Comparaison complète de l`examen microscopique par Ziehl

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Comparaison complète de l`examen microscopique par Ziehl
INT J TUBERC LUNG DIS 7(12) : 1163-1171
© 2003 IUATLD
Comparaison complète de l'examen microscopique par
Ziehl-Neelsen et par fluorescence pour le diagnostic de la
tuberculose dans un contexte urbain à faibles ressources
L. E. A. Kivihya-Ndugga,* M. R. A. van Cleeff,† W. A. Githui,* L. W. Nganga,*‡ D. K. Kibuga,§
J. A. Odhiambo,* P. R. Klatser¶
†
* Kenya Medical Research Institute, Center for Respiratory Diseases Research (CRDR), Nairobi, Kenya ; Department
‡
of Health, KIT (Royal Tropical Institute), Amsterdam, Pays-Bas ; Centre for Disease Control and Prevention
§
(CDC), Nairobi ; National Leprosy and Tuberculosis Programme (NLTP), Ministry of Health, Nairobi, Kenya ;
¶
Department of Biomedical Research, KIT, Amsterdam, Pays-Bas
_______________________________________________________________________________RESUME
CONTEXTE : La Clinique Thoracique du Conseil municipal de Nairobi au Kenya.
OBJECTIFS : Déterminer l'efficience y compris les coûts et le rapport coût-efficacité de six stratégies de diagnostic utilisant le Ziehl-Neelsen (ZM) et la microscopie à fluorescence (FM).
SCHEMA : Etude transversale de 1.398 suspects de tuberculose se présentant dans une clinique thoracique spécialisée à Nairobi, qui ont subi trois examens d'expectoration par ZN et FM. Les cultures d'expectoration sur
milieu de Löwenstein-Jensen ont été utilisées comme étalon. L'analyse des coûts a inclus le coût pour les services
de santé et pour les patients.
RESULTATS : Sur les 1.398 sujets enrôlés, 993 (71%) ont eu une mise au point diagnostique complète comportant trois échantillons d'expectoration pour des frottis pour ZN et FM, une culture des expectorations et un cliché thoracique. Le processus global de diagnostic a permis de détecter 92% des cas à culture positive que l'on ait
utilisé le ZN ou la FM sur un, deux ou trois échantillons. Les diverses stratégies ont influencé le ratio des tuberculoses à bacilloscopie positive versus à bacilloscopie négative ; toutefois, la FM s'est avérée plus sensible que le
ZN (P<0,001). Les performances de la FM n'ont pas été affectées par le statut VIH du patient. Le coût par cas à
bacilloscopie positive correctement diagnostiqué, y compris les économies, a été de 40,30 US$ pour FM sur deux
échantillons par comparaison avec 57,70 US$ pour ZN sur trois échantillons.
CONCLUSION : La méthode FM utilisée sur un ou deux échantillons a un meilleur rapport coût-efficacité et
raccourcit le processus de diagnostic. En conséquence, un plus grand nombre de patients peuvent être soumis au
régime antituberculeux pour la tuberculose à bacilloscopie positive, ce qui contribue à améliorer le traitement et
à réduire la transmission de la maladie.
MOTS CLE : tuberculose ; diagnostic ; Ziehl-Neelsen ; microscopie à fluorescence ; coût-efficacité
PAR SUITE DE la pandémie du virus de l'immunodéficience humaine (VIH), partiellement renforcée par une défaillance de l'infrastructure et par la
pauvreté, l'augmentation des cas de tuberculose
(TB) a atteint des niveaux incontrôlables, mettant à
l'épreuve des ressources limitées, particulièrement
dans les grandes villes des pays de la région subsaharienne.1 A Nairobi, le nombre des cas TB a été
multiplié par trente au cours des 20 dernières années, atteignant presque 15.000 cas en 2001, ce qui
correspond à environ 600 cas par 100.000 habitants.2 Plus de 75% de ces tuberculeux vivent dans
des baraquements et des bidonvilles non officiels
qui hébergent plus de 50% de la population.3
Si l'on tient compte de cet énorme accroissement, la cible de détection de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) correspondant à 70% au
moins des nouveaux cas au sein de la stratégie
DOTS (traitement directement observé et de courte
durée) ne sera probablement pas atteinte avant
2013. Au niveau mondial, y compris le Kenya, le
taux global de détection des cas à bacilloscopie
positive n'est que d'environ 40%.4 Pour que la stratégie DOTS puisse réussir, il est dès lors essentiel
d'améliorer les efforts de détection des cas de TB.5
Les efforts faits pour renforcer la détection des cas
comportent l'implication du secteur privé et celle
des organisations non gouvernementales (ONG),
des compagnies d'assurance de santé et des prisons. Bien que la qualité des services de laboratoire TB soit fondamentale, on n'a pas fait assez
d'efforts pour évaluer le fonctionnement des outils
de diagnostic de laboratoire eux-mêmes. Les déficiences dans le processus de détection des cas ont
Auteur pour correspondance: Paul R Klatser, Department of Biomedical Research, KIT, Meibergdreef 39, Amsterdam 1105 AZ, The Netherlands. Tel: (+31) 20-566 5440. Fax: (+31) 20-697 1841. e-mail: [email protected]
[Traduction de l'article "A comprehensive comparison of Ziehl-Neelsen and fluorescence microscopy for the diagnosis of tuberculosis in a resource-poor urban setting" Int J Tuberc Lung Dis 2003; 7(12): 1163-1171.]
2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
un impact négatif sur la lutte antituberculeuse.6
Le Programme National de lutte contre la Lèpre
et la Tuberculose (PNLT) du Kenya respecte les
directives internationales pour la diagnostic de la
TB : celles-ci recommandent que les sujets suspects de TB soumettent au laboratoire trois échantillons d'expectoration, prélevés de préférence sur
deux jours successifs, pour examen des frottis à la
recherche des bacilles acido-résistants (BAAR).7-10
Toutefois, vu la lourde charge des suspects de TB
et les limitations de ressources, il est difficile de
respecter ces directives. Cela peut entraîner des
erreurs de classification ou de diagnostic de la TB et
soit un retard de diagnostic qui peut être évité,11,12
soit le non-traitement de cas TB positifs. En raison
de sa faible spécificité, l'utilisation des clichés thoraciques (RXT) pour le diagnostic de la TB à bacilloscopie négative contribue également à un nombre
significatif de cas de TB faussement positifs.2,12
L'examen microscopique direct des expectorations à la recherche de BAAR reste la pierre angulaire du diagnostic de la TB pulmonaire, aussi bien
dans les pays industrialisés que dans les pays à faibles ressources.13 La technique de coloration des
BAAR actuellement attribuée à Ziehl-Neelsen (ZN)
a évolué grâce aux contributions d'un grand nombre
de chercheurs14 et est restée la technique centrale du
diagnostic de TB pendant près de cent ans. Bien que
moins sensible que la culture, le frottis de ZN est
considéré comme rapide, peu coûteux et hautement
spécifique.7,15,16
La technique d'examen des BAAR par microscopie par fluorescence (MF) après coloration à l'auramine est devenue disponible au milieu des années
1940.17 Sa sensibilité s'est avérée plus élevée que
celle de ZN,18,19 la haute spécificité étant similaire.
Elle est utilisée largement dans les pays industrialisés mais son emploi dans les pays en développement est limité par suite des coûts élevés d'investissement et d'entretien.20,21 Principalement en raison
de la perception de ces raisons économiques, la
microscopie par fluorescence est utilisée principalement dans les situations où plus de 50 échantillons
sont examinés chaque jour.
La résurgence mondiale de la TB a réveillé l'intérêt pour l'amélioration de l'efficience de la détection de Mycobacterium tuberculosis par les laboratoires dans les échantillons cliniques, principalement dans des contextes à faibles ressources.9,22
Beaucoup de cet intérêt s'est orienté vers une amélioration du processus de diagnostic,23 ce qui inclut
l'évaluation du tableau clinique d'un patient suspect, l'examen des frottis d'expectoration et en cas
de nécessité, l'examen d'une radiographie lorsque
les résultats des expectorations sont négatifs.
Pour faire face aux charges de travail importan-
tes dans les laboratoires de TB, on a proposé une
utilisation plus large de la microscopie par fluorescence et/ou l'examen d'un plus petit nombre
d'échantillons. Bien que certains rapports suggèrent
que l'examen de deux échantillons puisse être adéquat,24-27 la plupart des autorités continuent à recommander l'examen de trois échantillons même
pour les patients chez lesquels le premier échantillon d'expectoration fourni sur place s'avère positif.24,25,28 La validité de cette recommandation et la
contribution relative du nombre d'échantillons examinés au rendement diagnostic doivent être étudiés
de manière adéquate. Il n'y a aucune preuve documentée sur laquelle on puisse fonder le choix du
processus de diagnostic le plus approprié dans un
contexte où à la fois TB et VIH sont très prévalents ;
cette connaissance est pourtant essentielle pour la
formulation d'une stratégie. Nous faisons état ici des
observations d'une étude complète sur l'efficience,
les coûts et le rapport coût-efficacité de l'ensemble
du processus de diagnostic de la tuberculose pulmonaire en utilisant les expectorations comme échantillon biologique principal (examen des frottis suivi
par RXT), avec une attention particulière sur la détection des cas à bacilloscopie positive grâce à l'utilisation de six stratégies basées sur les techniques de
ZN ou de MF, respectivement sur un, deux ou trois
échantillons d'expectoration.
METHODES
Au cours d'une période d'un an, entre mars 2000 et
mars 2001, les nouveaux cas suspects de TB, âgés de
15 à 65 ans, ont été enrôlés à la Rhodes Chest Clinic
(RCC), le centre de diagnostic le plus important de
Nairobiville qui fournit environ 20% des cas déclarés
de TB pour l'ensemble du Kenya. Tous les sujets
enrôlés ont subi les procédures de routine du diagnostic des expectorations respectant les directives du
PNLT.8 Celles-ci comportent trois étapes : sélection
des suspects, examen microscopique des frottis et
RXT pour les suspects à bacilloscopie négative,
comme décrit antérieurement.12
L'Institut Médical de Recherche du Kenya
(KEMRI) a donné son approbation éthique pour
cette étude. Un consentement écrit et éclairé a été
sollicité auprès de tous les patients qui y ont participé.
Population de l'étude
Un suspect de TB sur 10 se présentant au RCC a été
sollicité pour être volontairement dans l'étude. Une
conseillère-infirmière entraînée a obtenu le consentement éclairé de chaque patient et a insisté sur la
nécessité de fournir trois échantillons d’expectoration. Les accompagnements volontaires pré- et
post-test ont été donnés aux patients qui ont
consenti à subir le test VIH. Ceux qui l'ont refusé
ZM et la FM pour la diagnoses de TB
sont néanmoins restés éligibles pour l'étude.
On a recueilli trois échantillons d'expectoration
(sur place, tôt le matin et sur place) dans des flacons
« Universel » stériles pour expectoration. Un frottis
direct a été réalisé avec chaque échantillon et coloré
par la technique de routine ZN au RCC.30 Un
échantillon dupliqué a été examiné séparément au
Centre de Recherche des Maladies Respiratoires
(CRDR) du KEMRI à la fois par la microscopie par
fluorescence31 et par la culture. Le personnel du laboratoire du KEMRI ignorait les résultats du ZN. La
culture des expectorations a été pratiquée sur des
milieux de Löwenstein-Jensen comme décrit précédemment.16,31 Les cultures ont été examinées chaque
semaine pendant 8 semaines et classées comme
positives, contaminées ou négatives si aucune croissance n'apparaissait après 8 semaines d'incubation.
La culture a été utilisée comme « gold standard »
de référence pour évaluer la sensibilité et la spécificité des procédures impliquant les frottis. Un suspect
dont au moins un résultat de culture s'avérait positif a
été considéré comme un cas démontré de TB, tandis
qu'un suspect ayant trois cultures négatives a été
considéré comme un cas non-TB. Lorsque les cultures étaient contaminées dans un des trois échantillons
et les deux autres cultures négatives, un diagnostic n'a
pas pu être porté avec certitude ; ces cas ont été exclus de l'analyse.
Le diagnostic clinique final a reposé sur les résultats du frottis d'expectoration et les signes radiologiques. Conformément aux directives,8 un suspect
a été diagnostiqué comme TB à bacilloscopie positive si au moins un des trois frottis était positif pour
les BAAR et comme TB à bacilloscopie négative
lorsque les trois frottis étaient négatifs pour les
BAAR et lorsque des anomalies compatibles ou hautement compatibles avec une TB pulmonaire apparaissaient au RXT. Pour évaluer l'objectivité des lectures primaires des RXT lus au RCC, les mêmes
films ont été relus séparément par un radiologue
ignorant les diagnostics portés au RCC.
Le test VIH a été pratiqué sur 2 ml de sang veineux prélevé dans des tubes sous vide avec EDTA et
sur lesquels les anticorps ont été recherchés par la
technique Virinostika HIV Uniform II plus O de chez
Organon Teknika (Bixtel, Pays-Bas). Les résultats
ont été transmis confidentiellement aux patients après
un accompagnement volontaire approprié.
Coûts
Les coûts ont été calculés de la manière décrite antérieurement.22 En résumé, les coûts de travail ont été
calculés à partir des échelles de salaire et des indemnités du personnel. Les coûts en équipement et
en produits pour le dépistage de routine ont été inclus. Les coûts supportés par les patients ont été
estimés après interview d'un échantillon aléatoire de
3
124 suspects de TB le jour de leur première visite à
la polyclinique. Une deuxième interview a été pratiquée à la fin du processus de diagnostic lorsqu'ils
revenaient au RCC pour chercher les résultats de
leur expectoration. En outre, on a interviewé un
groupe de 127 patients sous traitement. Les questionnaires appropriés ont été fournis pour évaluer la
fréquence des visites, les coûts des examens directs,
les coûts du transport et les pertes de revenus.
L'analyse des coûts a été basée sur le coût de 50
lames de ZN par jour, de 80 lames de MF par jour
et de 50 RXT par jour, chacun par deux membres
entraînés du personnel. Les coûts calculés d'investissement et de travail ont été considérés comme
égaux dans les différentes stratégies. Une analyse
de sensibilité a été menée pour évaluer dans quelle
mesure les modifications circonstantielles pourraient
affecter le rapport coût-efficacité.
Analyse des données
Le personnel de laboratoire ignorait les données
cliniques. Les données des patients ont été enregistrées sur les formulaires de routine et sur un registre spécial, introduites dans une base de données
computérisées et analysées en utilisant les logiciels
de statistique appropriés. Le test 2 a été utilisé
pour comparer les données binaires. La régression
logistique a été pratiquée sur les patients TB à
culture positive afin d'évaluer l'impact du VIH sur
la performance des tests.
RESULTATS
Caractéristiques de la population
Au total, 1.398 suspects ont été enrôlés dans
l'étude. Chez 169 suspects, le résultat de la troisième culture des expectorations a fait défaut, ce
qui n'a pas permis d'établir le diagnostic final.
Chez 236 autres suspects, les résultats des RXTs
ont fait défaut, principalement parce qu'ils n'étaient
pas revenus chercher les résultats de leur expectoration, ce qui était exigé pour conclure à un diagnostic de TB à bacilloscopie négative. Chez 993
suspects (71%), la totalité des données était présente et comportait les résultats de trois échantillons par suspect pour le ZN, pour la MF et pour la
culture, ainsi que la lecture d'un cliché thoracique.
Les participants de sexe masculin (âge médian 30,0
ans, extrêmes 16-60, n = 596) étaient significativement plus âgés que leur contrepartie de sexe
féminin (âge médian 27,0 ans, extrêmes 24-56, n =
397) (P<0,001). Le ratio masculin/féminin parmi
les suspects atteint 1,5. La proportion d'individus
qui ont accepté les tests VIH volontaires a diminué
avec le temps : au total 29% des hommes et 24%
des femmes l'ont accepté. La séroprévalence du VIH
est significativement plus élevée chez les femmes
que chez les hommes (56% vs. 34%, P<0,05). Un
4 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Tableau 1 Rendement de la détection de la TB grâce à l'examen microscopique au ZN ou à la MF suivi par un RXT parmi les sujets
suspects de TB (n = 993), stratifié en fonction du résultat des cultures
Suspects à culture positive
ZN
n (5%)
Etape 1 : n. total des suspects enrôlés
Etape 2 : Examen microscopique des frottis pour
détection des TB à bacilloscopie positive
1er échantillon
2ème échantillon
3ème échantillon
Total
Etape 3 : RXT de détection des TB à bacilloscopie
négative
RXT : compatible avec TB
RXT : hautement compatible avec TB
Total des TB
Rendement Etape 2 + Etape 3
n. total de diagnostics de TB
n. total de diagnostics non-TB
MF
n (%)
554 (100)
Suspects à culture négative
MF
ZN
n (%)
n (%)
439 (100)
176 (53,0)
129 (38,8)
27 (8,1)
332 (59,9) (100)
370 (86,0)
57 (13,3)
3 (0,7)
430 (77,6) (100)
0
5 (62,5)
3 (37,5)
8 (1,8) (100)
68 (38,4)
109 (61,6)
177 (31,9) (100)
47 (56,6)
36 (43,4)
83 (15,0) (100)
100 (69,9)
43 (30,1)
143 (32,6) (100)
99 (70,2)
42 (29,8)
141 (32,1) (100)
151 (34,4)
288 (65,6)
148 (33,7)
291 (66,3)
509 (91,9)
45 (8,1)
513 (92,6)
41 (7,4)
4
2
1
7 (1,6)
ZN = Ziehl-Neelsen ; MF = microscopie par fluorescence ; RXT = cliché thoracique
échantillon aléatoire de 437 (47%) RXT a été relu
et a montré un niveau de concordance de 90%. ( =
0,74 ± erreur standard 0,039).
La culture a été positive chez 554 (56%) des
993 suspects de TB (Tableau 1) ; 332 patients
(59%) avaient été détectés par le ZN et 177 de
plus (31,9%) par le RXT alors que 430 (77.6%)
des cas TB avaient été détectés par la MF et que le
RXT y avait ajouté 83 autres (15.0%), soit environ
la moitié moins qu'avec le ZN comme technique
de diagnostic (Tableau 1). Il ressort également de
ce tableau que le premier échantillon testé par la
MF a détecté 370 (66,8%) des suspects à culture
positive obtenant ainsi un résultat meilleur que
pour l'ensemble des trois échantillons testés au
ZN. Le processus global de diagnostic a permis
l'identification de 509 patients (91,9%) en utilisant
l'examen microscopique au ZN et 513 (92,6%) en
utilisant la MF complétés tous deux par RXT.
Bien que le ZN et la MF aient été hautement
spécifiques (respectivement 98,2% et 98,4%), le
RXT a contribué à un grand nombre de cas de TB à
bacilloscopie négative (32%) dont les cultures
étaient négatives.
Au Tableau 2, on voit que pour l'ensemble des
échantillons individuels la sensibilité et la valeur
prédictive négative (VPN) de la MF sont supérieures à celles du ZN (P<10-6 pour l'ensemble des
comparaisons). La sensibilité (et la VPN) de la
MF sur l'examen du premier échantillon fourni sur
place a été supérieure (67%) à celle du ZN réalisé
sur les trois échantillons (60%). Des trois échantillons examinés, la sensibilité la plus élevée
concerne l'échantillon d'expectoration du petit
matin à la fois pour le ZN (47%) et pour la MF
(73%). La différence de sensibilité entre n'importe
quel examen avec un résultat positif et n'importe
quel examen avec deux résultats positifs est significativement différente, pour le ZN (respectivement 60% et 35%) mais pas pour la MF (respectivement 78% et 72%). Il n'y a pas de différence de
spécificité entre les deux techniques.
Tableau 2 Caractéristiques des tests de microscopie par Ziehl-Neelsen (ZN) et par la fluorescence (MF) stratifiées en fonction des
échantillons recueillis, avec la culture comme « gold standard » (n = 993)
Système de test
Sensibilité
% (IC95%)a
Spécificité
% (IC95%)
VPP
% (IC95%)
VPN
% (IC95%)
Examen microscopique par ZN
1er échantillon sur place
2ème échantillon du petit matin
3ème échantillon sur place
N'importe quel cas avec un résultat positif
N'importe quel cas avec deux résultats positifs
32 (28-36)
47 (43-51)
31 (27-35)
60 (57-63)
35 (32-38)
100 (100-100)
99 (98-100)
99 (98-100)
98 (98-99)
100 (99-100)
100 (100-100)
98 (97-100)
97 (95-100)
98 (97-99)
99 (98-100)
54 (50-57)
60 (56-63)
53 (50-57)
66 (63-69)
55 (52-58)
Examen microscopique par MF
1er échantillon sur place
2ème échantillon du matin
3ème échantillon sur place
N'importe quel cas avec un résultat positif
N'importe quel cas avec deux résultats positifs
67 (63-71)
73 (70-77)
70 (66-74)
78 (75-80)
72 (69-75)
99 (98-100)
99 (99-100)
99 (98-100)
98 (98-99)
99 (99-100)
99 (98-100)
99 (98-100)
99 (98-100)
98 (98-99)
99 (99-100)
70 (67-74)
75 (71-78)
72 (69-76)
78 (75-80)
74 (71-77)
VPP = valeur prédictive positive ; VPN = valeur prédictive négative
ZM et la FM pour la diagnoses de TB
5
Tableau 3 Caractéristiques des tests de microscopie par Ziehl-Neelsen (ZN) et par fluorescence (MF) stratifiés en fonction du statut
VIH, avec la culture comme « gold standard » (n = 339)
Sensibilité
% (IC95%)
Spécificité
% (IC95%)
VPP
% (IC95%)
VPN
% (IC95%)
VIH négatif
ZN-positif *
MF-positif *
57 (50-64)
84 (79-89) †
98 (97-100)
98 (95-100)
96 (93-98)
96 (93-98)
79 (73-84)
91 (87-95)
VIH-positif
ZN-positif
MF-positif
36 (28-44) ‡
73 (65-80) †
100 (100-100)
100 (100-100)
97 (94-100)
100 (100-100)
70 (63-78)
85 (79-91)
* N'importe lequel des trois échantillons d'expectoration est positif pour le test.
†
MF significativement plus élevée par comparaison avec le ZN chez les séronégatifs pour le VIH (P = 0,003) et chez séropositifs pour le
VIH (P = 0,0001).
‡
ZN-positif significativement plus bas chez les séropositifs pour le VIH par comparaison avec le ZN chez les séronégatifs pour le VIH (P = 0,01)
VIH = virus de l'immunodéficience humaine ; VPP = valeur prédictive positive ; VPN = valeur prédictive négative.
ficativement plus faible chez les suspects séropositifs
pour le VIH que chez les séronégatifs (P = 0,01). La
régression logistique prenant en compte l'âge et le
sexe sur les 158 suspects de TB, positifs à la culture
Au Tableau 3, il apparaît que quel que soit le statut VIH, la MF est plus sensible que le ZN (P = ,003
pour les séronégatifs pour le VIH et P = 0,001 pour
les séropositifs). La sensibilité du ZN est signi-
Tableau 4 Coûts (US$) et rapport coût-efficacité du dépistage de 1.000 suspects de TB par l'examen microscopique direct des frottis
(ZN et MF) sur un, deux et trois échantillons d'expectoration, suivi par un cliché thoracique
Composantes du coût
par 1.000 suspects de TB
n. total des cas avec culture positive
Coût services de santé
Coûts de la polyclinique
Coûts du travail
Equipement et matériel
Coût total polyclinique
Coûts service laboratoire*
Coûts travail
Coûts investissement
Frais fonctionnement
Coût total laboratoire
Coûts radiologie †
Coûts travail
Coûts investissement
Frais fonctionnement
Coût total radiologie
Total coûts pour le service de santé
Coûts pour le patient ‡
Déplacement
Nourriture
Perte de revenus
Antibiotiques
Coût total pour le patient
Coût total du dépistage
Nombre total de cas détectés correctement
% TB bacilloscopie positive
% TB bacilloscopie négative
Coûts/cas correctement diagnostiqué
Coûts pour le service de santé
Coûts pour le patient
Cas à culture positive non détectés (%)
Nombre total de faux diagnostics
Dépenses évitées §
Coûts/ cas correctement diagnostiqué
incluant les dépenses évitées
er
ZN sur 1
échantillon
er
ème
ZN sur 1 et 2
échantillons
ZN sur 1er,
2ème et 3ème
échantillons
er
MF sur 1
échantillon
MF sur 1er
et 2ème
échantillons
MF sur 1er,
2ème et 3ème
échantillons
558
558
558
558
558
558
5691
293
5984
5691
293
5984
5691
293
5984
5691
293
5984
5691
293
5984
5691
293
5984
973
135
569
1677
973
135
1137
2245
973
135
1706
2814
608
169
1009
1786
608
169
2019
2796
608
169
3028
3805
154
237
1601
1992
9653
154
237
1339
1730
9959
154
237
1278
1669
10467
154
237
1212
1603
9374
154
237
1097
1488
10268
154
237
1090
1481
11270
1676
110
3817
466
6070
15723
512
33
67
30,7
18,8
11,8
8
135
(6897)
2438
161
5553
677
8828
18787
515
60
40
36,5
19,3
17,1
8
138
718
2895
191
6594
804
10484
20951
513
66
34
40,8
20,4
20,4
8
140
standard
1676
110
3817
466
6070
15443
512
74
26
30,2
18,3
11,9
8
136
1968
2438
161
5553
804
8828
19097
515
84
16
37,0
19,9
17,1
7
136
1626
2895
191
6594
350
10484
21754
516
85
15
42,1
21,8
20,3
7
138
1455
44,2
35,1
26,3
33,9
39,2
40,8
* En supposant un amortissement de 5 ans pour les microscopes et de 10 ans pour l'équipement radiologique.
†
Tous les patients qui ne sont pas positifs à la bacilloscopie subissent un RXT pour établir le diagnostic de TB à bacilloscopie négative.
‡
Déplacement vers la clinique pour trois examens en moyenne 3,8 fois. Déplacement supposé pour un examen : 2,2 fois, pour deux
examens : 3,2 fois
§
Coûts totaux pour traiter un patient à culture négative (considéré comme faux-positif) : 288 US$
ZN = Ziehl-Neelsen ; MF = microscopie par fluorescence
6 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Tableau 5 Coûts (US$) et rapport coût-efficacité de la détection de TB à bacilloscopie positive chez 1.000 suspects de TB grâce à
l'examen microscopique direct (ZN et MF) sur un deux ou trois examens d'expectoration
Composantes du coût pour 1.000 suspects
de TB
n. total des cas à culture positive
Coûts pour le service de santé
Coût total polyclinique
Coût total laboratoire
Coût total service de santé
Coûts pour le patient
Coût total pour le patient
Coût total du dépistage
n. total de cas correctement diagnostiqués (%)
Ratio
Coûts/cas correctement diagnostiqué
Coûts pour le service de santé
Coûts pour le patient
Coût total par patient faux-positif
Faux-positifs/1.000 suspects
Coût total pour les cas faux-positif/méthode
Coût total incluant le traitement des faux-positifs
Dépenses évitées
Coût par cas correctement diagnostiqué,
incluant les dépenses évitées
Cas à culture positive non détectés (%)
er
ZN sur 1
échantillon
ZN sur 1er
ZN sur 1er,
ème
et 2 échantil- 2ème et 3ème
échantillon
lon
MF sur 1
échantillon
MF sur 1er <
et 2ème échantillon
er
MF sur 1er, 2ème
et 3ème
échantillon
558
558
558
558
558
558
5984
1677
7661
5984
2245
8229
5984
2814
8798
5984
1786
7771
5984
2796
8780
5984
3805
9789
6070
13730
177 (32)
8828
17058
307 (55)
77,6
44,9
34,3
286
4
1262
14993
1262
55,5
26,8
28,7
286
4
1262
18320
1262
70,5
381 (68)
10484
19282
334 (60)
57,7
26,3
31,4
286
9
2524
21806
standard
51,4
251 (45)
57,7
224 (40)
6070
15139
373 (67)
8828
18095
430 (66)
10484
20273
433 (78)
40,6
20,8
16,3
286
4
1262
16402
1262
42,1
20,4
20,5
286
6
1767
19863
757
46,8
22,6
24,2
286
7
2020
22292
505
37,2
185 (33)
40,3
128 (23)
45,7
125 (22)
ZN = Ziehl-Neelsen ; MF = microscopie par fluorescence
et testés pour le VIH a montré que la probabilité de
positivité du frottis est plus faible chez les séropositifs que chez les séronégatifs pour le VIH et que
cet effet est plus marqué quand on utilise le ZN
(odds ratio ajusté pour l'âge et le sexe [ORa] 0,66 ;
intervalle de confiance [IC] 95% 0,32-1,36 ; P =
0,26) par comparaison avec la MF (ORa = 0,76 ;
IC95% 0,32-1,76 ; P = 0,52).
Au Tableau 4 figure l'analyse de coût pour l'investigation de 1.000 suspects en utilisant le ZN ou
la MF sur un, deux ou trois échantillons d'expectoration en fonction des différentes stratégies des
tests. Lorsque l'on applique la microscopie du frottis suivie du RXT, quels que soient la technique
utilisée et le nombre d'échantillons examinés, un
nombre similaire de patients aurait été correctement détecté par n'importe laquelle des six stratégies, ne laissant non détectés que 7 à 8% des sujets à
culture positive. Toutefois des différences ont été
observées dans le pourcentage de patients TB à bacilloscopie positive, s'étendant de 33% de bacilloscopies positives après ZN sur un échantillon, à 85%
après MF sur trois échantillons. Le nombre de patients détectés mais négatifs à la culture (patients TB
faux-positifs) apparaît au Tableau 4 de même que le
coût nécessaire pour diagnostiquer correctement un
cas de TB y compris les économies résultant du
non-traitement des sujets à culture négative par
comparaison avec la procédure standard de routine.
L'analyse des coûts pour la détection des seuls
cas à bacilloscopie positive apparaît au Tableau 5.
Les patients supportent la plus grande partie de
l'ensemble des coûts du dépistage. Les coûts par
cas diagnostiqué correctement diffèrent considérablement selon les stratégies, principalement par suite
des différences dans la détection des cas à bacilloscopie positive entre les diverses stratégies. On peut
détecter jusqu'à plus de 30% de cas à bacilloscopie
positive de plus avec la MF qu'avec le ZN. Lorsque l'on prend en compte les sommes épargnées,
les différences en matière de rapport de coûtefficacité entre les différentes stratégies sont plus
prononcées encore, s'étalant de 37,20 US$ à 70,50
US$ respectivement pour la MF et le ZN en cas
d'examen d'un échantillon.
Au Tableau 6 figure l'analyse de sensibilité
comparant deux stratégies (MF sur deux et ZN sur
trois échantillons) avec ajustement pour les différents aspects comme l'utilisation des RXT, la prévalence des TB à culture positive, la charge de
travail du laboratoire et les coûts en matière d'investissement et de travail. Dans tous les ajustements
hormis la radiologie, la proportion détectée de cas à
bacilloscopie positive reste la même (ZN3 60% et
MF2 77% des suspects à culture positive). L'utilisation du RXT après l'examen des frottis semble l'option qui a le meilleur rapport coût-efficacité mais
avec l'inconvénient de la mise sous traitement d'un
nombre élevé de cas à culture négative. Le coût par
cas correctement diagnostiqué augmente lorsque la
prévalence parmi les suspects ou la charge de travail
diminuent mais le ratio entre les deux stratégies reste
similaire. Même si l'on augmentait le prix du microscope à fluorescence à un montant irréaliste, MF2
ZM et la FM pour la diagnoses de TB
7
Tableau 6 Analyse de sensibilité basée sur le dépistage de 1.000 cas suspects de TB
Coûts (US$) par
patient M+ correctement
diagnostiqué
Composantes
Situation actuelle
Ajustement
A
B
Pas d'ajustement
Non pratiquée
55,8%
Pas d'ajustement
RXT pour tous les
suspects M(-)
20%
55,8%
Suspects 50, ZN 50, MF 80
Suspects 50, ZN 50, MF 80
Suspects 50, ZN 50, MF 80
40%
Suspects 50, ZN 30, MF 100
Suspects 30, ZN 30, M F60
Suspects 10, ZN 10, MF10
Idem pour ZN3 et MF2
Inclus
ZN 1350, FM 4050
33% de moins pour MF2
Exclus
ZN 1350, MF 40.500
C
D
E
F
G
H
I
J
K
L
M
Radiologie
Prévalence TB
B+C
Prévalence TB
Charge de travail quotidienne
Charge de travail quotidienne
Charge de travail quotidienne
E+G
C+H
Coûts du travail
Coûts pour le patient
Prix du microscope en US$
ZN3
58
41*
161
114
81
60
71
139
99
388
58
26
58
Coûts (US$) par
patient M(+) correctement diagnostiqué
incluant
les dépenses évitées
FM2 Ratio ZN3
FM2
Ratio
42
37
0,7
0,9
58
41
40
34
0,7
0,8
117
103
59
42
51
108
72
300
40
20
45
0,7
0,9
0,7
0,7
0,7
0,8
0,7
0,8
0,7
0,8
0,8
161
114
81
60
71
139
99
388
58
26
58
108
87
55
40
50
106
168
291
38
19
43
0,7
0,8
0,7
0,7
0,7
0,8
0,7
0,7
0,7
0,7
0,7
* Les Patients incluent les TB pulmonaires tant à bacilloscopie positive que négative
ZN3 = Ziehl-Neelsen sur trois échantillons ; MF2 = Microscopie par fluorescence sur deux échantillons
RXT = cliché thoracique ; M(+) = bacilloscopie positive ; M(-) = bacilloscopie négative
garderait un rapport coût-efficacité de 30% supérieur
à ZN3. Il en est de même lorsque les coûts supportés
par les patients sont exclus.
DISCUSSION
La détection des cas TB est une composante importante de la stratégie DOTS préconisée par
l'OMS.34 Dans des contextes à faibles ressources,
là où le fardeau de la TB est le plus élevé, la valeur
de n'importe quelle procédure de diagnostic dépend
de son coût et de son efficience. Une détection
efficiente et rapide, suivie d'un traitement adéquat
réduit de manière drastique la transmission de la
TB. Dès lors, il est important de minimiser les retards tant de diagnostic que de traitement pour
améliorer l'impact de n'importe quel programme de
lutte antituberculeuse. Alors que l'intérêt porté à
l'introduction de nouvelles techniques plus efficientes de diagnostic de la TB soit compréhensible,
dans les contextes à forte prévalence,6 les coûts et
la formation du personnel restent des obstacles
importants à leur application. L'examen des frottis
d'expectoration est relativement peu coûteux mais
n'arrive qu'à une faible sensibilité au niveau opérationnel, partiellement en raison de la nonadhérence aux directives. Dans une grande ville,
où 15.000 cas de TB existent chaque année, près de
60 techniciens temps plein seraient nécessaires pour
exécuter chaque jour l'examen microscopique des
frottis au ZN si l'on respectait les directives. Pour
réduire la charge de travail des services de laboratoire et main tenir et améliorer l'efficience du processus de diagnostic, des alternatives aux directives
actuelles (ZN sur 3 échantillons) devraient être explorées. Cette étude montre que le processus de
diagnostic incluant un examen CXT approprié a
détecté 92% de tous les cas à culture positive, quelle
que soit la technique utilisée pour l'examen microscopique des frottis.
La sensibilité du ZN reposant sur trois frottis
est de 60% (IC95% 57-63) et celle de la MF de
78% (IC95% 75-80). Ces observations sont
concordantes avec d'autres.5,25 Une étude au Sénégal a montré une différence moins prononcée entre
les résultats du ZN et de la MF, différence qui était
uniquement attribuable au groupe d'échantillons
comportant de petits nombres de bactéries, mais au
cours du suivi chez les patients, la différence de
rendement était similaire à celle signalée ici.35
Parmi ceux diagnostiqués comme TB à bacilloscopie positive, la plupart ont été détectés dans le
premier échantillon fourni sur place (ZN 53%, MF
86%). Les deuxième et troisième échantillons ont
contribué respectivement à 39% et 8% supplémentaires pour le ZN comparés à 13%et 0,7% pour la
MF. Pour les deux techniques, la sensibilité la meilleure est obtenue avec l'expectoration du petit matin (ZN 47% et MF 73%), ce qui confirme une étude
au Bangladesh.27
La sensibilité du ZN est significativement plus
faible chez les suspects séropositifs pour le VIH
que chez les séronégatifs, comme cela avait été
décrit antérieurement.36 Le statut VIH n'a pas d'impact significatif sur la performance de la MF, une
différence qui persiste même après correction pour
l'âge et le sexe. Dès lors la MF s'avère une techni-
8 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
que plus sensible que le ZN en raison de son aptitude à détecter de faibles charges bacillaires dans
les expectorations des sujets séropositifs pour le
VIH. Cela concorde avec le meilleur rendement de
la MF par rapport au ZN dans les échantillons à
plus faibles décomptes bacillaires signalé dans une
étude au Sénégal.35
Malgré la prévalence élevée du VIH dans la
zone de l'étude, on a détecté plus de cas de TB à
bacilloscopie positive par la MF que par le ZN ;
ceux-ci s'étalaient entre 67% avec un examen d'expectoration et 78% avec trois. Par voie de conséquence, un plus grand nombre de patients à bacilloscopie positive peuvent être mis sous traitement
après MF. De plus, la MF s'avère une technique
dont le rapport coût-efficacité est meilleur que
celui du ZN. L'application de la MF sur le premier
échantillon d'expectoration fourni sur place suivi
par le RXT a dépisté un nombre de cas correctement diagnostiqués similaire à celui obtenu par le
ZN pratiqué sur trois échantillons, et a augmenté
en même temps la proportion de cas à bacilloscopie
positive. Pour la détection des cas à bacilloscopie
positive, la MF appliquée sur le premier échantillon
a un rapport coût-efficacité environ deux fois supérieur à celui du ZN appliqué sur trois échantillons.
La prévalence des cas de TB confirmés par la
culture dans la population de notre étude, déjà décrite ailleurs,12 est très élevée (56%), ce qui suggère
une pré-sélection des cas suspects. Une prévalence
plus habituelle d'environ 40% augmenterait le coût
absolu par patient détecté mais non la différence
relative entre les diverses stra-tégies de diagnostic.
Même dans de tels contextes, l'analyse de sensibilité
a montré également que la MF a de meilleures performances que le ZN. Le coût élevé du microscope
à fluorescence, fréquemment utilisé comme argument contre son utilisation n'a que peu d'influence
car les coûts d'investissement du microscope à fluorescence ne représentent qu'une proportion insignifiante de l'ensemble des coûts de dépistage. L'utilisation du microscope à fluorescence entraîne des
économies tant pour le service de santé que pour le
patient. Les services plus conviviaux à l'égard du
patient peuvent susciter un recours précoce aux
soins des suspects de TB et les réductions de transmission de la TB qui en résultent.
Le diagnostic de TB à bacilloscopie négative repose principalement sur les résultats du RXT. Dans
notre contexte, tous les suspects chez lesquels trois
frottis avaient été négatifs à la bacilloscopie ont été
soumis à un RXT. Comme signalé précédemment, la
spécificité des RXT dans ce groupe de patients est
faible (67%).12 En raison de cette faible spécificité,
les deux stratégies de diagnostic ont ramené environ
20% de cas à culture négative (diagnostic en excès),
dont beaucoup sont susceptibles de ne pas être des
cas de TB. Quoiqu'une certaine proportion dans ce
groupe puisse être atteinte de TB, ceci est moins
grave que le fardeau que représenterait le traitement
de cas faussement positifs.12 Les mesures préventives
écartant l'utilisation des RXT ou améliorant la qualité
de la lecture des clichés sont dès lors indispensables.12 De nouvelles procédures de diagnostic plus
sensibles s'imposent pour les 8% de cas à culture
positive qui ont échappé à n'importe laquelle des
procédures actuelles de diagnostic.
Il ressort de cette étude que la MF est une technique plus sensible que le ZN dans les conditions du
terrain. Dans un contexte comme celui de Nairobi
avec un grand nombre de suspects de TB et une prévalence élevée du VIH, où l'on peut s'attendre à
beaucoup de patients dont les charges bacillaires sont
faibles, nous recommandons l'utilisation de la MF sur
deux échantillons. La MF pratiquée sur le premier
échantillon fourni sur place est déjà supérieure au ZN
sur trois échantillons, mais un deuxième examen par
MF sur l'échantillon du petit matin ramène 10% de
cas à bacilloscopie positive en plus. Comme d'autres
études l'avaient montré, un troisième échantillon ne
contribue pas beaucoup au diagnostic.26 Grâce à la
MF, un plus grand nombre de patients peuvent bénéficier d'un régime de traitement pour les TB à bacilloscopie positive, ce qui peut contribuer à une amélioration des résultats du traitement. Un autre avantage de la MF apparaît dans notre étude : à l'opposé
du ZN, sa sensibilité est indépendante du statut VIH
du patient. En outre, la MF est conviviale pour l'utilisateur et lorsqu'on ne pratique l'examen que sur un
seul échantillon fourni sur place, un plus grand nombre de patients adhéreront au processus de diagnostic
avec comme résultat une diminution des perdus de
vue. De plus, un nombre plus élevé de cas à bacilloscopie positive peuvent être décelés dans ces conditions. Finalement, nous suggérons de modifier la définition de TB à bacilloscopie positive depuis « tout
patient avec deux frottis positifs » vers « tout patient
avec au moins un frottis positif » comme cela a déjà
été recommandé antérieurement.27
Remerciements
Nous souhaitons remercier le personnel de la Rhodes Chest Clinic,
le Nairobi City Council et le Centre de Recherche des Maladies
Respiratoires, KEMRI, pour leur participation à ce projet.
Cette étude a bénéficié d'un fonds provenant du Ministère
néerlandais de la Coopération au développement (DGIS).
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