Enquête sur les rapaces diurnes nicheurs en Maine-et

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Enquête sur les rapaces diurnes nicheurs en Maine-et
Rapaces diurnes nicheurs en Maine-et-Loire (2000-2002)
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Enquête sur les rapaces diurnes nicheurs en Maine-et-Loire
(2000-2002)
Laurent HAUCHECORNE & Jean-Claude BEAUDOIN
La chasse au trésor
Cela commence comme une chasse au trésor devant une
carte «!d’état-major!» étalée sur la table et dont les plages
vertes font rêver de sous-bois odorants. Il s’agit alors de
tracer son carré central, comme si ce cadre délimitait la
position probable du trésor à découvrir, de repérer les routes
et les chemins, les accès, d’imaginer les points de vue
possibles cerclés de courbes de niveaux, de deviner déjà les
rapaces présents sur cet espace.
Cela se poursuit sur le terrain, les bottes aux pieds, l’œil
aux aguets dans les chemins creux ou les sous-bois. C’est le
moment que l’on attendait, quand les couleurs de la carte
prennent odeurs et consistance. Les « ! plages vertes ! »
deviennent frondaisons bruissantes sous le vent d’ouest. Les
espaces blancs sont devenus des prairies ou des champs
dont la terre parfois colle aux bottes, les courbes de niveau
des côtes à gravir. La carte a pris vie, une silhouette aperçue
sur fond de ciel, des cris perçants, une aire de branchages,
une rémige ramassée dans les feuilles mortes, une plumée
au bord du sentier, parfois rien, ou si peu à noter dans son
carnet de terrain. Autant d’indices qui, progressivement
resserrent la traque, pour surprendre un rapace toujours
insaisissable, qui paraît se jouer de nos tentatives, dérisoires
mais indispensables, de comptes humains.
Enfin de retour dans la chaleur de nos foyers, il reste à
recouper les traces, les indices, les soupçons et les
Résumé!: La participation de 62 observateurs a
permis d’assurer une couverture satisfaisante du
département de Maine-et-Loire dans le cadre de
l’enquête nationale coordonnée en 2000-2002 par
la Mission FIR de la LPO. Les résultats obtenus
montrent, par comparaison avec l’enquête de
1979-1982, une évolution positive pour 7 espèces
sur 10. Seules 2 espèces assez marginales, le
Circaète Jean-le-Blanc et le Busard des roseaux, se
maintiennent avec des populations très fragiles.
certitudes. De confronter, d’analyser, de spéculer sans
doute pour arriver à tracer de probables territoires de buses,
d’autours ou de busards. Et quand les observations des
quelque 64 Angevins qui ont joué ce jeu se regroupent,
comme un puzzle qui se dessine, on est fasciné de voir
apparaître une belle image des rapaces de chez nous qui
complétera celle des rapaces de France et c’est là que l’on
découvre ce qu’était le trésor!: des rapaces libres vivant leur
vie dans nos bois et nos campagnes et qu’on espère mieux
préserver en connaissant autant qu’il est possible leurs
effectifs, leurs besoins et leur dynamique.
Le protocole
Au cours de l’année 1999, la LPO (Mission Fonds
d’Intervention pour les Rapaces) a lancé une
proposition d’enquête en vue d’une estimation des
populations de rapaces diurnes nicheurs français pour
les années 2000-2001. La précédente enquête nationale
remontait aux années 1979-1982. Coordonnée par
Jean ! Sériot de la LPO nationale et un comité de
pilotage de treize autres personnes, l’enquête fut
relayée par les associations ornithologiques régionales
ou départementales. En Maine-et-Loire, la LPO Anjou
a pris en charge l’enquête.
La méthode employée s’est voulue à la fois souple,
attractive tout en maintenant une indispensable
rigueur scientifique et en permettant d’intégrer les
connaissances antérieures des observateurs. La durée
de l’enquête, deux ans, avec des compléments en 2002,
se voulait un compromis entre les possibilités de
mobilisation, les moyens disponibles et la dynamique
de certains rapaces.
L’unité de base fut la carte IGN 1:25!000 (260!km2)!;
il s’agissait de mener une prospection la plus
exhaustive possible sur un carré central de 5!x!5!km
(2!500!ha) soit 10!% de la carte, complétée éventuellement par un carré supplémentaire (deux cas en
Maine-et-Loire). Par ailleurs l’observateur était invité
à fournir une fourchette d’estimation sur la carte
entière basée sur l’extrapolation du carré central
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Laurent HAUCHECORNE & Jean-Claude BEAUDOIN
Prospection «!carré central!» et estimation carte entière
Données ponctuelles hors protocole
Prospection «!carré central!»
Nombre d’heures sur le carré central
Carte!1. — Couverture des cartes IGN 1:25!000 durant l’enquête.
inventorié, en tenant compte des habitats représentés,
et sur des observations hors carré ainsi que sur la
connaissance préalable de la carte (pour la description
et la justification du protocole voir Thiollay &
Bretagnolle, 2004!: 14-15).
Prospection en Maine-et-Loire
Notre département d’une superficie de 7 ! 233 ! km2
est concerné peu ou prou par 40 cartes IGN au
1:25!000 mais 27 seulement ont leur carré central situé
entièrement ou majoritairement en Maine-et-Loire. La
prospection peut être considérée comme suffisante
pour 22 cartes et moins approfondie pour cinq autres
(carte 1). 25 cartes ont fait l’objet de prospections sur
le carré central!et des estimations pour la carte entière
ont été fournies pour neuf cartes et, partiellement, sur
trois!autres. Nous avons donc des informations pour
27 ! cartes IGN. Compte tenu de cela et des
connaissances antérieures réunies dans les fichiers de
la LPO Anjou, il nous semble que le département a été
couvert de façon satisfaisante et les estimations
proposées pour l’ensemble du
département de
Maine-et-Loire peuvent être considérées comme
fiables.
Cette prospection a été permise grâce à
l’engagement de 15 responsables de cartes associés à
49 observateurs.
Les milieux inventoriés
Les milieux présents dans les carrés centraux
étudiés paraissent représentatifs de notre département
avec une dominante bocagère surtout à l’ouest, en
particulier dans les Mauges (70 à 80!% de bocage dans
les secteurs inventoriés) un peu moins dans le Segréen
(50 à 60 ! %), les cultures dominant ailleurs (jusqu’à
60!% dans les carrés centraux du Saumurois où à l’est
d’Angers) et les boisements étant surtout présents
dans le Baugeois (30 à 50!%).
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Rapaces diurnes nicheurs en Maine-et-Loire (2000-2002)
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Carrés centraux (%)
Espèces
Maine-et-Loire
Faucon crécerelle
Cartes (%)
France
Maine-et-Loire
France
100,0
95,0
100,0
95,9
Buse variable
96,0
91,2
100,0
94,7
Busard Saint-Martin
81,5
39,3
100,0
66,3
Épervier d’Europe
77,7
78,4
82,0
92,3
Bondrée apivore
52,0
47,7
90,0
82,2
Faucon hobereau
48,0
40,0
95,0
78,1
Autour des palombes
18,5
30,8
54,0
63,5
Busard cendré
18,5
18,9
27,0
39,4
Milan noir
15,0
37,8
63,0
56,8
7,5
9,3
41,0
19,5
13,0
32,8
Busard des roseaux
Circaète Jean-le-Blanc
Tableau!1. — Comparaison des fréquences des diverses espèces ayant fourni des indices de nidification
sur les carrés centraux et les cartes en Maine-et-Loire et en France.
Effectifs
Espèces
1979-1982
2000-2002
Tendances
100-200 (300)
160-200
stabilité (?)
Milan noir
15
41-58
augmentation
Circaète Jean-le-Blanc
1-2
3-4
stabilité ?
Busard des roseaux
>4
8-14
légère augmentation
Busard Saint-Martin
100
145-220
augmentation
> 45 (70)
75-90
augmentation ?
30-40
50-65
légère augmentation
450-600 ?
500-560
stabilité!?
> 1!000
2!270-2!450
augmentation
Faucon crécerelle
1!000-1!500
1!640-2!140
augmentation (?)
Faucon hobereau
50-80
120-170
augmentation
Bondrée apivore
Busard cendré
Autour des palombes
Épervier d’Europe
Buse variable
Tableau!2. — Comparaison des résultats des deux enquêtes en Maine-et-Loire et évolutions envisageables.
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Laurent HAUCHECORNE & Jean-Claude BEAUDOIN
Les résultats
Les prospections dans les carrés centraux ont
permis de contacter 10 espèces de rapaces diurnes
nicheurs sur les 11 dont la nidification est prouvée
actuellement en Maine-et-Loire (tableau!1). Une seule
espèce susceptible de se reproduire en Anjou, l’Aigle
botté, n’a fourni aucun indice durant l’enquête.
Ce sont au total 595!couples de rapaces qui furent
comptabilisés sur les carrés centraux (392 ! couples
nicheurs certains ou probables, soit 65,8 ! %, et 203
possibles, v. ! annexe) avec des extrêmes, selon les
cartes (en fonction du milieu et surtout de
l’importance de la prospection), allant de 7 à
49!couples, la moyenne étant de 24!couples par carré
central. De la même façon, le nombre d’espèces
contactées va de deux (pour un carré) à dix, la
majorité des carrés centraux fournissant des preuves
de nidification pour quatre à sept espèces (carte 2).
Compte tenu de ces données, des observations hors
protocole et des connaissances préalables sur un
certain nombre d‘espèces, des fourchettes
d’évaluation sont proposées dans le tableau!2.
Le rapace nicheur le plus abondant en Maine-etLoire est la Buse variable qui représente 45 ! % des
couples estimés et précède le Faucon crécerelle dont la
proportion atteint 36 ! %. Ces deux espèces à elles
seules regroupent donc environ 80!% des effectifs de
rapaces nichant en Anjou. Notons qu’au niveau
national ces pourcentages sont respectivement de
43!% et 25!%, soit un peu moins des trois quarts des
rapaces français. Il est vrai que dans notre pays ce sont
22 autres espèces qui se partagent l’effectif restant
(huit!pour les 20!% restant en Maine-et-Loire).
Les évolutions entre les deux enquêtes ne sont pas
évidentes à interpréter. En effet l’enquête de 1979-1982
avait réuni beaucoup moins d’observateurs et seules
quatre cartes IGN au 1:50 000 avaient été prospectées
selon un protocole d’ailleurs différent (tableau!2).
Commentaires par espèce
Les données fournies par les prospections dans les
carrés centraux permettent de tenter une estimation
des densités pour trois espèces largement réparties sur
l’ensemble du département ! : Buse variable, Faucon
crécerelle et Bondrée apivore. Pour les autres espèces
les commentaires porteront surtout sur les apports de
l’enquête concernant la répartition et les habitats.
Buse variable Buteo buteo (2 270-2 450 couples)
Les estimations «!carré central!» de neuf cartes pour
lesquelles les observateurs considèrent avoir une
bonne fiabilité figurent sur le tableau!3.
Carte IGN
Nombre
de couples
Couples
certains/
probables (%)
Densité
(nombre de couples
possibles à certains/100!km2)
cultivé
bocager
forestier
urbanisé
Angers O
1522O
14
85
56
36
32
8
13
Candé
1421O
19
79
76
38
50
10
1
Chalonnes-sur-Loire
1422E
10
70
40
36
58
5
Châteauneuf-sur-Sarthe
1521E
11
82
44
38
30
22
Durtal
1621O
16
93
64
12
35
48
Longué
1622E
24
83
96
56
Noyant
1722O
25
92
100
24
6
Segré
1421E
16
75
64
39
58
Yzernay
1524O
12
66
48
Milieux représentés (%)
36
79
Tableau!3. — Effectifs et densités de la Buse variable sur un échantillon de 9!carrés centraux.
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70
2
20
1
Rapaces diurnes nicheurs en Maine-et-Loire (2000-2002)
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Nombre de couples sur le!carré central (certains, probables, possibles)
Nombre de couples sur le carré supplémentaire
Nombre d’espèces nicheuses sur le carré central
Nombre d’espèces nicheuses sur la carte
Carte!2. — Résultats des prospections sur les carrés centraux et les cartes.
Même s’il est difficile d’en tirer des conclusions
définitives dans la mesure où les estimations sont
fournies par des personnes différentes avec des durées
d’observation et un nombre d’observateurs très
variables, on peut remarquer que les densités les plus
fortes se trouvent sur la carte de Noyant, secteur à
dominante forestière entrecoupé de cultures, et celle
de Longué où le milieu est majoritairement composé
de cultures variées entrecoupées de boisements très
fragmentés qui semblent particulièrement favorables à
l’espèce. Les cartes à dominante bocagère paraissent
finalement moins favorables même si les remarques
faites plus haut incitent à la prudence.
L’espèce a fortement progressé entre les deux
enquêtes comme le vérifie la comparaison de l’effectif
présent sur deux rectangles contigus de 1 ! 200 ! ha
coïncidant avec le carré central de la carte d’Angers
Ouest!: cinq!couples certains/probables en 1980-1981
et douze en 2000.
Bondrée apivore Pernis apivorus (160-200 couples)
Les données exploitables sont un peu moins
nombreuses pour cette espèce qui est notée nicheuse
sur 13 carrés centraux (52 ! %) mais 90 ! % des cartes
entières. Les observateurs s’estiment rarement
satisfaits de la fiabilité de leurs évaluations. En outre
la part des couples certains et probables est de 46!%
(seul l’épervier avec 47 ! % s’en rapproche, tous les
autres rapaces fournissant plus de couples certains ou
probables que de couples possibles). Cela illustre bien
le fait que l’espèce est discrète, présente tardivement
et avec un envol des jeunes en août, à un moment où
les observations dans le cadre de l’enquête sont quasi
nulles. En outre elle est moins densément répartie.
Le nombre de couples inventoriés va d’un seul pour
huit carrés centraux à trois dans trois cas. Les plus
fortes densités s’observent sur des cartes où alternent
des massifs forestiers étendus pouvant couvrir 20 à
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Laurent HAUCHECORNE & Jean-Claude BEAUDOIN
35 ! % de la superficie et des cultures ou du bocage
(trois ! cartes dans le Baugeois et la carte d’Yzernay
dans les Mauges).
Au sein du bocage dominant, la bondrée est
irrégulièrement distribuée mais peut être assez
abondante si des bois âgés et d’au moins cinq!hectares
sont bien représentés. Ainsi au sud-ouest d’Angers
trois!couples sont cantonnés dans des bois échelonnés
sur 5,5!km. La nidification dans des haies, mentionnée
par Nore (1979) dans le Limousin, n’a, à ce jour, pas
été constatée en Maine-et-Loire.
Aucune évolution notable des effectifs n’est
décelable entre les deux enquêtes mais la difficulté à
recenser l’espèce avec précision relativise un tel
constat.
Faucon crécerelle Falco tinnunculus (1 640-2 140 couples)
Sur 10 cartes où les observateurs considèrent avoir
obtenu une bonne fiabilité, les carrés centraux
accueillent entre 5 et 18!couples soit des densités allant
de 20 à 72!couples/100!km2. La valeur la plus faible
est fournie sur la carte, majoritairement forestière, de
Noyant et la plus forte sur des cartes où s’imbriquent
des cultures dominantes et des boisements
relativement nombreux (Longué, Doué-la-Fontaine et
Saumur). Encore une fois les zones bocagères
paraissent en retrait, ce qui est en accord avec
l’analyse de l’enquête nationale qui souligne que ces
zones sont «!pourtant réputées les plus favorables à
l’espèce.!» (Strenna in Thiollay & Bretagnolle, 2004!:
115). Les prospections n’ont, en revanche, pas apporté
de précisions sur l’importance de la population
urbaine en Maine-et-Loire.
Au cours des 20 dernières années les effectifs ont
sans doute progressé.
Milan noir Milvus migrans (41-58 couples)
Bien que trouvé nicheur certain/probable sur
18 ! cartes et nicheur possible sur quatre autres, ce
milan ne présente pas une distribution uniforme
même s’il exploite un vaste éventail d’habitats. Cette
localisation relative résulte de l’attrait pour trois types
de sites de nidification ! : la proximité des décharges
qui fixent 18-20!couples avec deux cas de construction
d’aire sur pylônes électriques d’une ligne traversant
une plaine céréalière, le réseau de grandes vallées
avec près d’une dizaine de couples dont quatre sont
connus pour occuper des îles boisées de Loire, des
bois proches d’étangs pour 8-11 ! couples au sein
d’habitats variés (plaines ouvertes, bocage…).
L’estimation proposée se fonde sur les couples
connus et non une extrapolation ! ; depuis l’enquête
précédente, les effectifs ont plus que doublé.
Circaète Jean-le-Blanc Circaetus gallicus (3-4 couples)
Les rares couples présents sont confinés au
Saumurois où ils occupent des boisements étendus
entourés de vastes secteurs comportant des zones
propices à la capture de reptiles!: friches, broussailles
sur pentes des coteaux, landes clairsemées, pelouses et
prairies, cultures… L’effectif mentionné est celui des
couples connus et n’a, peut-être, guère évolué depuis
l’estimation — sans doute trop basse — proposée pour
la période 1979-1982.
Busard des roseaux Circus aeruginosus (8-14 couples)
En dépit d’une progression sensible depuis la fin
des années quatre-vingt, l’espèce demeure rare du fait
du peu de sites favorables à la nidification. Une
dizaine de couples se reproduit sur des étangs, deux
ou trois autres font des tentatives sur des prairies
inondables et, depuis le milieu des années quatrevingt-dix, un couple s’est établi dans une friche et un
autre en plaine céréalière.
La population en Maine-et-Loire est caractérisée par
une grande fragilité. Les installations sans lendemain
sont fréquentes, même sur les étangs, et les échecs de
reproduction sont courants.
Busard Saint-Martin Circus cyaneus (145-220 couples)
Largement répandu dans tout le département, ce
busard occupe le bocage, les secteurs forestiers
entourés de cultures et les plaines ouvertes à la
condition d’y trouver des boisements comportant des
landes ou des parcelles récemment plantées pour
établir son nid. L’adoption de cultures comme sites de
reproduction demeure très marginale et n’a été
signalée, au cours de l’enquête, que pour une petite
dizaine de couples éparpillés sur tout le département.
La plupart des cartes accueillent moins de
10 ! couples et seules deux cartes ont un effectif
supérieur. Sur 14 carrés centraux bien couverts, la
densité est de 7,1!couples certains/probables!pour!100!km2
(7,9!couples/100!km2 au niveau national).
L’espèce a bien progressé au cours des 20 dernières
années en conformité avec le constat fait à l’échelle
nationale à l’issue de l’enquête.
Busard cendré Circus pygargus (75-90 couples)
La presque totalité des couples est concentrée dans
le Saumurois mais des isolés sont susceptibles de
s’installer un peu partout. Plus de 90!% des nids sont
localisés dans des cultures, principalement dans les
plaines céréalières autour de Doué–la–Fontaine et
Montreuil-Bellay où l’espèce peut se regrouper en
colonies lâches.
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Rapaces diurnes nicheurs en Maine-et-Loire (2000-2002)
La précision du recensement est élevée dans la
mesure où la majorité des couples du Saumurois font
l’objet, depuis 1992, d’un suivi qui a révélé de notables
fluctuations numériques selon les années (Printemps
in Beaudoin & Vimont 2005 ! : 16-18). L’évolution
depuis l’enquête précédente n’est pas aisée à cerner et
a été discutée par Printemps (op. cit.).
Autour des palombes Accipiter gentilis (50-65 couples)
L’espèce est dispersée sur l’ensemble du
département en fonction de l’abondance des
boisements, ce qui explique la présence de la moitié de
l’effectif départemental dans le Baugeois. L’autour
s’installe surtout dans des massifs d’au moins une
centaine d’hectares mais peut bâtir son aire dans des
bois plus restreints (voir Hauchecorne 2003 pour un
site des Mauges).
L’enquête a permis de contrôler une vingtaine de
couples et les connaissances acquises au cours des
années quatre-vingt-dix permettent une estimation
assez réaliste de l’effectif départemental malgré la
difficulté à recenser cette espèce discrète. Au cours des
20 dernières années la population de Maine-et-Loire a
dû légèrement progresser mais des inconnues
subsistent comme l’éventuelle reconquête de sites
d’où l’espèce a été éliminée par piégeage dans les
années soixante (forêts de Brain-sur-Longuenée et de
Bécon entre autres).
Épervier d’Europe Accipiter nisus (500-560 couples)
Largement répandue mais discrète, l’espèce n’a été
contactée que sur 20 des 25 carrés centraux pris en
charge et est de ce fait celle dont l’estimation des
effectifs est la moins fiable. Les meilleures densités
s’observent dans le bocage bien pourvu en petits bois
où elles atteignent cinq!couples par carré, soit près du
double de la moyenne de l’enquête nationale
(2,7!couples par carré). En revanche sur les carrés à
fort taux de boisement l’épervier paraît moins
abondant.
Aucune nidification n’est jusque-là constatée en
Maine-et-Loire dans des haies comme cela est signalé
par Chartier (1997) dans le bocage normand.
Quelques cas sont connus de parcs et boqueteaux
situés en zone périurbaine.
L’apparente stabilité des effectifs entre les deux
enquêtes n’est guère documentée compte tenu des
difficultés de recensement. Toutefois des indications
ponctuelles montrent une augmentation nette depuis
le début des années quatre-vingt et il est
vraisemblable que l’estimation proposée en 1979-1982
était optimiste.
65
Faucon hobereau Falco subbuteo (120-170 couples)
Disséminé sur tout le département il est noté
nicheur certain ou probable sur neuf carrés et sur la
plupart des cartes entièrement incluses en Maine-etLoire à l’exception de celles de Candé et Chemillé. Le
hobereau occupe une grande variété de milieux avec
une préférence marquée pour les vallées et les massifs
forestiers ceinturés d’espaces agricoles ouverts et
souvent proches d’étangs.
Un seul carré, situé sur la carte de Châteauneuf-surSarthe, héberge deux couples certains et sur les cartes
entières les effectifs ne semblent pas excéder la dizaine
de couples sauf sur celles de Châteauneuf-sur-Sarthe
et Noyant. Il faut reconnaître que la précision des
estimations est moyenne en raison de la relative
discrétion de l’espèce et du caractère tardif de sa
nidification.
Dans les vallées les couples nichent dans la
ripisylve et les plantations de peupliers et peuvent
être régulièrement distribués tous les trois à quatre
kilomètres comme cela est constaté dans le Val de
Loire en aval des Ponts-de-Cé. Un seul cas de
nidification sur pylône électrique a été mentionné au
cours de l’enquête et concerne une ligne à haute
tension située en vallée de L’Authion près de
Varennes-sur-Loire.
En 20 ans l’espèce paraît avoir bien progressé mais
présente des variations numériques sensibles d’une
année à l’autre.
Conclusion
Il est réjouissant de constater au terme de cette
enquête la relative bonne santé des rapaces diurnes se
reproduisant en Maine-et-Loire. Sur les 10 espèces
présentes sept ont plus ou moins augmenté leurs
effectifs au cours des vingt dernières années, trois
semblent assez stables mais sont difficiles à recenser
(bondrée, circaète et épervier) et l’évolution du Busard
cendré demeure incertaine. Toutefois il faut souligner
la grande fragilité des populations locales du Circaète
Jean-le-Blanc et du Busard des roseaux. Ces tendances
reflètent probablement la protection légale accordée à
tous les rapaces français à partir de 1972 ainsi que la
diminution du niveau de contamination par les
pesticides organochlorés mais doivent être relativisées
car contemporaines d’une altération drastique des
milieux agricoles qui représentent les trois quarts des
habitats du département.
!
Crex, 2006, 9 : 59-69
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Laurent HAUCHECORNE & Jean-Claude BEAUDOIN
Remerciements
À Jean-Do Vrignault qui a, amicalement, accepté de
réaliser les cartes, à Franck Noël, Thierry Printemps et
Emmanuel Séchet dont la relecture attentive a permis
d’améliorer le texte initial.
Br. ! Legendre, V. ! Leray, J.-M. ! Logeais, J.-Fr. Michel,
G.!Mourgaud, Ph. Pouplard, L.-M. Préau, P.!Provost,
L. ! Rattier, G. ! Réthoré, A. ! Ruchaud, E. ! Séchet,
G. ! Séjourné, P. ! Taunay, J. ! Tharrault, J. ! Tudoux,
V.!Vimont, J.-D.!Vrignault, B.!Wälchi et I.!Wibaut, tous
membres de la LPO Anjou et/ou de Mauges Nature.
Liste des responsables des cartes
Bibliographie
J.-Cl. ! Beaudoin (Chalonnes-sur-Loire, Angers ! O.,
Durtal, Longué), H. ! Berjon (La Bruffière), J.P. ! Boisdron (Baugé), J.-Fr. Cornuaille (Thouarcé)
D. ! Farges (Beaupréau, Chemillé), A. ! Fossé (Mazé),
Br. ! Gaudemer (Angers E.), L. ! Hauchecorne (Gesté,
Mortagne-sur-Sèvre, Cholet, Yzernay), J.-L.!Jacquemin
(Le Lion-d’Angers, Châteauneuf-sur-Sarthe),
L. ! Lahaye (Valanjou), V. ! Leray (Doué-la-Fontaine),
M.!Mérot (Candé, Segré), Th. Printemps (MontreuilBellay, Fontevraud-l’Abbaye), P. ! Raboin (Saumur,
Noyant) et S.!Robert (Angers E.).
Chartier A., 1997. — Biologie de reproduction de
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chronologie et paramètres de reproduction. Le
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Hauchecorne!L., 2003. — Dix ans d’observations sur
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gentilis dans les Mauges, Maine-et-Loire, de 1991 à
2001. Crex, 7!: 41-51.
Nore Th., 1979. — Rapaces communs en Limousin
pendant la période de nidification (Buse, Bondrée,
Milan noir, Busards Saint-Martin et cendré). Alauda,
47 (3)!: 183-194.
Printemps Th., 2005. — Busard cendré, in Beaudoin
J.-Cl., Vimont V. — Oiseaux nicheurs menacés des
milieux agricoles de Maine-et-Loire. Résultats de
l’enquête 1996-2001 et synthèse depuis les années
soixante. Crex, 8!: 16-18.
Thiollay J.- M., Bretagnolle V. (coord.), 2004. —
Rapaces nicheurs de France. Distribution, effectifs et
conservation. Delachaux & Niestlé, Paris, 176!p.
Thiollay J.-M., Terrasse J.-Fr., 1984. — Estimation des
effectifs de rapaces nicheurs diurnes et non rupestres en
France. Enquête FIR/UNAO 1979-1982. Fonds
d’intervention pour les rapaces et Union nationale
des associations ornithologiques, Gennevilliers,
178!p.
!
Liste des observateurs
Ces résultats ont été permis par l’implication,
importante ou plus ponctuelle, dans tous les cas
précieuse, des personnes dont les noms suivent et
sans doute de quelques observateurs inconnus ! ou
oubliés, qu’ils soient tous très sincèrement remerciés!:
G. ! Agenet, G. ! Allard, G. ! Balesme, F. ! Berland,
D. ! Bizien, P. ! Bizien, A. ! Blin, Cl. Bretaudeau,
A. ! Bruggeman, B. ! Buono, Ph. Cognée, M. ! Colasson,
S. ! Courant, H. ! Cozannet, R. ! Fay, Gr. ! Gadret,
G. ! Gallard, A. ! Gentric, Y. Guenescheau, M. ! Gys,
Fr.!Halligon, G.!Hardy, J.!Hardy, S.!Harel, Chr. Jolivet,
J. ! Lainé, J.-Cl. ! Lalande, Fr. Leblanc, D. ! Le Déroff,
Laurent Hauchecorne
2, rue Michel-de-Montaigne,
49300 Cholet
[email protected]
Jean-Claude Beaudoin
3, allée des Aulnes
49080 Bouchemaine
[email protected]
Crex, 2006, 9 : 59-69
Rapaces diurnes nicheurs en Maine-et-Loire (2000-2002)
67
Annexe. — Résultats de l’enquête sur les carrés centraux (C = couples certains/probables, P = couples possibles!;
sur les carrés limitrophes de Fontevraud et Montreuil-Bellay, ne sont comptabilisés que les couples cantonnés en Maine-et-Loire).
Bondrée apivore
Carte IGN
C
P
Milan noir
C
P
Busard
des roseaux
C
P
Gesté
1323E
La Bruffière
1324E
1
Candé
1421O
Beaupréau
1423O
1
Mortagne-sur-Sèvre
1424O
1
Busard
Saint-Martin
C
P
1
1
1
2
3
2
P
1
1
Chalonnes-sur-Loire
1422E
2
Chemillé
1423E
2
Cholet
1424E
2
2
1
1
2
Valanjou
1523O
2
1
Yzernay
1524O
1
2
Châteauneuf-sur-Sarthe
1521E
2
1
Angers E*
1522E
Thouarcé
1523E
Durtal
1621O
C
1
Segré
1421E
Le Lion-d’Angers
1521O
Angers O*
1522O
Busard cendré
1
2
1
2
4
1
1
1
1
1
2
1
Mazé
1622O
Doué-la-Fontaine
1623O
Baugé
1621E
Longué
1622E
Saumur
1623E
2
3
1
2
1
1
1
2
1
3
2
Montreuil-Bellay
1624E2
Noyant
1722O
Fontevraud
1723O
Total
2
2
1
1
1
13
12
6
1
1
Crex, 2006, 9 : 59-69
1
25
14
7
1
68
Laurent HAUCHECORNE & Jean-Claude BEAUDOIN
Autour
des palombes
Carte IGN
C
P
Gesté
1323E
La Bruffière
1324E
Candé
1421O
Beaupréau
1423O
Mortagne-sur-Sèvre
1424O
Segré
1421E
Chalonnes-sur-Loire
1422E
Chemillé
1423E
Cholet
1424E
Le Lion-d’Angers
1521O
Angers O*
1522O
Valanjou
1523O
Yzernay
1524O
Châteauneuf-sur-Sarthe
1521E
Angers E*
1522E
Thouarcé
1523E
Durtal
1621O
Mazé
1622O
Doué-la-Fontaine
1623O
Baugé
1621E
Longué
1622E
Saumur
1623E
Montreuil-Bellay
1624E2
Noyant
1722O
Fontevraud
1723O
Total
1
Épervier d’Europe
P
C
P
C
P
1
2
6
3
4
3
2
3
5
4
4
1
15
4
2
8
4
1
2
3
3
2
3
3
12
4
4
1
7
3
9
1
6
2
4
3
1
2
2
1
1
3
3
3
4
4
1
1
7
5
4
6
5
12
2
8
1
1
3
3
C
6
1
8
4
4
4
1
1
3
9
2
4
2
2
1
2
2
1
1
1
1
2
1
15
1
4
1
2
1
5
3
5
2
13
5
1
1
20
4
9
3
2
3
5
6
7
2
1
1
25
2
3
1
23
179
1
1
3
2
1
26
2
2
7
1
P
1
2
2
1
Faucon hobereau
3
2
4
Faucon crécerelle
C
2
1
Buse variable
60
4
1
1
2
1
1
108
68
8
1
7
*Le quadrillage retenu pour l'enquête ne tient pas compte des cartes de format atypique comme la 1522O qui couvre toute
l'agglomération d'Angers. De ce fait la dénomination 1522E est d'ordre pratique mais ne correspond pas une carte éditée par l'IGN.
Crex, 2006, 9 : 59-69
Rapaces diurnes nicheurs en Maine-et-Loire (2000-2002)
Crex, 2006, 9 : 59-69
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