Monteverdi Libro 8 Madrigali Amorosi Altri canti
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Monteverdi Libro 8 Madrigali Amorosi Altri canti
Monteverdi Libro 8 Madrigali Amorosi Altri canti di Marte e di sua schiera Ardo, e scoprir, ahi lasso, io non ardisco Non partir, ritrosetta Mentre vaga Angioletta Perché t’en fuggi, o Fillide Lamento de la Ninfa Chi vuol haver felice, e lieto il core Ninfa, che scalza il piede e sciolta il crine Dolcissimo usignolo ENTRACTE Vago augelletto che cantando vai O sia tranquillo il mare o pien d’orgoglio Su su su pastorelli vezzosi Ballo delle Ingrate Textes chantés Altri canti di Marte e di sua schiera Gli arditi assalti, e l'honorate imprese, Le sanguine vittorie, e le contese, I trionfi di morte horrida, e fera. Qu’un autre chante, de Mars et de sa troupe, Les hardis assauts, les exploits glorieux, Les sanglantes victoires et les combats, Triomphes de la Mort, effroyable et féroce. I' canto, Amor, da questa tua guerriera Quant'hebbi a sostener mortali offese, Com'un guardo mi vinse, un crin mi prese: Historia miserabile, ma vera. Moi je chante, Amour, de cette héroïne tienne Les mortelles attaques que j’eus à soutenir, comment Un regard m’a vaincu, des cheveux m’ont pris : Histoire malheureuse, mais vraie. Duo begli occhi fur l’armi, onde trafitta Giacque, e di sangue in vece amaro pianto Sparse lunga stagion l'anima afflitta. Deux beaux yeux furent les armes dont, transpercée, Resta gisante mon âme affligée, versant longtemps, Au lieu de sang, d’amères larmes Tu, per lo cui valor la palma, e 'l vanto Hebbe di me la mia nemica invitta, Se desti morte al cor, dà vita al canto. Toi dont la force a procuré, contre moi, palme Et gloire à mon ennemie invaincue, si tu donnas La mort à mon cœur, donne vie à mon chant ! (Della Lira del Cavalier Marino, parte prima - Rime amorose. In Venetia, Appresso Gio. Batt. Ciotti, 1602) (De la Lyre du Chevalier Marino, première partie, Poésies amoureuses, Venise, chez Giovanni Battista Ciotti, 1602) Ardo, e scoprir, ahi lasso, io non ardisco Quel che porto nel sen rinchiuso ardore, E tanto più dolente ogn'hor languisco Quanto più sta celato il mio dolore. Fra me tal'hor mille dissegni ordisco Con la lingua discior anco il timore, Ed all'hor, fatto ardito, io non pavento Gridar soccorso al micidial tormento. Je brûle, et n’ose pas montrer, hélas, Ce que je porte dans mon sein d’ardeurs cachées, Et d’autant plus souffrant languis à tout moment, Qu’au plus profond ma douleur reste celée. À part moi, quelque fois, j’ourdis mille desseins De délier ma langue et supprimer ma crainte, Et alors, enhardi, je ne redoute plus D’appeler au secours le tourment qui me tue. Ma s'avvien ch'io m'appressi a lei davante Per trovar al mio mal pace e diletto, Divengo tosto pallido in sembiante E chinar gl'occhi a terra son costretto. Dir vorrei ma non oso, indi tremante Comincio, e mi ritengo; al fin l'affetto S'aprir, nuntia del cor, la lingua vole, Si troncan su le labra le parole. Mais s’il advient que je m’avance devant elle Pour apaiser mon mal et trouver mon bonheur, Je deviens bien vite tout pâle, Et suis forcé de baisser les yeux vers la terre. Je voudrais parler, mais je n’ose, et tout tremblant Je commence, puis me retiens ; et à la fin, Si la langue, messagère du coeur, veut révéler Le sentiment, les mots se brisent sur les lèvres. (D'incerto) (Attribution incertaine) Non partir, ritrosetta, Troppo lieve [e] incostante, Senti, me non fuggir. Aspetta, odi il pregar, Del tuo fedel amante Tu non senti i lamenti. Ah tu fuggi, io rimango, Ah tu ridi, ed io piango. Ne pars pas, polissonne, Trop légère, trop inconstante, Écoute, ne me fuis pas. Attends, écoute ma prière, De ton fidèle amant Tu n’entends donc pas les gémissements ? Ah, tu fuis, moi je reste, Ah, tu ris, moi je pleure. L'alma vola disciolta, Teco parte il mio core. Ferma il piè , non fuggir, Ascolta, torna a gioir. Almen d'un che si more Tu non miri i martiri, Tu non odi, io ti chiamo, Tu mi sprezzi, ah, io ti bramo. L’âme s’envole, séparée, Avec toi s’en va mon cœur. Arrête tes pas, ne fuis pas, Écoute, retourne aux plaisirs. À moins qu’on ne meure, Tu ne prends pas garde aux martyres ? Tu n’entends pas : moi, je t’appelle ; Tu me méprises : ah, moi je t’aime. Tu crudel più offendi Quanto più sei fugace, Già dal sen l'alma fugge. Attendi, se il mio languir A te cotanto piace, Oh non ridi, non ridi Tu mi sprezzi, io t'adoro, Tu mi lasci, ed io moro. Cruelle, tu blesses d’autant plus Que plus vite tu fuis, Déjà de mon sein l’âme s’enfuit. Reste, si tu prends autant de plaisir À me voir languir, Oh ne ris pas, ne ris pas, Tu me méprises : moi, je t’adore, Tu m’abandonne : et moi, je meurs. (D'incerto) (Attribution incertaine) Mentre vaga Angioletta Ogn'anima gentil cantando alletta, Corre il mio core, e pende Tutto dal suon del suo soave canto. E, non so come, intanto Lorsque la belle Enfant Attire, en chantant, toute âme noble, Mon cœur accourt, et se suspend Tout entier au son de son chant suave. Alors, je ne sais comment, Qui entra l'istromento Ici entre l’instrument Musico spirto prende Fauci canore, e seco forma, e finge, Per non usata via, L’esprit de la Musique prend La gorge mélodieuse, et en forme, et sculpte, Par des chemins nouveaux, Qui entra l'altra parte dopo aver cantato le sue batute. Ici entre l’autre partie, aprè s qu’on a chanté les mesures pré cé dentes Garrula, e maestrevole armonia. Tempra d'arguto suon pieghevol voce, E la volve, e la spinge Con rotti accenti, e con ritorti giri, Quı̀ tarda, e là veloce; E tal'hor mormorando In basso, e mobil suono, ed alternando Fughe, e riposi, e placidi respiri, Hor la sospende, e libra, Hor la preme, hor la rompe, hor la raffrena, Hor la saetta, e vibra, Hor in giro la mena, Quando con modi tremoli, e vaganti, Quando fermi, e sonanti. Cosı̀ cantando, e ricantando il core, O miracol d'Amore, E; fatto un usignolo, Une gazouillante et toute puissante harmonie. Il tempère d’un son subtil la voix docile, Et la tourne, et la pousse, Avec des accents brusques et des tours sinueux, Ici lente, là rapide ; Et tantôt murmurante, Avec un son bas et labile, et alternant Fugues, et pauses, et paisibles soupirs ; Là il l’élève et la libère, Là il la presse, ou bien la brise, ou la réfrène, Là il en fait une flèche qui vibre, Et là il la fait tournoyer, Tantôt sur des modes tremblants, languissants, Et tantôt fermes et sonores. Et tandis qu’elle chante, et toujours chante, Le cœur, ô miracle d’Amour, Se change en rossignol, E spiega già per non star mesto il volo. Et, fuyant la tristesse, prend son vol. (Battista Guarini, Rime, 1602. Madrigal CXLV - Gorga di cantatrice) (Battista Guarini, Poésies, 1602. Madrigal CXLV – Gorge de cantatrice) Perché t’en fuggi, o Fillide, Perché t'en fuggi? Ohimè , deh Filli, ascoltami, E quei begli occhi voltami! Già belva non son io, né serpe squallido, Aminta io son, se ben son magro e pallido. Pourquoi t’enfuir, ô Phyllis, Pourquoi t’enfuir ? Hélas, Phyllis, écoute-moi, Et tourne tes beaux yeux vers moi ! Je ne suis ni bête féroce, ni sinistre serpent, C’est moi, Amynthe, tout maigre et pâle que je sois. Queste mie calde lacrime, Che da quest'occhi ogn'hor si veggon piovere, Han forza di commovere Ogni più duro cor spietato e rigido, Ma 'l tuo non già , ch'è più d'un giaccio frigido. Ces chaudes larmes Qui de mes yeux, à toute heure, tombent en pluie, Ont le pouvoir d’émouvoir Tous les cœurs les plus durs, sans pitié et rigides, Mais pas le tien, qui est plus froid que de la glace. Mentre spargendo indarno a l'aura Pianti e lamenti, indarno il cor distruggesi, Filli più ratta fuggesi, Né i sospir che dal cor sı̀ dolenti escono, Non voci o prieghi, i piè fugaci arrestano. Tandis que, répandant, en vain, à tous vents Plaintes et gémissements, en vain le cœur se brise, Phyllis, plus rapide, s‘enfuit : Ni les soupirs qui, si douloureux, sortent du cœur, Ni les cris, ni les prières n’arrêtent ses pieds en fuite. (Attribuito a Rinuccini) (Attribué à Rinuccini) Lamento de la Ninfa Lamento de la Nymphe Non havea Febo ancora Recato al mondo il dı̀, Ch'una donzella fuora Del proprio albergo uscı̀. Phébus n’avait pas encore Rendu au monde le jour, Quand une donzelle Sortit de sa demeure. Sul pallidetto volto Scorgeasi il suo dolor Spesso gli venı̀a sciolto Un gran sospir dal cor. Sur son visage pâli Se lisait sa douleur, Souvent un grand soupir S’exhalait de son cœur. Sı̀ calpestando [i] fiori Errava hor qua hor là . I suoi perduti amori cosı̀ piangendo và : Piétinant les fleurs Elle errait ça et là, Pleurant ainsi Ses amours perdues : Amor dicea, il ciel Mirando, il piè fermò Dove, dov'è la fé Che 'l traditor giurò . Miserella, ah più , no, no, Tanto gel soffrir non può . Amour, disait-elle ˗ et regardant le Ciel Elle arrêta ses pas ˗, Où est, où est la foi Que ce traître m’avait jurée ? ˗ Pauvre petite, ah, non, non Elle ne peut souffrir tant de glace. Fa che ritorni il mio Amor com'ei pur fu, O tu m'ancidi, ch'io Fais qu’il soit de nouveau mien, Amour, comme autrefois, Ou bien tue-moi, pour que je cesse Non mi tormenti più . Miserella, &c. De me tourmenter. ˗ Pauvre petite, &c. Non vò più ch'ei sospiri Se non lontan da me. No, no, che i suoi martiri Più non dirammi affè . Miserella, &c. Je ne veux plus qu’il soupire Sinon loin de moi. Non, non, puisqu’il ne me parlera plus, En vérité, de son martyre. ˗ Pauvre petite, &c. Perché di lui mi struggo, Tutt'orgoglioso sta. Che sı̀, che sı̀, se 'l fuggo Ancor mi pregherà . Parce que je me consume pour lui, Le voilà plein d’orgueil. Mais oui, mais oui, si je le fuis De nouveau il me suppliera. Miserella, &c. ˗ Pauvre petite, &c. Se ciglio ha più sereno Colei, che 'l mio non è , Già non rinchiude in seno, Amor, sı̀ bella fé . Miserella, &c. Si le regard de cette femme Est plus serein que le mien, Elle ne renferme pas dans son sein, Amour, une foi aussi belle. ˗ Pauvre petite &c. Né mai sı̀ dolci baci Da quella bocca havrà , Né più soavi, ah taci Taci ché troppo il sà . Et jamais de cette bouche Il n’aura d’aussi doux baisers, Ni d’aussi suaves, ah taisons-nous, Silence : il ne le sait que trop. Sı̀ tra sdegnosi pianti Spargea le voci al ciel. Cosı̀ nei cori amanti Nasce Amor fiamm'e gel. Ainsi, entrecoupée de sanglots furieux, Sa voix s’élevait jusqu’au ciel. C’est ainsi que, dans les cœurs amoureux, Amour mélange flamme et gel. (Ottavio Rinuccini, Rime) (Ottavio Rinuccini, Poésies) Chi vuol haver felice, e lieto il core, Non segua il crudo Amore, Quel lusinghier ch'ancide Quando più scherza, e ride, Ma tema di beltà , di leggiadria, L'aura fallace e ria. Al pregar non risponda, alla promessa Nol creda, e se s'appressa, Fugga pur, ché baleno è quel ch'alletta, Né mai balen'Amor, se non saetta. Toi qui veux heureux et gai garder ton cœur, Ne suis pas Amour, le cruel, Ce trompeur qui tue Quand il rit et joue, Mais crains son air faux et mauvais De beauté, de légèreté. Ne réponds pas à ses prières, à sa promesse Ne crois pas, et s’il s’approche, Fuis : ce qui attire en lui n’est qu’un éclair, Et les éclairs d’Amour, ce sont des flèches. (Battista Guarini, Rime, 1602, Madrigal CVII - Fuggasi Amore) (Battista Guarini, Poésies, 1602, Madrigal CVII – Fuyez l’Amour) Ninfa, che scalza il piede e sciolta il crine Te ne vai, di doglia in bando, Per queste piaggie lieta cantando, E ballando, Nymphe qui, les pieds nus et les cheveux défaits, T’en vas, loin des soucis, Tout en chantant, joyeuse, sur ces rives, Et dansant, Non scuoti a l'herbe le fresche brine. N’ôte pas de l’herbe le givre glacé. Qui, deh, meco t'arresta, ove di fiori S'inghirlanda il crin novello Questo ch'imperla fresco ruscello Bel pratello, Co' suoi correnti limpidi humori. Ici, ah, près de moi arrête-toi, là où de fleurs Se pare la chevelure nouvelle, Ce beau pré Que le frais ruisseau couvre de perles, Avec ses eaux courantes et limpides. De l'usate mie corde al suon potrai Sotto l'ombra di quest'orno A tempo il passo mover d'intorno, Né del giorno Faran te bruna gl'ardenti rai. Au son de mes cordes frappées, tu pourras, Sous l’ombre de cet orme, En mesure avancer tes pas alentour, Et du jour Les ardents rayons ne te bruniront pas. Ma, senza pur mirarmi, affretta il passo Dietro forse a Lillo amato. Ah che ti possa veder cangiato Quel piè ingrato Fera fugace, in un duro sasso! Mais, sans même me regarder, elle hâte ses pas Sans doute vers ce Lillo aimé. Ah si je pouvais voir changé Ton pied ingrat, Cruelle fuyarde, en un dur rocher ! (D'incerto) (Attribution incertaine) Dolcissimo usignolo, Tu chiami la tua cara compagnia Cantando : - vieni, vieni, anima mia. A me canto non vale, E non ho come tu da volar ale. O felice augelletto, Come nel tuo diletto Ti ricompensa ben l'alma natura, Se ti negò saver, ti diè ventura. Délicieux rossignol, Tu appelles ta chère compagne En chantant “Viens, viens, mon âme !” Mais à moi, le chant ne vaut rien, Je n’ai pas comme toi des ailes pour voler. Heureux oiselet, Comme avec cette joie Te récompense bien alme Nature : elle te refusa La conscience, mais t’a donné le bonheur. (Battista Guarini, Rime, 1602. Madrigal XIX - Felicità d'usignolo) (Battista Guarini, Poésies, 1602. Madrigal XIX – Joie du rossignol) *** ENTRACTE *** ENTRACTE Vago augelletto che cantando vai, Ovver piangendo, il tuo tempo passato, Vedendoti la notte e 'l verno al lato, E 'l dı̀ dopo le spalle, e i mesi gai, Bel oiselet qui vas chantant, Ou plutôt pleurant, ton temps passé, Voyant la nuit et l’hiver à côté, Et le jour, et les mois gais, derrière tes épaules, Se, come i tuoi gravosi affanni sai, Cosı̀ sapessi il mio simile stato, Verresti in grembo a questo sconsolato A partir seco i dolorosi guai. Si, aussi bien que tu sais tes graves souffrances, Tu savais mon état, semblable au tien, Tu viendrais dans le sein de cet inconsolé Partager avec lui ses douloureux malheurs. (Francesco Petrarca, Il Canzoniere, Sonetto XC.) (François Pé trarque, Sonnet XC) O sia tranquillo il mare o pien d’orgoglio Que la mer soit tranquille ou pleine d’arrogance, Mai da quest'onde io non rivolgo il piede; Io qui t'aspetto e qui de la tua fede, Tradito amante, mi lamento e doglio. Jamais je ne m’éloigne de ces ondes ; Moi, je t’attends ici : ici, de ton infidélité, Amant trahi, je me plains et je souffre. Spesso salir su queste rupi io soglio Per veder se 'l tuo legno ancor sen riede, Quivi m'assido e piango, onde mi crede Il mar un fonte e 'l navigante un scoglio. Souvent je viens monter sur ces rochers Pour voir si ton esquif ne revient pas enfin, Là, je m’assieds et pleure, et la mer crois Que je suis une source, le marin un récif. E spesso ancor t'invio per messaggieri, A ridir la mia pena e 'l mio tormento, Dell'aria vaga i zeffiri leggieri. Et souvent je t’envoie, en messagers, De l’air serein les zéphyrs légers, Pour te redire ma peine et mon tourment. Ma tu non torni, o Filli, e 'l mio lamento L'aura disperge, e tal mercé ne speri Chi fida a donna il cor e i prieghi al vento. Mais tu ne reviens pas, Phyllis, et cette plainte, La brise la disperse : c’est tout ce que peut espérer Qui à femme confie son cœur, et ses prières au vent. (D'incerto) (Attribution incertaine) Su su su pastorelli vezzosi, Correte, venite A mirar a goder L'aure gradite Ch'a noi porta ridente, Mirate i prati, Pien di fiori odorati, Ch'al suo vago apparir Ridon festosi. Su su su pastorelli vezzosi. Allez, allez, joyeux pastoureaux, Courez, venez Admirer, goûter Ce que le beau temps Nous apporte en riant, Admirez les champs Pleins d’odorantes fleurs, Qui rient et fêtent Sa belle apparition. Allez, allez, joyeux pastoureaux Su su su augelletti canori, Sciogliete, snodate Al cantar al gioir Le voci amate, Del sol ch'ei monti indora E suoi rametti Pien di vaghi fioretti Del leggiadro suo crin Dite gli honori. Su su su augelletti canori. Allez, allez oiselets chanteurs, Déliez, dénouez, En chantant, en jouissant, Vos voix bien aimées. Au soleil qui dore les monts Et leurs ramures Pleines de belles fleurs, À sa blonde chevelure, Faites honneur. Allez, allez, oiselets chanteurs. Su su su fonticelli loquaci, Vezzosi correte A gioir a scherzar Come solete. Di quai splendor si veste E di quei lampi Coloriti son i campi Che promettono ai cor Gioie veraci Su su su fonticelli loquaci. Allez, allez, fontaines bavardes, Joyeuses, courez Jouir et vous amuser Comme à l’accoutumée. De ces splendeurs se revêtent Les champs, et de ces éclats Les voici colorés, Qui promettent aux cœurs Des joies véritables. Allez, allez, fontaines bavardes. (D’incerto) (Attribution incertaine) Ballo delle Ingrate Ballet des Ingrates Amore De l'implacabil Dio Eccone giunti al regno Second'o bella Madre,il pregar mio. Amour De l’implacable Dieu Nous voici au royaume, Comme je t’en ai prié, o Mère très belle. Venere Non tacerà mia voce Dolci lusinghe e prieghi, Fin che l'alma feroce Del Re severo al tuo voler non pieghi. Vé nus Ma voix n’interrompra pas Ses douces séductions, ses prières, Tant que l’âme féroce Du Roi sévère n’aura pas cédé à tes volontés. Amore Ferma, Madre, il bel piè , non por le piante Nel tenebroso impero, Ché l'aer tutto nero Non macchiasse il candor del bel sembiante. Io sol n'andrò nella magione oscura E progando il gran Re trarrotti avante. Amour Arrête, Mère, ton beau pied, ne porte pas tes pas À l’intérieur du ténébreux empire De crainte que son air tout noir Ne souille la blancheur de ton si beau visage. Moi seul j’irai dans la demeure obscure Et, priant le grand Roi, te le ferai venir. Venere Va pur come t'aggrada : io qui t'aspetto, Discreto pargoletto. Vé nus Fais comme tu voudras : je t’attendrai ici, Charmant petit enfant. Sinfonia Symphonie Venere Udite, donne, udite, i saggi detti Di celeste parlar nel cor serbate. Chi, nemica d'Amor, ne crudi affetti Armerà il cor nella fiorita etade, Vé nus Écoutez, dames, écoutez ! Ces propos sages, Oracles du ciel, conservez-les dans votre cœur : Qui, ennemie d’Amour, contre ses durs affects Cuirassera son cœur dans la saison fleurie, Sinfonia Symphonie Venere Sentirà come poscia arda e saetti Quando più non havrà gratia e beltate, E in van ricorrerà , tardi pentita, Di lisci e d'acque alla fallace aita. Vé nus Sentira plus tard comme il brûle et transperce, Quand elle n’aura plus ni grâce ni beauté, Et qu’elle recourra, bien trop tard repentie, Au secours illusoire d’onguents et bains de peau. Plutone Bella madre d'Amor, che col bel ciglio Splender l'Inferno fai sereno e puro, Qual destin, qual consiglio Del ciel t'ha scorta in quest'abiss'oscuro? Pluton Mère très belle de l’Amour, dont les beaux yeux Font resplendir l’Enfer, rendu serein et pur, Quel dessein, quelle intention Du ciel t’aura conduite en cet abîme obscur ? Venere O de la morte innumerabil gente, Tremendo Re, dal luminoso cielo Traggemi a quest'orror materno zelo. Sappi ch'a mano a mano Vé nus Ô du peuple innombrable des morts Terrible Souverain, c’est l’amour maternel Qui m’arracha du ciel brillant vers cette horreur. Sache que, de plus en plus, L'unico figlio mio di strali e d'arco Arma, sprezzato arcier, gli omeri e l'ali. C’est en archer méprisé que mon fils unique Arme d’arc et de flèches ses épaules et ses ailes. Plutone Chi spogliò di valor l'auree saette Che tante volte e tante Gionsero al cor de l'immortal Tonante? Pluton Qui a privé de valeur les flèches d’or Qui tant et tant de fois Ont été jusqu’au cœur de l’immortel Tonnant ? Venere Donne, che di beltate e di valore Tolgono alle più degne il nome altero, Là nel Germano Impero Di cotanto rigor s'en vanno armate Che di quadrell'aurate, E di sua face il foco Recansi a scherzo e gioco. Vé nus Des femmes, qui en beauté, en valeur, L’emportent sur les plus dignes, Là, dans l’Empire germain, S’arment d’une telle rigueur, Qu’elle rient et se jouent Et de ses flèches d’or Et du feu de sa torche. Plutone Mal si sprezza d'Amor la face e 'l telo Sallo la terra e 'l mar, l'Inferno, e 'l Cielo. Pluton Malheur à qui méprise flamme et flèche d’Amour ! Terre, Mer, Enfer et Ciel en savent quelque chose Venere Non de più fidi amanti Odon le voci e i pianti, Amor, costanza e fede Non pur ombra trovar può di mercede. Questa gli altrui martiri Narra ridendo, e quella Sol gode d'esser bella. Quanto tragge d'un cor pianti e sospiri In van gentil guerriero Move in campo d'honor leggiadro e fiero. Indarno ingenio altero Fregia d'eterni carmi Beltà che non l'ascolta e non l'apprezza. O barbara fierezza, O cor di tigre e d'angue, Mirar senza dolore Fido amante versar lagrime e sangue, E per sua gloria e per altrui vendetta Ritrova in sua faretra Amor saetta. Venus Non, des amants les plus fidèles Elles n’entendent ni mots, ni pleurs. L’Amour, la constance, la foi Ne trouvent plus l’ombre du moindre crédit. L’une conte en riant Le martyre d’autrui, et l’autre Ne pense qu’à jouir d’être belle. Quand elle arrache au cœur pleurs et soupirs, En vain noble guerrier S’élance au champ d’honneur, vigoureux et féroce, En vain génie altier Tresse des chants éternels Autour d’une Beauté qui n’écoute ni n’apprécie rien. Ô barbare sauvagerie, Ô cœur de tigre et de serpent ! Voir sans sentir de douleur Fidèle amant verser des larmes et du sang ! Que pour sa gloire et pour les venger tous, Amour retrouve dans son carquois des flèches ! Plutone Se in van su l'arco tendi I poderosi strali, Amor, che speri e che soccorso attendi? Pluton Si c’est en vain que sur ton arc Tu tiras tes puissantes flèches, Amour, qu’espères-tu, quel secours attends-tu ? Amor Fuor de l'atra caverna, Ove piangono in van di speme ignude Scorgi, Signor, quell'empie e crude, Vegga su l'Istro ogni anima superba A qual martir cruda beltà si serba. Amour Hors de l’antre noir Où elles pleurent en vain, privées d’espoir Fais surgir, Seigneur, ces impies, ces cruelles : Que voie, sur le Danube, toute âme vaniteuse À quels martyres les beautés cruelles s’exposent. Plutone Deh, chi ricerchi Amore? Amor, non sai Che dal carcer profondo Calle non è che ne rimeni al mondo? Pluton Ah, que demandes-tu, Amour ? Ne sais-tu pas Que du fond de cette prison Il n’est pas de chemin qui en ramène au monde ? Amor So che dal basso Inferno Per far ritorno al Ciel, serrato è il varco, Ma chi contrasta col tuo poter eterno? Amour Je sais que, du fond de l’Enfer, Pour revenir au Ciel le chemin est étroit, Mais qui peut entraver ton pouvoir éternel ? Plutone Saggio signor, se di sua possa è parco. Pluton Il est sage le maître qui sait épargner son pouvoir. Venere Dunque non ti rammenti Che Proserpina bella a coglier fiori Guidai su 'l monte degli eterni ardori? Deh per quegli almi contenti Deh per quei dolci Amori, Fa nel mondo veder l'ombre dolenti. Vé nus Tu as donc oublié Que c’est toi qui guidas la belle Proserpine Sur le mont des ardeurs éternelles pour y cueillir Des fleurs ? Ah, au nom de vos âmes heureuses, Ah, au nom de ces douces amours, Fais apparaître jour les ombres douloureuses ! Plutone Troppo, troppo possenti, Bella Madre d'Amore, Giungon del tuo pregar gli strali al core. Udite, udite, o de l'infernal corte Fere ministre, udite. Pluton Bien trop, bien trop puissantes, Mère très belle de l’Amour, Les traits de ta prière arrivent à mon cœur. Oyez, oyez, atroces ministres De l’infernale cour, oyez ! Ombre d'Inferno Che vuoi? ch'imperi? Les Ombres d’Enfer Que veux-tu? Qu’ordonnes-tu? Plutone Pluton Aprite Le tenebrose porte De la prigion caliginosa e nera E de l'anime ingrate Trahete quı̀ la condannata schiera. Ouvrez Les ténébreuses portes De la prison fuligineuse et noire Et des âmes ingrates Faites monter ici la troupe condamnée. Venere Non senz'alto diletto Di magnanimi Regi Il piè porrai ne l'ammirabil tetto. Ivi di fabri egregi Incredibil lavoro O quante ammirerai marmorii fregi D'ostro lucenti e d'oro Splendon pompose le superbe mura, E per dedalea cura Sorger potrai tra l'indorate travi Palme [e] trionfi d'innumerabil avi. Né minor meraviglia Ti graverà le ciglia Folti theatri rimirando e scene, Scorno del Tebro e de la dotte Atene. Vé nus Non sans grand plaisir Vous porterez vos pas Sous l’admirable toit de palais splendides. Là, incroyable travail D’excellents ouvriers, Oh, combien vous verrez de frises marmoréennes !, Brillantes de pourpre et d’or, Resplendissent, pompeuses, les superbes murailles, Et, grâce aux soins dédaliques, Vous pourrez voir surgir, dans les travées dorées, D’innombrables aïeux les palmes et trophées. Et, pas moindre merveille Vous frappera les yeux, quand vous verrez Les pleins théâtres et les scènes Qui font rougir le Tibre et la savante Athènes. [Bc] Qui incominciano apparere le Donne ingrate, & Amore, e Venere così dicono. Ici commencent à apparaître les Dames ingrates, et Amour et Vénus s’expriment ainsi : A doi voci - Amore e Venere Ecco ver noi l'addolorate squadre, o miserelle, Di quell'alme infelici, miserelle, Ahi vista troppo oscura, o miserelle, Felici voi se vi vedeva il fato Men crude e fere, o men leggiadre e belle. O miserelle. A; deux voix – Amour et Vé nus Voici venir vers nous la troupe douloureuse, (Oh, malheureuses !) De ces âmes infortunées, Malheureuses. Ah vision sinistre (oh, malheureuses !), Plus chanceuses, si le destin vous avait vues Moins cruelles, moins féroces, ou moins coquettes Et moins belles (oh, malheureuses !) [Bc] Plutone rivolto verso Amore e Venere, così dice. Pluton, Parlant à l’Amour et à Vénus, s’exprime ainsi : Tornate al bel seren, celesti Numi. Regagnez votre jour serein, célestes divinités. [Bc] Rivolto poi all'Ingrate; così segue. Et parlant aux Ingrates, il poursuit ainsi : Movete meco voi d'Amor ribelle. Venez avec moi, vous, à l’Amour rebelles. [Bc] Qui con gesti lamentevoli, le Ingrate a doi a doi incominciano a passi gravi a danzare la presente entrata, stando Plutone nel mezzo, caminando a passi naturali, e gravi. Ici, avec des gestes de déploration, les Ingrates commencent, deux à deux, à pas lents, a danser la présente entrée, Pluton restant au milieu et marchant à pas naturels et lents. Entrata Entré e [Bc] Gionte tutte al posto determinato, incominciano il ballo come segue. Une fois toutes arrivées à leur place déterminée, Elles commencent le ballet comme suit. Ballo Ballet [Bc] Danzano il ballo fino à mezzo; Plutone si pone in nobil postura, rivolto verso la Principessa e Dame, così dice. Elles dansent le ballet jusqu’à la moitié ; Pluton prend une pose noble, puis, tourné vers la Princesse et les Dames, s’exprime ainsi : Plutone Dal tenebroso orror del mio gran Regno, Fugga, donne, il timor dal molle seno, Arso di nova fiamma al ciel sereno, Donna o donzella per rapir non vegno. Pluton Que la frayeur, Mesdames, fuie votre doux sein : De l’horreur ténébreuse de mon vaste royaume Je ne viens pas, brûlant d’une flamme nouvelle, Ravir ici Dame ni damoiselle. Ritornello Ritournelle Plutone E quando pur da vostri rai nel petto Languisse immortalmente il cor ferito Non fora disturbar Plutone ardito Di cotanta Regina il lieto aspetto. Pluton Et quand bien même, frappé par vos rayons, Son cœur devrait languir pour éternellement, Pluton ne saurait s’enhardir à troubler La joyeuse beauté d’une si grande Reine, Donna, al cui nobil crin non bassi fregi Sol ponn' del cielo ordir gli eterni lumi, Di cui l'alma virtù gli aurei costumi, Farsi speglio devrian monarchi e regi. D’une Dame, dont les nobles cheveux ne peuvent Recevoir comme digne parure que les feux éternels Du ciel ; et dont la douce vertu, les manières dorées Serviraient de miroir aux rois et aux monarques. Ritornello ut supra. Ritournelle, ut supra Plutone Pluton Sceso pur dianzi Amor nel Regno oscuro, Preghi mi fé ch'io vi scorgessi avanti Queste infelici, ch'in perpetui pianti Dolgonsi invan, ché non ben sagge furo. Descendu à l’instant dans le Royaume sombre, Amour m’a supplié d’avancer devant vous Ces malheureuses, qui, par d’éternelles plaintes, Se désolent en vain d’avoir été peu sages. Ritornello ut supra. Ritournelle, ut supra Plutone Antro è là giù di luce e d'aer privo, Ove torbido fumo ogn'hor s'aggira. Ivi del folle ardir tardi sospira Alma ch'ingrata hebbe ogni amante a schivo. Pluton Il est un antre, en bas, sans air et sans lumière, Où d’épaisses fumées à toute heure tournoient. Là d’une folle ardeur, trop tard, soupire l’âme Ingrate, qui voulut éviter tout amant. Indi le traggo, e ve l'addito e mostro, Pallido il volto e lagrimoso il ciglio, Perché , cangiando omai voglie e consiglio, Non piangeste ancor voi nel negro chiostro. C’est de là que je les fais sortir et vous les montre, Le visage pâli et les yeux larmoyants, Pour que, chant bientôt d’intention et de dessein, Vous n’alliez pas aussi pleurer dans l’obscur cloître. Ritornello ut supra. Ritournelle, ut supra Plutone Vaglia timor di sempiterni affanni Se forza in voi non han sospiri e prieghi. Ma qual cieca ragion vò l che si nieghi Quel che mal grado al fin vi tolgon gli anni? Frutto non è da riserbarsi al fine; Trovi fede al mio dir mortal beltate. Pluton Que la peur des tourments éternels soit plus forte, Si soupirs et serments ne peuvent rien sur vous. Mais quelle aveugle raison veut qu’on refuse Ce qu’à la fin, bon gré, malgré, les ans arrachent ? Il ne sert de rien de se garder pour la fin : Que toute mortelle beauté croie mes paroles. [Bc] Poi rivolto al Anime Ingrate così dice. Ma qui star più non lice, Anime Ingrate, Tornate a lagrimar nel Regno inferno. Puis, se tournant vers les Âmes ingrates, il dit : Il n’est plus permis de rester ici, Âmes Ingrates, Retournez donc pleurer au Royaume infernal. [Bc] Qui; ripigliano le Anime Ingrate la seconda parte del Ballo al suono come prima la qual finita, così Plutone gli parla. Ici, les Âmes Ingrates reprennent la seconde partie du ballet sur la même musique, et à la fin Pluton s’exprime ainsi : Plutone Tornate al negro chiostro, Anime sventurate. Tornate ove vi sforza il fallir vostro. Pluton Retournez dans le cloître ombreux, Âmes infortunées, Retournez où vous contraint d‘aller votre péché. [Bc] Qui; tornano al'Inferno al suono della prima entrata, nel modo con gesti, & passi come prima; restandone una in s[c]ena, nella fine facendo il lamento come segue; e poi entra nel'Inferno, Ici, elles retournent dans les Enfers au son de la première entrée, avec les mêmes gestes & les mêmes pas que la première fois ; une seule reste en scène et donne à la fin le lamento suivant, avant d’entrer dans les Enfers : Una dell'Ingrate Ahi troppo, ahi troppo è duro, Cruel sentenza e vie più cruda pena, Tornar a lagrimar ne l’antro oscuro. Aer sereno e puro, Addio per sempre, addio, O cielo, o sole, addio lucide stelle Apprendete pietà , donne e donzelle. Une des Ingrates Ah c’est trop, c’est trop dur ˗ Sentence cruelle et peine plus cruelle ˗ De retourner pleurer dans l’antre obscur. Air serein et pur, Adieu, adieu pour toujours, Ô ciel, ô soleil, ô brillantes étoiles, adieu ! Apprenez la pitié, dames et damoiselles ! Quatro Ingrate insieme Apprendete pietà , donne e donzelle. Quatre Ingrates, ensemble Apprenez la pitié, dames et damoiselles. [Bc] Segue una delle Ingrate Al fumo, a' gridi, a' pianti A sempiterno affanno, Ahi dove son le pompe, ove gl'amanti? Dove, dove sen vanno Donne che sı̀ pregiate al mondo furo. Aer sereno e puro, Addio per sempre, addio, O cielo, o sole, addio lucide stelle, Apprendete pietà , donne e donzelle. Une Ingrate ensuite Dans les nuées, dans les cris, les clameurs, Dans l’éternelle douleur, Hélas, où sont les amants, les splendeurs ? Où s’en vont, où s’en vont ces femmes Qui furent à ce point fameuses dans le monde ? Air serein et pur, Adieu, adieu pour toujours, Ô ciel, ô soleil, ô brillantes étoiles, adieu ! Apprenez la pitié, dames et damoiselles ! (D'incerto) (Attribution incertaine) © Traduction de Jean-Pierre Darmon