicht wird nach 1945
ausführlicher: Bedeutende Reformen haben die deutschen Gymnasien zweimal in der
Bundesrepublik Deutschland stark verändert; die historischen Veränderungen (Teilung
und Wiedervereinigung Deutschlands) erforderten weitere Umstrukturierungen. Die
Fremdsprachen haben in dieser Schulform und in ihrem Abschluss eine andere Stellung
als im französischen Schulsystem. Es dominiert das Englische, gefolgt von Latein und
Französisch im Kampf um den zweiten Platz; die anderen europäischen oder
Weltsprachen sind unterrepräsentiert. In diesem Zusammenhang hat das AbiBac mit
Französisch eine gute Stellung im Schulsystem, auch wenn es damit dem Englischen
keine Konkurrenz macht und sich nicht von den anderen Fremdsprachen abzugrenzen
braucht.
L'Abitur, abrégé en Abi (1), est le diplôme qui conclut les années d'études
secondaires dans un lycée en Allemagne. Il porte également le nom de
“Hochschulreife”, mot à mot, “maturité pour les études supérieures”, qui
s'applique à son autre fonction, celle d'ouvrir l'université à celui et celle qui
y aura été déclaré-e “mûr-e”. Grandement synonymiques, les deux termes
ont une aura stylistique différente, l'Abitur étant le terme courant des
élèves, familles et de la presse, l'autre terme se trouvant plutôt dans les
textes institutionnels. Comme dans l'usage français, le nom du diplôme
s'applique également à l'examen qui l'attribue.
Son histoire remonte à la fin du 18ème siècle en Prusse, qui introduit en
1788 une attestation de capacité à suivre des études supérieures, règlement
par lequel l'état prussien entendait disputer aux universités le libre choix de
leurs étudiants (Bölling 2010). Pendant environ cinquante ans et malgré les
efforts d'harmonisation de Wilhelm von Humboldt, les universités gardent
leurs propres examens d'entrée qui concurrencent cet “Abiturreglement”.
C'est seulement en 1834 qu'il s'impose à tous les jeunes gens désireux
O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
d'étudier, et qui composent alors dans les matières suivantes: latin, grec,
allemand, mathématique, histoire, français et sciences naturelles. Les
premières jeunes filles le passeront en 1896 à Berlin. Pendant un siècle et
malgré les bouleversements historiques, les guerres, changements de
régime, la partition et la réunification du pays, l'Abitur ne sera jamais
radicalement remis en cause, même si sa forme, ses contenus et son public
ont évolué en s'adaptant à l'enseignement secondaire, qu'il conclut.
L'évolution la plus importante est bien sûr l'effectif concerné par l'examen:
on passe de quelques centaines d'étudiants prussiens au début du 19ème s. au
demi-million d'élèves de l'Allemagne réunifiée de ces dernières années,
environ 35% d'une classe d'âge (Cortina 2008: 477). On s'imagine
volontiers en Europe extra-germanophone, et en Allemagne même, que
l'Abitur, et le lycée général qui y mène, le Gymnasium, n'auraient que peu
changé, parce qu'ils bénéficient tous deux d'une attractivité inégalée. Ils
représentent pour les familles allemandes le modèle scolaire même, avec
son exigence d'abstraction, ses compétences disciplinaires, et son peu
d'appétence pour l'application. Les autres pays européens continuent à se
représenter le lycée allemand comme une formation secondaire qui laisse
aux élèves le temps de vivre, avec ses après-midis de liberté, et les
bacheliers allemands comme des jeunes gens à la fois plus mûrs parce que
plus âgés – l'âge moyen d'un bachelier est de 19 ans – en même temps
qu'indociles en raison des contraintes éducatives moindres d'une
atmosphère anti-autoritaire qui renouerait avec l'esprit de la
Reformbewegung du début du 20ème s., en effaçant les expériences
désastreuses du Troisième Reich.
C'est faire fi de deux vagues de transformations importantes qui, depuis une
quarantaine d'années, ont changé l'examen qui clôt les études secondaires
en Allemagne: la première vague de démocratisation des années 1960 et le
syndrome PISA (voir plus loin) des années 2000.
Les années 1960 et la première réforme de l'Abitur
Alors que dans les années 1950, seulement 5% de la population scolaire
allemande passait l'Abitur (Cortina & alii 2008: 473) – il s'agit des chiffres
pour la République fédérale d'Allemagne et la République Démocratique
Allemande ajoutés – la montée démographique des classes d'âge nées après
la guerre à l'époque du “miracle économique”, ainsi que la tertiarisation des
secteurs d'activités, ont poussé, comme dans d'autres pays européens, au
développement de l'enseignement secondaire long dès le début des années
soixante. En 1970, 10% d'élèves passent (et réussissent) déjà l'Abitur, 20%
en 1980, soit un doublement en dix ans. Le pourcentage est nettement plus
bas que les chiffres français de l'époque: en 1970, 20% des élèves français
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
sont reçus au baccalauréat, presque 30% en 1980 (MEN 2007: 233). Le
plus faible taux allemand s'explique par le bon prestige de la formation dite
"duale", formation professionnelle en alternance qui n’exige pas le niveau
bac: ce type de formation détourne de bons élèves du baccalauréat
humaniste vers l'artisanat ou vers les métiers techniques de la petite et
moyenne industrie. Les chiffres cités sont à voir à la lumière de la durée de
formation de neuf ans: les bacheliers de 1970 sont entrés au lycée en 1961,
ce qui explique pourquoi il faut attendre les années 1970 pour voir la
réforme de l'examen terminal, lorsque des bataillons plus nombreux
d'élèves arrivent au bout de leur scolarité. Cette démocratisation est
accompagnée par un discours volontariste de politique éducative aussi bien
que de promotion sociale, qui se concrétise notamment par la possibilité
accrue de passer le baccalauréat dans un lycée professionnel, voire en cours
du soir.
Comme les universités se plaignent de l'inadéquation partielle de la
formation des bacheliers aux exigences du supérieur, des réformes
introduisent, à côté des matières obligatoires (“Pflichtfächer”), des options
(“Wahlfächer”), que l'on peut prendre en “Leistungskurs” («cours de
performance») qui bénéficient d'un plus fort coefficient. Il s'agit de
s'éloigner peu à peu de la culture universaliste de l'humanisme bourgeois
pour approfondir un nombre plus réduit de matières censées être celles des
futures études supérieures. De 1972, année de la première grosse réforme,
jusqu’à la fin des années 1990, les répartitions possibles entre l'obligatoire
et l'optionnel et leurs coefficients respectifs ne cessent d'évoluer, afin
d'enrichir les éléments de savoir traditionnel par des matières plus
contemporaines, tout en cherchant à empêcher qu'un bachelier ne contourne
les épreuves en langue maternelle, en mathématique ou en une langue
vivante en les remplaçant par sport, art ou instruction civique, pervertissant
par là les diversifications introduites par telle ou telle réforme.
Ces options d'un baccalauréat que l'élève se compose comme un menu sont
critiquées par l'opinion publique comme étant celles d'un “lycée-cafétéria”.
Mais les pédagogues conseillant les politiques y voyaient la possibilité
d'individualiser l'enseignement, l'adaptant notamment aux élèves venant de
milieux culturellement moins bien dotés, disposant dans une moindre
mesure de la culture appelée justement “générale”. Le fractionnement de la
classe en groupes suivant les matières choisies est vécu comme un élément
dynamisant pour les uns, comme une perte de sécurité émotionnelle par les
autres. Ce mouvement de va-et-vient entre les deux pôles, celui de
l'ouverture et de la différenciation aux publics et celui du retour à la
concentration sur des fondamentaux, marque toute la période.
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
Cependant, ce qui ne change pas à cette époque est l'autonomie des
établissements à délivrer l'Abitur. Pour donner un exemple concret de ce à
quoi ressemblait cet examen dans l'état du Baden-Württemberg (2) en
l'année 2000, un élève passait un écrit dans cinq matières: les trois matières
fondamentales et obligatoires (l'allemand, les mathématiques et une langue
vivante), une matière dite de “profil”, par laquelle l'élève plaçait l'accent de
sa formation plutôt dans le domaine littéraire, scientifique, social ou
artistique – cette matière étant choisie parmi d'autres langues vivantes, des
sciences exactes, l'art, le sport ou la musique – et une matière “de
prédilection”, i.e. le renforcement d'une matière déjà choisie. Les copies de
l'élève faisaient l'objet d'une double correction, la première par le
professeur de la classe, la deuxième par un autre enseignant de
l'établissement et c'est le jury de l'établissement qui fixait la note définitive
de chaque épreuve. Au lieu de craindre la subjectivité d'une notation
réalisée sans anonymat par leurs enseignants, les élèves trouvaient
généralement rassurante la perspective que leurs réalisations soient mises
en regard du programme effectivement réalisé dans la classe ou des
conditions particulières de l'établissement (3), rural ou urbain, difficile ou
favorisé. Un examen oral se déroulait devant un jury de trois personnes. La
note résultante tient aussi compte des notes de la première partie de l'année
terminale dans toutes les matières de l'écrit.
L’augmentation continuelle des effectifs scolaires dans le secondaire et la
variation des situations socio-économiques en fonction des Länder et des
types d'établissements (lycée général, professionnel, technique, ou
“académie professionnelle”) a fait naître depuis les années 1990 des
controverses sur la facilité ou la difficulté de l'examen suivant la région
géographique – il passe pour plus facile en Rhénanie-Westphalie qu'en
Bavière – et suivant les établissements. Dans des régions au solde
migratoire négatif, les établissements sont accusés de compenser les pertes
d'effectifs en rendant leur Abitur plus attractif (facile), alors que d'autres
établissements se chercheraient un “profil d'excellence” avec un examen
prétendument sélectif. Les études existantes n'ont jamais pu tirer au clair
lequel de ces flux aux motivations contradictoires l'emportait sur l'autre, ou
si la difficulté agissait comme repoussoir ou comme aimant (Cortina 2008:
468-469) mais le modèle de l'examen attribué localement perd peu à peu en
légitimité. Cette légitimité est également mise à mal par les problèmes
concrets d'adaptation des élèves déménageant en cours d'année d'un Land à
l'autre, difficultés surabondamment exploitées dans le discours critique sur
la situation scolaire: étant donné le faible nombre d'élèves concernés par un
déménagement au milieu de l'année par rapport à l'effectif scolaire d'un
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
Land, la fréquence de cette plainte dans la presse, véritable topos sur la
question, relève du sensationnalisme.
Deuxième vague de réformes: le choc “PISA”
Dans cette situation retentit le coup de tonnerre des résultats de l'enquête
PISA, présentés comme mauvais pour l'Allemagne et menant à ce qui a été
appelé un “choc”: en 2000, le pays n'occupait que le vingtième rang des
résultats en mathématique et culture scientifique, et le vingt-et-unième en
compétences de lecture. Même si des voix s'élèvent pour dénoncer
l'instrumentalisation de ces enquêtes internationales pour accélérer les
réformes voulues d'en haut (Jahnke & Meyerhöfer 2007), l'argument que
l'Allemagne risquerait de perdre son rang de grande puissance exportatrice
de technologies et savoirs est relayé par les familles inquiètes, qui craignent
de voir évincer leurs enfants des métiers de techniciens, ingénieurs, ou
professions médicales, auxquels de mauvais résultats en sciences ou
mathématique fermeraient l'accès. L'opinion publique des Länder de
l'Ouest de l'Allemagne se laisse facilement convaincre que les jeunes
Allemands commencent à étudier trop tard et y consacrent trop d'années,
comme le prétend l'OCDE dans son rapport annuel (OECD 2005) et
accepte le principe d'une réduction du temps scolaire dans le secondaire,
avançant l'âge de passage de l'Abitur de 19 à 18 ans, conformément à l'âge
moyen européen. En revanche, les Länder de l'Est comme la Saxe ou la
Thuringe en étaient restés à l'Abitur concluant une scolarité de 12 ans (4
ans de primaire + 8 ans de secondaire), système qui prévalait en
République Démocratique Allemande, et n’avaient pas souhaité rallonger la
scolarité secondaire dans une situation économique peu favorable à
l'emploi; les jeunes Allemands à l'Est désiraient pouvoir saisir rapidement
les offres d'emploi peu abondantes.
Le peu de contestation contre un cursus scolaire de 12 ans dans la partie
orientale de l'Allemagne s'explique par la tradition dirigiste et sélective du
système éducatif pendant les 40 ans d'Allemagne socialiste. En dehors de
divergences idéologiques attendues comme l'interdiction des écoles
privées, l'absence d'enseignement religieux ou la rupture avec la tradition
humaniste du latin-grec, la différence principale entre les deux systèmes
éducatifs est sans doute la sélectivité très explicitement assumée par la
formation secondaire en RDA. L'enseignement secondaire se déroulait
principalement au lycée polytechnique (POS = Polytechnische
Oberschule), mais celui-ci ne menait pas directement au baccalauréat, qui
était préparé en quatre ans dans le lycée élargi (EOS = Erweiterte
Oberschule), auquel, contrairement à ce que pourrait faire penser la
dénomination, n'avaient accès que des élèves aux potentialités scolaires
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
avérées. Leur sélection s'effectuait sur la base des mathématiques et
sciences exactes, qui constituaient un tiers de l'emploi d'un temps scolaire
nettement plus lourd qu'à l'Ouest. Les chiffres de bacheliers sortant de ce
type d'établissement était de 8% à 10% de la classe d'âge entre les années
1970 et la fin des années 1980, et, si l'on ajoute les effectifs des bacheliers
préparés dans les écoles professionnelles (Berufsschulen), les écoles
techniques (Fachschulen) ou l'université populaire, on obtient un taux de
12% à 13% pour toute la période, que l'on peut contraster avec la
croissance rapide des chiffres en Allemagne fédérale. La stabilité du taux
recouvre une tentative d'adéquation de la formation diplômante à l'activité
professionnelle. L'examen du baccalauréat lui-même était centralisé et
l'accent placé sur les sciences, les techniques et la professionnalisation plus
que sur les arts et lettres. Après l'unification en 1989-1990, les nouveaux
Länder ont adopté le modèle du lycée ouest-allemand tout en gardant la
durée de 12 ans et leur baccalauréat centralisé, deux caractéristiques qui
commencent à devenir objectifs de réforme dans le pays réuni.
Le raccourcissement de la scolarité secondaire à huit années de lycée pour
un baccalauréat que l’on passerait à 18 ans a déclenché de vives réactions
dans l'opinion publique ouest-allemande, qui hésite entre y voir un
nivellement des exigences disciplinaires, un surmenage des élèves, une
perte de diversité, ou au contraire une efficacité accrue et un gain de temps
de vie ou d'études. La discussion sur ce raccourcissement de la durée de
scolarité est à peine retombée que naît un nouveau sujet de divergences
dans le discours public, celui de la généralisation d'un baccalauréat central
à chaque Land, appelé Zentralabitur, qui se répand peu à peu en
remplaçant l'ancien baccalauréat d'établissement.
Au printemps de chaque année où le nouveau Zentralabitur touche un
nouvel état, les médias bruissent de rumeurs de “pannes” de sujets, de
complexité organisationnelle et des frais afférents au nouvel anonymat des
copies. A présent, le système de correction décrit plus haut pour le BadenWürttemberg a évolué vers la procédure suivante: chaque copie d'élève
dans chaque épreuve est toujours corrigée une première fois dans
l'établissement, puis la copie est anonymée et envoyée pour correction dans
un établissement régional de taille analogue. En cas de divergence, un
troisième correcteur est appelé à la rescousse, mais ne peut fixer sa note
qu'à l'intérieur de l'intervalle délimité par les deux premières, directive
considérée comme mécaniste par les enseignants et où la connaissance de
l'élève par l'équipe pédagogique ne joue plus. La nouvelle procédure est
d'autant plus lourde que le calendrier est très contraint: afin que tous les
établissements puissent composer le même jour sur l'une des 19 disciplines
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
qui peuvent faire l'objet d'une épreuve écrite, les examens de l'Abitur
peuvent durer jusqu'à trois semaines, mais la double-correction et les délais
d'envoi et de retour des copies à l'établissement d'origine constituent une
borne temporelle également menaçante. Enfin, la mise au point de sujets
uniques par discipline dans chaque état connaît quelques ratés, comme les
mathématiques du baccalauréat 2008 en Rhénanie-Westphalie, jugées trop
difficiles dans de nombreux établissements où les élèves ont obtenu des
notes inférieures de deux points en moyenne (4) à leurs résultats scolaires
habituels. L'épreuve a dû être rattrapée et l'état de Rhénanie-Westphalie a
créé, afin d'éviter le retour de telles pannes, un “contrôle technique” des
sujets écrits qui lui a coûté la somme d'un million d'euros pour les sujets
des épreuves 2009 et 2010, attisant à présent non plus le mécontentement
parental, mais celui du contribuable.
Le mouvement du baccalauréat unique par état continue cependant à
s'étendre. Dans la mesure où la Conférence des ministres de la culture – la
KMK (Kultusministerkonferenz s'occupant des questions d'éducation) – met
au point pour l'année 2011 des standards unifiés pour l'Abitur valables pour
tous les états d'Allemagne, on peut imaginer que la centralité du
baccalauréat allemand ne pourra que se renforcer. A partir de la situation
française, dans laquelle se sont amorcés ces dernières années des
mouvements de relocalisation des examens dans les établissements, on peut
être surpris de voir, sous couvert d'adaptation européenne, le mouvement
inverse se manifester en Allemagne. Mais ces évolutions répondent aux
situations différentes des deux pays: en France, où l'examen est national
depuis toujours et où sa simple réussite, c'est-à-dire sans moyenne brillante,
ne conduit guère qu'à l'université et non dans les classes préparatoires aux
Grandes Écoles qui forment aux métiers attractifs, il s'agit sans doute
d'alléger le budget prévu pour sa tenue, budget dont l'importance semble
aux politiques inversement proportionnelle à l'enjeu professionnel de
l'examen pour la nation. En Allemagne, où l'examen était jusqu'à présent
local et peu en rapport avec les futures études supérieures – un bachelier
pouvait très bien obtenir une excellente moyenne avec une combinaison de
matières plutôt littéraires et artistiques et s'inscrire grâce à elle en médecine
– il s'agit de mieux ajuster l'évaluation et les études: l'introduction de tests
de sélection en université ayant été refusée par ces dernières, se réclamant
(pour combien de temps encore?) d'un esprit de libre choix de réalisation
personnelle et de deuxième chance au cours de l'existence, l'Abitur voit sa
fonction se spécialiser peu à peu: filtrer les flux vers les études supérieures.
Le mouvement amorcé par la Prusse à la fin du 18ème s. connaît une
nouvelle évolution, cette fois sous l'inspiration des politiques européennes
en matière d'éducation.
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
La place des langues dans l'Abitur: évolution vers la domination de
l'anglais
À l’origine, l'Abitur prussien faisait la part belle aux langues anciennes,
latin et grec occupant par exemple 16 heures de l'emploi du temps de la
semaine lycéenne en 1837 (Bölling 2010: 37), alors que le français n'en
occupait que deux. Mais les exigences à l'examen en langue vivante
n'étaient pas aussi réduites que l'horaire congru pourrait le suggérer: il
fallait passer un thème à l'écrit (traduction d'un texte d'allemand en
français) et soutenir une interrogation en français à l'oral. Au gré de
certaines réformes, il y eut même ici ou là des dissertations françaises à
rédiger dans la partie écrite des épreuves au cours du 19ème s. Le français
était la première, et parfois seule langue moderne apprise dans le lycée
prussien, ne se voyant ponctuellement éclipsée par l'anglais que dans les
situations de tension entre les deux pays riverains: par exemple, le mauvais
souvenir laissé par les campagnes napoléoniennes en Allemagne avait fait
disparaître un temps le français de la liste des épreuves écrites de l'Abitur et
des phénomènes analogues se reproduisirent dans le sillage de la guerre de
1870 avec la France. Mais c'est la première guerre mondiale qui marque le
renversement définitif des rôles entre l'anglais et le français, certaines
régions remplaçant le français en tant que matière d'Abitur par l'anglais en
1914 ou 1915. C'est en 1933 qu'est officialisée la place de l'anglais comme
première langue de l'examen, le français n'occupant plus que la place de la
seconde langue. Les tentatives de renverser le rapport de langues en zone
d'occupation française après 1945 seront abandonnées en 1949 (Christ &
Hüllen 1995: 565), les trois zones américaine, anglaise et française gardant
l'anglais comme première langue pour l'Abitur, tandis que la zone
d'occupation soviétique prenait un chemin différent.
Entre 1949 et la réunification à l'Allemagne fédérale, le russe a été la
première langue apprise en RDA, l'anglais ou le français ne pouvant entrer
en ligne de compte qu'à partir de la place de seconde langue. Par deux fois,
cette planification des langues scolaires a obligé les régions d'Allemagne
orientale à faire sortir du néant des enseignant-e-s d'une langue pas ou peu
apprise jusqu'alors: dans les années 1950, des enseignant-e-s de russe,
langue absente de la tradition de l'enseignement secondaire, ne jouissant
pas d'une grande attractivité en dehors des familles politisées, et langue
d'un pays dans lequel on ne se rendait finalement guère; à partir de
1989/1990, ces enseignant-e-s de russe ont dû se recycler en anglais ou
français, la demande pour le russe se réduisant à des chiffres infinitésimaux
à partir de la chute du Mur, alors que celle pour l'anglais explosait. Dans un
cas comme dans l'autre, il fut difficile d'improviser la maîtrise de la
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
nouvelle langue, et les plaintes sur la mauvaise qualité de l'enseignement
des langues vivantes sont un topos de la période 1950-2000 pour la partie
orientale de l'Allemagne. Mais l'importance européenne de la langue russe
aurait sans doute mérité autre chose que le "démontage" linguistique
(Schröder 1995) qui a accompagné les événements historiques: le site
éducatif du Land de Berlin-Brandenburg (rubrique "Bilingualer Unterricht"
du bildungsserver) compte aujourd'hui à Berlin dix-sept lycées proposant
un cursus bilingue germano-anglais, six un cursus germano-français, quatre
proposant un enseignement bilingue avec l'espagnol et un seul avec le
russe, alors que cette langue serait d'un grand intérêt vu la relative
proximité de la frontière polonaise et les nouvelles relations commerciales
avec les anciens pays de l'Est, au premier rang desquels la Russie ellemême est devenue un partenaire économique de premier plan pour
l'Allemagne fédérale.
À l'Ouest, l'Abitur, dont la première partie de cet article a décrit la
complexité et les diverses évolutions, n'oblige pas à une épreuve d'anglais,
le statut de première langue vivante ne signifiant pas nécessairement qu'il
soit choisi en épreuve d'examen; le français, dont l'enseignement avait
encore de beaux restes dans les années 80, continuait à y être choisi comme
matière de l'épreuve de langue étrangère entre 10 et 20%. Ce pourcentage
variait et varie toujours en fonction du facteur géographique, les Länder
ayant une frontière commune avec la France l'apprenant traditionnellement
plus, en fonction du sexe de l'élève, l'anglais passant pour une langue de
garçons alors que le français ou l'italien ont une image de langue de filles,
ainsi que d'une diminution au fil du temps pour le français. Ironie du destin
par rapport à la France où l'allemand a une réputation de langue pour bons
élèves, sorte de latin moderne (Schneider-Mizony, 2010: 190), le français
est vu en Allemagne comme une langue difficile et élitiste, dont le lycée et
l'Abitur démocratisés se détournent de plus en plus. Enfin, les associations
allemandes de professeurs de français attribuent une part de responsabilité
en miroir à la politique linguistique de l'état français, non par un esprit de
revanche, mais dans le sens de la plus grande pente: les lycéens allemands
ne se disent pas "puisque les Français n'apprennent plus l'allemand, je ne
l'apprendrai pas non plus par rétorsion" mais ils raisonnent de façon
pragmatique en considérant que, puisque les jeunes français apprennent de
plus en plus l'anglais, celui-ci constituera un langage commun en cas de
rencontres bilatérales, tout en étant aussi bien plus international que plus
facile.
On pourra s'étonner du petit nombre de langues modernes évoquées jusqu'à
présent: mais le latin garde un rôle important au lycée, ayant encore dans
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
divers Länder, comme en Bavière, le statut de deuxième langue apprise,
avant le français. Il y eut même, après la deuxième guerre mondiale, des
tentatives de certains Länder, comme la Rhénanie-Westphalie, pour le
rétablir dans ses anciennes prérogatives de première langue (Fuchs 2004:
400). Il était cependant trop tard dans l'histoire pour revenir à une
conception wilhelminienne de l'éducation secondaire, de surcroît largement
discréditée par le fait que l'éducation humaniste n'avait pas fait preuve
d'une meilleure résistance à la dictature nazie: la première place de l'anglais
ne fut pas réellement contestée. Mais dans la mesure où un certificat de
latin est encore nécessaire aujourd'hui pour divers cursus d'études
supérieures, de l'histoire à la romanistique en passant par la philosophie ou
la théologie, et où l'obligation en a été abolie seulement récemment pour le
droit, la médecine ou les études vétérinaires, une partie des lycéen-ne-s
souhaitant étudier l'apprennent déjà au lycée.
La possibilité d'apprendre d'autres langues existe bien dans les lycées: le
Land du Baden-Württemberg se targue par exemple de proposer le choix
entre 8 langues à titre de matière obligatoire (Pflichtfächer) – anglais,
français, latin, grec, russe, espagnol, italien et portugais – et 11 langues à
titre de matière de prédilection (Wahlfächer): français, latin, grec, russe,
hébreu, italien, espagnol, portugais, chinois, japonais et turc (les deux listes
suivent l’ordre des effectifs d'apprenants en lycée; on remarque que les
langues anciennes y sont en bonne place, latin et grec pour la première,
latin, grec et hébreu pour la seconde). Cependant ces langues feront
d'autant moins l'objet d'un choix à l'Abitur qu'elles sont en rang ultérieur de
la liste. L'anglais pris à l'examen passe, pour un lycée étudié par Bölling
(2010: 117) de 40% en 1982 à 52% en 1992 et 56% en 2002 et la tendance
ne montre aucun essoufflement. Les deux autres langues choisies sont, dans
l'ordre, le français et le latin: on est loin d'un équilibre dans la diversité
linguistique.
Les langues voisines, c'est-à-dire de pays ayant une frontière commune
avec l'Allemagne comme le néerlandais, le danois, le polonais, ou le turc, la
langue d'immigration la plus importante, ne dépassent pas le 1% depuis une
quinzaine d'années. Même si les discussions récentes sur l'intégration des
jeunes citoyens à "arrière-plan migratoire", comme les appelle le discours
public, a amené les politiques à demander un soutien au turc dans
l'enseignement secondaire, cette langue ballottée entre la caractérisation
comme langue d'origine (Herkunftssprache) et langue étrangère
(Fremdsprache), qui concernerait alors potentiellement les jeunes d'origine
germanophone, peine à trouver une aura de langue pour l'Abitur, rejoignant
en cela les autres langues peu apprises. Plus que dans une indifférence aux
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
langues, il faut peut-être en chercher la cause dans les réformes incessantes
de l'examen, qui fragilisent les matières périphériques, intervenant plus
tardivement dans la scolarité comme les langues, ainsi que la monodomination de l'anglais.
L'ABIBAC
Dans ce contexte, il paraîtra peu étonnant que l'ABIBAC ait du mal à le
disputer en attractivité à l'International Baccalaureate (IB) pour l'anglais,
même s'il est directement ou indirectement le plus ancien baccalauréat
bilingue en Allemagne. L'ABIBAC est en effet à la fois la suite logique et
la déclinaison du "baccalauréat franco-allemand", issu des accords de
l'Elysée de 1963, qui se passe sous cette dénomination au lycée de Buc,
fondé en 1982 et sous l'étiquette "deutsch-französisches Abitur" au lycée de
Sarrebrücken, fondé en 1963 et au lycée de Freiburg im Breisgau, fondé en
1972. Il ne termine pas le même cursus et n'est pas tout à fait le même
examen que l'ABIBAC, beaucoup plus répandu, ceci expliquant cela.
L'ABIBAC est un mot-valise rassemblant la première syllabe de chacun
des deux mots désignant un examen de type baccalauréat préparé dans un
nombre beaucoup plus important d'établissements des deux pays (5) et
destiné à consacrer un cursus secondaire avec une place importante d'une
autre langue que l'allemand, permettant des études supérieures dans les
universités allemandes aussi bien que françaises. Il remonte aux accords de
Mulhouse signés en 1994. C'est un modèle à succès – il a été rejoint
récemment en France par le BACHIBAC, baccalauréat franco-espagnol, et
l'ESABAC, baccalauréat franco-italien, dont les premiers cursus ont été
ouverts à la rentrée scolaire 2010 – et il est reconnu en Allemagne à l'égal
de l'Abitur et en France à l'égal du baccalauréat. Mais – et en ceci le motvalise est tout à fait révélateur – il ne s'agit pas de l'addition des deux
examens avec toutes leurs composantes, mais d'une partie de chacun: en
Allemagne, l'ABIBAC ressemble majoritairement à l'Abitur, en France,
majoritairement au baccalauréat. Dans chacun des deux pays, la langue du
partenaire est enseignée à un fort taux horaire – 6 heures – et comprend
l'étude de textes littéraires. En Allemagne, deux autres matières sont
également données en langue française, l'histoire, dans tous les cas de
figure, et une autre matière qui peut être la géographie, distincte en
Allemagne de l'histoire, la politique ou la sociologie. Lors des épreuves de
l'ABIBAC, un des correcteurs à l'écrit et un des examinateurs à l'oral
viennent du pays partenaire. Il est spécifié dans les directives que la qualité
de la langue pour l'examen dans les deux disciplines non linguistiques
(DNL) doit être fluide et compréhensible, mais que seuls les savoirs ou
lacunes disciplinaires font l'objet de l'évaluation par une note. L'attrait de
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
l'ABIBAC s'exerce majoritairement sur les élèves de sexe féminin de la
«classe moyenne»: le nombre d'établissements qui le proposent augmente
chaque année, comme augmente chaque année le nombre de lycées qui se
cherchent un profil spécifique par des cursus bilingues, l'anglais étant de
loin la variante préférentielle.
En guise de conclusion: les langues ne sont pas un enjeu de l'Abitur
À l'issue de cette présentation panoramique de deux siècles d'histoire de
l'examen terminant la scolarité secondaire et introduisant à l'université, il
semblera aux lecteurs qu'il n'y ait pas de passion ou de débat sur les langues
en Allemagne fédérale: c'est à la fois inexact et fidèle. Inexact, parce que
les parents allemands peuvent, tout aussi bien que les parents d'autres pays,
s'enflammer sur des questions de langues à choisir lorsqu'on prétend
restreindre ce choix. La promotion de l'apprentissage du français dans le
pays de Bade, proche de la frontière française, est ressentie par certains
comme une intolérable ingérence dans leurs droits éducatifs lorsqu'elle a
lieu aux dépens d'un anglais ressenti comme matière tout aussi
incontournable que l'allemand ou les mathématiques. Et la place du latin en
Bavière fait l'objet régulier dans la presse d'attaques tout aussi virulentes
que peuvent être enflammées la défense du latin et du grec. Mais
l'impression a néanmoins ceci de juste que les enjeux sont ailleurs en
Allemagne: conception d'un lycée et de son examen terminal comme
élitistes ou démocratisés, diplôme terminal ou entrée dans les études
supérieures, souveraineté régionale, voire locale sur cet examen ou au
contraire standardisation au niveau du Land ou de l'état national, les enjeux
sont le choix entre la verticalité (sélective) ou l'horizontalité (ouverture
démocratique) du système scolaire. L'optimiste verra alors dans le
remplacement du latin par l'anglais à la place de première langue une
victoire des progressistes, le pessimiste s'attristera devant le fossé
grandissant entre les bonnes connaissances en anglais des jeunes allemands
et une relative indifférence aux autres langues, tout au moins dans la
scolarité.
Notes
(1) L'étymologie est latine, de abire, s'en aller; l'Abitur (ium) est ce qui permet de s'en
aller … du lycée!
(2) L'enseignement étant de la compétence du "Land" (l'état régional), le baccalauréat
allemand diffère jusqu' à aujourd'hui d'un Land à l'autre.
(3) C'était en tout cas l'argument mis en avant par la brochure du syndicat des
enseignants, le GEW (Gerwerkschaft für Erziehung und Wissenschaft) dans sa brochure
mise en ligne à l'automne 2008.
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O. Schneider-Mizony, L’Abitur en Allemagne et l’ABIBAC
(4) Dans une échelle de notes de 6 points; avec 1 comme meilleure note et 6 comme
plus mauvaise, cela représente un écart énorme dans l'évaluation des élèves.
(5) Un peu plus de 60 en France et un peu plus de 50 en Allemagne, cf. le site du Centre
International d'Études Pédagogiques CIEP, consulté le 19/02/2011.
Bibliographie et sites
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brochure consultée le 21/09/2010 www.gew.de/Abitur_in_der_Diskussion.html
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http://www.welt.de/politik
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