Homélie pour le Bicentenaire de la Congrégation des Sœurs

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Homélie pour le Bicentenaire de la Congrégation des Sœurs
Homélie de Mgr Hubert HERBRETEAU pour le Bicentenaire de la Congrégation des Sœurs
marianistes, le jour de la Pentecôte, en la cathédrale Saint-Caprais à Agen, le dimanche
15 mai 2016
Ac 2, 1-11 ; Ps 103 ; Rm 8, 8-17 ; Jn 14, 15-16. 23b-26
Chers amis, frères et sœurs
En cette fête de la Pentecôte, alors que nous célébrons le début du bicentenaire de la Congrégation des
Religieux et des Sœurs marianistes, trois faits retiennent mon attention.
Tout d’abord, on ne peut pas oublier qu’à l’âge de 14 ans, Adèle de Batz de Trenquelléon a fait sa
Confirmation, le jour de la Pentecôte, en 1803. Ce fut un événement déterminant dans sa vie. Lorsqu’elle
apprend que l’évêque d’Agen, Mgr Jacoupy, se dispose à donner la Confirmation aux jeunes et aux adultes
qui n’ont pas pu la recevoir à cause de la Révolution, elle demande à sa mère la permission de passer six
semaines auprès de Carmélites. Si elle a souhaité consacrer tant de temps à la préparation de ce sacrement,
c’est parce qu’elle est consciente de son importance.
En second lieu la Pentecôte est l’une des fêtes dont Adèle parle le plus. Elle est fille de l’Église, elle vit au
rythme de l’Église. Elle se réjouit de passer, comme l’Église le propose, les jours entre l’Ascension et la
Pentecôte, en communion étroite avec les Apôtres pour se préparer à accueillir Celui que le Christ a promis.
C’est à partir de ce moment-là que l’idée de fonder « la petite société » est née, que son ardeur apostolique a
pris de l’ampleur.
Enfin, autre fait remarquable : le jour de la Confirmation, Mgr Jacoupy invite à sa table ceux et celles qui ont
été confirmés et leurs parents. Adèle se trouve à côté de Jeanne Diché. Une amitié profonde va naître entre
les deux jeunes filles. Elles partagent le même idéal, le même désir d’aimer Dieu. Et c’est alors que tout a
commencé avec l’aide, entre autre, du Curé de Lompian, l’abbé Larribeau, mais surtout du Père Chaminade.
Une vie intérieure
Ce qui me frappe à la lecture des lettres d’Adèle, c’est l’importance qu’elle accorde à la vie intérieure. Pour
elle, la référence fondatrice de sa vie spirituelle, c’est l’attente de l’Esprit Saint entre l’Ascension et la
Pentecôte. Elle écrit à Agathe Diché (sœur de Jeanne) en 1806 : « Ah ! Tâchons de mériter que notre petite
Assemblée mérite la visite du Saint-Esprit. Demandons-le par d’instantes prières. Les Apôtres restèrent en
prières depuis l’Ascension jusqu’à la Pentecôte. Unissons-nous à eux, et prions, au moins de cœur, dans tous
les instants de la journée. »
Et l’année suivante, en 1807, elle exhorte Agathe : « Invoquons l’Esprit Saint et attirons-Le par l’ardeur de nos
prières ; et cet Esprit d’amour et de flamme en jettera quelques étincelles dans nos cœurs pour les réchauffer
de leur tiédeur. Soupirons donc après l’heureux jour ».
La vie intérieure est, pour Adèle, un soupir, un désir qu’il faut creuser dans l’intimité de la prière, mais aussi
une chaleur ressentie au fond du cœur.
Pour progresser dans la vie intérieure, il faut savoir prendre du temps pour Dieu. « Pour votre intérieur, chère
fille, dit-elle à Mère de l’Incarnation de Lachapelle, à Condom, en 1825, tâchez de prendre quelques instants
pour vous-même ; écrivez votre bon propos. Le bon Dieu sait bien rédimer le temps qu’on Lui consacre, il
n’est pas perdu ! »
Adèle recommande souvent la pratique du silence, vertu adaptée au temps de l’Avent, pour honorer le silence
du Verbe incarné dans le sein de Marie.
On retrouve chez Adèle les mêmes accents que ceux que vivra quelques années plus tard sainte Thèrèse de
Lisieux. Celle-ci dit qu’elle veut devenir une sainte dans « le vrai de la vie » Le « vrai de la vie », c’était éplucher
les pommes de terre, s’occuper du jardin ou du ménage. La vie intérieure ne doit pas éloigner des tâches
quotidiennes. C’est à travers la vie ordinaire que se développe la vie spirituelle.
Ce que fait l’Esprit Saint en nous
La vie spirituelle, c’est de vivre dans la mouvance de l’Esprit Saint. Comme l’affirme saint Paul dans la lettre
aux Romains : « L’Esprit vous fait vivre, puisque vous êtes devenus des justes », ajustés à Dieu, en harmonie
avec Dieu. Il est remarquable de voir comment Adèle introduit ses nombreuses lettres par une invocation à
l’Esprit Saint :
« Viens Esprit Saint nous éclairer de vos divines lumières ! » ; « Esprit Saint, dirigez toutes nos décisions » ;
« Esprit Saint, guidez ma plume ! » ; « O Saint Esprit, rendez-moi docile à vos saintes inspirations ! »
Il est remarquable aussi de noter que pour Adèle le fruit de l’Esprit Saint c’est l’amour. Elle interpelle :
« L’avons-nous reçu cet Esprit de flamme et d’amour ? Ce sont nos œuvres qui doivent le prouver. ». « Si
quelqu’un m’aime, dit Jésus, il gardera mes paroles. »
Elle souligne aussi combien l’Esprit Saint apporte paix et joie. À Mère Thérèse Yannasch, elle donne par
exemple, un jour, le programme de la grande retraite qui approche, avec des horaires précis. Et elle demande
qu’il n’y ait point de parloir ou d’œuvre extérieure : « Que la paix, le calme et la joie du Saint Esprit soient dans
vos cœurs pendant ce temps de moisson spirituelle ! »
En cela, elle rejoint ce que dit saint Paul au chapitre 5 de la lettre aux Galates : « Le fruit de l’Esprit, c’est
l’amour, la paix, la joie, la douceur… »
Frères et sœurs, vivons-nous suffisamment sous l’impulsion de l’Esprit ? Mère Adèle nous montre l’importance
de nous disposer à recevoir l’Esprit, l’urgence de l’implorer, de tenir conseil dans l’Esprit Saint. Nos paroisses,
nos Congrégations, nos associations chrétiennes sont souvent trop préoccupées par un résultat tangible à
obtenir. Dans une période de pénurie de vocations nous pensons que tout viendra au bout de nos efforts. Et
nous manquons de confiance en l’Esprit Saint alors qu’il ne cesse d’agir au sein de nos assemblées, comme
le montre le récit de la Pentecôte dans les Actes des Apôtres. Rien ne peut arrêter son action, rien ne peut
arrêter la course de la Parole de Dieu !
L’Église aux dimensions du monde
Je voudrais ajouter un troisième point en soulignant combien la Pentecôte est la fête qui ouvre à la mission
universelle. L’Institut des Filles de Marie Immaculée, fondé le 25 mai en 1816 s’est ouvert à de nombreux pays
avec tout un travail d’inculturation. Aujourd’hui, il est répandu en 14 pays dans le monde.
En ce jour du bicentenaire, rappelons-nous l’invitation du pape François : « En vertu du baptême reçu, chaque
membre du peuple de Dieu est devenu disciple-missionnaire (cf Mt 28, 19)… Tout chrétien est missionnaire
dans la mesure où il a rencontré l’amour de Dieu en Jésus Christ. Nous ne dirons plus que nous sommes
“disciples” et “missionnaires”, mais toujours que nous sommes “disciples-missionnaires” » (n° 120).
Chers amis, Adèle était vraiment “ disciple-missionnaire » Réjouissons-nous d’avoir cette belle figure dans
notre diocèse. Peut-être aurons-nous l’immense joie de célébrer sa béatification.
Oui, réjouissons-nous ! Que cette eucharistie soit l’occasion de fortifier notre vie spirituelle, notre esprit
missionnaire. Disons comme Adèle : « À la plus grande gloire de Dieu ! »
Amen !
Mgr Hubert HERBRETEAU
Cathédrale Saint-Caprais à Agen, le dimanche 15 mai 2016

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