L`art et la machine - Musée des Confluences

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L`art et la machine - Musée des Confluences
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du 13 | 10 | 2015
au 24 | 01 | 2016
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Bas —Will graphique : Intégral
Conception
2
Sommaire
Présentation de l’exposition....................... p.4
Plan..........................................................p.5
Le parcours.............................................. p.6
Prologue................................................................................................................ p.6
Partie 1 : Fascination de la machine ...................................................................... p.6
Partie 2 : La machine : un modèle ?........................................................................ p.6
Partie 3 : La machine à l’œuvre............................................................................... p.8
Partie 4 : Machines en rêves.................................................................................. p.8
Fiches œuvres.......................................... p.9
Lilienthal ‘‘type 1895’’.............................................................................................. p.9
Le Rhône, moteur rotatif type C avec son hélice de Louis Bréguet (1928).............p.10
Le laminoir – Ferdinand-Joseph Gueldry – 1901......................................................p.11
La gare d’Argenteuil – Claude Monet – vers 1872...................................................... 12
Rotorelief – Marcel Duchamp – 1935-1953................................................................ 13
Portrait de Jacques Hébertot – Francis Picabia – 1924............................................. 14
Le remorqueur – Fernand Léger – 1920.................................................................... 14
Activités programmées................................17
Parcours découverte (Lycée)....................................................................................17
Conférences/ Projections........................................................................................17
Convergence avec
les programmes officiels ............................. 18
Bibliographie.............................................. 18
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Présentation de l’exposition
‘‘L’Art et la Machine’’ est une exposition qui explore la frontière évanescente entre l’activité
scientifique, la technologie et la pratique artistique. À travers l’évolution historique de ce rapport,
c’est la question de la place de la machine dans notre société qui est ainsi posée.
Les arts plastiques et les technologies industrielles entretiennent depuis longtemps des
rapports complexes. Ils sont passés tour à tour de l’indifférence à la haine, de la fascination à la
collaboration en attendant l’adoption, voire la fusion. C’est cette histoire, ces liens, qui sont mis en
scène.
Depuis la décennie 1990, nous assistons à une mutation rapide et sans précédent de notre société :
la mondialisation et l’informatisation sont en train de bouleverser notre planète. L’art moderne
n’échappe pas à cette mutation accélérée. Ses bases, jetées au début du XIXème siècle, sont sans
doute en train de se modifier en profondeur.
Dans l’histoire de cette évolution, le rôle de la machine, née du creuset industriel, est fondamental.
C’est ce que montre l’exposition en confrontant des œuvres d’art et des éléments de la production
industrielle.
Au sein d’un parcours de plus de 1500 m2, cette exposition réunie plus de 170 pièces remarquables
issues de 44 musées en Europe.
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Plan du parcours
3. La machine
à l’œuvre
4. Machines
en rêve
2. La machine,
un modèle ?
Prologue
1. Fascination
de la machine
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Le parcours de l’exposition
Prologue
Le visiteur découvre deux films qui mettent la machine en vedette puis il s’interroge autour d’une
œuvre surprenante : Où se situe la frontière entre l’art et la machine ? S’agit-il d’art ?
Ce questionnement pose le propos de l’exposition qui cherche à explorer le rapport ambivalent
entre art et machine. Mis dans le contexte, le visiteur découvre alors l’histoire des représentations
de la machine par les artistes depuis le XIIIème siècle jusqu’à nos jours.
À voir :
La D.S. 1993 de Gabriel Orozco
Un court extrait du film de Louis Lumière : ‘‘L’arrivée d’un train en gare de la Ciotat’’ (1895)
Partie 1 : Fascination de la machine
Le visiteur prend ici la posture des artistes qui découvrent la machine pour la première fois. Au
milieu des moteurs, des hélices et autres machines spectaculaires, il est invité à découvrir des
pièces qui ont fasciné les artistes tel Marcel Duchamp qui visite en 1912 la 4ème exposition de
la locomotive aérienne. Celui-ci s’exclame et interpelle d’autres artistes : ‘‘C’est fini la peinture.
Qui ferait mieux que cette hélice ? Dis, tu peux faire ça ?’’. Cette découverte déclenche chez lui
l’envie de faire de l’art à partir d’éléments mécaniques. Cette ‘‘révolution duchampienne’’ crée un
changement dans la représentation de la machine.
Le visiteur est alors amené à s’interroger : Comment les artistes vont-ils réinventer la machine ?
À voir :
Lilienthal ‘‘type 1895’’
Le Rhône, moteur rotatif type C avec son hélice de Louis Breguet (1928)
Partie 2 : La machine : un modèle ?
Cette partie, qui se veut chronologique, démarre par la présentation de planches de l’Encyclopédie.
Avec l’émergence des Lumières, c’est en effet la première fois que les amateurs éclairés vont être
confrontés à des dessins de machines.
L’exposition se poursuit avec le 19ème siècle au cours duquel l’artiste participe à la légende de
l’industrie. Il est le plus souvent ‘‘invité’’ par l’entrepreneur pour peindre l’usine. Les machines sont
alors représentées dans leur contexte et en action. Peu à peu, les artistes s’intéressent à la figure
de l’ouvrier représenté en héros. L’artiste se fait militant en montrant la réalité des conditions de
travail. Ces représentations constituent l’apogée mais aussi la fin de la représentation picturale
‘‘classique’’ de l’intérieur de l’espace usinier, donc de la machine.
A partir de la fin du 19ème siècle, la machine est représentée pour elle-même. Ses représentations
seront présentes dans les différents courants artistiques.
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Le visiteur découvre alors des œuvres des impressionnistes. Grands utilisateurs du train pour aller
peindre sur le motif de nouvelles machines, ces derniers célèbrent les locomotives, symboles de la
technique et de la modernité.
Avec le dadaïsme, les œuvres de Marcel Duchamp proposent ensuite une rupture entre la
représentation traditionnelle de la machine et la machine élevée au rang d’art comme un objet
esthétique. Le visiteur découvre alors un univers particulier composé notamment d’objets
manufacturés qui témoignent de la curiosité de l’artiste pour la machine. Un autre univers, celui
de Francis Picabia propose d’autres représentations qui s’amusent des éléments mécaniques pour
raconter des histoires et réaliser des portraits.
Puis, l’exposition donne la parole aux futuristes et cubistes qui, comme Fernand Léger, cherchent à
retranscrire le mouvement et le rythme des machines.
L’exposition se poursuit ensuite avec les années 1960 au cours desquelles la machine revient en
force dans le regard des artistes. Production à la chaîne, standardisation, libération des mœurs,
société de consommation incitent les artistes à se réapproprier le réel pour en faire de l’art. La
machine est empilée, compressée, détruite, voire recréée, à l’image des œuvres de César et
Armam. Un mouvement artistique proposant un recyclage poétique du réel émerge : le Nouveau
Réalisme. Des artistes comme Jean Tinguely vont même jusqu’à créer de nouvelles machines en
récupérant et en bricolant.
D’un point de vue scénographique, des perspectives proposent au visiteur de découvrir à la fois les
œuvres et leurs machines inspiratrices.
À voir :
Des planches extraites de l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et
des métiers (1751-1772)
Le Laminoir (1901), Huile sur toile de Ferdinand-Joseph Gueldry
La gare d’Argenteuil (vers1872), Huile sur toile de Claude Monet
Roue de bicyclette (1913-1964), Marcel Duchamp
Rotorelief (1935-1953), Marcel Duchamp
Portrait de Jacques Hébertot (1924), Francis Picabia
Automobile in corsa (1912-1913), Luigi Russolo
Le Remorqueur (1920), Fernand Léger
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Partie 3 : La machine à l’œuvre
Le visiteur découvre la machine qui devient productrice d’art.
L’industrialisation va en effet mettre à la disposition des artistes des outils qui leur ouvrent de
nouveaux horizons : c’est l’apparition de la photographie et du cinématographe.
Cette partie se structure alors en deux sections :
•
•
Une première section relate l’histoire de la photographie et expose des photos représentant
des machines
Une deuxième section s’intéresse au cinéma et propose de découvrir des extraits de films dont
la machine est la vedette.
À voir :
Des extraits de films :
‘‘Métropolis’’ —1926
‘‘L’homme à la caméra’’ —1929
‘‘À nous la liberté’’ —1931
‘‘Les temps modernes’’ —1936
‘‘La machine à explorer le temps’’ —1960
‘‘Retour vers le futur’’ —1989
Kinétographe Robert-Houdin de Georges Méliès (1896)
Partie 4 : Machines en rêves
Dans une scénographie inspirée de musées d’art contemporain, le visiteur découvre des œuvres
réalisées à partir des années 1980. Les artistes s’amusent avec la machine et déclinent les thèmes
identifiés par leurs prédécesseurs comme le cycle, la voiture ou l’avion mais ici, la machine porte
un message autre qu’elle-même. Traitée avec ironie, humour, dérision elle exprime la nostalgie
du progrès ou les enjeux liés à la modernité. Les artistes sont ici présentés comme les nouveaux
ingénieurs du rêve.
L’exposition prend fin avec une œuvre monumentale de Tinguely que le visiteur peut découvrir
régulièrement en mouvement. Elle donne une sensation de force et de puissance onirique et
dévoile une mécanique qui n’est plus utilisée aujourd’hui.
À voir :
Meta Maxi (1986), Jean Tinguely
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Fiche objet — L’art et la machine
Lilienthal ‘‘type 1895’’
Otto Lilienthal
Réplique du planeur ‘‘type 1895’’
Le Bourget, musée de l’air et de l’espace
Photographie : Olivier Garcin - musée des Confluences, Lyon
Ce planeur est conçu par l’ingénieur allemand Otto Lilienthal en 1895.
Otto Lilienthal est considéré comme le pionnier de l’aéronautique. Il effectua entre 1871 et 1896
deux mille vols planés depuis une colline artificielle à proximité de Berlin. Il construisit 16 machines
dont les voilures sont réalisées en bois de saule entouré de coton. La surface portante variait de 10
à 20 m2.
Il expérimentait lui-même en vol les machines qu’il avait construites. En se lançant du haut d’une
colline haute d’environ vingt mètres, il pouvait planer jusqu’à 300 mètres dans les meilleures
conditions. Le contrôle de la machine se faisait par des déplacements du corps comme pour les
deltaplanes pendulaires contemporains.
Otto Lilienthal meurt suite à une chute en plein vol. Ses publications, ses nombreuses
correspondances ainsi qu’un grand nombre de photographies ont permis aux frères Wright, une
décennie plus tard, de réaliser le vol motorisé.
Ce type de machine était exposé lors des Expositions internationales de la Locomotion aérienne au
Grand Palais. La première eut lieu en octobre 1909. Ces expositions étaient à l’époque de véritables
évènements mondains qui attiraient aventuriers, badauds et acheteurs.
Référence sitographique :
www.lilienthal-museum.de/olma/f_muse.htm
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Fiche objet — L’art et la machine
Le
Rhône,
moteur rotatif type C avec son hélice de Louis
Bréguet (1928)
Le Rhône (moteur rotatif)
Le Bourget, musée de l’Air et de l’Espace
Photographie : Olivier Garcin - musée des Confluences, Lyon
Le Rhône était un moteur rotatif produit en France par la Société des Moteurs Le Rhône en 1916. Il a
équipé de nombreux avions de la première guerre mondiale.
Ce moteur en étoile, à combustion interne, tourne autour d’un vilebrequin fixe. Ce type de moteur
était très courant au début de l’aviation quand le rapport puissance/poids était le critère principal
devant la consommation et la fiabilité.
C’est certainement un moteur de ce type, avec son hélice, que Marcel Duchamp admira lors de la
4ème Exposition de la locomotion aérienne à Paris, au Grand Palais, en 1912.
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Fiche objet — L’art et la machine
Ferdinand-Joseph Gueldry
Le Laminoir
Ferdinand-Joseph Gueldry
Le laminoir (1901)
Huile sur toile, 90x120 - Nîmes, Musée des Beaux-Arts
Photographie Florent Gardin
Description de l’œuvre
Le laminoir est une machine destinée à laminer un produit métallurgique par le passage entre deux
cylindres. Dans la chaleur du feu, qui vient sublimer les corps mobilisés par l’effort, six hommes
travaillent auprès du laminoir. Le point de vue adopté souligne l’ambition narrative du peintre : il
livre une vision quasi documentariste du labeur de ces hommes.
Ce que l’œuvre nous apprend
Ferdinand Joseph Gueldry (1858-1945) s’est introduit au cœur des usines pour livrer une vision
réaliste du monde industriel et des ouvriers. Ce thème est choisi par un certain nombre d’artistes
depuis le second tiers du XIXe siècle. L’industrialisation fascine ces artistes. Vers 1850, un premier
processus d’industrialisation, qui repose sur l’exploitation du charbon, connaît son apogée. À partir
de 1880, un second processus d’industrialisation, lié à l’exploitation du pétrole et à la production de
l’électricité, permet des innovations techniques encore plus nombreuses qui, à leur tour, favorisent
l’essor de nouvelles industries. La croissance est spectaculaire. Les révolutions industrielles
provoquent l’émergence de nouveaux groupes sociaux, comme les ouvriers. La condition ouvrière
est précaire. Des auteurs comme Émile Zola ou Victor Hugo ont dénoncé à juste titre la misère du
prolétariat. La situation s’améliore cependant en Europe à partir de la fin du XIXe siècle. Ces progrès
sont le fruit des luttes collectives notamment. Ferdinand Joseph Gueldry livre ici une vision sans
fard de la réalité du labeur ouvrier.
Bibliographie
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DAVIET Jean-Pierre, La société industrielle en France (1814-1914), Paris, Seuil, 1997.
NOIRIEL Gérard, Les Ouvriers dans la société française au XIXe siècle, Paris, Seuil, 1986.
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Fiche objet — L’art et la machine
Claude Monet
La gare d’Argenteuil
Claude Monet
La gare d’Argenteuil (vers 1872)
Conseil départemental du Val d’Oise
Photographie J-Y Lacôte
Description de l’œuvre
Une locomotive fait irruption dans la gare d’Argenteuil. Face à elle, on discerne au loin une autre
machine. L’épaisse fumée qui se dégage de leurs cheminées se noie dans le ciel menaçant, raviné
par différentes nuances de gris.
Ce que l’œuvre nous apprend
C’est une œuvre de Claude Monet peinte en 1872, qui donne son nom au mouvement. La critique
satirique de Louis Leroy, parue dans Charivari, fait de ‘‘l’impression’’ la notion essentielle du
mouvement.
‘‘Impression, j’en étais sûr. Je me disais aussi, puisque je suis impressionné, il doit y avoir de l’impression là-dedans…
Et quelle liberté, quelle aisance dans la facture ! Le papier peint à l’état embryonnaire est encore plus fait que cette
marine-là !’’
De fait les critiques déplorent avec virulence cette rupture avec le fini. Il y a dans ‘‘l’impression’’
quelque chose de fugace, d’instantané que l’on récuse, comme si la peinture restait à l’état
d’ébauche. Elle n’a plus rien à voir avec l’œuvre pensée et conçue dans l’atelier. Les critiques
fustigent aussi la fascination des artistes pour le monde moderne. Une innovation permet ce travail
hors de l’atelier et offre une formidable liberté pour ces artistes qui veulent capter la variété des
couleurs sous l’effet de la lumière : le conditionnement de la couleur en tubes.
Claude Monet (1840-1926) se forme dans l’atelier de Charles Gleyre. Longtemps, il vit pauvrement.
C’est grâce à la rencontre avec l’un des plus importants galeristes de l’époque, Paul Durand-Ruel,
que l’artiste peut vivre de son art. Il peint à plusieurs reprises les différents visages de la ville,
notamment les gares. L’éclat métallique des machines, les brumes fantasmagoriques des vapeurs,
tout est prétexte à capter l’éphémère et à rendre l’émerveillement devant la vie moderne.
Bibliographie
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•
•
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Monet, l’œil impressionniste, Paris, Musée Marmottan, 2008.
MORVAN Bérénice, Impressionnisme, Paris, Terrail, 2006.
WELTON Jude, Claude Monet, La lumière et l’instant, Paris, Gallimard, 1993.
Fiche objet — L’art et la machine
Marcel Duchamp
Rotorelief
Description de l’œuvre
Les rotoreliefs sont des disques de carton imprimés de
motifs concentriques qui, actionnés sur des tournedisques, donnent l’illusion du volume. Marcel Duchamp
dépose l’idée auprès du Tribunal de commerce en 1935
et cherche à vendre son invention. L’entreprise se solde
par un échec. Les rotoreliefs témoignent cependant de la
curiosité de l’artiste pour la machine.
Ce que l’œuvre nous apprend
Dada est un mouvement international né en réaction à la
Première guerre mondiale.
Marcel Duchamp
‘‘Dada a son origine dans le dictionnaire. C’est terriblement
Rotorelief (1935-1953)
Set de six disques en carton et tourne-disque
simple. En français cela signifie ‘cheval de bois’. En allemand ‘va
Paris, Galerie 1900-2000
te faire, au revoir, à la prochaine’. En roumain ‘oui, vraiment, vous
avez raison, c’est ça, d’accord, vraiment, on s’en occupe’ etc.
C’est un mot international. Seulement un mot. Et ce mot comme mouvement. C’est simplement terrible. Si on en fait
une tendance de l’art, cela signifie qu’on veut prévoir des complications. Psycho dada, littérature dada, bourgeois
dada, et vous très honorés poètes qui avez toujours fait de la poésie avec des mots, mais jamais avec le mot même.
La guerre mondiale dada et pas de fin. La révolution dada et pas de commencement. Dada vous les amis, qui faites
aussi de la poésie, très chers évangélistes. Dada Tzara, Dada Huelsenbeck, Dada m’dada, Dada mhm’dada, Dada
Hue, Dada Tza. Comment atteindre la félicité éternelle ? En disant Dada. Comment devient-on célèbre ? En disant
Dada. Avec un geste noble et des manières raffinées. Jusqu’à la folie, jusqu’à l’évanouissement. Comment peut-on
se débarrasser de tout ce qui est anguille et journalier, de tout ce qui est l’aimable et l’adorable, de tout ce qui est
moralité, animalité, préciosité ? En disant Dada. Dada c’est l’âme du monde, Dada c’est le grand truc, Dada c’est le
meilleur savon au lait de lys du monde’’. —Hugo BALL
Marcel Duchamp (1887-1968) est à la fois un protagoniste à part entière de Dada et du Surréalisme.
Mais c’est aussi et surtout une personnalité à part. Il naît dans une famille d’artistes : ses frères
sont peintres et tous prennent part aux recherches menées par les avant-gardes de ce début du
XXe siècle. En 1917, il fait une entrée fracassante sur la scène artistique internationale. ‘‘Fontaine’’,
urinoir en porcelaine qu’il signe d’un pseudonyme, R. MUTT, est présenté à l’exposition de la
Society of Independant Artists, à New York. L’œuvre est rapidement enlevée, manifestant bien les
résistances à admettre que n’importe quoi peut devenir art : même l’objet le plus trivial peut être
érigé, ‘‘sacralisé’’, au rang d’œuvre d’art. Il joue ici encore de l’objet et de sa polysémie.
Bibliographie
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CROS Caroline, Marcel Duchamp, Paris, Éditions du Centre Georges Pompidou, 2014.
DUCHAMP Marcel, Duchamp du signe, Paris, Flammarion, 2013.
HUELSENBECK Richard, En avant Dada, L’histoire du dadaïsme, Dijon,
Les presses du réel, 2000.
NAUMANN Francis M., Marcel Duchamp, L’art à l’ère de la reproduction mécanisée, Paris,
Hazan, 1999.
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Fiche objet — L’art et la machine
Francis Picabia
Portrait de
Jacques Hébertot
Description de l’œuvre
Jacques Hébertot (1886-1970), pseudonyme d’André
Daviel, était poète et homme de théâtre. Francis Picabia
livre ici un portrait énigmatique, rompant avec le genre du
portrait. À l’encre de Chine, il dissémine sur le papier des
formes géométriques et des lignes afin de saisir l’essence
de son modèle.
Ce que l’œuvre nous apprend
Dada est un mouvement international né en réaction à la
Première guerre mondiale.
‘‘Dada prenait l’offensive et attaquait le système du monde dans
son intégrité, dans ses assises, car il le rendait solidaire de la
bêtise humaine, de cette bêtise qui aboutissait à la destruction de
l’homme par l’homme de ses biens matériels et spirituels. Aussi
fûmes nous désignés à prendre comme objet de nos attaques les
fondements mêmes de la société, le langage en tant qu’agent de
communication entre les individus, et la logique qui en était le
ciment.’’ —Tristan TZARA
La barbarie et l’absurdité de la guerre opère un
renversement total des valeurs : désormais les artistes
jouent et se jouent de tout. L’art cristallise cette
contestation.
‘‘Les idéaux culturels et artistiques – pris comme programme
de variété – c’est là notre façon de faire du candide contre
l’époque. Tout le monde fait comme si de rien n’était. La
boucherie s’amplifie et on s’accroche fermement au prestige de
la magnificence européenne. On cherche à rendre l’impossible
possible et, se servant du mensonge, on transforme la trahison
faite à l’homme, l’exploitation abusive de l’âme et du corps
des peuples, le massacre civilisé, en un triomphe du génie
européen’’.—Hugo BALL
Francis Picabia
Portrait de Jacques Hébertot (1924)
Encre sur papier
Collection David et Marcel Fleiss
Paris, Galerie 1900-2000
Dada se veut donc provocateur voire nihiliste. C’est une remise en question de la tradition et
une entorse tonitruante au mythe du Beau. Francis Picabia (1879-1983) est l’un des protagonistes
emblématiques de Dada. C’est un artiste hors norme, profondément iconoclaste. D’abord parce
qu’il va rompre avec l’image traditionnelle en se tournant vers l’abstraction. Ensuite parce qu’il
revendique sa liberté et s’il fréquente les avant-gardes, il n’hésite pas à les fustiger aussi.
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Les cubistes veulent couvrir Dada de neige : ça vous étonne mais c’est ainsi, ils veulent vider la neige de leur pipe
pour recouvrir Dada.
Tu en es sûr ?
Parfaitement, les faits sont révélés par des bouches grotesques.
Ils pensent que Dada peut les empêcher de pratiquer ce commerce odieux :
Vendre de l’art très cher.
L’art vaut plus cher que le saucisson, plus cher que les femmes, plus cher que tout.
L’art est visible comme Dieu !
L’art est un produit pharmaceutique pour imbéciles.
Les tables tournent grâce à l’esprit ; les tableaux et autres œuvres d’art sont comme les tables coffres-forts, l’esprit
est dedans et devient de plus en plus génial suivant les prix de salles de ventes
Comédie, comédie, comédie, comédie, comédie, mes chers amis.
Les marchands n’aiment pas la peinture, ils connaissent le mystère de l’esprit…
Achetez les reproductions des autographes.
Ne soyez donc pas snobs, vous ne serez pas – intelligents parce que le voisin possèdera une chose semblable à la
vôtre.
Plus de chiures de mouches sur les murs.
Il y en aura tout de même, c’est évident, mais un peu moins.
DADA bien certainement va être de plus en plus détesté, son coupe-file lui permettant de couper les processions en
chantant ‘‘Viens Poupoule‘‘, quel sacrilège !!!
Le cubisme représente la disette des idées.
Ils ont cubé les tableaux des primitifs, et les sculptures nègres, cubé les violons, cubé les guitares, cubé les journaux
illustrés, cubé la merde et les profils de jeunes filles, maintenant il faut cuber l’argent !!!
Dada, lui, ne veut rien, rien, rien, il fait quelque chose pour que le public dise : ‘‘nous ne comprenons rien, rien, rien’’.
‘‘Les Dadaïstes ne sont rien, rien, rien, bien certainement ils n’arriveront à rien, rien, rien’’.
— Manifeste DADA (lu au Salon des Indépendants, 1920)
Bibliographie
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•
MASSOT Pierre de, Francis Picabia, Paris, Seghers, 2002.
PRADEL Jean-Louis, Francis Picabia, La peinture mise à nu, Paris, Gallimard, 2002.
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Fiche objet — L’art et la machine
Fernand Léger
Le Remorqueur
Fernand Léger
Le Remorqueur (1920)
Huile sur toile, 103 x 132,5 cm
Musée de Grenoble
Photographie : Musée de Grenoble
Description de l’œuvre
Le Remorqueur appartient à une série dans laquelle Fernand Léger cherche à retranscrire le rythme
syncopé des machines dans un paysage réduit à des volumes géométriques et traversé par des
personnages déshumanisés, assemblages de volumes tubulaires à la couleur grise évoquant le
métal rutilant des mécaniques. La dislocation des formes est une ode joyeuse et pétaradante à la
modernité.
Ce que l’œuvre nous apprend
Les recherches de Fernand Léger se rapprochent de celles menées par les peintres cubistes, au
début du XXe siècle. Le cubisme est une double révolution, d’abord parce qu’il est une rupture
radicale avec la conception de l’espace pictural hérité de la Renaissance : le support devient une
surface protéiforme, affranchie de l’illusion donnée par les différents plans. Ensuite parce qu’il est
une rupture avec la figuration : la réalité est décomposée et recomposée en formes et en volumes
géométriques.
Fernand Léger (1881-1955) étudie l’architecture à Caen, puis la peinture à Paris, à l’Académie Julian.
En 1907, la rétrospective consacrée à Paul Cézanne est un choc : dès lors, Fernand Léger s’intéresse
au volume que le peintre aixois s’était attaché à simplifier. La période ‘‘cubiste’’ de Fernand Léger
est relativement courte. Son expérience sur le front, durant la Première guerre mondiale, exacerbe
sa fascination pour la machine.
‘‘Cette guerre-là, c’est linéaire et sec comme un problème de géométrie. Tant d’obus en tant de temps sur telle
surface, tant d’hommes par mètre et à l’heure fixe en ordre. Tout cela se déclenche mécaniquement. C’est
l’abstraction pure, plus pure que la peinture cubiste […] il n’y a pas plus cubiste qu’une guerre comme celle-là qui te
divise plus ou moins proprement un bonhomme en plusieurs morceaux et qui l’envoie aux quatre points cardinaux’’.
Après la Première guerre mondiale, il garde du cubisme le goût pour les volumes, mais il en donne
une vision très colorée et gaie.
Bibliographie
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CABANNE Pierre, Le cubisme, Paris, Terrail, 2002.
FRÉCHURET Maurice, CHAVANNE Blandine, LEBOSSÉ Claire et alii, Fernand Léger,
Reconstruire le réel, Paris, RMN, Grand Palais, 2014.
VALLYE Anna (éd.), Léger. Modern Art and the Metropolis, Philadelphia, Philadelphia museum
of Art, New Haven, Yale University Press, 2013.
Activités programmées
Parcours découverte
Niveau scolaire— Lycée
Durée— 1h30
Espaces— Salles 11 et 12, entrée salle 11
Nombre— Classe entière (un médiateur pour 28 élèves)
Résumé de l’activité—
Accompagnés du médiateur culturel, les élèves parcourent l’exposition pour observer et
s’interroger autour d’œuvres choisies. Ils découvrent l’histoire des représentations de la machine
dans l’art à partir du 18ème siècle. A travers elles, ils appréhendent l’évolution de notre société,
depuis l’industrialisation jusqu’à nos jours.
Des œuvres d’artistes comme Bonhommé, Monet, Duchamp, Léger, Tinguely ou Picabia seront
particulièrement analysées.
Objectifs généraux—
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Décrire et analyser des œuvres
À travers le regard des artistes, découvrir l’évolution de la machine dans notre société depuis le
18ème siècle jusqu’à nos jours.
Questions posées—
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Comment les artistes perçoivent la machine et l’histoire de l’industrie en France ?
Comment évolue la machine dans notre société ?
Que nous apprennent les œuvres sur la place de la machine dans notre société ?
Conférences/ Projections
Consulter le programme culturel de l’automne 2015 :
www.museedesconfluences.fr/fr/le-programme-automne-2015
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Convergence avec les
programmes officiels
Histoire
Collège
4e— ‘‘L’âge industriel’’
3e— ‘‘Un siècle de transformations scientifiques et technologiques’’
Lycée technologique
1ère STMG— ‘‘Diffusion du modèle industriel’’
1ère ST2S— ‘‘Science, innovation, société. 1850-1950’’
Philosophie
Lycée général
L | ES | S— ‘‘La culture’’ (art, travail, technique...)
Français
Lycée professionnel
CAP— ‘‘Être ouvrier en France du XIXe au XXIe siècle’’
1ère Bac Pro— ‘‘L’homme face aux avancées scientifiques et techniques : enthousiasmes et
interrogations’’
Bibliographie
•
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•
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WORONOFF Denis, Histoire de l’industrie en France, Seuil, 1994.
BENJAMIN Walter, L’œuvre d’art à l’époque de la reproductibilité technique, Paris, Gallimard,
2007.
DAUDEL Raymond, LEMAIRE D’AGAGGIO Nicole, Sciences et métamorphose des arts, Paris,
PUF, 1994.
HAYAT Michel, Arts assistés par machine et arts contemporain : vers une nouvelle philosophie
de l’art, Paris, L’Harmattan, 2002.
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