du chien - chatterie

Transcription

du chien - chatterie
C
éline Peccavy est avocat au Barreau de Toulouse et diplômée
de l’école de formation du Barreau de Paris en 2001.
Petite-fille de vétérinaire, elle a orienté très tôt
sa formation sur les animaux de compagnie.
Aujourd’hui, son cabinet est spécialisé dans ce domaine.
Elle travaille en étroite collaboration avec la profession vétérinaire
et notamment avec les experts auprès des tribunaux.
Dans ce cadre, elle est amenée à participer régulièrement à la
rubrique « Gestion » de la revue professionnelle
« La semaine vétérinaire ».
Elle a collaboré également de nombreuses années à la rédaction
de la rubrique juridique de diverses revues canines.
GUIDE
JURIDIQUE
DE LA VENTE
DU CHIEN
ET DU
CHAT
GUIDE JURIDIQUE DE LA VENTE DU CHIEN ET DU CHAT
q Maître Céline Peccavy
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Maître Céline
q Remerciements de l’auteur
Merci à Royal Canin pour m’avoir permis d’écrire ce livre,
et à Julien et Corentin pour leur patience.
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Coordination éditoriale : Laurent Cathalan assisté d’Ellinor Gunnarsson
Directrice artistique : Isabelle Sportès
Illustrations : Edouard Cellura
Maître d’œuvre technique : Buena Média Plus
2008 © Groupe Royal Canin
q Crédits Photos
Couverture : Labrador : Jean-Michel Labat - Abyssin : C Renner
Page 1 : Jean-Michel Labat - Page 5 : Benjamin Py - Page 11 : Delphine Debressy
Page 13 : Pali Rao - Page 19 : Jean-Michel Labat - Page 23 : Claudio Divizia
Page 25 : Marcus Clackson - Page 31 : Khz - Page 37 : Willie B. Thomas
Page 39 : Hervé Thouroude - Page 43 : Yves Lanceau - Page 49 : Jean-Michel Labat
Pages 51 et 55 : Olivier Tuffé - Page 77 : Imagine - Page 81 : Sarah Caney
Page 85 : Waldemar Dabrowski - Page 99 : Philippe Psaila - Page 109 : Jean-Michel Labat
Page 124 : Yves Lanceau - Page 133 : Betweenstap
q Signification des pictos
La balance correspond à un article de loi.
Le petit marteau correspond à un arrêt ou à un jugement rendu par une Cour,
un tribunal, etc. Le gros marteau correspond à une succession d’arrêts ou de jugements.
Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur
ou des ayants droits ou de ses ayants causes est illicite selon les dispositions du Code de la propriété.
Intellectuelle (Article L. 112-4) et constitue une contrefaçon réprimée par le Code pénal. Seules sont
autorisées (Article L. 122-5) les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non-destinées à une utilisation collective, ainsi que les analyses et courtes citations justifiées
par le caractère critique, pédagogique ou d’information de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées
sous réserve toutefois des dispositions des articles L. 122-10 à L. 122-12 du Code de la propriété intellectuelle relative à la reproduction par reprographie.
II
PRÉFACE
epuis plus de 40 ans, la passion du Chat et du Chien de race anime
D
les équipes de Royal Canin.
De cette passion est née notre philosophie : Connaissance et Respect.
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Base de notre partenariat avec les éleveurs, la connaissance des spécificités du
Chien et du Chat, le respect de leur animalité et de leurs besoins nutritionnels
ont permis à notre Centre de Recherche et Développement de proposer aux
éleveurs de nombreuses solutions nutritionnelles innovantes.
C’est grâce à cette collaboration exemplaire, que Royal Canin a été la première
Marque à développer des programmes alimentaires innovants, d’une précision
nutritionnelle unique, pour aider les Chats et les Chiens à exprimer le meilleur
d’eux mêmes.
Pour Royal Canin, le partenariat, c’est aussi le partage de la connaissance, ainsi,
ce guide s’inscrit dans la série des guides pratiques : Guide pratique de l’élevage
canin, Guide pratique de l’élevage félin, Guide pratique d’éducation du chien,
Guide pratique des maladies en élevage canin, ........ qui sont tous devenus des
ouvrages de référence dans le monde félinophile et cynophile, bien au-delà de
nos frontières.
Aujourd’hui, les éleveurs ont besoin de sécuriser la vente de leurs Chiots ou de
leurs Chatons, pour répondre aux attentes de leurs clients, en conformité avec
le cadre légal.
Royal Canin, en association avec un avocat spécialisé, vous présente ce nouveau
Guide qui a pour vocation de vous aider à réussir vos ventes, en toute connaissance des lois françaises actuelles concernant l’animal de compagnie.
Par son sujet, ce guide est une grande première dans l’aide qu’il apporte aux éleveurs français, qu’ils soient passionnés de Chats ou de Chiens.
Faire progresser la connaissance, apporter toujours plus de services aux éleveurs,
notre passion est toujours intacte !
Direction Générale
Royal Canin France
III
INTRODUCTION
Du particulier
au professionnel de la vente
q
L’enjeu est de taille. Etre particulier ou être professionnel de la vente aujourd’hui
ne conduit pas du tout aux mêmes droits ni surtout aux mêmes obligations. A
l’heure où l’on descend régulièrement dans la rue pour lutter contre la réduction
des droits acquis, le vendeur particulier d’animaux de compagnie n’est pas encore
menacé. Le vendeur professionnel, lui, au contraire, voit sa marge de manœuvre
réduire comme une peau de chagrin.
La question fondamentale en matière de vente de chiens et chats pourrait être
posée de la manière suivante : où finit l’amateurisme et où commence la professionnalisation de la vente d’animaux de compagnie ?
La loi du 6 janvier 1999 a été pour cela d’un grand secours car elle a enfin apporté
une réponse claire à cette question longtemps restée controversée. Le principe
posé par le texte de loi est aujourd’hui repris dans l’article L. 214-6 du Code rural
qui dispose :
« On entend par élevage de chiens ou de chats l’activité consistant à détenir des femelles
reproductrices et donnant lieu à la vente d’au moins deux portées d’animaux par an. »
S’il y a bien deux termes à retenir dans cette définition ce sont les mots « vente »
et « deux ». En effet, celui qui vend les chatons de la seule portée obtenue sur l’année ne peut être considéré comme professionnel. De la même manière, celui dont
deux chiennes reproductrices ont une portée sur la même année mais qui ne vend
que les animaux issus d’une seule portée et garde les autres pour lui ne peut non
plus être considéré comme professionnel. La condition se veut cumulative : il
faut à la fois qu’il y ait vente et que les animaux proviennent de deux portées
différentes.
La barrière est donc vite franchie et le nouveau professionnel rapidement tenu à
de biens plus lourdes obligations.
La loi fait ainsi une première différence quant aux documents qui doivent être
fournis à l’acheteur. Les formalités imposées au particulier sont plus que simplifiées
puisqu’il lui est simplement demandé de délivrer à l’acquéreur un certificat
de bonne santé établi par un vétérinaire. Ce certificat de bonne santé, en
revanche, ne fait pas partie de la liste des documents obligatoires pour le professionnel. Celui-ci se doit par contre de remettre au nouveau propriétaire une
attestation de cession et un document d’information sur les caractéristiques et les
besoins de l’animal contenant également, au besoin, des conseils d’éducation,
document en relation directe avec l’obligation de conseil et d’information qui
pèse désormais sur tout vendeur professionnel, quelle que soit sa branche.
IV
Autre différence non négligeable cette fois quant aux garanties après la vente.
Si le vendeur professionnel ne peut en aucun cas diminuer ou exclure sa
responsabilité légale en matière de vices cachés ou rédhibitoires sauf à effectuer
la vente avec un autre professionnel, le Code civil donne au contraire la possibilité au particulier qui vend un chien ou un chat de s’exonérer, à condition bien
sûr qu’il ne soit pas de mauvaise foi.
En outre, en cas de vice avéré, le vendeur particulier ne sera tenu qu’à la restitution du prix et au remboursement à l’acquéreur des frais occasionnés par la
vente. Le versement de dommages et intérêts n’interviendra que si l’acheteur
arrive à démontrer que le vendeur connaissait, au moment de la cession, l’existence même du vice. L’éleveur est dans une position bien moins confortable puisqu’en tant que professionnel, il est considéré comme ayant forcément eu connaissance du vice et à ce titre, il sera automatiquement tenu au versement de ces
dommages et intérêts.
Quant à la nouvelle garantie de conformité du Code de la consommation, ses
dispositions ne sont pas applicables au particulier mais seulement à l’éleveur.
Voilà encore une différence fondamentale.
La différence de régime va également se retrouver au niveau des obligations
sanitaires.
La loi du 6 janvier 1999 est venue poser le principe selon lequel un particulier
n’est obligé de mettre en place et d’utiliser des installations conformes aux règles
sanitaires et de protection animale chez lui que dans le cas où il détient plus de
neuf chiens. A contrario donc, celui qui détient neuf chiens au plus et qui ne
vend qu’une portée occasionnellement sera dispensé, non pas d’assurer un bienêtre certain aux animaux, mais de la mise en place d’installations lourdes et coûteuses. En comparaison, l’éleveur est tenu, outre une déclaration au Préfet et
autres formalités administratives, d’aménager d’une manière bien spécifique les
locaux de l’élevage. On se réfèrera en la matière au texte fondamental de l’arrêté
du 30 juin 1992. Sans rentrer dans les détails, ce texte impose, pour exemple, que
les plafonds et murs des locaux soient facilement lavables et désinfectables, que
les sols aient une pente minimum de 3 %. Enfin autre obligation de taille pour
le professionnel : il doit être titulaire d’un certificat de capacité ou travailler avec
une personne qui le possède.
Voilà pour un bref tableau des différences de régime entre l’éleveur et celui qui
vend très occasionnellement des chiots ou chatons.
Nous allons à présent entrer dans le détail.
V
TABLE DES MATIÈRES
I/ A LA RECHERCHE D’UN ACHETEUR
A/ La publicité
1) Les mentions imposées par la loi du 6 janvier 1999
2) Les conséquences d’une publicité irrégulière
a) Le fondement des sanctions
b) Jurisprudence
B/ Le refus de vente
1) Refus de vente à un consommateur
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a) Champ d’application
b) Refus de vente justifiés
c) Sanction
2) Refus de vente tenant à la personne de l’acheteur
3) Refus de vente entre éleveurs
II/ PRINCIPES GENERAUX DU DROIT DE LA VENTE
A/ Les éléments de la vente
1) Le transfert d’une chose
2) Le prix
3) La rencontre des volontés
B/ Les obligations du vendeur
1) Les obligations contemporaines de la vente
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a) La délivrance
b) L’obligation de renseignement
c) L’obligation de conseil
2) Les garanties après vente
a) La garantie d’éviction
b) Les autres garanties
C/ Les obligations de l’acheteur
1) Le paiement du prix
a) Contreparties de l’achat de l’animal.
b) Exigibilité du prix
c) Garanties de paiement
2) L’obligation de retirement
VI
III/ LE CONTRAT DE VENTE
A/ La réservation de l’animal
B/ Un contrat est un accord de volontés
C/ Les clauses litigieuses qui affectent le contrat
1) Les clauses abusives
2) Les atteintes au droit de propriété
3) Les clauses attributives de compétence juridictionnelle
D/ Les documents spécifiques à la vente d’un animal de compagnie
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IV/ VENTES PARTICULIERES
A/ La vente sur salons et autres manifestations
B/ La vente à distance
1) Champ d’application
2) Obligations liées à la vente à distance
C/ La « Copropriété »
D/ La vente de chiens de deuxième catégorie
1) Les deux catégories instituées par la loi du 6 janvier 1999
2) Le cas des chiens de première catégorie
3) La vente soumise à conditions des chiens de seconde catégorie
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VII
TABLE DES MATIÈRES
V/ PRINCIPES GENERAUX
DE PROCEDURE EN DROIT FRANÇAIS
A/ Organisation de la justice en France
1) Compétence d’attribution des tribunaux
a) Les juridictions civiles du premier degré
b) La juridiction de second degré : la Cour d’appel
c) La Haute Cour : la Cour de cassation
2) Compétence territoriale des tribunaux
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a) Le principe
b) L’exception
c) Jurisprudence
B/ Le principe du contradictoire
1) Définition et applications
2) Jurisprudence
C/ L’expertise judiciaire
1) Moment du recours à l’expertise
2) La demande d’expertise
3) La décision ordonnant l’expertise
4) Le déroulement de l’expertise
5) Les conclusions de l’expert
D/ Avoir recours ou non à un avocat
E/ L’aide juridictionnelle
1) Principe
2) Conditions d’octroi
F/ La transaction
1) Définition
2) Eléments de la transaction
3) Conditions de forme
4) Les effets de la transaction
VIII
VI/ LES DIFFERENTES PROCEDURES JUDICIAIRES
AUXQUELLES UN ACHETEUR PEUT AVOIR RECOURS
A/ L’action délictuelle
1) Régime
2) Jurisprudence
a) Les faits de l’espèce
b) La décision du tribunal
c) Commentaire
B/ L’action en garantie pour vice rédhibitoire ou caché
1) L’acheteur agit sur le fondement d’un des vices rédhibitoires
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a) Quels sont-ils ?
b) Quels textes leur sont applicables ?
c) Les démarches de l’acheteur
d) Les délais à respecter
2) L’acheteur agit sur le fondement d’un vice non rédhibitoire
a) Quels sont-ils ?
b) Quels textes leur sont applicables ?
c) Les démarches de l’acheteur
d) Les délais à respecter
3) Les indemnités octroyées à l’acheteur
a) Le devenir du prix de vente
b) Les indemnités accessoires
C/ La garantie de conformité
1) Domaine d’application
2) Définition de la conformité
3) Les délais à respecter
4) Conséquences de la non-conformité
a) Exclusion de garantie
b) Garantie principale
c) Garanties accessoires
5) Jurisprudence
a) Les faits
b) Les arguments des parties
c) Décision du Tribunal
D/ Les vices du consentement
1) L’erreur
2) Le dol
3) La violence
4) Prescription de l’action
ANNEXES : Code rural, Code civil, Code pénal
Page 133
IX
1/
À LA RECHERCHE
D’UN ACHETEUR
Avoir des chiots et des chatons en bonne santé à proposer
à la vente est une chose. Réaliser une vente dans de bonnes
conditions en est une autre. Cela implique tout d’abord
de trouver des acheteurs. En cela, la publicité, qu’elle soit
sur papier ou l’Internet, fonctionne bien. Cela implique
ensuite de pouvoir refuser de réaliser une vente qui ne serait
pas heureuse pour l’animal.
2
A/ La publicité
Si le bouche à oreille peut aider un élevage à augmenter sa notoriété
auprès des acheteurs potentiels, la publicité n’en demeure pas moins
incontournable pour un éleveur qui veut mettre toutes les chances de
son côté.
Alors avoir recours à la publicité, oui, mais pas n’importe comment.
Au-delà de l’investissement financier qu’elle représente, la publicité est soumise
à des règles strictes dont le non respect peut engendrer pour son auteur un coût
non négligeable.
1) Les mentions imposées par la loi du 6 janvier 1999
On doit encore une fois à la loi du 6 janvier 1999 d’avoir défini les règles à respecter. Le texte de référence en la matière est l’article L. 214-8 du Code rural.
Attention : il est à noter que les règles suivantes s’appliquent quel que soit le
support utilisé pour la publication de l’offre de cession de chats ou de chiens.
Il peut donc tout autant s’agir d’un journal local d’annonces gratuit, d’un journal
national ou encore d’internet.
v Pour le vendeur professionnel qu’est l’éleveur
Il doit faire figurer dans l’annonce son numéro d’identité qui lui a été attribué
lors de son inscription au répertoire des entreprises et de leurs établissements.
Intérêt mis en avant : permettre à l’acheteur comme à l’annonceur de vérifier
l’identité du vendeur et d’éviter en conséquence de répondre ou de cautionner
une offre de vente frauduleuse.
v Pour le vendeur particulier
Il peut, au choix, faire figurer dans l’annonce :
q le numéro d’identification de chaque animal ;
q le numéro d’identification de la femelle ayant donné naissance
aux animaux, ainsi que le nombre d’animaux de la portée.
v Quelle que soit la qualité du vendeur
Dans l’annonce, doivent figurer également l’âge des animaux et l’existence ou
l’absence d’inscription de ceux-ci à un livre généalogique reconnu par le ministre chargé de l’agriculture. En France, pour un chien, il s’agit du Livre des
Origines Français (L.O.F.). Pour un chat, il s’agit du Livre Officiel des Origines
Félines (L.O.O.F. ).
1- À LA RECHERCHE
D’UN ACHETEUR
3
2) Les conséquences d’une publicité irrégulière
a) Le fondement des sanctions
q Textes mis en application
La répression de la publicité trompeuse était, à l’origine, prévue par l’article 44
de la loi 73-1193 du 27 décembre 1973. Aujourd’hui, les textes de référence se
retrouvent aux articles L. 121-1 à L. 121-7 du Code de la consommation.
L’article L. 121-1 du Code de la consommation vise toute publicité comportant,
sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations
fausses ou de nature à induire en erreur.
Pour être critiquable, il faut donc que le message publicitaire contienne des éléments faux (on parle alors de publicité mensongère) ou de nature à induire en
erreur (on parle dans ce cas de publicité trompeuse).
Il est à noter toutefois que le délit de publicité trompeuse n’exige pas pour que
l’infraction soit constituée que la publicité ait effectivement induit en erreur.
Il suffit seulement qu’elle ait été propre à produire cet effet.
La notion de publicité mensongère n’appelle pas d’observations particulières.
La notion de publicité trompeuse, en revanche, est plus subjective. Malgré tout,
les termes employés impliquent une interprétation large : est condamnable
toute publicité constituée par des détails exacts mais présentés de manière tendancieuse susceptible de faire croire à des qualités que n’a pas le bien vendu.
Le caractère trompeur peut également provenir de l’emploi inapproprié de certains termes.
En matière de vente de chiens et chats, les termes trompeurs portent le plus souvent sur l’inscription ou non à un livre généalogique.
Rappelons ainsi que selon les termes de l’article L. 214-8 III du Code rural :
« Ne peuvent être dénommés comme chiens ou chats appartenant à une race que
les chiens ou les chats inscrits à un livre généalogique reconnu par le ministre
chargé de l’agriculture. »
Les termes L.O.F. et L.O.O.F. ne doivent donc pas être utilisés à la légère dans
une publicité. A défaut, l’auteur sera sanctionné. Nous en verrons quelques
exemples ci-dessous.
Comment s’apprécie le caractère trompeur de la publicité ? La jurisprudence se
veut sur ce point constante et considère que le caractère trompeur d’une publicité est apprécié en fonction des qualités de discernement et de l’esprit critique
du consommateur moyen.
4
v Sanctions pénales
Une publicité mensongère ou trompeuse expose son auteur principalement aux
sanctions prévues à l’article L. 213-1 du Code de la consommation et donc à :
q un emprisonnement de deux ans au plus
et/ou
q une amende de 37.500 € au plus.
Accessoirement, le tribunal peut également ordonner la publication du jugement dans les journaux et revues de son choix, cela aux frais de l’auteur
condamné.
En outre, le tribunal a également le pouvoir d’ordonner la diffusion, toujours
aux frais du condamné, d’une ou de plusieurs annonces rectificatives.
v Sanctions civiles
La réparation du dommage subi du fait d’une publicité trompeuse peut être obtenue auprès des juridictions civiles dans le cadre d’une action en concurrence
déloyale.
Cette action est elle-même fondée sur la responsabilité délictuelle et donc sur
l’article 1382 du Code civil.
On considère qu’un acte de concurrence déloyale ouvre droit à réparation même
si le fait dommageable n’est pas intentionnel.
De plus, le préjudice causé à la victime n’est ici que le reflet d’une faute. Si donc
la faute est constatée, il en résulte nécessairement un préjudice pour la victime.
q Prescription : l’action en concurrence déloyale doit être exercée dans un délai
de dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation.
q Peine principale : le préjudice causé est réparé par l’octroi de dommages et
intérêts.
q Peine accessoire : le juge peut ordonner également la publication de sa
décision.
b) Jurisprudence
Une annonce ne doit pas contenir à la fois les mentions
« pure race » et « non L.O.F. » :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Toulouse
le 10 octobre 2002 :
« Au vu des termes de l’annonce et du contenu de l’article L. 214-8
devenu L. 914-8 du Code rural, il n’est pas contestable que Madame C.
a commis une erreur en employant deux termes contraires dans la même
annonce et donc de nature à créer une confusion. En effet, il se déduit des éléments du dossier qu’elle ne pouvait indiquer "pure race" alors même qu’elle
mentionnait "Non L.O.F.", dès lors que ne peuvent être dénommés chiens
appartenant à une race que ceux inscrits au L.O.F. (Livre des Origines Français),
par application de l’article de la Loi précité. »
1- À LA RECHERCHE
D’UN ACHETEUR
Une annonce ne doit pas mentionner une race particulière alors
que l’animal vendu est non L.O.F. :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Redon le 10 mai 2001 :
« Attendu au fond, qu’il ressort des éléments du dossier que l’annonce de vente
litigieuse par Monsieur C. mentionne notamment "....Epagneuls bretons non
L.O.F. " qu’il résulte à cet égard des dispositions de l’article 276-5-3° du Code
rural que ne peuvent être dénommés comme chiens appartenant à une race que
les chiens inscrits à un livre généalogique reconnu par le Ministère de l’agriculture ; que le fait pour Monsieur C. d’indiquer la mention "non L.O.F." dans son
annonce ne lui permettait pas pour autant de mentionner le nom de la race
seul, le terme "type" ou "genre" devant alors être utilisé en accompagnement.
Attendu que ce manquement à la règlementation constitue une faute qui crée
un préjudice. »
La bonne foi de l’auteur de l’annonce n’empêche pas
la concurrence déloyale :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Dinan le 21 décembre
2000 :
« Des textes en vigueur et notamment de l’article 2765-3 du Code rural, il
ressort que ne peuvent être dénommés comme chiens appartenant à une race
que les chiens inscrits à un livre généalogique reconnu par le Ministère de
l’agriculture.
Il est constant et non contesté que Monsieur S. a fait paraître une annonce dans
"la Feuille de Chou" sous la forme suivante :
"4 chiots Colleys mâles non L.O.F. couleur sable tat. vac. mère tat. prix 800 F
(122 €) facilités paiement tél.".
Cependant, Monsieur S. ne pouvait utiliser l’appellation Colleys non L.O.F.
puisque les chiots proposés à la vente ne
réunissaient pas les critères permettant
ladite appellation même si les animaux
présentaient toutes les caractéristiques de la
race.
Quelque soit la bonne foi de Monsieur S.,
il est manifeste que la publicité réalisée par ce
dernier tombe sous le coup des dispositions de
l’article L. 121-1 du Code de la consommation
dans la mesure où elle a été de nature à induire
en erreur d’éventuels acquéreurs sur l’origine
des chiots. Ce comportement fautif est de nature
à engager la responsabilité de son auteur. »
5
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Il y a concurrence déloyale même si le vendeur
n’est pas professionnel :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Vannes le 5 octobre 2000 :
« En l’espèce, il ressort des pièces de la procédure que la partie défenderesse a
proposé à la vente des animaux de compagnie sans respecter la réglementation
rappelée ci-dessus et dans des conditions de nature à provoquer une erreur chez
d’éventuels acquéreurs.
Le fait de proposer à la vente dans de telles conditions, même à titre exceptionnel, des animaux de compagnie constitue un acte de commerce susceptible de
porter préjudice aux éleveurs professionnels dont l’activité est réglementée. En
réparation, il y a lieu de condamner la partie défenderesse. »
En revanche, l’absence de mention du N° de SIRET
n’est pas à l’origine d’une concurrence déloyale :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance d’Avranches le 18 octobre 2000 :
« Cependant, le fait que l’annonce publiée ne comporte pas le numéro de SIRET
du vendeur ou diverses autres indications telles que le numéro de tatouage des
chiots et de la mère, ou le nombre de chiots dans la portée, n’est pas de nature à
porter atteinte aux intérêts collectifs des éleveurs, dès lors que ces mentions ne
sont exigées que pour l’information des acheteurs et que leur absence, si elle peut
causer un préjudice aux intérêts collectifs des consommateurs, ne peut être
constitutive de concurrence déloyale à l’égard des éleveurs de chiens. »
B/ Le refus de vente
Le droit français fait de la propriété un droit absolu
et par conséquent très protégé.
Ce caractère souverain est posé par l’article 544 du Code civil qui affirme
que : « La propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la
plus absolue, pourvu qu’on en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les
règlements. »
Immédiatement après, l’article 545 du même code dispose que : « Nul ne peut
être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité. »
Si ce n’est pour cause d’utilité publique (en cas notamment d’expropriation), un
propriétaire ne devrait pas pouvoir être forcé de vendre son bien et le refus
opposé à une offre d’achat ne devrait pas non plus pouvoir être sanctionné.
Mais ceci concerne le caractère purement civil du droit de propriété. Lorsque les
intérêts commerciaux s’en mêlent, les choses se compliquent.
1- À LA RECHERCHE
D’UN ACHETEUR
1) Refus de vente à un consommateur
Instituée dans le but de protéger les consommateurs (on pourra définir le consommateur comme toute personne physique qui se procure un bien pour satisfaire
ses besoins personnels ou ceux de sa famille), l’interdiction de refus de vente
était initialement réglementée par l’ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945.
Cette interdiction existe toujours et figure à présent à l’article L. 122-1 du Code
de la consommation.
Cet article dispose ainsi que :
« Il est interdit de refuser à un consommateur la vente d’un produit ou la prestation d’un service, sauf motif légitime, et de subordonner la vente d’un produit
à l’achat d’une quantité imposée ou à l’achat concomitant d’un autre produit ou d’un
autre service ainsi que de subordonner la prestation d’un service à celle d’un autre
service ou à l’achat d’un produit. »
a) Champ d’application
Quels sont les vendeurs visés par cette interdiction ?
Le même article donne la réponse dans son alinéa 2 en précisant que :
« Cette disposition s’applique à toutes les activités visées au dernier alinéa de l’article
L. 113-2.»
Si on se reporte ainsi à l’article L. 113-2 on constate que le refus de vente aux
consommateurs concerne les activités de production, de distribution et de
services.
En conclusion, il est acquis que le refus de vente est répréhensible lorsqu’il est
opposé par un producteur, un commerçant, un industriel ou un artisan.
L’éleveur ne saurait bien entendu être considéré comme un artisan.
Le même constat peut se faire pour la qualité d’industriel.
Les choses sont plus discutables déjà pour la qualité de commerçant. Juridiquement, le commerçant est celui qui effectue à titre habituel des actes de commerce et donc qui, de manière régulière, achète pour revendre.
Si cela concerne à l’évidence les animaleries, c’est plus discutable en ce qui
concerne l’éleveur.
En effet, celui qui voit naître les chiots ou chatons à son élevage n’achète pas
les animaux qu’il va vendre. Il n’est donc pas commerçant.
Celui qui ne fait pas naître les animaux pourra, en revanche, subir le même sort
que les animaleries.
Attention également aux accessoires comme les croquettes. Les sacs sont
forcément achetés pour être revendus et on pourrait y voir les concernant
une activité commerciale entrant dans le champ d’application du refus
de vente.
Quant à la qualité de producteur, c’est elle qui pose le plus de problèmes.
Le vendeur particulier (qui ne vend donc pas plus d’une portée par an) ne
pourra certainement pas être considéré comme producteur.
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Le vendeur professionnel qu’est l’éleveur rentrerait plus facilement dans cette
catégorie.
L’activité d’élevage est reconnue comme étant une activité agricole puisqu’elle
correspond à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique de caractère
animal.
Faut-il en déduire de manière catégorique qu’elle est toujours une activité de
production soumise au refus de vente ? La réponse ne saurait être affirmative en
l’absence de jurisprudence abondante sur le sujet. On peut supposer que les
magistrats useront de leur pouvoir souverain d’appréciation et qu’un gros élevage sera plus facilement considéré comme production que celui où deux portées seulement sont vendues chaque année.
b) Refus de vente justifiés
Le refus de vente n’est pas prohibé dans tous les cas.
Deux cas ne donnent pas ainsi lieu à sanctions :
les ventes réglementées et l’existence d’un motif légitime
q Les ventes réglementées
Certains biens font l’objet d’une réglementation stricte en ce qui concerne leur
mise en vente et le refus de satisfaire une demande portant sur l’un de ces biens
n’est pas nécessairement répréhensible.
Il en est ainsi de la vente des chiens de deuxième catégorie.
Ces chiens ne sauraient être vendus notamment aux personnes âgées de moins
de dix-huit ans.
Le refus de vendre à un mineur ne saurait donc ici être sanctionné.
Il en serait de même vis-à-vis :
v d’un majeur en tutelle sauf autorisation par le juge des tutelles ;
v d’une personne condamnée pour crime ou à une peine d’emprisonnement
avec ou sans sursis pour délit inscrit au bulletin n° 2 du casier judiciaire ;
v d’une personne à laquelle la propriété ou la garde d’un chien a été retirée en
application de l’article L. 211-11 du Code rural.
q Motif légitime
Aux termes de l’article L. 122-1 du Code de la consommation, le refus de vente
est licite en cas de motif légitime.
Cette exception n’est pas définie par le texte et il faut donc se référer à la jurisprudence. On considère ainsi qu’il y a motif légitime lorsque l’acheteur est insolvable ou mauvais payeur.
Ainsi, si un éleveur a rencontré de grandes difficultés pour se faire payer de la
vente d’un premier animal, on estimera qu’il est en droit de refuser la vente d’un
second au même acheteur.
On considère également qu’il y a motif légitime en cas d’incivilité de l’acheteur.
1- À LA RECHERCHE
D’UN ACHETEUR
9
c) Sanction
Il s’agit d’une amende contraventionnelle de 5ème classe, selon les termes
de l’article R. 121-13 du Code de la consommation.
Le vendeur pourra donc être condamné à 1.500 € d’amende au plus, la peine
étant portée à 3.000 € en cas de récidive.
2) Refus de vente tenant à la personne de l’acheteur
Plus utilisées par les acheteurs sont les dispositions concernant le refus de vente
tenant à la personne de l’acheteur autrement dit l’interdiction de discrimination.
Les textes figurent cette fois directement dans le Code pénal.
Selon l’article 225-1 de ce code :
« Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur
apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de
leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur
âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance
ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race
ou une religion déterminée. »
Lorsque la discrimination conduit « à refuser la fourniture d’un bien ou d’un service », le vendeur est coupable d’un délit dont la peine peut aller jusqu’à trois ans
d’emprisonnement et 45.000 € d’amende.
La discrimination la plus invoquée est la discrimination raciale. En sont surtout
accusés les éleveurs de chiens de deuxième catégorie.
3) Refus de vente entre éleveurs
La loi 96-588 du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l’équilibre des relations commerciales a supprimé l’interdiction du refus de vente entre professionnels.
Il n’existe donc plus, comme c’est le cas pour la vente à un consommateur, de
texte exclusivement consacré au refus de vente entre professionnels.
Néanmoins, ce refus de vente peut toujours être appréhendé sur le terrain de la
responsabilité civile délictuelle (article 1382 du Code civil).
L’application de ces dispositions suppose la réunion de trois éléments : le refus
de vente doit être constitutif d’une faute ; la victime doit avoir subi un préjudice
du fait de ce refus et un lien de causalité entre la faute et le préjudice doit être
établi.
L’auteur d’un refus de vente peut être condamné à verser des dommages et intérêts au demandeur en réparation du préjudice subi. En revanche, il ne peut pas
valablement être condamné à satisfaire la demande.
2/
PRINCIPES GÉNÉRAUX
DU DROIT DE LA VENTE
Le Code civil définit la vente comme étant la « convention
par laquelle l’un s’oblige à livrer une chose, et l’autre à la
payer ». On devrait ajouter ici « d’une somme d’argent »
car le paiement en nature n’est pas constitutif d’une vente
mais d’un échange.
12
A/ Les éléments de la vente
Deux éléments sont indispensables à l’existence même d’une vente :
le transfert d’une chose et le paiement d’un prix.
En l’absence de prix, il peut y avoir donation ou échange. En l’absence de transfert,
il peut y avoir bail ou prêt.
1) Le transfert d’une chose
Le principe veut que tout ce qui est dans le commerce peut être vendu : meuble,
immeuble, bien corporel ou incorporel (brevet, marque).
Par dérogation au principe, certaines choses ne peuvent faire l’objet d’une vente.
Ces exceptions sont très variées. On y trouve la personne humaine, les produits
interdits comme la drogue ou des droits fondamentaux tel le droit de vote.
Pour qu’il y ait vente il faut également, outre le fait que la chose soit vendable,
qu’elle soit identifiée ou identifiable.
Pour les choses péries au moment de la vente, le principe veut que la vente soit
nulle.
Pour être valable, la vente implique aussi que le vendeur soit bien titulaire du
droit de propriété : on ne peut en effet céder plus de droit que l’on en a.
On ne peut ainsi vendre la chose d’autrui.
Si le bien est en indivision, la vente ne peut intervenir qu’avec l’accord de tous
les coindivisaires.
2) Le prix
L’article 1591 du Code civil dispose que : « Le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties. »
Le prix est nécessairement une somme d’argent.
Il doit donc être immédiatement chiffré ou à défaut être fixé par référence à des
éléments qui le rendent déterminable au jour où il devra être payé.
L’indétermination du prix prive la vente de l’une de ses conditions
d’existence : elle est donc sanctionnée de nullité absolue.
Le prix fixé se doit d’être réel et sérieux :
v Réel : il faut que soit versée une somme d’argent. A défaut la vente est
simulée et ne peut qu’être requalifiée en donation.
v Sérieux : même si le prix est libre, il doit tout de même constituer une
véritable contrepartie. A défaut, on dit que la vente est consentie à vil prix.
La sanction est la nullité.
2- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DU DROIT
DE LA VENTE
13
Concernant le montant du prix, le principe reste malgré tout la liberté contractuelle. Dès lors que le consentement des parties n’a pas été vicié, le prix qu’elles
ont fixé s’impose à elles sans que le juge puisse le rectifier au motif qu’il le trouverait injuste.
Des dérogations à ce principe existent. Elles sont limitées et toutes prévues par
des textes. On citera notamment la vente d’immeubles.
3) La rencontre des volontés
Le droit français présente une originalité quant au transfert de propriété.
En effet, dans notre législation, un transfert de plein droit et immédiat de la propriété se réalise du seul fait de la rencontre des consentements.
La propriété est ainsi acquise à l’acheteur à l’égard du vendeur dès qu’un accord
intervient sur la chose et sur le prix et cela bien que la chose n’ait pas encore
été livrée ni le prix payé.
Ainsi l’acheteur est-il immédiatement propriétaire et cela quel que soit le lieu où
se trouve l’objet de la vente. A l’instant même de la rencontre des volontés, la
chose tombe dans son patrimoine et lui seul a dès lors qualité pour conclure des
actes à son sujet.
Parallèlement, la chose quitte au même moment le patrimoine du vendeur,
privant ainsi des créanciers éventuels de la possibilité de saisir.
Notre législation admet cependant que des dérogations conventionnelles soient
apportées à ce principe de transfert immédiat qui n’est pas d’ordre public.
Il est donc possible pour les parties de retarder d’un commun accord le transfert
de propriété.
Une clause de réserve de propriété insérée dans le contrat de vente aura cet
effet. Nous l’étudierons un peu plus loin.
14
B/ Les obligations du vendeur
1) Les obligations contemporaines de la vente
a) La délivrance
q Définition
L’obligation de délivrance est assez mal définie par l’article 1604 du Code
civil puisque celui-ci dispose que: « La délivrance est le transport de la chose
vendue en la puissance et possession de l’acheteur. »
On retrouve néanmoins le terme « possession » qui rappelle qu’au moment de la délivrance, l’acheteur est déjà propriétaire, l’accord des volontés étant déjà intervenu.
En revanche, les termes de l’article 1604 laissent à penser qu’il incomberait au
vendeur d’assurer le transport de la chose en la possession de l’acheteur. Or il
n’en est rien !
La délivrance consiste au contraire et seulement à laisser la chose vendue à la
disposition de l’acheteur pour qu’il en prenne livraison.
q Moment de la délivrance
A défaut de stipulation, la délivrance est en principe exigible immédiatement.
Un délai peut cependant être convenu et une date de mise en disposition décidée. Ce sera d’ailleurs le cas chaque fois que la vente intervient alors que l’animal est âgé de moins de huit semaines.
Attention : lorsque la vente intervient entre un éleveur et un particulier et
que l’animal vendu l’est pour un prix supérieur à 500 €, la date convenue
pour la délivrance prend alors une importance particulière. En effet, le Code
de la consommation, dans son article L. 114-1, oblige dès lors le professionnel à
« indiquer la date limite à laquelle il s’engage à livrer le bien » et ouvre au consommateur acheteur le droit de « dénoncer » le contrat par lettre recommandée avec avis
de réception si ce délai est dépassé de plus de sept jours, sauf force majeure.
q Délivrance de la chose convenue et de ses accessoires
En premier lieu, le vendeur doit délivrer très exactement la chose vendue, telle
qu’elle est définie au contrat. Aucune substitution n’est possible et cela quand
bien même elle ne paraîtrait pas préjudiciable à l’acheteur.
Un contrat de réservation a le plus souvent été conclu entre les parties, ce
contrat désignant précisément le chaton ou le chiot de la portée qui fera l’objet
de la vente. C’est cet animal et non un autre qui devra être délivré.
Si l’animal venait à décéder avant la délivrance, le vendeur ne pourrait, en outre,
unilatéralement décider de remplacer celui-ci par un autre de la même portée et
cela malgré le fait qu’il prendrait un animal aux caractéristiques similaires.
2- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DU DROIT
DE LA VENTE
15
En second lieu, le vendeur doit à l’acheteur une délivrance conforme aux qualités prévues.
Le bien livré doit être matériellement celui qui a été promis et il doit posséder
également toutes les qualités annoncées.
Si ces deux conditions sont remplies, on parle de délivrance conforme.
Cette conformité s’apprécie à l’instant même de la délivrance.
Enfin, la délivrance doit porter sur les accessoires du bien livré.
La jurisprudence inclut dans ces accessoires les documents administratifs et
reconnaît que la solution s’applique aux papiers d’un animal. Ceci a été posé dès
1981 (arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le
26 novembre 1981) concernant les documents permettant d’inscrire un cheval de
course en compétition.
Peu de temps après, la Cour d’appel de Montpellier, dans un arrêt en date du
23 février 1982, affirmait que le vendeur de chien professionnel doit remettre,
lorsque la vente porte sur un chien de race, le certificat de naissance.
La même obligation pèse sur le vendeur quant à la carte d’identification.
q Preuves de la délivrance
La preuve de l’exécution matérielle de la délivrance pèse sur le vendeur. C’est
à lui de prouver qu’il a délivré le bien pour pouvoir ensuite en réclamer le paiement. C’est à lui également de prouver qu’il a bien délivré les accessoires.
Une fois la délivrance établie, ce sera à l’acheteur qui entend s’en plaindre de
prouver qu’elle n’est pas conforme.
Ce dernier doit néanmoins prendre toutes précautions utiles lors de la prise de
possession de l’animal que l’on nomme « réception ».
En effet, l’acheteur qui réceptionnerait sans faire de réserves serait censé accepter
l’animal pour conforme au contrat. Par la même, il s’interdirait d’élever par la
suite toute contestation sur ce qu’il a ainsi pu contrôler.
La Cour de cassation considère que « la réception sans réserves couvre les défauts
de conformité apparents ».
q Les sanctions
L’inexécution par le vendeur de son obligation de délivrance peut prendre trois
formes :
, défaut total de délivrance ;
, retard de délivrance ;
, délivrance défectueuse.
16
Les suites sont également de trois types :
v l’acheteur peut tout d’abord poursuivre l’exécution forcée de la délivrance ;
v l’acheteur peut aussi demander la résolution de la vente.
Pour l’obtenir, l’acquéreur devra en passer par la voie judiciaire et rien ne lui
assure d’obtenir au final la résolution du contrat. En effet, les juges ont le
pouvoir d’apprécier si le manquement est assez grave pour justifier
la résolution.
v L’acheteur peut enfin demander des dommages et intérêts ; cette troisième
solution étant appliquée dès lors que les juges considèrent que le manquement
ne justifie pas la résolution.
Aucune sanction ne sera en revanche appliquée :
v si la défaillance est due à la force majeure ;
v si le vendeur apporte la preuve de la force majeure.
Pour un exemple d’absence totale de délivrance :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Muret le 25 mai
2007 :
« En droit, en application des dispositions des articles 1604 et suivants
du Code civil, il appartient au vendeur de justifier qu’il a rempli son
obligation de délivrance ou du fait l’ayant libéré de son obligation.
Il est constant que suivant acte sous seing privé en date du 20 avril 2006, les acheteurs ont réservé auprès des vendeurs un chiot pour un prix de 1.200 € avec versement d’un acompte de 300 € et il n’est pas contesté par les défendeurs qu’ils ont
refusé le 10 mai 2006 de délivrer le chiot en cause aux demandeurs.
La preuve de l’absence de délivrance est établie et elle n’est justifiée par
aucun élément probant.
Il convient dès lors, par application des dispositions de l’article 1610 du Code
civil de prononcer la résolution de la vente aux torts exclusifs des vendeurs.
Les vendeurs doivent donc restituer la somme de 300 € versée par les demandeurs,
les intérêts moratoires étant dus au taux légal à compter de l’assignation et les
dommages et intérêts dus en application des dispositions de l’article 1611 du
Code civil seront évalués au titre des frais de déplacement exposées en vain le
10 mai, jour convenu de la délivrance, à la somme de 300 €. »
2- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DU DROIT
DE LA VENTE
17
Pour un exemple de délivrance défectueuse, l’animal
ne présentant pas les caractéristiques annoncées
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Rennes le 16 septembre
1998 :
« Il n’est pas contesté et il est établi que le chien a été vendu à Mademoiselle
acheteur comme étant de race Bichon maltais alors qu’il n’a pas le standard du
Bichon maltais ainsi qu’en font foi l’attestation de Monsieur X et l’avis du Juge
confirmateur d’Angers qui a refusé le chien à la confirmation comme n’ayant
aucun rapport avec la race Bichon maltais.
Le chien aurait dès lors dû être vendu comme étant de "type" ou de "genre"
Bichon maltais et non de "race" Bichon maltais.
Même s’il est fait mention du terme "race" sur tous les documents officiels de la
Société Centrale Canine comme le soutient Monsieur vendeur, il incombait à
ce vendeur de rayer le terme "race" préimprimé sur le contrat de vente et de
substituer à ce terme celui de "type" ou de "genre".
Quelle que soit la destination effective du chien, le seul fait que le vendeur professionnel qu’est Monsieur vendeur ait vendu à Mademoiselle acheteur un
chien désigné sur l’attestation de vente comme étant de "race" Bichon maltais
a été un élément déterminant du choix de la demanderesse d’accepter le prix de
3.200 F (488 €) qui était demandé et dont une partie doit désormais être restituée à titre de dommages et intérêts dès lors que le chien ne répond pas aux
caractéristiques convenues. »
b) L’obligation de renseignement
Le vendeur doit renseigner les acheteurs éventuels sur les caractéristiques
essentielles du produit.
Cette règle a été consacrée par la loi du 18 janvier 1992 dont l’article 2
repris par l’article L. 111-1 du Code de la consommation dispose que :
« Tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la
conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service. »
Une fois le contrat conclu, le vendeur a encore une obligation d’information :
il doit fournir à l’acheteur toutes les indications nécessaires sur les conditions
d’utilisation et les précautions d’emploi de la chose.
18
Sur la responsabilité d’un éleveur de chiens en cas de dysplasie :
q Arrêt rendu par la Cour d’appel de Montpellier le 14 octobre 2003 :
Les faits :
Madame E achète, le 3 août 1999, à Madame V, éleveur professionnel, un
chien de race Berger d’Anatolie, pour un montant de 609,80 €. Les conditions
particulières figurant sur l’attestation de vente précisent seulement : « les deux
testicules sont dans les bourses, la mâchoire est en ciseaux, excellent caractère,
chien de compagnie ». Une radiographie pratiquée le 12 février 2001 révèle que ce
chien est atteint d’une dysplasie coxo-fémorale de degré D, à la limite du E, de lésions
osseuses avec subluxation et arthrose ; le chien est déclaré inapte à la reproduction.
La procédure :
Madame E assigne son vendeur devant le Tribunal d’instance compétent afin
d’obtenir la résolution de la vente pour cause de vice rédhibitoire ; mais le délai
de rédhibition étant largement dépassé, le T.I., par jugement du 20 novembre
2001, la déclare irrecevable en son action et la condamne à verser la somme de
762,25 € à Madame V par application de l’article 700 du NCPC (Nouveau
Code de procédure civile)
Madame E relève alors appel de cette décision dont elle sollicite la réformation
et demande à la Cour, notamment, de la recevoir en son action en garantie des
vices cachés, sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code civil, et de
dire, sur le fondement de l’article 1147 du Code civil, que Madame V a failli à
son obligation contractuelle de renseignement en lui vendant un chien dont
elle savait, en sa qualité d’éleveur professionnel, que sa mère était atteinte de la
même affection.
Décision de la Cour :
v « Attendu que le chien vendu par Madame V à Madame E est issu d’un père
indemne de toute trace de dysplasie coxo-fémorale ; que Madame E verse au débat
un compte-rendu de lecture d’une radiographie ( ... ) effectuée le 30 décembre
1998 sur la mère du chien en question, que celle-là présentait "une lésion de
dysplasie nette au niveau de son articulation coxo-fémorale droite entraînant une
qualification de degré E, que le degré E est le degré le plus élevé de la dysplasie" ;
v attendu que Madame E verse également au débat la photocopie du passage
d’un ouvrage "Génétique et sélection chez le chien" rédigé par Monsieur
Bernard Denis, Professeur de l’Ecole Vétérinaire de Nantes, indiquant qu’un
chien issu du croisement d’un animal sain et d’un animal dysplasique présente
de 33 à 58 % de chance d’être atteint de dysplasie ; que le chien en question,
issu d’un père sain et d’une mère dysplasique avait donc 33 à 58 % de chance
d’être lui-même dysplasique ;
2- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DU DROIT
DE LA VENTE
19
v attendu que Madame E produit plusieurs documents d’ordre publicitaire
insérés dans des revues spécialisées dans lesquels les époux V proposent à la
vente des chiots L.O.F., présentés comme "d’excellentes origines", "authentiques", "rares", "élevés par de vrais passionnés", avec conseils et suivi d’élevage ;
v attendu qu’une personne qui fait insérer dans des revues spécialisées de
nombreux encarts publicitaires où elle propose de vendre des chiots, qui
exploite un élevage canin, qui déclare à ce titre des revenus ( ... ), qui est inscrite au répertoire national des entreprises en qualité d’éleveur, qui cotise à ce
titre à la MSA, doit être considérée comme un professionnel tenu d’une obligation de renseignements vis-à-vis des acquéreurs des chiens nés dans son
élevage ;
v attendu que Madame V, qui savait depuis le 15 avril 1999 que sa chienne
N était atteinte de dysplasie de niveau E, ne pouvait ignorer en sa qualité
d’éleveur professionnel que le chiot né le 12 mai 1999 présentait 33 à 58 %
de probabilité d’être lui-même atteint de cette maladie ; que lors de la vente
intervenue le 3 août 1999 elle n’a pas informé Madame E de cette situation et
lui a ainsi fait perdre toute chance de procéder à l’achat litigieux en toute
connaissance de cause ; qu’elle a ainsi commis une faute dont elle doit réparer
les conséquences dommageables ; que cette perte de chance sera indemnisée
par l’octroi, tous chefs de préjudices confondus, d’une somme de 500 € à titre
de dommages et intérêts. »
20
c) L’obligation de conseil
Par rapport à l’information, le conseil est un pas supplémentaire :
il consiste à indiquer à l’acheteur éventuel si le bien est adapté
ou non à la fin qu’il se propose.
Le conseil implique nécessairement une différence de compétence entre les parties. Par conséquent, ce devoir ne saurait peser que sur un vendeur professionnel.
2) Les garanties après vente
a) La garantie d’éviction
« Qui doit garantie ne peut évincer ». Cette règle découle de l’économie même de
la vente : le vendeur ne saurait reprendre, par une voie détournée, le profit de
ce qu’il a vendu à l’acheteur.
Ainsi, il doit s’abstenir de tout acte troublant l’acheteur dans la jouissance du
bien vendu.
Lorsque l’acquéreur est troublé par un tiers, le vendeur ne lui doit pas garantie
s’il s’agit de troubles de fait.
La garantie du vendeur s’applique au contraire aux contestations portant sur le
droit acquis par l’acheteur.
Il peut s’agir d’une éviction totale si le tiers prétend être lui-même propriétaire
de la chose.
Il peut s’agir d’une éviction partielle lorsque le tiers dispose de droits sur une
fraction du bien vendu.
Il peut enfin se révéler des charges non déclarées (usufruit, servitude, droit de
bail). Pour donner lieu à garantie, le droit du tiers doit être antérieur à la vente.
Lorsque l’acheteur est totalement évincé, la vente se trouve totalement anéantie.
L’acheteur peut alors formuler quatre types de demandes :
la restitution du prix ;
, la restitution des fruits, s’il doit lui-même les rendre au tiers qui l’évince ;
, le remboursement des frais qui sont non seulement les frais de vente, mais
aussi les frais de justice tant du procès principal que de l’action en garantie ;
, l’octroi de dommages et intérêts.
,
En cas d’éviction partielle ou de charges non déclarées, l’acheteur peut demander
l’anéantissement de la vente ou une indemnité qui équivaut à une diminution de
prix.
b) Les autres garanties
Se reporter au chapitre 6 du présent ouvrage.
2- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DU DROIT
DE LA VENTE
21
C/ Les obligations de l’acheteur
1) Le paiement du prix
L’obligation essentielle de l’acheteur est le paiement du prix.
a) Contreparties de l’achat de l’animal
Si dans une vente classique la contrepartie financière de la délivrance du bien
meuble est uniquement financière, on rencontre au contraire et régulièrement
dans les ventes d’animaux de compagnie une autre contrepartie : celle portant
sur des saillies ou des chiots ou chatons futurs.
L’acheteur se trouve alors tenu de verser à la fois une somme d’argent et de promettre une saillie ou un certain nombre de chiots ou chatons sur une portée
de la femelle vendue.
Ce procédé est légal uniquement dans la mesure où l’exécution en nature est
clairement déterminée et limitée dans le temps.
Que se passe-t-il alors si l’acheteur vient en temps voulu à ne pas respecter
son engagement ?
Les tribunaux, malgré toutes les bonnes raisons qui pourraient être invoquées,
font preuve de sévérité et condamnent l’acheteur, non pas à exécuter car ils n’en
ont pas le droit, mais à indemniser le vendeur.
Pour un exemple de chiots promis sur une portée
de la chienne vendue :
q Arrêt rendu par la Cour d’appel de Montpellier le 2 mars 2004
Les faits :
Le contrat de vente de la chienne Labrador, conclu le 8 mars 1998, prévoyait un prix de 5.000 F (762 €) à la remise de l’animal et deux chiots sur la
première portée. Par la suite Monsieur acheteur a fait reproduire la chienne
mais n’a pas donné les deux chiots prévus.
Décision de la Cour :
« Attendu que l’acquéreur ayant manqué à son obligation contractuelle de
réservation de deux chiens, le vendeur est fondé à obtenir, en réparation de
cette faute contractuelle, la somme de 1.524,49 € (10.000 francs) correspondant
au prix de vente habituellement pratiqué pour deux chiots Labrador. »
22
Pour un exemple de saillie promise :
q Arrêt rendu par la Cour d’appel de Limoges le 26 octobre 2006 :
Les faits :
Le 13 février 2000, Monsieur acheteur, éleveur canin, s’est porté acquéreur d’un
chien Bouledogue français auprès de monsieur vendeur, lui-même éleveur canin ;
le contrat prévoyait un prix de 4.000 F (610 €) auquel s’ajoutait l’obtention pour
le vendeur de deux saillies gratuites d’une chienne lui appartenant. Postérieurement à la vente, Monsieur acheteur s’est aperçu que le chien qu’il détenait ne
portait pas le numéro de tatouage figurant sur les papiers qui lui avaient été remis.
Etant persuadé de ne pas détenir le chien qui aurait dû lui être vendu, Monsieur
acheteur a refusé les saillies à Monsieur vendeur.
Décision de la Cour :
v « Attendu que le contrat en cause est un contrat de vente d’un animal ; que
sont applicables en conséquence les dispositions du Code civil relatives à la vente ;
v attendu que les accords pris entre les parties ne font pas difficulté, que
Monsieur acheteur ne conteste pas en effet qu’il était tenu, conformément à
l’acte de vente, de permettre deux saillies par le chien objet de celle-ci ; que la
non exécution de cette obligation fonde en conséquence la demande en dommages et intérêts de Monsieur vendeur sauf à Monsieur acheteur à apporter la
preuve d’un défaut de conformité de l’animal ou d’un dol du vendeur ;
v attendu qu’en application des dispositions de l’article 1642 du Code civil,
le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se
convaincre lui-même ;
v or attendu en l’espèce que le défaut de conformité de l’animal invoqué par
Monsieur acheteur, en ce que le tatouage de ce dernier n’était pas celui qui lui
avait été annoncé, constitue un vice apparent que Monsieur acheteur, dont il
convient d’observer qu’il est un professionnel de l’élevage de chiens, ne peut
utilement opposer au vendeur ;
v attendu qu’il s’ensuit que Monsieur acheteur n’est à même de démontrer ni
l’existence d’un défaut de conformité ni, partant, le dol du vendeur ; que la
connaissance du vice exclut en effet qu’elle puisse arguer d’une non conformité ou de la mauvaise foi du vendeur ;
v attendu, dans ces conditions, que le contrat initial doit recevoir effet, que
le refus de Monsieur acheteur de permettre les saillies prévues au contrat
constitue un manquement contractuel justifiant la demande de Monsieur
vendeur en dommages et intérêts. »
2- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DU DROIT
DE LA VENTE
23
b) Exigibilité du prix
q Principe
L’article 1650 du Code civil dispose que : « La principale obligation de l’acheteur est de payer le prix au jour et lieu réglés par la vente. »
L’article 1651 complète : « S’il n’a rien été réglé à cet égard lors de la vente, l’acheteur
doit payer au lieu et dans le temps où doit se faire la délivrance. »
Le principe veut donc que ce soit la délivrance qui rende le prix exigible et non
le seul transfert de propriété.
C’est en conséquence au vendeur qui réclame le paiement de prouver non
seulement quel était le prix mais encore qu’il a satisfait à son obligation de
délivrance.
Parallèlement, l’acheteur peut refuser de payer le prix tant que la délivrance
n’est pas parfaite.
q Clauses contraires
La règle du paiement immédiat n’est pas d’ordre public et les parties peuvent
conventionnellement avancer ou différer le paiement.
q Paiement avancé
Lorsqu’un contrat de réservation est signé pour un chaton ou un chiot, le vendeur demande généralement un premier versement. Cette somme d’argent peut
alors être qualifiée par le vendeur d’arrhes ou d’acompte. Mais attention, la qualification a une grande importance dans la mesure où les arrhes et les acomptes
suivent un régime juridique bien différent.
24
Ainsi, la somme d’argent versée à titre d’arrhes est directement liée à la faculté
de dédit qui est offerte aux deux parties, autrement dit à la possibilité donnée à
chacun des cocontractants de se retirer de la vente moyennant la perte d’une
somme fixée préalablement par le contrat.
L’éleveur qui ne souhaite plus vendre l’animal réservé pourra se dégager de la
vente, tout comme l’acheteur qui aura changé d’avis.
Mais ce changement de position n’est pas gratuit et son coût est directement lié
à la somme versée par l’acheteur.
Ainsi, selon les termes de l’article 1590 du Code civil :
« Si la promesse de vente a été faite avec des arrhes, chacun
des cocontractants est maître de s’en départir :
celui qui les a données en les perdant, celui qui les a reçues, en restituant le double. »
Par exemple, si la vente a été faite avec un versement de 100 € d’arrhes :
v l’acheteur qui change d’avis perdra les 100 € qu’il devra laisser dans
la bourse du vendeur ;
v le vendeur qui change d’avis devra restituer à l’acheteur les 100 € versés
et y ajouter encore 100 €.
Le mécanisme de l’acompte est tout autre. Il ne s’agit plus de donner la possibilité à chacune des parties de se défaire du contrat mais simplement, pour l’acheteur, de donner une avance sur le paiement du prix total.
Par la suite le prix devra être complété et le contrat devra être exécuté. La non
exécution serait constitutive d’une faute.
Il appartient donc à l’éleveur qui rédige le contrat de préciser très clairement à
quel titre les sommes sont versées.
Mais si la distinction entre arrhes et acompte est claire dans son principe, elle
peut être difficile à mettre en œuvre, en pratique, lorsque le versement n’a pas
été qualifié.
C’est pour résoudre ce problème que la loi du 3 janvier 1992 est venue poser une
présomption lorsque la vente intervient entre un vendeur professionnel et un
acheteur consommateur.
Dans ce cas, on doit appliquer les dispositions de l’article L. 114-1 du Code de la
consommation qui répute arrhes, sauf stipulation contraire, toute somme versée
à l’avance dans un contrat de vente de biens meubles conclu entre un professionnel et un consommateur dès lors que son prix excède 500 € et que la livraison
n’est pas immédiate.
L’éleveur étant un vendeur professionnel, cette disposition lui sera donc
applicable.
A contrario, lorsque le prix de l’animal vendu est inférieur à 500 €, c’est le
principe de la force obligatoire des contrats qui reprend le dessus.
2- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DU DROIT
DE LA VENTE
25
Ainsi, ce sera à celui qui entend rétracter son consentement de prouver l’existence d’une faculté de dédit à son profit. S’il n’y parvient pas, on considèrera
volontiers qu’il s’est agi d’un premier versement à titre d’acompte.
q Paiement différé
Le vendeur peut accepter de consentir à l’acheteur des facilités de paiement.
Ce sera notamment le cas chaque fois qu’un éleveur accepte un règlement
effectué par la remise de plusieurs chèques, le paiement étant alors étalé sur
plusieurs mois.
c) Garanties de paiement
Le vendeur dispose de trois garanties principales à l’encontre de l’acheteur
qui ne paie pas la totalité du prix convenu.
q Droit de rétention
C’est la première garantie du vendeur : il peut refuser de livrer l’animal tant qu’il
n’est pas payé, à condition bien sûr qu’il n’ait pas accordé de délai de paiement.
Ce droit est consacré par l’article 1612 du Code civil.
26
q Réserve de propriété
Lorsqu’il accorde des délais de paiement, le vendeur peut également se protéger
en insérant dans le contrat une clause par laquelle, tout en livrant le chien ou
le chat, il en retient la propriété jusqu’à complet paiement du prix.
Si le prix devait ne pas être entièrement payé, il serait alors en droit de revendiquer la restitution de l’animal.
On parle de « clause de réserve de propriété ».
Celle-ci a été consacrée par l’ordonnance du 23 mars 2006 et le principe est
depuis lors posé par l’article 2367 du Code civil qui dispose que :
« La propriété d’un bien peut être retenue en garantie par l’effet d’une clause de
réserve de propriété qui suspend l’effet translatif d’un contrat jusqu’au complet paiement de l’obligation qui en constitue la contrepartie. »
Pour que la clause soit valide, il faut qu’elle soit écrite.
Pour qu’elle produise effet, il faut que l’animal soit toujours dans le patrimoine
de l’acheteur au moment où le vendeur va le revendiquer.
Si l’acheteur a revendu l’animal, l’action en revendication échouera si le sousacquéreur était de bonne foi c’est-à-dire s’il était convaincu d’acheter l’animal
à son véritable propriétaire. On oppose ainsi au vendeur initial les dispositions
de l’article 2279 du Code civil.
Ce dernier pourra malgré tout, si le prix n’a pas encore été payé au revendeur,
se faire payer directement.
A défaut, il lui restera une action en responsabilité contre le revendeur.
A contrario, et donc si le sous-acquéreur avait été informé du défaut de
propriété pleine et entière du revendeur, le vendeur initial aura le droit
de revendiquer l’animal.
q Action résolutoire
La dernière protection du vendeur est tirée du droit commun et notamment de
l’article 1184 du Code civil.
L’application au droit de la vente des principes de l’article 1184 se retrouve dans
l’article 1654 du Code civil qui dispose que :
« Si l’acheteur ne paye pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la
vente. »
2- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DU DROIT
DE LA VENTE
27
Pour un exemple de résolution de vente :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Redon le 27
septembre 2001 :
v « Attendu que suivant contrat en date du 12 mars 2001, Monsieur vendeur a vendu à Monsieur acheteur un chien de race Dogue allemand au prix
de 5.000 F (762 €) ;
v attendu que Monsieur vendeur soutient n’avoir perçu qu’une partie du prix
de l’animal et demande en conséquence la résolution de la vente ;
v attendu qu’aux termes des dispositions des articles 1654 et suivants du
Code civil cette résolution peut être demandée par le vendeur dès lors que le
prix n’a pas été payé par l’acheteur ; que tel étant le cas, la non-comparution
de Monsieur acheteur laissant supposer qu’il n’a aucun moyen à opposer au
requérant, il convient de faire droit à la demande et d’ordonner la restitution
de l’animal au domicile de Monsieur vendeur dans les quinze jours suivant la
signification du présent jugement. »
2) L’obligation de retirement
C’est à l’acheteur qu’il incombe de procéder au retirement de la chose et non au
vendeur de la lui livrer. Il s’agit d’une conséquence du principe de transfert
immédiat de propriété.
Il en découle notamment qu’en principe les frais de transport sont à la charge
de l’acheteur tout comme les risques de ce transport.
En matière mobilière, ce qui est donc le cas pour une vente de chien ou de chat,
la sanction du non retirement est radicale : le seul fait que l’animal n’ait pas été
retiré à la date convenue emporte résolution de plein droit de la vente, sans qu’il
soit donc besoin d’une action judiciaire !
Le vendeur peut aussitôt revendre l’animal à une autre personne et même
demander des dommages et intérêts au premier acheteur s’il n’a pu ensuite
trouver acquéreur qu’à un plus bas prix.
3/
LE CONTRAT
DE VENTE
Document incontournable et phare de la vente, le contrat de
vente est la pièce maîtresse dans tout litige et toute procédure
judiciaire. Ce document permet à lui seul de préciser au juge
la commune intention des parties et de vérifier s’il existe un
déséquilibre significatif et passible de sanctions.
30
A/ La réservation de l’animal
La réservation d’un chiot ou d’un chaton déjà né n’appelle pas de commentaires particuliers.
On rappellera seulement que selon l’article 16 de la loi du 6 janvier 1999
reproduit dans l’article L. 214-8 II du Code rural, « seuls les chiens et les chats
âgés de plus de huit semaines peuvent faire l’objet d’une cession à titre onéreux ».
A contrario, une cession à titre onéreux étant une vente, il est donc possible
de donner un chaton ou un chiot âgé de moins de huit semaines.
Mais qu’en est-il de la réservation d’un animal qui n’est pas encore né ?
Cette réservation est-elle légale ?
La réponse est positive et repose sur le principe général posé par l’article
1130 du Code civil qui édicte que : « Les choses futures peuvent être l’objet d’une
obligation. »
On se place alors dans le cas d’une vente à terme.
Il est donc tout à fait possible pour un éleveur (ou même pour un vendeur particulier) de vendre un chaton ou un chiot qui n’est pas encore né.
Cela ne doit, cependant, pas se faire sans quelques précautions étant donné la
nature particulière de l’animal :
v lorsque l’éleveur connaît le nombre de chiots ou chatons portés par
la femelle, rien ne lui assure que tous les animaux seront bien vivants après
la mise bas ;
v lorsque l’éleveur vend des chiots ou des chatons avant même la saillie,
l’aléa est encore plus grand.
En tout état de cause, si l’animal venait à ne pas naître ou à décéder peu
de temps après sa naissance, la vente deviendrait alors caduque et la responsabilité de l’éleveur ne pourrait être engagée qu’à la condition de rapporter à son
encontre une faute.
3- LE CONTRAT
DE VENTE
31
B/ Un contrat est un accord de volontés
Si nul ne devrait ignorer la loi, il est un principe connu de tous et selon
lequel le contrat fait la loi des parties.
Il s’agit en fait de l’interprétation de l’article 1134 du Code civil qui dispose que :
« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les
causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. »
Le contrat de vente d’un animal de compagnie, le terme employé par la loi du
6 janvier 1999 est « attestation de cession », ne fait pas exception à ce principe.
Lorsque l’acheteur porte son choix sur le chiot ou le chaton, il doit donc préciser
au vendeur quel usage il entend faire de l’animal. Le vendeur, de son côté, va
informer l’acheteur de la qualité des animaux qu’il vend.
Au final, la vente ne pourra intervenir qu’à la condition d’un accord sur la
destination de l’animal, cet accord étant fondamental vis-à-vis des garanties
dues par le vendeur postérieurement à la vente.
En effet, que ce soit dans le cadre de la garantie de conformité ou de la garantie
pour vices cachés que nous étudierons un peu plus loin dans cet ouvrage, le juge
va se reporter à la destination choisie d’un commun accord par les parties.
La destination de compagnie, si souvent privilégiée, est définie par l’article
L. 214-6 du Code rural qui dispose que :
« On entend par animal de compagnie tout animal détenu ou destiné à être
détenu par l’homme pour son agrément. »
Aussi, vendre un chien ou un chaton comme animal de compagnie n’aura pas les
mêmes conséquences possibles que vendre ce même animal pour la reproduction.
32
C/ Les clauses litigieuses
qui affectent le contrat
1) Les clauses abusives
q Principes
Jusqu’à l’explosion du droit de la consommation, le vendeur, à condition de ne
pas être de mauvaise foi, pouvait limiter et même exclure sa garantie quant aux
vices qui se révèleraient postérieurement à la vente. Telle est la règle exprimée
par l’article 1643 du Code civil.
Dès 1965 cependant, la jurisprudence a fait évoluer cette règle et a déclaré sans
valeur les clauses restrictives de garantie lorsque le vendeur est un professionnel.
La justification est la suivante : le vendeur professionnel ne peut ignorer les
vices de la chose ou était tenu de les connaître.
Peu importe sa bonne foi, la preuve positive de cette dernière étant par ailleurs
totalement inopérante.
Lorsque l’acheteur est un consommateur, cette jurisprudence a été consacrée par
la loi sur les clauses abusives du 10 janvier 1978.
Mais attention, le caractère abusif peut se révéler dans une relation
autre que celle entre le vendeur professionnel et le consommateur.
En effet, les règles sur les clauses abusives s’appliquent également entre professionnels de spécialité différente.
On pourrait donc concevoir qu’un éleveur de chats qui vend un chaton à un éleveur de chiens n’est pas en mesure d’aménager sa responsabilité.
En définitive, une clause restrictive de garanties n’est aujourd’hui valable que
dans deux cas :
v si le vendeur est non professionnel ;
v si la vente est faite à un acheteur professionnel de la même spécialité
que le vendeur.
Mais encore faut-il, dans les deux cas, que le vendeur n’ait pas eu, avant la
vente, connaissance effective du vice, ce qui le rendrait de mauvaise foi.
q Sanction
Une clause abusive n’affecte pas le contrat dans lequel elle figure. Seule la clause
en elle-même est déclarée abusive et par conséquent seule la clause encourt la
nullité.
3- LE CONTRAT
DE VENTE
33
Exemples : Pour un exemple de clause abusive en ce qu’elle stipule
que même en cas de vice les frais vétérinaires resteront à la charge
de l’acheteur :
q Arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 10 septembre 1999 :
« En matière de vente d’animaux, les frais de la vente incluent les débours
que l’acquéreur a dû engager à la suite de celle-ci et notamment ceux occasionnés par la maladie, dès lors qu’en cas d’annulation de la vente, le vendeur bénéficie du croît de l’animal.
Dans ces conditions le vendeur invoque vainement la clause du contrat selon
laquelle les frais de vétérinaires engagés par l’acheteur restent toujours à la
charge de celui-ci. En effet, un vendeur professionnel ne peut en application des
articles 285-3 du Code rural et L. 132-1 du Code de la consommation, se prévaloir à l’égard d’un acheteur non professionnel d’une clause limitant par avance sa
garantie, dès lors que cette clause qui a pour effet de réduire de manière considérable sa responsabilité légale est abusive et crée au préjudice du consommateur
un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. »
De la même manière, sera déclarée abusive une clause qui prive l’acheteur de
l’une des branches de l’option prévue par l’article 1644 du Code civil et donc du
choix à faire entre le fait de garder l’animal et celui de le rendre.
En dehors de la garantie des vices cachés, on trouve également d’autres cas de
clauses abusives.
Ainsi, rappelons que le Code de la consommation, dans son article L. 114-1,
oblige le professionnel à « indiquer la date limite à laquelle il s’engage à livrer
le bien ».
En rapport avec cette obligation, est interdite la clause par laquelle un vendeur
s’exonèrerait de sa responsabilité en cas de retard.
Quant à la conformité :
L’article L. 211-17 du Code de la consommation pose le principe selon
lequel :
« Les conventions qui écartent ou limitent directement ou indirectement les droits
résultant du présent chapitre, conclues entre le vendeur et l’acheteur avant que ce
dernier n’ait formulé de réclamation, sont réputées non écrites. »
Est donc abusive une clause qui aménage la garantie de conformité du vendeur
professionnel vis-à-vis du consommateur.
34
En revanche, il a été jugé par la première chambre civile de la Cour de cassation,
dans un arrêt en date du 24 novembre 1993, que la garantie de conformité peut
être aménagée lorsque la vente est intervenue entre deux professionnels de
spécialité différente :
« Attendu, encore, que cette clause limitant la responsabilité du vendeur à raison non des vices cachés de la chose vendue, mais des défauts de conformité de
la marchandise livrée, la Cour d’appel n’avait pas à rechercher, pour déclarer la
clause opposable à l’acheteur, si ce dernier était un professionnel de même
spécialité que le vendeur. »
2) Les atteintes au droit de propriété
Nous l’avons déjà vu dans les développements sur le refus de vente : le droit
de propriété privée est en France un droit absolu consacré par l’article 544
du Code civil.
Une fois le droit de propriété transféré à l’acheteur, celui-ci est donc seul en
position de prendre des décisions qui concernent l’animal.
Parallèlement, le vendeur, au même instant, perd tout pouvoir.
On ne peut aller à l’encontre de ces principes dans le contrat de vente.
Aussi, n’est pas acceptable la clause suivante :
« Pour éviter de produire tout et n’importe quoi, l’acheteur s’engage à demander l’accord de l’éleveur pour le choix de la femelle pour l’étalon et de l’étalon
pour la femelle. »
Malgré la bonne intention qui l’anime, la clause suivante n’est également pas
opposable à l’acheteur :
« Toute maltraitance signalée à l’éleveur lui donnera le droit de reprendre l’animal sans préavis et la vente sera résolue de plein droit. »
S’il y a réellement maltraitance, le propriétaire pourra être condamné par un
Tribunal pénal et l’animal sera remis à une association.
3) Les clauses attributives de compétence juridictionnelle
Il est plus que tentant pour le vendeur d’un animal, quand on sait que pour
beaucoup de ventes l’acheteur est géographiquement éloigné de l’élevage,
de vouloir choisir à l’avance le tribunal qui réglera les litiges qui viendraient à
naître postérieurement à la cession de l’animal.
Ce type de clause pourrait ainsi permettre à un éleveur de la région toulousaine
de désigner le tribunal de Toulouse comme tribunal compétent et cela, même si
le chien ou le chat a été vendu à une personne habitant Metz, autrement dit à
l’autre bout de la France.
3- LE CONTRAT
DE VENTE
35
L’éleveur y gagnerait ainsi sur la qualité de sa défense.
En effet, il pourrait se rendre lui-même à l’audience sans perdre beaucoup de
temps ou se faire représenter par un avocat de la région avec lequel il pourrait,
étant donné la proximité, facilement communiquer. Le montage du dossier juridique n’en serait que plus facilité.
Pour l’acheteur habitant Metz, les choses seraient bien différentes. Penser à aller
lui-même à l’audience du tribunal de Toulouse serait, à vrai dire, plutôt impensable. Avoir recours à un avocat du Barreau de Metz serait parfaitement faisable.
Les frais de déplacement de cet avocat pour aller plaider le dossier à Toulouse
risqueraient en revanche de fortement décourager notre acheteur. Enfin, avoir
recours également à un avocat du Barreau de Toulouse serait encore une autre
option envisageable. Néanmoins, la communication et la préparation du dossier
risqueraient d’être freinées par la distance.
Il est donc incontestable que seul le vendeur serait avantagé dans une telle
vente et qu’une telle clause insérée dans le contrat découragerait bon nombre
d’acheteurs de faire valoir leurs droits.
Il n’en demeure pas moins que de telles clauses existent bel et bien en matière
contractuelle et notamment en matière de vente.
Elles dérogent cependant et incontestablement aux principes généraux directeurs de la procédure civile que nous étudierons un peu plus loin en traitant de
la compétence territoriale des tribunaux.
C’est pour cette raison qu’elles sont le plus souvent strictement limitées.
Pour une vente effectuée entre un éleveur et un acheteur résidant tous deux
en France.
Nous allons trouver le principe dans l’article 48 du Code de procédure civile :
« Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence
territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée. »
L’éleveur n’étant pas commerçant, la clause attributive de compétence lui est
donc formellement interdite.
Si malgré tout la clause devait figurer dans une attestation de vente, elle serait
réputée non écrite. Autrement dit, l’attestation resterait valable et la clause,
seule, serait comme rayée.
36
Pour une vente effectuée entre un éleveur et un acheteur résidant dans deux
pays différents.
Certains éleveurs vendent maintenant aussi bien dans les pays limitrophes de la
France que dans des pays plus éloignés comme les Etats-Unis.
Nous étudierons ici uniquement le cas des ventes effectuées dans le cadre de la
Communauté européenne.
En cette matière, les choses peuvent venir se compliquer rapidement dans la
mesure où le droit international permet pour un litige par exemple entre la
France et l’Espagne qu’un procès se tienne en Espagne mais soit jugé selon la loi
française et qu’inversement un litige soit jugé en France selon la loi espagnole.
Comment savoir alors quel pays sera désigné et quelle loi sera applicable ?
Le droit contractuel international est régi par la volonté des parties. Il appartient donc à celui qui rédige l’attestation de vente de préciser à la fois :
, le pays compétent ;
, la loi nationale applicable.
Dans le silence du contrat :
q Pays compétent
On se réfère alors aux deux rattachements de l’article 46 du Code de procédure
civile applicable à l’ordre international :
, lieu où demeure le défendeur ;
, lieu de la livraison effective.
Il suffit alors que l’un des rattachements soit localisé en France pour que les
tribunaux français soient compétents.
Autrement dit, les tribunaux français seront compétents si et seulement si, en
présence d’un cocontractant étranger, l’animal doit être livré en France.
q Loi applicable
Dans la mesure où la loi applicable au contrat n’a pas été choisie par les parties,
le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus
étroits.
Il est alors présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays
où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la
conclusion du contrat, sa résidence habituelle.
Dans le cas d’une vente de chien ou de chat, la prestation caractéristique est la
délivrance de l’animal. Cette prestation incombe au vendeur. Si celui-ci n’est
donc pas français, on ne pourra appliquer la loi française.
3- LE CONTRAT
DE VENTE
37
D/ Les documents spécifiques
à la vente d’un animal de compagnie
Il faut ici encore distinguer entre la vente faite par un professionnel et
celle réalisée par un particulier.
q Documents devant être remis à l’acheteur dans une vente faite par
un professionnel :
1° une attestation de cession ;
2° un document d’information sur les caractéristiques et les besoins de l’animal
contenant également, au besoin, des conseils d’éducation.
A noter que pour les transactions réalisées entre professionnels, la facture
tient lieu d’attestation de cession.
q Documents devant être remis à
l’acheteur dans une vente faite par
un non professionnel :
v un certificat de bonne santé établi par
un vétérinaire.
A ces documents principaux, on doit
ajouter ceux attachés à l’animal tels que
le certificat de naissance et la carte
d’identification.
On notera concernant cette dernière
qu’elle n’a pas valeur de titre de propriété mais constitue seulement une
présomption de propriété.
q Affirmation du principe par un
jugement en date du 17 janvier
2005 et rendu par le Tribunal
de Grande Instance de Toulouse
concernant un chien :
« La carte de tatouage ... ne vaut pas titre de
propriété. »
4/
VENTES
PARTICULIÈRES
Toutes les ventes ne se ressemblent pas. Au-delà des fondements
communs, la vente en exposition est soumise à des obligations
accessoires différentes de celles relatives à la vente réalisée à
distance via l’Internet. La différence peut porter également sur
l’animal. Ainsi, le vendeur de chiens de deuxième catégorie
connaît une pression administrative que ne rencontrera peut
être jamais le vendeur de Labradors. Quant au fait que l’on puisse
vendre non pas un animal mais seulement une quote part de
celui-ci, voilà une particularité bien réelle.
40
A/ La vente sur salons
et autres manifestations
Elles se multiplient mais n’en sont pas moins réglementées.
Le principe posé par la loi du 6 janvier 1999 l’est sous forme d’interdiction.
Ainsi, « la cession, à titre gratuit ou onéreux, des chiens et des chats et autres
animaux de compagnie dont la liste est fixée par un arrêté du ministre chargé de
l’agriculture et du ministre chargé de l’environnement est interdite dans les foires,
marchés, brocantes, salons, expositions ou toutes autres manifestations non spécifiquement consacrés aux animaux ».
A contrario, on doit donc en déduire que la cession, à titre gratuit ou onéreux, des chiens et des chats est autorisée dans toutes les manifestations
consacrées aux animaux.
Deux conditions supplémentaires à la conformité de telles manifestations :
v l’organisateur doit avoir fait préalablement une déclaration au
Préfet du département ;
v la mise en place et l’utilisation des installations prévues à cet effet
doivent être bien conformes aux règles sanitaires et de protection animale.
En dehors de ce cadre et à titre exceptionnel, il est permis que des chiens et
chats soient cédés lors de ventes précises et limitées dans le temps sur une
ou plusieurs périodes prédéfinies et en des lieux déterminés mais non spécifiquement consacrés aux animaux. Il y a une condition tout de même à cela : l’accord
du Préfet.
4- VENTES
PARTICULIÈRES
41
B/ La vente à distance
1) Champ d’application
Depuis la transposition de la directive communautaire, la vente à distance est
définie dans l’article L. 121-16 du Code de la consommation qui dispose que :
« Les dispositions de la présente section s’appliquent à toute vente d’un bien ou
toute fourniture d’une prestation de service conclue, sans la présence physique
simultanée des parties, entre un consommateur et un professionnel qui, pour
la conclusion de ce contrat, utilisent une ou plusieurs techniques de communication
à distance. »
En premier lieu, la vente à distance ne concerne que la cession faite par un éleveur à un acheteur consommateur.
En second lieu, il ressort des dispositions de l’article L. 121-16 que le Code de la
consommation ne définit donc pas la vente à distance par la technique utilisée.
Le critère est au contraire l’absence de présence physique entre les deux parties.
Ainsi, le vendeur et l’acheteur négocient et concluent un contrat par le truchement d’une technique permettant de communiquer alors qu’ils ne sont pas en
présence physique l’un de l’autre.
Il peut tout autant s’agir d’une communication par :
, téléphone ;
, courrier ;
, fax ;
, Internet.
A ce critère de présence physique on doit associer les dispositions de l’article
1583 du Code civil sur la vente, à savoir que la propriété est acquise à l’acheteur à l’égard du vendeur dès qu’un accord intervient sur la chose et sur le prix
et cela bien que la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé.
Cette combinaison des deux textes aboutit à la conclusion suivante : on se
trouve dans le cadre d’une vente à distance si au moment où le vendeur et
l’acheteur se mettent d’accord sur l’animal et sur le prix, ils ne sont pas en présence physique l’un de l’autre.
Ainsi, lorsqu’un acheteur réserve par Internet ou par téléphone un chiot ou un
chaton, la vente est faite et il s’agit d’une vente à distance, peu importe que le
contrat de vente soit ensuite signé à l’élevage en présence de l’éleveur et de
l’acheteur : la vente a déjà pris naissance lors de l’accord de volontés.
En outre, si un chèque d’acompte ou d’arrhes est envoyé puis encaissé après l’appel téléphonique ou après l’échange de courriels, il viendra confirmer l’existence de la vente à distance.
42
2) Obligations liées à la vente à distance
Vendre un chiot ou un chaton à distance implique beaucoup plus d’obligations
qu’on ne pourrait le croire.
Beaucoup d’éleveurs d’ailleurs pratiquent la vente à distance sans le savoir,
croyant à tort que la signature de l’attestation de cession à l’élevage ainsi que le
fait que l’acheteur vienne y chercher l’animal écartent l’application des dispositions de la vente par correspondance.
Lourdes donc sont les obligations de celui qui vend à distance.
Ainsi, l’offre de vente des animaux, qu’elle soit sur support papier ou sur
Internet, doit impérativement et conformément à l’article L. 121-18 du Code de
la consommation comporter les informations suivantes :
1° le nom du vendeur, son numéro de téléphone, son adresse ou, s’il s’agit
d’une personne morale, son siège social et, si elle est différente, l’adresse de
l’établissement responsable de l’offre ;
2° le cas échéant, les frais de livraison ;
3° les modalités de paiement, de livraison ou d’exécution ;
4° l’existence d’un droit de rétractation ;
5° la durée de la validité de l’offre et du prix de celle-ci ;
6° le coût de l’utilisation de la technique de communication à distance utilisée
lorsqu’il n’est pas calculé par référence au tarif de base.
Ces informations à caractère commercial doivent :
v apparaître sans équivoque ;
v être communiquées à l’acheteur consommateur de manière claire
et compréhensible ;
v être communiquées par tout moyen adapté à la technique de communication
à distance utilisée.
A défaut de respect de ces obligations, l’éleveur pourra être confronté à la
Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression
des fraudes.
Au-delà des impératifs liés à la rédaction de l’offre, l’obligation la plus lourde
pour un éleveur en cas de vente à distance reste sans aucun doute celle liée au
droit de retour donné à l’acheteur.
En effet, selon les dispositions de l’article L. 121-20 du Code de la consommation : « Le consommateur dispose d’un délai de sept jours francs pour exercer
son droit de rétractation sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités, à
l’exception, le cas échéant, des frais de retour. »
En d’autres termes, l’acheteur peut ramener à l’éleveur l’animal vendu dans les
sept jours suivant la délivrance, et ce, sans qu’il ait à se justifier ou la moindre
indemnité à verser. On lui demande simplement de prendre à sa charge les frais
de transport.
4- VENTES
PARTICULIÈRES
43
L’éleveur, lui, va alors se retrouver avec un animal à revendre. Il aura subi un
réel préjudice dont il ne pourra pas obtenir réparation.
En contrepartie du retour de l’animal, l’éleveur doit rembourser à l’acheteur le
prix de vente et ce, dans un délai maximum de trente jours à compter du jour
où l’acheteur a exercé son droit de retour.
Au delà des trente jours, la somme due sera productive d’intérêts au taux légal
en vigueur.
Enfin, il n’est pas inutile de préciser que les arrhes sont totalement compatibles
avec une vente à distance.
Dans un tel cas de figure, l’acheteur peut :
v avant la délivrance, exercer son droit de rétractation et perdre les arrhes
versées ;
v après la délivrance, exercer son droit de retour et n’avoir que les frais
de transport à assumer.
En conséquence, s’il connaît bien la législation et qu’il sait, avant même la
livraison, qu’il ne gardera pas le chiot ou le chaton, son intérêt sera d’attendre
la remise de l’animal pour exercer son droit de retour. Cet intérêt est bien
entendu contraire à celui de l’éleveur.
44
C/ La « copropriété »
Deux éleveurs tous deux propriétaires d’un même chien ou d’un même
chat se disent la plupart du temps être en copropriété.
Le terme de copropriété n’est cependant pas applicable à la propriété partagée
d’un animal.
En effet, la copropriété est l’organisation de la propriété d’un immeuble bâti
réparti par lots entre plusieurs personnes.
Elle est régie par la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
L’article 1er de cette loi dispose que :
« La présente loi régit tout immeuble bâti ou groupe d’immeubles bâtis dont la
propriété est répartie, entre plusieurs personnes, par lots comprenant chacun une
partie privative et une quote-part de parties communes. »
La copropriété ne peut donc concerner un animal de compagnie.
Malgré tout, la propriété partagée d’un animal entre plusieurs personnes existe
bien.
Elle n’est cependant pas soumise aux règles de la copropriété mais aux règles de
l’indivision figurant aux articles 815 et suivants du Code civil.
L’indivision ne pose pas de problèmes en soi tant que les propriétaires de l’animal appelés « indivisaires » s’entendent.
Du jour où l’entente cesse, on doit déterminer les droits de chacun.
Ces droits sont normalement prévus par un contrat passé entres les indivisaires.
Mais le contrat peut n’avoir pas envisagé tous les cas de figure ou même être
totalement inexistant.
Dans les deux cas, on doit alors se reporter aux règles générales de l’indivision.
La première de ces règles est posée par l’article 815 qui dispose que :
« Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué. »
En d’autres termes, le jour où deux propriétaires d’un même animal ne s’entendent plus, le partage doit être effectué. Bien entendu, il ne sera nullement question de partager l’animal mais de l’attribuer à l’un des indivisaires qui versera
alors à l’autre une indemnité.
4- VENTES
PARTICULIÈRES
Durant l’indivision, les principes suivants trouveront application :
q Article 815-2 :
« Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des
biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence.
Il peut employer à cet effet les fonds de l’indivision détenus par lui et il est réputé en
avoir la libre disposition à l’égard des tiers.
A défaut de fonds de l’indivision, il peut obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les
dépenses nécessaires. »
La conservation d’un animal s’entend du fait de le nourrir et de le soigner. Tout
indivisaire peut donc nourrir l’animal et l’emmener chez le vétérinaire afin de
le faire soigner ou vacciner. Ces dépenses devront en revanche être supportées
par tous les propriétaires.
q Article 815-3 :
« Le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne
ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de
disposition. »
Un indivisaire ne peut vendre ou donner seul l’animal en indivision. Il lui faut
le consentement unanime de tous.
q Article 815-14 :
Un indivisaire peut vendre sa part à une personne étrangère à l’indivision.
Néanmoins, dans ce cas, les autres indivisaires ont un droit prioritaire pour
acheter la part à vendre. Mais attention : la priorité ne dure qu’un mois.
Enfin :
q Article 815-9 :
« L’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention
contraire, redevable d’une indemnité. »
En ce qui concerne un animal de compagnie, la convention contraire sera fréquente dans la mesure où l’éleveur qui détient l’animal sur son élevage en
assume aussi généralement les frais d’entretien. Il ne saurait donc, en plus,
verser aux autres indivisaires une indemnité.
Attention, en revanche, aux chiots ou chatons qui pourraient naître : ils
n’appartiendront pas à celui qui détient l’animal mais à tous les indivisaires.
En conclusion, lorsqu’une indivision sur un animal de compagnie commence à
poser problème et que la voie amiable semble vouée à l’échec, l’indivisaire qui
veut faire valoir ses droits sera obligé d’en passer par la voie judiciaire.
45
46
D/ La vente de chiens
de deuxième catégorie
1) Les deux catégories
instituées par la loi du 6 janvier 1999
PETIT RAPPEL
La loi du 6 janvier 1999 a classé les chiens dits dangereux en
deux catégories :
, les chiens d’attaque (première catégorie) ;
, les chiens de garde et de défense (deuxième catégorie).
Selon, l’arrêté du 27 avril 1999, relèvent de la première catégorie :
, les chiens assimilables par leurs caractéristiques morphologiques aux chiens
de race Staffordshire terrier, sans être inscrits à un livre généalogique reconnu
par le ministre de l’agriculture et de la pêche ;
, les chiens assimilables par leurs caractéristiques morphologiques aux chiens
de race American Staffordshire terrier, sans être inscrits à un livre généalogique
reconnu par le ministre de l’agriculture et de la pêche.
Ces deux types de chiens peuvent être communément appelés « Pit-bulls » ;
, les chiens assimilables par leurs caractéristiques morphologiques aux chiens
de race Mastiff, sans être inscrits à un livre généalogique reconnu par le
ministre de l’agriculture et de la pêche. Ces chiens peuvent être communément
appelés « Boerbulls » ;
, les chiens assimilables par leurs caractéristiques morphologiques aux chiens
de race Tosa, sans être inscrits à un livre généalogique reconnu par le ministre
de l’agriculture et de la pêche.
Relèvent de la deuxième catégorie :
les chiens de race Staffordshire terrier ;
les chiens de race American Staffordshire terrier ;
les chiens de race Rottweiler ;
les chiens de race Tosa ;
les chiens assimilables par leurs caractéristiques morphologiques aux chiens
de race Rottweiler, sans être inscrits à un livre généalogique reconnu par
le ministre de l’agriculture et de la pêche.
,
,
,
,
,
2) Le cas des chiens de première catégorie
Concernant la vente des chiens de première catégorie, le principe est tout à la
fois simple et catégorique : il s’agit d’une interdiction totale (article L. 211-15
du Code rural).
Le vendeur tout comme l’acheteur qui contreviendrait à cette interdiction pourrait être puni :
4- VENTES
PARTICULIÈRES
47
q à titre principal :
, de six mois d’emprisonnement au plus
et/ou
, de 15.000 € d’amende au plus.
q à titre de peine complémentaire :
par la confiscation du ou des chiens concernés ;
, par l’interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d’exercer une activité
professionnelle ou sociale dès lors que les facilités que procure cette activité ont
été sciemment utilisées pour préparer ou commettre l’infraction ;
, par l’interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, de détenir un chien de
première ou deuxième catégorie.
,
Pour un exemple d’infraction constatée :
q Arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation
le 7 janvier 2003
« Se rend coupable du délit d’acquisition d’un chien d’attaque institué par
l’article 2 de la loi du 6 janvier 1999, et désormais prévu et puni par les articles
L. 211-15 et L. 215-2 du Code rural, le prévenu qui a fait l’acquisition d’un
chien de type Pitbull, né le 20 mars 2000, et classé en première catégorie par les
articles L. 211-12 du même code et 111 de l’arrêté du 27 avril 1999. La seule
constatation de la violation en connaissance de cause d’une prescription légale
ou réglementaire implique de la part de son auteur l’intention coupable exigée
par l’article 121-3 du Code pénal. »
3) La vente soumise à conditions des chiens de seconde
catégorie
Abordons à présent la vente, bien autorisée cette fois-ci, des chiens appartenant
à la seconde catégorie.
Si elle est licite, elle est également très réglementée.
En effet, tout citoyen ne peut légalement détenir un chien de deuxième catégorie. Il faut avant tout qu’il soit un bon citoyen, capable et adulte de surcroît.
La loi (article L. 211-13 du Code rural) a pris le parti d’interdire la détention
des chiens de deuxième catégorie aux personnes suivantes :
, personnes âgées de moins de dix-huit ans ;
, majeurs en tutelle à moins qu’ils n’y aient été autorisés par le juge
des tutelles ;
48
, personnes condamnées pour crime ou à une peine d’emprisonnement avec ou
sans sursis pour délit inscrit au bulletin nº 2 du casier judiciaire ou,
pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent ;
, personnes auxquelles la propriété ou la garde d’un chien a été retirée en
application de l’article L. 211-11, c’est-à-dire pour la dangerosité que pouvait
représenter le chien pour les autres.
Mais l’éleveur a-t-il vraiment les moyens de vérifier que l’acheteur qui se
présente pour conclure la vente n’entre pas dans l’une de ces catégories ?
La réponse est négative.
Mis à part l’âge de l’acheteur vérifiable sur un document d’identité, l’éleveur :
v n’a aucun moyen de savoir si une personne se trouve sous un régime de
tutelle ;
v n’est pas autorisé à consulter le bulletin nº 2 du casier judiciaire de l’acheteur.
Il ne peut donc, dans trois cas sur quatre, que se fier aux déclarations de
l’acquéreur.
Néanmoins, si le vendeur particulier n’est pas tenu des obligations d’information et de conseil que nous avons étudiées précédemment, l’éleveur, quant à lui,
se devra d’être très vigilant à la vente d’un chien de deuxième catégorie.
Ainsi, il doit clairement énoncer et mettre par écrit dans le contrat de vente les
interdictions énoncées par l’article L. 211-13 du Code rural et y mentionner
également que l’acquéreur a déclaré ne pas entrer dans l’une de ces catégories.
Le contrat de vente ainsi rédigé et signé par l’acheteur permettra d’exonérer le
vendeur de toute responsabilité si l’acquéreur devait avoir menti. En ce cas, la
peine principale encourue par l’acheteur est de :
, six mois d’emprisonnement au plus
et/ou
, 7.500 € d’amende au plus.
A titre de peine complémentaire, l’acheteur encourt :
, la confiscation du ou des chiens concernés ;
, l’interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, de détenir un chien
des première ou deuxième catégories.
Mais l’obligation de renseignement de l’éleveur ne s’arrête pas là.
4- VENTES
PARTICULIÈRES
49
Il est également en charge d’informer l’acheteur des obligations liées à la détention d’un chien de deuxième catégorie.
Le contrat de vente devra donc mentionner que cette détention doit
s’accompagner :
, du dépôt d’une déclaration à la mairie du lieu de résidence du propriétaire
de l’animal ou, quand il diffère de celui de son propriétaire, du lieu de résidence
du chien, cette déclaration devant être à nouveau déposée chaque fois à la
mairie du nouveau domicile ;
, de la vaccination antirabique du chien ;
, de la souscription d’une assurance garantissant la responsabilité civile
du propriétaire du chien ou de celui qui le détient, pour les dommages causés
aux tiers par l’animal.
Eu égard au contexte actuel concernant les chiens de seconde catégorie, les
obligations de l’éleveur dans une vente concernant ce type de chiens ne vont
cesser d’être revues à la hausse.
5/
PRINCIPES GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
Une procédure judiciaire peut très rapidement devenir le parcours du combattant. Ignorer les règles de procédure peut être
fatal. Mieux vaut donc au moins connaître les essentielles.
52
A/ Organisation de la justice en France
Nombreux et variés sont les tribunaux en France. Le justiciable a de quoi
s’y perdre.
On les regroupe malgré tout en plusieurs catégories appelées juridictions et organisées en deux grands ordres : un ordre judiciaire et un ordre administratif.
Chaque ordre possède ses tribunaux avec ses propres règles adaptées à la nature
des litiges en cause et à leur importance.
Un litige relève forcément de l’un de ces deux ordres.
En cas de doute sur l’attribution du litige, le problème est soumis à un tribunal
créé spécialement à cet effet : le Tribunal des conflits.
Ce tribunal décide de l’appartenance à l’un ou l’autre des ordres afin que ceux-ci
ne se renvoient pas indéfiniment le litige, évitant ainsi de le trancher.
En l’espèce et concernant la vente des chiens et chats, nous ne nous intéresserons
qu’aux juridictions de l’ordre judiciaire.
Ces juridictions règlent les litiges entre les personnes et sanctionnent les atteintes
contre les personnes, les biens et la société.
Lorsqu’elles sont chargées de juger les personnes soupçonnées d’une infraction
(contravention, délit, crime), ce sont les juridictions pénales ou répressives.
Celles qui n’infligent pas de peines mais tranchent un conflit (loyer, divorce,
consommation, héritage...) sont les juridictions civiles.
Le justiciable n’a pas le choix du tribunal qu’il doit saisir.
En effet, avant de se lancer dans un procès, le demandeur doit d’abord arriver à
déterminer précisément le tribunal qu’il doit saisir.
Pour savoir si, à l’égard d’un procès déterminé, tel tribunal est compétent, c’està-dire a reçu de la loi l’aptitude à étudier et juger telle affaire, il faut se placer
successivement à deux niveaux :
, au niveau de la compétence d’attribution ;
, au niveau de la compétence territoriale.
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
53
1) Compétence d’attribution des tribunaux
Il s’agit en premier lieu pour le justiciable de déterminer devant quel type de
tribunal il doit présenter sa demande.
a) Les juridictions civiles du premier degré
Trois tribunaux se partagent désormais ce contentieux : le Tribunal
de Grande Instance (TGI), le Tribunal d’instance et le juge de proximité.
Le juge de proximité est une création de la loi du 9 septembre 2002. L’objectif
de cette loi était d’attraire devant cette nouvelle juridiction les petits litiges de
la vie quotidienne, ceux qui en raison de leur faible montant ou de leur nature
ne sont pas portés devant un tribunal et d’assurer à ce contentieux un traitement simplifié, peu coûteux et rapide.
Ont donc été mis en place les juges de proximité qui ne sont pas des juges professionnels mais des personnes de la vie civile ayant des connaissances et une
expérience dans le domaine juridique qui apportent une contribution occasionnelle au fonctionnement du service public de la justice pour une durée non
renouvelable de 7 ans.
Le jugement rendu par la juridiction de proximité n’est pas susceptible d’appel,
ce qui constitue un véritable risque pour les deux parties au procès.
Le Tribunal de Grande Instance est la juridiction de droit commun. Autrement
dit, il a vocation à connaître tous les litiges qui ne sont pas expressément dévolus
à une autre juridiction.
Par opposition, les deux autres sont donc des juridictions d’exception.
Dès l’instant qu’un texte particulier n’a pas confié la connaissance d’une
certaine catégorie de litiges à un Tribunal d’exception, le Tribunal de Grande
Instance est compétent.
Cette solution est affirmée par l’article R. 311-1 du Code de l’organisation
judiciaire :
« Le Tribunal de Grande Instance connaît, à charge d’appel, de toutes les affaires pour lesquelles compétence n’est pas attribuée expressément à une autre juridiction, en raison de la nature de l’affaire ou du montant de la demande. »
La nature de l’affaire mais aussi et surtout le montant de la demande sont donc
déterminants dans la désignation du tribunal compétent.
Concernant la nature de l’affaire, la détermination ressort des compétences
exclusives réservées à chaque tribunal.
Ainsi, le TGI a compétence exclusive notamment dans les matières suivantes :
divorce, autorité parentale, succession, filiation, immobilier.
54
De la même manière, le Tribunal d’instance va avoir des attributions spécifiques. Elles sont nombreuses, variées et figurent dans les articles R. 321-3 et suivants du Code de l’organisation judiciaire.
On y trouve par exemple :
, les contestations relatives au contrat de salaire différé ;
, les contestations entre les nourrices ou les personnes et établissements
prenant des enfants en garde ou en pension et ceux qui les leur confient ;
, les contestations relatives aux frais de scolarité ou d’internat, lorsque
la demande est formée par tout établissement d’enseignement public ou privé ;
, les contestations relatives au contrat d’engagement entre armateurs
et marins.
Mais on y trouve également et à quelque valeur que la demande puisse s’élever :
les demandes relatives aux vices rédhibitoires et aux maladies contagieuses
des animaux domestiques, fondées sur les dispositions du Code rural ou sur la
convention des parties, quel qu’ait été le mode d’acquisition des animaux.
Le Tribunal d’instance apparaît donc comme la juridiction qui doit être saisie
en cas de vice répertorié par le Code rural ou de maladie réputée légalement
contagieuse.
En cas de vice caché, la solution sera différente.
Outre leurs compétences d’attribution spécifiques, les trois tribunaux ont vocation à se partager le contentieux des actions personnelles ou mobilières.
Le partage se fait alors en fonction du montant de la demande :
, jusqu’à 4.000 €, c’est la juridiction de proximité qui va trancher ;
, au-delà de 4.000 € et en deçà de 10.000 €, c’est le Tribunal d’instance ;
, au delà de 10.000 €, l’affaire sera portée devant le Tribunal de
Grande Instance.
Il faut en déduire qu’en cas de vice caché, le litige devra être porté devant le
juge de proximité si la demande est inférieure à 4.000 € et devant le Tribunal
d’instance au-delà.
b) La juridiction de second degré : la Cour d’appel
q Principes généraux
Selon l’article 542 du Code de procédure civile, l’appel tend à faire réformer ou
annuler par la Cour d’appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré.
L’appel est donc une voie de recours de droit commun par laquelle une partie
qui se croit lésée par un jugement, défère le procès et le jugement aux juges du
degré supérieur.
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
55
L’appel est une garantie de bonne justice et de sauvegarde des libertés publiques
car il permet un deuxième examen du procès fait par une autre juridiction qui
se doit d’être supérieure à la première.
La réformation du jugement vise à réparer les erreurs intellectuelles.
Le litige est alors entièrement réétudié par les juges du deuxième degré avec toutes
les questions de fait et de droit qu’il comporte.
Au final : soit le premier jugement est entièrement confirmé, soit il est infirmé
partiellement ou totalement.
L’arrêt rendu vient se substituer au premier jugement et devra être exécuté.
Attention cependant : l’appel n’est pas toujours possible.
Pour ces décisions qui ne sont pas susceptibles d’appel, on dit qu’elles sont rendues
en premier et dernier ressort.
C’est, en autres, le sort des jugements rendus par le juge de proximité.
Dans ce cas néanmoins, tout recours n’est pas bloqué puisque la voie du pourvoi
en cassation reste ouverte.
Lorsqu’un jugement est susceptible d’appel, on dit qu’il est rendu en premier
ressort.
Pour le Tribunal d’instance, cela concerne principalement les litiges dont le
montant dépasse le seuil de 4.000 € (taux du ressort).
56
Pour un exemple d’appel recevable :
q Arrêt rendu par la Cour d’appel de Dijon le 15 avril 1993 :
« Selon les dispositions de l’article 35 alinéa 2 du Nouveau Code de procédure
civile, lorsque les prétentions réunies sont fondées sur les mêmes faits ou sont
connexes, la compétence et le taux du ressort sont déterminés par la valeur
totale de ces prétentions.
En l’espèce, le fait unique dont découlent les prétentions de l’acheteur d’un chien
de race résulte de la vente de l’animal dont il demande l’annulation avec pour
corollaire la restitution du prix et le paiement de dommages-intérêts.
Il s’ensuit que, la valeur totale des prétentions étant supérieure au taux du
ressort fixé par le Code de l’organisation judiciaire, le jugement a été justement
qualifié en premier ressort et que l’appel interjeté par le vendeur est recevable. »
A noter que depuis le 1er janvier 2001, les verdicts des Cours d’assises peuvent
faire l’objet d’un appel devant une autre Cour d’assises.
Délai
Le délai de recours en matière contentieuse est d’un mois.
Ce délai court du jour où le jugement a été signifié à la partie adverse par voie
d’huissier.
Effet suspensif de l’appel
Outre la volonté de faire réformer le premier jugement rendu, l’appel est souvent utilisé par la partie perdante aux fins de gagner du temps.
En effet, l’appel a par principe un effet suspensif. Aussi, lorsqu’il est formé, l’exécution du premier jugement rendu est suspendue.
Cette suspension va durer quoi qu’il arrive pendant le délai laissé aux parties au
procès afin de décider si elles veulent ou non utiliser la voie de l’appel.
L’effet suspensif se prolongera ensuite si la voie de recours est utilisée.
Attention toutefois : l’effet suspensif ne se produit entre les parties que
dans la mesure où le jugement n’a pas été assorti dans sa formulation de
l’« exécution provisoire ».
Si à la fin du jugement, on peut lire qu’il y a lieu à « exécution provisoire », cela
signifie que malgré l’appel, celui qui aura gagné le premier procès sera en mesure
de faire exécuter la décision du tribunal contre le perdant.
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
57
Attention également : afin d’éviter les appels dilatoires, la loi impose à
l’appelant de déposer ses écritures dans les quatre mois de la déclaration
d’appel. A défaut, l’affaire est radiée et l’effet suspensif disparaît.
c) La Haute Cour : la Cour de cassation
Elle n’est pas un troisième degré de juridiction.
En effet, cette Cour saisie par un pourvoi ne rejuge pas l’affaire mais vérifie si les
lois ont été correctement appliquées par les tribunaux et les Cours d’appel.
On dit qu’elle est juge du droit et non des faits.
Si le pourvoi est non fondé en droit, la Cour rend un arrêt de rejet.
Si le droit n’a pas été correctement appliqué, la décision déférée sera cassée.
La Cour de cassation ne pouvant trancher le litige, l’affaire sera renvoyée à une
autre juridiction de même ordre, de même degré et de même nature que celle
qui avait primitivement statué.
Ainsi, si la décision déférée avait été rendue par une Cour d’appel, ce sera une
autre Cour d’appel qui se prononcera sur renvoi.
2) Compétence territoriale des tribunaux
Il s’agit en second lieu, pour le justiciable, de déterminer le tribunal géographiquement compétent.
Au 26 juin 2007, le ministère de la justice recensait en France :
, 476 Tribunaux d’instance et juridictions de proximité ;
, 181 Tribunaux de Grande Instance ;
, 35 Cours d’appel.
La réforme de la carte judiciaire entamée depuis dans un but annoncé de simplification va revoir à la baisse ces chiffres, notamment en ce qui concerne les
juridictions de première instance que sont les Tribunaux d’instance et les juridictions de proximité.
Les implantations judiciaires - après réforme 58
5- PRINCIPES
Ainsi :
, pour les Tribunaux d’instance (TI) : au 1er janvier 2010, 178 Tribunaux
d’instance auront été supprimés. Parallèlement, 7 Tribunaux d’instance et
7 juridictions de proximité seront créés ;
, pour les TGI : au 1er janvier 2011, 23 Tribunaux de Grande Instance
seront supprimés.
a) Le principe
La règle est si ancienne qu’elle ressort de la formulation latine :
« actor sequitur forum rei ».
Traduction : le tribunal compétent est celui du défendeur (celui qui n’est pas à
l’origine de la demande en justice).
Ce principe est consacré par l’article 42 du Code de procédure civile qui
dispose que :
« La juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle
du lieu où demeure le défendeur.
S’il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où
demeure l’un d’eux. »
La justification de ce principe réside pour l’essentiel dans le fait qu’on ne saurait
laisser la voie libre aux demandeurs malhonnêtes qui assigneraient devant un
tribunal parfois très éloigné du domicile des défendeurs tout en sachant que leur
propre insolvabilité les empêcherait par la suite de rembourser les frais de déplacement qu’ils ont imposés à ces défendeurs.
On notera qu’en vertu de l’article 43 du Code de procédure civile le « lieu où
demeure le défendeur » s’entend du lieu où celui-ci a son domicile ou, à défaut, sa
résidence.
b) L’exception
En matière contractuelle et donc dans le cadre d’une vente d’animal
de compagnie, le code donne au demandeur en justice une option.
Ainsi, s’il peut choisir de saisir le tribunal du lieu où demeure le défendeur, il
peut également saisir en vertu de l’article 46 du Code de procédure civile la juridiction du lieu de la livraison effective de l’animal.
Prenons l’exemple de la vente d’un chiot sur un salon. Imaginons que ce salon
ait lieu à Lyon, que l’éleveur ait son élevage sur Strasbourg et que l’acheteur
de passage alors sur Lyon ait sa résidence sur Marseille.
Cet acheteur marseillais pourra en cas litige saisir au choix :
, le tribunal de Lyon
ou
, le tribunal de Strasbourg.
Je vous laisse deviner vers quelle ville irait sa préférence.
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
59
60
Mais que se passe-t-il si l’acheteur se trompe de tribunal ? Dans l’exemple choisi,
que se passe-t-il donc si l’acheteur saisit le tribunal de Marseille ?
En ce cas, l’éleveur peut indiquer au tribunal cette erreur. S’il décide de le faire,
il doit alors :
v demander au tribunal saisi de se déclarer incompétent ;
v indiquer au tribunal saisi le tribunal compétent.
Cette seconde obligation est incontournable : si l’éleveur n’indique pas quel
tribunal est normalement compétent, le juge saisi ne pourra relever sa propre
incompétence.
Toujours dans l’exemple choisi, l’éleveur devra donc indiquer au tribunal de
Marseille qu’il est incompétent et demander à ce que le dossier soit transféré sur
Strasbourg.
c) Jurisprudence
Pour un exemple de tribunal incompétent territorialement :
q Jugement de la juridiction de proximité de Rochefort en date du
4 mai 2006 :
v « Attendu que par application de l’article 42 du Code de procédure
civile, le tribunal compétent est celui du lieu où demeure le défendeur ;
v que l’article 46 du même code précise qu’en matière contractuelle, le
demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le
défendeur, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ;
v attendu en l’espèce que Monsieur vendeur demeure à xxx, sur le ressort du
Tribunal d’instance de Pessac ;
v que le chien, objet de la vente a été livré à Monsieur acheteur sur le lieu
même de l’élevage ;
v que le juge de proximité de Rochefort est en conséquence incompétent.
Par ces motifs
Le juge de proximité statuant publiquement contradictoirement et par jugement susceptible de contredit ;
Se déclare incompétent au profit du juge de proximité du Tribunal d’instance
de Pessac (Gironde) auquel le présent dossier sera transmis par les soins du
greffe à l’expiration du délai de contredit. »
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
B/ Le principe du contradictoire
1) Définition et applications
Si vous regardez trop les séries télévisées américaines, vous risquez d’être déçu
par le présent paragraphe.
En effet, en France, le système judiciaire interdit tout effet de surprise dans un
procès.
Impossible de sortir de son chapeau un argument de dernière minute devant le
juge et de déstabiliser ainsi la partie adverse !
L’inattendu n’existe pas au jour des plaidoiries. Tout est connu d’avance et de
tous : c’est le principe du contradictoire.
Ce principe est consacré par l’article 15 du Code de procédure civile qui
dispose que :
« Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens
de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles
produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même
d’organiser sa défense. »
Le principe du contradictoire est un élément fondamental de la loyauté du procès
en France.
Il veut que chaque partie soit en mesure de discuter les prétentions, les arguments et les preuves de son adversaire. De ce fait, il s’applique tout autant aux
parties elles-mêmes qu’au juge en charge du dossier.
Ainsi, le juge devra faire respecter les droits de la défense en s’assurant que
chaque partie a bien signifié ses arguments écrits (appelés procéduralement
« conclusions ») à l’adversaire, en imposant la communication des pièces et en
ne statuant que sur les éléments du procès qui ont été contradictoirement
débattus devant lui.
Toutes les pièces remises au juge par une partie doivent donc l’avoir été également dans leur intégralité et préalablement à l’adversaire.
Il en est de même des conclusions produites au juge.
Quant à l’expertise qui peut être ordonnée dans le cadre de la procédure concernant un animal de compagnie, elle regorge d’applications du principe du
contradictoire :
v pour la réunion d’expertise, l’expert doit convoquer toutes les parties.
Si une partie choisit ensuite de ne pas s’y présenter, cette absence n’aura pas
d’influence sur la validité de la réunion, l’élément déterminant étant le fait
que toutes les parties aient été mises en demeure de venir ;
v chaque pièce communiquée par l’une des parties à l’expert doit également
l’être à l’adversaire. L’expert doit s’assurer de cette communication ;
61
62
v les résultats des investigations techniques auxquelles l’expert a procédé
hors la présence des parties doivent être soumis à celles-ci afin de leur permettre
d’être éventuellement à même d’en débattre contradictoirement avant le
dépôt du rapport.
La sanction du non respect du principe du contradictoire pour une expertise
n’est rien d’autre que la nullité !
2) Jurisprudence
Pour un exemple de nullité d’expertise où l’acheteur,
malgré la désignation par le tribunal d’un expert judiciaire, avait
fait expertiser son chien par deux vétérinaires de son choix et ce,
sans la présence de l’adversaire :
q Jugement rendu par la juridiction de proximité de Valence le
27 janvier 2006
v « Attendu que Monsieur T. a versé aux débats les deux attestations
des docteurs vétérinaires G. et P. en dates de 1er et 8 juillet 2005, effectuées sans attendre l’expertise ordonnée ;
v attendu que les prestations de ces deux vétérinaires ont été pratiquées sans
que le principe du contradictoire n’ait été respecté puisque le défendeur,
n’ayant pas été convoqué, n’a pas pu y participer, elles devront être écartées. »
Pour un exemple d’irrecevabilité d’une demande de publication du
jugement (affaire de publicité trompeuse relative à la vente de chiens)
pour cause de non respect du contradictoire :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Chateaudant le 14
novembre 2000
v « Attendu que le demandeur a en outre réclamé la publication
du jugement ;
v attendu qu’aux termes de l’art 15 du NCPC, les parties doivent se faire
connaître mutuellement et en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles
fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les
moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser
sa défense ;
v attendu que la demande susvisée a été formée verbalement à l’audience,
en l’absence du défendeur qui n’en a pas eu connaissance ;
Que ladite demande ne revêt pas de caractère contradictoire et sera donc
déclarée irrecevable. »
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
63
C/ L’expertise judiciaire
Un litige relatif à la vente d’un animal de compagnie implique forcément
l’étude et l’appréciation de la maladie qui le touche.
Oui mais voilà : le juge est doté uniquement de compétences juridiques. Il n’en
possède pas en matière médicale.
Certaines affaires relativement simples pourront malgré tout se régler en considération de la seule documentation médicale communiquée par les parties.
Dans d’autres cas, le recours à un expert vétérinaire sera nécessaire.
1) Moment du recours à l’expertise
L’expert peut intervenir soit avant le début du procès soit en cours de procès.
Il peut être ainsi souhaitable dans des cas bien particuliers et motivés par l’urgence que l’expertise ait lieu au plus tôt.
Ainsi, lorsque le chat ou le chien est décédé, il est préférable pour l’acheteur de
faire d’abord pratiquer une expertise avant d’engager le procès.
La solution est consacrée par l’article 145 du Code de procédure civile qui
dispose que :
« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve
de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête
ou en référé. »
Mais l’expertise peut également avoir lieu alors que le procès est déjà engagé.
L’éleveur peut considérer que les certificats médicaux produits par l’acheteur
sont peu probants et vouloir qu’une expertise judiciaire soit réalisée afin de
démontrer la réalité médicale du dossier.
2) La demande d’expertise
Elle peut être faite par l’une ou la totalité des parties au procès.
L’expertise peut également être ordonnée d’office par le juge qui s’estime insuffisamment informé par les pièces qui lui ont été communiquées pour trancher
le litige.
Dans ce dernier cas, l’expertise est certaine. Dans l’autre cas, cependant, il faut
savoir que le juge n’est pas tenu de faire droit à la demande. L’expertise est facultative et les juges font usage de leur pouvoir souverain d’appréciation pour décider
de faire droit ou non à la demande.
3) La décision ordonnant l’expertise
64
Recourir à une expertise a un coût manifeste. L’expertise doit donc être justifiée. En vertu de l’article 256 du Code de procédure civile, lorsqu’une question purement technique ne requiert pas d’investigations complexes, le juge
peut charger la personne qu’il commet de lui fournir une simple consultation.
A contrario, on estime donc que le recours à l’expertise suppose des investigations complexes.
En outre, le magistrat doit justifier dans son jugement de la nécessité de recourir
à une expertise.
Ainsi, la décision qui ordonne l’expertise :
v expose les circonstances qui rendent nécessaire l’expertise et, s’il y a lieu,
la nomination de plusieurs experts ;
v nomme l’expert ou les experts — A ce propos, le juge reste libre de désigner la personne de son choix, mais avec une préférence de la loi pour l’expert
judiciaire ;
v énonce les chefs de la mission de l’expert ;
v impartit le délai dans lequel l’expert devra donner son avis.
Pour un exemple de mission d’expertise dans une affaire où le chiot
était décédé d’une coccidiose :
q Jugement rendu le 19 mai 2006 par la juridiction de proximité
de Versailles :
« Le juge de proximité statuant publiquement par jugement contradictoire et avant dire droit :
v sursoit à statuer sur l’ensemble des demandes jusqu’à la nouvelle audience du
13 octobre 2006 à 9 heures à laquelle l’affaire est renvoyée ;
v ordonne l’expertise et désigne à cette fin Monsieur S. lequel aura pour
mission :
, prendre connaissance de tous les documents notamment médicaux
concernant l’animal ;
, préciser la période d’incubation de la coccidiose intestinale dont aurait
souffert l’animal ;
, donner son avis sur les causes du décès, en précisant si elles existaient même
en germe au moment de la vente ;
, de façon générale, donner toutes informations de nature à parfaire
l’information du juge.
v Dit que l’expert devra déposer son rapport dans un délai de trois mois à
compter de ce jour ;
v fixe la consignation par Mme G. à la somme de 700 € pour le 15 juin 2006
au plus tard ;
v réserve les dépens. »
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
65
Pour un exemple de mission d’expertise en matière de responsabilité
médicale :
q Jugement rendu par le Tribunal d’instance de Muret le 25 mai 2007 :
L’expert aura pour mission de « après avoir convoqué les parties :
se faire communiquer par les parties et prendre connaissance de tous documents concernant l’intervention pratiquée sur le chien par le vétérinaire ;
, dire si le vétérinaire a donné des soins attentifs, consciencieux et conformes
aux données acquises de la science lors de cette intervention et, en particulier,
dire si le fait de pratiquer une césarienne dans les conditions existantes lors de
l’intervention est constitutif d’une erreur.
,
Plus généralement, fournir tous les éléments techniques ou de fait, de nature à
permettre une appréciation complète du litige :
dit que l’expert devra s’expliquer techniquement sur les éventuelles
observations des parties recueillies à l’occasion d’une réunion de synthèse
précédant le dépôt du rapport au cours de laquelle il les informera de l’état
de ses investigations et de ses conclusions ;
, rappelle que pour l’accomplissement de cette mission, l’expert aura la faculté
de se faire communiquer ou remettre tous les documents et pièces et d’entendre
toutes les personnes qu’il estimera utile, ainsi que de recueillir, en cas de besoin,
l’avis d’un autre technicien dans une spécialité distincte de la sienne ;
, ordonne au vétérinaire de consigner avant le 25 Juin 2007 la somme de
800 € à valoir sur la rémunération de l’expert ;
, rappelle qu’à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l’expert
sera caduque ;
, dit que l’expert devra déposer au greffe du tribunal le rapport écrit de ses
opérations dans les 3 mois de l’avis de consignation de la provision qui lui sera
adressé, et en enverra à chacune des parties une copie complète, comprenant
la demande de fixation de sa rémunération ;
, précise que chacune des parties devra faire valoir ses observations
éventuelles sur la rémunération de l’expert sans attendre d’être sollicité en
ce sens, et ce dans un délai de 15 jours à compter de la réception de la copie
du rapport ;
, décide qu’en cas d’empêchement, l’expert sera remplacé par ordonnance
rendue sur simple requête ;
, sursoit à statuer sur les demandes jusqu’à la réouverture des débats après
le dépôt du rapport d’expertise ;
, réserve les dépens. »
,
66
4) Le déroulement de l’expertise
L’expert désigné doit tout d’abord faire savoir immédiatement s’il accepte ou
non sa mission.
Il peut avoir un lien quelconque avec l’une des parties qui l’empêcherait d’être
objectif et refuser en conséquence la mission.
S’il accepte, il ne peut commencer les investigations techniques et prendre
connaissance du dossier avant que la consignation ordonnée par le jugement
n’ait été faite.
La partie qui a sollicité l’expertise est en effet tenue de consigner préalablement
une somme déterminée destinée à fournir l’assurance que l’expert recevra le
montant de ses honoraires et le remboursement de ses débours.
La sanction de la consignation non effectuée ou du défaut de consignation
supplémentaire dans les conditions prévues est la caducité de la désignation de
l’expert. Il n’y aura donc pas d’expertise.
q Jugement rendu par la juridiction de proximité de Valence le
27 janvier 2006 :
v « Attendu que Monsieur T. n’a pas versé le supplément de consignation,
et qu’il a fait procéder à l’euthanasie et l’incinération de sa chienne, l’expertise
ordonnée est devenue sans objet, et l’action du chef de vice caché ne peut plus
être examinée. »
Quant aux investigations techniques et aux rapports de l’expert avec les parties
nous renverrons aux développements du principe du contradictoire.
5) Les conclusions de l’expert
Elles sont remises au magistrat dans un rapport. Ce rapport est préalablement
communiqué aux parties sous forme de projet. Les parties ont alors un délai déterminé par l’expert pour faire valoir leurs observations par écrit : on parle de
« dires ». Ces dires seront ensuite annexés au rapport définitif remis au magistrat.
Il faut savoir enfin que le juge n’est pas tenu par les conclusions de l’expert et qu’il
peut tout à fait trancher le litige en adoptant une position contraire au rapport.
Dans les faits, cela n’arrive que de manière exceptionnelle.
D/ Avoir recours ou non à un avocat
Si la présence personnelle des parties au procès présente des avantages et
si elle a été exigée pendant fort longtemps, le droit moderne se montre
plus favorable à la représentation.
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
67
Aujourd’hui, la représentation par avocat est obligatoire devant les Tribunaux de
droit commun, elle est facultative devant les Tribunaux d’exception.
En conséquence, elle s’impose devant le Tribunal de Grande Instance.
Elle est un choix devant la juridiction de proximité et devant le Tribunal d’instance.
Ainsi, devant ces deux juridictions, une personne peut en vertu de l’article 828
du Code de procédure civile se faire assister ou représenter par :
, un avocat ;
, son conjoint ;
, ses parents ou alliés en ligne directe ;
, ses parents ou alliés en ligne collatérale jusqu’au troisième degré inclus ;
, les personnes exclusivement attachées à son service personnel ou
à son entreprise.
Depuis la loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007, les parties peuvent également
se faire assister ou représenter devant le Tribunal d’instance et la juridiction de
proximité par leur concubin ou la personne avec laquelle elles ont conclu un
pacte civil de solidarité.
Attention cependant au fait qu’en dehors de l’avocat toute personne qui
entend représenter une partie en justice doit avoir reçu mandat de le faire
et être en mesure de produire ce mandat au tribunal le jour de l’audience.
En matière de vente d’animaux de compagnie, l’assistance et la représentation par
un avocat ne s’impose donc que rarement dans la mesure où la quasi-totalité des
litiges sont tranchés par la juridiction de proximité et par le Tribunal d’instance.
Il n’en demeure pas moins que si nul n’est censé ignorer la loi, connaître la loi
est le métier de l’avocat.
Il connaît les textes, les procédures, est habitué à se confronter à la machine
judiciaire.
Certaines personnes perdent leur procès car pour avoir voulu faire l’économie
des honoraires (encore qu’il n’y en ait pas à payer en cas d’assistance juridique
ou d’aide juridictionnelle) elles ont mené elles-mêmes la procédure, utilisé les
mauvais fondements juridiques et ont été déboutées de leurs demandes alors
qu’elles étaient dans leur bon droit.
On rappellera simplement que l’avocat, bien entendu, n’est tenu que d’une obligation de moyens. On ne saurait automatiquement gagner son procès en étant
représenté par un avocat. Dans le cas contraire, comment ferait-on lorsque
chaque partie a son avocat ?
68
E/ L’aide juridictionnelle
1) Principe
L’aide juridictionnelle représente pour une partie au procès la prise en charge de
ses frais de procédure.
Il s’agit donc d’une aide financière : l’Etat prend en charge la totalité ou une partie des frais de la procédure (honoraires d’avocat, rémunération d’huissier de
justice, frais d’expertise...).
Cette aide est accordée en fonction des revenus de celui qui la demande et
sera versée aux professionnels de la justice (avocat, huissier de justice...) qui
interviendront.
Attention, cette aide ne peut pas se cumuler avec une assurance de protection juridique.
Cette aide peut être accordée quelle que soit la juridiction judiciaire saisie : juridiction de proximité, Tribunal d’instance, Tribunal de Grande Instance...
2) Conditions d’octroi
Pour bénéficier de l’aide, il faut soit :
v être de nationalité française ;
v ou étant de nationalité étrangère :
, ressortissant de l’un des Etats membres de l’Union européenne
ou
, ressortissant d’un Etat ayant conclu une convention internationale
avec la France
ou
, résider habituellement en France en situation régulière
ou
, remplir les conditions de ressources.
Ainsi, la moyenne mensuelle des ressources du demandeur perçues entre le
1er janvier et le 31 décembre de l’année précédant la demande, sans tenir compte
des prestations familiales et sociales, doit être inférieure à un plafond de ressources fixé par décret et réévalué chaque année.
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
69
Les ressources englobent celles du conjoint, partenaire, des enfants mineurs non
émancipés et des personnes vivant habituellement au foyer.
Il est tenu compte :
, des revenus du travail ;
, de toutes les autres ressources (loyers, rentes, retraites, pensions
alimentaires...) ;
, de l’ensemble des biens (mobiliers et immobiliers...).
Pour 2008, la moyenne mensuelle des revenus perçus en 2007 doit être :
, inférieure ou égale à 885 €, pour l’aide juridictionnelle totale ;
, comprise entre 886 et 1.328 €, pour l’aide juridictionnelle partielle.
A ces montants s’ajoutent 159 € pour chacune des deux premières personnes
vivant au domicile du demandeur (ex : enfants, conjoint, concubin ou partenaire d’un pacte civil de solidarité) et 101 € à partir de la troisième.
PLAFONDS DES RESSOURCES À NE PAS DÉPASSER POUR OBTENIR L’AIDE
JURIDICTIONNELLE (CHIFFRES APPLICABLES AU 1ER JANVIER 2008 )
PERSONNE
À CHARGE
AIDE JURIDICTIONNELLE
TOTALE
AIDE JURIDICTIONNELLE
PARTIELLE
0
885 €
1328 €
1
1044 €
1487 €
2
1203 €
1646 €
3
1304 €
1747 €
4
1405 €
1848 €
5
1506 €
1949 €
6
1607 €
2050 €
70
71
72
73
74
F/ La transaction
1) Définition
Le mot transaction désigne souvent dans le langage courant n’importe quelle
sorte de contrat. On parle ainsi de la sécurité des transactions ou des transactions commerciales.
Il sera ici question uniquement et précisément du contrat de transaction régi par
les articles 2044 et suivants du Code civil.
Aux termes de l’article 2044, la transaction est un contrat par lequel les parties
terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.
Ce contrat est donc directement lié à un procès : il a soit pour objet de le terminer soit de l’éviter au moyen de concessions réciproques.
Un procès étant envisageable, chaque partie évalue alors quelles seraient ses
chances et les risques liés à cet événement incertain. Chaque partie essaie d’évaluer l’issue d’un procès éventuel. La transaction conclue, la personne ne saura
jamais s’il/elle a fait une bonne ou une mauvaise affaire.
2) Eléments de la transaction
Une transaction est constituée de trois éléments :
, une situation litigieuse ;
, une convention de règlement ;
, des concessions réciproques.
v La situation litigieuse est la base de la transaction. S’il n’y a pas de différend,
il n’y a pas de raisons de chercher un accord.
La situation litigieuse n’est pas forcément un procès déjà engagé. En effet, la
contestation peut consister en un différend qui pourrait simplement déboucher
sur un procès.
En conséquence, il est permis de transiger avant le procès, pendant le procès et
même après le procès. Avoir un jugement rendu en sa faveur n’est pas forcément
synonyme d’exécution rapide. On peut donc être amené à transiger avec la
partie adverse pour éviter les lenteurs, les difficultés et les tracas d’une procédure
d’exécution forcée.
v La convention de règlement n’est autre que le contrat passé entre les
parties afin de mettre fin au litige.
v Enfin, la convention exige des sacrifices réciproques. C’est l’essence même
de la transaction et la concrétisation du risque de perte.
Chaque partie abandonne ainsi une partie de ses prétentions.
5- PRINCIPES
GÉNÉRAUX
DE PROCÉDURE
EN DROIT FRANÇAIS
75
Attention : on ne pourrait parler de transaction dans le cas où une partie
abandonnerait la totalité de ses prétentions sans aucune contrepartie.
Il suffit enfin que les concessions soient réciproques : il n’est nul besoin qu’elles
soient d’une importance égale. C’est là le danger qui n’est pas contrôlable.
Dans une vente de chiots ou chatons, les concessions réciproques sont quasiment toujours les mêmes : l’acheteur renonce à saisir la justice et, en contrepartie,
l’éleveur verse une indemnité.
3) Conditions de forme
L’article 2044 du Code civil, en disposant que le contrat doit être rédigé par
écrit, peut laisser penser que la transaction est un contrat formaliste.
Tel n’est pourtant pas le sens du texte qui rappelle seulement le droit commun
de la preuve : l’écrit sera la preuve exigée lorsque le litige terminé par la transaction porte sur une somme supérieure à 800 €.
Pour une vente de chien ou de chat, ce sera généralement le cas, le litige portant le plus souvent à la fois sur le prix de vente et sur les frais vétérinaires.
4) Les effets de la transaction
La transaction est un contrat et ce contrat doit être respecté. S’il ne l’est pas, on
tombe dans le cadre de l’inexécution contractuelle qui entraine la résolution de
la transaction et rouvre la possibilité d’agir en justice.
Ainsi, s’il a été convenu en échange du renoncement à la procédure judiciaire
le versement d’une indemnité par l’éleveur, l’acheteur sera en droit de saisir le
tribunal si l’éleveur ne s’exécute pas.
La transaction a enfin des effets judiciaires.
Ainsi, si un procès était en cours, la transaction a pour effet de dessaisir le juge.
Si aucun procès n’était encore engagé, la transaction rend irrecevable toute
action relative à la contestation concernée.
A noter : l’effet extinctif ne concerne que les seuls droits qui ont été avec certitude compris dans la transaction.
6/
LES DIFFÉRENTES PROCÉDURES
JUDICIAIRES AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
L’acheteur mécontent de la vente est loin d’être démuni.
Pour une même maladie, il peut choisir dans un panel
d’actions celle qui sera la plus appropriée à ses revendications
que ce soit au niveau de la rapidité, des indemnités ou encore
du devenir de l’animal.
78
A/ L’action délictuelle
1) Régime
Elle est exceptionnellement utilisée par les acheteurs.
La raison ? Même si on considère qu’un acheteur saisissant seul un tribunal a très
peu de chances de penser à ce type d’action, la procédure délictuelle n’en reste
pas moins parfaitement connue des professionnels du droit que sont les avocats.
Alors pourquoi si peu de cas ? On peut avancer l’hypothèse selon laquelle la
garantie des vices cachés est tellement notoire qu’elle phagocyte tout autre type
d’action.
Mais aussi exceptionnelle soit-elle, l’action délictuelle existe bel et bien et c’eut
été un tort de ne pas l’étudier.
L’action délictuelle s’oppose par nature à l’action découlant d’un contrat et
appelée action contractuelle.
Si la vente est par essence contractuelle, il n’en demeure pas moins qu’une
action délictuelle est néanmoins possible en cette matière.
Cette action est fondée sur une notion de faute entrainant pour la victime un
préjudice qu’il conviendra de réparer.
Elle repose sur les dispositions de l’article 1382 du Code civil qui dispose que :
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui
par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. »
Un principe simple : une personne, par sa faute, cause à autrui un dommage.
Elle se doit de réparer en indemnisant la victime.
Ce principe très général peut donc trouver application en matière de vente et
notamment en matière de vente d’animal de compagnie.
L’acheteur se présentant ici comme la victime ayant subi le dommage devra,
pour obtenir gain de cause, apporter la preuve cumulative de trois éléments :
, l’existence d’une faute ;
, l’existence d’un préjudice certain, direct et personnel ;
, le rapport de causalité certain entre ces deux éléments.
S’il parvient à apporter ces trois preuves, l’auteur de la faute sera alors condamné
à le dédommager.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
Ce qui est important dans cette action, c’est le fait qu’il n’est nullement question
du devenir de l’animal quant à sa propriété.
La question de savoir si l’acheteur garde ou non son chien ou son chat n’a pas
ici sa place.
On ne raisonne que financièrement puisque la réparation de la victime intervient uniquement par le versement de dommages et intérêts.
Cette action présente enfin un intérêt incontestable vis-à-vis du délai donné à
l’acheteur pour saisir un tribunal puisqu’elle se prescrit par 10 ans à compter de
la manifestation du dommage.
2) Jurisprudence
Nous allons nous pencher sur un jugement rendu par la juridiction de proximité
de Bourgoin Jallieu le 13 septembre 2007.
a) Les faits de l’espèce :
Monsieur vendeur, qui exploite un élevage de chats, a vendu en 2005
à Monsieur acheteur un chaton de race Burmilla au prix de 700 €.
L’attestation de vente disposait que l’animal était vendu comme animal de compagnie réservé à un usage personnel et non destiné à l’élevage ou à la reproduction.
Après la vente, Monsieur acheteur a fait reproduire le chat avec une chatte de
même race. Six chatons sont nés dont certains ont été revendus par Monsieur
acheteur.
Par requête enregistrée par le Greffe du tribunal, Monsieur vendeur a sollicité la
convocation de Monsieur acheteur devant la juridiction de proximité aux fins
d’obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 3.800 € à titre de
dédommagement faisant état d’un manque de loyauté et d’actes concurrentiels
manifestes.
b) La décision du tribunal :
v « Attendu que l’attestation de vente signée par les parties le 4 septembre
2005 prévoyait expressément que le chaton était vendu comme animal de
compagnie, réservé à un usage personnel et non destiné à l’élevage ou à la
reproduction ;
v attendu que Monsieur acheteur reconnaît avoir fait reproduire le chat avec
une chatte de même race ;
v attendu que Monsieur acheteur reconnaît par ailleurs avoir vendu
certains chatons de la portée ;
79
80
v attendu qu’en ne respectant pas les termes du contrat lui interdisant l’achat
en vue de l’élevage ou de la reproduction, Monsieur acheteur a manqué à son
obligation de loyauté envers Monsieur vendeur ;
v attendu que l’ensemble de ces éléments caractérisent la faute de Monsieur
acheteur en application de l’article 1382 du Code civil ;
v attendu que la faute commise par Monsieur acheteur a causé à
Monsieur vendeur un préjudice commercial et moral qui sera justement réparé
par l’allocation de la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts. »
c) Commentaire
Dans le cas d’espèce, le tribunal considère comme faute, suite à une vente,
le préjudice commercial et moral subi par un vendeur dont l’acheteur a
fait reproduire par la suite l’animal.
Ce jugement s’il démontre bien l’application possible de l’article 1382 du Code
civil n’en demeure pas moins curieux.
En effet, la clause de destination de l’animal dans l’attestation de vente vise uniquement à protéger le vendeur d’une action future de l’acheteur sur une nonconformité de l’animal à une autre destination.
Il ne peut être interdit à une personne possédant un animal de compagnie de le
faire reproduire.
Ceci est contraire au droit absolu de propriété et pourrait être considéré comme
une clause abusive.
Cette décision reste donc étonnante.
Il n’en demeure pas moins que rendue par une juridiction de proximité, elle est
définitive (sauf à faire un pourvoi en cassation) et que l’affaire ne pourra donc
être rejugée par une Cour d’appel.
B/ L’action en garantie
pour vice rédhibitoire ou caché
Traditionnellement on entend par vice rédhibitoire un vice désigné par
le Code rural et vice caché un vice relevant de la garantie du Code civil.
Le régime de ces deux types de vices n’est pas tout à fait le même.
Aussi, pour plus de simplicité, nous les étudierons l’un après l’autre.
6- LES DIFFÉRENTES
1) L’acheteur agit sur le fondement
d’un des vices rédhibitoires
a) Quels sont-ils ?
A la base, l’article L. 213-4 du Code rural rappelle que la liste des vices
rédhibitoires et celle des maladies transmissibles sont fixées par décret
en Conseil d’Etat.
La partie réglementaire du Code rural fait ainsi mention, à l’article R. 213-2 des
informations suivantes :
Sont réputés vices rédhibitoires, les maladies ou défauts portant sur des chiens
et des chats,
pour l’espèce canine :
, la maladie de Carré ;
, l’hépatite contagieuse (maladie de Rubarth) ;
, la parvovirose canine ;
, la dysplasie coxo-fémorale ; en ce qui concerne cette maladie, pour les
animaux vendus avant l’âge d’un an, les résultats de tous les examens
radiographiques pratiqués jusqu’à cet âge sont pris en compte en cas d’action
résultant des vices rédhibitoires ;
, l’ectopie testiculaire pour les animaux âgés de plus de six mois ;
, l’atrophie rétinienne ;
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
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82
pour l’espèce féline :
, la leucopénie infectieuse ;
, la péritonite infectieuse féline ;
, l’infection par le virus leucémogène félin ;
, l’infection par le virus de l’immuno-dépression.
Concernant la dysplasie, il est à noter en premier lieu que seule la dysplasie
coxo-fémorale représente un vice rédhibitoire. Celle des coudes n’est pas visée.
En second lieu, la prise en compte des examens radiographiques pratiqués
jusqu’à l’âge d’un an est certes possible en théorie, puisque le texte l’indique,
mais peu probable en pratique. Nous verrons par la suite qu’eu égard au très
court délai laissé à l’acheteur pour agir, celui-ci ne sera généralement pas en
mesure d’utiliser ces examens dans une procédure fondée sur le Code rural.
Concernant l’ectopie testiculaire, il ne faut pas comprendre le texte au sens où
une ectopie testiculaire ne peut se révéler avant l’âge de six mois. Il faut, au
contraire, bien faire la différence entre le côté médical et le côté juridique. Un
chiot peut tout à fait présenter une ectopie testiculaire avant l’âge de six mois.
En revanche, l’action de son propriétaire ne sera, elle, valable qu’à partir du
moment où le chiot aura atteint l’âge de six mois.
b) Quels textes leur sont applicables ?
La réponse se trouve dans l’article L. 213-1 du Code rural qui dispose de
manière assez générale que :
« L’action en garantie, dans les ventes ou échanges d’animaux domestiques est
régie, à défaut de conventions contraires, par les dispositions de la présente section,
sans préjudice ni de l’application des articles L. 211-1 à L. 211-15, L. 211-17 et
L. 211-18 du Code de la consommation ni des dommages et intérêts qui peuvent être
dus, s’il y a dol. »
Il faut donc comprendre que toute action en garantie suite à la vente d’un animal
domestique et à fortiori lorsque l’animal est atteint par un vice rédhibitoire doit
suivre le régime imposé par le Code rural.
Le Code rural est donc d’application prioritaire et les dispositions à respecter
vont se retrouver dans les articles L. 213-1 et suivants de ce code ainsi que dans
les articles R. 213-1 et suivants du même code.
Il ne faut cependant pas oublier que si le Code rural est associé aujourd’hui de
manière évidente aux vices rédhibitoires, il n’en a pas toujours été ainsi.
Le texte même de l’article L. 213-1 du Code rural cité ci-dessus évoque très
clairement la possibilité de « conventions contraires ».
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
Il est donc possible de déroger aux principes mêmes des dispositions rurales pour
se référer aux dispositions du Code civil bien plus clémentes envers l’acheteur
comme nous allons le voir un peu plus loin.
Ce n’est toutefois pas la dérogation en elle-même qui a posé problème pendant
des années. Si les parties sont toutes deux d’accord pour appliquer les dispositions sur les vices cachés, on ne saurait les en empêcher dans la mesure où le
contrat de vente reste avant tout un accord de volontés.
Non, ce n’est pas l’accord commun des parties qui est ici en jeu mais plutôt
l’interprétation de cet accord.
En effet, assez rapidement, les tribunaux ont eu tendance à considérer que l’accord des parties pour déroger aux dispositions du Code rural avait été implicite :
Cour de cassation, 1ère chambre civile, 12 juillet 1977
Cour de cassation, 1ère chambre civile, 26 novembre 1981
Sans même le savoir, le vendeur et l’acheteur avaient donc convenu de placer
leur litige sur le terrain du Code civil.
La justification d’une telle position ? Les exemples sont nombreux.
q Dans un arrêt en date du 14 décembre 1994, la Cour d’appel
d’Orléans a jugé que :
« L’action en garantie d’un acheteur de chiens Berger allemand atteints de
dysplasie coxo-fémorale, fondée sur le droit commun de la vente, à savoir
les articles 1641 et suivants du Code civil, est recevable dès lors qu’aux termes de l’article 285-1 du Code rural, "la dysplasie coxo-fémorale est notamment
réputée vice rédhibitoire pour l’application des articles 284 et 285 du même code"
qui donnent ouverture notamment aux actions résultant des articles 1641 et suivants du Code civil, à défaut de convention contraire et qu’il résulte de ces
mêmes dispositions que l’exercice des actions en garantie des vices cachés n’est
pas interdite aux acheteurs que la loi a au contraire entendu protéger.
Les chiens Berger allemand atteints de dysplasie coxo-fémorale grave, sont
atteints d’un vice caché puisque l’acheteur qui a acheté ces animaux à l’âge de huit
semaines ne pouvait découvrir le vice, un diagnostic radiologique de l’infection
étant impossible avant l’âge de 12 à 16 semaines. Ce vice, entraînant une impotence fonctionnelle totale, rend les chiens impropres à leur destination, à savoir
la reproduction et l’élevage, de sorte que le vendeur doit garantir lesdits vices. »
q Arrêt en date du 9 janvier 1996 rendu par la Cour de cassation :
Les faits de l’espèce :
Le 27 septembre 1992, Monsieur Rollin a vendu à Mademoiselle Jaheny un
chiot de race Terre-Neuve nommé Harley né le 10 juillet 1992 pour la somme
de 5.000 F (762 €).
83
84
Dès le 13 avril 1993, Mademoiselle Jaheny a fait examiner le chiot par le docteur Jamet, vétérinaire, lequel a fait pratiquer le 14 avril 1993 des radios du
bassin et des hanches suspectant une dysplasie, maladie d’origine congénitale.
Le chiot opéré le 20 avril 1993, est mort le 1er mai 1993.
Les arguments de l’éleveur :
« D’une part : l’action en garantie des vices rédhibitoires pour l’une des maladies visées à l’article 285-1 du Code rural doit être intentée dans le délai de
trente jours à compter de la vente du chien.
Le chien Harley vendu par Monsieur Rollin à Mademoiselle Jaheny était
notamment porteur d’une dysplasie, maladie visée à l’article 285-1 du Code
rural. Cette vente a eu lieu le 27 septembre 1992. En conséquence,
Mademoiselle Jaheny aurait dû agir dans les trente jours à compter de cette
vente.
Il est cependant constant que Mademoiselle Jaheny n’a agi que le 23 juillet 1993
devant le Tribunal d’instance, soit à une date où aucune action n’était plus recevable ; d’où il suit qu’en déclarant pourtant l’action de Mademoiselle Jaheny
recevable pour avoir été intentée dans un bref délai, bien qu’il fût constant
qu’elle n’avait pas agi dans les trente jours suivants la vente du chien, le tribunal a violé les articles 285-1 et 285-2 du Code rural, ensemble les articles 1 et 3
du décret n° 90-572 du 28 juin 1990.
D’autre part : aux termes de l’article 290 du Code rural, « quel que soit le
délai pour intenter l’action, l’acheteur, à peine d’être non recevable, doit provoquer, dans les délais fixés par décret en Conseil d’Etat, la nomination d’experts
chargés de dresser procès-verbal, la requête est présentée verbalement ou par écrit, au
juge du Tribunal d’instance du lieu où se trouve l’animal ; ce juge constate dans son
ordonnance la date de la requête et nomme immédiatement un ou trois experts qui
doivent opérer dans le plus bref délai. »
Se plaignant des maladies du chien Harley, Mademoiselle Jaheny l’a fait examiner par ses divers vétérinaires, mais sans aucunement saisir le tribunal dans le
délai légal pour obtenir la désignation d’un expert, et que ce n’est qu’après la
mort du chien, qui n’a fait l’objet d’aucune expertise judiciaire, qu’elle a saisi le
tribunal afin d’être indemnisée de son préjudice.
En conséquence, en déclarant l’action intentée par Mademoiselle Jaheny recevable, bien qu’elle n’eût pas fait procéder à la désignation d’un expert judiciaire
pour examiner le chien, expertise qui conditionnait pourtant la recevabilité de
son action, le tribunal a violé l’article 290 du Code rural, ensemble l’article 1er
du décret n° 90-572 du 28 juin 1990. »
La décision du premier tribunal saisi :
« L’obligation de garantie du vendeur pour vice caché de la chose vendue dérogatoire aux dispositions des articles 284 et 285 du Code rural, peut résulter
implicitement de la nature de la chose vendue et du but que les parties se sont
proposé.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
En l’espèce, la vente par Monsieur Rollin, éleveur spécialisé dans la production
d’une race de chien déterminé, lequel était inscrit au L. 0. F. de la Société Centrale
Canine (dossier n° 9221207), suppose que l’animal devait posséder les qualités au moins physiques de la race et que l’acheteur était en droit d’attendre que
le chiot acheté soit conforme à l’usage auquel il le destinait, eu égard aux critères
retenus entre les parties par contrat daté de l’année 1992, signé des deux parties.
Il ne résulte pas dudit document que toute garantie ait été exclue par le vendeur.
En conséquence, l’action intentée par Mademoiselle Jaheny dans un bref délai
soit dès le 12 mai 1993, par déclaration au greffe du Tribunal d’instance de
Coulommiers doit être soumise à la garantie conventionnelle des vices cachés
relevant du droit commun, par application des articles 1641 et suivants du Code
civil. En conséquence, sans qu’il soit nécessaire de recourir à l’avis d’un autre
spécialiste des affections précitées, les documents médicaux versés aux débats
étant suffisamment probants, le vendeur doit être tenu envers l’acquéreur à la
restitution du prix ainsi qu’aux autres dédommagements résultant notamment
des frais exposés par Mademoiselle Jaheny. Il convient
de condamner Monsieur et Madame Rollin Yves à payer à
Mademoiselle Jaheny Chrislaine, la somme de 5.000 F
(762 €) correspondant au prix de vente de l’animal, et
celle de 7.000 F (1.067 €) en remboursement des frais
d’examens médicaux et d’opération du chien, exposés
par la demanderesse. »
La décision de la Cour de cassation :
« Attendu que les règles de la garantie des vices
cachés dans la vente des animaux domestiques
définies par le Code rural peuvent être écartées par
une convention contraire, qui peut être implicite
et résulter de la nature de l’animal vendu et
du but que les parties s’étaient proposé, que
le tribunal a retenu à cet égard que
Monsieur Rollin était un éleveur spécialisé dans la race de chien considérée, de
sorte que l’acheteur était en droit d’attendre que l’animal possède les qualités
physiques de cette race, recherchée par
l’acquéreur ; que le tribunal, qui a ainsi
retenu que le vendeur professionnel
était réputé connaître les vices de l’animal vendu, a légalement justifié sa décision. »
85
86
q Dans un arrêt en date du 8 février 2000, la Cour d’appel de
Paris a jugé que :
« Les règles de la garantie des vices cachés dans la vente des animaux
domestiques définies par le Code rural peuvent être écartées par une convention contraire qui peut être implicite et résulter de l’animal vendu et du but
recherché par les parties.
En l’espèce, l’acquéreur avait clairement précisé au vendeur son souhait de faire
participer le chien à des concours et de faire de la reproduction un objectif impliquant nécessairement un animal indemne de dysplasie, maladie transmissible.
C’est à tort que le vendeur, éleveur spécialisé, tente de se prévaloir d’une clause
dactylographiée renvoyant aux textes du Code rural alors que cette clause, figurant dans une attestation de vente délivrée à la livraison et non approuvée par
l’acheteur, est manifestement abusive.
Le vendeur doit réparer le préjudice subi en raison de la maladie affectant le
chien vendu et rendant l’animal impropre à sa destination. »
q Dans un arrêt en date du 5 septembre 2000, la Cour d’appel de
Montpellier a jugé que :
« Si la dysplasie coxo-fémorale d’un chien constitue un vice rédhibitoire visé
par l’article 285-1 du Code rural, il reste qu’un acheteur a la possibilité de
mettre en jeu le régime légal de garantie prévu par les articles 1641 et suivants
du Code civil s’il prouve que le vendeur et lui-même sont convenus, fût-ce de
manière tacite, de déroger aux dispositions du Code rural et d’étendre ce régime
à la vente en cause.
Dans le cas d’espèce, la preuve de cette convention dérogatoire résulte du prix
de 10.000 F (1.524,50 €) arrêté par les parties pour un chien dont les qualités
et mérites ressortaient des diverses récompenses obtenues et dont il n’est pas
contesté que l’acquéreur le destinait à la chasse à la suite du vendeur, tous les
éléments établissant que ces derniers s’étaient accordés sur la vente d’un animal
possédant les qualités physiques de la race, capable de chasser et ayant obtenu
de nombreux prix. »
Un arrêt de la Cour de cassation a cependant mis fin à cette interprétation
systématique de volontés : il a été rendu le 6 mars 2001 dans une affaire
concernant deux chattes.
Voici l’affaire en question.
Les faits de l’espèce :
Le 8 décembre 1990, Monsieur acheteur achetait à Monsieur vendeur une
chatte de race dénommée « Shalim » pour un prix de 14.000 F (2.134,29 €).
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
Le 9 mars 1991, Monsieur acheteur achetait un nouvel animal « Jovan » pour
la somme de 10.000 F (1.524,49 €).
Le 23 avril 1991, le docteur L., vétérinaire, précisait par certificat que : « Shalim »
présente une implantation dentaire défectueuse au niveau de la mâchoire supérieure, le croc droit étant dévié en dedans et en arrière conférant à la dite mâchoire
un aspect dévié. Ce défaut constitue un vice caché antérieur à la vente de l’animal
sur un animal vendu avant la sortie de sa dentition définitive.
Il précisait également que « Jovan » est âgée en fait de 9 ou 10 ans, compte tenu
de l’état de sa dentition, de la présence d’une cataracte sénile bilatérale, d’une
insuffisance cardiaque avec souffle (insuffisance valvulaire) et une amyotrophie
généralisée.
La procédure intentée par l’acheteur :
v Monsieur acheteur a dans un premier temps déposé une plainte
en tromperie contre le vendeur.
Malheureusement pour lui, cette plainte a été classée sans suite.
v Il a donc assigné devant le Tribunal d’instance de Dax le vendeur en
tromperie sur les qualités substantielles et rescision des ventes intervenues.
Par jugement du 27 octobre 1994, le Tribunal d’instance de Dax déboutait
Monsieur acheteur de sa réclamation présentée au titre de l’acquisition de la
chatte « Shalim » mais le déclarait en revanche bien fondé quant à son action
en rescision concernant la vente de la chatte « Jovan » acquise pour le prix de
10.000 F (1.524,49 €).
Le tribunal jugeait ainsi que le prix de vente serait réduit à la somme de 1.000 F
(152,45 €) et condamnait en conséquence le vendeur à payer à Monsieur acheteur la somme de 9.000 F (1.372,04 €) en réparation du préjudice subi par ce
dernier du fait de la tromperie dont il a été victime avec intérêts au taux légal à
compter du jugement.
v Non satisfait de ce jugement, le vendeur faisait appel et l’affaire était donc
rejugée par la Cour d’appel de Pau.
Celle-ci, dans un arrêt rendu le 20 novembre 1996, réformait partiellement
la décision rendue par le tribunal de Dax. Elle accueillait en effet,
et contrairement au tribunal, la demande de Monsieur acheteur concernant
la chatte « Shalim » et réduisait le prix de cet animal à la somme de 7.000 F
(1.067,14 €) ; le vendeur étant condamné au remboursement de cette
somme.
v Non satisfait une fois de plus de la décision, le vendeur portait l’affaire
devant la plus haute juridiction : la Cour de cassation.
87
88
La première chambre civile de la Cour de cassation se prononçait par un arrêt
en date du 6 mars 2001. Par cet arrêt, elle cassait et annulait dans toutes ses
dispositions l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Pau et renvoyait l’affaire à la
connaissance de la Cour d’appel d’Agen.
La haute juridiction faisait grief à la Cour d’appel d’avoir jugé sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code civil alors que les ventes d’animaux domestiques sont, sauf conventions contraires, régies par les articles
284, 285-1 et 285-2 du Code rural :
v « Attendu que pour faire droit à la demande de M R. l’arrêt attaqué s’est
fondé sur les dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil ;
v qu’en se déterminant ainsi, alors que l’action en garantie dans les ventes
d’animaux domestiques est régie, à défaut de conventions contraires, par les
dispositions des articles 284 et suivants du Code rural, la Cour d’appel qui n’a
pas constaté l’existence d’une telle convention a violé les textes susvisés. »
L’affaire était donc renvoyée devant la Cour d’appel d’Agen dont les conclusions
ne manqueront pas de vous étonner :
« Il appartient à Monsieur acheteur de rapporter la preuve que le vétérinaire a
bien examiné les animaux vendus ; qu’à l’époque des faits, le tatouage des chats
n’était pas obligatoire et que la seule description de l’animal ne saurait suffire à
démontrer que les chattes examinées sont bien celles vendues ; que surtout ces
défauts ou maladies ne sont pas celles prévues par l’article 285-1 du Code rural
quant aux vices rédhibitoires susceptibles d’annuler les ventes portant sur les
chats ; qu’ainsi, par réformation du jugement, il sera constaté que Monsieur
acheteur ne fait pas la preuve, qui lui incombe, que les animaux qu’on lui a
vendus étaient atteints de vices rédhibitoires et qu’il sera débouté de l’intégralité
de ses demandes. »
Et voilà...
Au final, notre acheteur aura parcouru toute la pyramide judiciaire pour se voir
opposer en fin de course l’absence d’identification des deux chattes conduisant
à un défaut manifeste de preuves.
Il n’en demeure pas moins que, par l’intermédiaire de cette affaire, la Cour de
cassation a pu poser en principe l’obligation, pour les juges saisis d’une affaire
concernant une vente d’animaux domestiques, de vérifier dans l’acte de vente
s’il y a bien une convention dérogatoire aux dispositions du Code rural.
Cet arrêt a donc mis un terme à la convention implicite des parties.
Désormais, la dérogation, si elle est voulue, se doit d’être expresse.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
COUR
DE CASSATION
COURS
D'APPEL
PREMIERE
INSTANCE
COUR DE
CASSATION
6 Mars 2001
Cour d'Appel
Cour d'Appel
de Pau
d'Agen
20 Novembre 1996
8 Janvier 2003
Tribunal d'Instance
de Dax
27 Octobre 1994
Les décisions postérieures à l’arrêt de la Cour de cassation de 2001 n’ont pas
manqué d’en tenir compte comme en attestent les exemples suivants.
q Arrêt de la Cour de cassation en date du 24 septembre 2002
concernant un chien atteint de maladie de Carré
Les faits :
Madame X... a vendu à Monsieur Y... un chiot ; l’animal a été livré, le
15 octobre 1999.
Le 29 octobre 1999, le vétérinaire a fait un diagnostic de suspicion de maladie
de Carré, confirmé par les analyses effectuées sur l’animal, après euthanasie, le
13 novembre 1999.
89
90
Le 18 novembre 1999, l’acheteur a assigné la venderesse en restitution du prix
et en paiement de dommages-intérêts, sur le fondement de la garantie des vices
cachés.
Décision de la Cour
v « Attendu que pour déclarer l’action recevable, le jugement attaqué, après
avoir exactement énoncé que la maladie de Carré constituait pour l’espèce un
vice caché prévu par le Code rural, retient que l’acheteur avait agi dans le bref
délai de l’article 1648 du Code civil ;
v attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que l’action en garantie dans les
ventes d’animaux domestiques est régie, à défaut de conventions contraires,
par les textes susvisés, le tribunal, qui n’a pas constaté l’existence d’une telle
convention, a violé ceux-ci. »
q Arrêt de la Cour de cassation en date du 24 septembre 2002
concernant un chat atteint d’une péritonite infectieuse
Les faits :
Madame X... a vendu, le 13 février 1999, un chat à Madame Y...
Celui-ci a été euthanasié, le 16 avril 1999, souffrant d’une péritonite infectieuse.
Le 2 juillet 1999, Madame Y... a demandé le remboursement du prix d’achat, des
frais de vétérinaire et la réparation de son préjudice moral.
Décision de la Cour
Vu les articles 284 et suivants anciens du Code rural et les articles 1er à 3 du
décret n° 90-572 du 28 juin 1990.
v « Attendu que, pour faire droit à la demande, le jugement attaqué s’est fondé
sur les dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil ;
v attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que l’action en garantie dans les
ventes d’animaux domestiques est régie, à défaut de conventions contraires, par
les textes susvisés, le tribunal, qui n’a pas constaté l’existence d’une telle convention, a violé ceux-ci. »
q Jugement de la juridiction de proximité de Bordeaux en date du 24
novembre 2006 concernant un chien atteint d’ectopie testiculaire
Les faits :
Le 10 août 2005, Monsieur acheteur a acheté à Monsieur vendeur un chien
mâle de race Yorkshire. Le 10 novembre 2005, Monsieur acheteur a informé par
courrier Monsieur vendeur que deux jours après la vente une visite vétérinaire
avait permis de mettre en évidence que le chien était atteint de cryptorchidie
(ectopie testiculaire).
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
Monsieur acheteur a sollicité le remboursement de 50 % du prix d’achat et une
participation aux frais médicaux.
Le conseil de Monsieur vendeur a, par courrier du 18 novembre 2005, demandé
communication des certificats vétérinaires établis et n’a pas obtenu de réponse.
Les arguments des parties
Monsieur acheteur sollicite que Monsieur vendeur soit condamné à lui verser la
somme de 750 €.
Cette somme à ses yeux est justifiée à concurrence de 500 € par une réduction
du prix d’achat de l’animal et pour un montant de 250 € par la réparation du
préjudice qu’il a subi.
Monsieur acheteur fonde sa prétention sur l’article 1641 du Code civil aux termes duquel le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la
chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine.
Monsieur vendeur pour sa part soutient l’irrecevabilité de l’action fondée sur
l’article 1641 du Code civil. Il considère en effet qu’en l’espèce doivent être
appliquées les dispositions de l’article L. 213-1 du Code rural qui prévoit que
l’action en garantie dans les ventes ou échanges d’animaux domestiques est
régie à défaut de convention contraire par les dispositions de la présente section.
Décision du tribunal
L’article L. 213-1 du Code rural dispose que : « L’action en garantie dans les
ventes ou échanges d’animaux domestiques est régie à défaut de convention
contraire par les dispositions de la présente section. »
En l’espèce le contrat de vente souscrit par Monsieur acheteur versé aux débats
ne contient aucune stipulation ayant pour objet de faire échec à l’application
des dispositions du Code rural.
Dans ces conditions ces dernières doivent être appliquées et non l’article 1641 du
Code civil.
La demande de Monsieur acheteur doit être déclarée irrecevable.
q Arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 1er février 2007
concernant un chien atteint de dysplasie coxo-fémorale
Les faits :
Le 30 septembre 2001, Monsieur vendeur a vendu à Monsieur acheteur,
pour un prix de 9.000 F, soit 1.372,04 €, un chien de race Labrador.
Le 21 décembre 2002, le Docteur G., vétérinaire consulté par le propriétaire
du chien, a diagnostiqué chez cet animal une dysplasie sévère et bilatérale des
coudes et des hanches.
91
92
Après avoir fait adresser le 14 janvier 2003, par son avocat, un courrier à
Monsieur vendeur, Monsieur acheteur a saisi le Tribunal d’instance par acte du
22 mai 2003.
Décision de la Cour
L’action en garantie dans les ventes et échanges d’animaux domestiques est
régie, à défaut de conventions contraires, par les articles L. 2131 et suivants du
Code rural.
v « Considérant que l’affection diagnostiquée le 21 décembre 2002 par un
vétérinaire figure dans la liste des maladies réputées rédhibitoires dressée par
l’article L. 213-4 du Code rural ;
v considérant que le premier juge ne pouvait faire droit à la demande sur le
fondement des articles 1641 et suivants du Code civil, faute de convention
contraire permettant d’écarter les dispositions du Code rural ;
v qu’en effet, Monsieur acheteur ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe,
d’une telle convention contraire ;
v que la facture établie au moment de la vente de l’animal ne mentionne,
s’agissant de la garantie, aucune dérogation au Code rural, laquelle ne peut se
déduire, en l’espèce, du prix payé ni de la notoriété de l’éleveur ;
v considérant que la seule action disponible, en application des articles L. 213-1
du Code rural, est irrecevable comme engagée tardivement. »
c) Les démarches de l’acheteur
Pour agir en justice, il faut saisir un tribunal.
Notre acheteur doit donc commencer par là.
Mais la même question se pose à chaque fois : quel tribunal saisir ?
En présence d’un vice rédhibitoire, il s’agit toujours du Tribunal d’instance et
non de la juridiction de proximité.
En effet, la règle est posée par le Code de l’organisation judiciaire dans son article
R. 321-7 :
« Le Tribunal d’instance connaît, à quelque valeur que la demande puisse s’élever
et sous réserve des dispositions spéciales du Code rural et du Code forestier :
3º Des demandes relatives aux vices rédhibitoires et aux maladies contagieuses des
animaux domestiques, fondées sur les dispositions du Code rural ou sur la convention des parties, quel qu’ait été le mode d’acquisition des animaux. »
Si le demandeur se trompe et saisit la juridiction de proximité, le défendeur
pourra toujours faire relever l’incompétence de la juridiction et faire transférer
le dossier devant le juge d’instance. Voilà pour la compétence d’attribution.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
Pour la compétence territoriale, les choses se compliquent quelque peu.
En effet, il se peut que l’acheteur ait à saisir deux Tribunaux d’instance différents.
, Une première demande doit ainsi être portée devant le tribunal
compétent « suivant les règles ordinaires du droit » comme l’indique
l’article R. 213-4 du Code rural.
Il s’agit donc en principe du tribunal dont dépend le vendeur ou du tribunal
de l’acheteur si le chien lui a été livré.
, Une seconde demande concernant la désignation des experts, doit, elle,
être faite auprès du juge du Tribunal d’instance du lieu où se trouve l’animal.
Autrement dit, si le chien a été livré à l’acheteur ou si les deux parties résident
dans des localités proches et dépendant du même ressort judiciaire, un seul
tribunal sera saisi des deux demandes.
Dans les autres cas, l’acheteur sera dans l’obligation de saisir deux tribunaux.
Après avoir déterminé les tribunaux compétents, notre acheteur doit ensuite
formuler ses demandes.
Il rencontre là deux obligations :
celle de demander la nomination d’experts ;
, celle de produire un diagnostic de suspicion pour les maladies transmissibles.
,
La première obligation se comprend aisément : le juge n’est pas un vétérinaire
et n’est donc pas à même de pouvoir juger l’état de l’animal. On ne vient pas en
outre à une audience avec son chien ou son chat !
Pour pouvoir, malgré tout, avoir un avis éclairé et totalement objectif sur l’état
de santé de l’animal, le juge a besoin de prendre l’avis de vétérinaires.
Mais tous les vétérinaires ne sont pas habilités, en principe, à délivrer cet avis.
Aussi, le juge choisit-il un ou trois vétérinaires figurant sur la liste des experts
vétérinaires et dépendant de sa Cour d’appel.
Ces vétérinaires formés à la procédure judiciaire, à l’expertise et assermentés
seront en mesure de donner au magistrat toutes les informations utiles.
Le texte de l’article R. 213-3 précise ainsi : « Ces experts vérifient l’état de
l’animal, recueillent tous les renseignements utiles, donnent leur avis et, à la fin
de leur procès-verbal, affirment par serment la sincérité de leurs opérations. »
Cette requête en nomination d’experts doit être faite par l’acheteur sous peine
de non recevabilité de l’action.
En effet, même si le tribunal devait être saisi dans les délais requis, l’oubli de
cette demande est de nature à faire tout échouer.
Un arrêt apportant quelques nuances à ce principe absolu a cependant déjà été
rendu en sens contraire par la Cour d’appel de Rouen le 4 mai 1999.
93
94
En l’espèce, la Cour avait ainsi considéré que :
« Dès lors que l’acquéreur du chiot décédé cinq jours après la vente de la parvovirose a saisi le Tribunal d’instance du lieu de situation de l’animal 11 jours après
la vente en joignant à sa requête deux certificats vétérinaires établis dans les termes et délais légaux faisant état de l’existence du vice rédhibitoire de parvovirose
et du décès de l’animal par parvovirose, mais que ce tribunal a manifestement
jugé inutile et impossible d’ordonner une expertise compte tenu des certificats
produits et du décès de l’animal en invitant le demandeur à saisir le Tribunal
d’instance du lieu du domicile du vendeur, compétent au fond, ce dernier, saisi
dans le délai légal de 30 jours, n’ayant pas davantage ordonné d’expertise, il ne
saurait être ainsi reproché à l’acquéreur de ne pas avoir expressément sollicité la
nomination d’un expert dans la mesure où en effet il a intenté son action dans le
délai légal et prouve, que le décès du chien est dû à la parvovirose.
Son action est donc recevable et bien fondée, une recherche positive du virus
incriminé ayant été effectuée dans les cinq jours de la vente et le vétérinaire
ayant certifié que le décès de l’animal était bien dû à ce virus. »
Quant à l’obligation de produire un diagnostic de suspicion, cette deuxième
obligation est imposée par l’article R. 213-6 qui dispose :
« Dans les cas de maladies transmissibles des espèces canine ou féline, l’action en
garantie ne peut être exercée que si un diagnostic de suspicion signé par un vétérinaire a été établi selon les critères définis par arrêté du ministre chargé de l’agriculture. »
Parmi les vices rédhibitoires des chiens et chats, les maladies transmissibles sont
au nombre de six.
On compte ainsi,
pour l’espèce canine :
la maladie de Carré ;
, l’hépatite contagieuse canine ;
, la parvovirose canine ;
,
pour l’espèce féline :
la leucopénie infectieuse féline ;
, la péritonite infectieuse féline ;
, l’infection par le virus leucémogène félin.
,
Le diagnostic de suspicion doit être matérialisé par un certificat rédigé par un
vétérinaire conformément à l’arrêté ministériel du 2 août 1990.
Ainsi, un diagnostic clinique de suspicion peut être porté :
v sur la base d’un tableau clinique fortement évocateur, relevé et consigné par
un vétérinaire ou un docteur-vétérinaire ;
v à la suite d’un examen de laboratoire.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
A chaque fois qu’un examen de laboratoire peut confirmer la suspicion clinique,
le vétérinaire ou docteur-vétérinaire doit effectuer, identifier et conserver dans
les meilleures conditions tous les prélèvements nécessaires en vue de pratiquer
ou faire pratiquer les examens complémentaires adaptés.
Il en va de même en cas de mort de l’animal dans les délais de garantie.
PETIT RAPPEL
Selon l’article L. 441-7 du Code pénal :
« Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 € d’amende le fait :
1º d’établir une attestation ou un certificat faisant état de faits matériellement inexacts. »
Le diagnostic de suspicion est soumis à ces dispositions.
Selon le même texte, le même tarif est applicable pour le fait de « faire
usage d’une attestation ou d’un certificat inexact ou falsifié. »
d) Les délais à respecter
C’est ici que se situent les principaux obstacles sur la route
procédurale de l’acheteur.
Obtenir un certificat faisant état d’un diagnostic de suspicion est faisable. Saisir
un ou deux tribunaux et demander la nomination d’experts vétérinaires également. Respecter les délais imposés par le Code rural pour faire tout cela est une
bien toute autre affaire.
En effet, les délais imposés sont tellement courts qu’ils vouent pratiquement
toute action judiciaire à un échec certain.
Autrefois, on les trouvait énumérés par le décret n° 90-572 du 28 juin 1990.
Ce décret a été abrogé le 1er août 2003 (faites en conséquence attention
aux formulaires d’attestation de cession qui en font encore mention car ils
ne sont plus conformes).
Mais le fond des textes n’a pas été modifié pour autant. On a seulement effectué
une transposition dans la partie réglementaire du Code rural.
Deux types de délais vont s’y retrouver :
v le délai pour introduire l’action et demander la nomination d’experts
vétérinaires ;
v le délai pour faire établir un diagnostic de suspicion.
Le premier délai est posé par l’article R. 213-5 du Code rural qui dispose ainsi que :
« Le délai imparti à l’acheteur d’un animal tant pour introduire l’une des actions
ouvertes par l’existence d’un vice rédhibitoire tel qu’il est défini aux articles
L. 213-1 à L. 213-9 que pour provoquer la nomination d’experts chargés de
dresser un procès-verbal est de :
95
96
Trente jours pour les maladies ou défauts des espèces canine ou féline mentionnés
à l’article L. 213-3. »
Le second délai est posé par l’article R. 213-6 qui énonce que :
« Dans les cas de maladies transmissibles des espèces canine ou féline, le diagnostic de
suspicion signé par un vétérinaire doit être établi dans les délais suivants :
pour l’espèce canine :
1º pour la maladie de Carré : huit jours ;
2º pour l’hépatite contagieuse canine : six jours ;
3º pour la parvovirose canine : cinq jours ;
,
,
,
pour l’espèce féline :
,
,
,
4º pour la leucopénie infectieuse féline : cinq jours ;
5º pour la péritonite infectieuse féline : vingt et un jours ;
6º pour l’infection par le virus leucémogène félin : quinze jours.
Tout aussi contraignant que le délai en lui-même est le point de départ de ce délai. »
En effet, selon la procédure du Code rural et son article R. 213-7 :
« Les délais prévus aux articles R. 213-5 (introduction de l’action et demande de
nomination d’experts) et R. 213-6 (diagnostic de suspicion) courent à compter
de la livraison de l’animal. La mention de cette date est portée sur la facture ou sur
l’avis de livraison remis à l’acheteur. »
Ce n’est donc pas la découverte du vice en lui-même qui va déclencher le chronomètre mais la remise de l’animal à son nouveau propriétaire, cette remise étant
attestée par la date portée sur l’attestation de cession.
Rien ne pourra proroger en outre le délai. Les pourparlers entre vendeur et acheteur ne seront pas ainsi pris en considération.
En d’autres termes, le Code rural pousse l’acheteur à devenir véritablement procédurier. Celui qui veut mettre toutes les chances de son côté doit d’abord assigner, ensuite discuter...
Les tribunaux ont toujours été très stricts quant à l’application du délai de 30 jours.
q Arrêt de la Cour d’appel de Nancy en date du 6 octobre 1999
concernant un chien atteint de dysplasie coxo-fémorale
« L’acheteur d’un chien atteint de dysplasie coxo-fémorale, vice rédhibitoire visé par l’article 285-1 du Code rural, est irrecevable à agir en garantie, dès lors qu’il n’a pas respecté le délai imposé par l’article 285-2 du même
code et fixé par l’article ler du décret du 28 juin 1990. Il avait en effet 30 jours
pour provoquer la nomination d’un expert ou introduire l’action en garantie,
mais il n’a demandé la désignation d’un expert que plus d’un mois et demi après
la découverte du vice caché. »
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
q Arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux en date du 18 septembre 2000
concernant un chien atteint de dysplasie coxo-fémorale
« Si le décret du 28 juin l990, pris pour l’application de la loi du 22 juin 1989,
répute vice rédhibitoire la dysplasie coxo-fémorale du chien, l’action en résolution de la vente basée sur ce texte ne peut être admise dès lors que le juge n’a
pas été saisi dans le délai de 30 jours suivants la prise de possession de l’animal,
fixé par le décret. »
cas particuliers de la dysplasie et de l’ectopie
testiculaire chez le chien
Un chiot se vend généralement à l’âge de huit semaines, la loi, rappelons-le,
l’interdisant avant.
A cet âge, la dysplasie coxo-fémorale ne peut être détectée avec certitude.
Il est possible, certes, qu’un vétérinaire commence à la soupçonner.
En revanche, les radiographies officielles ainsi que leur interprétation par le lecteur officiel du club de race concerné ne pourront être faites que bien plus tard.
L’acheteur d’un chiot ne pourra donc qu’avoir laissé expirer depuis longtemps le
délai de 30 jours lorsque la dysplasie aura été officiellement constatée.
Au final, on peut en conclure que les textes du Code rural ne sont dans les faits
applicables qu’à la vente de chiens adultes.
Quant à l’ectopie testiculaire chez le chiot, l’acheteur va se retrouver confronté
au même non sens concernant le délai.
Si l’ectopie testiculaire peut, elle, se révéler lorsque le chiot est à peine âgé de
huit semaines, il ne faut pas oublier que le Code rural répute vice rédhibitoire
l’ectopie testiculaire seulement pour les animaux âgés de plus de six mois.
En conséquence, à supposer que l’ectopie testiculaire soit constatée par un vétérinaire et que l’acheteur saisisse le tribunal dans les 30 jours qui suivent la vente
d’une demande en nomination d’experts, ladite demande ne pourra de toute
manière pas aboutir.
Le tribunal saisi ne pourra, en effet, que relever le fait que l’animal n’est pas
encore âgé de six mois !
Si un acheteur veut réellement se prémunir contre cet obstacle procédural, il ne
doit pas acquérir de chiot mâle âgé de moins de cinq mois.
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98
2) L’acheteur agit sur le fondement d’un vice
non rédhibitoire
a) Quels sont-ils ?
La liste des vices rédhibitoires se veut, quoi qu’on en dise, limitative.
Ceci étant posé, on peut donc mettre dans la catégorie des vices non rédhibitoires,
toutes les autres affections dont peuvent souffrir un chien ou un chat.
Les tribunaux parlent alors de vice caché et non plus de vice rédhibitoire.
Les exemples ne manquent pas.
q Dans un arrêt en date du 16 décembre 1982, la Cour d’appel
de Douai avait jugé que :
« L’acheteur d’un chien de race qui paye l’animal à un prix supérieur au
prix moyen est en droit d’exiger que l’animal soit en parfaite santé et, à
défaut, il y a lieu à réfaction du prix. »
Dans le cas d’espèce, l’animal était atteint de trachéobronchite virale.
q Dans un arrêt en date du 2 mars 1984, la Cour d’appel de Paris avait
considéré comme vice caché pour un chien de race Berger allemand :
le fait que l’animal soit peureux et sensible aux coups de feu.
q Dans un arrêt en date du 24 juin 1988, la Cour d’appel de Versailles
avait jugé que :
« Doit être résolue aux torts des vendeurs pour garantie des vices cachés de l’article 1641 du Code civil la vente d’un animal domestique dont la stérilité, connue
par les vendeurs avant la vente, n’a pas été révélée aux acheteurs profanes. »
q Dans un arrêt en date du 20 novembre 1996, la Cour d’appel de
Pau avait jugé que :
« Le chat vendu présentant une implantation dentaire défectueuse au niveau
de la mâchoire supérieure, il s’ensuit qu’il y a lieu de réduire de moitié le prix
de vente. Le chat de race Exotic Shortair est affecté au moment de la vente d’un
défaut caché touchant à une qualité substantielle dès lors que le vendeur a dissimulé l’âge réel de l’animal. En l’état, les nombreux défauts de l’animal liés à
son âge (cataracte sénile, insuffisance cardiaque, amyotrophie généralisée)
rendent l’animal impropre à la reproduction et aux concours, usages auxquels
l’acheteur le destinait. »
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
q Dans un arrêt en date du 16 février 1998, la Cour d’appel de
Grenoble avait considéré comme vice caché pour un chien de race :
une pyodermite évoluant en dermite atopique.
q Dans un arrêt en date du 10 février 1999, la Cour d’appel de
Bordeaux avait considéré comme vice caché :
une denture affectée d’anomalies.
q Dans un jugement en date du 2 septembre 2004, le Tribunal d’ins-
tance d’Uzès avait considéré comme vices cachés :
une sténose aortique sévère ;
, une dysplasie des deux coudes.
,
q Dans un jugement en date du 8 juin 2007, la juridiction de proxi-
mité de Versailles a considéré comme vice caché :
une coccidiose intestinale.
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b) Quels textes leur sont applicables ?
Longtemps, les tribunaux ont raisonné de manière binaire :
les vices rédhibitoires devaient être traités selon les dispositions du
Code rural, les autres vices dits cachés selon les dispositions du Code civil.
Pour exemple, par un arrêt en date du 16 février 1998 la Cour
d’appel de Grenoble avait considéré que :
« L’acquéreur d’un chien de race atteint d’une pyodermite évoluant en dermite atopique génétiquement transmissible est parfaitement justifié à engager
une action estimatoire fondée sur les dispositions des articles 1641 et suivants
du Code civil dès lors que cette affection n’est pas mentionnée dans l’énumération donnée par l’article 285-1 du Code rural pour l’application des dispositions des articles 284 et 285 du même code. »
La Cour de cassation a remis en cause cette distinction par un arrêt en date du
6 mars 2001.
Nous avons déjà évoqué précédemment cet arrêt dans le cadre de la dérogation
implicite aux dispositions du Code rural qui était autrefois faite.
Il n’est pas inutile cependant de revenir un peu sur cet arrêt.
Rappelons ainsi que dans le cas d’espèce, l’une des chattes présentait une
implantation dentaire défectueuse au niveau de la mâchoire supérieure et l’autre chatte présentait une cataracte sénile bilatérale, une insuffisance cardiaque
avec souffle et une amyotrophie généralisée.
Ces maladies ne sont pas répertoriées dans la liste des vices rédhibitoires.
La Cour de cassation, si elle avait suivi sa position antérieure, aurait donc dû
accepter l’application des dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil.
Mais cela n’a pas été le cas.
Ses conclusions ont été, rappelons-le, les suivantes :
« L’action en garantie dans les ventes d’animaux domestiques est régie, à défaut
de conventions contraires, par les dispositions des articles 284 et suivants du
Code rural, la Cour d’appel qui n’a pas constaté l’existence d’une telle convention a violé les textes susvisés. »
La Cour de cassation a donc, par cet arrêt, posé le principe de l’application
prioritaire du Code rural, que le vice soit rédhibitoire ou non.
Le pouvoir de cette Haute Cour sur les juridictions inférieures est indéniable.
Elle les influence et les guide dans le raisonnement et la position à adopter.
Depuis 2001, bon nombre de tribunaux ont donc adopté ce principe de priorité
du Code rural. Malgré tout, certaines juridictions continuent à ignorer ce revirement et appliquent les anciens principes.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
q Le Tribunal d’instance d’Uzès dans un jugement en date du 2
septembre 2004 a ainsi jugé que :
« L’article L. 213-4 du Code rural énumère limitativement les maladies
constitutives de vices rédhibitoires pour les ventes de chiens. Les deux
pathologies dont le chien est atteint ne figurent pas dans cette liste. Seule la dysplasie coxo-fémorale est visée, et non les deux dysplasies retrouvées chez le chien.
L’attestation de vente du chien fait expressément référence aux vices rédhibitoires
et prévoit alors un échange d’animaux, sans frais. Le contrat vise également la
dysplasie coxo-fémorale invalidante avec un examen chez un vétérinaire nommément désigné.
Il y a donc lieu de considérer que le litige ne peut se résoudre par un échange
d’animaux, comme prévu au contrat et doit donc être pris en considération au
regard des dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil, ainsi que
cela a déjà été jugé par la Haute Cour, lorsque l’animal est atteint d’une maladie
non visée aux dispositions du Code rural. »
q Plus étonnant encore est le jugement rendu par la juridiction de
proximité de Versailles le 8 juin 2007 :
Les faits :
Le 28 avril 2005, Monsieur acheteur a fait l’acquisition d’un chien de race « Cavalier King Charles » auprès de Monsieur vendeur moyennant un prix de 1.000 €.
Le chiot refusant de s’alimenter et présentant des diarrhées, Monsieur acheteur
l’emmène le 30 avril chez un vétérinaire qui le garde en observation une journée et le rend le soir avec un traitement pour la diarrhée. Malgré le traitement,
l’état du chiot s’est aggravé et Monsieur acheteur décide de l’amener dans une
clinique vétérinaire de garde où il est hospitalisé et où il décédera dans la nuit
du 1er au 2 mai 2005.
L’animal a été autopsié le 4 mai suivant et des prélèvements ont été réalisés en
vue d’un examen histologique. Le compte-rendu d’examen fait état d’une « forte
coccidiose intestinale objectivée et jugée responsable de la forte entérite avec
diarrhée mucoïde observée ».
Les arguments des parties
Monsieur acheteur soutient que son action est parfaitement recevable sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code civil puisque la pathologie dont
le chien était atteint ne rentre dans aucun des cas visés par l’article 285-1 du
Code rural.
De son côté, Monsieur vendeur rappelle que l’action en garantie dans les ventes d’animaux domestiques est régie, à défaut de conventions contraires, par les
dispositions du Code rural, lequel prévoit qu’elle doit être exercée dans le délai
de 30 jours.
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La décision du tribunal
L’article L. 213 -1 du Code rural prévoit que « l’action en garantie dans les
ventes ou échanges d’animaux domestiques est régie, à défaut de conventions
contraires par les dispositions de la présente section ... » ; l’article R. 213-2, pris
en application de l’article L. 213-2 donne une liste des maladies ou défauts portant sur les chiens constituant des vices rédhibitoires ouvrant droit à l’action en
garantie des articles 1641 et suivants du Code civil. Dans cette liste ne figure
pas la coccidiose intestinale dont le chiot de la demanderesse a été victime.
En l’espèce, au verso de l’attestation de vente du chiot, sont rappelées les dispositions relatives aux vices rédhibitoires dans les ventes et échanges d’animaux
domestiques. Ces dispositions prévoient que l’action doit être exercée dans un
délai de 30 jours à compter de la livraison de l’animal dans six cas de maladie
des espèces canines.
Cette attestation de vente étant le contrat de vente liant les parties constitue
une convention contraire puisqu’elle limite explicitement à six cas de maladie
précisément énumérés le délai de 30 jours dans lequel doit s’exercer l’action en
garantie.
La coccidiose intestinale n’étant citée parmi ces six cas, l’action de Monsieur
acheteur exercée postérieurement à l’expiration du délai de 30 jours suivant
la livraison de l’animal est recevable.
Il existe donc depuis 2001 une véritable incertitude quant au choix des dispositions que la juridiction saisie choisira de retenir.
c) Les démarches de l’acheteur
Tout comme en matière de vice rédhibitoire, l’acquéreur qui vient se
plaindre d’un vice caché doit tout d’abord saisir le tribunal compétent.
Mais cette fois-ci et contrairement à la procédure intentée pour un vice rédhibitoire, ce n’est pas le Tribunal d’instance qui sera automatiquement compétent.
Non, en matière de vice caché, on en revient au droit commun.
Ainsi, si l’enjeu du litige ne dépasse pas 4.000 €, l’acquéreur devra saisir la
juridiction de proximité qui se prononcera en premier et dernier ressort (pas
d’appel possible).
Si l’enjeu du litige dépasse 4.000 €, l’acquéreur pourra dans ce cas saisir le Tribunal
d’instance qui se prononcera à charge d’appel (appel possible).
Quant au tribunal géographiquement compétent, on doit ici appliquer également les règles de droit commun étudiées plus haut : c’est donc en principe le
tribunal du domicile du défendeur sauf si l’animal a été livré dans un autre lieu.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
Une fois le bon tribunal saisi, notre acquéreur doit ensuite fonder en droit son
action.
Nous nous placerons ici dans le cas où le litige né va être jugé selon les dispositions du Code civil (pour l’application du Code rural, il suffit de se reporter à
l’étude faite un peu plus haut).
Pour qu’une action ainsi fondée aboutisse, l’acheteur doit être en mesure d’apporter cumulativement la preuve de trois éléments :
, l’animal était déjà atteint par la maladie au jour de sa remise ;
, la maladie n’était pas connue par l’acheteur et ne pouvait pas être
décelée à ce moment là ;
, la maladie est d’une gravité telle que si l’acheteur l’avait connue, il n’aurait
pas acheté l’animal ou n’en aurait donné qu’un prix bien moindre.
Le caractère cumulatif est ici très important : si un seul de ces trois éléments
vient à faire défaut, l’acheteur perdra son procès.
La préexistence de la maladie à la cession
C’est une condition nécessaire à la mise en jeu de la garantie du vendeur, ce dernier ne pouvant être tenu responsable des maladies contractées par le chiot ou
le chaton après son départ de l’élevage.
Le problème se pose toutefois assez souvent de la détermination difficile de la
date exacte de l’origine du vice allégué.
Cette détermination est toutefois essentielle à l’action dans la mesure où la
charge de la preuve de l’antériorité pèse sur l’acheteur, demandeur dans la procédure judiciaire.
Il ne peut y avoir ici de renversement de la charge de la preuve conduisant le
vendeur à prouver que le vice n’était pas présent avant la remise de l’animal
(nous verrons qu’il n’en est pas de même malheureusement dans le cadre de la
nouvelle garantie de conformité).
La preuve n’est donc pas toujours aisée pour l’acquéreur.
Bien entendu, dans le cas des maladies héréditaires et en cas d’affection congénitale (maladie présente à la naissance), la preuve sera facilitée : l’animal est
atteint depuis sa naissance et cela même si la maladie ne s’est pas déclarée avant
la vente.
Il est à noter que pour le cas de la dysplasie chez le chien, le défendeur aura tendance à mettre en avant les mauvaises conditions de vie du chien. Il faut cependant savoir que même si elles sont avérées, le tribunal privilégiera la thèse de
l’hérédité.
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Pour les autres maladies, les choses sont plus compliquées. Le magistrat se réfèrera donc aux certificats vétérinaires produits par l’acheteur. Si l’éleveur souhaite les contester, il peut toujours demander une expertise judiciaire.
La maladie n’était pas connue par l’acheteur et ne pouvait pas
être décelée au moment de la remise
Si l’animal ne présente pas de troubles apparents et si l’acheteur est un profane,
un défaut sera facilement considéré comme caché.
En effet, l’acheteur doit seulement procéder à des vérifications normales, cette
notion étant appréciée assez largement puisqu’on considère qu’un acheteur n’est
tenu de faire appel qu’à ses seules capacités personnelles.
q Dans une affaire ancienne où un acheteur avait fait l’acquisition,
sans le savoir, d’un cheval borgne, la Cour de cassation le 24 février
1964 avait considéré que :
« Cette infirmité n’était pas apparente et ne pouvait être décelée que par un examen approfondi auquel un acheteur n’a pas coutume de se livrer en personne. »
A contrario, on considère donc que l’acheteur prévenu de l’existence d’un vice
lors de la vente ne pourra plus s’en plaindre ultérieurement.
Ceci est conforme aux dispositions de l’article 1642 du Code civil selon
lesquelles : « Le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a
pu se convaincre lui-même. »
Dûment informé, il ne peut, à juste titre, se plaindre d’avoir acheté un bien vicié
(Cour d’appel de Versailles, le 20 janvier 1994).
Mais encore faut-il que le vendeur puisse après la vente prouver l’information
de l’acheteur.
La baisse du prix de vente en raison d’un défaut présenté par l’animal est assez
courante.
Pour que l’éleveur soit totalement protégé, il lui faut également faire figurer
de manière apparente dans l’attestation de vente le défaut en lui-même et ses
implications possibles.
Tromper l’acheteur sur l’état réel de santé revient, en effet, à considérer le vice
comme caché.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
q Dans une affaire sur la vente d’un chat au cours d’une exposition
féline avec un reçu remis à l’acheteur mentionnant le caractère temporaire et aisément guérissable de la maladie, la Cour d’appel de Rouen
le 19 mai 1993 a considéré que :
« Le reçu remis à l’acquéreur présentait l’affection dont il était atteint comme
bénigne et aisément guérissable et le vendeur a lui-même déclaré que s’il avait
connu la maladie mortelle dont il était atteint il ne l’aurait point vendu, d’autant que l’animal a été vendu au cours d’une exposition féline où il avait été jugé
excellent. L’animal domestique ayant été atteint d’une maladie grave, il y a lieu
de prononcer la résolution de la vente. »
La gravité de la maladie
Pour qu’il y ait véritablement vice caché et application de la garantie correspondante, l’élément le plus important, conformément à l’article 1641 du Code civil,
est que le défaut caché de la chose vendue la rende impropre à l’usage auquel on
la destine, ou diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise,
ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il l’avait connu.
On peut être en présence d’une maladie antérieure à la vente et cachée le jour
de la remise de l’animal sans que pour autant on puisse faire jouer la garantie des
vices cachés.
Si cette maladie ne rend pas le chien ou le chat impropre à sa destination, l’action de l’acheteur n’aura aucune chance d’aboutir.
C’est donc à ce niveau que la destination de l’animal vendu prend tout son sens.
Cette destination a été choisie, rappelons-le, d’un commun accord entre le vendeur et l’acheteur lors de la conclusion de la vente.
C’est à cette destination choisie et mentionnée sur l’attestation de vente que le
juge va donc se référer pour apprécier si oui on non il y a impropriété de l’animal à l’usage auquel on le destinait ou si cet usage est nettement diminué.
C’est une appréciation « in concreto », au cas par cas.
L’étude de la jurisprudence reste une fois de plus ce qu’il y a de plus instructif.
q Pour un exemple de chien propre à sa destination de chien de
compagnie, Cour d’appel de Montpellier, arrêt du 2 mars 2004 :
v « Attendu qu’il est constant que cette chienne, née le 20 décembre
1997 et enregistrée au L.O.F. le 14 février 2000 et qui répond à tous les
critères de sa race, est atteinte d’une cataracte polaire postérieure et bilatérale
diagnostiquée le 6 mai 2000, soit deux ans après la vente.
105
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v qu’il s’agit d’une maladie dont l’origine est probablement génétique, sans que
les avis médicaux produits ne permettent cependant de dégager une quelconque
certitude, compte tenu des divergences et nuances que leur rapprochement fait
apparaître ;
v attendu que cette affection, même si elle altère la qualité de la vision, n’affecte pas les relations de l’animal à l’égard de son maître et l’agrément que
celui-ci tire de sa compagnie ;
v qu’elle n’est pas irréversible et qu’une intervention chirurgicale, dans l’éventualité où elle deviendrait nécessaire, permettrait à N. de recouvrer une vue correcte, le vendeur offrant d’en prendre les frais à sa charge ;
v qu’enfin, elle est sans incidence sur ses capacités reproductrices ; que si l’on
ne peut exclure que certains de ses chiots contractent un jour la cataracte, force
est cependant de constater qu’en l’état, la preuve n’est pas rapportée d’une transmission effective de cette maladie par N. à sa descendance ;
v attendu que dans ces circonstances, l’existence d’un vice rédhibitoire ouvrant
droit à l’action estimatoire des articles 1641 et suivants du Code civil n’est pas
en l’espèce caractérisée ;
v que Monsieur acheteur sera en conséquence débouté de sa demande en réduction du prix de vente. »
q Pour un exemple de chien impropre à sa destination de chien de
compagnie : Tribunal d’instance d’Uzès, jugement en date du 2 septembre
2004 :
« Il est évident que pour un Terre-Neuve, chien particulièrement imposant et
susceptible de nager et d’avoir une grande activité d’extérieur, la sténose aortique
sévère va limiter ses capacités de chien d’agrément, de même que la dysplasie
mitrale et la dysplasie des coudes dont il a été opéré.
De plus, il est démontré que ce chien sera toute sa vie sous médicament vasodilatateur, et que son espérance de vie est singulièrement raccourcie, par rapport à
ce qui est habituellement attendu par l’acheteur d’un chiot de race. Sans compter l’impossibilité de le faire se reproduire, sous peine de transmission des maladies dont il souffre. Les expositions et concours sont également remis en cause,
du fait de l’essoufflement anormal du chien.
Il y a donc bien une impropriété partielle du chien à l’usage auquel il est normalement destiné, le Terre-Neuve n’étant pas une race de chien de salon, qui peut
se contenter de rester allongé sur un coussin, durant toute sa vie.
Si Monsieur acheteur avait su de quelles maladies son chiot était atteint, il ne
l’aurait pas acquis et, en tout cas, pas au prix qu’il a accepté de débourser. »
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
d) Les délais à respecter
Si la juridiction saisie suit la position adoptée par la Cour de cassation
depuis mars 2001, elle devra faire application du délai de 30 jours
pour saisir le tribunal et demander la nomination d’experts vétérinaires.
Si au contraire, elle ne suit pas cette position, elle fera application de l’article
1648 du Code civil.
Cet article est très intéressant de par son évolution.
Voici son ancienne rédaction : « L’action résultant des vices rédhibitoires doit être
intentée par l’acquéreur, dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires, et
l’usage du lieu où la vente a été faite. »
Le bref délai a longtemps donné lieu à des interprétations très diverses :
q La Cour d’appel de Dijon, dans un arrêt en date du 15 avril
1993, avait jugé pour un chien de race Drahthaar que :
« Considérant que la remise à titre gracieux d’un deuxième chien, au
demeurant affecté des mêmes défauts que le premier, n’a pas eu pour effet
d’interrompre ou de prolonger le bref délai, l’action résultant des vices rédhibitoires exercée par l’acheteur dans un délai de deux ans à partir de la date du
deuxième examen de confirmation est jugée tardive et donc irrecevable. »
q Dans un arrêt en date du 14 décembre 1994, la Cour d’appel
d’Orléans a jugé que :
« Est recevable l’action en garantie des vices cachés d’un acheteur de chiens Berger
allemand atteints de dysplasie coxo-fémorale, fondée sur le droit commun de la
vente, à savoir les articles 1641 et suivants du Code civil, qui a été intentée à bref
délai au sens de l’article 1648 du Code civil, le délai de neuf mois entre la découverte du vice et l’action n’étant pas excessif dès lors qu’avant d’engager son action
l’acheteur s’est entouré de précautions en sollicitant préalablement l’avis d’un professeur en médecine vétérinaire ainsi que celui de la société du chien Berger allemand, la nature du vice en cause exigeant, en effet, l’avis de spécialistes. »
q Le bref délai avait même été estimé à 30 jours, pour un cheval, par
la Cour de cassation dans un arrêt en date du 11 avril 1995 :
« Il appartient aux juges du fond de déterminer souverainement si, eu égard à la
nature des vices et aux circonstances de la cause, l’action en garantie des vices
cachés a été intentée dans le bref délai imposé par l’article 1648 du Code civil ;
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v que, s’agissant de la résolution de la vente d’animaux fondée sur les articles
1645 et suivants du Code civil, rien ne leur interdit, pour fixer ce délai, de faire
référence, à titre d’élément d’appréciation, à celui de l’action rédhibitoire dans
les ventes d’animaux domestiques régie par l’article 285 du Code rural ;
v que la Cour d’appel n’a fait qu’user de son pouvoir souverain en retenant
qu’en l’espèce, le bref délai devait être très voisin de celui fixé pour les vices énumérés par ce texte, notamment la boiterie ou l’immobilité du cheval, et que l’action engagée par la société Narvick international le 10 octobre 1988, alors que
la vente avait été conclue le 7 septembre précédent, était tardive. »
q La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 20 février 1998, avait
considéré :
« En assignant le vendeur des chiens, moins d’un an après la découverte du vice
affectant la chose vendue, l’acheteur a respecté le bref délai prévu par l’article 1648
du Code civil. »
q Dans un arrêt en date du 5 septembre 2000, la Cour d’appel de
Montpellier a jugé que :
« La maladie dont est atteinte la chienne (dysplasie coxo-fémorale) la rend
impropre à l’usage de la chasse à laquelle elle était destinée, néanmoins l’acquéreur
ayant engagé une action plus de six mois après avoir eu connaissance du vice
sa demande est irrecevable. »
q Prenant en considération le temps des pourparlers entre le vendeur
et l’acheteur, la Cour d’appel de Paris dans un arrêt rendu le 11 octobre
2000 avait jugé que :
« Est irrecevable l’action engagée plus de quinze mois après la date de l’échec
des pourparlers. »
A l’étude de la jurisprudence, on pouvait donc en conclure que le bref délai s’entendait comme une durée de moins d’un an.
Tout a changé en 2005.
Une ordonnance à effet au 17 février 2005 a modifié l’article 1648 du Code civil
et a enfin posé un délai précis : deux ans.
Attention : ce nouveau délai n’est applicable qu’aux ventes intervenues
après le 17 février 2005.
Quoi qu’il en soit, que l’on se place avant ou après le 17 février 2005, une chose
demeure : le point de départ du délai.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
En effet, le point de départ n’est pas la date d’acquisition de l’animal (comme
c’est le cas dans la procédure fondée sur les dispositions du Code rural) mais la
date de découverte du vice.
C’est donc un système plus avantageux pour le propriétaire d’un animal dont la
maladie ne se révèle pas forcément immédiatement après l’achat.
2) Les indemnités octroyées à l’acheteur
Nous allons maintenant nous placer dans l’hypothèse où le tribunal saisi de l’affaire
considère que l’existence d’un vice, qu’il soit rédhibitoire ou caché, est avérée.
Que l’on soit en présence d’un vice rédhibitoire ou non, l’aboutissement est
pour ainsi dire le même.
En effet, l’article R. 213-2 du Code rural fait expressément référence pour les
vices rédhibitoires à l’application des actions résultant des articles 1641 à 1649
du Code civil.
C’est donc au Code civil que l’on doit se reporter pour connaître les demandes
possibles de l’acheteur et les condamnations afférentes du vendeur.
109
110
a) Le devenir du prix de vente
Le choix de l’acheteur
Si le Code civil et le Code rural se rejoignent quasiment en tous points sur
l’aboutissement de la procédure en garantie pour vice, un point cependant
demeure différent.
Le principe veut, selon l’article 1644 du Code civil, que ce soit l’acheteur qui
ait le choix entre :
v rendre l’animal et se faire restituer le prix (on parlera d’action rédhibitoire) ;
v ou garder l’animal et se faire rendre une partie du prix, telle qu’elle sera
arbitrée par experts (on parlera d’action estimatoire).
Il est de la sorte acquis que le choix offert à l’acheteur par l’article 1644 du Code
civil s’exerce sans que cet acheteur ait à le justifier (arrêt rendu par la première
chambre civile de la Cour de cassation le 5 mai 1982).
Rappelons également qu’une clause privant l’acheteur d’une des branches
de l’option prévue par ce même article ne peut être invoquée par un vendeur
professionnel.
Enfin, l’acheteur peut toujours introduire une action sur un fondement (estimatoire par exemple) et changer ce fondement (en action rédhibitoire) en cours
de procédure. Ce changement est possible tant qu’il n’a pas été statué sur la
demande par décision passée en force de chose jugée (décision devenue définitive) ou tant que le vendeur n’a pas acquiescé à la demande (arrêt rendu par la
seconde chambre de la Cour de cassation le 11 juillet 1974).
Le tribunal saisi ne saurait enfin choisir lui-même entre les deux actions, sauf si
l’acheteur a fondé sa procédure à titre principal sur l’une et à titre subsidiaire sur
l’autre (arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 6
mars 1990).
Le Code rural bloque cependant le choix de l’acheteur lorsque l’animal est
atteint d’un vice rédhibitoire.
L’article L. 213-7 dispose à cette fin que :
« L’action en réduction de prix autorisée par l’article 1644 du Code civil ne peut
être exercée dans les ventes et échanges d’animaux énoncés à l’article L. 213-2
lorsque le vendeur offre de reprendre l’animal vendu en restituant le prix et en remboursant à l’acquéreur les frais occasionnés par la vente. »
En conséquence, si le vendeur accepte de rembourser l’intégralité du prix ainsi
que tous les frais accessoires, l’acheteur n’aura pas d’autre choix que de rendre
l’animal.
Cette solution n’est pas très conforme à la nature particulière des animaux
de compagnie.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
En effet, il résulte du lien d’affection qui s’établit rapidement entre une personne et son chien ou son chat que la plupart des actions judiciaires engagées
visent à une réduction de prix et non à la résolution de la vente.
L’action estimatoire
En faisant le choix de cette action, l’acheteur s’interdit le remboursement total
du prix de vente. Il n’aura le droit de se faire rendre qu’une partie du prix.
Cette partie du prix ne saurait en revanche être évaluée au hasard.
Le juge ne saurait seul, non plus, décider de son montant.
L’article 1644 du Code civil est très clair à ce sujet : la partie du prix à restituer
doit « être arbitrée par experts ».
Il s’agit, pour la juridiction saisie, d’une véritable obligation (arrêt rendu par la
troisième chambre civile de la Cour de cassation le 10 novembre 1999).
L’action rédhibitoire
En faisant le choix de cette action, l’acheteur obtiendra du tribunal la résolution de la vente.
La résolution d’une vente implique que l’on remette les choses dans leur état antérieur. Pour cela, le vendeur doit restituer le prix de vente et l’acheteur l’animal.
Si ce dernier ne peut s’exécuter, la résolution devient impossible.
En conséquence, cette action ne peut être intentée si l’acheteur a perdu l’animal.
L’action est toutefois recevable si l’animal est mort des suites du vice dont il
était atteint.
b) Les indemnités accessoires
L’acheteur ne se contente généralement pas de la restitution d’une partie
ou de la totalité du prix de vente.
Il aurait d’ailleurs tort de le faire puisque les dispositions du Code civil lui donnent la possibilité d’obtenir bien plus.
Aux termes de l’article 1645 dudit code, lorsque le vendeur connaissait les vices
de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les
dommages et intérêts envers l’acheteur.
On sanctionne donc ici le vendeur de mauvaise foi.
Mais attention, la démonstration de la mauvaise foi du vendeur est plus ou
moins simple à faire.
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112
Dans le cas d’un vendeur non professionnel, l’acquéreur devra apporter la preuve
de la connaissance du vice lors de la vente.
Dans le cas, par contre, d’un vendeur professionnel, le mécanisme est différent.
En effet, la jurisprudence est constante sur le point suivant : le vendeur professionnel est présumé être de mauvaise foi. On considère qu’il ne peut ignorer les
vices de la chose vendue et qu’il doit donc en répondre !
En aucune manière, il n’est admis à apporter la preuve contraire.
q Pour exemple, dans un arrêt en date du 16 février 1998,
la Cour d’appel de Grenoble jugeait que :
« Le vendeur, professionnel de l’élevage de chiens, devra rembourser la
somme de 6.000 F (915 €) sur le prix perçu, car il ne peut utilement prétendre avoir ignoré la maladie qui affectait l’animal lors de la vente et le rend
impropre à l’usage de reproduction auquel il était destiné, outre la condamnation, en vertu des dispositions de l’article 1645 du Code civil, au paiement de
5.000 F (762 €) à titre de dommages-intérêts destinés à réparer le préjudice matériel de l’acquéreur qui a dû exposer des frais de vétérinaires. »
Seul échappatoire pour l’éleveur comme nous l’avons déjà vu plus haut : insérer,
lorsqu’il vend un chien ou un chat à un autre éleveur, une clause excluant sa
garantie pour les vices cachés.
Attention : si l’animal vendu vient à mourir des suites du vice, le vendeur,
qu’il soit professionnel ou non, de mauvaise foi ou non, sera tenu, outre
à la restitution du prix de vente mais aussi à d’autres dédommagements
ci-dessous énoncés.
Etudions à présent les indemnités auxquelles un vendeur de mauvaise foi peut
être condamné.
Remboursement des frais vétérinaires
Ils sont pour ainsi dire incontournables.
Ils dépassent le plus souvent le prix de vente et coûtent donc très cher au final
à l’éleveur.
q Pour un chien Berger allemand atteint de dysplasie coxo-fémorale
la Cour d’appel d’Orléans dans un arrêt en date du 14 décembre 1994
jugeait que :
« Suite à l’action estimatoire intentée par l’acheteur, en application de l’article
1644 du Code civil, le vendeur doit restituer une partie du prix, à savoir 5.058 F,
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
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UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
et, du fait qu’il connaissait le vice, est tenu, en application de l’article 1645 du
Code civil, à tous les dommages-intérêts envers l’acheteur, à savoir 16.658 F
(2.540 €) en réparation des actes médicaux permettant de remédier au vice. »
Contrairement à la réduction du prix de vente qui doit être estimée par experts,
le texte de l’article 1645 du Code civil ne donne aucune indication.
Le magistrat devra donc seul, en dehors de toute expertise judiciaire demandée
par l’une ou l’autre des parties, estimer le montant des frais vétérinaires à rembourser selon les certificats médicaux et les factures produits.
Il garde en la matière son pouvoir souverain d’appréciation et n’est pas tenu par
les dépenses réellement effectuées.
q Ainsi, dans une affaire concernant un chien atteint de dysplasie des
coudes, l’acheteur, résidant à Béziers, avait choisi de faire opérer l’animal non par son vétérinaire mais par l’Ecole Vétérinaire de Toulouse.
Le Tribunal d’instance d’Uzès dans son jugement du 2 septembre 2004
avait alors considéré que :
« Il y a donc lieu de lui allouer 1.100 € de dommages et intérêts, cette somme
prenant en considération à la fois une diminution du prix de vente, pour vice
caché et la garantie de ces vices par le vendeur, puisque par ailleurs la requérante conserve le chien et l’agrément partiel qui en résulte.
Il n’existe pas d’autres préjudices justifiés par la requérante, qui a fait le choix
d’utiliser les services de l’École Vétérinaire de Toulouse, plus éloignée et plus
prestigieuse que le vétérinaire local, mais également plus onéreuse. Il n’y a donc
pas lieu à indemnisation supplémentaire de ce chef. »
Préjudice moral
L’indemnisation du préjudice moral résultant du décès d’un animal est une solution acquise dans son principe depuis plus de quarante ans.
A l’origine de cette jurisprudence se trouve un arrêt rendu par la première
chambre civile de la Cour de cassation le 16 janvier 1962 pour un cheval de
course dénommé « Lunus ».
Depuis, les décisions rendues se sont étendues aux autres animaux et notamment aux chiens et aux chats.
Ainsi, a été reconnu le préjudice affectif du propriétaire d’un Yorkshire écrasé
par un automobiliste qui a pris la fuite (Cour d’appel de Paris, arrêt en date du
7 mars 1983).
De même, existe-t-il un préjudice moral lorsqu’un vétérinaire décide l’euthanasie
d’une chienne sans le consentement de son propriétaire (Cour de cassation,
arrêt rendu par la 1ère chambre civile le 8 juillet 1986).
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Le montant de l’indemnisation reste généralement peu élevé.
Pour un chien Labrador atteint de dysplasie, le Tribunal d’instance d’Auxerre
avait estimé le préjudice moral à hauteur de 100 €.
Pour un chien Berger allemand atteint de dysplasie coxo-fémorale, la Cour
d’appel d’Orléans, dans son arrêt en date du 14 décembre 1994, avait estimé le
préjudice moral à hauteur de 4.000 F (610 €).
Perte de chance
Entre le dommage futur et certain et le dommage éventuel se situe la perte de
chance.
Depuis quelques années, les tribunaux considèrent recevables les demandes
indemnitaires fondées sur la perte de chance.
On considère que le préjudice est certain si la chance existe réellement, c’est-àdire s’il est probable que l’événement heureux considéré se produira.
Un acquéreur pourrait soutenir que l’animal qu’il a acquis et qui était, selon le
contrat, destiné à l’accompagner dans son travail lui a fait perdre certaines occasions professionnelles réelles en raison de la maladie dont il est atteint.
La perte de chance peut concerner également la reproduction prévue de l’animal si la destination était clairement mentionnée en ce sens.
q A ce titre la Cour d’appel d’Orléans avait alloué le 14 décembre 1994 la
somme de 90.000 F (13.720 €).
q Relevant la perte de chance de reproduction, la Cour d’appel de Paris avait
alloué par un arrêt en date du 8 février 2000 la somme globale de 6.000 F (915 €)
pour ce préjudice ainsi que pour le remboursement des frais d’opération de l’animal.
Dépenses d’entretien et de nourriture, frais d’inscriptions dans les
expositions.
Lorsque le magistrat prononce la résolution de la vente, l’acheteur peut faire
valoir que jusqu’à ce jour précis il a dû nourrir et entretenir l’animal. Au bout
de quelques années, cela peut représenter pour le vendeur des sommes non
négligeables en comparaison du prix qu’il a pu retirer de la vente.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
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C/ La garantie de conformité
1) Domaine d’application
Cette garantie est très récente puisqu’elle a été introduite dans notre
législation par l’ordonnance du 17 février 2005.
Toutefois, et cela n’est pas sans importance, les textes qui la concernent figurent
dans le Code de la consommation.
En conséquence, cette nouvelle garantie ne concerne que les relations contractuelles entre le vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou
commerciale et l’acheteur agissant en qualité de consommateur.
Elle ne peut donc s’appliquer pour une vente conclue entre deux particuliers ou
entre deux éleveurs, professionnels de l’élevage.
Outre la responsabilité quasi automatique du vendeur, responsabilité que nous
étudierons un peu plus loin, l’un des problèmes majeurs posés par l’ordonnance
réside dans le fait qu’elle a été conçue principalement pour les biens meubles
traditionnels tels qu’un téléviseur ou un réfrigérateur.
Certes, son application aux animaux de compagnie ne fait aucun doute dans la
mesure où le Code rural le mentionne clairement.
Toutefois, les termes utilisés par l’ordonnance ne sont pas toujours compatibles
avec les animaux.
Il suffit pour s’en convaincre de lire l’article L. 211-4 du Code de la consommation qui utilise les termes « emballage, instructions de montage » ou encore l’article
L. 211-5 du même code qui parle « d’échantillon ».
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2) Définition de la conformité
Le principe de la garantie est posé par l’article L. 211-4 du Code de la
consommation qui indique que : « Le vendeur est tenu de livrer un bien
conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance » (remise de l’animal).
L’article L. 211-5 vient ensuite préciser que pour être conforme au contrat, le
bien doit :
« 1º Etre propre à l’usage habituellement attendu d’un bien semblable et, le cas
échéant :
v correspondre à la description donnée par le vendeur et posséder les qualités
que celui-ci a présentées à l’acheteur sous forme d’échantillon ou de modèle ;
v présenter les qualités qu’un acheteur peut légitimement attendre eu égard
aux déclarations publiques faites par le vendeur, par le producteur ou par son
représentant, notamment dans la publicité ou l’étiquetage. »
On ne peut que penser en lisant ce dernier paragraphe aux sites Internet.
A ce propos, l’éleveur doit prendre conscience du fait que la publicité sur son
site de chiens ou chats ayant reçu de nombreuses récompenses est susceptible
d’être utilisée par l’acheteur. Si celui-ci a acquis un animal présentant, postérieurement à la vente, un problème de santé, l’acquéreur ne manquera pas de
mettre en avant la renommée de l’élevage incompatible avec l’animal qui lui a
été vendu.
« 2º Ou présenter les caractéristiques définies d’un commun accord par les parties
ou être propre à tout usage spécial recherché par l’acheteur, porté à la connaissance
du vendeur et que ce dernier a accepté. »
Ce paragraphe-ci n’est pas sans rappeler la notion de destination posée par le
Code civil.
En effet, rappelons que le Code civil parle de vice lorsque le défaut rend
l’animal « impropre à l’usage auquel on le destine ou diminue tellement cet usage
que l’acheteur ne l’aurait pas acquis, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix,
s’il l’avait connu ».
Dans le cas de la garantie de conformité, on utilise les termes « usage spécial
recherché par l’acheteur » mais la finalité est la même.
Quoi qu’il en soit, Code de la consommation ou Code civil, le magistrat va examiner au cas par cas si l’animal remplit bien son rôle.
Ainsi, le chien vendu comme chien de chasse et qui s’enfuit au premier coup de
fusil sera certainement considéré comme :
, non-conforme selon le Code de la consommation ;
, impropre à l’usage auquel on le destine selon le Code civil.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
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3) Les délais à respecter
Selon l’article L. 211-7 du Code de la consommation, les défauts de conformité
qui apparaissent dans un délai de 6 mois à partir de la délivrance sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire.
Voilà un problème de taille pour le vendeur.
En effet, à partir du moment où le défaut se révèle dans les 6 mois qui suivent
la remise de l’animal, ce n’est pas à l’acheteur de prouver que le problème existait avant la vente mais au vendeur de prouver que ce n’était pas le cas.
Il y a donc une véritable présomption contre le vendeur et qui pèse de surcroît
sur lui pendant 6 mois.
Second délai essentiel en matière de conformité : celui pour porter l’action
devant un tribunal.
Il est fixé par l’article L. 211-12 qui édicte que l’action résultant du défaut de
conformité est limitée dans le temps : elle se prescrit par deux ans à compter de
la délivrance de l’animal.
4) Conséquences de la non conformité
a) Exclusion de garantie
Il se peut tout d’abord que l’animal ne soit pas conforme et que
la responsabilité de l’éleveur ne soit pas engagée pour autant.
En effet, tout comme le Code civil, le Code de la consommation prend le soin
de dégager le vendeur de la responsabilité d’un vice qu’il aura clairement signalé
à l’acheteur.
Ainsi l’article L. 211-8 dispose que :
« L’acheteur est en droit d’exiger la conformité du bien au contrat. Il ne peut
cependant contester la conformité en invoquant un défaut qu’il connaissait ou
ne pouvait ignorer lorsqu’il a contracté. »
En conséquence, si le chiot vendu présente déjà à huit semaines un problème
laissant présager une ectopie testiculaire, il appartiendra au vendeur de le signaler
sur l’attestation de vente.
Le prix sera vraisemblablement revu à la baisse pour cette raison.
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118
Si le problème devait n’être porté à la connaissance de l’acheteur que de manière
orale, le vendeur serait par la suite dans une position critique et dans l’impossibilité de prouver quoi que ce soit.
La garantie trouverait alors à s’appliquer, ce qui serait regrettable.
Attention : rappelons qu’aux termes de l’article L. 211-17, les conventions
qui écartent ou limitent directement ou indirectement les droits résultant de la garantie de conformité dans une vente conclue entre le vendeur et l’acheteur avant que ce dernier n’ait formulé de réclamation, sont
abusives et de ce fait réputées non écrites.
b) Garantie principale
Plaçons-nous maintenant dans le cas où la non-conformité est avérée.
Dans une telle situation, l’acheteur consommateur a droit pour son mal à deux
remèdes :
, La réparation ;
, le remplacement.
En tout état de cause, c’est à lui que revient tout d’abord le choix.
Que faut-il entendre par réparation ?
La jurisprudence en la matière n’est pas encore assez riche pour nous le dire.
On peut cependant supposer que pour une dysplasie, par exemple, il pourrait
s’agir d’une opération chirurgicale.
La réparation sous-entend quoi qu’il arrive, pour les animaux domestiques, l’intervention d’un vétérinaire.
Seul un tel praticien sera en mesure de dire si oui ou non une « réparation » est
envisageable.
Le choix de l’acheteur étant fait, les choses ne s’en simplifient pas pour autant.
En effet, après avoir posé le principe du choix par l’acheteur, le même article
L. 211-9 vient aussitôt affirmer que :
« Le vendeur peut ne pas procéder selon le choix de l’acheteur si ce choix
entraîne un coût manifestement disproportionné au regard de l’autre modalité, compte tenu de la valeur du bien ou de l’importance du défaut. Il est alors
tenu de procéder, sauf impossibilité, selon la modalité non choisie par l’acheteur. »
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
On voit ici que le choix de l’acheteur est bien fragile.
Reprenons le cas du chiot vendu qui est diagnostiqué dysplasique par la suite.
Le coût du remplacement par un autre chiot peut être bien moindre que celui
d’une lourde opération chirurgicale.
L’éleveur pourrait donc légalement, s’il a des chiots disponibles à la vente,
contraindre l’acheteur au remplacement.
Les choses se compliquent encore.
Pour cause, l’article L. 211-10 dispose que :
« Si la réparation et le remplacement du bien sont impossibles, l’acheteur
peut rendre le bien et se faire restituer le prix ou garder le bien et se faire rendre
une partie du prix. »
mais également que : « La même faculté lui est ouverte :
si la solution demandée, proposée ou convenue ne peut être mise en œuvre dans le
délai d’un mois suivant la réclamation de l’acheteur ;
ou si cette solution ne peut l’être sans inconvénient majeur pour celui-ci compte tenu
de la nature du bien et de l’usage qu’il recherche.
La résolution de la vente ne peut toutefois être prononcée si le défaut de conformité est mineur. »
En d’autres termes, si l’acheteur choisit la réparation, le vendeur ne pourra, en
principe, lui imposer un remplacement que s’il est en mesure de lui échanger
l’animal dans un délai d’un mois.
Mais on doit également considérer la nature particulière du bien vendu. Un
chien et un chat ne sont pas des meubles ordinaires.
L’acheteur acquiert en même temps que leur propriété un attachement quasi
certain. On pourrait ainsi valablement considérer que la nature particulière d’un
animal de compagnie permet à son propriétaire d’imposer à l’éleveur la réduction du prix de vente.
Dans l’exemple pris, le propriétaire du chien dysplasique pourrait vouloir garder
son animal et ainsi opposer au remplacement proposé par le vendeur une réduction du prix de vente.
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Deux schémas pour synthétiser
les suites possibles d’une non-conformité avérée :
LA RÉPARATION ET LE REMPLACEMENT SONT POSSIBLES
DANS LE DÉLAI D’UN MOIS
6- LES DIFFÉRENTES
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AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
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LA RÉPARATION ET LE REMPLACEMENT
SONT IMPOSSIBLES DANS LE DÉLAI
D’UN MOIS OU DE MANIÈRE DÉFINITIVE
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c) Garanties accessoires
Tout comme dans la garantie fondée sur un vice, l’acheteur peut, dans
la garantie de conformité, ne pas se contenter du remplacement,
de la réparation ou de la réduction de prix.
L’acquéreur est donc recevable à demander de surcroît des dommages et intérêts
par application de l’article L. 211-11 du Code de la consommation.
Enfin, il faut savoir que l’acheteur peut en outre valablement cumuler les garanties.
Il peut ainsi engager à la fois :
, une action résultant des vices rédhibitoires ;
, une action visant à l’obtention de dommages et intérêts pour dol ;
, une action en garantie de conformité.
5) Jurisprudence
Elle est encore assez pauvre dans la mesure où le texte sur lequel elle repose est
récent et encore assez mal connu.
A titre d’exemple, nous allons nous pencher sur un jugement rendu par la juridiction de proximité d’Auch le 9 mars 2007.
a) Les faits
Le 17 avril 2005, Monsieur vendeur a vendu à Monsieur acheteur
un chien mâle de race Rottweiler né le 1er février 2005.
Ce chien a été vendu pour la somme totale de 1.000 €.
Un premier versement de 300 € avait été fait lors de la réservation de l’animal.
Un second versement de 700 € a été fait à la livraison.
En outre, il était clairement indiqué de manière manuscrite sur l’attestation de
vente que le chien était « vendu ce jour sans défaut ».
Le chien devait cependant présenter assez rapidement des boiteries à l’effort qui
n’ont pas manqué d’alerter Monsieur acheteur.
Celui-ci est donc allé consulter son vétérinaire pour en connaître l’origine.
Après plusieurs examens réalisés non seulement par le vétérinaire de Monsieur
acheteur mais également par celui de Monsieur vendeur, le diagnostic fut établi
de manière catégorique : le chien était atteint de dysplasie coxo-fémorale.
Il fut procédé à son euthanasie le 23 décembre 2005.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
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AVOIR RECOURS
b) Les arguments des parties
Monsieur acheteur, en se fondant exclusivement sur les dispositions
du Code de la consommation, demande à monsieur vendeur :
La restitution du prix de vente, soit 1.000 €.
La condamnation de Monsieur vendeur à lui payer 1.000 € de dommages et
intérêts.
S’appuyant sur les termes de l’ordonnance 2005-136 du 17 février 2005,
Monsieur acheteur prétend que Monsieur vendeur n’a pas rempli son obligation
de conformité, telle que définie par l’article L. 211-5, et qu’il conviendra, en
conséquence de faire application de l’article L. 211-10 en obtenant la restitution du prix et des dommages et intérêts au titre de l’article L. 211-11.
Monsieur vendeur soutient que seul l’article L. 213-1 du Code rural peut
s’appliquer ici, et que le demandeur doit être déclaré irrecevable pour être hors
délai. Il soutient également que Monsieur acheteur n’apporte ni la preuve de
l’existence d’un défaut lors de la délivrance, ni la preuve de l’état de l’éventuel
avancement de la maladie, et qu’en tout état de cause, ce défaut ne rendait pas
le chien impropre à son usage d’animal de compagnie.
Monsieur vendeur demande que Monsieur acheteur soit intégralement débouté
de ses demandes.
c) Décision du tribunal
L’ordonnance 2005-136 du 17 février 2005, publiée au Journal Officiel du 18
février s’applique aux relations contractuelles créées postérieurement à son
entrée en vigueur, entre un vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle et un acheteur agissant en qualité de consommateur. Cette ordonnance a, expressément, modifié l’article L. 213-1 du Code rural en offrant la
possibilité au consommateur de déroger aux termes de cet article du Code rural,
par le recours aux articles L. 211-1 et suivants du Code la consommation.
Le fondement de la demande de Monsieur acheteur utilisant le Code de la
consommation sera déclaré recevable puisque l’action résultant du défaut de
conformité se prescrit par deux ans à compter de la délivrance du bien (L. 21112), et que Monsieur acheteur pouvait le faire avant le 17 avril 2007.
Il est constant que le chien, objet du présent contrat, souffrait d’une dysplasie
importante et qui s’aggravait rapidement. Cette maladie a été diagnostiquée, dès
le 15 juillet 2005, soit moins de six mois après la délivrance de l’animal. Les
défauts de conformité sont présumés exister au moment de la délivrance, aux
termes de l’article L. 211-7 ; le vendeur n’apporte pas la preuve contraire.
123
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Il est logique de considérer qu’un défaut qui détériore la santé du chien et pouvant influencer son caractère, est un défaut de conformité au sens du Code la
consommation parce qu’il altère les qualités substantielles recherchées par un
acheteur particulier qui n’aspire qu’à posséder un bon chien de compagnie, en
bonne santé. Ce même acheteur particulier qui s’adresse à un élevage de qualité
et qui paye un prix élevé, est en droit d’espérer un chien « sans défaut » tel que
le stipulait le contrat.
Il est établi que le vendeur n’a pas délivré un bien conforme au contrat.
Monsieur acheteur demande la restitution du prix aux termes de l’article L. 211-10
qui précise que cette restitution est possible pour autant que l’acheteur
« rende le bien ».
Mais, Monsieur acheteur s’est interdit cette possibilité en faisant procéder à
l’euthanasie du chien, dont la nécessité ne semblait pas évidente, si l’on en croit
l’attestation du 7 février 2007 du vétérinaire qui y a procédé. Monsieur acheteur
ne pouvant plus rendre le chien, il ne peut exiger la restitution du prix.
En revanche, le défaut de conformité a créé un préjudice, tant moral qu’en
frais de vétérinaires, à Monsieur acheteur qui sera accueilli, aux termes de
l’article L. 211-11, à hauteur de 500 €.
Le vendeur sera débouté de ses demandes.
Synthèse du jugement, dans l’espèce, le tribunal :
réaffirme l’application possible de la garantie de conformité à un animal
de compagnie ;
, refuse la demande de remboursement du prix de vente dans la mesure où
l’acheteur n’est pas en mesure de restituer l’animal et alors même que
l’euthanasie ne s’imposait pas ;
, accueille la demande de dommages et intérêts.
,
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D/ Les vices du consentement
Un contrat, quel qu’il soit, est toujours formé par la rencontre de
consentements.
Mais le consentement n’oblige que si la volonté de celui qui l’a donné est saine,
c’est-à-dire si elle est exempte de vices.
Si le consentement est vicié au moment où il est donné, le contrat associé ne
sera pas valable.
La loi a ainsi entendu protéger celui dont le consentement a été altéré, en lui
permettant de demander la nullité du contrat conclu sous l’empire d’un vice du
consentement.
Si l’action fondée sur un vice du consentement se présente dans un but de justice puisqu’elle se propose de protéger celui des cocontractants dont le consentement n’est pas parfaitement libre dans sa volonté ou éclairé dans son intelligence, elle doit également tenir compte du principe de la sécurité des transactions.
Selon l’article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent
lieu de loi à ceux qui les ont faites.
On ne peut remettre en cause et annuler un contrat à la légère. Aussi la loi
exige-t-elle une certaine participation de l’autre partie au vice du consentement.
La volonté n’engageant que si elle est éclairée et libre, le Code civil en tire pour
conséquence trois vices du consentement que sont : l’erreur, le dol, la violence.
Attention : la nullité du contrat implique la restitution de l’animal au
vendeur. L’acheteur ne devra donc pas utiliser ce type d’action s’il
entend garder son chien ou son chat.
1) L’erreur
D’une manière générale, l’erreur consiste à se tromper, à croire qu’est vrai ce qui
est faux ou inversement.
On distingue de par l’obligation de sécurité des transactions, les erreurs substantielles et celles qui sont indifférentes.
Les erreurs substantielles
Le texte de référence en la matière est l’article 1110 du Code civil qui
dispose que :
« L’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la
substance même de la chose qui en est l’objet. »
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Il est donc nécessaire que l’erreur, pour qu’elle soit considérée comme viciant le
contrat, présente une certaine gravité.
Cette gravité est appréciée eu égard à la méprise concernant les qualités substantielles du bien vendu.
On s’attache donc à la qualité déterminante que la victime de l’erreur avait en
vue dans la contreprestation.
Par exemple : pour l’acheteur dans une vente d’antiquité, la qualité substantielle
est l’ancienneté.
Dans une vente d’objet d’art, la qualité substantielle est l’authenticité.
Dans une vente de chiens de race, la qualité substantielle pourra être :
, l’inscription au L.O.F. (arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris
le 16 novembre 1984) ;
, l’ascendance du chiot ;
, l’éleveur ;
, l’usage de l’animal (arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour
de cassation le 5 février 2002 où la Cour considère qu’il y a erreur quand
l’acquéreur d’une jument de course constate à la livraison que l’animal est en
état de gestation.
Mais attention : en aucun cas, la qualité substantielle ne pourra être la
bonne santé de l’animal. Si l’animal vient à être malade voire à décéder
postérieurement à la vente, l’acheteur devra agir sur un autre fondement comme par exemple celui de la garantie des vices.
q Jugement en date du 7 octobre 2004 rendu par le Tribunal
d’instance de Castelsarrasin
Les faits :
Le 3 février 2002, Monsieur acheteur a acquis deux chiens de race West
Highland terrier auprès de Monsieur vendeur pour le prix de 838,47 € chacun.
Ces chiots femelles ont été vaccinées le 7 février 2002. Le lendemain de la
vaccination, les deux chiennes ont contracté la parvovirose et la chienne SU.
en est décédée le 12 février 2002.
Il demande dès lors au tribunal :
v de juger que le contrat de vente de SU. est nul sur le fondement de l’article
1110 du Code civil ;
v de condamner Monsieur vendeur à lui verser la somme de 197,74 € en réparation de son préjudice financier concernant la chienne SC. et la somme de
1.500 € en réparation de son préjudice moral.
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La décision du tribunal
v « Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article 1110 du Code civil que
l’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la
substance même de la chose qui en est l’objet.
Que cette erreur doit porter sur la matière dont la chose est composée et sur les
qualités substantielles (authenticité, origines, utilisation) en considération desquelles les parties ont contracté ;
v attendu en l’espèce que Monsieur acheteur qualifie d’erreur sur les qualités
substantielles la parvovirose canine dont ont été victimes les deux chiots achetés, et notamment SU. qui n’en a pas réchappé ;
v que la maladie invoquée n’affecte pas un caractère précis de l’animal en
considération duquel Monsieur acheteur a contracté ;
v que cette maladie à supposer qu’elle ait existé au montent de la vente, ce qui
n’est pas démontré au vu des pièces du dossier dès lors que les chiots ont été examinés par un vétérinaire au moment de leur vaccination et postérieurement à la
vente, ne peut constituer une erreur sur les qualités substantielles et n’est
constitutive que d’un vice caché ;
v que Monsieur acheteur qui agit sur le fondement de l’article 1110 du Code
civil, sera donc débouté de sa demande en annulation de vente de SU. et de sa
demande de dommages et intérêts pour SC. »
Enfin, il appartiendra au demandeur de prouver le caractère substantiel de ce
qui fait défaut et fonde l’action.
q Dans un arrêt en date du 12 mai 1992, la Cour d’appel de
Montpellier a jugé que :
« Il n’est pas prouvé que la qualité substantielle de l’animal acquis ait été sa
faculté de reproduction. De plus, l’acheteur ne prouve pas que l’impossibilité
pour l’animal de se reproduire aurait constitué une erreur ayant vicié son
consentement. L’acheteur qui a sans raison rendu l’animal au vendeur doit le
reprendre et lui rembourser les frais de nourriture dépensés par ce dernier. »
En tout état de cause, les juges saisis apprécient souverainement les qualités qui, dans
le contrat, doivent être considérées comme substantielles aux yeux des parties.
Les erreurs indifférentes ne donnant pas lieu à nullité
Les erreurs indifférentes sont essentiellement celles qui ne portent pas sur la
substance mais sur le motif ou la valeur.
Ainsi une erreur sur le motif est inopérante, même si ce motif a été déterminant
pour une partie et même s’il a été connu par l’autre partie.
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Exemple de motif : l’achat d’un chien de grande taille car on doit
acquérir une propriété en campagne.
Le seul fait qu’il y ait erreur sur la valeur ne suffit pas non plus à justifier une
nullité.
Lorsqu’elle est inexcusable, c’est-à-dire lorsqu’elle est facile à éviter, l’erreur
cesse d’être une cause de nullité, même si elle porte sur les qualités substantielles.
Un principe veut que « la loi ne protège pas les imbéciles ».
Enfin, les erreurs arithmétiques, erreurs de comptes, n’entraînent pas la nullité
du contrat. Elles doivent seulement être rectifiées.
2) Le dol
Des trois vices du consentement prévus par le Code civil, le dol est celui qui est
le plus souvent invoqué.
Le dol est une manœuvre ayant pour but et pour résultat de surprendre et donc
de tromper le consentement d’une partie.
Aux termes de l’article 1116 du Code civil : « Le dol est une cause de nullité
de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont
telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas
contracté. »
La loi ne fait donc du dol un vice du consentement que si trois conditions sont
remplies : il doit avoir été malhonnête, déterminant et provenir du cocontractant.
Enfin, il ne se présume pas et doit par conséquent être prouvé.
Condition de malhonnêteté
Le Code civil emploie le mot « manœuvres » qui implique une idée de machination et d’artifice. La jurisprudence a élargi la notion en y faisant entrer le
mensonge (malhonnêteté active) et la réticence (malhonnêteté passive).
Ainsi, le mensonge, même sans machinations préparées, constitue un dol.
Mais ne sont pas dolosives les exagérations habituelles dans une profession ;
ainsi le vendeur peut vanter la marchandise qu’il propose. La mesure de la vantardise acceptable varie selon la profession.
La réticence, quant à elle, est le fait de garder le silence sur une information que
l’on connaît et devrait communiquer. Longtemps, le silence a été une habileté
permise. Aujourd’hui, comme les autres manœuvres, la réticence constitue un
dol et se trouve cause de nullité lorsqu’elle a pour dessein d’amener quelqu’un à
contracter en le trompant.
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
q L’arrêt rendu par la Cour d’appel de Lyon le 12 mars 2003 offre
un exemple de dol par réticence
Les faits :
Le 20 février 2000, Madame Marie-Noëlle Y, éleveur de chiens de race Berger
allemand, a vendu à Monsieur Didier X, pour le prix de 4.800 F (732 €), le
Berger allemand Podium, né le 6 août 1999 et issu d’une portée de dix chiots.
En raison de son comportement anormal, l’animal a été examiné, le 9 mars
2000, par le vétérinaire Jean-Hugues Desrois, puis, a été immobilisé à la clinique
vétérinaire pendant sept jours, à compter du 17 mars 2000. En raison d’une suspicion d’empoisonnement, notamment par strychnine, un prélèvement d’urine
était alors examiné par l’Ecole Vétérinaire de Lyon qui ne décelait pas de traces
des convulsifiants recherchés.
Au début du mois d’avril 2000, l’animal échappait à son maître.
Le 1er mai 2000, ce dernier apprenait de Madame Y que la portée avait été
victime d’une intoxication par le plomb.
Le Docteur Jean-Philippe Jaudon, vétérinaire de l’éleveur, indiquait au Docteur
Desrois que l’autopsie d’un chiot avait révélé une intoxication au plomb de la
portée dont Podium faisait partie. Le Docteur Jaudon et le Docteur Philippe
Berny, de l’Ecole Vétérinaire de Lyon, auraient avec lui évoqué la possibilité
d’un relargage du plomb, à l’origine des troubles nerveux et physiques manifestés par l’animal, après la vente.
La décision de la Cour
v « Attendu que, comme l’action estimatoire, le dol peut être invoqué pour
conclure seulement à l’octroi de dommages et intérêts ; attendu que les époux X
soutiennent que, s’ils avaient connu le saturnisme dont le chiot avait été
atteint, ils n’en auraient pas fait l’acquisition ;
v attendu qu’en effet, ils se sont adressés à un éleveur disposant d’un affixe afin
d’avoir le maximum de garanties d’acquérir un animal de pure race dont, en
exposition, ils puissent obtenir la confirmation, après quinze mois d’âge ; qu’à
cette fin, l’animal, tatoué YNP 951, avait été immatriculé à la Société Centrale
Canine sous le numéro 199 925 086, par l’éleveur ; que le prix et les dépenses
de santé, consenties par eux en quinze jours, plus de 5.000 F (762 €), confirment
l’exigence des époux X ;
v attendu que Madame Y réplique que le chiot ne présentait aucun trouble au
moment de la vente et que le saturnisme, qui n’est pas une maladie contagieuse,
n’avait pas à figurer sur le carnet de santé de l’animal ; qu’elle n’avait donc pas
à informer les acquéreurs d’un mal qui n’existait plus, au moment de la vente ;
Mais attendu que l’acquéreur d’un animal de pure race est en droit d’acquérir un
sujet qui n’a pas été atteint d’une affection grave susceptible d’en affecter la
durée de vie ou le comportement ; que tel n’est pas le cas d’un chiot ayant été
atteint de saturnisme ;
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v attendu que Madame Y ne prétend pas qu’elle était, au moment de la vente
du chiot, dans l’ignorance des incidences possibles du saturnisme chez le
chien, après même la disparition de la symptomatologie première ; que sa réticence fut ainsi intentionnelle ; attendu que les époux X rapportent, de la sorte,
la preuve d’un dol par réticence qui les a déterminés à passer contrat alors que,
dûment informés, ils se seraient abstenus. »
Caractère déterminant du dol
La nullité ne peut être prononcée que si l’erreur provoquée par le dol a déterminé le consentement.
Cela peut porter notamment sur l’âge, la race, l’origine du chien ou ses aptitudes.
L’acheteur doit prouver que cette caractéristique était la condition essentielle du
contrat.
Origine du dol : le cocontractant
Le dol n’est une cause de nullité que s’il émane du cocontractant et donc pour
l’acheteur du vendeur lui-même ou de son représentant.
Preuve du dol
Le dol ne se présume pas. Il doit être prouvé par celui qui s’en dit victime.
Les tribunaux vérifient au cas par cas les preuves apportées par le demandeur,
comme le montre un jugement rendu par la juridiction de proximité de Valence
le 27 janvier 2006 :
v « Attendu que l’annulation pour dol, sur le fondement de l’article 1116 du
Code civil, est subordonnée, d’une part à un élément intentionnel de la part du
vendeur qui est la volonté de tromper, caractérisé par des manœuvres dont
l’auteur du dol s’est servi pour tromper, et d’autre part que ces manœuvres soient
telles, qu’il soit évident que, sans elles, l’autre partie n’aurait pas contracté ;
v attendu que Monsieur acheteur n’apporte aucune preuve, comme il en a
l’obligation, de quelque manœuvre que ce soit pour cacher lors de la vente un
mauvais état de la chienne qui, s’il l’avait connu, l’aurait empêché de contracter,
il ne pourra qu’être débouté de ses demandes. »
3) La violence
Elle est rarement invoquée.
Elle est un vice du consentement même si le cocontractant n’y a pas participé
comme le précise l’article 1111 du Code civil :
6- LES DIFFÉRENTES
PROCÉDURES
JUDICIAIRES
AUXQUELLES
UN ACHETEUR PEUT
AVOIR RECOURS
« La violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation, est une cause de
nullité, encore qu’elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel
la convention a été faite. »
En outre, peu importent les moyens employés : physiques (séquestration),
moraux (souffrance morale), astuce.
Elle n’est cependant un vice du consentement que si elle est illégitime, déterminante et émane d’une personne physique.
L’article 1112 du Code civil précise que :
« Il y a violence, lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent.
On a égard, en cette matière, à l’âge, au sexe et à la condition des personnes. »
Le côté déterminant de la violence est apprécié au cas par cas.
L’obligation, pour la violence, qu’elle soit l’œuvre d’une personne humaine
signifie que la contrainte résultant des événements n’est pas une violence.
4) Prescription de l’action
La convention contractée par erreur, violence ou dol,
n’est point nulle de plein droit.
Elle donne seulement le droit à la victime d’engager une action en nullité.
L’action est limitée dans le temps comme l’indique l’article 1304 du Code
civil qui édicte que :
« Dans tous les cas où l’action en nullité ou en rescision d’une convention n’est pas
limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans. »
Ce temps ne court dans le cas de violence que du jour où elle a cessé ; dans le
cas d’erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts.
Il est enfin important de noter également, dans le cas d’un dol, que le droit de
demander la nullité d’un contrat par application des articles 1116 et 1117 du
Code civil n’exclut pas l’exercice, par la victime des manœuvres dolosives,
d’une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation
du préjudice qu’elle a subi (principe posé depuis un arrêt rendu par la première
chambre civile de la Cour de cassation le 4 février 1975).
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