Le gore et les sous-genres de l`horreur - horreur

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Le gore et les sous-genres de l`horreur - horreur
vril 2008
Volume 1 . Numéro 1 . A
Le bulletin québécois des amateurs de film d’horreur
Sang, monstres et tueurs en série
Le gore et les sous-genres de l’horreur
Le cinéma d’horreur contemporain, dans ses formes les plus extrêmes, a donné naissance à trois type de
cinéma de l’outrance et de la démesure : le gore, le giallo et le snuff. L’étiquette cinéma d’horreur n’est
souvent associée qu’à ces trois formes qui l’ont, d’une certaine façon, condamné à n’être qu’un genre
mineur, pervers et pernicieux. Pourtant, il existe de nombreux styles cinématographiques à l’horreur.
Le Gore
Par : Jacinte Pearson
Le terme anglais gore n’a pas été inventé pour le cinéma.
Le Barnhart Dictionary of Etymology, qui propose comme
définition « sang répandu, sang coagulé », situe l’apparition
du mot, dans son orthographe actuelle, aux alentours de
1150. Il en retrouve l’origine dans le vieil anglais gor (saleté,
excrément), de la même famille que gyre et apparenté à gor
(saleté en vieil allemand), goor (minable, miteux en hollandais) et gor (substance visqueuse en vieil islandais). C’est
dire si, dans ses plus lointaines racines, le gore est déjà
associé à l’idée de sale et de répugnant Le dictionnaire cité
explique qu’on a ensuite commencé à employer ce mot pour
évoquer le sang coagulé, et spécialement le sang versé sur
le champ de bataille. Plus tard, Shakespeare utilise gore
pour signifier la souillure quand Macbeth raconte comment il
a tué les gardes de Duncan (« There, the murderers, steep’d
in the colours of their trade, their daggers unmannerly
breech’d with gore »). On voit apparaître l’expression poétique blood and gore (1563) et ses variantes archaïques gore
of blood et gore-blood (Roméo et Juliette : « A bloody piteous
corpse ; pale, pale ashes, all bedaub’d in blood, all in goreblood »).
L’effet gore n’est donc pas exclussif au cinéma du XXe siècle
puisqu’il a pris ses racines dans les premières représentations dramatiques. Si le gore cinématographique remonte
vraisemblablement à la tragédie antique, c’est toutefois le
théâtre du Grand-Gignol qui lui légua la tradition des scènes
sanglantes. Fondé en 1899 par Max Maurey, ce théâtre de
l’horreur était d’abord destiné à un public bourgeois à la
recherche de frissons à bon marché et désireux de s’encanailler, le grand guignol allait par la suite, pendant plus de
soixante ans, connaître un énorme succès populaire. Les
spectateurs mystifiés se demandaient comment ces effets
répugnants étaient accomplis sous leurs yeux. Sacrifiant la
subtilité psychologique aux effets sanguinolents, le grand
guignol était le théâtre de l’illusion et de l’étonnement. Rien
que du beau fait divers, magnifié
jusqu’au gag final pour éclater
en une monstrueuse bulle rouge
sang. Par exemple, on y retrouve
des œuvres comme Le coiffeur fou, L’horrible expérience
et d’autres aux titres autant
éloquents. De plus, l’obscur dramaturge Oscar Méténier a fait sa
marque avec ses nombreuses
adaptations des œuvres les plus
violentes d’Edgar Allan Poe. Bref,
Affiche du Jardin des supplices d’octave
le théâtre Grand-Guignol a fourni
mirleau monté au grand-gignol en 1922.
pendant quelques décennies
un exutoire à la peur, la haine et la violence, et la littérature
d’épouvante contemporaine ainsi que le cinéma d’horreur
se situent dans son prolongement. D’ailleurs, le théâtre
ferma ces portes à Paris en 1963, l’année précédente où
H.G. Lewis réalisait le premier film gore, Blood Feast.
(suite page 2)
Sommaire
Le gore et les sous-genres de l’horreur............ 1-2
Critique DVD
Small Gauge Trauma........................................3
L’évolution du genre au fil des ans................... 4-5
Top 5 des films à écouter à l’Halloween...............5
Profil - entrevue
Dany Champagne......................................... 6-7
À ne pas manquer
Sortie DVD - Machine Girl................................8
Le bulletin québécois des amateurs de film d’horreur
Ce qui caractérise le gore c’est un état
d’esprit, une conception de la violence,
une accumulation quasi maladive et
quasi interrompue de meurtres horribles et ce, sans aucun souci de logique.
Autrement dit, c’est un assemblage de
violence pure et gratuite qui repose sur
une débauche d’effets spéciaux ultraréalistes et sanglants. Le scénario étant
plutôt simpliste, la véritable intention
du gore est de choquer et d’écoeurer.
C’est donc ce qu’à voulu faire Herschell
« Gore-don » Lewis. À son insu, il déclencha une nouvelle vague horrifique qui
allait prendre de l’importance dans les
années 1970, pour atteindre son sommet dans les années 1980. Il allait être
suivi par les Georges A. Romero, Lucio
Fulci, Tobe Hooper, Joe D’Amato et
d’autres œuvrant plutôt dans la parodie
comme Peter Jackson (Braindead, Bad
Taste) et Sam Raimi (la trilogie d’Evil
Dead)
Le giallo
Le mot italien
giallo désigne à la
fois une couleur
(jaune) et une littérature policière
populaire. Au
cinéma, les gialli
correspondent
à une catégorie
de films typiquement latins qui
sont apparus au
cours des années
1970. C’est un cinéma italien où
l’horreur est axée principalement sur
la figure meurtrière du psychopathe.
Le giallo est en fait un sous-produit du
gore qui obéit à des règles : présence
d’un assassin masqué et ganté de cuir
noir, succession de meurtres sadiques
et sanglants filmés en gros plans, fétichisme de l’arme blanche et du verre
tranchant, décors et éclairages baroques aux couleurs chatoyantes à dominante de rouge et de vert et finalement,
une fascination pour les infirmités
physiques et mentales et les déviations
sexuelles. Dès 1962, Mario Bava établissait les fondements du giallo avec
son film La fille qui en savait trop. Puis,
Dario Argento, son fils spirituel, donna
un nouveau souffle au sous-genre avec
L’oiseau au plumage de cristal, Le chat
à neuf queues, Quatre mouches de
velours et surtout avec Les frissons de
l’angoisse en 1975.
la véritable intention du gore
est de choquer et d’écoeurer
L’horreur-fiction
Parallèlement à la vague horrifique des
tueurs en série qui s’est développée
vers la fin des années 1970, des réalisateurs décident plutôt de présenter
une monstruosité organique engendrée
par l’individu lui-même. L’exemple
classique de ce type d’horreur parasitaire demeure Alien (Ridley Scott,
1979) où la créature visqueuse qui loge
dans la poitrine d’une malheureuse
victime jaillit soudain au grand jour.
John Carpenter a aussi exploité ce volet
de science-fiction et d’incarnation du
mal. Dans son chef-d’œuvre The Thing,
rien ne différencie de leurs collègues
les hommes contaminés par l’extraterrestre. La métamorphose se situe
dans l’intérieur du corps. Notons aussi
le talent de David Cronenberg avec
des films comme Frissons, Rage, La
mouche, Chromosome 3 et l’excellent
Videodrome. Ces films rappellent sans
cesse que le corps même peut devenir
monstrueux sans qu’on s’y attende. On
remarque une tendance vers une épouvante intérieure, des images qui expriment des questions existentielles de la
vie et de la mort. Dans son adaptation
du roman de William Burroughs (Naked
Lunch), David Cronenberg utilise des
trucages encore plus spectaculaires
dans une nouvelle réflexion sur les
apparences trompeuses. Le héros est
sujet à de perpétuelles hallucinations,
et les objets, dotés d’une vie autonome,
saignent lorsqu’ils sont détruits. Son
esthétique du gore est remarquable.
Drame d’horreur
Optant pour une approche plus psychologique de la violence, ce sousgenre s’avère tout aussi efficace et
même parfois plus cauchemardesque.
Volume 1 . Numéro 1 . Mai 2008
L’horreur est souvent dans une optique
d’une éventuelle réalité laissant l’auditeur perplexe. Les thèmes abordés
sont la plupart du temps la religion, les
phénomènes paranormaux et le crime.
Stanley Kubrick a justement vu, dans le
roman The Shinning de Stephen King,
l’occasion d’évoquer cet .équilibre fragile entre le psychologique et le surnaturel. Le but est d’effrayer les gens en
agissant simplement sur l’esprit. Ce ne
sont pas des films gores, ou du moins
ils en contiennent peu. Un film comme
The exorcist a fonctionné à la manière
d’un électrochoc auprès du public. Il y
a eu aussi les films de Brian De Palma,
dont certains contiennent quelques
effets de gore qui ont demeurés gravés
dans les mémoires longtemps après les
projections (Sissi Spacek recouverte de
sang dans Carrie, le visage tailladé au
rasoir d’Angie Dickinson dans Dressed
to Kill ou le meurtre à la perceuse
électrique de Body Double). De plus, il y
a eu des films très dérangeants comme
Salò o le 120 giornate di Sodoma et
The Devils, traitant de la torture et
des tourments que l’on peut infligés
à l’humain. Ces abus de pouvoirs et
fanatisme sont inspirés de faits réelles
et demeure dur à supporter à l’écran.
Pour terminer, il y a le film criminel, un
nouveau regard sur le tueur psychopathe. Qui ne peut oublier la descente
aux enfers des grands films Seven et
Silence of the Lambs. Puis, s’inscrit
Henry : Portrait of a Serial Killer, qui
reconstitue quelques jours de la vie de
Henry Lee Lucas (un authentique tueur
en série incarcéré et accusé de trois
cent soixante-neuf meurtres). Ce film se
démarque en effet des autres évocations cinématographiques de criminels
par sa glaciale objectivité. La caméra
accompagne le personnage dans
ses œuvres sans porter de jugement
moral ni tenter d’expliquer son comportement. Seule la scène où Henry
assassine son complice fait appel à un
effet gore (une tête tranchée) et c’est la
moins percutante car soudain le spectateur peut se raccrocher à des repères
familiers.
Suite dans le prochain numéro
Le bulletin québécois des amateurs de film d’horreur
Volume 1 . Numéro 1 . Mai 2008
Critique DVD
Small Gauge Trauma
Par : Jacinte Pearson
Et oui ça sent enfin l’été, soleil, terrasse et boissons à volonté. C’est aussi
l’ouverture de nombreux festivals. Mais
celui qui nous intéresse est nul autre
que Fantasia, le plus important festival de film de genre en Amérique de
Nord. D’ailleurs, je suis déjà impatiente
de connaître la programmation juillet
2008. Mais en attendant, je contiens
ma fébrilité et pour ce faire, j’ai tout
récemment acheté la merveilleuse
compilation Small Gauge Trauma. Ce
petit bijou hétéroclite, sorti en 2006
pour célébrer les 10 ans du festival,
nous offre 13 courts-métrages en provenance de 8 pays : Canada, Espagne,
Belgique, Argentine, Portugal, Japon,
Angleterre et Brésil. Mitch Davis, en
collaboration avec le studio Synapse
Films, est allé dénicher les meilleurs et
les plus excentriques courts-métrages
projetés au festival. On a droit à des
films d’animations, des drames, des
films d’horreur, des stop-animations,
un sexploitation religieux et un mini
métrage assez bizarroïde.
Contenu
Le DVD s’ouvre avec un mot de bienvenue très spécial du légendaire José
Mojica Marins (Coffin Joe). Par la suite
s’en suit du défilement des courtsmétrages. Certains sont très efficace,
comme The Separation, une animation
rappelant l’art de Jan Švankmajer et
l’atmoshpère de David Lynch, l’ironique
Tea Break, qui m’a fait bien rigoler, le
cinglant L’Ilya, qui s’avère une analyse artistique plutôt macabre sur le
suicide et finalement I’ll See You in My
Dreams, un vidéoclip du groupe métal
Moonspell qui est tout simplement
délectable. Il y a aussi l’effroyable Amor
Só de Mãe, qui avec son atmosphère
satanique, vous restera perplexe.
D’autres comme Ruta Destroy!, Flat
- N -Fluffy et Miss Greeny demeurent
divertissants mais sans plus. Bref, j’ai
eu un grand plaisir à découvrir tout ces
histoires et je vais sûrement en avoir
autant à les redécouvrir. Small Gauge
Trauma est aussi bourré de suppléments. La plupart des films contiennent
des commentaires, il y a des scènes
supprimées, une introduction par Mitch
Davis (directeur de la programmation
international du festival et animateur)
et un montage fort instructif et amusant de topos télévisuel concernant le
festival durant les dix dernières années.
Pour tout ceux et celles qui ne connaissent pas le festival ou plutôt les
malchanceux qui ne peuvent jamais y
aller, Small Gauge Trauma est un must
pour les fans du genre. Non seulement
il vous fera découvrir un peu ce qu’est
Fantasia, mais vous donnera assurément la piqûre pour que vous y fassiez
un tour cet été. Vous le voulez!
www.fantasiafest.com
Le bulletin québécois des amateurs de film d’horreur
Volume 1 . Numéro 1 . Mai 2008
Il était une fois… le film d’horreur
L’évolution du genre au fil des ans
L’émotion ou le sentiment de peur sont inscrit dans la culture, dans le temps et dans l’espace. Le
cinéma est un véhicule important de représentations reliées à la peur. C’est cette sensation forte, telle
une monté d’adrénaline, que recherche les amateurs du genre. Comme un conte ou une légende, le
cinéma d’horreur a permis de raconter en plus d’illustrer des histoires aussi fabuleuses que terrifiantes.
Observont donc la naissance de ce média à travers les années.
Par : Jacinte Pearson
L’horreur cinématographique est apparue dès les débuts du
cinéma sans toutefois le revendiquer. Sous prétexte de vérité
historique ou documentaire, c’est le cinéma muet qui nous
a donné nos premières scènes horrifiques. En 1895, The
Execution of Mary, Queen of Scots, court métrage d’à peine
une minute, réalisé par Alfred Clark, montrait la première
décapitation à l’écran. D’ailleurs ce film fut considéré comme
le premier à utilisé des techniques de montage cinématographique. Ensuite, en 1912, ce fut le tour de l’Italien Enrico
Guazzoni d’agrémenter sa version de Quo Vadis? de quelques séquences d’horreur : chrétiens dévorés par des lions,
torches humaines flambant dans le jardin de Néron, sans
oublier le suicide sanglant du poète Pétrone se tranchant les
veines dans sa baignoire. Cependant, on considère Georges
Méliès comme le créateur du genre, avec des œuvres burlesques tel que Le Manoir du diable en 1896 et La Caverne
maudite en 1898 et Histoire
d’un crime en 1906. Magicien de
formation, ce français d’origine est
reconnu comme le père des effets
spéciaux, le premier réalisateur et
le créateur du premier studio de
cinéma. Son film le plus marquant,
fut son premier film de sciencefiction Voyage dans la lune, apparu
en 1902 et adapté du roman de
Le voyage dans la Lune
Jules Verne, De la Terre à la lune.
Le premier long-métrage à faire couler du sang à des fins
dramatiques fut le film muet américain Intolérance de D.W.
Griffith en 1916. Quatre époques sont présentées en alternance pour dénoncer l’intolérance : la répression des grèves,
la Saint-Barthélemy, la Passion du Christ et Babylone. De la
Babylone antique au début du XXe siècle, ce film illustre en
quatre épisodes, la cruauté et la férocité de l’homme envers
son prochain.L’épisode babylonien insiste sur la cruauté des
combats afin d’en condamner la barbarie. Comme dans les
films de guerre les plus récents, la vue du sang vient alors
conférer un effet de réalité à la scène, tout en accentuant le
caractère spectaculaire. L’exemple le plus frappant reste sans
doute ce plan où le torse nu d’un soldat se couvre de sang à
mesure que la lance d’un ennemi s’enfonce dans son ventre.
Parenthèse faite, le cinéma d’horreur
sera véritablement lancé grâce au
cinéma expressionniste allemand
avec, pour les plus connus, l’envoûtant Das Cabinet des Dr. Caligari de
Robert Wiene, qui inspira sûrement
l’imaginaire de Tim Burton et The
Golem de Carl Boese en 1920. C’est
en 1922 que sort l’œuvre la plus
importante dans l’émergence du
genre : Nosferatu de F.W. Murnau.
L’ambiance particulièrement morbide du film et la terrifiante
prestation de Max Schreck dans le rôle du vampire a grandement marqué le cinéma d’horreur. Aux États-Unis, The
Hunchback of Notre-Dame de Wallace Worsley sort en 1923,
et devient le premier film américain important du genre. En
1925, The Phantom of the Opera de Rupert Julian, produit
par Universal Pictures, préfigure l’importance du studio dans
l’essor du cinéma d’horreur durant les années 1930. Il s’y
produit de grands films lucratifs : Dracula de Tod Browning,
Frankenstein de James Whale, Dr. Jekyll and Mr. Hyde de
Rouben Mamoulian et King Kong de Merian C. Cooper
Années 50
Ensuite viennent les années 50 avec la guerre froide, la peur
du nucléaire et des expérimentations scientifiques. L’horreur
apparaîtra donc sous forme de science fiction : The Thing
from Another World de Christian Nyby, Invasion of the Body
Snatchers de Don Siegel sont des pamphlets anti-communistes, Them! De Gordon Douglas, Gojira de Ishirô Honda voient
des animaux mutés sous l’effet de radiations nucléaires et
The Fly de Kurt Neumann montre un scientifique défiguré
par une expérience qui tourne mal. De plus, il faut souligner
l’importance de la Hammer Film Production, qui rayonna sur
le cinéma d’horreur avec des productions s’appuyant sur des
réalisateurs de qualité comme Terence Fisher et des acteurs
comme Peter Cushing et Christopher Lee. C’est le triomphe
mondial de The Curse of Frankenstein, réalisé en 1957 par
Terence Fisher, qui va décider Hammer Films à se lancer dans
une politique de remakes en couleurs des grands films de
monstres produits par Universal avant guerre. La sensibilité
et l’audace de Fisher ont donné à ces films une tout autre
Volume 1 . Numéro 1 . Mai 2008
dimension et souvent une meilleure qualité que les originaux.
À voir absolument : Horror of Dracula, The revenge of Frankenstein, The Mummy et The Curse of the Werewolf. Bref,
notons aussi, du côté de la France, un classique d’épouvante
au réalisme glacial, que j’affectionne particulièrement, Les
Yeux sans visage de Georges Franju. Cette œuvre inclassable
dont le merveilleux cauchemardesque, conjugué à intrigue
policière, offre des images saisissantes. Malgré les années,
ce film a su conservé toute sa force évocatrice et toute sa
poésie.
le cinéma d’horreur sera
véritablement lancé grâce
au cinéma expressionniste
allemand
Années 60
C’est dans les années soixante que l’horreur gothique atteint
son apogée. On voit aussi apparaître l’appellation Série B,
grâce aux réalisations à petit budget de Roger Corman. The
Little Shop of Horrors est tourné en seulement deux jours.
Puis plusieurs adaptations des nouvelles d’Edgar Allan Poe,
mettant souvent en vedette l’inquiétant mais sublime Vincent
Price, sont produites : House of Usher, Pit and the Pendulum, The Raven… Enfin, le genre prend son envol, les effets
spéciaux se perfectionnent et on y voit un affaiblissement
progressif de la censure, permettant aux scénaristes et aux
metteurs en scène de donner libre cours à leur imagination.
L’horreur s’ancre dans la réalité, s’affranchit de son aspect
fantastique. Les monstres y sont des humains psychologiquement instables, assouvissant leurs pulsions névrotiques
dans le meurtre. Psycho d’Alfred Hitchcock et Peeping Tom
de Michael Powell reflète bien cette tendance. La même
année, Mario Bava réalise le giallo La fille qui en savait trop.
Il tournera le premier grand classique de ce genre en 1964
avec 6 Femmes pour l’assassin. En Amérique, Herschell
Gordon Lewis réalise le premier film gore, Blood Feast, sousgenre qui aura des répercutions fondamentales. Les pires
atrocités sont alors exposées au spectateur, de la trépanation
à l’éviscération, en passant par l’énucléation, l’égorgement et
autres joyeusetés. Lewis tournera une dizaine de films gores
dans les années 60-70, Two Thousand Maniacs! demeure
mon préféré. Regarder un film de H.G. Lewis est un pur
divertissement. Il faut cependant boucler sa ceinture et être
prêt pour toute une virée. À éviter si vous êtes du genre à
prendre la vie trop au sérieux. Finalement et non le moindre,
une œuvre magistrale, qui marquera durablement les esprits,
perce l’écran en 1968: Night of the Living Dead de George
A. Romero. C’est la première fois qu’un film d’horreur se veut
une critique politique et sociale de son époque. D’un pessimisme total, ce film est traité avec réalisme et intelligence et
nous porte à réflexion sur notre comportement en société.
Suite dans le prochain numéro
Le bulletin québécois des amateurs de film d’horreur
Top 5 des films à voir
pour l’halloween
Par : Jacinte Pearson
Trop vieux pour passer l’halloween? Pourquoi pas vous
mettre dans l’ambiance en regardant de bon vieux classique
d’horreur dans le crépuscule de votre salon. Voici donc quelques suggestions pour votre divertissement morbide.
Halloween (1978) par John Carpenter
Un choix aussi évident qu’incontournable. Je recommande
de le voir seul dans le noir le plus complet possible, et à
plein volume pour la trame sonore!!!
Re-Animator (1985) par Stuart Gordon
Œuvre classique d’H.P. Lovecraft… Pour tous ceux qui se
questionnent sur la physionomie et le fonctionnement du
cerveau. À écouter si vous êtes un amateur de Gore.
Pumpkinhead (1988) par Stan Winston
Ce conte macabre, inspiré d’un poème d’Ed Justin, mis au
monde une des créatures les plus effrayantes du cinéma
d’horreur. Sous-estimée à mon avis, ce film au goût amer de
vengeance, s’est avéré très divertissant et a su dégager une
atmosphère digne des grands classique d’épouvante. Peu de
sang mais beaucoup de frissons!
The Legend of Hell House (1973) par John Hough
Selon moi, c’est la meilleure histoire de maison hantée,
après The Haunting évidemment. Ce film d’une atmosphère
incomparable, nous tiens en haleine du début jusqu’à la fin.
Le jeu des acteurs est impeccable, particulièrement celui de
Roddy McDowall, et les décors sont à couper le souffle.
Legend of Sleepy Hollow
Il ne s’agit pas ici du film de Tim Burton mais plutôt du
dessin animé produit par Walt Disney en 1949. Retomber en
enfance avec ce bonbon d’animation. Il faut quand même
avouer que le climat de terreur se trouvant dans la scène où
Ichabod Crane s’apprête à rencontrer le cavalier sans tête
vaut à lui seul le visionnement.
Alors voilà! Faites vos choix, achetez vos friandises préférés,
emmitouflez-vous confortablement dans votre couverture et
n’oubliez pas de verrouiller vos portes…
Le bulletin québécois des amateurs de film d’horreur
Volume 1 . Numéro 1 . Mai 2008
Profil - entrevue
Dany Champagne, créateur du site
internet www.horreur-web.com
Par : Jacinte Pearson
Crédit photo : Dany Champagne
Le 29 octobre 2003, le site Horreurweb.com fut officiellement mis en
ligne. Ce site a su rapidement faire sa
place comme référence sur l’horreur
cinématographique et demeure le site
de ressources numéro 1 au Québec.
On y retrouve principalement des critiques de films, mais aussi des dossiers
comme le top 50 des meilleurs films et
le top 100 des meurtres les plus cools.
De plus, ce site entretien un service de
clavardage fort intéressant pour tout
passionné du genre.
Dany Champagne a étudié en cinéma
au Cégep de Saint-Hyacinthe. Il n’a
pas de formation spécifique en ce qui
attrait à la conception web et l’écriture
critique. C’est en partie ce qui le rend
fier du site puisqu’il a accompli beaucoup avec peu. «Du moment que j’ai eu
Internet vers 16 ans, j’ai tout de suite
été intrigué par la conception web. Ça
n’a pas pris de temps avant que je me
parte mes propres sites (très amateurs!) et que j’en retire un grand plaisir. Au début c’était surtout des sites
sur des films spécifiques ou sur des
réalisateurs. Je me suis rendu compte
qu’on faisait rapidement le tour d’un
sujet aussi précis et l’idée m’est venue
de faire un site sur le cinéma d’horreur en général. Puis, lorsque je me
suis rendu compte qu’il n’y avait pas
vraiment de bon site québécois du
genre, ça a été une motivation supplémentaire à mon projet ». Maintenant
entouré d’une équipe de rédaction et
d’administration, Horreur-web.com
est énormément complet et très bien
structuré. Un incontournable si vous
êtes amateur de film d’horreur.
Acceptant de se livrer à une
entrevue électronique, voici la
vision de Dany Champagne sur
le cinéma d’horreur.
Pourquoi aimez-vous le cinéma
d’horreur?
J’ai toujours apprécié le cinéma d’un
point de vue technique. Je me fiche pas
mal des vedettes hollywoodiennes, du
flafla des grosses productions et des
effets spéciaux qui coûtent des millions
de dollars. Ce qui m’intéresse c’est la
réalisation, l’atmosphère qu’elle peut
dégager aidé de la musique et de la
direction photo, le choix des angles,
etc… Sans vouloir dénigrer les autres
genres, je crois que c’est le cinéma
d’horreur qui offre le plus d’opportunités pour un cinéaste à être créatif dans
ses aspects. La comédie se fie à ses
blagues, le drame repose sur la performance des acteurs, les films d’action
doivent avoir de bonnes cascades et
le cinéma d’horreur repose sur le dos
des différents réalisateurs. Je ne dis
pas que les autres genres ne bénéficient pas de cinéastes compétents,
seulement que l’horreur permet d’être
plus créatif tant d’un point de vue
technique que du côté de l’imaginaire.
Aussi, comme bien du monde, j’aime
bien avoir une bonne frousse de temps
à autres!
que je l’apprécie. Par contre, je dois
avouer que je craque pour les films à
l’ambiance gothique rehaussée. J’aime
les réalisations soignées, subtiles et
réfléchies. De plus, j’aime les cinéastes qui n’ont pas peur de lâcher leur
fou à défaut de peut-être se planter
royalement. L’audace est un aspect que
j’apprécie beaucoup.
Quel a été le premier film a vous
donner des frissons?
Le premier film qui m’a donné des
frissons est le premier « vrai » film
d’horreur que j’ai visionné : The Gate.
Pour une raison que j’ignore, mon père
me l’avait enregistré lorsque j’avais
environs 6 ou 7 ans. Je suis rapidement devenu obsédé par ce film que
j’aie dû regarder une centaine de fois!!
Le film était parfait pour m’introduire
au genre à un si jeune âge puisque
les 45 premières minutes ne contiennent rien d’horrifique. Le film raconte
l’histoire d’un jeune garçon qui doit
passer le weekend sous la supervision
de sa sœur. Le soir venu des démons
sortent d’un trou dans la cour et le bordel pogne dans la maison! Après avoir
assisté aux aventures de ce petit garçon, j’étais rivé à l’écran et n’avais pas
vraiment le choix de regarder le reste
même si j’étais terrifié!!! J’en garde un
excellent souvenir de jeunesse.
Selon vous, quels sont les critères d’un bon film d’horreur?
Quel film vous a le plus bouleversé, voir choqué?
Je suis assez ouvert d’esprit. Je n’ai
donc pas de critères spécifiques qu’un
film doit absolument remplir pour
Question difficile, puisqu’il y en a
plusieurs. Je dirais The Texas Chain
Saw Massacre, l’original de Tobe
Volume 1 . Numéro 1 . Mai 2008
Hooper réalisé en 1974. Son côté cru et
barbare m’avait énormément impressionné à l’époque. TCM est le film qui
met le mieux en scène la terreur et la
pure folie. Tobe Hooper s’est vraiment
défoulé avec ce film sans jamais tomber dans le mauvais goût. TCM est un
film qui assomme le spectateur sans
jamais s’excuser et sans jamais laisser
croire que ce n’est que du cinéma.
Quelle est votre sous-genre
préféré et pourquoi?
Si auparavant j’étais plus difficile
dans mon choix de sous-genre, mon
travail sur Horreur-web.com m’a permis d’élargir mes horizons. Je dirais
qu’aujourd’hui, j’apprécie tous les sousgenres à part égale ou presque. Si je
devais en choisir qu’un seul, j’opterais
peut-être pour les vieux films en noir
et blanc à l’atmosphère gothique. Je
citerais comme exemple les vieux classique d’Universal comme Frankenstein,
The Wolfman ou les films du studio
Hammer comme Horror Of Dracula ou
Curse Of Frankenstein. La raison pour
laquelle j’aime ce sous-genre c’est que
le soucis du détail au niveau de la réalisation est superbe. L’histoire se déroule
généralement dans de vieux château,
les costumes sont bien choisis et le
brouillard est tellement présent qu’on a
envi d’ouvrir les fenêtres pour le laisser
s’échapper un peu!!
Que pensez-vous du phénomène du
remake?
Je n’ai rien contre les remakes. Par
contre, ce qui me fâche c’est la conception qu’a Hollywood du remake! À mon
avis, il y a deux raisons de réaliser un
remake. La première, c’est pour améliorer un mauvais film au potentiel certain.
Par exemple, le remake de Toolbox
Murders réalisé par Tobe Hooper, qui
améliore sur toute la ligne le film original de Dennis Donnelly. La deuxième,
c’est pour transposer une histoire dans
une nouvelle réalité sociale ou politique. Les deux plus belles réussites sont
à mon avis The Fly de David Cronenberg qui s’est servi de la base d’une
Le bulletin québécois des amateurs de film d’horreur
série B des années 50 pour réaliser
une allégorie sur le Sida. L’autre belle
réussite est The Thing de Carpenter.
Ce qui est dommage avec la tendance
actuelle de ne produire pratiquement
que des remakes, c’est que les studios
hollywoodiens ne le font pas pour les
bonnes raisons. Aujourd’hui, les remakes sont produits uniquement pour
exploiter un titre connu et bien implanté
dans la culture populaire. Pour un
studio, c’est bien plus facile de commercialiser un remake de Halloween,
Texas Chainsaw Massacre ou Amityville
Horror en raison de la réputation des
films originaux. Les producteurs se foutent pas mal que ces films aient besoin
d’une relecture ou non, ce qui importe
c’est le potentiel de retombés économiques du titre!
« c’est le cinéma d’horreur qui
offre le plus d’opportunités pour
un cinéaste à être créatif »
On voit peu de film d’horreur
québécois sur nos écrans, pouvez-vous expliquer pourquoi?
Le cinéma d’horreur s’adresse à un
public bien particulier. Puisqu’au
Québec la population est restreinte,
lorsqu’un film est produit, les artisans
doivent s’assurer qu’il sera vu par le
plus grand nombre de personne possible. Avec les budgets des films qui grimpent sans cesse, il est important pour
la santé du cinéma québécois de faire
des profits. C’est pourquoi bon nombre
de films québécois sont des comédies
ou des drames sentimentaux puisqu’ils
touchent la majorité de la population.
En conséquent, un film d’horreur ne
toucherait qu’une faible partie de la
population et serait un risque côté
profit. Ceci dit, il existe plusieurs
cinéastes très talentueux au Québec
qui s’efforcent de réaliser des courtsmétrages horrifiques très intéressants.
Il existe une communauté underground
de cinéaste qui s’adonnent aux courts-
métrages d’horreur dont la majorité
des gens ignorent l’existence. Ce n’est
qu’une question de temps avant qu’un
d’eux franchissent la barrière et nous
offre un vrai film québécois d’horreur!
Quelle est votre opinion sur la
censure?
Ce que je trouve dommage de la
censure de nos jours, c’est qu’elle
est utilisée dans un but strictement
commerciale. Plus un film est coté
sévèrement (aux Etats-Unis, R ou
NC17), moins les adolescents auront
la chance de voir un film. Donc souvent
les studios vont obliger un réalisateur à
couper ses scènes plus violentes dans
le but d’obtenir une cote plus basse
(PG13) et ainsi permettre à un public
plus large de voir le film … et au studio
de faire plus d’argent!! Le cinéphile se
retrouve donc avec un produit dilué qui
ne représente plus la vision du réalisateur et qui est bien souvent décevant.
Le studio va pousser l’insulte plus loin
quelque mois plus tard en sortant une
version « uncut/unrated » sur DVD. Le
cinéphile qui avait été déçu du résultat
au cinéma va bien souvent se laisser
tenter par la promesse d’un film plus
sanglant et ainsi enrichir encore plus le
studio!! À mon avis, la cote attribuée à
un film ne devrait jamais influencer le
potentiel commercial, ce qui n’est pas
le cas aux États-Unis, pays qui dicte à
sa façon comment le film sortira partout dans le monde. Un film coté NC17
ne pourra être publicisé dans les journaux et à la télévision et ne sera pas
présenté dans la majorité des salles.
C’est pourquoi la majorité des réalisateurs doivent passer un temps fou sur
la table de montage pour modifier leur
film de façon à obtenir la cote R.
À ne pas manquer
Sortie DVD
Par : Jacinte Pearson
Date de sortie : 3 juin 2008
Titre original : Kataude Mashin Gâru
Écrit et réalisé par : Noboru Iguchi
Pays : Japon/États-Unis
Durée : 96 min
Déjà acclamé par les critiques, ce film semble rappeler
l’euphorie qu’ont créée les Evil Dead et Brain Dead en
ouvrant la voie à un cinéma transgressif totalement décomplexé. On dit que The Machine Girl (qu’on pourrait traduire
comme « LA NETTOYEUSE ») rejoindrait la haute marche,
comme ses confrères, de ces films qui font vraiment très plaisir à voir. Et qui en matière de gore, nous sert abondement.
Histoire
La vie d’une jeune fille bascule le jour où un groupe de Yakuzas tue, en plus de ses parents, son petit frère et la torture
en lui coupant le bras gauche. Décidée à se venger, elle est
épaulée par les parents d’une autre victime. A eux trois, ils
partent botter les fesses de ceux qui sèment la mort autour
d’eux.
En se basant sur un scénario extrêmement simple (la vengeance d’une écolière) qu’il a écrit lui-même, Noboru Iguchi
a isolé tout ce qu’il aimait au cinéma (les giclées de sang, les
Yakuzas, les ninjas, les trucages gores, les tronçonneuses,
les Samurais, les sabres) pour tout mélanger dans un délire
total avec entre autres, parmis les gadgets, une guillotine
volante qui semblerait très divertissante. Bref, ce film s’avère
d’un pur divertissement et sera loin de passer inaperçue. On
garanti même son statut culte!
Références
Éditrice
Jacinte Pearson
LE CINÉMA GORE une esthétique du sang
Philippe Rouyer
Rédactrice
L’ART DE FAIRE PEUR : des récits légendaire aux films d’horreur
Martine Roberge
Conceptrice graphique
www.horreur-web.com
Coordonatrice à l’impression
www.ohmygore.com
Promotion
Jacinte Pearson
Jacinte Pearson
Jacinte Pearson
Jacinte Pearson
Bulletin trimestriel
Le bulletin québécois des amateurs de film d’horreur
Renseignement
6400, 16e Avenue
Montréal, QC H1X 2S9
(514) 554-9324

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