Riad Sattouf - L` arabe du futur

15/1/2015
Riad Sattouf - L' arabe du futur
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L’ arabe du futur
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Riad Sattouf - L' arabe du futur
in Illustration, News / by admin
13 janvier 2015
A mon sens, l’un des chef d’oeuvres de l’année 2014
Une jeunesse au Moyen-Orient entre 1978 et 1984 (Tome 1)
L’actualité récente pose nécessairement la question de l’implication et de sa forme. Si comme nombre
d’entre nous je puis dire que « je suis Charlie » je ne pense pas utile dans mon cas, de redire ce qui à
déjà été très bien dit à maintes reprises ces derniers jours. Je ne peux d’ailleurs que trop vous inciter à
lire la lettre du Petit Web à ce propos.
Puisqu’il s’agit bien là de liberté d’expression et de dessin, j’ai souhaité revenir sur un ouvrage qui, à
mon sens, est l’un des chef d’oeuvres de l’année 2014 : L’ARABE DU FUTUR de Riad Sattouf.
« En 1980, j’avais 2 ans et j’étais un homme parfait »
L’arabe du futur
Autobiographique, cet ouvrage retrace la jeunesse de Ria Sattouf au
Moyen-Orient entre 1978 et 1984
Cet ouvrage n’a pas vocation à être un pamphlet polémiste et c’est avec beaucoup de subtilité que Riad
nous donne à revisiter un pan de notre histoire contemporaine par le truchement des yeux de l’enfant
qu’il était. Jamais jugeant, presque clinique dans la narration, distancié assurément, Riad décrit les
péripéties de sa famille, guidée par un père tiraillé entre une éducation universitaire parisienne (la
Sorbonne) et une éducation traditionnelle inhérente à la société syrienne dont il était originaire.
« Mon père était pour la panarabisme. Il était obsédé par l’éducation des Arabes. Il pensait que
l’homme arabe devait s’éduquer pour sortir de l’obscurantisme religieux »
C’est en ces quelques mots que Riad décrit son père et plante du même coup le décors de sa cellule
familiale.
Un périple paradoxalement ubuesque et tranquille
Au sein de son univers si caractéristique (« Pascal Brutal » mais également les films « Les beaux
gosses » et « Jacky au royaume des filles »), Riad Sattouf nous emmène dans une sorte de périple à la
fois ubuesque et tranquille. Cette narration d’apparence nonchalante ne sert qu’à rendre plus cinglante
l’absurdité d’une enfance vécue sous le joug d’une éducation pour le moins chaotique, tiraillée entre
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aspiration a l’élévation intellectuelle et patriarcat obscurantiste. Le père de Riad, qui aurait souhaité
être médecin « si la vue du sang ne lui avait pas fait tourner de l’oeil, » a choisi d’être « docteur ».
C’est donc après l’obtention de sa thèse (« L’opinion publique française à l’égard de l’Angleterre de
1912 à 1914ʺ″) sanctionnée d’une mention « Honorable » qu’Abdel-Razak décide de postuler pour un
poste de maître basé à Tripoli. C’est sur ces entrefaits que s’engage ce roman graphique.
Un portrait sans concession jamais moralisateur
Avec une forme de tendresse parfois acerbe, souvent teintée d’une indulgence enfantine faussement
candide, Riad Sattouf décrit sa jeunesse dans la Libye de Kadhafi puis en France et en Syrie. Les
dessins dénués d’emphase, alliant la ligne claire à une palette de couleurs tranchées, mettent l’accent
sur la dimension émotionnelle et psychologique de son parcours. Aucunement moralisateur, il dresse
un portrait sans concession des sociétés qu’il traverse et des protagonistes fortuits qui les composent. A
grand renfort de saillies truculentes, il met en exergue la dimension fondamentalement antinomique qui
oppose nos aspirations idéologiques et l’impuissance des sociétés à faire preuve de clairvoyance (je
pense notamment aux bulles traitant de son passage dans les écoles françaises).
Par la singularité de cette enfance dépeinte au vitriol, Riad Sattouf trace, il me semble, les contours
d’une vision holisthique de notre société. Comment ne pas s’interroger en effet sur le rôle de
l’individu, de son implication. Tout à la fois seul à décider en son âme et conscience, seul à devoir
opérer ses choix, et pourtant maillon essentiel au service actif ou passif de desseins qui le dépassent.
Comme par un mouvement de balancier, nous oscillons entre une description impartiale des faits tels
que les percevait Riad et les aspirations subjectives mâtinées de l’idéologie d’un père déphasé,
immature, au comportement erratique, incapable de digérer ses propres incohérences, qui mène la
barque de sa famille avec la dextérité d’un capitaine aveugle.
Un ouvrage aux intonations singulières
D’un point de vue graphique cet ouvrage engagé n’est pas sans m’évoquer Quino et son emblématique
Mafalda. Avec une économie de moyens, un dessin à la ligne claire, épuré, combiné à une palette
colorimétrique réduite, cette BD est un petit bijou pictural, un livre plein d’humanité à posséder
absolument
Riad Sattouf
Nė à Paris en 1978, Riad Sattouf est d’origines franco-syrienne. Après avoir passé sa prime jeunesse
en Lybie et en Syrie il étudie en France, tout d’abord en Bretagne puis à Paris à l’école des Gobelins en
section animation. Passionné comme je l’ai moi même été par la série animée « les mystérieuses cités
d’or » (dixit Wikipedia) il est l’auteur de nombreuses bandes dessinées dont Retour au collège, Pascal
Brutal (Fauve d’or 2010), La vie secrète des jeunes, Petit Verglas, Les Pauvres Aventures de Jérémie,
Pipit Farlouse, Laura et Patrick et L’arabe du futur. Egalement réalisateur Riad Sattouf compte deux
films à son actif : « Les Beaux Gosses » et « Jacky au royaume des filles« .
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