Les musiques berbères

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Les musiques berbères
Les musiques berbères
Les Berbères, qui préfèrent s’auto-désigner comme Amazighes au Maroc, constituent un important
ensemble d’ethnies d’Afrique du Nord qui, autrefois, occupaient un vaste territoire de la vallée du Nil
à l’Atlantique, incluant le Sahara. Dans l’Antiquité, on les connaissait comme Numides, Libyens, Garamantes ou Gétules avant qu’ils ne soient sous domination romaine (le Berbère Septime Sévère devint
Empereur romain de 145 à 162), puis sous domination arabe. Ils durent alors se convertir au christianisme
(Saint-Augustin – 354-430 – était berbère), puis à l’islam. Le mot berbère provient du latin barbarus
(barbare), reprenant la dénomination barbaros que les Grecs anciens employaient pour qualifier les
étrangers.
Jusqu’au xixe siècle, les Européens nommaient encore Barbarie, la côte des Barbaresques, réputée pour
ses pirates qui rendaient peu sûre la navigation en Méditerranée. Aujourd’hui, les Berbères forment une
mosaïque de peuples répartis entre l’Égypte et le Maroc (35 % de la population marocaine) reliés entre
eux par des traditions et des langues de la famille afro-asiatique, radicalement distinctes de l’arabe.
Par contre, l’alphabet berbère (le tifinagh) n’est plus utilisé que par les Touaregs. Ces derniers sont
nomades et circulent entre Libye, Algérie, Mali et Burkina Faso. La majorité des Berbères vit cependant
de manière sédentaire dans des oasis (Égypte, Libye, Algérie) ou des villages de montagne (Chaouis
et Kabyles d’Algérie, soit plus du tiers des Algériens ; Rifains, Zayanes et Chleuhs du Maroc). Enfin, un
grand nombre de groupes ethniques non berbérophones d’Afrique du Nord, dont les Guanches des
îles Canaries (Espagne), sont d’origine berbère et ont été pour la plupart progressivement arabisés.
En France, les Berbères représentent 35 % des immigrés originaires d’Afrique du Nord, dont le célèbre
footballeur Zinedine Zidane. Un des chanteurs algériens les plus célèbres en France, fils de berger, est
aussi originaire de la Grande Kabylie : Idir1.
On comprend aisément que les musiques berbères soient très diverses dans l’ensemble du Maghreb.
Elles sont toutes populaires, de transmission orale, et ne connaissent pas d’académisme. Ce sont des
musiques fonctionnelles, intégrées à des fêtes villageoises ou des rituels comme le mariage, les fêtes
d’après le travail aux champs ou les fantasias.
Les musiques sont souvent répétitives, évoluant sur des échelles mélodiques indépendantes du système des maqamat et souvent pentatoniques. Le rythme est généralement assuré par des tambours
bendirs. Le chant alterné et la danse collective revêtent une importance capitale et sont à la base d’un
large répertoire. Les instruments mélodiques sont principalement des cordophones (luth guembri ou
vièle soussi ribab) et des aérophones (flûtes, hautbois ghaïtas).
Au Maroc, l’ahouach est une pratique poétique, musicale et chorégraphique collective des Berbères
Chleuhs de l’Atlas (région de Souss). Deux demi-chœurs d’hommes seuls ou d’hommes et de femmes
se répondent des chants souvent improvisés dans le genre vernaculaire amarg, évoquant des histoires
de la vie quotidienne. Par sa forme et les thèmes évoqués, l’amarg se distingue des poésies conventionnelles plus élaborées des poètes professionnels raïs. Les deux chœurs de l’ahouach, qui se tient
généralement durant la fraîcheur de la nuit, chantent en répons des mélodies pentatoniques en frappant
des mains ou en jouant du bendir. Parfois, un ensemble de flûtes joue à l’unisson des formules mélodiques indéfiniment reprises et accompagnées de divers tambours sur un rythme ternaire au tempo
vif. Les figures, plutôt acrobatiques, s’enchaînent sur les indications d’un maître de danse.
L’ajmak est un genre de joute poétique, improvisée et rimée, obéissant à des règles de versification et
de métrique très précises. Un poète d’ajmak doit avoir une bonne connaissance des traditions berbères,
un sens aigu de la répartie, de la dérision, de l’ironie et de la satire, et, bien évidemment, une totale
maîtrise de la langue amazighe. Les plus réputés d’entre eux sont Boubaker Anchad, Hussein Janti,
El-Hadj Belâid, Ahmed Amentag et surtout Said Achtouk.
Dans le Moyen Atlas, l’ahidous est le divertissement préféré des Berbères amazighs. Il se présente sous
la forme d’une danse villageoise en chaîne mixte, accompagnée de chants et rythmée de bendirs. Toute
occasion est bonne pour danser ensemble l’ahidous, en particulier les soirs de moisson.
1 Voir son CD La France des couleurs, 2007.
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Inversement, le guedra est une danse de soliste, généralement une femme à genoux au centre d’un
groupe, dont le haut du corps dessine des ondulations et oscille d’avant en arrière. La tête marque des
mouvements lents et rythmés tandis que le mouvement des mains exprime des émotions comme la
passion, la joie ou la douleur. Cette danse, dont les gestes et postures relèvent d’un fort symbolisme,
est exécutée par les Sahraouis du grand sud marocain pour bénir les mariés ou les amis.
BIBLIOGRAPHIE
BASSET A., Essai sur la littérature berbère, Paris, Ed. Ibis Press-Awal, 2001.
BOUNFOUR, Introduction à la littérature berbère, 1 : Poésie, Paris, Ed. Peeters, 1999.
LORTAT-JACOB Bernard, Musiques et fêtes du Haut-Atlas, Société française d’ethnomusicologie/
Éditions Transatlantiques, 1980.
ROVSING-OLSEN Myriam, Chants et danses de l’Atlas, Arles/Paris, Actes Sud/Cité de la musique, 1997.
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