L`engagement d`une entreprise de tourisme en
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L`engagement d`une entreprise de tourisme en
UNIVERSITE LUMIERE LYON 2 MASTER 2 « ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE » RAPPORT DE STAGE L’engagement d’une entreprise de tourisme en faveur du développement durable : une démarche nécessaire pour le développement de l’offre d’écotourisme et de tourisme solidaire? Etudiant : Mathilde Linossier Maître de stage : Lahsen Abdelmalki, Responsable du master Année Universitaire : 2007-2008 Travail achevé : A Montréal, le 25.11.2008 Table des matières Table des matières ........................................................... ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. Remerciements ........................................................................................................................... 3 Introduction ................................................................................................................................ 4 1. 2. L’entreprise et son contexte ........................................................................................... 5 1.1. Présentation de l’entreprise .................................................................................... 5 1.2. Besoins de l’entreprise : mission, objectifs, outils de travail ................................. 6 1.3. Analyse externe ...................................................................................................... 8 1.4. Analyse interne..................................................................................................... 22 La nécessité d’envisager le tourisme autrement........................................................... 27 2.1. Les dérives du tourisme « classique ».................................................................. 27 2.2. L’émergence de nouvelles formes de tourisme.................................................... 31 2.3. Réglementation : codes, textes et chartes............................................................. 34 La certification des entreprises..................................................................................... 36 2.4. 3. 4. Une nouvelle tendance : la certification ............................................................... 37 2.4.1. Quelques labels ............................................................................................ 39 2.4.2. Le retard du Québec dans la certification..................................................... 40 2.4.3. La Charte de Nanuq Aventure...................................................................... 43 La mise en pratique du projet ....................................................................................... 47 3.1. L’impact de la démarche dans la gestion interne de l’entreprise ......................... 47 3.2. Le projet au quotidien .......................................................................................... 49 3.3. La mise en place de critères ................................................................................. 53 3.4. Les freins dans la mise en place du projet............................................................ 54 Bilans et résultats, préconisations ................................................................................ 58 4.1. Le projet à long terme : perspectives.................................................................... 58 4.2. Bilan et résultats, préconisations .......................................................................... 60 Conclusion....................................................................... ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. Bibliographie ................................................................... ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. Annexes ........................................................................... ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. Annexe 1 : Charte interne de Nanuq Aventure - volet fournisseursERREUR ! SIGNET NON DEFINI. Annexe 2 : Charte interne de Nanuq Aventure - volet clients ........ ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. 2 Remerciements Je tiens, tout d’abord, à remercier toute l’équipe pédagogique du Master ESS de l’université Lumière Lyon 2 sans laquelle mon départ pour le Canada n’aurait pas été possible. Je souhaite aussi remercier toute l’équipe de « Nanuq Aventure » qui m’a accueillie si chaleureusement dans ses locaux et fait découvrir la vie d’une agence de tourisme réceptif. Je remercie également mes deux tutrices de stage, Marion Guiset et Patricia Lachance, qui m’ont conseillée, écoutée et ont approfondi avec moi toute la réflexion sur la mise en place du projet d’écotourisme et de tourisme solidaire. Notre nouveau manager, Pierre-André Boyer, arrivé peu après moi, m’a fait part de sa grande expérience dans le domaine du tourisme et m’a aiguillée sur les perspectives possibles du projet. Merci à lui aussi. J’associe bien sûr à ces remerciements le président de Nanuq Aventure et directeur commercial Djamal Hassaïne, qui m’a offert la plus belle reconnaissance possible de tout mon travail de ces six mois, en m’offrant un poste dès le mois d’octobre au sein de Nanuq Aventure. Je souhaite également remercier mon tuteur universitaire, Lahsen Abdelmalki, qui m’a conseillée et aidée dans la réflexion et rédaction de ce mémoire de stage, et a proposé de mettre en place des dispositifs d’arrangements pour effectuer ma soutenance à distance. Merci aussi à tous les professionnels et civils qui ont partagé leurs connaissances avec moi, sur l’histoire Amérindienne notamment, et à ceux qui ont pris du temps pour répondre à mes questions sur leur démarche responsable au sein de leurs structures touristiques. Enfin, je remercie toutes les personnes qui m’ont soutenue pour leur patience et leur aide. 3 Introduction D’après les prévisions de l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT), le taux de croissance du tourisme mondial devrait s’établir à 4,1% par an entre 1995 et 2020, soit 1,56 milliard d’arrivées de touristes internationaux en 2020, contre presque 900 millions aujourd’hui. La démocratisation du voyage et des loisirs dans de plus en plus de pays rendent cette croissance possible, malgré les incertitudes géopolitiques. Mais le développement rapide et pas toujours maîtrisé du tourisme peut entraîner des effets pervers nombreux, il convient donc de mettre en place des systèmes de régulations et des politiques d’incitation à développer des formes de tourisme « responsable ». Le thème de ce rapport de stage porte naturellement sur l’engagement des entreprises en faveur d’un tourisme plus responsable. Afin d’allier les connaissances acquises dans ma formation antérieure de tourisme à celles de ma formation actuelle en économie sociale et solidaire, il apparaît comme une évidence de travailler sur un projet de tourisme responsable. L’entreprise qui m’a accueillie tout au long de ces six mois m’a offert l’opportunité de développer tout ce volet et de l’intégrer dans la gestion quotidienne. La mission principale a été la conception d’une charte interne, permettant de retracer toute la politique de l’entreprise en matière de tourisme responsable. La prise de conscience générale, en matière d’environnement notamment, pousse les entreprises à s’engager dans des démarches de développement durable, de responsabilité sociétale, ou autre, et constitue ainsi pour le tourisme responsable un formidable marché à développer. Ainsi, une première partie permettra de présenter l’entreprise, une deuxième partie tentera de montrer la nécessité d’envisager le tourisme autrement que le tourisme classique de masse, une troisième partie montrera la mise en pratique du projet au quotidien, et enfin une dernière partie fera le bilan de ces six mois de stage. Les termes de tourisme responsable, durable, écotourisme, tourisme solidaire, équitable, étant tous assez proches dans leur définition, ils pourront tous être utilisés tout au long de ce rapport pour éviter la redondance. 4 1. L’entreprise et son contexte 1.1. Présentation de l’entreprise Nanuq Aventure Inc. est une entreprise privée à but lucratif créée en 2002. Elle s’est beaucoup développée au cours de cette année passée. Activité : agence de tourisme réceptif et tour opérateur Nanuq Aventure est le spécialiste de la destination Canada. L’entreprise construit des circuits et séjours sur mesure, à la demande des agences de voyages et tour opérateurs basés principalement en France, Belgique, suisse et Allemagne. L’entreprise peut répondre à toutes les demandes, pour des clients individuels, des groupes, de la clientèle haut de gamme, des voyages d’entreprise (comité d’entreprise, motivation, récompense). C’est à l’entreprise de faire preuve de créativité, de rapidité, d’efficacité, de réactivité pour être sélectionnée par l’agence et le client final. Nanuq Aventure s’occupe également de tout ce qui concerne les réservations, et l’accueil des clients sur place. Départements : Service FIT (Free Independant Travelers): il s’agit de la clientèle individuelle, jusqu’à 20 personnes. Le service s’occupe de la production, c’est-à-dire la conception des circuits et la recherche de fournisseurs pour créer des partenariats, du suivi des dossiers avec les clients, de tout ce qui concerne les réservations, facturation, relations clients et fournisseurs, préparation du voyage pour les clients, accueil des clients. Service Groupe : pour les groupes au-delà de 20 personnes. Bien que l’aspect logistique soit très différent, le service groupe s’occupe des mêmes fonctions que le service FIT. Service commercial : prospection auprès des clients potentiels, suivi et appui des dossiers en cours auprès des clients, relations directes avec les clients. Formation et conseil. Service comptabilité. Service informatique : mise en place de nouveaux outils informatiques Service communication : mise en page des brochures et autres supports de communication, préparation des salons et autres événements auxquels l’entreprise participe. 5 Projet annexe sur l’écotourisme et le tourisme solidaire : le projet sera détaillé tout au long de ce mémoire. 1.2. Besoins de l’entreprise : mission, objectifs, outils de travail Mission et sujet du stage A l’origine, Nanuq Aventure est destinée à concevoir des voyages qui sortent de l’ordinaire. La nécessité d’assurer son besoin en fonds de roulement l’a poussée à proposer des produits plus de « masse », c’est-à-dire la conception de circuits relativement classiques et très touristiques. Ces circuits sont très demandés, mais ce sont également ceux qui entrainent une concurrence très rude par les prix. Nanuq Aventure se crédibilise de plus en plus et est reconnue pour son originalité, ce qui permet de gagner de précieux dossiers haut de gamme. Sur cette voie, Nanuq Aventure pourra se concentrer sur ce qui fait son originalité : les voyages extraordinaires. Dans cette perspective, le retour aux sources implique aussi une réflexion en profondeur sur l’écotourisme, l’éthique, l’équité, etc. De la volonté du directeur de « bouger les choses » et de la motivation de toute l’équipe pour continuer sur la voie du tourisme durable, est née ma mission : développer les produits écotouristiques et de tourisme solidaire. Cela passe par la veille de marché, un profond travail de recherche, des prises de contacts et des rencontres avec de nombreux partenaires potentiels, du travail de terrain, et surtout la rédaction de la charte de l’entreprise qui apportera la crédibilité nécessaire pour développer ces produits. Ce travail s’articule autour de quatre pôles principaux : Le tourisme solidaire : ici, on entend des projets de tourisme en partenariat avec des communautés amérindiennes, où les retombées économiques profitent à toute la communauté, avec possibilité de financer des projets de développement. Le tourisme écologique : il s’agit là de trouver des fournisseurs partenaires dans tous nos domaines d’intervention : hébergement, activité, restauration, transport, qui ont mis en place des démarches de préservation de l’environnement et de réduction de leur impact négatif sur l’environnement. La dynamique locale : le tourisme peut être un excellent moyen de dynamiser une région, par l’activité, l’emploi, l’animation générés. Le tourisme local (tourisme à la ferme, découverte des produits locaux, gastronomie, terroir, etc.) rentre tout à fait dans la 6 perspective du tourisme durable. Finalement, le tourisme local, c’est du tourisme équitable au Nord ! Le volet protection des animaux : « Nanuq » signifie ours polaire en Inuit. La protection des animaux est une cause qui tient à cœur à toute l’équipe de Nanuq Aventure. Ma mission ici est donc de développer un partenariat avec une association de protection des animaux, si possible de l’ours polaire, fortement menacé, ou tout autre animal menacé vivant sur le territoire canadien (les loups, les baleines…) Objectifs Au départ, les objectifs sont clairs : que la charte interne soit rédigée d’ici septembre, validée ensuite par un organisme externe ; et que ce même organisme puisse également auditer tous les partenaires signataires de la charte pour vérifier que les critères définis par la charte soient bien respectés. En ce qui concerne les partenaires, la priorité est de trouver des hébergements : à partir du moment où les hébergements sont sélectionnés, il est possible de créer un circuit et de développer les activités aux alentours. L’idéal est bien sûr qu’un ou plusieurs circuits soient complètement mis en place à la fin de mon stage, c’est-à-dire qu’ils aient été testés, vérifiés, adaptés. Le partenariat avec une association de protection des animaux doit également être mis en place d’ici septembre. D’un autre côté, il s’agit de développer un projet dans la durée, et donc de le pérenniser. Pour cela, mieux vaut prendre du temps au début afin de bien poser les bases et ne pas brûler les étapes. Face à la masse de travail que ces objectifs exigent, il se peut que les bases soient bien posées d’ici septembre mais que certains aspects ne soient pas encore finalisés. D’autant plus que l’été est une période où l’activité est fortement intensifiée, je suis donc aussi mobilisée pour le travail quotidien du service groupes afin de pouvoir répondre à toutes les demandes. Nous verrons donc plus tard que la mission s’est fortement étoffée au cours de ces derniers mois, et cela a entrainé une modification des objectifs de départ. 7 1.3. Analyse externe L’analyse externe de l’entreprise permet d’analyser son environnement et de déterminer si des facteurs externes peuvent influer sur l’entreprise de façon positive ou négative. Cette analyse permet également de situer l’entreprise sur son marché et de la positionner par rapport à ses concurrents. Chiffres Le tourisme est la branche qui génère le plus d’emplois et de recettes au monde, en employant 8% de la main-d’œuvre mondiale (soit 255 millions de personnes, et 5,5 millions de nouveaux emplois chaque année), en générant environ 360 milliards de dollars de recettes chaque année dans le monde, et en contribuant à hauteur de 11,7% du PIB mondial1. Sa croissance est très forte, en moyenne 4,1% par an d’après l’OMT (Organisation Mondiale du Tourisme), et l’on n’attend pas moins de 1,6 milliards de touristes en 2020. Quelques chiffres au niveau mondial, continental, national et régional : Ces chiffres permettent de mettre en lumière la situation du Canada, et plus particulièrement de la province du Québec dans le tourisme global. Statistiques mondiales de l’OMT, Amériques et Canada : 133,5 millions de touristes dans les Amériques (soit 16,56% des parts de marché mondiales) en 2005 Canada : 19,152 millions, 15,2% des parts de marché des Amériques, avec une tendance plutôt à la stabilité / légère baisse par rapport aux années précédentes. Canada : 13,584 milliards de recettes, soit 9,4% des parts des Amériques, avec une tendance plutôt à la légère hausse par rapport aux années précédentes. En général : les Amériques ont des parts de recettes plus élevées que les parts de marché des arrivées. Au Canada, c’est l’inverse : cela signifierait alors que les touristes dépensent en moyenne moins d’argent lors d’un séjour au Canada que dans les autres pays des Amériques. 1 On trouve différents chiffres selon les sources sur le nombre d’emplois, les recettes engendrées ou la contribution au PIB. Mais elles montrent toutes la même tendance et sont unanimes sur le poids du tourisme dans le monde du travail ou des recettes financières générées. 8 Statistiques au Québec2 : 2,7 millions d’arrivées internationales et 3 milliards de dollars américains de recettes Canada : 40,342 millions de touristes en comptant les excursionnistes, dont 4,555 au Québec, soit 11,3% de parts de marché au Canada Canada : 14,302 millions de dollars canadiens de recettes, dont 2,444 au Québec soit 17,1% des parts de marché au Canada. Provenance des touristes : Québec, autres provinces canadiennes, USA, France, Royaume-Uni, Allemagne, Mexique, Japon. Tourisme : 2,7% du PIB québécois, 5ème produit d’exportation, 29 600 entreprises, 388 000 emplois dont 133 000 directs. Données du ministère du Québec et de l’AEQ (Aventure Ecotourisme Québec)3 : 250 entreprises œuvrent dans le tourisme d’aventure et en écotourisme, dont 15% spécifiquement écotourisme. Selon l’AEQ : les dépenses en tourisme d’aventure et écotourisme permettent création/consolidation de 11400 emplois par an au Québec. Le Québec est la troisième province touristique du Canada, après l’Ontario et la Colombie Britannique. Les touristes dépensent en proportion plus que dans d’autres régions, puisque les recettes sont plus élevées que le nombre d’arrivées en pourcentage. Le potentiel touristique est très grand et ne demande qu’à se développer, la provenance de plus en plus internationale des touristes le montrent et confirme cette tendance. Par rapport aux statistiques mondiales, le poids du tourisme dans le PIB québécois est relativement peu élevé, ce qui laisse penser que ce potentiel n’est pas encore exploité à 100% et que des opportunités d’emplois et de développement d’activités touristiques sont à créer. Par contre, ces chiffres laissent penser que le potentiel écotouristique du Québec est largement sous-exploité avec seulement 250 entreprises de tourisme d’aventure et de plein-air, dont une petite partie seulement est axée sur l’écotourisme. Les acteurs Le tourisme est un domaine où les acteurs sont nombreux et très interdépendants les uns des autres. Voici les principaux acteurs que l’on retrouve : 2 Source : étude du Ministère du Tourisme, Le Tourisme en Chiffres 2006, disponible sous le lien http://www.bonjourquebec.com/mto/publications/pdf/etudes/Tourisme_chiffres2006.pdf 3 Source : l’étude complète, Etude sur la valeur économique de l'écotourisme et du tourisme d'aventure, est disponible sous le lien http://www.aventure-ecotourisme.qc.ca/content/articlefiles/98-Sommaire_AEQ_etude.pdf 9 Les fournisseurs : les prestataires d’activités, d’hébergement, de restauration dans le pays d’accueil. L’agence réceptive : c’est l’acteur spécialiste de la destination, qui s’occupe des réservations et de l’accueil des clients, elle propose des voyages sur son pays d’activité et sert d’intermédiaire entre l’agence ou le TO et les fournisseurs. Le tour opérateur (TO) : il produit des voyages, sur une ou plusieurs destinations avant de les vendre soit dans les agences de voyage, soit directement au client final. L’agence de voyage : elle vend les voyages des agences réceptives, des TO au client final. Dans la logique, les prestataires d’activités, hébergements et restauration vendent leurs services et produits à l’agence réceptive, qui peut alors proposer un itinéraire au TO, qui va vendre le voyage à l’agence de voyage qui va à son tour vendre le voyage au client final. Mais ce processus a lieu dans un monde de concurrence pure et parfaite… La réalité est toute autre, souvent marquée par l’opacité et les comportements déloyaux : chaque acteur va essayer de vendre en direct au client final, afin d’éviter les intermédiaires et ainsi réduire les coûts. Les fournisseurs vont de plus en plus vendre en direct par le biais de leur site internet, l’agence réceptive va essayer de vendre directement à l’agence de voyages, le TO directement au client final, l’agence de voyages va essayer de traiter en direct avec les fournisseurs, etc. Au final, même si chaque acteur a un rôle bien défini au départ, les rôles finissent par se confondre, chacun « marchant sur les plates-bandes » des autres, intensifiant ainsi la concurrence et la pression sur les coûts et les prix de vente. Le marché Le tourisme est un marché très concentré et un secteur très concurrentiel : d’après le schéma ci dessous sur l’interdépendance des acteurs du tourisme, on s’aperçoit que les acteurs sont nombreux et jouent sur le même terrain. Par exemple, un TO aura besoin de l’expertise de l’agence réceptive car c’est cette dernière qui est spécialiste de la destination. Mais bien souvent, dès que le TO a noué des liens avec les prestataires d’hébergement, de restauration, et d’activité, et ce grâce à l’agence réceptive, il va essayer de négocier directement avec eux pour obtenir de meilleurs prix. Si l’agence réceptive est écartée du processus, cela signifie un intermédiaire en moins (et donc une marge en moins à comptabiliser dans le prix de vente final), et donc un prix final plus compétitif pour attirer les clients. Pour faire face à ce type de comportement déloyal, Nanuq Aventure a mis en place une politique de confidentialité des prix avec ses partenaires 10 fournisseurs : ces derniers s’engagent à ne pas communiquer leurs prix lorsque des représentants de TO ou d’agences viennent en reconnaissance. Le schéma nous montre également que les acteurs tissent des relations complexes entre eux : d’un côté ils vont représenter chacun un maillon de la chaîne qui a besoin des autres maillons pour exister, en partant du prestataire d’hébergement ou restauration, puis du réceptif, du TO et enfin de l’agence de voyage ; d’un autre côté ils vont tous essayer plus ou moins de faire de la vente directe pour être le seul intermédiaire dont le client final aura besoin et ainsi offrir un tarif compétitif. En effet, dans ce milieu et sur le marché du tourisme classique à moyen de gamme, le prix est souvent le nerf de la guerre : les clients veulent de la qualité à bas prix, c’est sans cesse la course au prix (sauf dans le cas des clients qui n’ont pas de contrainte de budget, mais on touche alors une clientèle bien spécifique et moins nombreuse). Il faut alors sans cesse négocier les prix avec les partenaires, et les entreprises qui obtiennent de bons prix sont celles qui apportent du volume, donc de nombreux clients. Au niveau du tourisme responsable, la réalité du marché est toute autre. Outre que ce marché est très restreint au Québec, il concerne en France par exemple surtout le secteur associatif à but non lucratif, assez éloigné de tout ce mécanisme où les maillons sont interdépendants. En ce qui concerne les structures opérant sur le territoire québécois, on remarquera que les entreprises touristiques qui proposent du tourisme de plein-air et d’aventure sont assimilées à de l’écotourisme, ce qui n’est pas forcément vrai. On reviendra sur ce point plus tard. 11 L’interdépendance des acteurs du tourisme : Vend à Clients Internet : sites des fournisseurs, agence de voyages et TO Agence de voyages Tour opérateur Réceptif Prestataires d’activités Restauration Hébergement Transport 12 La concurrence La concurrence est très dure dans ce domaine. Entre la vente directe, les autres réceptifs, etc., les concurrents sont partout. On peut différencier plusieurs types de concurrents : Concurrents intra sectoriels : les autres réceptifs basés au Canada, Les clients ou fournisseurs qui font de la vente directe Les autres destinations : les pays froids comme la Norvège, la Russie, etc., et les pays plus exotiques, les destinations plus avantageuses économiquement, etc. Le tourisme est un secteur très particulier où finalement toutes les destinations sont interchangeables et substituables. Une catastrophe a lieu dans un pays ? Qu’à cela ne tienne, les voyageurs trouveront bien une autre destination pour leurs vacances. Une région dépendante du tourisme pourra être complètement ruinée en cas de catastrophe (naturelle, terrorisme…), sans que cela ait le moindre effet sur la croissance globale du tourisme. Au niveau de l’écotourisme au Québec, Nanuq Aventure pourrait vraiment se positionner comme leader sur ce marché. Cette forme de tourisme, même si elle est utilisée partout, ainsi que par les concurrents intra-sectoriels, est finalement assez peu mise en avant et peu d’entreprises ont choisi de se positionner sur ce créneau pourtant porteur. Beaucoup utilisent le concept, mais plus souvent pour désigner le fait que leurs activités se déroulent en plein air que parce que la structure a adopté une véritable politique environnementale. A ce niveau là, la concurrence se situerait davantage au niveau des autres destinations, dont certaines sont connues et reconnues comme le Costa-Rica au niveau de l’écotourisme ou encore les pays d’Afrique de l’Ouest comme le Mali au niveau du tourisme solidaire. 13 La concurrence d’après les 5 forces de Porter Le schéma des 5 Forces de Porter peut rendre compte de la compétitivité et de la concurrence qui règnent dans le secteur du tourisme : Produits de substitution : autres destinations exotiques, provinces canadiennes, USA, Scandinavie, Russie, Pays de l’Est… Pouvoir de négociation des clients : très élevé, joue beaucoup sur les prix Pouvoir de négociation des fournisseurs : dépend de la Concurrence intra-sectorielle situation, si c’est un fournisseur déjà établi ou non, avec ses clients. Ils feront de meilleurs tarifs si Nanuq apporte du volume, mais Nanuq a un large choix de fournisseurs aussi. Menaces de nouveaux entrants : nombreuses petites entreprises qui peuvent décrédibiliser le concept d’écotourisme, absence de barrières à l’entrée Outre une forte concurrence intra-sectorielle, où chaque agence réceptive se bat pour obtenir de nouveaux clients, les fidéliser alors que l’image du Canada se détériore et que la destination n’est pas réputée pour offrir un bon rapport qualité-prix, la concurrence avec les autres destinations est sans doute la plus « fatale ». Autant au niveau de la clientèle individuelle, si une personne a 14 décidé de partir au Canada, alors son choix est arrêté et elle est prête à payer plus cher, autant au niveau de la clientèle de groupe la logique est différente : les clients font en général appel à plusieurs agences réceptives dans un même pays pour obtenir le tarif le plus avantageux ou dans plusieurs pays : ainsi il est possible de perdre des dossiers groupes contre des destinations plus exotiques. Le pouvoir de négociation des clients et des fournisseurs est également élevé. Si Nanuq Aventure continue de se développer, les rapports vont certainement s’équilibrer davantage. Analyse PESTE de l’écotourisme La matrice PESTE permet d’analyser l’environnement de l’écotourisme et de déterminer s’il est favorable ou non au développement de cette forme de tourisme4. OPPORTUNITES 2002 : année MENACES internationale de l’écotourisme par les Nations Unies, superficie de territoire protégé Sommet mondial de l’écotourisme à Absence de politique sur la protection Québec des paysages Démarche Qualité Tourisme du Rareté des ressources financières ministère du tourisme québécois POLITIQUE / Manque flagrant de réglementation dans Politique touristique du le domaine (application des normes, gouvernement du un etc.), labels « peu convaincants » : clés partenariat LEGAL Retard du Québec au plan de la Québec : industrie-gouvernement vertes, feuilles vertes, diamants… autour de la problématique de Pas de concertation entre les acteurs développement durable pour une vision commune, pas de Cadre de référence existants : AEQ, consensus autour du terme écotourisme STAQ (efforts de mise en marchés compliqués) (Société Autochtones protégées, du Touristique Québec), des aires Demande du marché français de politique certification, contrôle, campagne de gouvernementale sur la biodiversité, sensibilisation sur l’écotourisme et code 4 La source principale pour réaliser cette analyse est l’étude du ministère du tourisme, Nature et tourisme : l’écotourisme au Québec en 2002, disponible sous le lien http://www.bonjourquebec.com/mto/publications/etudes/ecoQC02.html 15 la protection des sites, le tourisme, d’éthique plans régionaux, etc. Efforts encore limités dans la promotion de pratiques de tourisme durable Croissance prévue de 10 à 15% par an du tourisme d’aventure Le Canada est une destination Forte Equateur Croissance forte du tourisme et du Produits d’écotourisme et consommés dans le cadre d’un s’accroissant. Secteur ECONOMIQUE Marché européen particulièrement important pour les producteurs de Qualité et originalité des produits Diversification potentiel de des de nouveaux produits concurrence des au autres Rentabilité financière prioritaire qui peut aller à l’encontre des principes Marché peu segmenté et peu diversifié Globalement très petites entreprises : faible chiffre d’affaires, saisonnalité. Absence de barrières à l’entrée Partenariat public – privé accru Dynamique du secteur de l’aventure Produit « aventure seulement et de l’écotourisme émergence écotouristiques. produits, développement en provinces et des USA tourisme d’aventure et écotourisme encore Québec, voyage plus traditionnel l’Allemagne, La concurrence entre pays ira en de tourisme de nature le plus souvent pour Scandinavie, Russie, pays de l’Est, etc. marché des loisirs et des excursions internationale : Afrique pour la France, Costa-Rica et écotouristique populaire concurrence – 0,5% plein des air » : voyages d’agrément Québec en 1998. Retombées économiques dans les régions et communautés locales Recherche de plus-value à l’expérience touristique en nature, SOCIAL Exigence chance accrue pour des l’écotourisme Recherche accrue du luxe qui peut aller à touristes : qui propose des produits de qualité plus en plus vite, touriste hybride valeurs de l’écotourisme Attentes des clientèles qui évoluent de l’encontre des principes écotouristiques (golf, spa…) Perte des activités dans de traditionnelles Clientèle de plus en plus curieuse : culturelles nombreuses besoin de rencontres, sens, valeurs… communautés, perte de l’expertise liée à 16 Très fort potentiel d’écotouristes certaines activités dont le voyage n’a pas pour but Dégradation principal archéologiques niches l’écotourisme ; de marché petites pour les culturelle Composante culturelle des milieux d’écotourisme Clientèles de plus en sites culturels ou Intégration limitée de la composante écotouristes expérimentés. naturels de aux Méconnaissance expériences des cultures autochtones plus préoccupées par l’environnement, Améliorations souhaitables des activités campagnes de sensibilisation d’interprétation Plusieurs programmes de formation Méconnaissance en écotourisme producteurs Main-d’œuvre qualifiée disponibles dans les ministères ou de des la part des informations organismes gouvernementaux Internet Technologies relativement simples de recyclage, etc. TECHNOLOGI technologies Accès aux systèmes de réservation pour Nouvelles environnementales de plus en plus QUE Innovations environnementales ? abordables ? les petites structures ? Au marché ? Progrès constants dans la conception des équipements de plein air et outils de communication Grands espaces propices à ce type de Milieu naturel constamment menacé tourisme, parcs nationaux, régions Certaines activités d’aventure polluantes pôles d’attraction Aires protégées ENVIRONNEM protégées ENT écotouristique à (déforestation…) et fort aires non Problème potentiel Implantation du Programme Sans des transports (transport hybride… ?) Sites choisis davantage par convenance que par réel souci de qualité Trace (pistes de recommandations Lieux de concentration de la demande pour les touristes afin de laisser le Territoire partagé avec des activités non moins de traces possible de leur écotouristiques (chasse, industrie…) 17 Connaissance limitée des producteurs passage) Protection de la nature, des animaux des impacts de leurs activités sur le Territoire partagé : possibilité de milieu naturel combiner plusieurs types de Potentiels peu exploités dans le domaine tourisme (forfait) des produits exclusifs Bonne accessibilité aux sites Constats de l’analyse : le Canada, et le Québec, possèdent tous les atouts pour développer l’écotourisme. Cependant, cette forme de tourisme étant encore en émergence, il n’y a pas vraiment de consensus sur les définitions, le cadre de référence du concept, ou encore une vision commune. Face à la demande croissante des clients pour l’éthique ou l’environnement, et à la conscientisation des acteurs du tourisme, on devrait se diriger de plus en plus vers une démarche commune, de fédération de toutes les parties prenantes pour renforcer le positionnement du pays et de la région sur ce marché et ainsi faire face à la concurrence. Analyse PESTE du tourisme solidaire et autochtone On remarque qu’ici, contrairement à la matrice PESTE de l’écotourisme, l’aspect humain est au cœur de l’analyse. En effet, le tourisme solidaire pose toute la question des rapports humains, des notions de partenariat et d’implication de tous les acteurs. Aussi, dès que l’on touche à l’humain, les conséquences peuvent être bien plus importantes ou désastreuses que dans les domaines économique ou environnemental : c’est tout un système social que l’on remet en cause, le rapport à la culture, aux traditions, et plus que dans n’importe quel autre domaine, il faut anticiper tous les effets que notre action touristique peut avoir sur une communauté. NB : Attention aux termes choisis. Au Canada, c’est le terme de tourisme autochtone qui est employé. La notion de tourisme solidaire n’existe pas ici, elle est souvent réservée aux pays en voie de développement alors que ce n’est pourtant pas une de ses conditions de réalisation. OPPORTUNITES POLITIQUE LEGAL / MENACES Code mondial d’éthique du tourisme Manque total de visibilité : processus, de l’OMT procédure, termes… L’OMT voit dans le tourisme durable Pas/peu de concertation entre acteurs 18 un facteur de lutte contre la pauvreté Pas de réglementation au Québec Le gouvernement du Québec met en (application des textes, etc…) place une stratégie pour développer et Pas de stabilité au niveau de la tête du promouvoir le tourisme durable par le conseil biais de subventions à des projets. réguliers, abandon des projets en de bande5 : changements cours, pas de continuité long terme. Peu de marge sur ce type de voyages, Secteur en émergence au Québec Retombées positives pour la communauté d’accueil Création d’emplois Volonté de transparence de la part des touristes sur la construction du prix, la répartition des bénéfices, etc. Marché européen important : demande Problème d’infrastructures dans les réserves L’attrait du profit peut mettre en péril l’intégrité culturelle Difficulté de mise en marché du produit Manque de main-d’œuvre qualifiée, trouver un guide autochtone pour accrue pour vivre des expériences ECONOMIQUE rendre amérindiennes Croissance sans précédent de la population autochtone : les jeunes sont Coûts en temps et en argent dus à l’éloignement Le tourisme autochtone offre un large certains sites à la hauteur des attentes du client Concurrence : en ce qui concerne le tourisme solidaire, le marché français potentiel de croissance, à condition qu’il reste authentique de (Grand Nord…) : l’expérience doit être exploitée, défi de les maintenir dans le touristique harmonieuse une ressource humaine largement sous tourisme. l’expérience est plus porté vers l’Afrique Concept de tourisme solidaire peu développé au Nord Saisonnalité Accès au financement problématique6 SOCIAL Volonté de vivre une expérience, Capacité à maintenir le projet, la 5 Les communautés autochtones élisent leur chef et son conseil qui constituent alors le conseil de bande. Il représente la population au niveau juridique, administratif politique. 6 Se renseigner à ce sujet sur la Loi sur les Indiens, où les conditions bancaires pour des prêts financiers par exemple sont beaucoup plus drastiques que pour les non Autochtones. 19 rencontrer la population, sa culture, flamme, la coopération : cela implique mode de vie, etc. Echange. un personnel motivé aussi bien chez le Possibilité d’allier dans un voyage la voyagiste nature et la culture. d’accueil. Intérêt du public français pour la Réussir à s’adapter aux 2 cultures découverte du mode de vie amérindien Nombreux préjugés à l’égard des Pour les Amérindiens7 : un moyen de communautés réconciliation (mieux comprendre leur Problèmes d’alcoolisme, drogues… : réalité), de préserver leurs traditions et peuple blessé, en manque de repères de se rapprocher (garder leur culture Pas ou peu de contacts entre les vivante, Amérindiens et les Canadiens rapprochement générations), de entre promouvoir les leur la communauté Peu d’Amérindiens connaissent encore culture (faire connaître leur histoire, les traditions, les légendes… mise en valeur de leur culture), Fossé fragile entre authenticité et d’émancipation (fierté, estime de soi) folklorisation de la culture Créer des liens authentiques et rétablir Pour les Amérindiens : lieux sacrés la confiance pour ce peuple blessé devant être gardés secrets, sentiment Le tourisme autochtone se traduit de d’être observé, obligation d’assiduité multiples de lors des prestations touristiques, notion l’ethnotourisme à l’écotourisme en de sécurité, niveau de confort et passant par le tourisme d’aventure : on d’hygiène exigé par le client. peut manières, imaginer une allant multitude de produits. que Volonté Les communautés ne paraissent pas prêtes à porter ce type de projet et engagement de la La communauté, l’entreprise de communauté, son implication directe tourisme et le voyageur ont chacun dans le processus de développement leurs attentes, il faut réussir à les du concilier projet touristique conditions de réussite. sont des Réticence des autochtones vis-à-vis de certains comportements non adaptés Sensibilisation faible aux avantages et débouchés du tourisme : les communautés ont d’autres priorités 7 Cf. l’article du Globe Veilleur Le tourisme autochtone, plus qu’un simple produit, juin 2007 20 (infrastructures…) Réticence de la part des acteurs touristiques de travailler avec les communautés: longueur du processus TECHNOLOGI QUE Internet Gros potentiel : toutes les techniques et traditions amérindiennes pour vivre ENVIRONNEM en pleine nature et en harmonie avec ENT les principes d’écotourisme : trappe, canoë, plantes, pierres, forêt… liés au Mise en marché des produits Dégradation des sites culturels Choix des sites et accessibilité La chasse peut être mal perçue mode de vie Constat de l’analyse : la STAQ (Société Touristique des Autochtones du Québec) est la référence québécoise en matière de tourisme autochtone. Pas forcément en lien avec les principes du tourisme solidaire, elle se veut une vitrine et un tremplin pour les communautés désirant s’investir dans le tourisme en matière de visibilité, commercialisation des produits, communication et promotion, outils de gestion, etc. En dehors de cette association, il est très difficile d’obtenir des informations sur d’autres projets de tourisme autochtone non référencé par elle. Les structures membres sont de qualité inégale et variable, certaines étant habituées à traiter avec de la clientèle internationale, d’autres étant beaucoup plus petites et beaucoup moins touristiques, laissant ainsi plus de place à la rencontre et à la spontanéité. Toute la difficulté pour une entreprise comme la nôtre consiste à travailler avec des partenaires qui puissent offrir des prestations répondant aux attentes de la clientèle internationale avec des standards de qualité et de confort précis et élevés, mais tout en gardant une authenticité certaine. Le débat est très complexe au Québec, mais les Amérindiens ont adopté en quelques décennies un mode de vie aux antipodes de ce qu’ils vivaient depuis des milliers d’années ; c’est un peuple en crise d’identité profonde qui a bien souvent perdu beaucoup de ses coutumes et traditions. Le client risque donc d’être déçu en voyant que son mythe de l’Indien en costume traditionnel s’effondre pour laisser la place à des gens comme vous et moi qui vivent dans des maisons dures, roulent en voiture, etc. 21 Le tourisme autochtone offre malgré tout de formidables opportunités économiques grâce aux activités créées, et humaines grâce aux rencontres entre plusieurs cultures. Le tout est de ne pas sombrer dans la « caricature » de sa culture pour satisfaire à la demande d’exotisme des clients. Que ce soit pour l’écotourisme ou le tourisme autochtone, l’offre québécoise n’est pas toujours bien structurée ou mise en valeur. De gros efforts restent à fournir, d’abord au niveau de la réglementation institutionnelle qui peut impulser ou favoriser les démarches environnementales et solidaires des entreprises touristiques, puis au niveau des entreprises elles-mêmes sur la qualité des produits et services pour pouvoir répondre à la demande des clients les plus exigeants, sur la visibilité de leur démarche grâce à une meilleure concertation entre les acteurs, etc. Le potentiel est bel et bien là, et Nanuq Aventure a toutes les clés en main pour pouvoir développer des produits dans ces marchés de niche. 1.4. Analyse interne L’analyse interne de l’entreprise permet de mettre en lumière les forces et les faiblesses de l’entreprise. Grâce à cette analyse, elle pourra optimiser ses forces et au contraire combattre ses faiblesses pour être la plus performante possible sur son marché. Les clients Nanuq Aventure est un réceptif canadien qui travaille principalement avec le marché Europe francophone et le marché allemand. Les régions « exploitées » par Nanuq Aventure pour cette clientèle européenne sont la Colombie Britannique à l’ouest du pays et le Québec à l’est. L’entreprise est en train de développer fortement la région de l’Ontario. On peut diviser la clientèle en deux catégories : la clientèle FIT (Free Independant Travelers voyageurs indépendants) et la clientèle de groupes. Le service FIT s’occupe des demandes qui impliquent jusqu’à 20 personnes, ce sont des personnes qui voyagent généralement en famille, entre amis, en couple, etc., mais ce peut être également des GIR (Groupe d’Individuels Regroupés). Cette clientèle est relativement diversifiée : il n’y a pas vraiment de profil type, les attentes sont donc aussi variées, même si l’image véhiculée par le Canada se reflète largement dans le choix de produits des clients, à savoir des produits de plein air, que ce soit l’hiver ou l’été, plus que des produits culturels. 22 La clientèle de groupe est en général une clientèle d’entreprise. Là, deux profils se distinguent très nettement : le profil « voyage économique » et le profil « voyage incentive ». Dans le voyage économique, la contrainte de budget est très forte, on aura plus affaire à des groupes de type comité d’entreprise. Appartiennent également à cette catégorie les groupes qui voyagent en autocar et ne font donc pas partie d’un voyage d’entreprise. Par conséquent, on va forcément proposer des produits assez classiques et touristiques, qui correspondent au budget alloué. Le voyage « incentive », qui concerne plus des voyages de récompense, des séminaires ou autre, nous invite à la créativité : en effet, le budget étant plus flexible, nous pouvons nous permettre d’inclure des prestations très haut de gamme, des produits exceptionnels, de privatiser des sites, etc. Ce sont donc deux approches totalement différentes du voyage. La clientèle FIT et la clientèle groupe ne demandant pas la même méthode ni les mêmes outils de travail, ce sont donc logiquement deux services différents qui s’en occupent. En ce qui concerne les voyages d’écotourisme et de tourisme solidaire dont je m’occupe, il s’agit plus d’anticiper la demande et de se positionner sur ce marché : les clients ne pensent pas forcément au Canada pour ce type de voyage, à nous de leur montrer que c’est possible et de créer la demande pour attirer une nouvelle forme de clientèle. Positionnement Positionnement actuel : On peut résumer ainsi le positionnement de l’entreprise sur le marché touristique au Québec : • Produits originaux, hors des sentiers battus • Produits haut de gamme et exclusifs • Crédibilité vis-à-vis des clients pour des produits de qualité, originaux, reconnus pour cela • Produits plus classiques qui génèrent le volume et donc la viabilité financière de l’entreprise • Produits nature, grands espaces, activités de plein air, avec parfois des composantes amérindiennes • Produits FIT et Groupe Large gamme de produits, de prix, de clientèle Positionnement sur les produits classiques pour assurer la pérennité de l’entreprise Positionnement sur le marché du tourisme d’aventure pour des produits originaux 23 Le tourisme d’aventure se marie bien avec l’écotourisme et le tourisme autochtone pour un positionnement encore plus original. Volonté de se positionner sur le marché de l’écotourisme : • Un positionnement écotourisme donnerait une crédibilité supplémentaire à Nanuq Aventure en terme de qualité et d’originalité • Un positionnement écotourisme serait dans la suite logique des produits d’aventure : aventure dans la nature tout en la respectant… • Un positionnement écotourisme découle logiquement de la charte interne que l’on veut rédiger • Le Canada est connu pour ses grands espaces et est une destination écotouristique populaire : une démarche responsable permet de se différencier et de sortir du lot. Volonté de se positionner sur le marché du tourisme autochtone : • Un positionnement original et peu mis en avant par les concurrents (hormis quelques sites reconstitués « de masse ») • Un positionnement innovateur • Un positionnement qui confirme et crédibilise la démarche de Nanuq Aventure pour un tourisme responsable • Un positionnement qui complète le triangle du développement durable : économie, environnement, social/éthique • Un positionnement qui permet là aussi de se différencier Que ce soit pour l’écotourisme ou le tourisme autochtone et solidaire, Nanuq Aventure s’est déjà forgée une réputation solide d’entreprise qui propose des produits originaux, de qualité, que personne d’autre ne fait. Développer ces deux marchés de niche apparaît donc comme un prolongement de l’offre et une suite logique de ce que Nanuq Aventure propose actuellement. Analyse SWOT Par rapport à tout ce qui a été écrit plus haut, il convient d’analyser les forces, faiblesses, opportunités et menaces du projet d’écotourisme et de tourisme solidaire de Nanuq Aventure dans le cadre d’une analyse SWOT. 24 L’analyse SWOT permet de mettre en adéquation les analyses interne et externe de l’entreprise, que l’on retrouve dans le tableau ci-dessous. FAIBLESSES FORCES • Un projet qui correspond aux valeurs de l’entreprise : protéger l’environnement, les de crédibilité sur le marché • Petite équipe : capacité de répondre à la animaux, la culture • Implication • Petite entreprise jeune : problème de l’entreprise pour le demande dans les délais impartis, parfois longs à répondre développement durable • Entreprise reconnue pour la qualité de ses produits et son originalité (hors des sentiers • Associer le nom de l’entreprise uniquement à l’aventure • Produits vendus réputés trop chers battus) • Partenaires fiables sur les marchés français et allemands, et sur le territoire québécois • Motivation forte pour développer des produits écotouristiques et solidaires. • Réseau de fournisseurs (et clients) insuffisant • Réseau faible au niveau des partenaires amérindiens • Un projet novateur au Québec, qui suscite l’enthousiasme : possibilité de financements externes • Pas encore de catalogue écotouristique • Ne propose écotouristiques • Ecotourisme et tourisme solidaire : aspects peu mis en avant par la concurrence, pas que des produits (motoneige) : risque d’incohérence et d’image brouillée pour le client leadership de Nanuq Aventure OPPORTUNITES • Canada : MENACES destination écotouristique • Faible prise de conscience des populaire, pays réputé « vert », grand fournisseurs sur l’environnement, travail potentiel d’éducation et de sensibilisation important • Demande du marché français d’allier des expériences amérindiennes au voyage • Concurrence : agences qui « copient » ou « doublent » les projets 25 • Clients et fournisseurs pas forcément prêts écotouristique • Demande des clients d’avoir des garanties comme la charte solidaire et autochtone • Clients en général prêts à payer plus cher un voyage à valeur à s’impliquer dans un projet de tourisme ajoutée comme • Problème d’image du Canada, travail important de communication à fournir l’écotourisme ou le tourisme solidaire • Le gouvernement commence à mettre en place des politiques d’incitation pour développer et promouvoir le tourisme durable Dans un contexte de fort développement de l’entreprise, une période d’ajustement et de restructuration est à prévoir, mais qui permettra à terme de palier à des faiblesses comme le délai de réponse. La solidification de l’équipe apportera de la crédibilité en plus à l’entreprise nécessaire pour fidéliser les clients et travailler avec les fournisseurs. De plus, par le projet d’écotourisme et de tourisme solidaire novateur, Nanuq Aventure a vraiment l’opportunité de se positionner en leader sur ces deux marchés de niche, finalement peu exploités par la concurrence : l’entreprise maîtrise des éléments très importants sur ce marché comme la qualité, l’originalité de ses produits, et quelques partenariats solides ; et bénéficie d’opportunités non négligeables, comme les aides gouvernementales qui vont être mises en place pour les projets de tourisme inscrits dans une démarche de développement durable, ou encore la demande accrue des clients en matière de garanties (notamment environnementales) et leur intention de payer plus cher un voyage responsable ou écologique. L’entreprise doit toutefois veiller à garder son avantage novateur et le mettre en valeur auprès des TO et des agences de voyages, qui sont les premiers clients à convaincre avant les clients finaux. Pour cela, il convient de comprendre la nécessité d’envisager le tourisme autrement, et que tous les acteurs du tourisme prennent conscience des enjeux majeurs qu’il représente. 26 2. La nécessité d’envisager le tourisme autrement 2.1. Les dérives du tourisme « classique » L’objectif n’est pas ici de disserter en détail sur les dérives du tourisme classique, mais de faire un état des lieux des principaux effets pervers, très nombreux dans ce domaine. On s’aperçoit en effet que les trois pôles du développement durable - environnement, économie, social/éthique sont touchés dans le tourisme, et une stratégie touristique non maîtrisée et mal étudiée peut engendrer de graves conséquences à ces trois niveaux. Sur le plan environnemental Le transport aérien La question du problème aérien n’est toujours pas résolue. Malgré les efforts des grandes compagnies aériennes pour améliorer leur flotte au niveau qualité, diminuer le taux de pollution par passager, etc., l’impact sur l’environnement par les émissions de gaz à effet de serre est important. Les scénarios pessimistes prévoient même un recul de l’intensité touristique à cause du problème majeur du pétrole (augmentation drastique des prix, épuisement des réserves…). Ceux qui ont tiré la sonnette d’alarme prônent un tourisme plus local, mais dans le contexte actuel, il est difficile d’imaginer que les clients renoncent à leur rêve d’exotisme. De plus, on pointe toujours du doigt le tourisme et le transport aérien dans les problèmes de réchauffement climatique, pourtant ce dernier ne serait responsable « que de » 2 à 4% des émissions globales, ce qui n’empêche pas évidemment de se poser la question et de chercher des solutions pour des voyages moins polluants : « si la part des transports aériens dans les émissions globales de gaz à effet de serre de l'UE n'avoisine actuellement que 2% à 4%, selon les études, ses émissions augmentent plus rapidement que celles de tous les autres secteurs. Celles qui sont dues aux vols internationaux ont augmenté de 73% entre 1990 à 2003 et devraient, d'après les projections de la Commission européenne, atteindre 150% d'ici à 2012 si aucune mesure n'est prise. Une telle croissance annulerait alors plus d'un quart de la réduction des émissions que l'UE-15 est censée réaliser entre 1990 et 2012 en vertu de protocole de Kyoto. »8 Dans ce contexte, on peut se demander ce que font les grandes industries qui ont une part beaucoup plus importante dans les émissions de gaz à effet de serre... 8 Source : Newsletter Actu Environnement 27 La consommation d’eau et d’énergie Les grands centres touristiques ont également une consommation importante d’eau et d’énergie due à des normes de confort élevées: les clients peuvent s’offrir un luxe impossible à domicile, comme le golf, qui demande un entretien spécifique. Cela pose problème dans les régions sèches, où l’eau est rare : faut-il privilégier le profit et la satisfaction de la demande, ou permettre aux agriculteurs locaux de survivre ? Souvent, le choix est vite fait… Dans un pays comme le Canada, la problématique est différente : c’est un pays peu peuplé par rapport à sa superficie, où les ressources naturelles sont d’une telle richesse et abondance qu’elles ont toujours été considérées comme infinies, inépuisables. L’eau est gratuite pour les habitants ! C’est inconcevable pour nous. Du coup, personne n’est éduqué et sensibilisé à l’économie d’eau, les habitants en usent et en abusent… Les grands médias commencent à mettre en avant la problématique de l’eau, des compteurs commencent à être installés, mais le travail à faire au niveau de la sensibilisation et de l’éducation est énorme. Le Québec a d’ailleurs publié sa Politique Nationale de l’Eau en 2002, afin de protéger cette ressource en l’incluant dans une perspective de développement durable et en garantissant la sécurité des usagers et des écosystèmes9. Au niveau du tourisme, les effets pervers sur l’environnement peuvent aussi se caractériser par la déformation des paysages (standardisation architecturale qui ne s’inscrit pas dans le paysage local), le traitement des eaux usées et des déchets, l’absence de recyclage, l’absence de politique de réduction à la source (emballages, dosettes individuelles, etc.), etc. Les dérives sont nombreuses, mais quelques structures touristiques ont la volonté de s’inscrire dans une démarche plus respectueuse en cherchant l’impact minimum sur l’environnement. Sur le plan social et éthique La prise en compte de la population locale, son bien-être, sa participation aux projets, sont probablement les enjeux majeurs du tourisme, et presque tout reste à faire. Les conséquences au niveau éthique sont plus souvent négatives que positives. Culture et traditions L’aspect le plus important est sans doute le rapport entre les touristes et les locaux, leur culture. 9 Plus d’informations sur le site Internet du Ministère du Développement Durable, de l’Environnement et des Parcs du Québec : http://www.mddep.gouv.qc.ca/eau/politique/index.htm . 28 D’un côté, le tourisme peut avoir un impact positif et perpétrer une culture, une tradition qui disparaîtrait peu à peu si le tourisme ne les faisait pas vivre. Le touriste peut également participer en apportant des produits, comme du thé ou des bougies, ce qui contribue à la responsabilisation du touriste et à la notion de réciprocité, vitale dans les échanges. D’un autre côté, on constate que les relations entre touristes et locaux peuvent se dégrader. La frontière est mince entre authenticité et voyeurisme, échange véritable et spectacle folklorique, etc. C’est dangereux de tomber dans la caricature pour satisfaire la demande d’exotisme des clients. On peut citer Rigoberta Menchú Tum, prix Nobel de la Paix 1992 : « Ce qui nous blesse profondément nous, les autochtones, c’est le fait qu’on reconnaisse la beauté de nos costumes, mais que la personne qui les porte n’existe pas. » On pense souvent aux pays en voie de développement par rapport à ces aspects, mais cette problématique s’applique tout à fait ici au tourisme autochtone, aux relations entre les voyageurs et les Amérindiens. Comme on l’a vu précédemment, le tourisme peut être un bon moyen de faire vivre la culture et les traditions des Premières Nations qui sont en voie de disparition. Mais on constate que les touristes veulent souvent voir une caricature de leur culture, des autochtones en costume qui dansent et qui chantent autour du feu… Mais la réalité est autre, ils ne vivent plus comme cela, mais bien comme nous, ils ont adopté le mode de vie occidental, et à ce niveau ne répondent donc plus aux attentes d’exotisme et de folklore de la clientèle. Il est important de développer une forme de tourisme qui respecte le mode de vie actuel des Amérindiens tout en partageant et transmettant un savoir ancestral, sans pour autant sombrer dans le folklore, comme c’est parfois le cas sur les sites reconstitués « de masse ». Au départ, l’idée est sans mauvaises intentions, au contraire : il s’agit de faire connaître la culture et les traditions des Amérindiens, ce qui crée en plus de nombreux emplois. Mais les touristes repartent avec une image non représentative de la réalité difficile des Premières Nations en ayant assouvi leur soif d’exotisme… Le comportement du touriste En vacances, le touriste peut mal se comporter : après avoir travaillé dur pendant l’année, le temps est venu de se reposer, de profiter des vacances, et parfois de considérer que tout est permis… ce qui peut avoir de graves conséquences dans les pays d’accueil comme la prostitution, le travail des enfants… des comportements qui restent la plupart du temps impunis, 29 et des fléaux quasiment impossibles à combattre : si un pays prend des mesures, et pour peu qu’il les applique, le fléau ne fera que se déplacer ailleurs. A priori, le Canada est moins concerné par ces problématiques, puisqu’il bénéficie de protection et de lois démocratiques. Le déplacement de populations Le tourisme peut contribuer au déplacement de populations : de manière assez peu significative, il peut entraîner l’exode rural (les personnes sont attirées par les emplois que peut générer une importante station de tourisme), le tourisme peut au contraire aboutir à l’expulsion d’une population, par exemple pour la construction d’un immense complexe. Là encore, cette dérive concerne moins le Canada que des pays en voie de développement, où les populations ont souvent moins connaissance de leurs droits et sont donc plus faciles à exploiter. Sur le plan économique Travail et formation Le tourisme est réputé pour être un secteur relativement précaire, comme nous le montrent les chiffres du Bureau International du Travail10. On peut penser que la situation est encore plus inégalitaire au Sud, avec les responsabilités et postes-clés confiés à des Occidentaux et le travail peu qualifié confié à la main-d’œuvre locale. Le thème des droits des travailleurs dans le tourisme est très peu abordé dans les conventions, chartes, textes internationaux. La formation est très importante, car elle peut être un indicateur essentiel de la professionnalisation d’un secteur. Les formations ayant pour but de former les managers de demain, ce qui éviterait « d’importer » des cadres européens. Au niveau du Canada, on pourrait appliquer cette problématique au tourisme autochtone : les Amérindiens sont-ils bien maîtres des projets touristiques dans leurs communautés, les guides sont-ils issus de leurs communautés, etc. ? 10 D’après le BIT : les 3 secteurs hôtellerie, restauration et tourisme représentent 3 à 4% du PIB dans la plupart des pays et emploient quasiment 3% de la force de travail mondiale. Les travailleurs de ces secteurs gagnent en moyenne 20% de moins que dans les autres branches. La moitié des travailleurs ont moins de 25 ans et 70% sont des femmes. 30 La dépendance économique Si les pays considèrent souvent le tourisme comme une solution miracle pour leur développement, les risques sont grands : d’une part, les activités traditionnelles comme l’agriculture peuvent être délaissées, d’autre part en cas de catastrophe, une région dépendante du tourisme sera totalement ruinée, sans que cela se ressente au niveau global. La fuite des capitaux Le tourisme attire de nombreux capitaux étrangers, ce qui permet l’implantation de nouvelles entreprises et donc une certaine dynamique de l’économie nationale. Mais cela pose la question de la répartition des recettes : 30% seulement resteraient dans les pays du Sud11. Cela s’explique notamment par le fait que les grands groupes touristiques sont standardisés et importent donc la majeure partie des biens et services, en passant par le personnel de direction. L’Etat peut aussi choisir de financer des projets touristiques au détriment de la population locale. Comme on peut le constater à travers ces quelques exemples, les dérives dans le tourisme sont nombreuses. Toutes ne concernent pas le Canada, cependant cela nous montre bien la nécessité d’envisager le tourisme autrement afin de limiter un maximum, voire d’éviter quand c’est possible, ces effets pervers. Cela passe notamment par l’émergence de nouvelles formes de tourisme, qui cherchent des solutions pour mettre en place un tourisme plus responsable. 2.2. L’émergence de nouvelles formes de tourisme Bref historique Après avoir été pendant longtemps un luxe réservé à une élite, le tourisme s’est démocratisé au XXème siècle et est devenu accessible aux classes moyennes, qui pouvaient maintenant partir en vacances (avènement des congés payés, puis progressivement réduction du temps de travail par exemple, qui laissent plus de temps libre à la population) : le tourisme de masse est né. Aujourd’hui devenu l’une des principales branches mondiales, le tourisme transporte des centaines de milliers de voyageurs, brasse des milliards de dollars, emploie des millions de gens. Pas étonnant que des pays, notamment en voie de développement, s’engouffrent dans la voie 11 Source : www.tourisme-durable.net, où l’on trouve une foule d’informations sur les problématiques actuelles concernant les dérives du tourisme et les alternatives naissantes. 31 royale du tourisme, considéré comme solution miracle pour leur développement. Mais un tourisme non maîtrisé, on l’a vu, peut engendrer des effets pervers, surtout quand cela concerne des millions de gens. Face aux dérives du tourisme de masse, des alternatives naissent : on parle aujourd’hui de tourisme responsable, durable, éthique, équitable, solidaire, d’écotourisme, etc. Tous ces concepts se distinguent par de subtiles nuances, mais rejoignent tous un même objectif : celui de placer au centre du voyage le respect de l’être humain et de son environnement. Quelques définitions Il convient de donner quelques définitions des différents concepts du tourisme, que l’on utilise à Nanuq Aventure, pour montrer qu’ils se rejoignent dans leurs objectifs, malgré quelques nuances. En fait, contrairement à d’autres domaines comme le commerce équitable, qui même si sa définition ne fait pas l’unanimité, son appellation a été largement adoptée par tous, le tourisme est composé d’une multitude de concepts qui revendiquent chacun leurs différences. Le résultat est que l’on voit partout tous ces termes, et que pour le consommateur il est difficile de faire la part des choses. Quel terme utiliser alors ? Dans sa politique de communication, Nanuq Aventure devra adopter des termes précis et garder une cohérence. L’appellation n’a pas encore été entérinée, mais elle devra prendre en compte plusieurs éléments : l’écotourisme est un terme utilisé « à tort et à travers » par tous ceux qui proposent des activités de plein-air et de nature, et l’utiliser nous aussi peut prêter à confusion ; le terme de tourisme solidaire est ici peu connu comme on l’a vu ; enfin le gouvernement veut promouvoir des projets de tourisme dans une démarche de développement durable, ces deux derniers termes sont donc également à prendre en compte dans la politique de communication. Ecotourisme La déclaration finale du Sommet Mondial de l’Ecotourisme organisé en 2002 par l’OMT, précise les principes particuliers qui distinguent l’écotourisme de la notion plus large de tourisme durable : 32 « L'écotourisme rassemble toutes les formes de tourisme axées sur la nature et dans lesquelles la principale motivation du touriste est d'observer et d'apprécier la nature ainsi que les cultures traditionnelles qui règnent dans les zones naturelles. Il inclut les communautés locales et indigènes dans sa planification, son développement et son exploitation et contribue à leur bien être. Il favorise la protection des zones naturelles : • En procurant des avantages économiques aux communautés d'accueil, aux organismes et aux administrations qui veillent à la préservation des zones naturelles ; • en créant des emplois et des sources de revenus pour les populations locales ; • en faisant davantage prendre conscience aux habitants du pays comme aux touristes de la nécessité de préserver le capital naturel et culturel. Il comporte une part d'éducation et d'interprétation du patrimoine naturel et culturel. Il est généralement organisé, mais pas uniquement, pour des groupes restreints par de petites entreprises locales spécialisées. On trouve aussi des opérateurs étrangers de dimensions variables qui organisent, gèrent ou commercialisent des circuits écotouristiques, habituellement pour de petits groupes. » Tourisme solidaire La définition de l’UNAT (union nationale des associations de tourisme) élaborée avec des associations de tourisme solidaire définit ainsi le tourisme solidaire : « Le tourisme solidaire regroupe les formes de tourisme «alternatif» qui mettent au centre du voyage l’homme et la rencontre et qui s’inscrivent dans une logique de développement des territoires. L’implication des populations locales dans les différentes phases du projet touristique, le respect de la personne, des cultures et de la nature et une répartition plus équitable des ressources générées sont les fondements de ce type de tourisme. » Tourisme équitable L’association de tourisme équitable Croq’Nature basée en France le définit ainsi dans sa charte du tourisme équitable : « C'est un ensemble d'activités de services touristiques, proposé par des opérateurs touristiques à des voyageurs responsables, et élaboré par les communautés d'accueil, autochtones (ou tout au moins en grande partie avec elles). Ces communautés participent de façon prépondérante à 33 l'évolution de la définition de ces activités (possibilité de les modifier, de les réorienter, de les arrêter). Elles participent aussi à leur gestion continue de façon significative (en limitant au maximum les intermédiaires n'adhérant pas à ces principes du tourisme équitable). Les bénéfices sociaux, culturels et financiers de ces activités doivent être perçus en grande partie localement, et équitablement partagés entre les membres de la population autochtone. » Tourisme autochtone Équipe Canada – Tourisme autochtone, dans le livret intitulé Liste de vérification pour réussir, propose la définition suivante pour l’expression « tourisme culturel autochtone » : « Le tourisme culturel autochtone désigne l’ensemble des entreprises touristiques qui appartiennent aux Premières nations, aux Métis ou aux Inuits, et qui sont exploitées par eux, et qui intègrent une expérience culturelle autochtone d’une manière appropriée, respectueuse et authentique du point de vue de la culture autochtone représentée… Quatre thèmes se dégagent – culturel, durable, axé sur le service aux clients et prêt à répondre aux exigences du marché national et international. » On se rend bien compte de l’importance de l’implication et de la participation de tous les acteurs à la lecture de ces définitions. L’aspect pédagogique est également prépondérant, que ce soit au niveau de la sensibilisation environnementale ou de la préparation des voyageurs et des communautés à se rencontrer et à respecter les cultures de chacun. Dans ce cadre, Nanuq Aventure intègre bien les principes de ces nouvelles formes de tourisme : la charte permet de constituer des partenariats solides dans un cadre de coopération, d’inclure tout un volet de sensibilisation des clients et de formation des employés, etc. 2.3. Réglementation : codes, textes et chartes Le domaine institutionnel Outre les labels et certifications du domaine privé, on trouve une forme de réglementation dans le domaine institutionnel. 34 Peut-être faut-il commencer par évoquer le rapport Brundtland de 1987, qui officialise le concept de développement durable autour des trois pôles économique, environnemental et social / éthique. En effet, l’écotourisme se réclame d’une intégration aux principes du développement durable, en réconciliant d’abord l’économique et l’environnemental (faire comprendre aux entreprises que l’on peut être gagnant en adoptant des stratégies en faveur de l’environnement, comme la réduction des coûts d’énergie, mais aussi parier sur le long terme : la prospérité économique est inconcevable sans un environnement sain), sans oublier l’implication des populations vivant sur le site en question, l’équité entre le « Nord » et le « Sud » et entre les générations12. On peut citer aussi l’Agenda 21 pour l’industrie du voyage et du tourisme publié en anglais par l’organisation mondiale du tourisme (OMT) en 1996, qui décline l’agenda 21 (Déclaration de Rio 1992) au secteur du tourisme et s’articule autour de 10 priorités environnementales comme la gestion de l’eau, des déchets, de l’énergie… On pourrait aussi parler de la charte du tourisme durable de Lanzarote13, adoptée en 1995, qui a fortement inspiré le Code Mondial d’Ethique, mais qui depuis est complètement passée aux oubliettes : sans doute est-ce parce qu’elle est beaucoup moins libéralisée que les autres textes qui l’ont suivie, ou encore qu’elle est plus pessimiste sur les limites dans le domaine du tourisme. Toujours est-il qu’il est très difficile de la trouver et qu’elle n’est évoquée pratiquement nulle part. Finalement, c’est sans doute l’OMT qui a développé le code le plus connu, avec le Code Mondial d’Ethique du Tourisme, paru en 1999 et disponible sur le site internet14. Ce code s’adresse à tous les acteurs du tourisme : entreprises, pouvoirs publics, communautés d’accueil, touristes… mais ses principes restent très généraux et donc très vagues, de plus ce code, s’il peut éventuellement servir de référence, reste globalement très peu appliqué. Au niveau international, on trouve aussi les déclarations de Djerba et de Davos15 : lors de la première conférence internationale sur le changement climatique en 2003 à Djerba, il a été reconnu qu’il existait des relations entre le tourisme et le changement climatique, et qu’il fallait donc agir en conséquence. Cette conférence a été suivie quatre ans plus tard avec la Déclaration de Davos. 12 L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, 2006, pp. 342-343 http://www1.insula.org/carturi.pdf pour avoir la charte complète 14 http://www.unwto.org/ethics/full_text/en/pdf/Codigo_Etico_Fran.pdf pour avoir le code complet 15 Le tourisme autrement, 2008, p.54 13 35 Sans doute est-il également nécessaire de rappeler l’année 2002 a été proclamée Année Internationale de l’écotourisme par le PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement) et l’OMT, et que le premier sommet mondial de l’écotourisme a eu lieu à Québec en 2002 également, ce qui témoigne de l’intérêt croissant pour cette forme de tourisme. Enfin, on peut citer parmi les initiatives reconnues l’Initiative des Tours Opérateurs (TOI), lancée en 2000 par le PNUE, l’UNESCO, l’OMT, et douze des plus grands voyagistes comme Accor ou TUI. Cette initiative est volontaire et ses membres s’engagent à intégrer le développement durable dans leurs pratiques, mais sans obligation de rendre des comptes : elle est donc plutôt considérée comme une plateforme d’échange16. Il est indéniable que la multiplicité de ces textes indique clairement que les nouvelles formes de tourisme vont prendre de plus en plus d’importance dans les années à venir et qu’elles devront être prises en compte presque automatiquement. Pour le moment, nous en sommes encore au stade de balbutiement, où la réglementation n’est pas encore très claire, les principes peu appliqués, etc. Cela viendra sans doute avec le temps. La certification des entreprises Face à des textes institutionnels plutôt flous ou souvent trop vagues, très peu mis en application, encore moins contrôlés, ce n’est pas étonnant de voir que de plus en plus d’entreprises se lancent dans l’auto-certification. Face à la multiplication de l’offre dite écotouristique, on assiste parallèlement à la multiplication de textes, codes, chartes, pour légitimer cette offre. Ainsi, de plus en plus d’organisations votent leurs propres chartes, qui incluent de nombreux principes éthiques, d’environnement… : elles ne peuvent tout simplement plus passer outre ces thèmes, récurrents dans l’actualité et ancrés progressivement dans la conscience des gens. Les avis d’experts sur ces initiatives sont partagés : réelle volonté de changement ou effet de publicité, politique de communication pour l’amélioration de l’image de l’entreprise ? Après lecture globale de ces textes, plusieurs points ressortent : les acteurs sont souvent relativement libres dans le choix et l’application des critères, il n’y a pas de contraintes claires. On se pose donc légitimement la question suivante : jusqu’où les chartes sont-elles respectées par les partenaires ? Une entreprise peut-elle abuser de la situation et communiquer sur un projet en particulier pour diffuser une image positive globale de son activité ? 16 Le tourisme autrement, 2008, p.138 36 Outre ces aspects, la critique la plus forte concerne le contrôle : il se fait la plupart du temps en interne, sans aucune instance externe mise en place pour plus d’objectivité. Les impacts positifs restent donc à prouver pour la crédibilité de ces textes, encore trop souvent superficiels. Comme je l’ai indiqué précédemment, l’une de mes missions est de développer notamment une charte propre à Nanuq Aventure. J’essaierai de vous démontrer plus loin en quoi cette charte ne s’inscrit pas dans le « greenwashing » ambiant, comme le dit le jargon local (terme qui désigne le fait que beaucoup d’entreprises intègrent des politiques environnementales mais que ces dernières sont souvent superficielles), mais est bien l’expression d’une volonté forte de réel changement. 2.4. Une nouvelle tendance : la certification La certification est donc une nouvelle tendance. Le label se compose d’une combinaison d’image et de mot-clé, facilement reconnaissable grâce à la compression de l’information17. Il sert à garantir la qualité d’un produit et est délivré par un certificateur. La certification, elle, désigne plutôt un processus de vérification du respect d’un cahier des charges. Nous parlerons dans ce paragraphe de certification et de label, les deux termes étant finalement très proches au niveau de leur signification. Avantages L’OMT pense que des conditions de mise en marché ainsi que des normes de qualité et d’environnement à travers des systèmes de certification doivent être mis en place. D’après l’OMT ces derniers sont plus rapides à mettre en œuvre que les lois et sont plus innovants, ils contribuent à la prise de conscience des acteurs en matière d’environnement notamment et à la sensibilisation des touristes et des locaux, et constituent un avantage concurrentiel certain (image...). L’institutionnalisation de l’écotourisme permet non seulement de créer la demande (en faisant connaître ses composantes - observation des animaux, interprétation de la nature, etc., - il suscite l’intérêt des futurs consommateurs), mais aussi de contrôler l’offre par l’élaboration de critères rigoureux à respecter pour les entreprises, et enfin de réguler le tout par la mise en place 17 Zukunft des Tourismus, 1996 37 de normes au niveau organisationnel18. Pour les entreprises, les labels constituent un instrument de communication important : d’un côté pour leur image, d’un autre côté pour une communication optimale et ciblée vers différents groupes. Cela facilite la commercialisation de leurs produits, et les entreprises peuvent mieux expliquer leur procédure et leur motivation. Elles peuvent aussi remplir des composantes d’éducation et de sensibilisation19. Les entreprises peuvent ainsi maintenir leur légitimité sur le marché. Pour les clients, les avantages de la certification sont multiples. Ils peuvent obtenir une information globale et très claire grâce au label, satisfaire à leur besoin de sécurité (une entreprise labellisée est toujours associée à la notion de sécurité, qui constitue le cœur du label), l’évaluation et le contrôle des critères du label apportent aussi une crédibilité supplémentaire pour le client. Grâce à la certification le client ne doute pas de la crédibilité de l’entreprise et peut se décider plus rapidement pour des produits certifiés. De plus, dans le domaine de l’écotourisme, on peut même parler de certification fondée sur les valeurs (respect de la nature, équité, etc.). Ces valeurs permettent de créer un climat de confiance pour l’écotouriste en quête de réenchantement du monde et de retour à des valeurs plus ou moins perdues20 : rassuré sur le contenu de son voyage, cela va favoriser son comportement de consommation. Inconvénients Même si la certification présente indéniablement de nombreux avantages et permet d’évoluer vers un futur plus harmonieux, ses inconvénients n’en sont pas moins nombreux : en se multipliant, les labels créent parfois plus de confusion qu’autre chose aux yeux du client. Il ne sait plus auquel se fier et où chercher ou trouver la bonne information fiable, d’autant que la comparaison est très difficile : chaque label va valoriser et mettre en avant tel critère plutôt que tel autre, ces critères ne vont pas forcément être reconnus par le client, tout cela va rendre d’autant plus difficile toute la notion de vérification et de contrôle, ce qui entraîne un risque de traitement inégal, etc. Aujourd’hui, les principaux détracteurs de toutes ces initiatives accusent les agences et TO de mettre en place des principes « creux » uniquement à des fins d’image et marketing. Certains posent la question suivante : tout cela ne sert donc qu’à la commercialisation de produits pour combattre la concurrence ? La certification peut-elle servir son objectif premier 18 l’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, 2006 Ökomanagement im Tourismus, 1998 20 L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, 2006 19 38 de bénéficier en premier lieu aux populations et territoires d’accueil ?21 Découle-t-elle de cet objectif ? Il me semble qu’avec une transparence totale sur notre démarche, et un contrôle externe régulier, nous pouvons répondre à ces inconvénients. 2.4.1. Quelques labels Il existe de nombreux labels en Europe dans le domaine du tourisme, en particulier pour ce qui a trait à l’environnement. Au Canada, c’est une autre histoire ! Que ce soit en Europe ou au Québec, tous ces labels peuvent prêter à confusion pour les personnes. Comme il n’y a pas encore vraiment de consensus sur les termes à adopter ainsi que leur définition (comme nous l’avons vu plus haut) dans le tourisme responsable, il apparaît donc bien difficile qu’il existe un label ou une certification qui fasse l’unanimité dans ce domaine, qui soit adopté par de nombreux acteurs du tourisme et reconnu comme modèle de référence pour la population, comme on peut le voir dans le commerce équitable. Malgré tout, de plus en plus d’initiatives dont font preuve les entreprises convergent vers un objectif de transparence, et la certification permet de concrétiser et de prouver leur démarcher. Selon l’OMT, il existe plus de 60 éco-labels et certifications de tourisme, et plus de 7000 produits touristiques sont certifiés dans le monde. Cependant, cela dénote une forte inégalité dans la répartition géographique : 68% des programmes adoptés et 6000 des 7000 produits certifiés sont dans l’Union Européenne (UE), 17% des programmes sont en Amérique du Nord, et quelques autres pays se partagent le reste. En général, les candidats à un label doivent remplir un certain nombre de critères et des exigences spécifiques. Les candidats sont dans le domaine du tourisme les destinations, les entreprises, les hôtels, les activités, les transporteurs, des ONG… les programmes de certification basés sur le développement durable sont majoritairement promus par des ONG dans le domaine du tourisme (30%) ou de l’environnement (10%), puis par les gouvernements (20%) et enfin les entreprises (12%) selon l’OMT. Le reste est partagé par diverses ONG, dont 3% par des ONG de consommateurs22. Au niveau environnemental, on peut citer quelques labels reconnus comme l’Ecolabel Européen 21 Pour plus d’informations et de réflexions sur les enjeux du tourisme durable, voir le site très complet www.tourisme-durable.net 22 L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, 2006, p.349 39 pour les services d’hébergement touristiques (hôtels, chambres d’hôtes, campings ayant un impact réduit sur l’environnement), le label Pavillon Bleu (qualité de l’eau des plages, des ports…), la Clef Verte (pour les hébergements, critères environnementaux et d’éducation à l’environnement), etc. Au niveau social et solidaire, on peut citer la Charte du Tourisme Equitable, rédigée en concertation par plusieurs associations de voyage solidaire (Croq’Nature, la Route des Sens…) qui repose principalement sur la notion d’implication et de partenariat avec les populations locales ; la charte de l’UNAT (Union Nationale des Activités de Tourisme et de Plein Air) qui a élaboré une grille de critère de tourisme solidaire que ses membres doivent respecter ; ou encore le label ATR (Agir pour un Tourisme Responsable) qui regroupe une douzaine de voyagistes du tourisme d’aventure. Le Québec n’échappe pas à la règle puisque chaque année nombre de structures se voient délivrer les Grands Prix du Tourisme. Mais nous détaillerons plus bas la situation des labels au Québec. 2.4.2. Le retard du Québec dans la certification Comme on l’a vu plus haut, que ce soit dans le domaine de l’écotourisme ou du tourisme solidaire, les certifications sont beaucoup plus nombreuses en Europe qu’en Amérique du Nord. Même si les inconvénients de la certification sont nombreux, surtout en terme de choix de critères et de contrôle de ceux-ci, on peut faire le lien entre l’amélioration des pratiques et la certification. On peut critiquer tant que l’on veut les auto-certifications et labels, il n’empêche qu’il est indéniable que l’on note un changement des pratiques en Europe du côté de l’industrie touristique, et une sensibilisation croissante du côté des consommateurs. Plusieurs études ont été menées, et il semble que même si le fossé entre les intentions et les actes est encore très grand, la clientèle est de plus en plus exigeante en termes de prestations « vertes » et son choix peut être influencé en conséquence. Une étude de TNS Sofres, réalisée pour voyages-sncf.com et routard.com en mars 2008 par téléphone auprès de 800 voyageurs français, le montre : seulement 7% des interrogés pratiquent le tourisme dit durable (contre 2% en 2007), mais le concept en intéresse 87% (contre 72% en 2007), 72% ont envie de le pratiquer et 65% sont prêts à compenser leurs émissions de CO2 de leur voyage. Mais nombreux sont ceux qui ont encore des préjugés (confort rudimentaire…) ou qui se déclarent mal informés (78%)23. Il apparaît donc évident que l’on doit répondre à une attente en développant des produits de tourisme responsable, 23 Article lu sur le site www.quotidiendutourisme.com 40 mais que l’on doit diffuser une information la plus transparente et la plus complète possible, afin d’éviter les dérives de l’auto-certification. Labels écologiques Cependant, les structures de tourisme du Québec, et plus largement du Canada, ne sont pas forcément aussi sensibilisés que les structures européennes. Ainsi, si l’on prend l’exemple des hôtels, « moins de 2% des établissements hôteliers du Québec enregistrés par la CITQ (Corporation de l’industrie touristique du Québec) participent officiellement à l’un ou l’autre des programmes offerts » pour la réduction de leur empreinte écologique : la Clé Verte qui est un programme de réduction de l’empreinte écologique créé en 1997 et géré par l’Association des Hôtels du Canada (AHC) ; le Label Leed (Leadership in Energy and Environmental Design) pour les établissements en construction ou rénovation géré par le Conseil du bâtiment durable du Canada ; le programme Green Leaf qui indique le nombre de mesures écologiques mises en place selon le nombre de feuilles attribuées ; ou encore le programme Résertvert crée en 2007 par l’Association des Hôteliers du Québec et qui porte sur les trois piliers du développement durable…24. Labels autochtones Toute une éducation reste à faire pour inciter les partenaires à améliorer leurs pratiques. En ce qui concerne le tourisme autochtone, on peut indiquer que la STAQ (Société Touristique des Autochtones du Québec) intègre de nouveaux membres lorsque ceux-ci sont en mesure de répondre à certaines exigences de la demande internationale. Lors d’une rencontre dans nos bureaux, le responsable de la commercialisation nous a ainsi confié que la STAQ souhaite mettre en place un label d’authenticité, mais là tout reste à faire, en particulier définir concrètement ce qu’est l’authenticité d’un produit autochtone… A ma connaissance, il n’y a pas vraiment d’autre certification en la matière. De manière plus générale, on peut noter l’implication du gouvernement québécois pour dynamiser le tourisme au Québec autour de la problématique de développement durable autour d’un triple objectif dans sa Politique Touristique du Québec, Vers un Tourisme Durable, parue en 2005 : 24 Article lu sur le Globe Veilleur, la référence québécoise en information sur les tendances touristiques internationales : http://veilletourisme.ca/ 41 Objectif économique : porter les recettes touristiques du Québec de 9 milliards de dollars canadiens (CAD) en 2003 à 13Md en 2010. Objectif environnemental : accroître le nombre d’exploitants et de touristes sensibilisés à l’utilisation durable de l’environnement. Objectif socioculturel : favoriser une offre touristique développée et exploitée dans le respect des populations locales. L’implantation du Programme Qualité par le gouvernement québécois est également un cadre de référence, qui se base notamment sur des normes du BNQ (Bureau de Normalisation du Québec, équivalent de l’Afnor en France), et prévoit l’adhésion à des codes de bonne conduite, la mise en place d’outils d’accompagnement et de gestion, l’intégration de l’écotourisme, etc25. Le fait que le gouvernement institutionnalise le tourisme durable au Québec devrait logiquement impulser une dynamique et pousser les entreprises du secteur à intégrer le développement durable dans leurs pratiques. Cela devrait également logiquement favoriser le projet de Nanuq Aventure. Finalement, ce qui nous intéresse le plus est sans doute la nouvelle norme sur l’écotourisme du BNQ, qui a été élaborée par de nombreux acteurs reconnus du tourisme. Cette norme englobe de nombreux principes et s’adresse à tous les acteurs de l’hébergement, du transport, aux prestataires d’activités, etc. Une entreprise comme la nôtre ne peut pas vraiment prétendre à ce type de certification, mais il est certain que nous pouvons nous fier aux fournisseurs certifiés, les audits externes étant réalisés régulièrement. Cette norme vient d’être mise en place, et est donc encore peu connue. Après discussion avec la spécialiste du tourisme du BNQ, on ne peut pas encore obtenir de résultats visibles de cette certification : encore peu de structures ont entamé la démarche, il est donc impossible d’avoir une liste exhaustive des fournisseurs certifiés. Nous ne pouvons pas non plus ne pas parler d’AEQ (Aventure Ecotourisme Québec). Cette association, créée par les professionnels de l’industrie touristique, et qui a pour vocation de promouvoir ses membres et de leur fournir des outils d’accompagnement, a mis en place son label AEQ, probablement le seul connu et reconnu au Québec aujourd’hui dans le domaine du tourisme d’aventure et de plein-air. Ce label est surtout axé sur la qualité et la sécurité, mais 25 Voir à ce propos l’étude complète Nature et Tourisme, l’écotourisme au Québec en 2002, publiée par Tourisme Québec et disponible sur internet : http://www.bonjourquebec.com/mto/publications/etudes/ecoQC02.html 42 intègre peu à peu la dimension environnementale. Nanuq Aventure a donc entrepris la démarche de certification. 2.4.3. La Charte de Nanuq Aventure Objectifs et vision On se rend compte que quelques labels existent, mais la plupart apparaissent comme étant peu crédibles (certification simple à obtenir, peu de taux de vérification, etc.), donc encourageant le « greenwashing » ambiant : de nombreuses structures mettent en avant une démarche responsable, et c’est plus souvent une apparence qu’une réalité. Nanuq Aventure a décidé de créer sa propre charte, qui devrait aboutir à terme à la création d’un label. Le but n’est pas de participer au « greenwashing » et de mettre en avant une façade, mais de construire au fur et à mesure une véritable stratégie de tourisme responsable, en termes d’écologie, d’éthique et d’économie. Cela correspond à un souhait de tous les membres de l’entreprise et aux valeurs prônées par cette dernière. Cela implique aussi que l’on ne brûle aucune étape et que l’on ne communique pas sur ce projet trop vite : il faut d’abord bien poser les bases, prendre le temps d’évaluer les critères en collaboration avec nos partenaires, vérifier sa faisabilité… L’objectif de cette charte est d’adopter une démarche globale : non seulement nous nous engageons en prenant des mesures concrètes, en environnement par exemple, mais en plus nos partenaires s’engagent avec nous, et nos clients aussi. Nanuq Aventure veut certes monter des circuits écologiques et solidaires, qui reprennent les thématiques sur lesquelles je travaille tourisme avec les Amérindiens, tourisme territorial, écotourisme -, mais aussi sensibiliser les autres partenaires par sa démarche et les pousser eux aussi à adopter des mesures, environnementales notamment, et à améliorer leurs pratiques. C’est un travail sur le long terme et de longue haleine, mais qui en vaut la peine. Aussi, le but n’est pas non plus de créer un label pour qu’il devienne aussi connu que les labels évoqués plus haut. Dans un premier temps, la charte nous permet de rédiger et mettre en forme notre politique, d’informer nos clients sur nos actions et notre démarche, et surtout de soutenir, promouvoir, et mettre en avant nos partenaires signataires. S’ils décident de s’engager avec nous, nous nous engageons de notre côté à leur fournir un soutien technique et financier, ainsi qu’une visibilité sur le marché européen. 43 Conception de la charte Pour cela, nous avons voulu définir trois volets de la charte : fournisseurs, clients et charte interne. Le volet fournisseur regroupe les critères que nous souhaitons voir mis en place par nos partenaires. Nous avons insisté sur l’aspect environnemental, car comme le Canada est un pays dit « développé », on retrouve moins d’abus au niveau social ou éthique : les travailleurs sont quand même protégés par les lois du pays, même si bien sûr la protection est plus libérale qu’en Europe. Ces critères se composent aussi bien de mesures concrètes à adopter, en commençant par des mesures relativement simples comme changer les ampoules ou mettre un panneau d’information dans les chambres d’hôtels sur la réutilisation des serviettes, que par des mesures de formation des employés, de sensibilisation de la clientèle, etc. Le volet clients est plus une explication de notre démarche, en présentant le projet de Nanuq Aventure, l’intérêt de la démarche et l’importance de promouvoir ce type de voyages. Un aspect de sensibilisation est associé à l’explication. Le volet interne concerne plutôt toutes les actions que les employés peuvent réaliser au sein de l’entreprise. Un projet innovant pour une agence de tourisme réceptif Quand on observe ce qui se fait ici en matière de tourisme responsable, on se rend compte que ce type de projet est relativement innovant pour une agence de tourisme réceptif. Bien sûr, lorsque l’on analyse la concurrence intra-sectorielle, de nombreux autres réceptifs ont un volet sur le tourisme responsable, quelque soit son appellation (tourisme durable, écotourisme, tourisme équitable…). Ainsi l’un des plus gros voyagistes internationaux intégrés au monde, qui exploite un vaste réseau de distribution, possède sa propre compagnie aérienne, etc. et qui regroupe tous les maillons de la chaîne de la valeur, en exerçant un contrôle étroit sur ceux-ci, dont fait partie le plus grand réceptif canadien, soutient des projets de tourisme durable à hauteur de 35 000 euros par projet. Cette aide financière porte sur des projets à trois niveaux principalement : aide humanitaire internationale, le tourisme durable, l’avancement des connaissances et des compétences en tourisme. Si l’on s’attarde sur la rubrique consacrée de leur site internet, même si force est de constater que le groupe explique brièvement les enjeux du tourisme durable et ses engagements concrets pris en conséquence, nous restons malgré tout dans le vague, le général, sans précisions sur les zones géographiques, les partenaires, les actions concrètes concernées par 44 le projet. Finalement, il est difficile de trouver des informations concrètes et précises sur les actions menées et les résultats obtenus. Si l’on s’intéresse à un autre réceptif important du Canada, il plante un arbre à chaque fois qu’il reçoit un invité : cela s’inscrit dans le cadre d’un écotourisme responsable et d’un développement durable. D’autres réceptifs concurrents n’évoquent pas du tout cet aspect là dans leur politique d’entreprise. La seule entreprise qui se positionne vraiment sur le marché de ce qu’elle appelle elle-même l’écotourisme éthique est un TO et une agence réceptive à travers toutes les Amériques. Mais le Canada ne représente que deux voyages sur toute sa gamme de produits (si l’on s’en réfère à son site internet), et ces derniers sont surtout axés sur l’aspect écotourisme et non éthique. Finalement, le projet de Nanuq Aventure apparaît comme étant relativement innovant au vu de ce que l’on vient de lire. S’engager clairement dans une démarche d’amélioration des pratiques, en mettant en place des actions concrètes en interne, mais aussi auprès de nos fournisseurs et de nos clients, créer un organisme chargé gérer les fonds alloués à nos partenaires privilégiés, compenser les émissions carbones des voyages terrestres (car Nanuq Aventure ne prend pas en charge l’aérien), faire des efforts pour réduire nos marges et ainsi rendre les voyages plus accessibles au client final, demander à nos clients (TO et agences) de faire de même, sont autant d’actions que peu d’agences ici au Québec ont osé mettre en place et approfondir autant. D’autant que, comme on l’a vu, c’est une démarche globale, qui ne concerne pas seulement une entreprise, une structure, un hôtel, mais bien un ensemble de partenaires, qui pourront à leur tour sensibiliser leurs propres partenaires, leur maison-mère, leurs clients. Un projet qui colle à la réalité du marché En plus d’être innovant, ce projet colle à la réalité du marché. Face à la conscientisation du public, face aux exigences croissantes en termes d’environnement et d’éthique, les clients de Nanuq Aventure sont très demandeurs de ce type de projet. D’ailleurs ce ne sont pas les seuls : au niveau institutionnel, le ministère du tourisme québécois est plus qu’intéressé par les projets de tourisme durable, notamment dans le cadre de son Programme Qualité et de son projet de développement du Grand Nord (ici le Grand Nord ne désigne pas le Canada comme nous nous le représentons en Europe, mais bien le Grand Nord au sens géographique du terme, c’est-à-dire ici le Nunavik où vivent encore les Inuits et la région du Labrador) ; au niveau financier, ce sont des banques comme la Caisse Desjardins qui financent des projets innovants. 45 Comme on l’a vu, la demande est croissante pour des voyages responsables, mais il reste des lacunes au niveau de l’offre : les préjugés sur l’inconfort de ce type de voyages ont la vie dure (44% toujours selon l’étude Sofres vue plus haut), les prestations sont en général plus coûteuses (d’où l’importance de faire des efforts de réduction des coûts en agissant sur la marge par exemple), l’information est encore peu fiable et incomplète. Un projet comme celui de Nanuq Aventure répond donc clairement à un besoin, la charte étant la transcription écrite de cette démarche : diffuser l’information la plus complète et la plus précise possible à nos clients, à nos fournisseurs, en toute transparence ; offrir toujours un service et des prestations de qualité pour montrer que l’on peut allier tourisme responsable et confort ; rendre ce type de voyages accessibles à tous pour que les 72% de Français qui se disent prêts à franchir le pas puissent le faire réellement. Un projet qui colle à la volonté interne de l’entreprise Je pense que je l’ai suffisamment évoqué dans la première partie, mais il est bon de rappeler que le projet de Nanuq Aventure colle à la volonté interne de l’entreprise, que ce soit au niveau des dirigeants que des employés. En plus de correspondre à des valeurs profondes (importance de préserver notre environnement, d’établir des relations équilibrées et équitables avec nos partenaires, etc.), ce projet permet de répondre aux objectifs stratégiques de l’entreprise, de développer le portefeuille client et de toucher une nouvelle cible grâce à un positionnement original. Maintenant, il s’agit d’étudier comment le projet de charte interne peut s’insérer dans le travail quotidien et se réaliser concrètement. 46 3. La mise en pratique du projet 3.1. L’impact de la démarche dans la gestion interne de l’entreprise Pour mener à bien un tel projet, la volonté interne de l’entreprise ne suffit pas. En effet, c’est toute la gestion interne de l’entreprise qui va être remise en question, et bouleversée si nécessaire. Il paraît logique que si l’on demande à des partenaires de respecter certains critères, nous nous devons d’être les premiers à satisfaire ces critères si l’on veut rester crédibles dans notre démarche. Comme nous l’avons vu plus haut, c’est surtout au niveau environnemental que nous pouvons intervenir, tout en restant dans une logique économique et compétitive pour la bonne santé de l’entreprise. Nous sommes moins concernés au niveau social ou éthique en interne puisque nous sommes soumis aux mêmes règles que n’importe quel autre employé au Canada et que nous avons des avantages certains liés à notre métier. On retrouvera cependant des mesures éthiques au niveau de notre politique d’achat, du soutien à nos partenaires, etc. On peut diviser la démarche interne en plusieurs étapes : les actions concrètes au siège de l’entreprise, les déplacements, la participation des employés, et les mesures éthiques ; sans oublier l’accompagnement de nos partenaires par la mise en place d’outils techniques. . Les actions concrètes Au niveau des actions concrètes, nous pouvons lister toutes les actions qu’il est possible de réaliser, et les rassembler au sein d’un guide interne. Comme dans n’importe quelle autre maison, les mesures peuvent concerner l’électricité, l’eau, l’éclairage, le tri et le recyclage, le réemploi du matériel de bureau, la communication interne par e-mail et non sur du papier imprimé, etc. On peut même aller plus loin et envisager, à terme, de l’électricité photovoltaïque, du chauffage géothermique, etc. La compensation carbone Au niveau des déplacements, Nanuq Aventure a choisi la voie de la compensation des émissions de gaz à effet de serre. Les alternatives écologiques sont encore peu développées dans le domaine du transport, en particulier dans le tourisme : sans parler du transport aérien, qui n’est pas la vocation de Nanuq Aventure, les solutions avancées pour le transport terrestre sont peu applicables dans le tourisme. Les voitures hybrides sont quasiment inexistantes dans les parcs de location de voiture, les moyens de transport électriques sont très marginaux et donc pas du tout 47 développés dans le tourisme… face à cela, il apparaît que la compensation carbone des déplacements du personnel et des voyages des clients est une solution satisfaisante et présente un double intérêt : • « L’argent est dépensé sur des investissements qui vont permettre des économies de CO2 pérennes, alors que les émissions rejetées par un vol sont ponctuelles : à terme, un don de 10euros bien investi engendre plus d’économie que la quantité émise lors du vol. • Rôle pédagogique : en chiffrant le coût écologique d’un trajet en avion, la compensation participe à la sensibilisation des voyageurs. 26» Nanuq Aventure a décidé de s’allier à l’une des organisations les plus fiables au monde, et certainement la plus fiable au Canada, pour mettre en place un système de calcul compatible à nos activités. Les mesures éthiques Au niveau des mesures éthiques, nous pouvons envisager une autre politique d’achat : en plus des mesures écologiques, l’entreprise peut également privilégier l’achat de produits équitables (label « certifié équitable ») pour les fournitures ou aliments quotidiens, comme le café ; encourager et promouvoir les fournisseurs qui ont aussi une politique d’achat équitable, ou une politique d’achat local (mobilier, décoration des chambres d’hôtels, œuvres d’art, produits agricoles, etc.), selon les critères de notre charte, etc. L’implication des employés Au niveau de la participation des employés, en plus de la diffusion du guide interne, il est question de créer une newsletter interne sur les avancées du projet, mais aussi sur tout ce qui concerne l’entreprise, les projets de chacun, les nouveautés, etc. Cette mesure là s’inscrit dans une politique d’amélioration de la communication interne et c’est la responsable de ce secteur qui sera chargée de mettre en place ce système. Finalement, tout ce qui concerne la participation des employés relève de la communication, nous serons donc amenés à mettre en place divers outils comme la newsletter, mais aussi une boîte à idées, des réunions périodiques, etc. Il faut souligner qu’à ce niveau là, c’est toute une équipe qui est fédérée autour d’un projet commun, et que l’on peut donc considérer ce dernier comme un facteur clé de motivation, qui crée un espace où chacun peut exprimer ses idées, ses sensibilités, etc. 26 Alternatives Economiques, le tourisme autrement, p.127 48 L’accompagnement des partenaires L’accompagnement et le soutien de nos partenaires fait partie intégrante de notre politique. Lorsque nos partenaires s’engagent, nous nous engageons avec eux. Nous pouvons définir comme suit notre processus d’accompagnement : Première phase d’approche : nous échangeons avec notre partenaire, étudions la possibilité de coopération sur le projet, etc. Organisation d’une réunion préliminaire avec quelques partenaires privilégiés afin de leur présenter la charte, récolte des réactions et des impressions, révision de la charte en conséquence. Validation de la charte, envoi à tous les partenaires intéressés Réunion avec tous les signataires, explication de la démarche d’accompagnement : o Disponibilité de tous les instants o Soutien technique par la remise d’un document avec notamment des fiches techniques sur les actions à mener, comment faire, quels sont les avantages et les inconvénients, les retombées économiques, et qui contacter o Soutien financier à des projets innovants, par le biais de subventions notamment (installation d’une éolienne par exemple), on peut également envisager un système de dons des clients (s’ils veulent soutenir un projet en particulier), ou de prélèvement automatique d’un pourcentage défini sur notre marge ou notre bénéfice. o Soutien administratif dans la démarche de demande de subventions, les personnes ressources à contacter pour tel ou tel projet o Envoi d’une newsletter (intervalle à déterminer) 3.2. Le projet au quotidien L’intégration du projet dans le travail quotidien 49 Le projet d’écotourisme et de tourisme solidaire de Nanuq Aventure s’inscrit dans le long terme. Dans un domaine où tout bouge tellement vite, où la réactivité est une qualité maîtresse, et où l’on est souvent amené à travailler dans l’urgence, il s’agit de réussir à dégager en permanence assez de temps pour s’y consacrer. Outre les actions quotidiennes que chacun peut mener, la fédération autour d’un projet, il faut aussi définir les priorités et savoir si l’on veut mobiliser une personne pour faire avancer les choses et dynamiser la démarche ou bien si quelqu’un s’y consacre par « à-coup » pour privilégier les demandes concrètes et rentables économiquement. Au niveau de la gestion, cela se traduit par des choix stratégiques : en effet, l’entreprise doit bien faire du profit pour exister, et selon les cibles de clientèle, cela va se traduire par des partenariats pas forcément en accord avec le projet ; d’un autre côté le projet s’inscrit dans une démarche sur le long terme pour sensibiliser tous nos fournisseurs au fur et à mesure. Dans une période de pérennisation de l’entreprise, il faut savoir être flexible et s’adapter à la situation. Travail de recherche et de documentation C’est la base. Un profond travail de documentation a été mené, qui a permis de dégager les éléments clés des analyses interne et externe de l’entreprise vus plus haut dans la première partie. Il a permis en outre de déterminer les régions phares de l’écotourisme, les pratiques, les communautés qui ont développé des produits touristiques, etc. C’est un premier pas pour la recherche de partenaires : il permet d’avoir une meilleure connaissance du territoire, des acteurs, de connaître les organisations fédératrices pour pêcher les bonnes informations, de constituer un réseau qui s’étoffera au fil du temps. La recherche de partenaires Tout un programme ! Le travail de recherche permet de repérer quelques structures modèles qui servent de référence aux autres acteurs. En contactant ces structures, on se rend compte qu’elles sont très intéressées par le projet de Nanuq Aventure, et que c’est principalement la motivation des dirigeants qui porte le projet. En effet, si les dirigeants sont très impliqués dans un projet écologique ou éthique, ils pourront assez facilement faire redescendre l’information, et organiser des formations, des réunions avec les employés afin de les impliquer et de les sensibiliser à leur tour. De plus, il est important qu’une personne soit responsable du projet afin de motiver le personnel et le mobiliser si nécessaire. 50 Outre la recherche documentaire ou informatique, contacter les ATR (Association de Tourisme Régional, équivalent des offices de tourisme régionaux en France) a permis de recevoir une mine d’informations sur les initiatives qui existent dans chaque région, d’identifier ainsi les acteurs clé à contacter et les zones géographiques propices à ce type de démarche. L’inconvénient majeur est que les ATR font la promotion de leurs membres uniquement, et qu’il existe de nombreuses structures, souvent de petite taille, totalement indépendantes et n’appartenant à aucun réseau, qui ont des démarches responsables, mais qui du coup ne sont répertoriées nul part. A nous donc de les débusquer, par le bouche-à-oreilles, par des rencontres, par des recherches sur Internet, etc. Une fois qu’un certain nombre de partenaires potentiels a été identifié, une première prise de contact a lieu, par courriel ou par téléphone. Cela permet de tester la réactivité de la personne, de voir si le projet l’intéresse ou non, de créer surtout un premier lien qui permet d’établir la confiance. Cela permet également de repérer les partenaires potentiels géographiquement pour organiser des visites de terrain. Les visites de terrain Les visites de terrain sont l’occasion de rencontrer en personne la personne ressource contactée lors de la recherche de partenaire, et de se rendre compte réellement de la situation. On peut poser toutes les questions que l’on veut et l’on peut vérifier la véracité de l’information fournie en demandant de visiter les lieux. Pour le moment, je n’ai pas eu l’occasion de faire beaucoup de visites de terrain pour ce qui concerne l’écotourisme et le tourisme solidaire. J’ai fait de nombreuses visites d’hôtel à Montréal afin de mieux connaître nos partenaires habituels et de pouvoir mieux renseigner nos clients sur les hébergements qu’ils choisissent : la plupart ont mis en œuvre quelques actions écologiques, mais avouent avoir encore beaucoup de chemin à parcourir. On constate malgré tout que la plupart des hôteliers prennent maintenant en compte l’environnement dans leur politique, et les actes finiront bien par suivre le discours. J’ai tout de même visité quelques structures écotouristiques qui proposent hébergement rustique et activité de pleine nature non motorisée, ce qui a priori correspond à la vision générale que les gens se font de ce type de tourisme (confort rudimentaire), mais d’autres visites sont prévues dans des hôtels et auberges de qualité. J’ai également assisté à une cérémonie Amérindienne sur un site reconstitué, animée par un Chef Médecin reconnu ici. Bien que reconstitué, c’est un site peu fréquenté par les touristes, destiné 51 plutôt à une clientèle en quête de ressourcement, et qui permet le dialogue avec ce fameux Chef Médecin. On peut légitimement s’interroger sur l’authenticité du lieu, mais il ne faut pas oublier que ces terres appartenaient avant aux Peuples des Premières Nations, et que ce terrain était probablement habité... Ces visites permettent de confirmer ou non l’intérêt réciproque pour continuer le projet et bâtir ensemble un partenariat. Partenariat qui aboutit logiquement à l’introduction de la structure en question dans un circuit écotouristique, puisque le but est de la promouvoir et donc de lui apporter de la visibilité internationale et de la clientèle. La conception de circuits Ce sont avant tout les hébergements qui vont déterminer l’itinéraire d’un circuit. Une fois que les hébergements sont sélectionnés, il est relativement simple de trouver des prestataires d’activités ; au vu du nombre de parcs nationaux et de réserves protégées sur le territoire québécois, et canadien, les activités écotouristiques ne manquent pas. Il suffit ensuite de monter le circuit étape par étape, en prenant en compte le transport, l’hébergement, la restauration, les activités. Ensuite, on envoie le programme à l’agence qui transmet le tout au client final. La conception de critères fait également partie intégrante du projet au quotidien. 52 3.3. La mise en place de critères S’inspirer de ce qui existe déjà Parallèlement à la recherche de partenaires et aux visites de terrain, la mise en place de critères pour notre charte est nécessaire pour que les partenariats éventuels prennent corps. Pour ce faire, nous pouvons déjà commencer par les chartes qui existent déjà et nous en inspirer, souligner les critères récurrents, déterminer les cibles de ces chartes... Soumettre les critères aux partenaires Nanuq Aventure a quelques partenaires privilégiés à qui il est possible de présenter les critères autour d’une table ronde afin d’avoir un premier retour sur leur crédibilité et surtout sur leur caractère réalisable ou non. Selon leur réaction, nous serons amenés à modifier ou améliorer le contenu de la charte pour qu’elle soit la plus juste et la plus réaliste possible. Une fois cette première réunion effectuée, nous pourrons convier tous les partenaires potentiels intéressés dans le cadre d’une conférence organisée par Nanuq Aventure afin de leur présenter le projet, comme expliqué plus haut. Nous pourrons ainsi concrétiser les partenariats, et mettre en œuvre concrètement le projet. Nous sommes bien sûr ouverts à toutes les remarques et critiques constructives, que nous prendrons en considération, mais nous savons également ce que nous voulons. Organiser des audits externes par un organisme indépendant Nos fournisseurs partenaires ont signé la charte, ils se sont engagés avec nous dans une démarche de tourisme responsable : les actes doivent respecter l’engagement. Comme nous l’avons expliqué plus haut, il est impératif que ce soit un organisme indépendant qui effectue les audits pour vérifier le respect des critères et l’amélioration des pratiques. Nous avons pour le moment fait appel à plusieurs organismes. D’après nos entretiens, ils sont tous très intéressés par cette approche, qui constitue une première ici au Québec. Ils nous ont tous fait des devis, approximatifs, car ils ont besoin de plus d’éléments sur notre charte afin de nous envoyer une proposition précise. Nous devons donc patienter encore avant de faire appel à eux, le temps de finaliser la charte. Les organismes pouvant répondre à notre demande sont de nature très variée : entreprise privée, association, réseau associatif... 53 Ils peuvent nous offrir une prestation sur mesure, c’est-à-dire un audit de chaque partenaire une fois par an, ce qui serait l’idéal. La première visite serait a priori la plus complète et la plus longue, les suivantes seraient des visites de contrôle. Il y aurait de nouveau une visite très complète tous les 3 ou 5 ans (à nous de déterminer) pour que notre certification ne soit pas uniquement un formulaire à remplir lors de la première adhésion, mais bien le reflet d’une véritable démarche responsable, sans cesse remise en cause afin de l’améliorer toujours. Les coûts sont également très variables, à nous donc de trouver la solution la plus satisfaisante. 3.4. Les freins dans la mise en place du projet Intégrer un projet de long terme dans le quotidien C’est sans doute la plus grande difficulté : dans un quotidien où l’urgence est de mise, il faut réussir à dégager du temps pour travailler sur un projet de long terme. Pourtant, ce n’est pas toujours évident : il paraît logique que quand l’on doit envoyer une proposition pour le lendemain à un client, c’est sur ce travail là que l’on va se concentrer. Si l’on répond plus rapidement, cela permet également de consacrer plus de temps aux projets de chacun : écotourisme, communication, thématiques que l’on souhaite développer (par exemple croisières, agrotourisme, etc.), etc. Pour le moment, cela prend du temps à être mis en place, mais comme j’intègre l’équipe dès la fin du stage comme employée pour continuer le projet, cela laisse évidemment plus de perspective dans le long terme et je peux donc être mobilisée cet été sur le travail mentionné cidessus. Intégrer le projet dans une logique économique Les principes du développement durable allient en principe harmonieusement l’environnement, l’économie et l’éthique. En théorie, c’est fantastique. Mais la réalité peut vite nous rattraper. Il faudra du temps pour que le projet soit définitivement un allié de la logique économique. Ce n’est absolument pas impossible, mais il faut prendre en compte certains paramètres incontournables : l’entreprise doit bien vivre, et c’est d’abord au niveau économique qu’elle va faire des choix. Et les choix économiques peuvent parfois entrer en contradiction avec le projet. Par exemple, l’entreprise a besoin de « gagner » des groupes plutôt de type « économique », c’est-à-dire des budgets bas ou moyen de gamme, et des voyages en autocar. Ces groupes 54 permettent d’alimenter le besoin en fonds de roulement de l’entreprise, de la faire vivre. Cette clientèle est pour le moment indispensable. Et pour attirer cette clientèle, nous faisons appel non pas à des fournisseurs soucieux de l’environnement, mais d’abord à ceux capables de fournir le meilleur tarif. Car c’est d’abord et avant un tout un prix attractif que ces clients recherchent, et si la concurrence fait mieux, eh bien c’est à la concurrence qu’ils s’adresseront. Et si les fournisseurs qui sont les plus compétitifs sont les plus pollueurs, nous n’avons pour le moment guère le choix. A moyen terme, le but est de négocier avec quelques partenaires privilégiés. A plus long terme, le but est aussi de revenir essentiellement à une clientèle plus haut de gamme, que nous traitons déjà. Là, c’est la même chose, mais sous un autre angle : comme ce sont généralement des clients qui veulent du très haut de gamme, de l’exclusif, ils vont choisir des produits tels que des transferts en 4x4 ou limousine au lieu du bus, des survols en hydravion, ou en hélicoptère, etc. Certes, la compensation carbone de ces voyages est possible, certes nos fournisseurs sont de plus en plus soucieux d’acheter du matériel de plus en plus performant sur le plan écologique, de privilégier des carburants moins polluants, etc., mais n’importe quel détracteur pourra utiliser cet argument. Cependant, Nanuq Aventure a des partenaires qui lui font entièrement confiance pour commercialiser leurs produits, et la logique est donc délicate. De plus, il ne faut pas virer dans l’extrémisme écologique et renoncer à toute forme de technologie motorisée ou autre : il est certain que nous n’empêcherons jamais les gens de rêver à de lointaines destinations, même s’il est clair que le tourisme local est une alternative très satisfaisante, et il faut savoir conjuguer avec son temps. Si nous utilisons des transports motorisés, qui polluent, on peut essayer certes de réduire leur utilisation, mais on peut aussi essayer d’optimiser leur utilisation, favoriser des technologies moins polluantes, moins bruyantes, etc. Surtout que ces prestataires d’activités ou transporteurs créent aussi de l’emploi, donc ce qui est positif d’un côté peut avoir des conséquences négatives de l’autre. Intégrer le projet dans une logique financière On peut avoir le projet du siècle, s’il n’est pas réalisable sur le plan financier, il ne pourra jamais être mis en œuvre. Il doit donc impérativement s’inscrire dans une logique financière pour permettre sa réalisation. Cela peut passer par l’investissement de capitaux propres, la recherche de subventions. A priori, les coûts du projet concernent : La validation de la charte par une personne compétente au niveau juridique, comme un avocat 55 Les audits auprès des signataires, les coûts ne sont pas encore définis Les projets que Nanuq Aventure souhaite soutenir et financer en partie, là ce sera au cas par cas Nous en parlerons dans la partie 4, mais nous allons entamer une démarche de recherche de financements. Intégrer le projet dans une logique concurrentielle On l’a vu, le tourisme est un secteur toujours en mouvement. Si une entreprise a un concept innovant, il y a de fortes probabilités pour qu’il soit copié et repris peu de temps après. Le concept de la charte étant relativement nouveau au Québec, et surtout face à la demande croissante de la clientèle (européenne notamment) quant aux initiatives « vertes », c’est pratiquement sûr que les concurrents directs de Nanuq Aventure vont à un moment ou un autre mettre en place une politique de tourisme responsable. Durant toute la phase de conception et mise en œuvre du projet, il faut donc veiller à ne pas dévoiler trop d’informations. Le monde du tourisme est petit, tout le monde se connaît, et une information peut rapidement se propager. Lors de la prise de contact avec les ATR, avec les structures, il fallait trouver un moyen d’en dire suffisamment sans trop en dire. De plus, comme pour la logique économique, Nanuq Aventure doit rester une entreprise compétitive. Les produits qu’elle développe, en plus d’être rentables, doivent aussi correspondre à un marché, à une demande, à une cible. On l’a analysé tout au long de ce rapport, le potentiel écotouristique du Québec est certain. Il faut créer des produits qui puissent répondre aux attentes tout en restant attractifs et donc compétitifs. Difficulté de communication auprès du client final Nanuq Aventure est une agence de tourisme réceptif, et ses clients sont les agences de voyages ou les tours opérateurs. Nous ne traitons jamais en direct avec les clients finaux. D’où la difficulté de leur communiquer des informations sur notre projet. Nous savons que nos clients sont très demandeurs de démarches comme la nôtre, mais ils doivent également se constituer en relais de Nanuq Aventure et diffuser l’information auprès du client final, pour l’aider dans son choix. Si le client final n’a absolument aucune idée de nos actions, pourquoi choisirait-il un voyage de notre griffe plutôt que de celle d’un concurrent ? Nous avons vu précédemment que si le client a pourtant connaissance d’une démarche volontaire et responsable de l’entreprise, cela l’aidera sans aucun doute dans sa décision finale. 56 Même si les commerciaux de Nanuq Aventure rencontrent les agences et TO en France et peuvent leur exposer le projet de vive voix et en face-à-face pour plus d’impact, si ces derniers ne relaient pas l’information, il sera difficile d’en informer nous-mêmes le client final. On peut constater que malgré les freins, le projet d’écotourisme et de tourisme solidaire de Nanuq Aventure a pris beaucoup d’ampleur au cours de ces derniers mois. Au bout de six mois, il est temps de faire le bilan, d’analyser les résultats et de faire des préconisations. 57 4. Bilans et résultats, préconisations 4.1. Le projet à long terme : perspectives Création d’une association Au cours de ces derniers mois, du début de la réflexion jusqu’à maintenant, le projet d’écotourisme et de tourisme solidaire de Nanuq Aventure a pris beaucoup d’ampleur et ouvert de nombreux champs d’action et perspectives. Au départ, il était simplement question de soutenir des associations ou organismes à but non lucratifs dans le domaine de la protection des animaux, de l’environnement, ou autre ayant un rapport avec la philosophie de Nanuq Aventure. Le don financier est l’action la plus simple à mettre en place, cependant elle est relativement impersonnelle et n’implique pas beaucoup celui qui l’effectue. De plus, il est très difficile de savoir quels projet sont financés avec les dons, et la répartition de ces derniers n’est pas toujours transparente selon les organismes. Nous avons d’abord contacté des associations connues mondialement, mais ce sont des énormes structures qui agissent à l’échelle internationale, de taille bien trop disproportionnée par rapport à celle de Nanuq Aventure. Par exemple, l’une de ces associations exige de n’importe quelle entreprise un montant de minimum 25 000 dollars canadiens, juste pour pouvoir utiliser son logo. L’association ne tient compte ni de la taille de l’entreprise ni de son chiffre d’affaires pour le montant imposé. Il paraît évident qu’un partenariat s’avère impossible dans ces conditions. Nanuq Aventure se tourne plus vers des organismes de taille similaire, qui permettra un véritable échange et un véritable suivi. Si de tels partenariats se créent, il sera alors plus facile pour Nanuq Aventure de s’impliquer concrètement dans les actions de l’organisme en question et de fournir un suivi aux clients qui décident de soutenir aussi l’action. Outre la volonté de soutenir des projets externes à Nanuq Aventure, nous avons également réfléchi aux sources de financement de ces projets. Ils peuvent être de plusieurs natures : Proposition au client de participer financièrement à l’un des projets, mais cela pose des difficultés de suivi de projet comme expliqué ci-dessus, Part de financement intégrée automatiquement au prix du voyage, mais dans le contexte où nous devons proposer sans cesse des tarifs toujours plus compétitifs, cela paraît utopique, 58 Pourcentage de la marge prélevé et destiné au soutien des projets externes, cela paraît une solution satisfaisante, d’autant que ce n’est pas le client final qui supporte la différence tarifaire, mais bien l’entreprise. C’est également une marque supplémentaire de son engagement : elle est prête à consacrer une part de son chiffre à des projets qui lui tiennent à cœur. Subventions et financements externes Evidemment, il est possible de combiner plusieurs de ces possibilités. Finalement, l’idée de création d’une association sans but lucratif est née au cours des différentes discussions. Elle serait constituée d’un comité décisionnel composé de divers acteurs du tourisme et autres domaines, et permettrait de soutenir financièrement nos partenaires via des projets concrets. A ce niveau, nous en sommes encore à l’étape de la réflexion et tout reste à faire. Recherche de subventions La recherche de subventions et financements fait partie de la prochaine étape et de ma mission principale des prochains mois. Pour réaliser un projet, il est important de pouvoir le financer. Même si Nanuq Aventure fait des efforts sur ses marges lors de la vente de circuits écotouristiques, propose aux voyageurs de participer financièrement, ce n’est pas suffisant. En effet, si l’on veut pouvoir soutenir nos partenaires et des projets externes, c’est indispensable de trouver des subventions. Entre le coût des audits auprès des fournisseurs, puisqu’il n’y a pas de raison que ce soit eux qui en supportent le coût, les aides financières pour améliorer leurs pratiques ou financer leurs rénovations / nouvelles constructions, les projets externes…, Nanuq Aventure pourra difficilement supporter tous ces coûts seule, alors qu’il existe des possibilités de financements externes. Développer le projet dans les autres provinces du Canada Le projet d’écotourisme et de tourisme solidaire de Nanuq Aventure s’est principalement concentré sur le Québec, province où les partenariats les plus solides ont été établis et où la plupart des séjours organisés par Nanuq Aventure se déroulent. Mais parallèlement au développement des autres régions, nous avons parlé de l’Ontario et de la Colombie Britannique, les deux provinces les plus touristiques du pays avant le Québec, il paraît logique que la démarche de tourisme responsable va également s’étendre à ces zones 59 géographiques. Toutes les étapes que nous avons évoquées au long de ce rapport seront donc de nouveau mises en œuvre, à commencer par la recherche de partenaires. 4.2. Bilan et résultats, préconisations Le bilan du stage est très positif. Tous les objectifs de départ n’ont pas forcément été remplis, mais les raisons ont été expliquées tout au long de ce rapport : le projet a pris de l’ampleur, j’ai été mobilisée sur des missions parallèles car il a été convenu assez tôt finalement de ma continuation au sein de Nanuq Aventure, etc. Toutes les bases ont bien été posées pour appréhender l’avenir du projet avec sérénité, les étapes ont été identifiées… Le projet de Nanuq Aventure a un fort potentiel de développement : il anticipe une demande claire et correspond à des attentes précises, il contribue à l’amélioration des pratiques au sein de l’entreprises et chez les partenaires, il solidifie un réseau de partenaires privilégiés et fiables, etc. Pour autant, un gros travail reste à fournir, auprès des entreprises québécoises notamment : avoir conscience de la fragilité de ses ressources quand elles paraissent inépuisables est un travail de longue haleine. L’accompagnement auprès des partenaires dans leur démarche devrait y contribuer. Quand la charte aura été finalisée et que les premiers tests auront été effectués, il conviendra de communiquer sur le projet. Un positionnement clair et cohérent sera la garantie de la crédibilité de Nanuq Aventure sur le marché de l’écotourisme et du tourisme solidaire, avec des résultats concrets à pouvoir avancer. Il est certain que les résultats attendus se feront ressentir à moyen voire long terme. La production en catalogue pour toute l’année 2009 des tours opérateurs et des agences de voyages est déjà terminée, ce qui fait que notre production de circuits écotouristiques ne sera pas dans les brochures de nos clients avant 2010, d’autant qu’un important travail de communication pour convaincre les clients de Nanuq Aventure et les clients finaux d’acheter des voyages responsables est à prévoir. Pour cela, la responsable de la communication ainsi que les commerciaux en France se constitueront en relais du projet en interlocuteurs privilégiés. Les résultats à court terme que nous pouvons analyser sont probants et concernent dans l’immédiat les retours des fournisseurs contactés, des ATR, etc., qui sont tous unanimes sur l’intérêt qu’un tel projet présente. Sur le plan personnel, ce stage a également été très positif. Il m’a permis d’une part d’acquérir une nouvelle expérience très riche dans un pays à la fois cousin et étranger, de vivre dans un 60 nouvel environnement, d’adopter un nouveau mode de vie, dans une ville très riche par sa diversité culturelle et ethnique, et qui m’a impressionnée par sa tolérance et son ouverture d’esprit. D’autre part, j’ai eu la chance de travailler au sein d’une équipe conviviale et chaleureuse sur un projet particulièrement intéressant où j’avais des responsabilités. Le projet était embryonnaire lors de mon arrivée et je dirais presque que j’ai eu carte blanche pour le développer. J’ai ainsi pu mettre à profit mon autonomie et mon sens de l’organisation, tout en appréhendant la réalité du terrain et du monde du travail dans le tourisme. De plus, ce type de mission s’inscrit dans la droite lignée de mon projet professionnel, et le fait de pouvoir prolonger cette expérience et de continuer le projet amorcé constitue pour moi une grande reconnaissance du travail que j’ai accompli au cours de ces derniers mois. Ma mission a été très enrichissante, à de nombreux points de vue : j’ai appris à conduire un projet de manière relativement autonome et à procéder par étapes - travail minutieux de documentation, recherche de partenaires, constitution de la charte… - puis à m’adapter à la réalité du terrain, revoir les échéances en fonction des avancées, des réflexions, de l’évolution du projet, rencontrer des professionnels. J’ai beaucoup appris au cours de ces six derniers mois, et la vie en entreprise m’a donné l’occasion de mieux appréhender les codes relationnels avec les clients, les fournisseurs, de me découvrir de nouvelles compétences, en production et négociation par exemple. Travailler au service groupes m’a également permis de prendre conscience d’une certaine réalité liée au marché, qui peut parfois entrer en contradiction avec nos idéaux, et de parvenir ainsi à aborder la question du tourisme responsable sous un autre point de vue, plus en phase avec la réalité économique des entreprises. Je me suis vraiment impliquée personnellement dans ce projet qui correspond à mes convictions personnelles : c’est très important pour moi d’entreprendre des actions qui donnent un sens à notre travail, à notre vie, d’être en accord avec nos convictions, avec nous-mêmes, et j’espère de tout cœur pouvoir atteindre cet objectif dans ma future vie professionnelle. C’est bien parti. 61 Conclusion En s’engageant dans une démarche de tourisme responsable, Nanuq Aventure se positionne sur un marché prometteur et sur une destination qui a un potentiel énorme au niveau de l’écotourisme combiné avec des thématiques Amérindiennes authentiques. En effet, le Canada, et plus particulièrement le Québec dans notre cas, est le pays des grands espaces où la nature a toute sa place, et est la terre de civilisations très anciennes. Protéger ce patrimoine tout en le mettant en valeur, par le tourisme notamment, apparaît comme un défi, si ce n’est une obligation. Un territoire dénaturé, pollué est vite déserté et ne constitue plus ni une attraction touristique, ni un lieu de vie attrayant pour les habitants. Nanuq Aventure l’a bien compris et a la volonté de développer un tourisme intelligent, loin du tourisme de masse et ses dérives, en mettant en œuvre une politique ambitieuse, qui implique non seulement l’entreprise elle-même, mais aussi ses partenaires privilégiés au niveau des fournisseurs et des clients. Nanuq Aventure veut démontrer qu’avec une vision commune entre l’entreprise et ses partenaires, nous pouvons améliorer les pratiques actuelles et intégrer l’environnement et l’éthique dans la gestion quotidienne de chaque structure, en réalisant des gestes parfois simples, en révisant notre politique d’achat, notre plan de formation du personnel, en informant la clientèle, etc. Autant de mesures qui se retrouvent dans la charte interne que nous avons développée et que l’on doit valider, qui signe l’engagement de Nanuq Aventure en faveur du développement durable pour développer ses produits écotouristiques et de tourisme solidaire. Qu’est-ce que cela implique concrètement ? Aujourd’hui, il existe une prise de conscience réelle sur l’importance du tourisme durable, aussi bien pour les populations locales que pour l’environnement, les microprojets et projets se multiplient, des marchés se créent : on progresse lentement, de plus en plus d’entreprises transcrivent par écrit leurs engagements pour plus de crédibilité et de transparence. L’engagement apparaît comme une valeur sûre permettant d’ouvrir de nouveaux marchés et de les pérenniser, en apportant la confiance nécessaire pour le client ; encore faut-il que toutes les structures puissent afficher des mesures concrètes, des résultats probants au bout d’un certain temps, fassent appel à des contrôles externes pour la véracité de leurs engagements, etc. Ce que Nanuq Aventure s’engage à faire et à démontrer dans les mois à venir. Mais sans une réelle volonté politique qui accompagne l’engagement des entreprises, les avancées économiques, sociales, environnementales, vont être longues à se faire ressentir. 62 Bibliographie Livres W. Freyer und K. Scherhag, Zukunft des Tourismus, FIT-Verlag Dresden, 1996 A.Viegas, Okomanagement im Tourismus, R. Oldenbourg Verlag München Wien, 1998 Françoise Perriot, Pour voyager autrement, Agir, le guide des nouvelles solidarités, Le pré aux clercs, 2005 Christiane Gagnon et Serge Gagnon, L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, de la conservation au développement viable des territoires, Presses de l’Université du Québec, collection tourisme, 2006 Revues Le tourisme autrement, Alternatives Economiques, Pratiques n°33, Mars 2008 TER Durable magazine, Tourisme Equitable, Responsable et durable, n°2, Mai 2008 Etudes Le défi du tourisme Autochtone : gérer la croissance, communiqué de la commission canadienne du tourisme, n°11, décembre 2000 Nature et Tourisme, l’écotourisme au Québec en 2002, Tourisme Québec, 2002 Etude sur la valeur économique de l’écotourisme et du tourisme d’aventure, Aventure Ecotourisme Québec, 2004 Le tourisme solidaire vu par les Français, Notoriété, image et perspectives, Union Nationale des Associations de Tourisme et de Plein Air (UNAT), mars 2005 Le tourisme en chiffres 2006, Tourisme Québec, 2006 Sites Internet et Newsletters www.unwto.org : organisation mondiale du tourisme www.tourisme-durable.net : de nombreuses informations sur toutes les thématiques du tourisme durable www.tourismesolidaire.org : ATES Association pour le Tourisme Equitable et Solidaire, informations sur les acteurs et les projets www.veilletourisme.ca : Globe Veilleur, réseau de veille québécois en tourisme, de nombreux articles sur les sujets de mon stage. 63 www.quotidiendutourisme.com : site français pour les professionnels du tourisme, de nombreuses informations sur la concurrence, la demande des clients, les tendances du tourisme. www.tourmag.com : portail à destination des professionnels du tourisme www.bnq.qc.ca : Bureau de Normalisation du Québec, informations sur les certifications dans le tourisme www2.ademe.fr : Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie Film Le Peuple Invisible, de Richard Desjardins, 2007 64