Carl Ludwig Fernow et la recherche d`une esthétique idéale

Transcription

Carl Ludwig Fernow et la recherche d`une esthétique idéale
UNIVERSITÉ PARIS IV - LA SORBONNE
FACULTÉ des Lettres/Études germaniques
THÈSE
Pour obtenir un titre académique
UNIVERSITÉ PARIS IV - LA SORBONNE - PARIS en cotutelle avec la
FRIEDRICH - SCHILLER - UNIVERSITÄT - JÉNA
Soutenue et présentée publiquement par
Béatrice Deffner
le 6 juillet 2009
L’art comme nature supérieure - Carl Ludwig Fernow et la recherche d’une
esthétique idéale
Directeur de recherches:
M. le Professeur Roland Krebs
JURY:
Mme le Professeur Elisabeth Décultot (ENS Paris)
M. le Professeur Roland Krebs (Université Paris IV - la Sorbonne)
M. le Professeur Klaus Manger (Université Friedrich Schiller Jéna)
M. le Professeur Dieter Burdorf (Université de Leipzig)
JENA/PARIS 2010
3
«L’intérêt porté au beau et à l’art qui nous élève vers un monde supérieur ne doit pas nous
rendre indifférent au monde réel»
(Carl Ludwig Fernow, Études romaines III, préface)
4
REMERCIEMENTS
En premier lieu, je voudrais remercier tous ceux qui, par leur aide ou leur soutien, ont
contribué à la réalisation du présent travail de thèse.
Tout d’abord, je tiens à exprimer ma sincère reconnaissance à mon directeur de thèse,
Monsieur le Professeur Roland Krebs de l’Université de Paris IV - la Sorbonne, non
seulement pour son soutien avisé mais également pour le temps consacré.
De même, je voudrais remercier Monsieur le Professeur Klaus Manger, le co-directeur de
recherches à la Friedrich-Schiller-Universität de Jéna, pour la coopération agréable et pour
avoir accepté de superviser ce travail dans le cadre d’une cotutelle de thèse.
Je tiens également à adresser des remerciements à Madame le Professeur Elisabeth Décultot,
de l’École normale supérieure - Paris, Madame le Professeur Françoise Knopper de
l’Université de Toulouse II, tout comme à Monsieur le Professeur Dieter Burdorf de
l’Université de Leipzig.
Un grand merci revient également à Melle Christelle Bony, enseignante au collège Robespierre
de Saint-Pol-sur-Mer, pour sa patience concernant la relecture du travail, et surtout pour son
amitié de longue date.
Par ailleurs, je voudrais remercier, de tout mon cœur, ma tante, Madame Irmgard Buisson,
pour le soutien moral.
Et, last but not least, je voudrais exprimer ma grande gratitude envers l’association Pierre
Grappin et, en particulier, Mme Pierre Grappin, pour la bourse de recherche qui m’a été
accordé dans le cadre d’un séjour de courte durée en Allemagne tout en mettant en relief
l’engagement de cette association en faveur du développement des études germaniques en
France. Merci mille fois.
5
SOMMAIRE
Sigles.................................................................................................................................................6
Introduction…...................................................................................................................................8
I.
La thèse classique ou les inspirations de l’homonomie classiciste:
Fernow dans la continuité et discontinuité avec l’idéal classique
1.
Kant: «quelle richesse créatrice d’idées»…………………………………......................23
2.
Schiller: «le labyrinthe des belles apparitions»…………………………………….........44
3.
Le Winckelmann de Fernow: «la grandeur silencieuse et calme»………………………62
II.
L’antithèse de la critique de l’art ou la critique de l’hétéronomie artistique:
La critique de l’industrie de l’art académique et l’esquisse de l’artiste idéal
1.
Ludovico Ariosto: «l’un des rares favoris des dieux»……………………………….........78
2.
Asmus Jakob Carstens: «le génie né pour les beaux-arts»……………………………......90
3.
Antonio Canova: «L’attrait plaisant et flatteur de Canova»…………………………….113
III.
La synthèse moderne ou le principe de l’autonomie esthétique:
Les approches d’une esthétique ‘idéale’
1.
Du beau dans l’art: «le but ultime de l’art»...…................................................................127
2.
Du caractéristique: «ou la vérité de la représentation»…………….................................136
3.
De l’enthousiasme de l’artiste: «cette aspiration divine»……………………………......148
IV.
Conclusion: L’image idéale de l’Antiquité - un espace utopique des temps modernes? 161
Bibliographie…………………………………………………………………………….164
6
SIGLES
1. ŒUVRES DE FERNOW
RS
Römische Studien, 3 vol., Éd. Gessner, Zurich, 1806.
ARIOST
Leben und Werk Ariosto’s des Götlichen, Éd. Gessner, Zurich, 1809.
CARSTENS
Leben des Künstlers Asmus Jakob Carstens, Éd. Hartknoch, Leipzig, 1806.
CANOVA
Über den Künstler Canova und seine Werke, Éd. Gessner, Zurich, 1806.
2. TEXTES D’AUTEURS CITÉS FRÉQUEMMENT AU LONG DE NOTRE OUVRAGE
KU
Kant, Critik der Urtheilskraft, Éd. Preuβische Akademie der Wissenschaften, Berlin, 1790.
JS
Johanna Schopenhauer, Carl Ludwig Fernow’s Leben, Éd. Cotta, Tübingen, 1810.
IF
Irmgard Fernow, Carl Ludwig Fernow als Ästhetiker - ein Vergleich mit der Kritik der
Urteilskraft, Mayr, Würzburg, 1936 [thèse, Univ. Friedrich-Wilhelm, Bonn].
HE
Herbert von Einem, Carl Ludwig Fernow - Eine Studie zum deutschen Klassizismus,
Deutscher Verein für Kunstgeschichte (Éd.), vol. III, Berlin, 1935.
HT
Harald Tausch, Entfernung der Antike - Carl Ludwig Fernow im Kontext der Kunsttheorie
um 1800, Éd. Niemeyer, Tübingen, 1998.
3. OUVRAGES COLLECTIFS
VRW
Von Rom nach Weimar - Carl Ludwig Fernow, Harald Tausch et Michael Knoche (Éd.),
Éd. Narr, Tübingen, 1998.
KAW
Kunst als Wissenschaft - Carl Ludwig Fernow ein Begründer der Kunstgeschichte,
Reinhard Wegner (Éd.), Éd. Vandenhoeck & Ruprecht, Göttingen, 2005.
4. MAGAZINES et JOURNAUX
NTM
Neuer Teutscher Merkur, C. M. Wieland (Éd.), Weimar, [1790-1810].
JDM
Journal des Luxus und der Moden, Friedrich Justin Bertuch, Weimar, [1787-1812].
NDM
Neues deutsches Magazin, C.U.D. Eggers, Hambourg (1791), Altona (dès 1792), [1791-1800].
7
A part cela, il est à noter que l’utilisation de la mise en relief est systématique pour signaler la
composition des mots, termes spécifiques et titres d’ouvrages étrangers, également à
l’intérieur des citations.
Les guillemets sont généralement employés pour souligner certains mots et noms propres dans
le texte courant, et aussi pour délimiter les citations.
Afin d’éviter les accumulations malencontreuses de signes de ponctuation, les mots
importants situés dans des citations brèves déjà encadrées par des signes seront mis en relief
par des guillemets simples ou par un espacement des lettres qui les composent.
L’orthographe étrangère de certains mots ou expressions sera aussi indiquée, immédiatement
après ou mis entre guillemets, lorsque cela s’avère nécessaire.
Pour une bibliographie plus détaillée, le lecteur est prié de se reporter à la partie
correspondante située à la fin du présent travail.
La traduction, quant à elle, est généralement donnée immédiatement après la citation ou en
bas de page, selon la longueur du texte, entre parenthèses et en caractères romains encadrés
systématiquement par les guillemets, le cas échéant.
Sauf indication contraire, l’auteur du présent travail est également à l’origine de toutes les
traductions des mots d’emprunts étrangers et paraphrases des citations et celles-ci sont donc
données sous réserve de réctification.
8
INTRODUCTION
Afin de justifier la démarche scientifique utilisée pour la bonne conduite de la présente
enquête, nous avons choisi de centrer notre réflexion sur trois centres thématiques:
1. La relation sujet-objet: c’est-à-dire la corrélation entre le représenté et le représentant en
art. Ainsi, nous allons nous intéresser dans un premier temps à la question dans quelle mesure
Fernow s’éloigne-t-il du principe classique d’égalité entre le sujet-objet (mimésis), pour
valoriser la liberté de l’artiste (autonomie esthétique).
2. L’unitas diversitatis: à savoir l’unité dans la diversité du tableau littéraire,1 dont Fernow se
sert aussi dans la monographie sur Carstens, afin de démontrer, suivant sa compréhension
humaniste de l’histoire, comment celui-ci est «devenu ce qu’il est devenu.»2
3. La diversité idéelle - en partant du principe qu’il n’y a pas qu’une seule démarche
scientifique propre au présent sujet de recherche, mais une multitude d’axes de recherche
potentiels, dont nous avons pris connaissance au cours de l’élaboration du présent projet, mais
qui dépasserait sans doute le cadre du présent travail, de sorte que nous sommes amenés à
laisser leur exploration à des études futures.3
1
Annette Graczyk: Das literarische Tableau zwischen Kunst und Wissenschaft, Éd. Fink, Munich, 2004.
Voir Carstens, Leben und Werke. Von K. L. Fernow, H. Riegel (Éd.), Hannovre, 1867, p. 185: „In dem Leben
eines Künstlers von so entschiedenen Anlagen und so durchaus eigener, trotz den ungünstigesten Umständen
glücklich durchgeführter Selbstbildung ist nichts merkwürdiger, als zu sehen, wie er ward, was er geworden.“
3
Ou, selon les termes de Pierre Francastel: «J’ai cru qu’on ne pourrait comprendre le passé qu’à travers le
présent, et réciproquement», et il ajoute: «je souhaite qu’on se souvienne toujours qu’à travers l’art
contemporain, c’est la Renaissance que j’ai voulu saisir», dans: Peinture et société [1965], cité selon Daniel
Lagoutte dans: Introduction à l’histoire de l’art, Éd. Hachette, Paris, 1997, p. 121.
2
9
Afin d’évaluer l’importance de Fernow en tant que critique dans le cercle des Amis de l’art
weimariens, il faut prêter une attention particulière au contexte historique. Au premier abord
on constate, que l’idéal de l’art antique peut être considéré comme l’une des constantes du
discours esthétique autour de 1800. Ce phénomène culturel qui, quoique conditionné par
plusieurs facteurs d’ordre historique et sociologique, est généralement mis en rapport avec la
crise de l’art4 traditionnellement attribuée aux influences romantiques, qui se manifestent vers
la fin du XVIIIème siècle; ce fait est bien connu. Afin de mieux cerner les arrière-plans qui ont
mené à ce réveil à l’antique,5 une rapide référence à l’art semble ici s’imposer. La réflexion
dite esthétique relève d’une longue tradition en Occident et remonte au moins jusqu’à
l’Antiquité grecque,6 sans oublier les grandes étapes de l’histoire de l’art, comme par exemple
le symbolisme du Moyen-âge, le naturalisme de la Renaissance et le sensualisme laïque de
l’âge baroque. Du côté allemand, ce furent notamment les répercussions du siècle des
Lumières venant de France ou d’Angleterre, qui eurent également une incidence importante
sur les œuvres des philosophes de la Frühen Neuzeit,7 et préparèrent ainsi le terrain à
l’avènement d’un discours, à la fois historique et scientifique, sur l’art en Allemagne. Il en va
de même sur le plan esthétique. Sous l’influence des thèses de Marmontel,8 Gotthold Ephraim
4
Victoria von Flemming et Sebastian Schütze (Éd.): Ars naturam adiuvans. Festschrift für Matthias Winner zum
2. März 1996, v. Zabern (Éd.), Mayence, 1996.
5
Cf. p. ex.: The Greek Revival, Éd. John Mordaunt Crook, Londres, 1972.
6
Cf. à ce sujet aussi Annie Becq: Genèse de l’esthétique française moderne 1680-1814, Éd. Albin Michel, Paris
1994, p. 4: «S’il est vrai qu’une réflexion sur l’art et le beau existe en Occident depuis l’Antiquité grecque, elle ne
se présente pas sous le nom d’esthétique, avant la publication de l’Aesthetica de Baumgarten en 1750, le fait est
bien connu.»
7
Wolfgang Detel et Claus Zittel (Éd.): Wissensideale und Wissenskulturen in der frühen Neuzeit/Ideals and
Cultures of Knowledge in Early Modern Europe, (Wissenskulturen und gesellschaftlicher Wandel, vol. 2), Éd.
Akademie Verlag, Berlin, 2002, ainsi que: Kulturelle Orientierung um 1700: Traditionen, Programme,
konzeptionelle Vielfalt, Sylvia Heudecker, Dirk Niefanger et Jörg Wesche (Éd.), Éd. Niemeyer, Tübingen, 2004.
8
D’après la théorie de J. G. Robertson Lessing pourrait avoir pris connaissance des thèses de Marmontel émises
dans la Poétique françoise (1763) par le biais d’un article de recension paru dans la Bibliothek der schönen
Wissenschaften und freien Künste [vol. XI, i, p. 13, p. 289 ss. et vol. XII, I, p. 42 s., (1764-65), Dyck, Leipzig
(1765-1806)] qui auraient également inspiré le Laokoon. Cf.: “Lessing and Marmontel”, dans: The Modern
Language Review, vol. 6, n° 2 (1911), ps. 216 ss.
10
Lessing9 va discuter pour la première fois la question de la connaissance humaine dans le
contexte des différentes théories sur la perception par rapport à l’interaction entre la physis et
la psyché,10 en fondant ainsi l’herméneutique visuelle.11 A cela s’ajoute également
l’interrogation de la raison humaine et l’imagination artistique, aussi à l’égard des aspects
anthropologiques.12 Dans le sillage de la Querelle des Anciens et des Modernes,13 Johann
Christoph Gottsched14 défend ainsi un point de vue conservateur, tandis que le moderne
Leibniz15 valorise la poésie dans le miroir de la force d’imagination. La vague de
l’enthousiasme shakespearien, marque par la suite une «rupture avec la poésie normative» en
faveur de la «langue du cœur»16, ce qui engendre un changement vis-à-vis de la
compréhension de la nature et de l’art au sens d’une esthétique du génie. De même, Leibniz
élabore un modèle métaphysique des monades qui constituent l’univers, et, ce faisant, il
s’oppose à Spinoza17 et à sa théorie panthéiste de l’esprit universel. Cette réflexion traduit
également l’idéal de l’art classique, d’après lequel le beau dans l’art se manifeste à travers les
objets comme un tout harmonieux, de manière quasi inductive,18 en parfait repos. En
9
Monika Schrader: Laokoon -‘eine vollkommene Regel der Kunst.’ Ästhetische Theorien der Heuristik in der
zweiten Hälfte des 18. Jahrhunderts: Winckelmann, (Mendelssohn, Lessing, Herder, Schiller, Goethe), (Reitel,
vol. 42 Europaea Memoria), Hildesheim/Zurich/New York, Éd. Olms, 2005.
10
Hans Georg von Arburg et Caroline Welsh: Hirnhöhlenpoetiken. Theorien zur Wahrnehmung in Wissenschaft,
Ästhetik und Literatur um 1800, (Litterae n° 114), Éd. Rombach, Fribourg/Brisgau, 2003. Gabriele Brandstetter
et Gerhard Neumann: Romantische Wissenspoetik. Die Künste und die Wissenschaften um 1800, (Stiftung für
Romantikforschung, vol. 26), Éd. Königshausen & Neumann, Wurzbourg, 2004.
11
David Wellbery: Lessing’s Laocoon. Semiotics and aesthetics in the age of reason, Éd. University Press,
Cambridge, 1984, ainsi que Frederick Burwick: “Lessing’s Laokoon and the Rise of Visual Hermeneutics”, dans:
Poetics Today, Éd. Porter Institute for Poetics and Semiotics, Los Angeles, 1999.
12
Jörn Steigerwald et Daniela Watzke (Éd.): Reiz - Imagination - Aufmerksamkeit. Erregung und Steuerung von
Einbildungskraft im klassischen Zeitalter (1680-1830), Éd. Königshausen & Neumann, Wurzbourg, 2003.
13
Voir: Parallèle des Anciens et des Modernes, Éd. Arts et Sciences Jean Paul Coignard (Éd.), Paris, [16881697].
14
Johann Christoph Gottsched: Versuch einer Critischen Dichtkunst, [1730], Breitkopf, Leipzig, 41751.
15
Cf. les essais théoriques de Gottfried Wilhelm Leibniz au sujet de la perception humaine: Nouveaux essais sur
l’entendement humain, [1704], Éd. Haude, Berlin 1936.
16
Voir à ce sujet également l’étude de Klaus Manger: „’Sprache des Herzens’ in der Hoftheaterkunst“, dans:
Jahrbuch Mitteldeutsche Barockmusik 2004: Mitteldeutschland im musikalischen Glanz seiner Residenzen, Peter
Wollny (Éd.), Éd. Ortus, Beeskow, 2005, ps. 11-26, ici: p. 11.
17
Baruch de Spinoza: Éthique [1661], Éd. Seuil, (Collection Points), Paris, 1999, p. 59. Cf. également Pierre
Macherey: Introduction à l'Éthique de Spinoza, Éd. PUF, Paris, 1994-1998.
18
Theodor Fechner: Vorschule der Aesthetik, 2 vol., Leipzig, 1876. Voir également Michael Heidelberger: Die
innere Seite der Natur. Gustav Theodor Fechners wissenschaftlich-philosophische Weltauffassung, Éd.
Klostermann, Francfort/M., 1993.
11
l’occurrence, David Hume19 va, pour la première fois, dans la continuité de Isaac Newton,20
établir le lien entre les sciences naturelles et la nature humaine, tout en élevant, dans une
certaine mesure, le principe de la force imaginative au-dessus de la raison. A ces deux
positions de base s’ajoute aussi le point de vue empiriste des théoriciens suisses Johann Jakob
Bodmer et Johann Jakob Breitinger.21 Dans ce contexte il faut également mentionner
l’influence des philosophes anglais tels que Thomas Hobbes,22 John Locke23 et Anthony
Shaftesbury,24 mais qui sont à délimiter nettement du sensualisme anglais et du Paradise
Lost25 de John Milton. Bodmer va, sous l’impression de ce dernier, contrecarrer les maîtres à
penser français de Gottsched et le culte classiciste de l’Antiquité, en érigeant l’emphase du
sentiment en nouvel idéal dans la poésie, ce qui déclenchera, en l’occurrence, un vif débat
littéraire. De Gottsched à Leibniz en allant jusqu’à Lessing,26 on assiste ainsi à une discussion
idéologique autour d’une table d’échecs, sur la question de la perception, à savoir le conflit
entre la psyché et la physis, à la lumière des différentes théories de la perception. D’une
manière générale, on situe les débuts du discours esthétique en 1750, en même temps que la
19
David Hume: Philosophical Essays Concerning Human Understanding, A. Millar (Éd.), Londres, 1748.
Isaac Newton: Philosophiae Naturalis Principia Mathematica [1686], S. Pepys (Éd.), Londres, 1687.
21
Johann Jakob Bodmer: Von dem Einfluβ und Gebrauche der Einbildungs-Krafft, Francfort/Leipzig, [s.n.],
1727, ainsi que: Critische Abhandlung von dem Wunderbaren in der Poesie und dessen Verbindung mit dem
Wahrscheinlichen, Conrad Orell & Comp., Zurich, 1740.
22
Voir: The collected works of Thomas Hobbes, William Molesworth (Éd.), Éd. Thoemmes Press, Londres,
1992.
23
John Locke: An Essay Concerning Human Understanding [1690], 4 vol., Éd. A. et J. Churchill, Londres,
1706.
24
Anthony Ashley Cooper, third Earl of Shaftesbury: Characteristics of Men, Manners, Opinions, Times [17111714], Éd. Olms, Hildesheim/New York, 1978. Cf. Ästhetik, 4 vol., éd. Frommann-Holzboog, Stuttgart/Bad
Cannstatt, 1981-1993 [édition intégrale].
25
Le vers épique Paradise Lost de John Milton passe pour un chef d’œuvre de la poésie post-homérique. Le
topos du paradis perdu transparaît dès les premières lignes: “Of mans first disobedience, and the fruit of that
forbidden tree, whose mortal taste brought death in the world, and all our woe, with loss of Eden, till one reater
man restore us, and regain the blissful seat sing heav’nly muse, that on the secret top of Oreb or Sinai, did inspire
that shepherd, who first taught the chosen seed in the beginning of Heav’ns and earth, rose out of chaos […] ”,
voir: Paradise lost - A poem written in ten books, Londres, [1667], Roy C. Flannagan (Éd.), Ohio, 1992.
26
Gotthold Ephraim Lessing passe en raison de son rationalisme éclairé de ses écrits comme l’initiateur du
classicisme allemand avec son traité portant sur la beauté dans l’art, le Laocoon. Cf. Le commentaire de Pierre
Grappin à ce sujet dans Encyclopédia universalis (Éd.), vol. 13, Paris, 1995, p. 648 s.: «Lessing était trop
rationaliste pour oser prophétiser; mais l'élargissement qu’il a su donner à la philosophie des Lumières, reçue
d'Angleterre et de France, annonce les grands idéalistes de l'Allemagne classique.»
20
12
parution de l’œuvre littéraire majeure d’Alexander Gottlieb Baumgarten27 intitulée Aesthetica.
Puis suivirent les écrits de Moses Mendelssohn28 et de Friedrich Nicolai,29 sans oublier le fait
que le Suisse Jean-Pierre Crousaz30 publia, antérieurement à Baumgarten mais sous une
forme moins définitive, un traité comparable sur le beau dans l’art, plus précisément en 1715.
Il reste toutefois à déterminer auquel des deux traités revient véritablement le statut d’écrit
fondateur en matière d’esthétique. Cependant, il faut attendre Kant et sa Critique de la faculté
de juger,31 pour voir interrogées, pour la première fois, les possibilités et les limites du
jugement esthétique, ouvrage auquel se référeront également les grands représentants de
l’idéalisme allemand, dont les principaux acteurs sont Georg Friedrich Wilhelm Hegel,32
Johann Gottlieb Fichte33 et Friedrich Wilhelm Joseph Schelling.34 Relevant de la même
importance quant aux questions de l’histoire de l’art, et en particulier celle du développement
de l’esthétique comme science moderne propre à la culture,35 ce sont les réflexions théoriques
sur l’art de Karl Philipp Moritz au sujet De l’imitation plastique et la Théorie des ornements,36
qui, en raison de leur portée autonome dans le domaine de l’art, peuvent passer pour
27
Alexander Gottlieb Baumgarten: Meditationes philosophicae de nonnullis ad poema pertinentibus, Éd. Halae
Magdeburgicae, 1735 et Æsthetica, vol. I/II, Éd. Johannes Christian Kleyb, Francfort/Oder, 1750[-1758].
28
En raison de l’orientation rationnelle des écrits Mendelssohn compte traditionnellement parmi les esthètes du
rationalisme (parmi Baumgarten et Nicolai), qui vont statuer dans la perfection sensuelle une formule pour la
beauté dans l’art.
29
En collaboration avec Moses Mendelssohn Nicolai publiera à partir de 1759 la Bibliothèque de belles sciences
et des arts libres (Bibliothek der schönen Wissenschaften und freien Künste) et, en collaboration avec Herder, la
Bibliothèque générale allemande (Allgemeine Deutsche Bibliothek).
30
Jean-Pierre de Crousaz: Traité du beau Traité du beau, où l’on montre en quoi consiste ce que l’on nomme
ainsi, par des Exemples tirés de la plupart des Arts et des Sciences [1712], Éd. F. L’Honoré & Chatelain,
Amsterdam, 1715. Cf. aussi André Bandelier et Sébastien Charles: «Actualité de Jean-Pierre Crousaz», dans:
Revue de théologie et de Philosophie, (n° 136, 204), ps. 3-6.
31
Voir Immanuel Kant: Critik der Urtheilskraft, première partie, vol. 5, Königlich Preußische Akademie der
Wissenschaften (Éd.), in: Kant’s gesammelte Schriften, Éd. Reimer, Berlin, 1908 [réédition].
32
Georg Friedrich Wilhelm Hegel: Système de l’idéalisme transcendantal, 1801.
33
Johann Gottlob Fichte: Fichtes sämtliche Werke, Éd. de Gruyter, Berlin, 1971.
34
Ce faisant, Schelling entend expliquer la philosophie fichtéenne et la réconcilier avec la réalité. Cf. à ce sujet
Bernhard Barth: Schellings Philosophie der Kunst. Göttliche Imagination und ästhetische Einbildungskraft,
(Symposion, vol. 92), Éd. Alber, Fribourg/Brisgau et Munich, 1991, [thèse, Univ. Fribourg/Brisgau, 1986].
35
Friedrich Wilhelm Joseph Schelling: System des transcendentalen Idealismus, Éd. Cotta, Tübingen, 1800.
Cf. Georg Eckhardt e. a. (Éd.): Anthropologie und empirische Psychologie um 1800 - Ansätze einer Entwicklung
zur Wissenschaft, Éd. Böhlau, Cologne e. a, 2001.
36
Voir à ce sujet également l’étude d’Alessandro Costazza: Schönheit und Nützlichkeit. Karl Philipp Moritz und
die Ästhetik des 18. Jahrhunderts, (IRIS n° 10), Lang, Francfort/M., 1996 et idem: Genie und tragische Kunst.
Karl Philipp Moritz und die Ästhetik des 18. Jahrhunderts, (IRIS n° 13), ibid., 1999.
13
fondatrices quant au classicisme weimarien. Le discours esthétique des Amis de l’art
weimariens,37 dont le programme culturel et littéraire vise principalement à revaloriser l’art de
l’héritage classique pour la modernité, se situe également devant cet arrière-plan historique et
dans la continuité de la redécouverte de l’Antiquité par Winckelmann. Or, il faut aussi noter
ici qu’il ne s’agit pas, comme longtemps présumé, d’un mouvement exclusivement allemand,
mais, bien au contraire, d’un vaste réseau relationnel aux imbrications et interactions
multiples des différentes aires culturelles, si bien que l’on peut parler à juste titre d’un courant
esthétique à portée européenne.38 Vu dans l’ensemble, on observe, vers la fin du XVIIIème
siècle, un changement de paradigme qui va de la mimésis classique vers l’esthétique de la
perception et celle de la représentation. On constatera ici également que, même si ce
phénomène semble avoir été déjà bien analysé dans son ensemble, notamment par les
philosophes, les écrivains et les chercheurs spécialisés en la matière, il faut également
admettre que jusqu’à l’heure actuelle, un certain nombre d’axes de recherche potentiels
restent encore à explorer de plus près. C’est particulièrement le cas d’un représentant secret
du cercle des Amis de l’art weimariens agissant dans une «obscurité sacrée»,39 et qui va
animer, des années durant, le discours esthétique de la scène culturelle en Allemagne autour
de 1800. Il s’agit ici de Carl Ludwig Fernow, dont le rôle éminent, au sein des amis d’art
weimariens, passe pour établi, du point de vue de la recherche moderne en études
germaniques. Vu de près, le personnage de Fernow s’avère être non seulement l’une des
37
Klaus Manger: „Fernow als Weimarischer Kunstfreund zwischen Goethe und Meyer“, VRW, 1998, ps. 20-37,
et Helmut Holtzhauer: „Die Weimarschen Kunstfreunde“ dans: Goethe-Jahrbuch (vol. 29), ps. 1-26, ainsi que
l’article d’Ines Boettcher et de Harald Tausch dans: Goethe-Handbuch, vol. 4/2: „Weimarische Kunstfreunde“,
Hans-Dietrich Dahnke et Regine Otto (Éd.), Éd. Metzler, Stuttgart, 1998, ps. 702-706. Cf. également Joachim
Berger (Éd.): Der ‚Musenhof’ Anna Amalias. Geselligkeit, Mäzenatentum, und Kunstliebhaberei im klassischen
Weimar, Éd. Böhlau, Cologne e. a., 2001, et idem: Anna Amalia von Sachsen-Weimar-Eisenach, Denk- und
Handlungsräume einer aufgeklärten Herzogin, (Ereignis Weimar-Jena. Kultur um 1800: Ästhetische
Forschungen, vol. 4), Klaus Manger (Éd.), Éd. Winter, Heidelberg, 2003.
38
Cf. HT, p. 17: „Der Klassizismus Winckelmannscher Prägung wurde so zu einer Mode, die ganz Europa
erfasste und die bis in die kleinsten Bereiche des täglichen Lebens hinein geschmacksbestimmend wurde.“
39
Voir la correspondance de Wieland, Hans Werner Seiffert et Siegfried Scheibe (Éd.), vol. 5: Briefe der
Weimarer Zeit (21 septembre 1772-1831), Éd. Akademie der Wissenschaften, Berlin, 1983, p. 601: „heiligen
Dunkel.“ Voir à ce sujet également l’étude de Klaus Manger: Das Ereignis Weimar-Jena aus
literaturwissenschaftlicher Sicht, (Sächsische Akademie der Wissenschaften), vol. 139/cahier n° 5, Éd. P. Hirzel,
Stuttgart/Leipzig, 2005, p. 3.
14
personnalités les plus facétieuses des théoriciens secrets de l’événement culturel de WeimarJéna, mais également un homme de sciences à part, dont le large spectre d’activités et de
centres d’intérêt révèle sans doute une ambition démesurée visant à l’universalité idéelle, qui
peut être vu conforme à l’idéal de l’érudition humaniste.
Ainsi, la ‘multifocalité’ des champs d’étude potentiels semble déjà justifier l’intérêt quasiment
pluridisciplinaire manifesté de la part des germanistes à son égard.
En ce qui concerne l’état actuel de la recherche fernowienne, on observe, depuis quelque
temps, une certaine tendance à une redécouverte de son œuvre. Ceci est d’autant plus étonnant
si l’on considère le fait que ses écrits étaient, depuis des années, parfaitement tombés dans
l’oubli. Quant à la littérature de recherche portant sur Fernow, deux catégories ressortent
d’emblée: ce sont les sources historico-biographiques d’un côté, et les études propres à la
critique d’art, de l’autre.
Concernant les sources historico-biographiques, on se référera en premier lieu à l’ouvrage de
Johanna Schopenhauer40 (1810), qui, en tant qu’amie et confidente de longue date, entend
offrir au lecteur surtout une vue globale de la vie et de l’œuvre de l’écrivain Fernow, dont elle
fait aussi le portrait dans son roman intitulé Gabriele sous les traits de la figure romanesque
d’Ernesto.41
40
Johanna Schopenhauer: Carl Ludwig Fernow’s Leben, Éd. Cotta, Tübingen, 1810. L’auteur estime Fernow
surtout comme «tête brillante» („trefflichen Kopf[es]“) et le considère comme «l’un des plus adorés et des plus
chers» parmi ses hôtes („einer der von mir Geliebtesten und mich Liebendsten“, cf. JS, p. 52). Selon ses dires, elle
passe ses deux dernières années de sa vie avec lui dans «les relations les plus belles d’amitié sacrée et de
confidence mutuelle» („in den schönsten Verhältnissen heiliger Freundschaft und gegenseitigen Vertrauens“, ibid.,
I). Voir à ce sujet également Achim von Arnim: „Carl Ludwig Fernow’s Leben, von Johanna Schopenhauer“, dans:
Berliner Abendblätter, n° 25/26, 1811, ps. 98-111.
41
Idem: Gabriele. Ein Roman, vol. 1-3, Éd. Brockhaus, Leipzig, 1819/20, ainsi que: Gabriele. In sämtlichen
Schriften, vol. 7-9, Éd. Brockhaus et Sauerländer, Leipzig et Francfort/M., 1830. En dernière édition par
Brockhaus, voir à ce sujet le commentaire figurant dans l’annexe de Stephan Koranyi, p. 416: „In der Figur des
Ernesto lassen sich unschwer Züge des [von ihr] verehrten Fernow erkennen.“
15
Suivant l’ordre chronologique, on mentionnera également l’étude de Livia Gerhardt42 (1908),
qui peut se référer à sa correspondance autobiographique, mais qui n’est plus accessible à la
recherche actuelle.43
L’article de Fritz Fink,44 quant à lui, porte essentiellement sur l’activité littéraire et le travail
de Fernow en tant que bibliothécaire de la duchesse Anna Amalia durant ses années à
Weimar.
L’historien Georg Luck45, enfin, se concentre surtout, dans son ouvrage intitulé Carl Ludwig
Fernow, sur une reconstruction descriptive du voyage en Suisse, tout en insérant des aspects
d’ordre biographique.
Pour ce qui est des études esthétiques, on se reportera en premier lieu à l’ouvrage d’Herbert
von Einem46 (1935), qui décrit de plus près les théories de Fernow à l’intérieur du classicisme
allemand.
Irmgard Fernow47 se concentre également, dans sa thèse (1936), sur l’aspect esthétique, tout
en présentant de manière synthétique les idées philosophiques de Fernow, à partir de la
philosophie kantienne.
Manfred Ebhardt48, lui, considère Fernow comme un théoricien de l’art et Deutschrömer, en
le situant, dans son article portant sur l’interprétation de la peinture raphäélienne intitulé Die
Deutung der Werke Raffaels in der deutschen Kunstliteratur (1972), au même rang que
Goethe et Meyer.
42
Livia Gerhardt: Carl Ludwig Fernow, Éd. Haessel, Leipzig, 1908.
Voir également à ce sujet HT, p. 9: „Einige seiner Briefe, die von Johanna Schopenhauer und Livia Gerhardt
noch eingesehen werden konnten, sind nicht mehr nachweisbar.“
44
Fritz Fink: Carl Ludwig Fernow. Der Bibliothekar der Herzogin Anna Amalia (1763-1808), Éd. Fink,
Weimar, 1934.
45
Voir Georg Luck, Carl Ludwig Fernow, Éd. Hans Huber, Berne/Stuttgart/Toronto, 1984.
46
Herbert von Einem: Carl Ludwig Fernow - Eine Studie zum deutschen Klassizismus, Éd. Deutscher Verein für
Kunstwissenschaft, Berlin, 1935.
47
Irmgard Fernow: Carl Ludwig Fernow als Ästhetiker - ein Vergleich mit der Kritik der Urteilskraft, Mayr,
Würzburg, [thèse, Univ. Berlin].
48
Manfred Ebhardt: Die Deutung der Werke Raffaels in der deutschen Kunstliteratur, Éd. Körner, Baden-Baden,
1972.
43
16
La contribution de Harald Tausch49 et de Lea Ritter Santini50 (les deux datent de 1998) porte
premièrement sur l’histoire de la collection de la bibliothèque fernowienne et, en particulier,
sur celle de sa collection des gravures.
Harald Tausch51 (2000), dans son étude, s’intéresse en premier lieu à la question du rôle joué
par Fernow en tant qu’homme des post-Lumières et classiciste ‘civil’,52 en mettant l’accent
majeur sur le contexte discursif de l’esthétique autonome autour de 1800.
Parmi les publications plus récentes figure l’ouvrage de Janis Sarlak53 (2003) qui examine de
plus près la notion de style envisagée sous l’aspect d’un classicisme sentimental, aussi à
l’égard de la peinture paysagiste, tout comme l’ouvrage de Franz Joachim Verspohl54 (2004)
qui s’intéresse en particulier à l’image de Winckelmann véhiculée par Fernow.
De même, on lira avec intérêt les deux ouvrages collectifs rassemblant les actes des deux
colloques consacrés à Fernow s’intitulant Von Rom nach Weimar55 (1998) et Kunst als
Wissenschaft - Carl Ludwig Fernow, ein Begründer der Kunstgeschichte (2005).56 Les
renvois littéraires que l’on citera ci-après se réfèrent exclusivement à ces deux ouvrages, dans
lesquels nous avons discerné trois axes thématiques centraux:
1. Les études linguistiques et dialectales (dans les Études romaines),
2. les recherches historiques et littéraires (e. a. de I. Fernow, H. v. Einem et H. Tausch),
3. les analyses philosophiques et esthétiques («Du beau dans l’art», «Du caractéristique» et
«De l’enthousiasme de l’artiste»).
49
Harald Tausch: „Fernows Kupferstichsammlung“, VRW, ps. 130-152.
Ibid., Lea Ritter-Santini: „Tausend Bücher - Fernows Bibliothek“, ps. 114-129.
51
Harald Tausch, Entfernung der Antike - Carl Ludwig Fernow im Kontext der Kunsttheorie um 1800, Éd.
Niemeyer, Tübingen, 2000.
52
Ibid., p. 4: „Fernows ziviler Klassizismus ist, so paradox dies auch klingen mag, das Ergebnis
kunsthistorischen Denkens.“
53
Cf. Janis Sarlak: Die Rolle Carl Ludwig Fernows für die Entwicklung des kunsthistorischen Stilbegriffs
‘Sentimentalischer Klassizismus’ im Hinblick auf die deutsche Landschaftsmalerei im 18. Jahrhundert, Éd.
Niemeyer, Tübingen, 2003.
54
Cf. Franz-Joachim Verspohl: Carl Ludwig Fernows Winckelmann: Seine Edition der Werke, WinckelmannGesellschaft (Éd.), Stendal, 2004.
55
Harald Tausch/Michael Knoche (Éd.): Von Rom nach Weimar, Éd. Gunter Narr, Tübingen, 1998.
56
Reinhard Wegner (Éd.): Kunst als Wissenschaft - Carl Ludwig Fernow, ein Begründer der Kunstgeschichte,
Éd. Vandenhoeck & Ruprecht, Göttingen, 2005.
50
17
En ce qui concerne les travaux linguistiques, on évoquera au premier abord l’étude de Herbert
Izzo57(1975), qui s’intéresse à l’importance de Fernow en tant que latiniste et chercheur
dialectal.
Dans le même sillage, Jürgen Storost58 (1990) le présente sous un jour nouveau en tant que
«linguiste aux arguments descriptifs […] qui n’a pas pensé historiquement.»59
Par ailleurs, on attirera ici l’attention sur le recueil réalisé par Harald Thun60 et Jörn
Albrecht61 (1998), qui offre également une vue globale des travaux linguistiques de Fernow.
Quant aux études historico-littéraires, elles se concentrent principalement sur l’influence
intellectuelle exercée par Fernow et son importance au sein de la société weimarienne, de
même que son activité en tant que théoricien de l’art, qu’on ne peut pas toujours délimiter
clairement des études esthétiques, étant donné que les frontières entre les deux s’avèrent
parfois comme étant très floues.
En ce qui concerne la troisième catégorie, Sabine M. Schneider62 (1998) thématise dans son
article les apories de l’esthétique schillérienne en établissant un lien avec les interprétations
qu’en fait le kantien Fernow.
Helmut Pfotenhauer63 (1998) se focalise essentiellement sur le caractère à la fois
monumentalisant-défenseur et compensatoire du projet fernowien consacré à l’œuvre de
Winckelmann.
57
Herbert Izzo: Carl Ludwig Fernow as Italian Dialectologist and Romanist, dans: H. J. Niederehe/H. Hamann
(Éd.): In memoriam Friedrich Diez. Akten des Kolloquiums zur Wissenschaftsgeschichte der Romanistik,
Amsterdam, 1976, ps. 125-140.
58
Jürgen Storost: Zur Erforschung der italienischen Dialekte in der deutschen Sprachwissenschaft der ersten
Hälfte des 19. Jahrhunderts, (Italienische Studien), 1990, ps. 55-69.
59
Ibid., p. 62: „ [Fernow] hatte noch keine Vorstellung von der historisch-vergleichenden Methode.“
60
Harald Thun: Die Entstehung einer wissenschaftlichen Gattung - die monographische Dialektübersicht bei
Dante, Denina und Fernow, VRW, ps. 87-113.
61
Jörn Albrecht: „Fernow und die Anfänge der Italianistik in Deutschland“, VRW, ps. 69-86, „Carl Ludwig
Fernow und Christian Joseph Jagemann“, dans: Italien in Germanien - Deutsche Italien-Rezeption von 1750 1850, Éd. Gunter Narr, Tübingen, 1996, ainsi que, idem: „Die Italianistik in der Weimarer Klassik - Das Leben
und Werk von Christian Joseph Jagemann (1735-1804)“, Éd. Gunter Narr, Tübingen, 2006, ps. 227-241.
62
Sabine M. Schneider: „Die Krise der Kunst und die Emphase der Kunsttheorie“, VRW, ps. 52-69.
63
Ibid., H. Pfotenhauer: „Fernow als Kunsttheoretiker in Kontinuität und Abgrenzung von Winckelmanns
Klassizismus“, ps. 38-52.
18
En ce qui concerne la première catégorie, Klaus Manger64 (1998) situe Fernow dans le cercle
relationnel entre Goethe et Meyer, tout en mettant en lumière l’organisation structurelle et le
programme de propagande des Amis de l’art weimariens qu’il désigne comme étant un
apotropaion culturel dirigé contre le mouvement romantique.
Jochen Golz65 (1998) portraitise Fernow comme un homme des post-Lumières et auteur de
lettres, ce qu’il démontre à partir des documents historiques de l’œuvre épistolaire, illustrant
les contacts personnels durant les années 1804-1808.
En l’occurrence, Reinhard Wegner66(2005) met l’accent scientifique principalement sur la
position de Fernow dans le contexte des débuts de l’histoire de l’art, qui coïncide avec le
deuxième séjour à Jéna, tout en prenant aussi en considération l’aspect de l’histoire de
l’université.
Dans la même optique, Harald Tausch67(2005) s’intéresse aux influences multiples que
Fernow connaît dans le réseau relationnel tissé autour de Karl Leonhard Reinhold, Johann
Gottlieb Fichte et Johann Benjamin Erhard durant son séjour à Jéna et démontre dans quelle
mesure le contexte philosophique a une incidence sur l’évolution de sa pensée esthétique sur
un art dit autonome.
Johannes Grave68(2005) s’attache à reconstruire l’importance de Fernow et sa position
philosophique dans le cercle restreint regroupé autour de Goethe, Schiller et Aloys Hirt, et les
Schellingiens, tout en sondant de près son activité en tant que maître de conférences à Jéna.
Markus Bertsch69 (2005) s’interroge davantage sur la relation corrélative entre artiste et
biographe, qu’il illustre à travers une comparaison contrastée entre Fernow/Johann Christian
Reinhart et Goethe/Philipp Hackert.
64
Cf. note n° 37, ibid., ainsi que, idem: „Das Italienbild des klassischen Weimar nach Jagemann: Carl Ludwig
Fernow“ in: Die Italianistik in der Weimarer Klassik - Das Leben und Werk von Christian Joseph Jagemann
(1735-1804), Jörn Albrecht und Günter Kofler (Éd.), Narr, Tübingen, 2006, ps. 227-241.
65
Jochen Golz: „Fernow in Weimar“, VRW, ps. 1-19.
66
Reinhard Wegner: „Fernow in Jena“, KAW, ps. 60-81.
67
Ibid., Harald Tausch: „Von Jena nach Rom“, ps. 130-153.
68
Johannes Grave: „Weimarer Versatzstücke in Carl Ludwig Fernows ‘Römischen Studien’“, KAW, ps. 82-97.
69
Ibid., Markus Bertsch: „Fernow und Reinhart“, ps. 98-130.
19
Klaus Manger70 démontre à l’aide de la biographie de Carstens que la technique narrative de
Fernow se trouve dans la tradition du Tableau de Paris par Louis-Sébastien Mercier, à la
différence de Jean-Jacques Barthélémy dans son ouvrage Voyage du jeune Anarcharsis, ce
qu’il identifie également comme un phénomène européen dans la littérature d’artistes. 71
En l’occurrence, l’étude de Martin Dönike72 soulève la question de l’authenticité du portrait
que Fernow brosse de son ami à travers sa biographie consacrée à Carstens, ce qu’il examine
à partir d’une comparaison entre les thèmes traditionaux et les structures spécifiques du roman
d’artiste.
Pour ce qui est de l’importance de la monographie d’artiste par rapport au développement des
formes de publication modernes, le lecteur découvrira avec intérêt l’article de Karin Hellwig
(2005),73 qui montre dans quelle mesure le genre de la biographie d’artiste s’insère
parfaitement dans la continuité des formes littéraires traditionnelles.
En raison de divers champs d’activité de Fernow et la présence d’une partie mineure des corps
de texte cohérents, il faut considérer quelques parties de son œuvre complexe comme étant
peu explorées. Ainsi, nous voudrions esquisser ici brièvement des axes potentiels de
recherche, qui pourraient faire l’objet de travaux futurs.74
Quant aux lettres classiques, il y a quelques aspects didactiques et pédagogiques dans les
études de Fernow sur la langue italienne qui mériteraient encore une certaine attention,
comme par exemple ses réflexions quant à la définition du signe linguistique75 (evtl. Le signe
70
Ibid., Klaus Manger: „Fernows literarische Formen“, ps. 166-183.
Voir aussi idem (Éd.): „Italienbeziehungen des klassischen Weimar“, Éd. Niemeyer, Tübingen, 1991, ps. 181196.
72
Martin Dönike: „Fernows Carstens - ein treues Charakterbild?“, KAW, ps. 144-165 et idem: Pathos, Ausdruck
und Bewegung. Zur Ästhetik des Weimarer Klassizismus, Éd. de Gruyter, Berlin, 2005, ps. 293-284.
73
Ibid., Karin Hellwig: Carl Ludwig Fernows Bedeutung für die Künstlerbiographie der ersten Hälfte des 19.
Jahrhunderts, ps. 131-143.
74
Cf. HT, p. 12 s.
75
Ainsi Fernow était à la recherche d’une sorte de clef universelle pour la systématisation des langues romaines,
en prenant comme point de départ la clef des langues de Denina. Dans son article dédié à Uhden Sur les
dialectes dans la langue italienne (RS, III, à partir de la page 209), il regrette de ne pas avoir terminé ses
recherches, étant donné qu’il s’était surtout concentré, durant ses études linguistiques, sur le saisi global des
dialectes italiens, les dramaturgies d’Allacci et les Cansonette romanze.
71
20
esthétique?), au sujet de la grammatologie (Manuel de la langue italienne pour
germanophones), ainsi que de la dialectologie (Des dialectes de la langue italiennes). On
pourrait également faire une approche tenant compte des aspects poétologiques («De
l’imitation des improvisateurs italiens» dans Prométhée). A part cela, une comparaison de la
monographie d’artiste de Fernow Leben des Ludovico Ariosto’s des Götlichen avec l’ouvrage
de Giovanni Andrea Barotti offre un aspect thématique potentiel, et Raccolti dei autori
classici italianin (Dante, Pétrarque, Arioste, Tasso), de même qu’une analyse approfondie de
l’image que Fernow brosse de l’Italie («Portraits des mœurs et de la culture à Rome», «Des
improvisateurs»).
Dans le domaine germanistique, quelques champs resteraient encore à explorer de près,
comme par exemple le lyrisme (e. a. Thalia, Le livret de Heidelberg, L’almanach des muses et
L’anthologie lyrique de Matthison), le commentaire (dans Les œuvres de Winckelmann et evtl.
Raccolti dei autori classici), ainsi que la rhétorique des dédicaces (p. ex. le duc de Weimar, F.
Brun, Wächter, Seume, Hirt etc.).
L’étude de la critique fernowienne portée à l’art et à la culture dans ses œuvres et
contributions, comme par exemple dans ses travaux archéologiques («La statue de Minerve à
Cori», «Les affaires de pillage en Italie» et «Des théâtres amovibles de Kurio»), ainsi que la
thématique de ses rapports journalistiques (dans: Les nouvelles en art et littérature), sans
oublier les très nombreuses critiques littéraires (e. a. contenu dans le Mercure allemand, Le
journal du luxe et des modes et le Journal général littéraire de Jéna) offriraient également un
intérêt particulier. A part cela, une réédition de la correspondance de Fernow et d’un choix de
ses lettres, ainsi qu’une sélection de ses écrits et essais propres à la critique d’art seraient très
souhaitables. Harald Tausch élabore actuellement une telle édition de ses œuvres.
Ainsi pouvons-nous dès maintenant, à l’égard de nos considérations précédentes, justifier le
point de départ de la présente thèse portant sur la vie et l’œuvre de Carl Ludwig Fernow, qui a
21
pour premier but de présenter sous un jour nouveau la genèse de ses idées sur la théorie de
l’art, aussi en examinant les aspects socioculturels et anthropologiques de son temps.
Pour ce qui est des principaux axes de recherche du présent travail de thèse, on tentera, en
première partie, de reconstruire les sources philosophiques ayant nourri sa pensée esthétique
et surtout les écrits de Kant, de Schiller et de Winckelmann, tout en opérant une sélection des
textes les plus importants dont nous estimons qu’ils présentent un intérêt particulier pour la
présente analyse. Ainsi, nous allons nous concentrer, dans une première partie, sur les sources
à l’origine de sa compréhension de l’art (comme la philosophie transcendantale de Kant,
l’idéalisme esthétique de Schiller et le classicisme de Winckelmann), tout en démontrant le
détournement progressif opéré par Fernow de l’unilatéralité ou l’homonomie76 de la pensée
classiciste. Puis, nous nous demanderons dans quelle mesure les monographies d’artistes de
Fernow comportent des thèses sociocritiques, dirigées seulement contre la politique de
formation des académies, mais également contre l’hétéronomie de la production artistique de
son temps. Cet aspect sera envisagé sous la forme d’une comparaison de la monographie
d’Arioste à celles d’Antonio Canova et d’Asmus Jakob Carstens.
A partir d’une analyse discursive de ses écrits sur la théorie de l’art, comme par exemple des
contributions centrales portant sur l’esthétique contenues dans le premier tome des Études
romaines,77 intitulé «Du beau dans l’art», «Du caractéristique» et «De l’enthousiasme de
l’artiste», nous tenterons, en troisième partie, de présenter de manière synthétique les traits
fondamentaux de l’esthétique autonome de Fernow, en prenant en considération des passages
de texte appropriés, afin de rendre justice, de façon cohérente et sous un nouveau jour, à la
valeur propre de ses approches théoriques sur le terrain de l’esthétique.
76
Par le néologisme d’homonomie que nous venons de créer (du grec ὁµο égal/νόµος principe législatif) nous
entendons dans ce contexte généralement toute orientation unilatérale sur un horizon de référence normatif.
77
Carl Ludwig Fernow: Römische Studien, vol. I-II, Éd. Gessner, Zurich, 1806.
22
La thèse classique ou les inspirations de
l’homonomie classiciste:
Fernow dans la continuité et en délimitation avec l’idéal de l’art antique
23
I. 1. Immanuel Kant: «…quelle richesse créatrice d’idées»
Le philosophe qui a probablement façonné le plus la pensée esthétique de Fernow est sans
doute Immanuel Kant.78 Ainsi, nous proposons ici de nous intéresser, dans un premier temps,
à son adaptation des thèses kantiennes afin d’examiner, dans un deuxième temps, dans quelle
mesure on peut décrypter dans celles-ci des influences venant de l’idéalisme allemand. Dans
deux lettres, adressées chacune à son ami et mécène Jens Baggesen79 et à son ancien
professeur Leonhard Reinhold,80 Fernow manifeste son enthousiasme initial pour la
philosophie de Kant, en se disant fasciné par sa «richesse intarissable d’idées», dans laquelle
il croit déceler une «révélation pour l’esthétique», qui, selon ses dires, a pénétré son esprit
avec une «clarté lumineuse»: […] je me réjouis indiciblement de découvrir chaque jour comme le
développement kantien du beau et au fond tout ce qui est contenu dans la Critique de la faculté de juger s’avère
comme étant tellement fructueux, en ce qui concerne l’application sur l’art et le jugement des œuvres d’art et
81
quelle abondance, quelle richesse créatrice d’idées est fondée dans cette nouvelle apparition pour l’esthétique.
Et, plus loin:
[…] toutes mes études de l’art se concentrent sur la réduction des arts plastiques sur des principes
philosophiques, et l’application réciproque de ceux-ci dans le jugement. Je ne puis vous dire comment cela me
réjouit de me laisser convaincre à la fois par l’accord de l’expérience à maints égards avec les principes de base
78
Nous nous concentrons ici principalement sur l’œuvre théorique majeure de Kant, la Critique de la faculté de
juger, première partie, vol. 5, 1790. C’est le professeur Reinhold qui initie Fernow aux thèses de Kant.
79
Jens Immanuel Baggesen rencontre à Weimar et Jéna des personnages littéraires et adeptes de la francmaçonnerie comme Wieland, Schiller, Jacobi, Klopstock, Bode, Voβ et Reinhold (cf.: Le labirinthe ou voyage en
Suisse par l’Allemagne en Suisse, 1789). Dans ce même cercle de la loge de Gotha nommé A la boussole („zum
Kompaβ“), il rencontre aussi Fernow en 1790, qui s’y essaie comme peintre. Ainsi, ce dernier fait le portrait de
Baggesen en compagnie de sa femme Sophie. Cf. Luck, 1984, p. 15: „Fernow malte das junge Ehepaar und
Baggesen, der ihn sofort lieb gewann, schlug ihm vor, gemeinsam eine Reise durch Schweiz nach Italien,
Sizilien und Spanien zu unternehmen.“ Étant donné qu’il n’y plus de place dans le carrosse de Baggesen, Fernow
finance son voyage en faisant de petits travaux qu’il trouve également par l’intermédiaire du Danois. Cf. aussi:
Jens Baggesen und die deutsche Philosophie, Éd. Universitätsverlag, Leipzig, 1914.
80
Voir à ce sujet: „Eine Reihenfolge von Briefen Fernow’s. An Reinhold in Jena und Kiel“, dans: Penelope Taschenbuch für das Jahr 1844, Theodor Hell (Éd.), Éd. Hinrichs, Leipzig, 1844, ps. 313-385.
81
Fernow, lettre adressée à Baggesen du 20 février 1795, cité selon Livia Gerhardt, 1908, p. 77: „[…] es freut
mich unsäglich, täglich zu finden, wie die kantische Entwicklung des Schönen und überhaupt alles, was in seiner
Kritik der Urteilskraft enthalten ist, in der Anwendung auf Kunst und Beurteilung von Kunstwerken so fruchtbar
erscheint, und welche Fülle, welch ein unerschöpflicher Reichtum von Ideen […] in dieser neuen Offenbarung
für die Ästhetik liegt.“
24
a priori issues de la vérité kantienne, comme par l’examen de la justesse de mon essai de calcul […] j’ai
réexaminé [à Rome] la critique du jugement et je puis bien dire que son esprit […] a pénétré le mien avec une
clarté splendide.82
Afin de reconstruire le lien idéel entre Fernow et l’esthétique de Kant, il suffit déjà de jeter un
regard dans l’immense collection des ses œuvres philosophiques, y compris les divers
manuscrits et écrits esthétiques, qui sont pour la majorité sauvegardés dans les archives,
dédiés à Goethe et Schiller. Parmi ces ouvrages de référence figure également une édition
ancienne de l’œuvre de Kant, la Critique de la faculté de la raison pratique,83 datant de 1788
et qui est annotée par Fernow. Cette œuvre nous fournit de nombreux indices sur l’étude
approfondie que Fernow a vouée à la lecture de la philosophie kantienne durant son séjour à
Jéna. C’est par le biais du professeur Reinhold,84 qui détient la chaire de philosophie dans ce
même établissement, que Fernow entre pour la première fois en contact avec les idées
kantiennes, pour lesquelles il s’enthousiasmera sa vie durant. A cela, il doit également sa
réputation comme kantien au sens strict du terme.85 Il faut cependant remettre en question la
thèse selon laquelle on peut considérer Fernow, comme certains lui en firent reproche, comme
«vulgarisateur des idées kantiennes»,86 «réciteur de Kant»87 ou même comme «un kantien
82
Fernow, dans une lettre à Reinhold datant du 18 juillet 1796, à Johanna Schopenhauer, voir référence ailleurs,
ps. 251 et 258.
83
Cette première édition de la Critique de la raison pratique de 1788, consultée et annotée par Fernow, est
actuellement conservée à la bibliothèque Anna Amalia à Weimar.
84
Fernow est considérablement influencé par l’interprétation que Reinhold fait des thèses kantiennes, dont il a
probablement pris connaissance par le biais de son ancien professeur Walther (l’ami de Reinhold et de Wieland),
avant qu’une rencontre personnelle entre Fernow et Reinhold n’ait vraiment eu lieu pendant son séjour à Jéna
(1803). La correspondance de Fernow témoigne également d’un important échange épistolaire avec Reinhold. Cf. la
lettre de Fernow à Johann Gottlieb Carl Nauwerck datant du 16 novembre 1793, cité d’après Livia Gerhardt, 1908,
p. 29: „Ich habe diesem Manne, dem edelsten, den ich je kannte, unendlich viel zu verdanken; er hat in meinem
Kopfe gewaltig aufgeräumt, und ihm habe ich auch die Wendung meines Schicksals zu verdanken.“ Au sujet de
Reinhold cf. également Ernst Cassirer: Das Erkenntnisproblem in der Philosophie und Wissenschaft der neuesten
Zeit, III, Berlin, 1920, p. 33 ss.
85
Voir le commentaire de Fernow à ce sujet: „Ich bin bei einigen schon als ein Kantianer, d. h. bei ihnen als ein
Mensch, der viele unverständliche Orakelsprüche und Spitzfindigkeiten in sein Kopf gepfropft hat, bekannt.“
Voir: Aus Jens Baggesens Briefwechsel mit Karl Leonhard Reinhold und Friedrich Heinrich Jakobi, partie II,
Leipzig, 1831, p. 376.
86
Voir la remarque de Gerhard von Rumohr au cours d’une table ronde au sujet de Kant, cité selon Atanazy
Raczynski: Die neuere deutsche Kunst, vol. III, 1841: „Fernow hingegen entrückte die Ansichten Carstens […]
indem er sie in die Schulsprache der Kantischen Philosophie (wohl vergeblich) zu übersetzen versuchte.“
87
Voir la remarque critique de Hegel au sujet des lectures de Fernow à Jéna, émise dans une lettre à August
Wilhelm Schlegel du 16 novembre 1803: „[…] man sagt er lese Ihnen Kantische Defini[tionen] ab.“ Cf. à ce
25
abstrait et prêcheur populaire»,88 tout comme la question de savoir si Fernow a vraiment mal
compris le modèle, à la fois eschatologique et apocalyptique,89 de l’histoire,90 tel que Kant le
conçoit sur la «fin de toutes les choses»,91 quand il tente de fonder de manière théorique une
doctrine sur l’art qui se veut atemporel.92 Il reste à souligner que Fernow envisage
principalement «toute loi originaire de la conscience sur laquelle repose toute conception
esthétique, toute notion de contenu de la nature ou de l’art»,93 en se servant des «principes
kantiens […] pour saisir plus profondément qu’avant le contenu atemporel et éternel de l’art
ancien et nouveau.»94 Il est vrai, dans un premier temps, que Fernow s’inspire essentiellement
des conceptions et des modèles de pensée kantiens. Or, dans un deuxième temps, on observe
chez lui aussi un certain degré d’autonomie idéelle, car il quitte par moments délibérément le
terrain kantien, afin de fonder sa propre théorie esthétique dite idéale,95 qui se veut à la fois
normative et autonome, mais qui n’a pas trouvé l’aboutissement concret dans une «œuvre
sujet également une lettre d’Alexander von Humboldt adressée à Goethe datant du 28 janvier 1803, dans laquelle
il parle de ses points de vue «bornés» („beschränkten Ansichten“). Voir H. Schmidt: Ein Jahrhundert römischen
Lebens. Von Winckelmanns Romfahrt bis zum Sturz der weltlichen Papstherrschaft, Leipzig, 1904, p. 44.
88
Cf. lettre de Georg Zoëga adressée à Friederike Brun, 7. Prairial a. 6. [25 mai 1798], dans Welcker 1913, vol.
2, p. 115 s.
89
Mike Sandbothe: „Von der Grundverfassung des Daseins zur Vielfalt der Zeit-Sprachspiele“, paru dans:
Heidegger-Handbuch, Dieter Thomä (Éd.), Éd. Metzler, Stuttgart, 2003, ps. 87-92.
90
Manfred Riedel: „Geschichte als Aufklärung. Kants Geschichtsphilosophie und die Grundlagenkrise der
Historiographie“, dans: Neue Rundschau, n° 84, (1973), ps. 289-308.
91
Immanuel Kant: „Das Ende aller Dinge“, dans: Kants sämmtliche kleine Schriften. Nach der Zeitfolge
geordnet, vol. 3, Königsberg et Leipzig, 1797, p. 507: „Für ein Wesen, welches sich seines Daseyns und der
Gröβe desselben (als Dauer) nur in der Zeit bewusst werden kann […] Denken aber ein Reflektiren enthält,
welches selbst nur in der Zeit geschehen kann.“
92
HE, p. 83: „Fernows Kunstlehre macht den Versuch allgemeine und notwendige Gesetze für die Kunst
aufzustellen, die für alle Zeiten gültig sind, und nach denen alle einzelnen Kunsterscheinungen gerichtet werden
können.“
93
Ernst Cassirer: Kants Leben und Lehre, Berlin, 1921, ici p. 330: „[…] ursprüngliche[n] Gesetzlichkeit des
Bewusstseins, auf welcher jedwede ästhetische Auffassung, jedwede Bezeichnung eines Inhalts der Natur oder
der Kunst [beruht].“
94
HE, p. 82: „[…] die kantischen Prinzipien […] nur Hilfsmittel [sind], den überzeitlichen, ewigen Gehalt der
alten und neuen Kunst tiefer, als es bisher möglich war zu erfassen.“
95
La notion d‘‘ idéalique’ est un élément de discours fréquemment employé dans les écrits esthétiques de
Fernow, afin de décrire un art, qu’il oriente généralement à l’idéal de beauté de l’art caractéristique, Cf. RS, II, p.
XII, au sujet du colorit: „Die bisherige Vieldeutigkeit der Ausdrücke ideal und idealisch deren wahrer Sin, bei
dem mechanischem Treiben der Kunst, und bei dem steten Schwanken derselben zwischen geistloser
Nachahmung des Wirklichen und gesezloser Willkür, fast ganz verloren gegangen war, hat auch in diesem Theile
der Kunst die grösten Misbräuche veranlast und begünstigt, die nur durch eine gründliche Einsicht in das Wesen
des Kolorits, und die Zurückführung des Studiums auf karakteristische Wahrheit in Ton und Materie, getilgt
werden.“
26
accomplie»,96 dont la théorie esthétique aurait pu s’insérer dans le cadre d’un système
philosophique clos aux interconnexions cohérentes et logiques. Ceci a pour conséquence
qu’on est amené à reconstruire la genèse de ses théories sur l’art à partir de ses essais
esthétiques, et à les mettre en perspective à l’égard d’éventuelles influences liées au contexte
historique. Tout d’abord, on remarquera dans ce contexte que, malgré l’hétérogénéité idéelle
qui s’offre à première vue, on peut néanmoins distinguer une certaine homogénéité dans la
pensée à ce sujet. L’une des constantes est sans doute la «pénétration idéelle»97 de sa pensée
esthétique par les principes kantiens, qui peut être décrite moins comme un «système d’une
évolution idéelle»,98 mais plutôt comme une systématisation sous la forme d’une libre
adaptation. Comme Irmgard Fernow le constate, il se sert ainsi à maintes reprises des
«terminologies kantiennes»99 et des notions similaires, ce qui, par moments, peut intriguer le
lecteur. De même, Fernow suit toujours, dans son argumentation philosophique, le même
triple pas argumentatif, c’est-à-dire une organisation triadique dans le traité philosophique
que Kant privilégie également comme procédé synthétique avant l’analytique.100 En outre,
l’organisation idéelle de la conception fernowienne de l’art correspond tout à fait aux trois
96
Irmgard Fernow, 1936, p. 14: „Von Fernows Ästhetik gilt im besonderen, was über sein Werk im allgemeinen
gesagt wurde: er hat sie der Nachwelt nicht zu einem System verdichtet hinterlassen können.“
97
Cf. Fernow, lettre à Reinhold datée 18 juillet 1796, citée selon Johanna Schopenhauer, 1810, p. 251 et p. 258.
98
Cf. HE, p. 79: „Fernows Werk ist weniger die fortschreitende Entfaltung einer ihm eigenen, zunächst nur
keimhaft vorhandenen Idee, sondern vielmehr die bewusste Anwendung einiger schon anfänglich feststehender,
von ihm als richtig erkannter philosophischer Prinzipien auf ein bestimmtes geistiges Gebiet und seine
Durchdringung mit diesen Prinzipien. Seine Entwicklung (wenn man überhaupt von ihr sprechen will) ist mehr
eine stoffliche Bereicherung als ein gedankliches Fortschreiten.“
99
Ibid., IF, p. 15: „Die Tatsache dieses Durchdrungenseins von kantischem Geist wird schon beim einfachen
Lesen seiner Schriften evident; nicht allein dass er sich ständig kantischer Terminologie bedient, vermittelt er
bisweilen - sich selbst scheinbar nicht unbewuβt - sätzeweis seine Ansichten in kantischen Wortlaut, so dass man
sich fast an das Verhältnis Chatterton’s zu Chaucer erinnert fühlt.“
100
Kant écrit dans la préface de la Critik der Urtheilskraft (voir réf. ailleurs): „Man hat es bedenklich gefunden,
dass meine Einteilungen in der reinen Philosophie fast immer dreiteilig ausfallen. Das liegt aber in der Natur der
Sache. Soll eine Einteilung a priori geschehen, so wird sie entweder analytisch sein, nach dem Satze des
Widerspruchs; und da ist sie jederzeit zweiteilig (quodlibet ens est aut A aut non A). Oder sie ist synthetisch;
und, wenn sie in diesem Falle aus Begriffen a priori (nicht, wie in der Mathematik, aus der a priori dem Begriffe
korrespondierenden Anschauung) soll geführt werden, wo muβ, nach demjenigen, was zu der synthetischen
Einheit überhaupt erforderlich ist, nämlich 1, Bedingung 2, ein Bedingtes 3, der Begriff, der aus der Vereinigung
des Bedingten mit seiner Bedingung entspringt, die Einteilung notwendig Trichotomie sein.“
27
complexes idéels formant également la clef de voûte théorique de l’esthétique transcendantale
de Kant:101
1. La théorie sur le beau dans l’art,
2. la théorie sur le sublime dans l’art,
3. la théorie sur le génie artistique.
A partir de Kant, Fernow va par la suite sanctionner le modèle de la triplicité esthétique, qui
consiste à subordonner trois buts partiels à une finalité supérieure de l’art:
Idéalité =
beauté + caractère
⇒ Le but final de l’art
Nous allons encore nous intéresser de plus près à l’organisation de ces thématiques complexes
au cours du troisième chapitre du présent travail. Concentrons-nous ici principalement sur
l’origine des idées et conceptions esthétiques de Fernow dans le contexte de la Critique de la
faculté de juger. Comme Irmgard Fernow le souligne, le fait que Fernow sorte la partie
portant sur la philosophie de l’art de son ancrage contextuel de l’œuvre philosophique de
Kant, et la considère de façon isolée comme ‘esthétique’, représente une nouveauté dans le
domaine de l’analyse scientifique.102 La prise de distance consciente qui résulte de cette
restriction thématique vis-à-vis des études traditionnelles sur Kant paraît en revanche comme
une conséquence logique de ses propres ambitions philosophiques, mais qui reste toutefois
ancrée dans le sillage des thèses kantiennes, étant donné que celles-ci comportent encore
beaucoup d’aspects nouveaux103 qu’il voudrait rendre accessible à l’esthétique. Au delà, il lui
101
Ibid.
Cf à ce sujet également IF, p. 18: „Der grundlegende Unterschied zwischen Kant und Fernow ist, daβ dieser wie ja z. B. auch Schiller - die kantische Lehre für das Gebiet der Kunst allein nutzbar gemacht hat - also, von
Kant aus gesehen, eine Beschränkung auf einen kleineren Bereich vorgenommen hat.“
103
Cf. S[amuel] Ersch et J[ohann] [Gottfried] Gruber: Allgemeine Encyclopädie der Wissenschaften und Künste,
I, 43, Leipzig, 1846, p. 169 s.: „Der Einfluβ der Kantischen Philosophie wird auch auf die Bildung des
Geschmackes von schönen Kunstwerken wichtig sein, wenn ihre Grundsätze von kunsterfahrenen Kennern
richtig angewendet werden. - Hier ist noch viel ungebautes Land, soviel auch über Kunst bisher geschrieben ist.“
102
28
importe de «mettre en marche une critique de l’art plus approfondie.»104 Ainsi, il juge comme
«pitoyable et plat»105 la «philosophie scolaire»106 diffusée par des «causeurs d’art
prétentieux»,107 qu’il considère avant tout comme étant homonome. A la différence de ces
esthéticiens à la mode, Fernow cherche à légitimer une nouvelle doctrine de connaissance
selon des critères objectifs, ce qu’il voudrait atteindre concrètement par l’abstraction des
thèses kantiennes. Ainsi, le sentiment de l’art résulte chez Fernow, comme chez Kant, d’une
disposition naturelle de l’esprit humain,108 qui, de ce fait, est subjectif.109 La difficulté, qui se
pose d’emblée à Fernow est donc la quête d’un nouvel horizon de référence objectif, c’est-àdire une base de légitimation se situant hors du subjectif, lui permettant d’objectiver ou de
trouver des normes scientifiques propres au sentiment de l’art. Et nous voilà arrivés au
problème principal de l’esthétique fernowienne. Herbert von Einem a déjà souligné la
difficulté d’une telle entreprise scientifique reposant principalement sur la question de la
légitimation objective d’une esthétique transcendantale. Une question s’impose d’emblée:
Comment peut-on fonder la faculté de juger du sujet contemplant l’objet esthétique, qui, selon
104
Cf. Aus Jens Baggesens Briefwechsel, voir ailleurs, p. 376: „Ich hoffe es dahin zu bringen, daβ wenigstens
eine gründlichere Kunstkritik in Gang komme […].“
105
Ibid., s.: „[…] denn die Begriffe von Kunst, Schönheit usw., die hier, selbst bei den Menschen von denen man
etwas Besseres zu erwarten berechtigt ist, kursieren, sind erbärmlich und seicht. Die Antiquare sind, was das
Wissen, was Belesenheit, Buchgelehrsamkeit und Gedächtnis betrifft, wahre Kolosse; sie haben ganze
Bibliotheken. Zeit- und Namenregister, ich weiβ nicht im Kopf oder im Magen, aber sie sind Zwerge und
Krüppel, sobald sie über irgend etwas raisonniren und nicht bloβ Gelerntes, sondern Gedachtes sagen sollen.“
106
Cf. à ce sujet un autre commentaire de Fernow dans RS, I, p. 310 s.: „Das algemeine Geschwäz über die
Künste, wie es in unseren Ästhetiken gewönlich getrieben wird, hat weder für den Künstler, noch für das
Publikum den geringsten Nutzen, und dient blos, eine Menge seichter und anmaβender Kunstschwäzer zu
bilden, die, mit den eben so leren Formeln ihrer erlernten Schulfilosofie ausgerüstet, sich zu Gesezgebern und
Richtern des Geschmaks aufwerfen, und in der Anwendung ihrer hohlen Ästhetik auf die Kunst selbst die
ungemeintesten Dinge vorbringen, die von der gläubigen Menge als Orakelsprüche aufgenommen und
nachgebetet werden.“
107
Ibid. Voir citation précédente.
108
Kant définit l’esprit comme la faculté de la réprésentation des idées esthétiques comme force d’imagination,
cf. § 49: Von den Vermögen des Gemüts, welche das Genie ausmachen, 192/193, A 190, p. 413: „Geist, in
ästhetischer Bedeutung, heiβt das belebende Prinzip im Gemüte. Dasjenige aber, wodurch dieses Prinzip die
Seele belebt, der Stoff, den es dazu anwendet, ist das, was die Gemütskräfte zweckmäβig in Schwung versetzt, d.
i. ein solches Spiel, welches sich von selbst erhält und selbst die Kräfte dazu stärkt. Nun behaupte ich, dieses
Prinzip sei nichts anders, als das Vermögen der Darstellung ästhetischer Ideen; unter einer ästhetischen Idee
aber verstehe ich diejenige Vorstellung der Einbildungskraft, die viel zu denken veranlaβt […].“
109
Cf. Denis Dumouchel: Kant et la subjectivité esthétique. Esthétique et philosophie avant la Critique de la
faculté de juger, Éd. Vrin, Paris, 1999.
29
Kant, est purement subjective, car elle dépend de la notion de goût, qui est fortement
individuelle et donc variable, puisque propre à chacun, de manière objective? A première vue,
une telle entreprise scientifique apparaît comme une quadrature du cercle. D’après un
commentaire d’Herbert von Einem, il ne serait «ni hasard ni arbitraire que la théorie de l’art
de Fernow a dû être influencée d’une manière décisive par Kant»,110 étant donné qu’au centre
de l’esthétique kantienne on trouve aussi la question à laquelle Fernow s’est consacré de
façon intense, à savoir celle de l’objectivité qui trouve son origine dans le sujet même.111 Pour
résoudre ce problème, qui réside notamment dans la causalité, Kant évoque dans un premier
temps le jugement esthétique du goût d’un principe sur la perception sensualiste,112 qui,
d’après lui, est toujours lié à la volonté d’atteindre un but et la sensation d’une envie ou, au
contraire, d’une désenvie. Celui-ci s’oriente d’abord vers l’intention, et est donc subjectif, car
il obéit exclusivement à la faculté du jugement et du désir humains, et, de ce fait, doit se
distinguer forcément de l’utilité pratique (=objective) de la nature.113 Fernow tente en
revanche d’annihiler cette antinomie existante par la sublimation de l’art comme une «nature
supérieure.»114 Par cette sublimation imaginaire, il accorde à l’art un caractère idéal qui
n’obéit à aucune conceptualité et, de ce fait, s’avère comme étant diamétralement opposé aux
110
HE, p. 81: „kein Zufall und keine Willkür, daß Fernows Kunstlehre entscheidend von Kant bestimmt werden
muβste.“
111
Schiller poursuit dans ses lettres adressées à Johann Gottfried Körner une intention similaire. Cf. aussi le
commentaire de Goethe au propos de l’objectivité scientifique dans: „Versuch über die Vermittlung zwischen
Subjekt und Objekt“, envoyé à Schiller le 17 janvier 1788, publié en 1823, dans les œuvres de Goethe: „Der
Versuch als Vermittler von Objekt und Subjekt“, Hamburger Ausgabe [HA], Munich, 81981, vol. 13 (14), ps. 1020.
112
KU, § 39: „Von der Mittelbarkeit einer Empfindung“, B 153, A 151, p. 386: „Wenn Empfindung, als das
Reale der Wahrnehmung, auf Erkenntnis bezogen wird, so heiβt sie Sinnenempfindung; und das Spezifische
ihrer Qualität lässt sich nur als durchgängig auf gleiche Art mitteilbar vorstellen, wenn man annimmt, daβ
jedermann einen gleichen Sinn mit dem unsrigen habe: dieses lässt sich aber von einer Sinnesempfindung
schlechterdings nicht voraussetzen.“
113
Ibid., VI.: „Von der Verbindung des Gefühls der Lust mit dem Begriffe der Zweckmässigkeit der Natur“, B
XL, A XXXVII, p. 261: „Die Erreichung jeder Absicht ist mit dem Gefühle der Lust verbunden; und, ist die
Bedingung der erstern eine Vorstellung a priori, wie hier ein Prinzip für die reflektierende Urteilskraft
überhaupt, so ist das Gefühl der Lust auch durch einen Grund a priori und für jedermann gültig bestimmt; und
zwar bloβ durch die Beziehung des Objekts auf das Erkenntnisvermögen, ohne dass der Begriff der
Zweckmäβigkeit hier im mindesten auf das Begehrungsvermögen Rücksicht nimmt, und sich also von aller
praktischen Zweckmäβigkeit der Natur gänzlich unterscheidet.“
114
RS, I, p. 319: „Sie [die Kunst] erscheint als eine höhere Natur […].“
30
lois causales de la nature. Ainsi, Fernow élève l’art115 (comme création de l’homme) audessus de la nature, afin de dissoudre cette opposition entre l’art et la nature dans une sorte de
dualisme coexistant. Dans ce contexte, la finalité s’avère être un mot clef par rapport à la
conception fernowienne. Dans une certaine mesure, Fernow présuppose, à la manière de Kant,
un processus créatif à partir de l’opus (œuvre), en faisant la différence entre l’agere (agir) de
la nature d’un côté, et le facere (faire) de l’artiste, de l’autre.116 Or, en parallèle à cela, il part
de la liberté de l’artiste (loin de l’intention de Kant !), car il distingue la productivité, à la
différence du fonctionnement organique de la nature, qu’il ne voit conditionnée ni par la
nécessité, ni par l’arbitraire ou d’autres lois externes.117 De même, on peut envisager la
conception fernowienne de l’artiste tout à fait au sens du Prométhée118 goethéen. Suivant sa
logique, l’artiste ne doit pas imiter le beau naturel, mais plutôt créer le beau dans l’art à partir
de la nature.119 Tandis que Kant rattache le principe exclusivement à l’homme (=genre), à la
différence des animaux (=espèce), Fernow va encore plus loin en opérant une distinction, en
ce qui concerne le caractère, entre l’espèce, le genre et l’individualité.120 Mais, en règle
générale, il définit, conformément à Kant, l’idée du beau comme étant issue d’un amalgame
115
Concernant la relation art-nature chez Fernow, cf. aussi la citation suivante: „Aber das erquickende Gefühl
eines reinen Naturgenusses, der uns für den Augenblick ganz genügt und beseeligt, ist, wie ich meine, wohl auch
soviel werth, als das Namenlose Sehnen und Streben, welches eine Natur im Style und mit den Idealen der Kunst
gegattet, in uns erregt“ (JS, p. 324).
116
Cf. également IF, p. 19. Voir aussi KU, § 43, B 174/175, A 172, p. 401 s.: 1, „K u n s t wird von der N a t u r,
wie Tun (facere) vom Handeln oder Wirken überhaupt (agere), und das Produkt oder die Folge der erstern als
Werk (opus) von der letztern als Wirkung (effectus) unterschieden […] 2, Kunst als Geschicklichkeit des
Menschen wird auch von der Wissenschaft unterschieden (Können vom Wissen) als praktisches vom
theoretischen Vermögen, als Technik von der Theorie […] 3. Wird auch Kunst vom Handwerke unterschieden;
die erste heiβt freie, die andere kann auch Lohnkunst heiβen.“
117
RS, I, p. 303 s.: „[…] die Naturschönheiten […] bringt die Natur in ihrer groβen Werkstatt in unendlicher
Mannigfaltigkeit hervor, zu welchen Zwecken? Ob zu eigenem Wohlgefallen, ob zu unserem? Ob aus
Notwendigkeit, ob aus Willkür? Das wissen wir nicht […] das Kunstschöne [aber] bringt der Mensch nach
vorgestellten Zwecken hervor.“
118
Dans son poème Prométhée, Goethe conçoit le prototype de l’homme en tant qu’artiste-rebelle créateur, qui, à
l’opposition de la sphère divine, joue le rôle de démiurge créateur: «N’était-ce pas toi, cœur sacré et embrasé, qui
as tout achevé par toi-même», cité selon: Johann Wolfgang von Goethe - Gedichte, Bernd Witte (Éd.), Éd.
Reclam, Stuttgart, 1998, p. 43 s.
119
Cf. chapitre au sujet de Carstens.
120
Nous allons revenir à cet aspect au cours de la troisième partie du présent travail.
31
entre l’idée normale et l’idée rationelle.121 Quant à l’homme, il part à l’opposé des
dispositions innées de l’esprit, des soi-disant «sources cognitives originelles»122 qui, d’après
sa conviction, conditionnent les possibilités de connaissance empiriques du sujet. D’où résulte
également chez Kant la séparation entre la connaissance, d’un côté, et le sentiment, de l’autre,
dont il déduit l’exploration d’une «départition des capacités déjà considérées […] de l’esprit
humain.»123 Ces «lois originelles de la conscience» sont en grande partie liées au subjectif. En
l’occurrence, Fernow, en tant qu’historien de l’art, considère l’esthétique avant tout comme
un phénomène historique, et vise donc, pour ce qui est de la légitimation du jugement
esthétique, l’aspect objectif.124 Comme nous avons déjà pu le constater, Fernow fonde l’ordre
des choses non pas sur l’ordre, mais sur le sujet empirique, qui se détache des possibilités de
connaissance de la raison (connaissance = rationalisme = a priori), en obéissant uniquement à
l’horizon émotionnel de l’expérience (sentiment = empirisme = a posteriori), dont il déduit
également la subjectivité du jugement esthétique. Quant à la question de savoir si l’on
parvient à la définition de l’idéal de beauté par une démarche a priori ou empirique,125 il
distingue ainsi, tout à fait dans le sens kantien, l’idée normale (fondée empiriquement) que la
121
KU, § 17, „Vom Ideale der Schönheit“, B 55, A 54/55, p. 315: „Hiezu [sic] [zur Bestimmung des Schönen]
gehören aber zwei Stücke: erstlich die ästhetische Normalidee, welche eine einzelne Anschauung (der
Einbildungskraft) ist, die das Richtmaβ seiner Beurteilung, als eines zu einer besonderen Tierspezies gehörigen
Dinges, vorstellt; zweitens die Vernunftidee, welche die Zwecke der Menschheit, sofern sie nicht sinnlich
vorgestellt werden können, zum Prinzip der Beurteilung einer Gestalt macht, durch welche, als ihre Wirkung in
der Erscheinung sich jene offenbaren.“
122
KU, § 22: „Die Notwendigkeit der allgemeinen Beistimmung, die in einem Geschmacksurteil gedacht wird,
ist eine subjektive Notwendigkeit, die unter der Voraussetzung eines Gemeinsinns als objektiv vorgestellt wird“,
B 66/67, A 65/66, p. 322: „Wie sollten wir wohl a priori eine synthetische Einheit auf die Bahn bringen können,
wären nicht in den ursprünglichen Erkenntnisquellen unseres Gemütes subjektive Gründe solcher Einheit a priori
enthalten, und wären diese subjektiven Bedingungen nicht zugleich objektiv gültig, indem sie die Gründe der
Möglichkeit sind, überhaupt ein Objekt in der Erfahrung zu erkennen.“
123
Cf. Kant „Kritik des Geschmackes“, voir lettre à Reinhold, datée 28 décembre 1787, dans: Kant’s gesammelte
Schriften, cf. référence ailleurs, vol. IV, p. 394: „[…] das die Zergliederung der vorher betrachteten Vermögen
mich im menschlichen Gemüte hatte entdecken lassen, und welches zu bewundern und womöglich zu ergründen
mir noch Stoff genug für den Überrest meines Lebens an die Hand geben wird.“
124
Herbert von Einem définit le dualisme imminent entre Kant et Fernow comme suit: „Kant geht vom
menschlichen Subjekt aus, und die Kunst interessiert ihn nur insofern und insoweit, als sie ein Akt des
menschlichen Bewuβtseins ist. Seine Bemühung gilt der Begründung der Kunst von der subjektiven Seite. Sein
Problem ist das Problem der Möglichkeit der Kunst. Fernow dagegen hat - selbst bei seinen dem Subjektiven
gewidmeten Betrachtungen - doch immer das historische Phänomen der Kunst als einer objektiven Gegebenheit
vor Augen. Sein Interesse ist mehr auf die Wirklichkeit als auf die Möglichkeit der Kunst gerichtet“ (voir HE, p.
82).
125
KU, § B55, A 54/55, p. 314.
32
nature du beau «se développe et s’explique de manière satisfaisante et subjective avant tout
par l’esprit humain»,126 il critique en même temps aussi l’insuffisance de cette approche
explicative, étant donné que celle-ci ignore la cause objective. Mais qu’entend exactement
Fernow par cette «trace objective»?127 Afin de répondre à cette question, il faut avoir recours
au principe sensualiste de Kant sur la perception, qui est basé sur la connaissance de l’objet
par l’homme, suivant lequel la sphère du suprasensible n’est pas saisissable par les
possibilités de la raison et doit donc être fondée de manière empirique, c’est-à-dire
transcendantale (et non pas transcendentale!). La sensation du beau dans l’art reste donc, en
tant qu’acte de la perception sensualiste de la nature de l’objet,128 exclusivement conditionnée
par le principe de l’envie,129 tout en distinguant une perception à la fois subjective et
intéressée130 (=sensation de l’agréable) et celle à la fois objective et désintéressée131
(=sensation du beau). De plus, Kant subdivise le jugement esthétique en quatre moments
(selon la qualité, la quantité, la relation et la modalité),132 afin d’obtenir une définition plus
précise du beau esthétique. Comme Herbert von Einem le constate, ces moments se retrouvent
également dans les idées esthétiques de Fernow,133 dont nous voudrions présenter ici une vue
d’ensemble cohérente. Du premier moment, la qualité, Kant déduit le désintérêt134 du goût du
126
RS, I, p. 293 s.
Ibid., Cf. aussi IF, p. 23: „objektive Spur.“
128
KU, VII: „Von der ästhetischen Vorstellung der Zweckmässigkeit der Natur“, B XLIII, A XLI, p. 263: „Was
an der Vorstellung eines Objekts bloβ subjektiv ist, d. i. ihre Beziehung auf das Subjekt, nicht auf den
Gegenstand ausmacht, ist die ästhetische Beschaffenheit derselben […].“
129
Ibid.: „Dasjenige Subjektive aber an einer Vorstellung, was gar kein Erkenntnisstück werden kann, ist die mit
ihr verbundene Lust oder Unlust.“
130
Cf. KU, § 3: „Das Wohlgefallen am Angenehmen ist mit Interesse verbunden“, B 7, A 7, p. 281: „Angenehm
ist das, was den Sinnen in der Empfindung gefällt.“
131
Ibid., § 2: „Das Wohlgefallen, welches das Geschmacksurteil bestimmt, ist ohne alles Interesse“, B 5/6, A 5/6,
p. 280: „Interesse wird das Wohlgefallen genannt, was wir mit der Vorstellung der Existenz eines Gegenstandes
verbinden.“
132
Voir KU, „Analytik der ästhetischen Urteilskraft“, premier livre, § 1-22, 3-73.
133
HE, p. 86.
134
KU, § 1: „Das Geschmacksurteil ist ästhetisch“, B 17/18, A 17/18, p. 288: „Geschmack ist das
Beurteilungsvermögen eines Gegenstandes oder einer Vorstellungsart durch ein Wohlgefallen, oder Missfallen,
ohne alles Interesse. Der Gegenstand eines solchen Wohlgefallens heiβt schön.“
127
33
deuxième, la quantité, le caractère général de la notion du beau,135 du troisième, la relation,
la conformité de l’objet136 et du quatrième moment, la modalité, le principe du plaisir.137 Dans
le troisième moment du jugement de goût (relation), Kant évoque le principe de la force
imaginative libre,138 qu’il élève par rapport au génie au même rang que la faculté de
connaissance productive,139 et, par rapport au jugement de goût, associe à la sensation d’envie
du sujet contemplant, qui n’est pas logique, mais exclusivement subjective140 et étroitement
liée à un processus cognitif, où les forces d’imagination se retrouvent dans un état de libre
jeu.141 Ce sentiment d’envie ou de désenvie reste cependant fondé empiriquement et donc a
posteriori,142 ce qui est également valable pour le jugement esthétique.143 Chez Fernow, on ne
trouve pas d’autres détails quant au principe d’envie de Kant. En ce qui concerne la force
imaginative, on constate par contre plusieurs parallèles théoriques. Ainsi, Kant subordonne la
libre force imaginative144 à des lois autonomes,145 dont résulte l’impossibilité des lois
objectives par rapport au jugement de goût (raison=normativité). Or, celle-ci ne peut pas être
autonome, car elle n’est pas soumise à des lois subjectives (à partir de la raison = liberté =/
135
Ibid., § 6: „Das Schöne ist das, was ohne Begriffe, als Objekt eines allgemeinen Wohlgefallens vorgestellt
wird“, B 32, A 32, p. 298: „Schön ist das, was ohne Begriff allgemein gefällt.“
136
Ibid.: „Schönheit ist Form der Zweckmäβigkeit eines Gegenstandes, sofern sie, ohne Vorstellung eines
Zwecks an ihm wahrgenommen wird.“
137
Ibid., § 18: „Was die Modalität eines Geschmacksurteils sei“, B 69, A 68, p. 324: „Schön ist, was ohne
Begriff als Gegenstand eines notwendigen Wohlgefallens erkannt wird.“
138
Ibid.
139
KU, § 49: „Von den Vermögen des Gemüts welche das Genie ausmachen“, B (deuxième édition) 194, A
(première édition) 191, p. 414: „Die Einbildungskraft (als produktives Erkenntnisvermögen) ist nämlich sehr
mächtig in Schaffung gleichsam einer andern Natur, aus dem Stoffe, den ihr die wirkliche gibt.“
140
Ibid.
141
KU, § 9: „Untersuchung der Frage: ob im Geschmacksurteile das Gefühl der Lust vor der Beurteilung des
Gegenstandes, oder diese vor jener vorhergehe“, B 27/28, A 27/28, p. 295.
142
Ibid., § 12: „Das Geschmacksurteil beruht auf Gründen a priori“, B 36/37, A 36, p. 301.
143
Ibid.: „Nun ist es auf ähnliche Weise mit der Lust im ästhetischen Urteile bewandt: nur daβ sie hier bloβ
kontemplativ, und ohne ein Interesse am Objekt zu bewirken, im moralischen Urteil hingegen praktisch ist.“
144
KU, „Allgemeine Anmerkung zum ersten Abschnitte der Analytik“, B 69, A 68, p. 324: „Die Notwendigkeit
der Allgemeinen Beistimmung die in einem Geschmacksurteil gedacht wird, ist eine subjektive Notwendigkeit,
die unter der Voraussetzung eines Gemeinsinns als objektiv vorgestellt wird.“
145
Ibid., p. 325: „Allein daβ die Einbildungskraft frei und doch von selbst gesetzmäβig sei, d. i. dass sie eine
Autonomie bei sich führe ist ein Widerspruch. Der Verstand allein gibt das Gesetz.“ Kant en déduit par la suite le
principe de la libre causalité: „Es wird also keine Gesetzmäβigkeit ohne Gesetz, und eine subjektive
Übereinstimmung der Einbildungskraft zum Verstande, ohne eine objektive, da die Vorstellung auf einen
bestimmten Begriff von einem Gegenstande bezogen wird, mit der freien Gesetzmäβigkeit des Verstandes
(welche auch Zweckmäβigkeit ohne Zweck genannt worden) und mit der Eigentümlichkeit eines
Geschmacksurteils allein zusammen bestehen können.“
34
autonomie). Dans la complexité de cette idée réside également le problème de l’opposition
entre art et nature chez Kant. Ainsi, il juge ces deux principes (art/nature) comme
inconciliables, étant donné que l’art, à la différence de la nature, suit les lois de la causalité146
(=nécessité + arbitraire), et, pour cette raison, ne peut pas, comme la morale, être soumis à la
force de jugement réflexif, tandis que la nature de l’art ne peut être saisie que par le jugement
de goût subjectif (résultant de la contemplation + force imaginative), qui, en l’occurrence,
obéit à des lois libres. En revanche, Fernow considère l’imaginatio (de l’artiste)
principalement comme une force à la fois libre et productive et ainsi comme un élément
dynamique de la représentation idéale, qui s’oppose, comme instance autonome, à la causalité
de la nature.147 Par la suite, Kant accorde tout à fait, en ce qui concerne le jugement du goût
(=subjectif), en se démarquant du jugement de connaissance (=logique), possible objectivité
d’une conception empirique, hormis celle reposant sur l’envie ou la désenvie,148 qu’il
réconduit uniquement au sensus communis.149 Pour lui, celui-ci a un caractère général
uniquement subjectif (et donc pas objectif !) et passe ainsi pour une norme idéale, c’est-à-dire
comme un barême général et non pas universel (!).150 Ainsi, Kant conçoit la nécessité
146
Kant modifie le principe de la causalité naturelle (apparence), en ayant recours au principe de liberté (la
raison pure et pratique), c’est-à-dire la possibilité d’une expérience de la sphère de l’intelligible et du substrat
suprasensuel de la nature à partir de l’homme (apparence de l’univers des sens), par laquelle celle-ci se trouve
également ‘causalisée.’ Cf. KU, B LV, A LIII, p. 271.
147
RS, I , p. 307 s. et IF, p. 18: „Keine der Schranken, welche die Natur an der vollkommenen Ausbildung […]
hindern, hindert den Künstler an einer durch denselben veredelten Darstellung seiner Gestalten […] es hängt
von ihm ab, nicht nur in seiner Einbildungskraft ein so vollkommenes Ideal der Menschengestalt
hervorzubringen als er vermag […] sondern auch dasselbe in seinen Werken unter mannigfaltigen Charakteren
ebenso rein und vollkommen wieder darzustellen, wie es seiner Einbildungskraft vorschwebt.“
148
KU, „Allgemeine Anmerkung zum ersten Abschnitte der Analytik“, B 69, A 68, p. 324: „Alle Beziehung der
Vorstellungen, selbst jene der Empfindungen, aber kann objektiv sein (und da bedeutet sie das Reale einer
empirischen Vorstellung); nur nicht der die das Gefühl der Lust und Unlust, wodurch gar nicht ins Objekte
bezeichnet wird, sondern in der das Subjekt, wie es durch die Vorstellung affiziert wird, sich selbst fühlt.“
149
KU, § 20: „Die Bedingung der Notwendigkeit, die ein Geschmacksurteil vorgibt, ist die Idee eines
Gemeinsinnes“, B 65, A 64, p. 321: „Also müssen sie ein subjektives Prinzip haben, welches nur durch Gefühl
und nicht durch Begriffe, doch aber algemeingültig bestimme, was gefalle oder missfalle. Ein solches Prinzip
aber könnte nur als ein G e m e i n s i n angesehen werden; welcher vom gemeinen Verstande, den man
bisweilen auch Gemeinsinn (sensus communis) nennt, wesentlich unterschieden ist: indem letzterer nicht nach
Gefühl, sondern jederzeit nach Begriffen, wiewohl gemeiniglich nur als nach dunkel vorgestellten Prinzipien,
urteilt.“
150
KU, § 22, A 67: „Also ist der Gemeinsinn, von dessen Urteil ich mein Geschmacksurteil hier als ein Beispiel
angebe und weswegen ich ihm exemplarische Gültigkeit beilege, eine bloβe idealische Norm, unter deren
Voraussetzung man ein Urteil, welches mit ihr zusammenstimmte und das in demselben ausgedrückte
35
subjective de la définition, qui conditionne le jugement de goût, en présupposant une norme
générale, hormis le caractère subjectif, dont il déduit par la suite la nature insaisissable du
beau esthétique, qui, selon lui, s’affranchit de toute forme de conceptualité. 151 En
conséquence, il distingue le goût esthétique du goût purement sensuel, tout en concédant la
possibilité d’un principe (non valable objectivement!).152 A partir du sensus communis
présupposé comme étant à la fois général et subjectif, Fernow essaie en revanche de fonder
théoriquement le caractère objectif de la faculté de juger (résultant du bon sens et de la
raison). Le problème auquel il s’intéresse en particulier est alors celui de la recherche d’un
nouvel horizon de référence, loin des systèmes référentiels normatifs qui sont la nature et
l’histoire. La thèse selon laquelle Fernow opère de manière anhistorique153 est justifiée dans
le sens où il ne déduit l’esthétique ni des apparences de la nature, ni des événements
historiques, mais à réfuter dans le sens où il lie le beau dans l’art tout à fait à de la beauté
naturelle (=caractère idéal - mais non pas ART = NATURE!), et, ce faisant, déclare
l’Antiquité, même si c’est sous réserve, comme norme idéal de la production créative. Quant à
cette idée, on constate non seulement le problème de l’historicité, c’est-à-dire un idéal de l’art
anhistorique à partir de l’antiquité (!),154 mais aussi le danger d’un glissement vers le
Wohlgefallen an einem Objekt, für jedermann mit Recht zur Regel machen könnte: weil zwar das Prinzip nur
subjektiv, dennoch aber, für subjektiv-allgemein (eine jedermann notwendige Idee) angenommen, was die
Einhelligkeit verschiedener Urteilenden betrifft, gleich einem objektiven, allgemeine Beistimmung fordern
könnte; wann man nur sicher wäre, darunter richtig subsumiert zu haben.“
151
KU, B 143, A 141, p. 379: „Unter einem Prinzip des Geschmacks würde man einen Grundsatz verstehen,
unter dessen Bedingung man den Begriff eines Gegenstandes subsumieren, und alsdann durch einen Schluβ
herausbringen könnte, daβ er schön sei. Das ist aber schlechterdings unmöglich.“
152
Ibid.: „Wenn Geschmacksurteile (gleich den Erkenntnisurteilen) ein bestimmtes objektives Prinzip hätten, so
würde der, welcher sie nach dem letztern fället, auf unbedingte Notwendigkeit seines Urteils Anspruch machen.
Wären sie ohne alles Prinzip, wie die des bloβen Sinnengeschmacks, so würde man sich gar keine Notwendigkeit
derselben in die Gedanken kommen lassen.“
153
HE, p. 56: „Fernows Vorstellungswelt ist vollkommen unhistorisch“, ainsi que ibid., p. 83: „Fernows
Kunstlehre macht den Versuch, allgemeine und notwendige Gesetze für die Kunst aufzustellen, die für alle
Zeiten gültig sind, und nach denen alle einzelnen Kunsterscheinungen gerichtet werden können.“
154
Le problème de l’histoire chez Fernow est un sujet très controversé. Ainsi, Fernow part, tout comme
Winckelmann du principe selon lequel l’art des Anciens représente une norme esthétique atemporelle (antiquité
éternité). La légitimation d’un principe artistique éternel, qui trouve pourtant son ancrage historique dans
l’Antiquité, n’étant pas le sujet de notre travail et, par conséquent, nous ne nous y attarderons pas.
36
subjectif,155 étant donné que les lois objectives ne sont pas fondées à partir de l’extérieur, mais
à partir de l’intérieur de l’homme. Pour résoudre ce problème, Fernow achève un grand écart
esthétique qui prend comme point de départ la ‘désindividualisation’156 de l’homme. Nous
reviendrons à cet aspect dans le contexte de la conception du caractère esthétique. A part le
terme de ‘caractéristique’, celui d’‘idéal’ constitue un élément discursif récurrent des écrits
esthétiques. En règle générale, Fernow le conçoit comme le principe de la beauté esthétique
sublime, en se référant à la définition de Kant établie par l’idéalité comme «un être adéquat à
l’idée»157 et s’oriente à la fois vers la raison et vers l’utilité,158 et, par rapport à Schiller,
pourrait également s’appliquer à l’homme en tant qu’anthropologicum.159 Fernow part d’une
idée analogue, en acceptant l’idée normale de Doryphore comme règle idéale,160 mais en
prenant en considération le caractère spécifique comme autre critère esthétique.161 A part cela,
la question s’impose à lui de savoir comment définir le beau mathématique, qu’il envisage à
partir de l’analytique de Kant.162 Dans son ouvrage, Kant sépare strictement art et
mathématique, en considérant tout ce qui est «régulier et rigide»163 comme étant dépourvu de
goût, vu qu’il ne contient rien de caractéristique ou de spécifique par rapport à la personne.164
155
HE, p. 83: „Die Gefahr einer solchen Einstellung ist das Abgleiten ins Subjektive.“
Ibid.: „Voraussetzung des Fernowschen Weges ist daher die Zugrundelegung eines Begriffes vom Menschen,
aus dem alle individuellen Züge ausgeschieden sind, eines Menschenbildes von strenger Allgemeingültigkeit und
Notwendigkeit. Das ist, wie wir gesehen haben, bei Fernow auch wirklich der Fall.“
157
KU, § 17: „Vom Ideale der Schönheit“, B 55, A 54/55, p. 314: „Idee bedeutet eigentlich einen
Vernunftbegriff, und Ideal die Vorstellung eines einzelnen als einer Idee adäquaten Wesens.“
158
Ibid.
159
Ibid., s.
160
Ibid.: „Analytik des Schönen“, B 57/58, A 59, p. 317. Cf. au sujet de l’histoire de la réception: Polykleitos, the
Doryphoros and tradition, (Wisconsin studies in classics), Éd. University Press, Wisconsin, 1989.
161
Cf. RS, I, p. 356.
162
KU, „Allgemeine Anmerkung zum ersten Abschitte der Analytik“, B 70, A 69, p. 325: „Nun werden
geometrisch-regelmäβige Gestalten, eine Zirkelfigur, ein Quadrat, ein Würfel u.s.w von Kritikern des
Geschmacks gemeiniglich als die einfachsten und unzweifelhaftesten Beispiele der Schönheit angeführt; und
dennoch werden sie eben darum regelmäβig genannt, weil man sie nicht anders vorstellen kann als so, daβ sie für
bloβe Darstellungen eines bestimmten Begriffs, der jeder Gestalt die Regel vorschreibt (nach der sie allein
möglich ist), angesehen werden.“
163
Ibid., p. 317: „Analytik des Schönen - Allgemeine Anmerkung“, B 72/73, A 71/72, p. 327: „Alles SteifRegelmäβige (was der mathematischen Regelmäβigkeit nahe kommt) hat das Geschmackwidrige an sich: dass es
keine lange Unterhaltung mit der Betrachtung desselben gewährt sondern sofern es nicht ausdrücklich die
Erkenntnis oder einen bestimmten praktischen Zweck zur Absicht hat, lange Weile macht.“
164
Cf. également la note de Kant sur la régularité physiognomique, ibid., B 57/58, A 57, p. 317: „Man wird
finden, dass ein vollkommen regelmäβiges Gesicht, welches der Maler ihm zum Modell zu sitzen bitten möchte,
156
37
La conception de Fernow par rapport au caractère esthétique d’une représentation
mathématique est analogue. Ainsi, il part comme Kant du principe qu’une représentation
adéquate de l’image normale comme «l’idéal d’une utilité extérieure»,165 sous la forme d’une
«figure géométrique sans faille»,166 est pensable; or, en l’occurrence, il trouve que l’idéal
d’une utilité intérieure (=nature) est à priori impossible à représenter. Ce faisant, il n’exclut
pas l’union entre l’art et la régularité mathématique, mais, d’une manière générale, il les
sépare rigoureusement. Dans ce contexte, le parallèle qu’on peut établir entre Fernow et les
thèses pertinentes de Simondon167 et Pierre Francastel,168 dont la logique argumentative du
raisonnement par rapport à l’esthétique à travers la technique est similaire, s’avère frappant.
Un autre point, qui mérite également une certaine attention à l’égard de sa controverse avec
Kant, est la dimension socioculturelle. Quel rôle joue Fernow en tant que médiateur
intellectuel quant à la diffusion de la philosophie kantienne dans l’espace européen?
Ce sont notamment les rédactions philosophiques de Fernow, qui vont susciter l’intérêt de
Madame de Staël,169 dont le salon littéraire peut tout à fait être considéré comme l’emblème
de l’aspiration cosmopolitique à la sociabilité littéraire170 à l’issue du XVIIIème siècle, et ainsi
contribuer par la suite à la diffusion des idées kantiennes en Italie171 comme en France. Cette
gemeiniglich nichts sagt; weil es nichts Charakteristisches enthält, also mehr die Idee der Gattung, als das
Spezifische einer Person ausdrückt.“
165
RS, I, p. 347.
166
Ibid.
167
Cf. à ce sujet Simondon: Du mode d’existence des objets techniques, Éd. Aubier, Paris, 1958, p. 183: «La
réalité esthétique ne peut en effet être dite ni proprement objet ni proprement sujet; certes, il y a une relative
objectivité des éléments de cette réalité; mais la réalité esthétique n’est pas détachée de l’homme et du monde
comme un objet technique […].»
168
Pierre Francastel: Art technique aux XIXe et XXe siècles, (Collection, vol. n° 131), Éd. Denoël, Paris, 1991.
169
Ghislain de Diesbach: Madame de Staël, Éd. Perrin, Paris, 1983, ainsi que Béatrice Didier: Madame de Staël,
Éd. Ellipses, Paris, 1999. De même, il est intéressant de savoir que Mme Staël est issue de la même ligne de
descendance que Susanne von Necker ou Madame Suschen (la marraine et mécène de Fernow durant son enfance
à Blumenhagen), cf. L. Gerhardt, 1908, p. 2. Il est possible que Fernow ait porté cette coïncidence à la
connaissance de Madame de Staël.
170
Wolfgang Adam e. a. (Éd.): Geselligkeit und Bibliothek. Lesekultur im 18. Jahrhundert, (Études de la
Gleimhaus Halberstadt, vol. 4), Éd. Wallstein, Göttingen, 2005. Cf. par ailleurs l’étude de Gerhard Neumann et
Sigrid Weigel (Éd.): Die Lesbarkeit der Kultur. Literaturwissenschaften zwischen Kulturtechnik und
Ethnographie, Éd. Fink, Munich, 2000.
171
IF, III, p. 49: „Die Bedeutung der Kantschülerschaft Fernows für die K u n s t besteht, wie im ersten Teil
dieser Arbeit erhellt wurde, darin, dass Fernow, indem er für die i d e a l i s c h e Kunst plädierte, im Verein mit
Carstens, die später von Thorwaldsen fortgeführte neue Epoche in der Kunst einleitete. Und für die P h i l o s o p
38
dernière lui demande aussi de lui faire parvenir les rédactions en question qu’elle étudie,
probablement avec Benjamin Constant,172 comme les écrits de Schelling.173 Ainsi, il est fort
probable que c’est indirectement par l’intermédiaire de Fernow que les idées de Kant trouvent
également leur entrée dans le cercle illustre de Madame de Staël,174 d’où elles sont
retransmises, grâce à l’imbrication intense des salons littéraires175 à la mode depuis
Diderot.176 Il est curieux que ce même salon de Madame de Staël constitue cette scène
littéraire, où la religion de l’art,177 qui sera par la suite celle du XIXème siecle, trouve sa
véritable origine. Il faut aussi souligner dans ce contexte la participation réelle de Fernow à
ces soirées de discussion au cours desquelles Henry Crabb Robinson,178 Constant179 et Mme
de Stäel vont poser le fondement intellectuel du discours sur l’autonomie esthétique. Mais ce
qui est sûr, c’est qu’une rencontre personnelle entre Constant et Fernow a véritablement eu
lieu le 22 janvier 1804, et à laquelle assista aussi Crabb Robinson, qui fréquentait à cette
époque les conférences de Schelling sur l’esthétique à Jéna. Constant décrit Fernow comme
suit: «[…] professeur à Jéna, dont on dit qu’il est spirituel et érudit.»180 Ce qui est
intéressant, c’est que ce même Robinson est un élève que Fernow, qui lors d’une rencontre
h i e [war es Fernow], der den kantischen Ideen, der kritischen Philosophie, auch in Italien erstmalig den Boden
bereitete.“
172
Le Cahier rouge de Benjamin Constant, Louise Estournelles Constant de Rebecque (Éd), Éd. C. Lévy, Paris,
1907.
173
Fernow cité d’après Livia Gerhardt, 1908, p. 53: „Ich musste ihr [Mme de Staël] versprechen, einige
philosophische Aufsätze, die ich in italienischer Sprache geschrieben habe zu übersenden.“ Cf. ici et par la suite
aussi Tausch, 1998, p. 41.
174
Cf. Julia von Rosen: Kulturtransfer als Diskurstransformation - die Kantische Ästhetik in der Interpretation
Mme de Staëls (Studia Romanica, vol. 120), Éd. Winter, Heidelberg, 2004.
175
Cf. aussi Brunhilde Wehinger: Conversation um 1800. Salonkultur und literarische Autorschaft bei Germaine
de Staël, (Gender Studies Romanistik, vol. 7), Éd. tranvía e. Frey, Berlin, 2002, ainsi que: L'Allemagne et la
France des Lumières. Deutsche und Französische Aufklärung: Mélanges offerts à Jochen Schlobach par ses
élèves et amis, Michel Delon et Jean Mondot (Éd.), Paris, Éd. Honoré Champion, Paris, 2003.
176
Denis Diderot: Salon de peinture de l’Académie royale de peinture et de sculpture (1759-81), Essais sur la
peinture, (1767). Cf. à ce sujet également: Les salons, 3 vol., Seznec et J. Adhémar (Éd.), Paris, 1963.
177
Cf. Bernd Auerochs: Die Entstehung der Kunstreligion, (Palaestra, vol. 323), Éd. Vandenhoeck & Ruprecht,
2006.
178
Hertha Marquardt: Henry Crabb Robinson und seine deutschen Freunde, Brücke zwischen England und
Deutschland im Zeitalter der Romantik, Éd. Vandenhoeck & Ruprecht, 2 vol., Göttingen 1964/1967. A part cela,
il est probable que la conversion de Robinson à Kant est aussi en partie due à l’influence intellectuelle de
Fernow.
179
Cf. note n° 174.
180
Cf. Benjamin Constant: Journaux intimes, Alfred Roulin et Charles Roth (Éd.), Éd. Gallimard, Paris, 1961, p.
58.
39
avec Constant avait fait un exposé sur l’esthétique de Kant, ce qui amène par ailleurs ce
dernier à noter cette remarque dans son Journal intime: «Des idées inouïes. L’art pour l’art.
Sans but. Tout but dénature l’art.»181 Les essais de Fernow au sujet de la philosophie de Kant
livrent ainsi les impulsions intellectuelles qui vont mener par la suite au fondement du
mouvement de l’art pour l’art,182 ce qui peut tout à fait être considéré comme «l’exemple
riche en conséquences du transfert culturel franco-allemand.»183
Vu dans l’ensemble, on peut ainsi constater par rapport à Kant que Fernow formule en partie
quelques-unes de ses thèses sur l’esthétique transcendantale soit de façon identique, soit en les
examinant sous un angle critique ou en les empruntant aux signes inverses, de telle sorte
qu’on peut parler globalement d’une adaptation libre.
Intéressons-nous maintenant dans ce qui suit à la question de savoir dans quel sens on peut
établir, à partir de Kant et en le dépassant, d’autres parallèles intellectuels avec Fernow et les
autres représentants du courant de l’idéalisme allemand. On constate, dans un premier temps,
que les deux vont essayer de colmater cette lacune théorique qui se trouve dans la philosophie
transcendantale de Kant, à savoir le problème de la nature du ‘moi’ créateur. Ainsi, Fichte
prend, comme Fernow, l’‘ego’ artistique comme point d’accroche méthodique de ses
réflexions esthétiques. Ce dernier est productif dans le sens où il se crée, à partir des objets de
sa perception, un monde imaginaire d’objets. Par la suite, on oppose à cet ego autopuissant de
l’artiste un non-ego fictif, et, dans ce contexte, l’opposition entre sujet-objet, similaire au
principe de l’autogenèse, forme le moment de départ idéel d’un processus créateur
181
Ibid. s.: «Idées très ingénieuses. L’art pour l’art, et sans but. Tout but dénature l’art.»
Cf. à ce sujet également Albert Cassagne: La théorie de l’art pour l’art chez les derniers romantiques et les
premiers réalistes, Paris, 1997.
183
Cf. au sujet du développement par la suite du discours sur l’autonomie esthétique: L’art pour l’art: der
Beginn der modernen Kunstdebatte in französischen Quellen der Jahre 1818 bis 1847, Roman Luckscheiter
(Éd.), Éd. Aisthesis, Bielefeld, 2003, p. 9: „Ideengeschichtlich erweist sich das l’art pour l’art also nicht nur als
schillerndes Bindeglied zwischen Aufklärung und Romantik, sondern auch als folgenreiches Exempel des
deutsch-französischen Kulturtransfers, zumal gegen Ende des 19. Jahrhunderts wiederum eine eminente
Rückwirkung der französischen l’art pour l’art-Schule auf die Herausbildung des Aesthetizismus in der
deutschen Literatur zu konstatieren ist“, et ibid. p. 12: „Die eigentlichen Pioniere des l’art pour l’art hieβen
jedoch Moritz, Kant und Schiller.“
182
40
dialectique. Après la suppression de la chose en soi selon Kant, Schelling élève dans sa
philosophie naturelle le moi créateur comme instance régulatrice dont l’activité, incessante et
contradictoire (comparable à une table rase), englobe la totalité du savoir comme l’unique
saississable, et ce faisant, crée un système. Tandis que Fichte considère le moi comme
proprement humain et strictement personnel, Schelling affirme, en l’occurrence, son caractère
général et absolu, tout en subdivisant l’activité artistique en réel (‘inconscient’, c.-à-d. dans
l’état naturel) et idéal (l’état d’esprit conscient), en concevant l’idéal, à côté du réel, comme
étant les mêmes parties constituantes du moi dans sa totalité. Le système de connaissance
schellingien peut par ailleurs être subdivisé en deux périodes temporelles. Dans la première
phase (philosophie=science rationelle), la philosophie est envisagée sous l’angle d’une
instance immanente, c’est-à-dire qui fait partie de l’intrinsèque de la raison, dont les causes
sont nécessaires, et, de ce fait, indispensables. Dans la deuxième phase (philosophie=science
positive), la philosophie est vue au sens d’une instance transcendante, qui se situe au-dessus
de la raison, dont les causes dépendent, à la différence de la causalité naturelle,
principalement du vouloir ou du non-vouloir et sont donc libres et fondées empiriquement, en
tant qu’expérience résultant d’une corrélation entre l’histoire et la révélation. De par cette
déduction de tout être de la nature (natura naturata) de l’absolu (inconscient) comme le
principe réel agissant (natura naturans), Schelling fonde par la suite les lois cosmiques sous
la forme d’un dualisme de la nature positif-négatif, à l’instar d’un perpetuum mobile des
forces d’esprit opposées, qui produisent à la fois la matière (positif, matérialisant), comme la
contemplation (négatif, formalisant). En l’occurrence, Fernow considère cette approche
comme étant trop abstraite et «seulement digeste pour les têtes brillantes» et ainsi, il pense,
dès son arrivée à Jéna, à ramener le système schellingien «dans la sphère de la raison
humaine.»184 De même, il est tout à fait conscient du fait que les défenseurs de Schelling vont
184
JS, p. 318: „Ja noch mehr [will ich], sobald meine Zeit es erlaubt, das Schellingsche System studiren; denn ich
halte es für Pflicht, es zu kennen wenn es mich auch nicht überzeugen sollte. Wenn ich etwas Wahres und Gutes
41
être «peu ravis»185 des thèses kantiennes, ce qui ne l’empêche pas pour autant d’oser quelques
tentatives d’orientations dans le réseau des Schellingiens,186 afin de sélectionner le vrai et le
bon.187 La relation avec son concurrent intellectuel Friedrich Ast188 joue, dans ce contexte,
indubitablement un rôle non-négligeable, ce dont témoigne une lettre de Böttiger. Malgré sa
critique au sujet de la «sagesse surnaturelle» de ces «prophètes de la nouvelle
philosophie»,189 il est toutefois probable que Fernow ait eu pris connaissance de la théorie
esthétique d’Ast déjà avant la rédaction des Études romaines.190 Mais il demeure incertain191
dans quelle mesure il se laisse vraiment inspirer par le système schellingien, étant donné qu’il
reste toujours ferme sur sa position antimétaphysique,192 bien que les deux s’enthousiasment
darin finde, wie ich nicht zweifle, so werde ich Gebrauch davon zu machen wissen, und es in die verständliche
Sphäre des menschlichen Verstandes herabzubringen trachten, damit es den Menschenkindern sammt und
sonders nützlich werden könne. Schellings Philosophie ist nur für sehr gute Köpfe verdaulich, für Schwachköpfe
aber verrückend, benebelt ihnen das Oberstübchen. Aber der Schwindel wird sich schon wieder geben, wenn die
Narrheit vorüber ist. Dann wird die Selbsterkenntnis der Dummheit schon von selbst eintreten.“
185
Au sujet de la relation de Fernow avec les Schellingiens, voir la citation suivante dans une lettre à Böttiger
(datée Jéna, 20 novembre 1803), citée selon JS, p. 318: „Ich weiβ nicht eigentlich, wie das allgemeine Urtheil
oder das pluralistische der Studierenden über meine Vorlesungen ausgefallen ist. Bis jetzt ist darüber noch keine
Stimme zu mir gedrungen, alle Schellingianer werden wohl wenig von mir erbaut seyn, da ich Sachen vortrage,
oder vielmehr bis jetzt vorgetragen habe, die so unendlich tief unter ihrem Horizonte der Region des gesunden
Verstandes liegen. Aber das soll mich nicht irre machen; ich werde meiner Ueberzeugung folgen und dieser auch
ganz; denn selbst da, wo ich mit Kant, dem ich sonst im Ganzen folge, nicht zusammenstimme, verlasse ich ihn.“
D’après le registre des conférences de l’université de Jéna [n° 38, ss. 297-302, (1804)], Fernow fait plusieurs
exposés pendant le semestre d’hiver 1803/04 et celui de l’été de 1803/4 e. a. au sujet de l’archéologie („Von den
vorzüglichsten aus dem Alterthume übrig gebliebenen Statuen“) et de l’esthétique („Ästhetik“ comme
„Geschichte der Baukunst, Bildhauerkunst und Mahlerey der Alten“). Également parus dans: Intelligenzblatt der
Jenaischen Allgemeinen Literatur-Zeitung, n° 195 (1803), paragraphes 1593-1597.
186
Cf. à ce sujet aussi l’article de Johannes Grave: Weimarer Versatzstücke in Carl Ludwig Fernows ‘Römischen
Studien’ - Zu Fernows Orientierungsversuchen im Geflecht von Hirt, Goethe, Schiller und den ‘Schellingianern’,
KAW, ps. 82-97.
187
Cf. lettre à Böttiger, op. cit.
188
Friedrich Ast: System der Kunstlehre oder Lehr- und Handbuch der Aesthetik zu Vorlesungen und zum
Privatgebrauche entworfen, Éd. Hinrichs, Leipzig, 1805. Dans la bibliothèque de Fernow se trouvait un
exemplaire de cette édition, dans laquelle Ast résume la doctrine schellingienne à partir des conférences tenues
durant le semestre d’hiver 1802/03 et 1804/05.
189
Voir la lettre de Fernow adressée à Böttiger, datée 4 août 1805, citée d’après JS, p. 349.
190
VRW, p. 87.
191
Cf. JS, p. 319: „[Ich habe] ‘nichts Neues’ in der ‘Schellingschen Lehre’ gefunden, daβ man in einer
eigentlichen Unrichtigkeit geziehen hätte. Mit einem Worte, was ich jetzt noch nicht davon weiβ, will ich, sobald
ich kann, kennen lernen und Alles zu meinem Nutzen und Gebrauch treulich anwenden.“
192
On constate des analogies entre Fernow et Schelling surtout par rapport à la comparaison quant aux arts
plastiques, l’importance historique de Michel-Ange, la notion de l’imitation de la nature, ainsi que
l’interprétation de la doctrine classique d’electio. En ce qui concerne ‘l’artiste véritable’, leurs points de vue
divergent, ce qui est surtout déductible du point anti-métaphysique de Fernow.
42
de la même façon pour Kant193 et, par la suite, fréquentent les mêmes cercles intellectuels à
Jéna. De même, la rencontre suggérée par Schiller entre «Hegel et Fernow»194 n’a
vraisemblablement jamais eu lieu. Par ailleurs, il s’est avéré que Fernow connaissait la
dialectique195 de Hegel déjà avant la publication de la Phénoménologie de l’esprit,196 étant
donné qu’il conçoit, encore avant lui, un modèle dialectique197 du paragone,198 qui évalue de
manière critique la production de l’art de son temps. Ayons ici également présent à l’esprit le
modèle de l’histoire selon Hegel, qui s’applique également au domaine de l’esthétique, au
sens de l’avènement, du développement et de la décadence des arts au sein d’une culture.
Suivant la logique hégélienne, l’ère classique incarne l’image199 d’un idéal disparu
(thèse=normatif), tout au contraire de l’époque classiciste, qui introduit une phase diminutive
de la production artistique (antithèse = a-normatif), tandis que l’âge romantique représente
une floraison de l’art (synthèse = normatif + a-normatif). Si l’on essayait maintenant d’insérer
la conception historique de l’art fernowienne, à partir de Hegel, dans la logique d’un système
193
Voir lettre de Schiller à Körner, datée 3 mars 1791 et redigée à Marbach, citée selon Helmut Koopmann
„Kleine Schriften nach der Begegnung mit Kant“, in Schiller-Handbuch, Éd. Kröner, Stuttgart, 1998, ps. 575585.
194
Schiller suggère cela dans une lettre adressée à Goethe, datant du 30 novembre 1803, dans: Briefwechsel
zwischen Schiller und Goethe, Emil Staiger (Éd.), Francfort/M., 1977, p. 105 s. Dans le journal de Goethe, on
trouve sous la date 26. 11. 1803 une note correspondante, qui témoigne d’une rencontre réelle: „Dr. Hegel, Prof.
Schelver, Hofr. Stark, Prof. Fernow.“ Voir Goethes Tagebücher, Weimarer Ausgabe [WA], III, 3, ps. 18011808. Le résultat de cette rencontre au cas où elle aurait vraiment eu lieu n’est malheureusement transmise nulle
part.
195
Suivant l’approche dialectique, la logique fournit les bases théoriques, tandis que la philosophie de nature
évalue les données scientifiques (bases physiques, chimiques et biologiques), et l’esprit la sphère socio-humaine
(surtout la politique et l’histoire du monde).
196
Dans la bibliothèque de Fernow, on trouve également une édition de l’ouvrage de Hegel (System der
Wissenschaft/ vol. 3, Phänomenologie des Geistes, Bamberg/Wurzbourg, 1807), ainsi que celui au sujet de
Fichte (Differenz des Fichte’schen und Hegel’schen Systems der Philosophie, Jéna, 1801). Cf. à ce sujet
également: Differenz des Fichteschen und Schellingschen Systems der Philosophie, Marcel Méry (Éd.), Éd.
Ophyrys, Paris, 1964.
197
[Hegel:] Ästhetik, Friedrich Bassenge (Éd.), 2 vol., Francfort/M., voir l’essai introductif de George Lucács, p.
11: „Hegels Ästhetik bedeutet auf dem Gebiete der Kunstphilosophie den Gipfelpunkt des bürgerlichen
Denkens, der fortschrittlich bürgerlichen Traditionen […] sein tiefer und feiner Sinn für die Eigenthümlichkeiten
und Widersprüche der historischen Entwicklung, die dialektischen Verknüpfung der historischen Probleme mit
den theoretischen und systematischen Fragen der allgemein objektiven Gesetzmäßigkeiten erkennbares Ganzes
zu bilden.“
198
Otto Pöggeler: Die Frage nach der Kunst, Éd. Alber, Fribourg/Munich, 1984. Pöggeler part d’un échange
intellectuel à la fois réciproque et très riche, et atteste à Fernow par ailleurs une «surprenante parenté avec
Hegel» („überraschende Hegel-nähe“/ ibid., p. 178).
199
Harald Tausch: „Literaturtheorien des Klassizismus“, dans: Metzlers Literaturlexikon - Literatur- und
Kulturtheorie, Ansgar Nünning (Éd.), Stuttgart, 1998, ps. 261-264.
43
dialectique, on parviendrait peut-être au schéma suivant, qui met au clair les différents points
de départs théoriques:200
Hegel
thèse
art classique/symbolisme
antithèse
classicisme
synthèse
romantisme
architecture
sculpture
musique, peinture, poésie
Fernow
thèse
ère classique
antithèse
romantisme
synthèse
esthétique autonome
sculpture
musique, peinture, poésie
arts plastiques
Comme il ressort nettement de la juxtaposition ci-dessus, les points de vue de Hegel et de
Fernow s’avèrent généralement comme étant diamétralement opposés. Un lien entre les deux
approches de systèmes pourrait pourtant être établi à travers la définition du beau dans l’art
comme amalgame d’idée et d’idéal,201 traduisant également les convictions esthétiques de
Fernow, et dans ce contexte, l’esthétique idéale de Schiller offrirait «un point de fuite de
perspective commun»,202 ce qui sera le sujet du prochain chapitre.
200
Nous avons ici recours au schéma de Daniel Lagoutte comme modèle idéel de dans: Introduction à l’histoire
de l’art, Éd. Hachette, Paris, 1997, p. 122.
201
Cf. Le traité de Hegel Die Idee des Kunstschönen oder das Ideal, op. cit.: „Die Idee des Kunstschönen aber ist
die Idee mit der näheren Bestimmung, wesentlich individuelle Wirklichkeit zu sein, sowie eine individuelle
Gestaltung der Wirklichkeit mit der Bestimmung in sich wesentlich die Idee erscheinen zu lassen […] So gefaßt
ist die Idee als mit ihrem Begriff gemäß gestaltete Wirklichkeit das Ideal.“
202
S. M. Schneider, VRW, p. 53: „[…] Schillers ästhetische Theorie wäre demzufolge das notwendige
Bindeglied zwischen der transzendentalen, rein an Subjektvermögen interessierten Ästhetik der ‚Kritik der
Urteilskraft’ und einer objektiven Kunstlehre Fernows, welche die Kantischen Dichotomien überwindend zu
einer Synthese von Stoff und Form gelangte und diese Objektivierung zu einer systematischen und normativklassizistischen Gattungsästhetik ausbaute. Der perspektivische Fluchtpunkt dieser Triade Kant, Schiller, Fernow
wäre dann Hegel, der in seiner Ästhetik Schiller das Verdienst zuschreibt ‚die Kantische Subjektivität und
Abstraktion des Denkens durchbrochen und den Versuch gewagt zu haben, über die sie hinaus die Einheit und
Versöhnung denkend als das Wahre zu fassen und künstlerisch zu verwirklichen’.“ Voir la citation de Hegel
dans: Werke, Eva Moldenhauer et Markus Michel (Éd.), 13 vol., Vorlesungen über Ästhetik, ici: vol. 1,
Francfort/M., 1973, p. 89.
44
I. 2. Friedrich Schiller: «…s’élancer vers des sphères supérieures»
Si nous avons, au chapitre précédent, vu de plus près le lien entre Fernow et Kant, surtout par
rapport à l’idéalisme allemand, nous voudrions maintenant, à partir des observations que nous
avons faites jusqu’ici, établir le parallèle idéel avec Schiller. Dans un premier temps, on
constate que les deux hommes se sont personnellement rencontrés,203 à deux moments
différents de leur vie: entre 1791 et 1793, lorsque Fernow fait des études de philosophie à
Jéna, et à partir de 1803, quand, de retour d’Italie, il est nommé professeur à l’université de
Jena. Par l’intermédiaire de Goethe, dont l’intérêt pour Fernow a surtout été suscité par le
travail de ce dernier comme rapporteur pour le ‘Mercure allemand’, et, en tant que
cosmopolite,204 s’intéresse surtout à sa collection des grands classiques italiens, Fernow est
nommé bibliothécaire à la cour205 de la duchesse Anna Amalia. Or, cette rencontre littéraire
n’aboutit pas à un échange intellectuel ou à une amitié de longue durée, mais il faut
néanmoins partir de l’hypothèse que leur relation, aussi à cause de leur faible écart d’âge
(quatre années seulement les séparent), est tout à fait harmonieuse, étant donné que Fernow,
suivant sa route en Italie, rend personnellement visite à Schiller à Ludwigslust en 1793. Le
lien idéel à Schiller est au contraire marqué par une relation ambivalente, qui se concrétise par
une oscillation constante entre l’admiration et le refus, surtout en ce qui concerne des
questions philosophiques.206 Au sujet de l’esthétique, on remarque que la philosophie de Kant
est le point commun entre Schiller et Fernow. Vu dans l’ensemble, on a toutefois l’impression
que Fernow est toujours soucieux de ‘rékantiser’ les conceptions schillériennes, qui étaient
203
Cf. ici dans ce qui suit HE, ps. 115-126, voir pour la présente citation p. 115: „Beschränkt sich Fernows
Verhältnis zu Schiller auf den nachhaltigen Einfluβ eines bestimmten Werkes [Kritik der Urteilskraft], so ist
dagegen bei seinem Verhältnis zu Schiller auβer nach dem Einfluβ verschiedener Schriften auch nach der
Einwirkung der Persönlichkeit zu fragen.“
204
Cf. également Klaus Manger: Goethe und die Weltkultur, (Ereignis Weimar-Jena. Kultur um 1800:
Ästhetische Forschungen, vol. 1), Éd. Winter, Heidelberg, 2003.
205
Cf. également à ce sujet l’étude de Fritz Fink: Fernow als höfischer Bibliothekar der Anna Amalia, Éd. Fink,
Weimar, 1934.
206
Ibid.
45
censées s’émanciper de Kant,207 ce qui constitue une contradiction et qui a pour conséquence
ce durcissement du système, empêchant finalement Fernow d’amalgamer les idées de Schiller
et Kant, en les développant sur le plan intellectuel. Mais la question de savoir si Fernow, en
raison de son conservatisme théorique, peut en effet être considéré comme un auteur peu
productif,208 doit pourtant être mise en doute. Concentrons-nous avant tout, dans ce contexte,
sur le point de départ initial de Fernow. Dans une lettre adressée à Christoph Martin
Wieland,209 il se montre tout d’abord très critique au sujet du style littéraire de Schiller, qu’il
qualifie de façon peu respectueuse de «baratin de philosophie tarabiscotée.»210 Deux ans plus
tard, dans deux lettres adressées211 chacune à Reinhold et Baggesen, il manifeste cependant
son enthousiasme au sujet des «Idées concernant l’éducation esthétique de l’homme» et «De
la grâce et dignité» publiées dans les Heures.212 Au centre des deux traités est l’idée de la
perfectibilité humaine213 vue dans le contexte de la représentation esthétique idéale, la grâce.
Cette dernière dispose d’une longue tradition, notamment dans la philosophie anglaise. Ainsi,
William Hogarth conçoit, dans son traité Analysis of Beauty,214 la grâce (l’équivalent de
207
Au sujet du lien entre Schiller et Kant, cf. la citation dans une lettre à Jacobi, datant du 29 juillet 1795, Fritz
Jonas (Éd.), IV, p. 200: „Da, wo ich bloβ niederreiβe und gegen andere Lehrmeinungen offensiv verfahre, bin
ich streng kantisch, nur da, wo ich aufbaue, befinde ich mich in Opposition gegen Kant.“ Cf. à ce sujet
également Cathleen Muehleck-Müller: Schönheit und Freiheit. Die Vollendung der Moderne in der Kunst.
Schiller und Kant, Wurzbourg, 1989.
208
HE, p. 106: „[…] daβ Fernow im Grunde eine unschöpferische Natur war.“ Cf. par ailleurs au sujet de la
problématique du connaisseur et de l’amateur l’étude de Andrea Heinz et Stefan Blechschmidt: Dilettantismus
um 1800, (Ereignis Weimar-Jena. Kultur um 1800: Ästhetische Forschungen, vol. 16), Heidelberg, 2007.
209
Christoph Martin Wieland engage Fernow comme rapporteur pour le Mercure allemand pendant son séjour
en Italie. Fernow admire Wieland comme poète de la nation et lui dédie, en témoignage de son admiration, la
monographie d’Arioste (voir deuxième partie du présent travail).
210
Fernow dans sa lettre à Wieland [1795], cf. aussi Wielands Briefwechsel, op. cit.
211
Cf. Livia Gerhardt, 1908, p. 85 s., ainsi que: lettre à Reinhold (Rome, le 18 juillet 1796), dans: Sämmtliche
Schriften von Johanna Schopenhauer, vol. I: Carl Ludwig Fernow’s Leben, deuxième partie, Leipzig, 1830, ps.
18-32; ainsi que: Fernow à Baggesen (Rome, le 15 décembre 1796), dans: Penelope - Taschenbuch für das Jahr
1844, Theodor Hell (Éd.), N. F., 4ème année, Leipzig, 1844, ps. 374-385.
212
Voir „Über die Ästhetische Erziehung des Menschen“, dans: Die Horen. Eine Monatsschrift, vol. I, 1ère année
(1795), 1ère pièce, ps. 7-48; 2ème pièce, ps. 51-94; vol. 2, 1ère année (1795), 6ème pièce, ps. 45-124, „Über das
Naive“, vol. 4, 1ère année, (1795), 11ème pièce, ps. 43-76, ainsi que: „Die sentimentalischen Dichter“, vol. 4, 1ère
année (1795), 12ème pièce, ps. 1-55; vol. 5, 2ème année (1796), ps. 75-122. Cf. également Hans-Heino Ewers: Die
schöne Individualität. Zur Genesis des bürgerlichen Kunstideals, Éd. Metzler, Stuttgart, 1978 [thèse, Univ.
Francfort/M., 1976].
213
Cf. à ce sujet également Ernst Behler: Unendliche Perfektibilität - Europäische Romantik und Französische
Revolution, Éd. Schöningh, Paderborn, 1989.
214
Dorothy George: Hogarth to Cruikshank: Social Change in Graphic Satire, Éd. Viking Press, New Ed, 1987.
46
grace) comme ligne de beauté harmonieuse (linea serpentinata), ce qui sera plus tard discuté
e. a. par Edmund Burke,215 qui s’inspire du sublime. Shaftesbury216 entreprend ensuite la
moralisation de la conception du beau, une approche, qui sera par la suite reprise par Wieland,
Schiller et Fernow. Ce dernier distingue par principe le ‘sensual’ et ‘moral grace’, ce qu’il
cherche à légitimer à partir de la comparaison entre la Vénus Urania (=spiritual love),
incarnant la morale idéale, et celle plutôt ‘laïque’ Vénus Pandémos (=worldly love).217 En
l’occurrence, dans le discours français (la grâce, la désinvolture ou la délicatesse), c’est plutôt
l’aspect mathématique qui est dominant. Tandis que François de La Rochefoucauld218 définit
la grâce en règle générale comme un phénomène insaisissable («Je ne sais quoi») et une
symétrie secrète («symétrie dont on ne connaît pas les règles»), Schiller élargit la notion à
l’échelle éthique et anthropologique, en envisageant toujours la perfection par rapport à
l’homme, en distinguant la beauté, la morale, la raison et la sensualité, et, en analogie, la
grâce, la dignité, le sublime et la volupté. Fernow se trouve surtout en osmose intellectuelle
avec ses thèses au sujet de la nature idéaliste, qu’il compare cependant toujours à la
conception kantienne, en jugeant finalement l’explication schillérienne comme «plus
satisfaisante.»219 Quatre ans plus tard, on trouve dans le magazine d’Egger220 un autre
215
Edmund Burke: A Philosophical Enquiry into the Origin of our Ideas of the Sublime and Beautiful, Londres,
(1757), 17592 [Neuauflage: J. T. Houton (Éd.), Routledge, Londres, 1958].
216
Schiller s’inspire indirectement des thèses de Shaftesbury par l’interprétation que fait Wieland de ces
dernières, en adoptant un point de vue plutôt holistique que gnostique, c’est-à-dire rationnel, ce qui conduit
inévitablement à une distorsion de la notion de kalokagathia chez Shaftesbury, qui - quant à elle - est strictement
stoïcienne. Cf. Frederic Beiser in: Schiller as a philosopher - A Re-examination, Éd. University Press, Oxford,
2005, p. 94: “Once we take into account Wieland’s influence, another mystery resolves itself. We can understand
why Shaftesbury has been so persistently misread as the father of Schiller’s concept of aesthetic education. The
reason is that Wieland himself interpreted Shaftesbury in support of his own ideals, Wieland made Shaftesbury’s
concept of the virtuoso the inspiration for his programme of aesthetic education. It proved to be a seminal
confusion.”
217
Cf. les réflexions de Wieland au sujet de la Venus Anadyomene, p. ex. Simon Richter: “Wieland and the
Phallic Breast”, dans: German Life and Letters, vol. n° 52, édition n° 2, 1999, ps. 136-150.
218
François de La Rochefoucauld: Réflexions ou Sentences et maximes morales, (1664), G. Duplessis, Paris,
5
1678. Cf. par ailleurs Kai-Ulrich Hartwich: Untersuchungen zur Interdependenz von Moralistik und höfischer
Gesellschaft am Beispiel La Rochefoucaulds, (Abhandlungen zur Sprache und Literatur, n° 113), Éd.
Romanistischer Verlag, Bonn, 1997 [thèse, Univ. Cologne, 1996].
219
Fernow à Baggesen, 15 décembre 1796, voir référence ailleurs: „Durch Schillers Briefe und übrigen Aufsätze
in den ‚Horen’ bin ich groβentheils mit ihm auch wegen der in der Schrift über Anmut und Würde in Eintracht
gebracht worden. Ich hoffe, daβ auch Sie […] die Schönheit nun weniger zweideutig ansehen werden als
ehedem, nachdem Schiller die rein idealische Natur auf den erhabensten aller Standpunkte, den der vollendeten
47
passage qui, comme on peut facilement le déceler, fait de toute évidence allusion à la nouvelle
du collectionneur221 que Goethe rédigea en collaboration avec Schiller. En l’occurrence, cette
«fantaisie philosophante» se réfère aux métaphysiciens et idéalistes; il ne reste qu’à deviner
qui peut vraiment correspondre à ce surdoué, qui «vole à grande vitesse sur des ailes
puissantes» et «qui perce l’obscurité avec le rayon d’éclair du génie», c’est-à-dire qui crée
l’événement avec ses théories novatrices quant aux questions esthétiques. Suivant la logique
d’un clavis scientiae,222 on constate indubitablement des similitudes avec le philosophe de la
nouvelle du collectionneur,223 et donc Schiller. Toutefois, il reste difficile de savoir qui se
cache concrètement derrière le nous collectif, qui relève ici plutôt d’un sens rhétorique. A part
cela, on ne peut que soupçonner que Fernow brosse, à travers l’image du sceptique restant,
son autoportrait littéraire: comme celui d’un Dédalus kantien qui reste bien ‘les pieds sur
terre’,224 qui, contrairement à l’‘Icare’ schillérien, évite sagement de tels vols dans les
Menschheit gestellt hat. […] Beim Lichte besehen ist seine Erklärung […] keine andere, als die von Kant
aufgestellte, nur, dass er, was Kant an Besonderem gezeigt hat, am Allgemeinen zeigt. Kants freie
Übereinstimmung der Einbildungskraft mit dem Verstande und Schillers Harmonie der sinnlichen und
vernünftigen Triebe sind im Grunde ein- und dasselbe; und durch beide in einem Punkt zusammentreffende
Erklärungsarten ist der Gegenstand nur um so besser ins Licht gestellt, und besonders die Schönheit der
Gesinnung, wo gewiβ nicht Einbildungskraft und Verstand, sondern Neigung und Pflicht frei zusammenstimmen
müssen - ,befriedigender’ erklärt.“
220
Voir RS, I, „Über das Kunstschöne“ (ps. 291-450), première parution dans le Deutsches Magazin de Egger
(1799): „Wer seinen Flug noch höher richten und auf den Fittichen einer filosofirenden Fantasie, oder einer
fantasirenden Vernunft (in der Sprache der Eingeweihten intellektuelle Anschauung genannt) sich zu den
überirdischen Sfären emporschwingen, und das Urschöne in Gott, oder im Universum aufsuchen, und im
Absoluten erkennen wil, dem wünschen wir eine glükliche Reise, und er sol uns gegrüst seyn, wenn er uns aus
den Regionen des Lichts nicht dunkle Orakelsprüche, sondern klare, heitere, für die Theorie der Kunst und für
die Anwendung fruchtbare, klare Einsichten zurückbringt. Wir wollen ihn hier unten erwarten.“ La notion du
beau originel se réfère apparemment à Schelling.
221
[Johann Wolfgang v. Goethe:] „Der Sammler und die Seinigen“, nouvelle parue dans: Propyläen. Eine
Monatsschrift, (21799), Goethe (Éd.), deuxième pièce, ps. 26-122. Une lettre de Fernow datant du 14 avril 1805
témoigne de son rapport avec Goethe; il parle de son inquiétude «qu’une étoile principale de notre art et du goût
allemand va s’éteindre» vu la maladie de Goethe, mettant sa vie en danger („[ein] Angelstern unserer Kunst und
des teutschen Geschmacks untergeht“/cité d’après JS, p. 343). De même, il mentionne dans ce contexte sa
relation étroite avec Schiller, son «frère de Titane» („Titanenbruder“) avec lequel il vit dans «l’amitié la plus
sincère» („in der genauesten Freundschaft lebt“, ibid.).
222
A partir de la notion de littérature de clef et la relation communicative entre l’auteur et le récepteur
concernant d’un message sous-jacent, cf. l’étude de Gertrud Maria Rösch: Clavis Scientiae. Studien zum
Verhältnis von Faktizität und Fiktionalität am Fall der Schlüsselliteratur, Éd. Niemeyer, Tübingen, 2004.
223
Denise Blondeau: „Goethes Novelle Der Sammler und die Seinigen als ‚doppelte Ästhetik’“, in: Klassiken
Klassizismen, Klassizität, Sektion 21, Lang, Francfort/M., ps. 19-24. Cf. pour les citations suivantes note n° 211
ebd.
224
Voir note ci-dessus.
48
‘sphères’ de l’abstraction. Intéressons-nous davantage, dans ce contexte, au point de départ
schillérien, à savoir le point de vue idéaliste.225
On peut d’emblée déceler trois tendances basiques: 1. L’aspect scientifique226 2. L’aspect
(socio-)politique227 et 3. L’aspect (esthético-) philosophique.228 Cette différenciation est
également importante par rapport à la conception esthétique de Fernow. Concernant la
première tendance, il faut partir du principe que l’anticonformisme intellectuel229 de Schiller
et sa position initialement prorévolutionnaire,230 traduisent également en partie les
convictions (cosmo-)politiques’231 de Fernow. A l’égard de la politisation des arts sous la
forme d’une mission éthique, on constate cependant une divergence d’esprit. Tandis que
Schiller est toujours soucieux de subordonner celle-ci à des fins collectives au sens d’un
programme éducatif,232 Fernow, quant à lui, reste plutôt sceptique. Considérons maintenant de
plus près les deux points de départ. Schiller essaie de démontrer à partir des considérations
d’ordre historique,233 et par allusion aux conséquences de la Révolution française que le
problème politique ne peut être résolu ni dans une société naturelle ni dans une société divisée
ou artificiellement produite, étant donné que la pulsion et la raison s’y confrontent
225
Berghahn Klaus L.: Ansichten eines Idealisten, Éd. Athenäum, Francfort/M., 1986.
Klaus Manger et Gottfried Willems (Éd.): Schiller im Gespräch der Wissenschaften, (Ereignis Weimar-Jena.
Kultur um 1800: Ästhetische Forschungen, vol. 11), Éd. Winter, Heidelberg, 2005.
227
Ernst Cassirer: „Die Methodik des Idealismus in Schillers philosophischen Schriften“, in: Idee und Gestalt,
Berlin 1921, ainsi que Klaus Berghahn: Ästhetik und Politik im Werk Schillers, (Monatshefte, vol. 66), Éd. Lang,
Francfort/M., 1974, ps. 401-421.
228
Lukács Georg: „Zur Ästhetik Schillers“, in: Beiträge zur Geschichte der Ästhetik, Berlin, 1954, ps. 11-96,
ainsi que Kerry Stanley: Schiller’s Writings on Aeshetics, Éd. University Press, Manchester, 1961.
229
Voir l’article de Roland Krebs: «Le jeune Schiller face au matérialisme français», dans: Revue d’études
germaniques internationale, n° 22, 2004, ps. 25-42.
230
Ibid. Jean Mondot: «Schiller et la Révolution française - D’un silence, l’autre», ps. 87-102.
231
Cf. Ulrich Floss: Kunst und Mensch in den ästhetischen Schriften Friedrich Schillers. Versuch einer
kritischen Interpretation, Cologne/Vienne, 1989, ainsi que Teresa R. Cadete: Schillers Ästhetik als
Synchronisierung seiner anthropologischen und historischen Erkenntnisse, (Weimarer Beiträge), cahier n° 6,
Weimar, 1991, ps. 839-852.
232
Entre 1795 et 1805 Schiller s’intéressa surtout, en dehors de l’écriture de drames (Don Carlos), à la rédaction
d’écrits théoriques («De l’éducation esthétique de l’homme», «De la poésie naïve et sentimentale»), qui sont
généralement attribués au classicisme weimarien. Schiller préconise, comme programme dirigé contre la
révolution et en se délimitant de la politique actuelle, non seulement la création pacifique d’un état idéal, mais
également l’éducation esthétique de l’homme, dont la raison et la sensualité forment une corrélation
harmonieuse. Cf. Rüdiger Safranski: Friedrich Schiller oder die Erfindung des deutschen Idealismus, Éd.
Hanser, Munich, 2004.
233
Cf. Thomas Prüfer: Die Bildung der Geschichte. Friedrich Schiller und die Anfänge der modernen
Geschichtswissenschaft (Geschichtskultur, vol. 24), Éd. Böhlau, Cologne/Weimar/Vienne, 2002.
226
49
réciproquement. Comme alternative à cet état de nature ou état de nécessité, Schiller conçoit
ainsi un état de raison ou état idéal, «comme c’est la beauté par laquelle on accède à la
liberté.»234 Suivant cette logique, l’art prend la place d’un élément consolidant qui dépasse les
divisions sociales, et qui peut donc être employé comme catalyseur afin de réaliser la société
idéale, à l’exemple de la polis grecque.235 La dimension utopique de cette approche est
manifeste.236 Sous l’impression des effets violents de la Révolution française, Schiller associe
le présent à une dégradation des mœurs et une culture appauvrie, tandis qu’il voit dans Les
Dieux de la Grèce237 l’Antiquité comme l’exemple par excellence d’une société morale
hautement civilisée où les arts fleurissent, qui ressent naturellement, à l’opposé de celle qui
ne ressent que le naturel.238 Pour cette raison, son utopie sociale vise à mettre «de manière
rationnelle une Grèce» au monde.239 Fernow défend un idéal antique similaire, quoique
modéré, qui conçoit l’art moins comme un don naturel, que comme «le produit d’une culture
nationale.»240 Dans ce contexte, il n’exclut pas la possibilité d’un retour à une époque
234
Voir: Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme, Robert Leroux (Éd.), Éd. Aubier, 1992 (dans ce qui suit
raccourci SBE), 2ème lettre, p. 90: „Dem Griechen ist die Natur nie bloβ Natur; darum darf er auch nicht erröten,
sie zu ehren; ihm ist die Vernunft niemals bloβ Vernunft: darum darf er auch nicht zittern, unter ihren Maβstab zu
treten. Natur und Sittlichkeit, Materie und Geist, Erde und Himmel flieβen wunderbar schön in seinen
Dichtungen zusammen.“
235
SBE, lettre n° 10, p. 163: „Man beruft sich, zuversichtlich genug, auf das Beispiel der gesittesten aller
Nationen des Altertums, bei welcher das Schönheitsgefühl zugleich seine höchste Entwicklung erreichte, und auf
das entgegengesetzte Beispiel jener teils wilden, teils barbarischen Völker, die ihre Unempfindlichkeit für das
Schöne mit einem rohen oder doch austeren Charakter büssen.“
236
Cf. Walter Hinderer: „Utopische Elemente in Schillers ästhetischer Anthropologie“, dans: Literarische
Utopie-Entwürfe, Hiltrud Gnüg (Éd.), Francfort/M., 1981, ps. 173-186, ainsi que Klaus L. Berghahn:
„Ästhetische Reflexion als Utopie des Ästhetischen. Am Beispiel Schillers“, dans: Utopieforschung.
Interdisziplinäre Studien zur neuzeitlichen Utopie, (Éd.) Voβkamp, vol. 3, Éd. Metzler, Stuttgart, 1982, ps. 146171.
237
Voir l’hymne panégyrique de Schiller Die Götter Griechenlandes, (1788): „Da ihr noch die schöne Welt
regieret, an der Freude leichtem Gängelband selige Geschlechter noch geführet, schöne Wesen aus dem
Fabelland! Ach, da euer Wonnedienst noch glänzte, wie ganz anders, anders war es da! Da man deine Tempel
noch bekränzte, Venus Amathusia!“, cité selon [Friedrich Schiller:] Sämtliche Gedichte, Éd. Insel, Francfort/M.,
1991, ps. 190-194.
238
Voir: „Über naive und sentimentalische Dichtung“, dans: Schillers Werke, Nationalausgabe [NA], vol. 20,
Benno v. Wiese (Éd.), (1962), p. 431. Cf. à ce sujet Bernhard Fischer: „Goethes Klassizismus und Schillers
Poetologie der Moderne: Über naive und sentimentalische Dichtung“, in: Zeitschrift für deutsche Philologie, (n°
113/2), (1994), ps. 225-245: „Sie empfanden natürlich; wir empfinden das natürliche.“
239
Voir la lettre de Schiller à Goethe, écrite le 23 août 1794, dans: Briefwechsel zwischen Schiller und Goethe,
Emil Staiger (Éd.), Francfort/M., 1977, p. 34: „auf rationalem Wege ein Griechenland [zu] gebären.“
240
RS, I, p. 414: „Wir wollen bildende Kunst haben; die Grichen hatten sie wirklich; bei ihnen war sie ein
natürliches Erzeugnis der Nazionalkultur, und ihre ganze Verfassung aufs innigste verwebt: Wann sie das einst
50
florissante de culture, mais, à la différence de Schiller, il est tout à fait conscient de la
problématique d’une telle renaissance intellectuelle. Alors que Fernow, à l’égard du rapport
de l’état grec, insiste sur l’emphase du sentiment, Schiller vise surtout l’aspect socio-critique.
Ainsi, ce même attire l’attention sur le fait que l’histoire offre également suffisamment d’antiexemples quant à l’échec de la ‘symbiose culturelle’ au sens de la corrélation entre la
politique et l’état à l’antique, comme l’illustre par exemple la chute du Saint Empire romain.
Or, on remarque, qu’en règle générale, il établit toujours une relation directe entre l’art et la
politique. Contrairement à cela, Fernow se prononce clairement, malgré les problèmes
d’orientation métaphysique qu’il a au début,241 pour une séparation nette entre les deux
sphères, car selon lui, cela correspond plus à l’utilité idéale de l’art.242 En revanche, en ce qui
concerne la controverse schillérienne, à savoir la problématique du présent et l’esquisse d’un
ordre futur idéal, Fernow s’accorde avec lui principalement sur le point que l’art constitue
«une pulsion esthétique»243 qui peut engendrer une amélioration des conditions.244 Ainsi il
approuve, au moins en principe, la conception schillérienne d’une mission éthique de l’art,
dont il va cependant se distancier par la suite dans le sens où il ne croit pas à l’art comme
moyen servant à l’éducation du genre humain,245 et pour cette raison, il décline strictement
toute sorte d’instrumentalisation de celui-ci. Concentrons-nous alors ici surtout sur l’aspect
esthétique, c’est-à-dire celui qui est propre à la philosophie de l’art. Dans un premier temps,
on constate que Fernow, à l’instar de Schiller, cherche toujours «la notion objective du
wieder bei uns seyn wird, dann werden vielleicht auch wir eine bildende Kunst haben, die ihrem Zwecke
entspricht. Last uns also wenigstens fühlen und richtig erkennen, was wir nicht hervorzubringen vermögen.“
241
Cf. lettre de Fernow à Johann Pohrt datant du 17 décembre 1796, citée selon Harald Tausch KAW, p. 41.
Impressionné par la philosophie de Fichte, Fernow envisage tout à fait la possibilité d’une politisation des arts,
mais qu’il ne conçoit pas en opposition à ces propres idées sur l’autonomie.
242
RS, III, „Über Rafaels Teppiche“, ps. 115-210. Voir pour la présente citation la préface, dédiée «Au peintre
historique Gerhard von Kügelgen de Dresde» („Den Historienmaler Gerhard von Kügelgen in Dresden“): „Du
sahest ein, dass jene jetzt von allen Banden religiöse und politische Zwecken abgelöste, sich selbst überlassene
Malerei ernstlicher als je streben müsse, ihre Selbstständigkeit auf eine bedeutende, würdige dem idealen
Zwecke der Kunst entsprechende Weise zu behaupten […].“
243
SBE, lettre n° 16, p. 342.
244
SBE, lettre n° 9, p. 29: „[…] von allem, was positiv ist, und was menschliche Konventionen einführten [... ]
losgesprochen [ist].“
245
Pierre Grappin (Éd.) [G. E. Lessing:] Erziehung des Menschengeschlechts: Gespräche über Freimaurer, Apel
(Éd.), Kulturverlag, Hambourg, 1948.
51
beau.»246 Par ailleurs, il emprunte de la philosophie kantienne un principe de base: celui de la
«liberté de la force d’imagination», tout en soumettant l’esprit exclusivement au
déterminisme de la sensation humaine. Contrairement à l’abstraction de Kant, Schiller
concrétise ces approches ‘transcendantales’ dans sa doctrine de l’homme comme nature
double,247 sous la forme d’un individu oscillant constamment entre la raison et la sensualité et
n’obéissant qu’à sa nature rationnelle.248 Il y parvient notamment en opérant une distinction
entre la pulsion matérielle (sentiment) d’un côté, et la pulsion formelle (raison) de l’autre, qui
se trouvent toujours en contradiction. A l’opposé du modèle rationnel, Schiller essaie ainsi de
transgresser le dualisme de l’être non pas par l’élévation de l’esprit au-dessus du corps, mais
par l’union entre la ratio et le sensus (chez Schiller l’obligation et le talent), sous la forme
d’une pulsion au jeu (=pulsion formelle + pulsion matérielle).249 Ce faisant, l’unité forme le
principe de base quant à l’accord des sens,250 qui non seulement influence les états d’âme,
mais porte également atteinte à la raison.251 De même, Schiller distingue l’homme rationnel
de l’homme spirituel, et parallèlement à cela, la forme et la matière.252 Un problème principal
qui s’impose ici est celui de la légitimation du beau mouvement par une culture basée sur
l’éthique et l’esthétique. A ce propos, Schiller comme Fernow s’opposent à la conception de
morale rigoureuse de Kant, étant donné qu’il considère la morale et la sensualité comme étant
deux principes inconciliables.253 A l’opposé de Schiller, Fernow est aussi d’avis que c’est
246
Schiller, lettre à Körner, du 21 décembre 1792, Nationalausgabe [NA] 26, p. 170 s.: „Den objectiven Begriff
des Schönen, der sich eo ipso auch zu einem objectiven Grundsatz des Geschmacks qualificirt, und an welchem
Kant verzweifelt, glaube ich gefunden zu haben. Ich werde meine Gedanken darüber ordnen, und in einem
Gespräch Kallias, oder über die Schönheit, auf die kommenden Ostern herausgeben.“
247
AW, p. 102: „Der Mensch unterdrückt die Forderungen seiner sinnlichen Natur […] um sich den höhern
seiner vernünftigen gemäβ zu verhalten; oder er kehrt es um und ordnet den vernünftigen Teil seines Wesens
dem sinnlichen unter und folgt als bloβ dem Stoβe, womit ihn die Naturnotwendigkeit gleich den andern
Erscheinungen forttreibt; oder die Triebe des letztern setzen sich mit den Gesetzen des erstern in Harmonie, und
der Mensch ist einig mit sich selbst.“
248
Ibid.: „Nicht um sie wie eine Last wegzuwerfen oder wie eine grobe Hülle von sich abzustreifen, nein, um sie
aufs innigste mit seinem höheren Selbst zu vereinbaren, ist seiner reinen Geisternatur eine sinnliche beigestellt.“
249
SBE, lettre n° 14, p. 208.
250
SBE, lettre n° 15, p. 214.
251
Ibid.
252
SBE, lettre n° 18, p. 244.
253
KU, § 39, „Von der Schönheit als Symbol der Sittlichkeit“, B 254, A 250/251, p. 461.
52
plutôt une culture sensuelle qui favorise cette première,254 en prenant clairement ses distances
du modèle de l’art schillérien. Celui-ci est à la fois influencé par la doctrine kantienne (ratio)
et rousseauiste255 (‘nature’) mais pourtant émancipé de ces deux systèmes et à vocation
idéale,256 dans le sens où la contemplation esthétique,257 suite à une disposition esthétique de
l’âme,258 devient le point de départ d’une considération morale.
De même, Schiller essaie d’éliminer la différence entre la pulchritudo vaga et la pulchritudo
adhaerens,259 en attribuant néanmoins à Kant le mérite d’avoir séparé la logique de
l’esthétique,260 en ayant séparé la forme du contenu, et, ce faisant, produit l’unité de la forme
et de la matière. Au delà, il applique ce postulat non-logique à l’homme: si Kant parlait
encore du bien moral, Schiller élargit la notion au beau moral (kalokagathie), qu’il voit
uniquement légitimé par le beau mouvement. Après les Lettres de Kallias,261 Schiller ébauche
en conséquence, dans son traité Sur la grâce et la dignité, cette théorie sur la perfection
esthétique,262 d’après laquelle la beauté représente le reflet de l’idéal de liberté dans le monde
du mouvement: «La liberté de l’apparition» présupposée par la «technique dans la liberté».263
254
HE, p. 115 ss.
Jean-Jacques Rousseau: Traité sur l’origine de l’inégalité entre les hommes, [de Moses Mendelssohn avec une
lettre au Monsieur le magistre Lessing et enrichie d’une lettre de Voltaire à son auteur], Éd. C. Voss, Berlin,
1756. Cf. également Jean-Marie Paul: «Rousseau et Kant: de l’utilité de la civilisation», dans: La volonté de
comprendre, hommage à Roland Krebs, Maurice Godé et Michel Grunewald (Éd.), Éd. Paul Lang, Francfort/M.,
2005.
256
Pierre Hartmann: «La question esthético-politique chez Rousseau et Schiller», in: Revue internationale
d’études germaniques, n° 22, 2004, ps. 119-132.
257
Schiller voit la disposition esthétique de l’âme („ästhetische Stimmung des Gemüts“) comme le fondement de
l’être humain.
258
Cf. Klaus Manger en collaboration avec Nikolas Immer: Der ganze Schiller - Programm ästhetischer
Erziehung, (Ereignis Weimar-Jena. Kultur um 1800: Ästhetische Forschungen, vol. 15), Heidelberg, 2006.
259
Voir Kant, KU, § 16, B 49, A 49, p. 310.
260
Cf. lettre de Schiller à Körner, datée 25 janvier 1793, Godeke II, p. 6 et HE, p. 108 s. Au sujet de la
correspondance de Schiller avec Körner cf. l’étude de Theodor Wilhelm Danzel: „Über Schillers Briefwechsel
mit Körner“, dans: Zur Literatur und Philosophie der Goethezeit [1855], Hans Meyer (Éd.), Stuttgart, 1962.
261
Victor Basch: «Le Kallias de Schiller, in: Mélanges Henri Lichtenberger», Éd. Vrin, Paris, 1934, ps. 99-121,
ainsi que J. M. Ellis: Schiller’s Kalliasbriefe an the Study of his Aesthetic Theory, Éd. Mouton, Den Haag, 1969.
262
Kenneth Parmelee Wilcox: Die Dialektik der menschlichen Vollendung bei Schiller, Éd. Lang, Francfort/M.,
1981.
263
Cf. la correspondance de Schiller, op. cit., y compris la lettre de Schiller à Körner, datée Jéna, le 23 février
1793 [dimanche]: „Freiheit in der Erscheinung ist eins mit der Schönheit“, et idem dans: Über Anmut und
Würde, Éd. Reclam, Stuttgart, (1971), 2003, p. 37: „Der Grund der Schönheit ist überall Freiheit in der
Erscheinung. Der Grund unserer Vorstellung von Schönheit ist Technik in der Freiheit.“
255
53
L’homme incarne cette beauté du mouvement,264 car il unit dans son être la personne et le
caractère (avec les états d’âme correspondants) et ainsi, il peut sélectionner ses apparitions,
et, dans ce contexte, Schiller distingue par la suite également la beauté architectonique et de
la beauté amovible.265 Par rapport à l’homme, il élargit la beauté naturelle, par ce même
indice, au principe de liberté, comme étant cette cause, qui change selon ses propres
raisons.266 Suivant cette logique, il établit par la suite une différence entre deux formes du
mouvement: la forme sympathique (consciente) et la forme arbitraire (inconsciente). Cela
déclenche de vives polémiques de la part de Fernow. Dans une lettre à Baggesen, ce dernier
annonce une contre-déclaration à ce propos,267 qu’il expose dans sa lettre suivante, en
considérant l’expression de la beauté selon Schiller comme étant impure, étant donné qu’elle
implique trop d’éléments hétérogènes (moral, sensuel, gracieux, émouvant etc.).268 De même,
il constate que dans les deux moments du beau mouvement, la grâce ou la délicatesse
(attitude morale et sensuelle) et la dignité (expression d’une attitude sublîme), que l’idéal
esthétique kantien ou bien spinoziste du désintérêt n’est de toute évidence pas réalisé, étant
donné que les deux principes obéissent exclusivement aux sphères d’intérêt propres à
l’homme. En l’occurrence, le postulat schillérien de beauté se réfère d’abord à l’homme et
l’état de la belle apparence qui se destine aux fins collectives, qu’il croit reconnaître dans
chaque âme délicate comme étant l’expression de la grâce.269 A la différence de Schiller,
264
Cette notion de la beauté vivante remonte à Lessing, Cf. citation: „Schönheit ist Reiz in Bewegung“, dans:
Laokoon oder über die Grenzen der Mahlerey und Poesie, Éd. Reclam, XXI, p. 157.
265
Voir: „Über Anmut und Würde“, Klaus L. Berghahn (Éd.), Éd. Reclam, Stuttgart, 1994; (sigle raccourci dans
ce qui suit AW), ici p. 84.
266
Ibid., p. 83: „Aber mit der Willkür tritt der Zufall in ihre Schöpfung ein, und obgleich die Veränderungen,
welche sie unter dem Regiment der Freiheit erleidet, nach keinen andern als ihren eignen Gesetzen erfolgen, so
erfolgen sie doch nicht mehr aus diesen Gesetzen.“
267
Voir lettre de Fernow à Baggesen écrite à Rome, le 20 février 1795, voir référence ailleurs, p. 371: „Ich habe
einen kleinen Aufsatz über die Schönheit der Bewegung fertig liegen, worin ich nicht ganz der Schiller’schen
beistimmen kann, der die Erklärung derselben nicht rein genug gibt, sondern noch heterogene Theile mit
aufnimmt.“
268
Ibid.: „So wie der Körper die Materie ist, woran die Schönheit der Gestalt hervorgebracht wird, so ist der
Ausdruck, er mag nun sittlich oder sinnlich, anmutig oder liebreizend usw. sein, unstreitig die Materie der
Bewegung, und die Schönheit ist nicht ganz rein, wenn ihr irgend etwas von solchem Ausdrucke anklebt.“
269
Cf. Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme (sigle SBE), lettre n° 27, p. 372: „Existiert aber auch ein
solcher Staat des schönen Scheins, und wo ist er zu finden? Dem Bedürfnis nach existiert er in jeder
54
Fernow remplace par ailleurs cette notion de grâce par celle de la belle conduite comme degré
d’expression, qu’il considère comme étant la beauté du mouvement.270 De même, il approuve
la théorie schillérienne de la Gestalt vivante271 uniquement comme expression de la beauté
modifiée, car, selon lui, ce n’est que la forme et non pas la matière, à la différence des attraits
de la nature (comme p. ex. des couleurs, des tons), qui puisse être soumise à une
idéalisation.272 Est-ce que Fernow ignore ici vraiment le problème de personne273 et le
principe kantien de la beauté utile,274 en esquissant une notion trop capricieuse de la Gestalt275
et des arts plastiques,276où, contrairement à Schiller, l’expression des arts plastiques est
également transposée dans la sphère humaine de l’apparition (=mouvement)?277 Faut-il
concevoir, ce que Schiller considère comme l’apparence esthétique, uniquement à partir de
l’ontologie (à savoir l’existence) ou la phénoménologie (c'est-à-dire l’apparence)? Schiller
laisse ce choix au juge de l’art rigoureux auquel Fernow peut être identifié. Cette libération
de l’idéal de toute forme du subjectivisme va chez lui, comme chez Goethe, de pair avec la
feingestimmten Seele […] wo nicht die geistlose Nachahmung fremder Sitten, sondern eine eigne schöne Natur
das Betragen lenkt, wo der Mensch durch die verwickeltsten Verhältnisse mit kühner Einfalt und ruhiger
Unschuld geht, und weder nötig hat, fremde Einheit zu kränken, um die seinige zu behaupten, noch seine Würde
wegzuwerfen, um Anmut zu zeigen.“
270
Voir lettre n° 16, ibid.: Unter dem Anstand verstehe ich […] den Stil der persönlichen Selbstdarstellung, die
der Mensch, insofern er das Kunstprodukt seiner eigenen Ausbildung ist, an sich selbst hervorbringt […] aber
nur in dem schönen ist die Schönheit der Bewegung rein enthalten.“
271
Le terme de la Gestalt est synonyme de forme, silhouette, ou apparence. Cf. à ce sujet également l’idée de
Pygmalion chez Schiller, voir SBE, lettre n° 15, p. 214.
272
Ibid.: „[man nur die Form] nicht die Materie idealisieren und verschönern [kann].“ Fernow se réfère ici
également à Kant et du problème du coloris comme sensation de sens de la belle nature. Voir KU, § 40, A 171.
273
Cf.: Über Anmut und Würde, op. cit., p. 92.
274
Voir Kant: „Allgemeine Anmerkung zum ersten Abschnitte der Analytik“, A 68 ss.: „[…] und das
Wohlgefallen ruht nicht unmittelbar auf dem Anblicke der Gestalt, sondern der Brauchbarkeit derselben zu
allerlei möglicherlei Absicht.“
275
D’après Fernow l’art est capable d’exprimer «l’idéal de la perfection et beauté humaines» („[…] das Ideal
menschlicher Vollkommenheit und Schönheit“) de façon complète, en mettant l’accent soit sur l’idéal de
l’apparence („das Ideal der Gestalt“) soit sur l’idéal du caractère („das Ideal des Karakters“). Ensuite, il définit
l’art plastique comme «la Gestalt et l’expression visible du même» („Gestalt und sichtbaren Ausdrucke
derselben“/ voir RS, II, p. 23). De même, Fernow opère, à partir de Kant, une distinction stricte entre le
mouvement et la Gestalt comme les «deux formes les plus générales de la contemplation [l’espace et le temps]»
(„beiden algemeinsten, den beiden Formen der Anschauung (dem Raume und der Zeit)“/ RS, II, p. 19).
276
Fernow au sujet de l’idéal plastique dans RS, I, p. 101: „Bestimtheit der Formen, eine feste Stellung und
Haltung sol[l] dem bildenden Künstler vor allem wichtig seyn, und sie lassen sich mit der grösten Zartheit und
Grazie jugendlicher Naturen verbinden.“
277
SBE, lettre n° 26, p. 350.
55
quête d’un unique style pur,278 en se délimitant de toute forme de maniérisme,279 duquel
Fernow se distancie également de manière décisive.280 Que cela ait pour première
conséquence une interprétation unilatérale de la notion d’art, qui peut être décrite comme un
durcissement du système théorique, paraît évident. Un autre aspect, qui mérite par rapport à
Schiller et Fernow d’être mentionné, est le problème de la séparation des arts. La question
concrète que les deux se posent est la suivante: comment peut-on délimiter ces genres
différents (à savoir la musique, la poésie, les arts plastiques) les uns par rapport aux autres?
Schiller ébauche, à ce propos, un modèle de fusion d’après lequel la musique, «sa perfection
sublime» devient Gestalt, «l’art plastique dans sa perfection sublime» devient musique, et la
poésie, «dans sa formation parfaite», intrigue, comme l’art musical, «de manière puissante»,
mais, en même temps, entoure «avec la clarté silencieuse comme les arts plastiques.»281
Fernow, se concentrant moins sur le caractère unique de l’art, critique au contraire le principe
de l’hétéronomie artistique, qu’il voit surtout propagée par les «peintres allégorisants et les
musiciens qui peignent»,282 qui, au sens de la poésie universelle progressive émise par
Schlegel,283 cherchent à unir tous les genres d’art de par leur activité en tant qu’amateur.
278
Ainsi, Fernow part, en ce qui concerne le style, d’un type idéal d’après lequel l’artiste ne devrait «pas
inventer», mais «s’approprier l’esprit et le style de l’idéal» („nicht erfinden“ et „sich den Geist und Stil des
Ideals zu eigen“/RS, II, p. 41): „[…] dass er aus ihnen die schönen Verhältnisse lerne, welche demselben zum
Grunde liegen; dass er an ihnen seine Einbildungskraft zur Anschauung der algemeinen Geseze der Natur
erhebe, und so den Tipus in sich erzeuge, welcher seinen eigenen idealischen Schöpfungen zum Vorbilde dient.“
279
Schiller envisage toujours par rapport à la grâce humaine l’idéal de la belle grâce, tandis que Fernow parle,
par rapport à l’homme, uniquement des belles manières. Il se peut que Fernow associe à la grâce exclusivement
«l‘attrait doux et flatteur» („lieblichen, schmeichelnden Reiz“/ cf. chapitre au sujet de Canova), qu’il ne peut pas
admettre en tant que classiciste sévère.
280
Cf. JS, p. 362.
281
Voir lettre n° 22, XII, p. 84: „Die Musik in ihrer höchsten Veredelung muβ Gestalt werden und mit der
ruhigen Macht der Antike auf uns wirken; die bildende Kunst in ihrer höchsten Vollendung muss Musik werden
und uns durch unmittelbare sinnliche Gegenwart rühren; die Poesie in ihrer vollkommensten Ausbildung muβ
uns, wie die Tonkunst, mächtig fassen, zugleich aber, wie die Plastik mit ruhiger Klarheit umgeben.“ Cf.
également, pour de plus amples informations au sujet de l’histoire de l’esthétique musicale l’étude de Dénis
Zoltai: è- und Affekt. Geschichte der philosophischen Musikästhetik von den Anfängen bis zu Hegel, Éd.
Akademie Verlag, Berlin, 1970 [traduction allemande].
282
RS, II, X: „[der] so hoch gepriesenen musikalischen Poeten, allegorisierenden Maler und malenden Musiker
samt ihren wundersamen Werken sowie das lose Geschwäz jener Phantasten, die gerne alle Künste untereinander verirren.“ Fernow fait allusion à ce phénomène du courant romantique visant à l’universalisation des
arts, que Schiller, à l’opposé, rejette avec véhémence.
283
Cf. Friedrich Schlegel: Athenäum. Eine Zeitschrift von August Wilhelm Schlegel und Friedrich Schlegel, vol.
I, deuxième pièce, Berlin, Éd. Friedrich Vieweg l’ancien, 1798, n° I, ps. 3-146 [sans noms d’auteurs]. Parue en
56
Selon lui, seuls les artistes peuvent transgresser les différents arts de par leur traitement de la
matière. Or, cette dernière doit toujours présenter le contenu et la forme, la beauté et la Gestalt
dans une relation équilibrée, orientée vers l’idéal, et qui ne doit ni être exagérée, ni être trop
schématique.284 A l’opposé de Fernow, Schiller élève la forme au-dessus du contenu, étant
donné que «c’est la forme seule qui […] agit sur l’homme dans son ensemble, tandis que le
contenu n’agit que sur des forces isolées.»285 Dans Les frontières des beaux-arts, Schiller
sanctionne par la suite l’art comme étant la symbiose entre l’apparence et la nécessité. De là
résulte le traçage des limites entre les genres artistiques, en respectant l’utilité générale, qui
correspond en effet tout à fait aux convictions de Fernow d’une séparation des arts. 286 Ainsi,
ce dernier opère une distinction entre l’art musical, l’art poétique et rhétorique, et
l’imagination poétique, qu’il définit comme étant la représentation dans le temps, où le moyen
est à chaque fois le mouvement, qui ne peut qu’ « equisser les apparences», hantant «le sens
intérieur» et, pour cette raison, ne peut «donner des images», mais seulement «éveiller celles
qui sont déjà présentes.»287 Toutefois, il reste à savoir si Fernow distord vraiment le principe
reédition sous le titre ’Äthenäums’-Fragmente und andere Schriften, Éd. Reclam, Stuttgart, 1978, p. 90: „Die
romantische Poesie ist eine progressive Universalpoesie. Ihre Bestimmung ist nicht bloβ, alle getrennte
Gattungen der Poesie wieder zu vereinigen, und die Poesie mit der Philosophie und Rhetorik in Berührung zu
setzen. Sie will, und soll auch Poesie und Prosa, Genialität und Kritik, Kunstpoesie und Naturpoesie bald
mischen, bald verschmelzen, die Poesie lebendig und gesellig, und das Leben und die Gesellschaft poetisch
machen, den Witz poetisieren, und die Formen der Kunst mit gediegnem Bildungsstoff jeder Art anfüllen und
sättigen, und durch die Schwingungen des Humors beseelen.“
284
Fernow s’exprime à ce sujet en détail dans son essai: „Über den Zwek, das Gebiet und die Grenzen der
dramatischen Malerei“, RS II, p. 11. Dans ce contexte, il critique non seulement les «positions et distorsions
exagérées du corps» („übertriebenen Stellungen und Verdrehungen des Körpers“), mais également «l’imitation
sans esprit des formes antiques» („geistlose Nachahmung antiker Formen“), qui se manifeste chez les nouveaux
artistes non seulement à travers la forme «les positions académiques et le groupement théâtral» („akademischen
Stellungen und theatralischem Gruppenbau“), mais également dans le choix des couleurs «l’art d’aveugler par
des coups de pinceau et un effet de couleurs frappant» („Kunst zu pinseln und durch auffallende Farbenwirkung
zu blenden“).
285
Cf. SBE, 22ème lettre, p. 188 ss.: „Und nicht bloβ die Schranken, welche der spezifische Charakter einer
Kunstgattung mit sich bringt, auch diejenige, welche dem besondern Stoffe, den er bearbeitet, abhängig sind,
muss der Künstler durch die Behandlung überwinden. In einem wahren Kunstwerke soll der Inhalt nichts, die
Form aber alles tun, denn durch die Form allein wird auf das ganze im Menschen, durch den Inhalt hingegen nur
auf einzelne Kräfte gewirkt.“
286
Cf. troisième partie du présent travail.
287
RS, II, p. 20: „nur schon vorhandene wecken könne.“
57
schillérien de la poésie naïve et sentimentale288 quand il considère l’idéal comme notion de
raison,289 en assimilant l’idéal au naturel, et non pas au sentimental.290 De toute façon il est
sûr que pour Fernow, tout comme pour Schiller, en ce qui concerne la question de l’idéalité
dans l’art,291 la plasticité, au sens que lui confère Herder,292 constitue un point de fuite
commun.293 Globalement, on peut alors faire un lien entre Schiller et Fernow, surtout à
l’égard de l’idée d’autonomie et la conception du génie. Or, une congruence parfaite ne peut
être constatée que par moments et, le cas échéant, seulement sous forme d’approches. La
thèse selon laquelle les convictions esthétiques de Fernow et de Schiller pourraient être
égalisées par l’idéalisme romantique294 ne peut donc pas être soutenue. Quoique la définition
schillérienne sur le beau dans l’art comme synthèse entre le beau et le vrai traduise aussi les
convictions théoriques de Fernow, ce dernier se distancie également délibérément de la
mission, à la fois morale et éthique, déclarée dans les lettres intitulées «Sur la grâce et la
288
HE, p. 124: „[…] Fernow [hat] den Grundgedanken der Schrift über das Naive und Sentimentalische sich
nicht […] zu eigen machen können [da er ihn] offensichtlich nicht verstanden hat.“ Il reste à savoir si Fernow,
comme le constate von Einem ignore le problème fondamental du traité schillérien („das Grundproblem der
Schillerschen Abhandlung fremd geblieben ist“), étant donné qu’il confond de toute évidence le topos antique et
sentimental (p. ex. le Torquato Tasso de Goethe), en limitant les arts plastiques seulement à l’Antiquité (HE, p.
125).
289
RS, I, p. 339 s.: „[das Ideal sei ein] Vernunftbegrif, dem kein Gegenstand in der Wirklichkeit ganz entspricht,
und den kein Streben, sich wirklich zu machen, ganz erreicht, weil er ein Unendliches, Unbedingtes enthält.“
290
Lettre du 15 déc. 1796, cité selon Penelope, p. 377: „Ich glaube, dass sich über das Naive nichts Wahreres
und Besseres sagen läβt, und daß Schiller diesen Gegenstand erschöpft hat. Nur wünschte ich, daß Schiller […]
die sentimentalischen Dichter anders getauft hätte [...] Das Idealische steht dem Natürlichen, welches den
naiven Charakter ausmacht, besser entgegen als das Sentimentale, welches Wort weder die Sache selbst richtig
ausdrückt noch einen so weiten Umfang hat als der Begriff des Idealen.“
291
La question de la normativité de l’idéal esthétique, ou l’idéalité, est un élément de discours très récurrent dans
les écrits esthétiques de Fernow. Suivant une logique similaire, Henri Bergson utilise la notion d’idéalisme afin
de mettre en relief l’impact propre à la perception exercé par un art orienté vers la realité sur le spectateur, qu’il
comprend comme un moyen pour l’expérience de la réalité: «Ainsi, qu’il soit en peinture, sculpture, poésie ou
musique, l’art n’a d’autre objet que d’écarter les symboles pratiquement utiles, les généralités
conventionnellement et socialement acceptées, enfin tout ce qui nous masque la réalité, pour nous mettre en face
à face avec la réalité même […] C’est d’un malentendu sur ce point qu’est né le débat entre le réalisme et
l’idéalisme dans l’art. L’art n’est sûrement qu’une vision plus directe de la réalité, cf. Henri Bergson: «Le Rire»,
dans: Quadrige, Éd. PUF, 1940, ps. 115-120, ici p. 120.
292
Pour Herder, le toucher est le sens le plus mémorable pour la perception. Ainsi s’explique pour lui aussi la
priorité de la vérité des formes des arts plastiques avant la densité superficielle (‘Flächigkeit’). Cf. Herder und
die Anthropologie der Aufklärung, vol. II, Éd. Carl Hanser, Munich, 1987, p. 410 s.: „Der Körper der das Auge
sieht, ist Fläche: die Fläche, die das Gefühl tastet, ist Körper […] Der Liebhaber, der eine schöne Statue sah, sah, als ob er sie fühlte; sieht sie noch im Kupferstiche wieder; wieder als Bildsäule, und nicht bloβ als Gemälde:
sieht sie, als fühle er sie noch. So der entzückte Liebhaber seine gegenwärtige und noch in ihrem Bilde seine
abwesende Schöne - hier kann sich jeder Leser, Beispiele, die im gegenwärtig sind, denken.“
293
Cf. S. M. Schneider, VRW, p. 60: „Was Schiller ‘Natur’ oder ‘Naives’ nennt, ist dasselbe, was für Fernow die
Plastizität der Antike ist.“
294
Ibid., p. 52.
58
dignité», qu’il considère comme étant une transgression illicite du champ esthétique. Suivant
son approche utopique, la mission de l’art consiste sutout à propulser le spectateur vers un
monde idéel,295 en constituant un palliatif vis-à-vis des «peines et petitesses» de la vie, mais
qui, en même temps, ne doit nullement, au sens aristotélien296 ou platonicien,297 rendre
indifférent «au monde réel», mais plutôt, comme vérité de l’art, y sensibiliser.298 A l’opposé,
Schiller envisage, pour ce qui est de la contemplation de l’art, premièrement la réception
stimulante ou tranquillisante, qui dépend de la disposition spirituelle du spectateur (relaxant,
stressant, énergique ou touchant), qui ne préserve l’homme ni de «la barbarie ou de la
cruauté», ni de «la mollesse ou l’hystérie.»299 De même, l’intérêt renforcé que Fernow et
Schiller accordent aux questions d’anthropologie300 constitue un maillon commun quant au
conflit idéologique entre le matérialisme et l’idéalisme,301 étant donné que les deux essaient
295
RS, III, p. V: „Vor allem ist die Idealwelt der Kunst fähig, den Geist der oft feindselig auf uns eindringenden
Gegenwart zu entführen, und ihn zu den ewig heiteren Regionen des Schönen emporzutragen, wo der Tumult der
tief unter ihm kämpfenden Leidenschaften nicht hinreicht.“
296
Aristotèle voit par exemple la poésie (poiètike) comme le résultat de la mimésis, en considérant cette dernière
moins au sens traditionnel d’une imitation de la nature, que comme une fiction divertissante et dissipante (libre
imitation de la nature). Ainsi, le poète (poieta), contrairement au philosophe de la nature (physiologon), peut
enchanter son public moins par la forme de la présentation que par la représentation, le contenu, et la vivacité de
la mise en scène (diégestai). Cf. [Aristoteles:] Poetik, Manfred Fuhrmann [Éd.], Éd. Reclam, Stuttgart, 1982,
ainsi que Jörg Schönig: Mimesis - Repräsentation - Imagination: Positionen von Aristoteles bis zum Ende des 18.
Jhd., Éd. de Gruyter, Berlin, 1994.
297
Platon: ΠΟΛΙΤΕΙΑ (III), (Œuvres complètes), Émile Chambry (Éd.), Éd. Les belles lettres, Paris, 1989, p. 110
(398/a/IX). En traduction allemande par Rudolf Rufener et Thomas Alexander Szlezák (Éd.), Éd. Artemis et
Winkler, Düsseldorf et Zurich, 2003. Concernant la littérature de recherche, voir p. ex. Ulrike Zimbrich: Mimesis
bei Platon, (Europäische Hochschulschriften, collection n° 15, vol. 28), Éd. Lang, Francfort/M. e. a., 1984
[thèse, Univ. Francfort/M.], ainsi que Cornelius Grupen: Die Speisung der Seele: Platons trophologische
Psychologie, Hambourg, 1998 [thèse, Univ. Hambourg].
298
RS, III, préface et JS, p. 342: „Die Beschäftigung mit dem Schönen und der Kunst, die uns in eine ideelle
Welt erhebt, darf uns für die wirkliche nicht versteinern, sondern sie soll Muth geben, die Plackereien und
Armseligkeiten derselben froh zu ertragen. Die Künste leisten uns keinen schlimmern Dienst, als wenn ihr Genuβ
uns verwöhnt, und für die Disharmonien des wirklichen Lebens, die sie auslosen sollen, nur noch empfänglicher
macht.“ Cf. à ce sujet également Goethe „Über die Wahrheit und Wahrscheinlichkeit von Kunstwerken“, (WA,
I, ps. 255-266), ainsi que la théorie de Henri Bergson sur l’art en tant que moyen de percevoir la réalité. Cf. à ce
sujet également l’idéalisme d’Auguste Rodin, comme il l’exprime par exemple dans des œuvres comme La
pensée (1893-95), L’hiver (1895) et La main de Dieu (1884). Voir aussi Antoinette le Normand-Romain: Rodin,
Éd. Flammarion, 1997.
299
SEB, 16ème lettre, p. 230: „Die energische Schönheit kann den Menschen ebenso wenig vor einem gewissen
Überrest von Wildheit und Härte bewahren, als ihn die schmelzende vor einem gewissen Grade der Weichlichkeit
und Entnervung schützt.“
300
Dans une lettre à Johann Pohrt (cité HE), Fernow déplore ainsi le fait qu’Izt ne se soit pas inspiré de
l’esthétique schillérienne qui, selon lui, aurait sans doute enrichi son anthropologie: „[Izt habe] Schillers
ästhetische Arbeiten noch nicht gekannt […] sonst würde er noch mehr in diese Dinge eingedrungen sein.“
301
De façon similaire Fernow s’était prononcé plus tard sur les études anthropologiques du fondateur de la
phrénologie, Franz-Joseph Gall, qu’il loue au sujet des «découvertes anatomiques» („anatomischen
59
de faire ressortir ce que Kant appelle humaniora302 de son abstraction, et, à la différence des
philosophes naturelles,303 le fonder d’une nouvelle façon. Ainsi, la définition de Kant
concernant la question d’une propédeutique esthétique comme fondée non pas ‘par des
règles’, mais dans la ‘culture des forces de l’âme’, s’applique à Schiller comme à Kant. De
même, le postulat kantien sur la volonté sous la forme d’un nosce te ipsum est transféré par
les deux sur le terrain esthétique au sens d’un nosce naturam. La différence décisive y repose
sur une interprétation réciproque de la notion de nature à l’égard des idées des Lumières. Un
autre point commun entre les deux systèmes consiste en la déduction de la notion classiciste
de l’art à partir d’une «expérience d’absence et d’altérité»,304 c’est-à-dire l’utopie de
l’Antiquité comme étant l’emblème de la perfection humaine, un idéal, qu’on cherche à
réaliser à partir d’une «construction transcendantale»305 dans l’art moderne. Fernow, comme
Schiller, n’est pas indifférent au paradoxe que représente l’idéal atemporel du classicisme,
tout comme de cette césure d’époque sur le plan sociopolitique que devait introduire la
Entdeckungen“) et qu’il considère ainsi comme une «doctrine sur les organes irrefutée» („unangefochtene
Organenlehre“/cf. lettre datant de Weimar, 20 septembre 1805): „Sie stimmt mit dem, was ich sonst wohl über
die Natur unsers Wesens geahnet und vermuthet habe, und was zwischen Materialismus und Idealismus in der
Mitte liegt, recht gut überein […] Gewiβ ist seine Lehre ein Theil eines groβen Ganzen, wozu eben so notwendig
die Empirie, als die transcendente Naturphilosophie gehören und einander in gebührenden Ehren halten
möchten. Leider! Schimpft Gall auf die Philosophie ohne sie zu kennen, und die Naturphilosophen schimpfen
auf Gall, und wollen den menschlichen Schädel nach ihrem dreibeinigen Triangel construieren“, cité d’après JS,
p. 350.
302
Kant, AA XVI, L § 53/54, ainsi que X 45-46. Cf. [Polyhistorie, humaniora, 11-13]. Cf. également HE, p.
105: „Was die Erziehung zur Kunst anbelangt, so betont Kant, daβ sie „nicht in Vorschriften, sondern in der
Kultur der Gemütskräfte durch diejenigen Vorkenntnisse […], welche man humaniora nennt, zu liegen habe.
Daβ Fernow diese humaniora in besonderem Maβe in Kants Philosophie ausgedrückt fand, bezeugt noch einmal
die Bedeutung, die diese Philosophie als Ganzes für Fernow hat.“
303
Fernow se distancie décidément, en tant que kantien professé des métaphysiciens jenensiens. De même, la
relation entre Schiller et Fichte est d’une nature plutôt ambiguë; ce premier approuve, dans les lettres sur
l’esthétique, tout à fait les théories sur la connaissance énoncées par Fichte, mais, en même temps, il critique
leur caractère abstrait.
304
Cf. dans ce qui suit S. M. Schneider, VRW, p. 60: „Fernow und Schiller gewinnen den Begriff der Kunst aus
einer Absenz- und Alteritätserfahrung, die konstitutiv für die Idee der Kunst ist.“
305
Ibid.: „Die Melancholie, die im Schluβbild von Winckelmanns ‘Geschichte der Kunst des Alterthums’ die
historische Distanz zu einer unverständlich gewordenen Antike entdeckt und dort bereits die normative
Ausrichtung des Klassizismus hintertreibt, ist in Schillers und Fernows transzendentaler Konstruktion der Kunst
der Moderne als Paradox eingeschrieben.“
60
commercialisation306 de l’art, et ainsi l’aliénation307 de l’artiste. Ainsi, on assiste,
parallèlement au triomphe du positivisme308 initié par Auguste Comte et l’industrialisation309
commençante, à la valorisation de l’activité créatrice de l’homme, qui va de pair avec la
séparation de la valeur artisanale et marchande, qui sera désormais évaluée d’après le contenu
(comme étant le produit de la raison) et la forme (comme produit de la matière), ce qui va par
ailleurs entraîner l’avènement d’une industrie de l’art orientée principalement vers la valeur
marchande.310 Schiller et Fernow en sont tout à fait conscients et cherchent donc à améliorer
les conditions à l’égard des données historiques, surtout socioculturelles, en respectant des
changements religieux et politiques. Malgré les points communs, basés sur la quête d’un
nouvel idéal de l’art à partir d’une considération sobre d’une esthétique du présent ressentie
comme étant inproductive, les conceptions de l’art de Fernow et de Schiller sont pourtant
fondamentalement différentes. Si Fernow considère Schiller comme un théoricien flottant
dans des ‘sphères supérieures’, en le juxtaposant ainsi aux défenseurs métaphysiques qu’il
qualifie de fantaisistes, cela apparaît non seulement comme une démarcation idéologique,
mais plutôt comme une distance sociologique.311 Si l’on résumait maintenant les conceptions
306
Cf. à ce sujet l’étude de J. Xirau, dans: «Le problème de l’être et l’autonomie des valeurs», dans: Actualités
scientifiques et industrielles, (IX. Congrès international de philosophie), vol. X, Paris, Éd. Hermann, 1937, p.
110.
307
Martin Dönike, KAW, idem, p. 62: „Eine Epochenzäsur trennt den modernen Ausstellungskünstler in der Tat
von dem Auftragskünstler für Hof und Kirche, und kaum einer der Zeitgenossen spricht dies so nüchtern und
hellsichtig aus wie Carl Ludwig Fernow, der in Rom die konkreten Auswirkungen auf Künstler wie Asmus Jakob
Carstens oder Johann Christian Reinhart [sehen konnte]. In Schillers [ästhetischen] Briefen […] wird die
Entfremdungserfahrung, der kunstfeindliche Charakter des Zeitalters, allgemein als Kulturkritik formuliert.“
Nous reviendrons à cet aspect au cours de la deuxième partie du présent travail.
308
Auguste Comte: Rede über den Geist des Positivismus, [titre original: Discours sur l'esprit positif],
(Philosophische Bibliothek, vol. 468), Éd. Meiner Verlag, Hambourg, 1994 et l’étude socio-critique de Max
Horkheimer: „Kulturindustrie. Aufklärung als Massenbetrug“, in idem: Dialektik der Aufklärung. Philosophische
Fragmente, Éd. Querido, Amsterdam, 1947, ps. 144-198. Cf. par ailleurs également Bernhard Plé: ’Die Welt’ aus
den Wissenschaften. Der Positivismus in Frankreich, England und Italien von 1848 bis ins zweite Jahrzehnt des
20. Jahrhunderts, eine wissenssoziologische Studie, Éd. Klett-Cotta, Stuttgart, 1996.
309
Hans-Werner Hahn: Die industrielle Revolution in Deutschland, Éd. Wiss. Verlag, Oldenburg, 2005.
310
Werner Hofmann: „Der Tod der Götter“, dans: John Flaxman. Mythologie und Industrie, (catalogue de la
Hamburger Kunsthalle, 1979), Éd. Prestel, Munich, 1979.
311
Cette distance se réfère surtout à la popularité de Schiller, que Fernow a cherché toute sa vie durant. Fernow
en est tout à fait conscient quand il quitte, au bout d’un an de professorat, l’université de Jéna et ainsi le champ
de bataille du discours esthétique, pour s’installer à Tiefurt, où il va se consacrer intensément à ses études
linguistiques et à l’écriture des monographies.
61
théoriques de Kant, Schiller et Fernow sous la forme d’une comparaison à partir de la relation
objet-sujet, on observait donc une transition graduelle vers l’esthétique autonome:
1. Kant
- L’idéalisme transcendantal, fondé subjectivement, porté sur la causalité.
2. Schiller - L’idéalisme esthétique, orienté à la fois au sujet-objet, autonome-subjectif.
3. Fernow - L’autonomie esthétique idéale (inachevée), à la vocation objective.
D’après cette vue d’ensemble, il paraît donc tout à fait légitime de placer Fernow, non
seulement d’un point de vue historique mais également philosophique, dans la continuité
intellectuelle directe de Kant et de Schiller, vu que sa conception de l’esthétique autonome
offre une option théorique qui se situant à mi-chemin entre les deux systèmes. Toutefois, la
notion de «perfection historique»312 nécessite d’être modifiée dans la mesure où il s’agit bien,
surtout par rapport à Kant, d’un héritage idéel, mais nullement d’une perfection ou d’un
pérfectionnement d’un système philosophique. Les aspirations émancipatoires de Fernow en
tant que théoricien de l’art vont encore se concrétiser à l’égard de Winckelmann, comme nous
allons encore le voir au chapitre suivant.
312
Cf. note n° 306, ibid.: „[…] System historischer Vollendung.“
62
I. 3. Le Winckelmann de Fernow: «Noble simplicité, grandeur calme et silencieuse»
Si on se demande dans quelle mesure Fernow apporte de nouveaux élans au discours
esthétique dominé par l’art classiciste autour de 1800, une étude des écrits winckelmanniens
s’avère comme étant un point de départ tout à fait favorable. Dans ce contexte, il paraît
évident de situer Fernow à la fois dans la continuité et la discontinuité de Winckelmann. Cette
double perspective dans l’analyse nous permettra également de présenter la valeur propre de
la pensée esthétique de Fernow dans son contexte philosophique. Parallèlement à l’Analysis of
Beauty313 de Hogarth paraît en Allemagne, quoique dans le temps décalé et différent quant à
son orientation thématique, le traité de Johann Joachim Winckelmann intitulé Pensées sur
l’imitation des œuvres grecques dans la peinture et les arts plastiques. Cette circonstance est
d’autant plus étonnante quand on considère le fait que Winckelmann s’intéresse initialement
moins au domaine des arts plastiques, qu’à la poésie d’Homère. Cette ‘transition’ lui pose des
problèmes au départ et ne devient possible que par l’intermédiaire du peintre et sculpteur
Adam Friedrich Oeser314 qui, selon sa conviction, lui ouvre les yeux pour ce qui est de
l’intérêt de la peinture et de la sculpture. Lorsque l’ouvrage en question paraît en 1755 à un
tirage de seulement cinquante exemplaires, Winckelmann est alors un auteur parfaitement
inconnu, et cela non seulement dans les milieux d’experts. Afin d’attirer une plus grande
attention sur son texte, il a recours à une ruse, en inventant une controverse d’érudits, au
cours de laquelle il attaque avec véhémence son propre texte sous la forme d’une dépêche,
parue anonymement. Cette tactique littéraire lui sert ensuite de point d’accroche, afin de
réfuter ces mêmes reproches critiques dans une déclaration personnelle. En ce qui concerne le
contenu de ce texte, on constate tout à fait des similitudes avec la conception de Hogarth,
alors que, vu dans l’ensemble, l’écho critique qui transparaît dans les deux ouvrages est pour
313
Dorothy George: Hogarth to Cruikshank: Social Change in Graphic Satire, Éd. Viking Press, New Ed, 1987.
Friedrich Schulze: Adam Friedrich Oeser - Der Vorläufer des Klassizismus, Éd. Köhler & Amelang, Leipzig,
1950.
314
63
le moins contradictoire. Ainsi, Winckelmann conçoit le plaisir de l’art généralement comme
un délice de l’œil ou de l’oreille, déclenché par des incitations optiques ou acoustiques
(comme p. ex. des plaisirs gourmands, le décor, la danse, etc.), en évitant de manière
fondamentale tout ce qui est trop radical ou extrême. En ce qui concerne la forme, il voit le
principe de beauté idéale principalement réalisé dans la ligne ondulante ou serpentée (linea
serpentinata), qui se concrétise par l’harmonie des transitions douces, discrètes et variables
(‘variety’), qu’il distingue à la fois de la monotonie d’une ligne droite, comme de
l’immédiateté des changements de direction arbitraires. Ce sont surtout ces transitions
discrètes qu’Hogarth érige, non seulement par rapport à l’art, mais également dans le domaine
humain, comme idéal de l’harmonie. Ainsi, en tant qu’élève de la société baroque de la cour,
il n’exige de l’art que l’amusement, tandis que Winckelmann, en tant que classicistes sévère, y
voit principalement une instance morale et cathartique. Dans sa formule, souvent citée,
portant sur la définition de la beauté esthétique comme ‘simplicité noble et calme grandeur’
on voit donc surtout l’aspiration d’élever l’art au-dessus d’une pure délectation des sens, en le
considérant comme un médium transcendantal de l’existence humaine. La ‘noble simplicity’
remonte initialement au peintre et théoricien de l’art anglais Jonathan Richardson,315 qui
développe dans ses écrits, pour la première fois, un système critique pour l’évaluation et le
jugement des œuvres d’art. Par la suite, Lessing va prendre en considération l’exactitude du
moment représenté, alors que Winckelmann va se concentrer essentiellement sur la
«simplicité noble, grandeur calme.» Contrairement à cela, Fernow va, par rapport à la
discussion propre au Laokoon et conformément à sa conception de l’art sublime comme une
«nature supérieure», mais qui ne doit pas «rendre indifférent à la réalité»,316 élargir cette
315
Jonathan Richardson: An Essay on the whole Art of Criticism et An Argument in Behalf of the Science of a
Connoisseur (1719). Cf. à ce sujet l’étude de Carol Gibson-Wood: Jonathan Richardson - Art Theorist of the
English Enlightenment, Éd. University Press, Yale, 2000.
316
Voir pour la présente citation: RS, III, préface et JS, p. 342.
64
formule à la «grandeur calme et silencieuse.»317 Ce changement de paradigme apparaît en
l’occurrence comme une conséquence logique d’un changement dans l’histoire des idées.
Déjà à l’âge de la Renaissance318 on commence à s’orienter, à l’égard du classicisme français,
à l’issue du XVIIème siècle, vers les fragments de la sculpture antique, en voyant formulées les
règles éternelles de l’art dans l’Antiquité. Par la suite, on va assister, au cours de la Querelle
des Anciens et des Modernes,319 à une discussion sur la possibilité d’un dépassement de l’âge
classique, qui va de pair avec la question d’une éventuelle temporalisation du goût. De même
nous ne voudrions pas ici passer inaperçu le fait que Winckelmann entreprend dans ses écrits
une migration constante entre les points de vue antique et moderne,320 mais qu’on le situe
habituellement comme défenseur classiciste du côté des Anciens, car il finit par faire culminer
le culte antique par la formule de «devenir inimitable»,321 de par l’imitation des Anciens. Ce
paradoxe que constitue le principe de l’imitation comme théorème a-référentiel (éternité),
mais en même temps référentiel (Antiquité), auquel il s’est manifestement peu heurté, et qui
constitue au fond le point faible de son idéal de l’art, ne sera relevé par la critique d’art que
tardivement. L’idée de base de sa conception de l’art est justement ce caractère modèle de
l’Antiquité grecque: l’imitation de la nature serait une pure copie, un dédoublement du monde
sans esprit; en l’occurrence, la vraie beauté dans l’art réside dans le perfectionnement,
l’idéalisation, voire le dépassement de l’existant, ce qui est également érigé en idéal
d’humanité d’après le modèle grec,322 auquel se joint également Fernow. Ainsi, il place le
317
Cf. troisième chapitre du présent travail.
Andreas Tönnemann: Die Kunst der Renaissance, Éd. Beck, Munich, 2007.
319
Voir: Parallèle des Anciens et des Modernes, Éd. Arts et Sciences Jean Paul Coignard, Paris, 1688-1697.
320
Voir à ce sujet en détail Elisabeth Décultot: Untersuchungen zu Winckelmanns Exzerptheften. Ein Beitrag zur
Genealogie der Kunstgeschichte im 18. Jahrhundert, (Stendaler Winckelmann-Forschungen, vol. 2), Éd. Franz
Philipp Rutzen, Ruhpolding, 2004.
321
Voir Winckelmanns Gedancken zur Nachahmung der griechischen Wercke in der Mahlerey und BildhauerKunst, 1755, cité d’après Fernow dans Winckelmanns Werke, Dresde, 1808 (siglé WW), p. 7: „Der einzige Weg
für uns, groß, ja, wenn es möglich ist, unnachahmlich zu werden, ist die Nachahmung der Alten, und was jemand
vom Homer gesagt, dass derjenige ihn bewundern lernet, der ihn wohl verstehen gelernet, gilt auch von den
Kunstwerken der Alten sonderlich der Griechen.“
322
[Hegel:] Ästhetik, Friedrich Bassenge (Éd.), Francfort/M., 2 vol., 1955, p. 11: „Diesen Menschen zu gestalten,
ist in den Augen Hegels die große Aufgabe der Kunst. Natürlichkeit schafft dieses Ideal der Humanität das
318
65
deuxième tome de ses études romaines sous le vers d’Horace «Vos exemplaria Graeca Nocturna versate manu, versate diurna.»323 De même, Winckelmann voit la Grèce antique
comme l’emblème de l’âge d’or, ce temps de floraison en art et culture déjà loué par Hésiode
et Ovide, qu’il voit surtout favorisé par l’existence de facteurs favorables, comme le climat
méditerranéen, et le lien des Grecs avec la nature (p. ex. le culte du corps et l’athlétisme),
l’absence des maladies de civilisation et des clichés moraux modernes. Nous ne voudrions pas
nous attarder ici davantage sur la question relevée par Wolfgang Ullrich,324 à savoir dans
quelle mesure l’approche winckelmannienne peut être, vue au sens d’un eugénisme, fondée à
la fois biologiquement et de par la race. De toute façon, de ce statut de culte de l’Antiquité
résulte un autre paradoxe: plus celle-ci est déclarée un événement historique unique, plus elle
paraît être inaccessible dans le présent, et doit probablement l’être, car de cette façon, elle
peut en effet le mieux inspirer les mondes imaginaires des classicistes.325 L’élégie Pompeji et
l’Herculanum (1796) offre un exemple pour le culte de l’Antiquité stimulant la force
imaginaire poétique, dans laquelle Schiller, quoiqu’il n’ait jamais vu de ses propres yeux les
fouilles des villes campaniennes, exprime sa fascination vis-à-vis des reliques antiques: «Rien
n’est perdu, la terre l’a conservé fidèlement.»326 Une vision chimérique similaire du
classiciste Jean Clair327 atteste également Heyne, Caylus328 et Fernow, étant donné que ceuxci se prononcent toujours de manière critique quant aux procédés de restauration destinés au
sauvetage des statues. A cette position conservatrice s’ajoute également le point de vue proabsolute Kriterium für die Bewertung jedes künstlerischen Stils, jeder Kunstgattung oder eines einzelnen
Werkes.“
323
RS, II, préface.
324
Wolfgang Ullrich: Was war Kunst? Biographien eines Begriffs, Éd. Fischer, Munich, 2005, p. 57.
325
Thorsten Fitzon: Reisen in das befremdliche Pompeji. Antiklassizistische Antikenwahrnehmung deutscher
Italienreisender 1750-1870, (Quellen und Forschungen zur Literatur- und Kulturgeschichte, vol. 29), Éd. de
Gruyter, Berlin/New York, 2004.
326
Voir „ Herculanum und Pompeji“, dans [Friedrich Schiller:] Sämtliche Gedichte und Balladen, Georg
Kurscheidt (Éd.), Éd. Insel, Leipzig, 2004.
327
Jean Clair: Génie et folie en occident, Éd. Gallimard, Paris, 2005, ici p. 346: «Jusqu’au XVIIIe siècle, les
procédés de restauration s’appliquaient surtout à la peinture. Cependant, certains antiquaires se prononcent
clairement contre ceux de la statuaire; c’est le cas de Caylus, de Heyne et de Fernow. Canova déclare en 1821
que ce serait un crime que de restaurer les sculptures du Parthenon.»
328
Cf. commentaire de Fernow WJ, p. 57: „Graf Caylus, ein französischer Altertumsforscher, der aber Italien
bereist hatte, trug ebenfalls viel zu einer richtigen Kenntnis des Geistes und Kunstwerkes der Altertümer bei.“
66
monumental, comme le défendent par exemple Quatremère de Quincy329 et Viollet-le-Duc,330
qui se déclarent en règle générale pour des mesures restauratrices, à condition que le caractère
original soit préservé. Chez Winckelmann, cet éloge331 du classicisme va de pair avec un
pessimisme de l’époque, qui est non seulement conscient des limites de ses propres
possibilités artistiques, mais également de la fin, qui se dessinait, de l’iconographie, 332 et qui,
pour cette raison, compense son désir de ce qui est cru perdu333 à travers le rêve du paradis
perdu.334 Le culte du corps esthétisant et l’idéal de la liberté humaine: on pourrait de toute
évidence ramener l’idéal d’art winckelmannien à cette formule courte, dont l’approche
utopique réside justement dans le culte de l’Antiquité, qui font de lui un précurseur du
néoclassicisme européen,335 au même titre qu’une figure centrale du néohumanisme336
allemand. Pour mieux cerner le statut idéel de Winckelmann en Allemagne à l’issue du
XVIIIème siècle, il faudrait également prendre en considération d’autres facteurs d’ordre
sociopolitique. Ainsi, on peut tout à fait considérer son ambition de vouloir déclencher un
renouveau artistique dans l’esprit antique comme étant une réaction vis-à-vis des conditions
329
Antoine Chrysostome Quatremère, appelé Quatremère de Quincy: Canova et ses ouvrages (1834) et Lettres
sur les préjudices qu’occasionnerait aux arts et à la science le déplacement des monuments de l'art de l'Italie
(1796). Cf. à ce sujet aussi René Schneider: L'esthétique classique chez Quatremère de Quincy (1805-1823), Éd.
Hachette, Paris, 1910, et idem: Quatremère de Quincy et son intervention dans les arts (1788-1850).
330
Eugène Emmanuel Viollet-le-Duc: «Restaurer un édifice, ce n’est pas l'entretenir, le réparer ou le refaire,
c'est le rétablir dans un état complet qui peut n'avoir jamais existé à un moment donné», cité selon le
Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle (1854 à 1868), vol. 8, voir le chapitre
intitulé: «Réstauration.» Cf. à ce sujet également Jean-Paul Midant: Au Moyen Âge avec Viollet-le-Duc, Éd.
Parangon, Lyon, 2001.
331
Cf. note n° 336, ibid.
332
Erwin Panofsky: Ikonographie und Ikonologie. Eine Einführung in die Kunst der Renaissance, dans le même
ouvrage: Sinn und Deutung in der bildenden Kunst, Éd. Dumont, Cologne, 1975, ainsi que Peter Schmidt: Aby
Warburg und die Ikonologie, Wuttke (Éd.), Wiesbaden, 21993, Georges Didi-Huberman: L'image survivante:
histoire de l'art et temps des fantômes selon Aby Warburg, Éd. Les Éditions de Minuit, Paris, 2002, et Silvia
Ferreti: Cassirer, Panofsky and Warburg: Symbol, Art and History, Yale University Press, Londres/New Haven,
1980.
333
Raimund M. Fridrich: Sehnsucht nach dem Verlorenen. Winckelmanns Ästhetik und ihre frühe Rezeption, Éd.
Lang, Francfort/M., 2003.
334
Cf. p. ex. WW, p. 12 s.
335
Horst Rüdiger: «L’accession à l’humanité par la beauté», dans: Encyclopédia Universalis (Éd.), vol. 23, Paris,
1995, p. 863: «[…] précurseur du néoclassicisme européen.»
336
Ibid.: «À l'encontre de l'humanisme et du classicisme des pays latins, notamment de la France, qui se
réclament principalement de l'héritage romain, Winckelmann proclame l'évangile des Grecs qui, grâce à lui et à
ses disciples, Herder, Goethe, Hölderlin et même Nietzsche, est devenu le modèle du néo-humanisme allemand.»
67
socioculturelles de l’époque.337 D’un autre côté, dans le déclin de l’art diagnostiqué par lui se
reflète le mécontement d’une époque, qui laisse clairement transparaître la glorification de
l’Antiquité comme étant un réflexe de compensation face à ces tendances peu saluées
attribuées à l’esprit du temps. Devant cet arrière-plan historique, Winckelmann est ainsi
assimilé par les amis de l’art weimariens à l’idéal du penseur antique, en raison du caractère
universel de ses écrits. Par moments, cela dupait même le lecteur quant aux fautes formelles et
propres au contenu, comme par exemple le mélange de sa pensée esthétique avec une volonté
excessive de mission pédagogique et pseudo-érotique,338 qui traverse par ailleurs aussi toute
son œuvre comme un fil rouge. Ce culte défensif-monumentalisant339 autour de sa personne
sera célébré par ses adeptes, parmi lesquels se trouve Friedrich August Wolf,340 qui va aussi
formuler pour la première fois le désidérata d’une réédition des œuvres de Winckelmann, qui,
en l’occurrence, sera réalisée par Fernow. Le contexte historique est également d’une
importance particulière en ce qui concerne l’évaluation des ambitions littéraires et
propagandistes que Goethe poursuit à travers sa publication des écrits winckelmanniens.341
Ainsi, l’année de parution est assombrie d’emblée par deux événements négatifs: la mort de
Schiller d’un côté, et la fin des Propylées, de l’autre, qui devait en même temps introduire la
fin des «Amis de l’art weimariens.» Face à ce fiasco culturel qui s’annonçait, l’héritage
classique devait être revitalisé pour la postérité, afin de faire barrage à l’entrée menaçante du
mouvement romantique. Comment aurait-on pu mieux y parvenir que par le manifeste à
l’honneur de Winckelmann, visant à la réanimation de l’héritage culturel classique, en
conférant, en même temps, une nouvelle légitimation au mouvement de l’art weimarien après
337
Cf. Conrad Wiedemann: „Römische Staatsnation und griechische Kulturnation“ (1986) dans: Griechenland
als Ideal. Winckelmann und seine Rezeption in Deutschland, Ludwig Uhlig, Tübingen (Éd.), 1988, ps. 173-178.
338
Cf. note n° 337, ci-dessus, ibid.: «mission pédagogique pseudo-érotique.»
339
Helmut Pfotenhauer, VRW, p. 40.
340
Friedrich August Wolf est surtout connu comme philologue et chercheur dans le domaine des études antiques
et passe également pour le fondateur du néohumanisme allemand. En accord avec Schiller, Goethe et Wilhelm
von Humboldt, il voit dans la philologie classique l’idéal de formation, qui, selon sa conviction, permet à
l’homme l’épanouissement harmonieux dans le monde.
341
Cf. Klaus Manger: Johann Joachim Winckelmann. Seine Wirkung in Weimar und Jena, (Schriften der
Winckelmann-Gesellschaft/vol. 27), Stendal, 2007, ps. 29-40.
68
la mort de Schiller? Des événements importants sur le plan historique, qui ont pu avoir une
incidence sur son écriture, présentent également un intérêt particulier. Dans ce contexte, il
faut mentionner surtout les guerres napoléoniennes et la bataille de Jéna et Auerstedt.342
Fernow est témoin de l’incident des troupes françaises à Jéna. On ne peut que soupçonner
l’impact traumatique que le vécu a dû exercer sur lui en tant qu’historien. Ainsi, il paraît tout
à fait probable qu’il cherchait, par le biais de l’engagement littéraire, une sorte d’effet
thérapeutique, afin de se remettre mentalement de la catastrophe nationale. Vu dans le
contexte de la philosophie de Herder,343 le projet fernowien de Winckelmann ne pourrait être
plus antagoniste. Ce premier traduit surtout deux objectifs principaux: c’est le désir d’une
nouvelle fondation d’état d’un côté, et la quête de l’identité nationale, de l’autre. Entre 1805
et 1808, Fernow s’occupe intensément de l’héritage intellectuel winckelmannien, ce dont
témoigne également sa contribution à l’ouvrage collectif de Goethe Winckelmann et son siècle
portant le titre «Remarques d’un ami»344 qui prend le relais de l’ouvrage précédent de Johann
Heinrich Meyer345 intitulé «Ésquisse d’une histoire de l’art du dix-huitième siècle.» A
l’origine du projet éditorial de Goethe on trouve l’intention de publier pour la première fois la
correspondance inédite de Winckelmann avec le secrétaire secret du duc Hieronymus Dietrich
Berendis, sous la forme d’un ouvrage colectif. L’œuvre comporte par ailleurs une dédicace
adressée à la duchesse Anna Amalia, une préface (les deux redigées par Goethe), les déjà
342
Voir „Briefe von Fernow an Böttiger“, dans: Der Neue Teutsche Merkur vom Jahre 1809, vol. I, ps. 69- 82 et
ps. 116-124. Cf. égalment Hans-Joachim Widmann: Die Schlacht bei Jena und das Ende der Weimarer Klassik:
Ein Moment der Weltgeschichte - und wie der Frankfurter Bürger und Weimarer Geheime Rat Johann Wolfgang
von Goethe ihn erlebte, Éd. Davos, 2006 [à l’occasion du 200ème anniversaire de la bataille à Jéna].
343
[Johann Gottfried Herder:] Werke, vol. III, Wolfgang Proß (Éd.), ainsi que: Ideen zur Philosophie der
Geschichte der Menschheit, Éd. Carl Hanser, Munich, 2002.
344
Voir: „Die Bemerkungen eines Freundes“, dans: Winckelmann und sein Jahrhundert. In Briefen und
Aufsätzen, Goethe (Éd.), Tübingen, 1805, ps. 132-195 (siglé WJ). A ce sujet, Fernow rédige un article critique
correspondant [voir Jenaische Allgemeine Literatur-Zeitung/ n° 128, 30 mai 1805 et n° 29, 31 mai 1805], mais
qui, comme l’œuvre en elle-même, fait une sortie très peu remarquée: „Als aber das […] Werk erschien, war die
Aufnahme durch das Leserpublikum recht zurückhaltend. Die Künstler- und Ästhetenkreise, gegen die es
gerichtet war, reagierten mit Totschweigen. Die Rezension Fernows in der ‘Jenaischen Allgemeinen
Literaturzeitung’ vom 30 Mai 1805 konnte nicht recht zählen, da sie von einem Mitverfasser stammte“ (ibid., p.
20).
345
Cf. Jochen Klauβ: Der ‘Kunschtmeyer’. Johann Heinrich Meyer. Orakel Goethes, Éd. Hermann Böhlaus
Nachf., Weimar, 2001.
69
mentionnés «Esquisse de l’histoire de l’art au dix-huitième siècle» par Meyer, les
«Remarques d’un ami», et les trois «Esquisses de déscription au sujet de Winckelmann»
(Goethe, Meyer et Wolf), auquel s’ajoute un «Manuel de l’Antiquité au dix-huitième siècle»
(Meyer et par ailleurs Humboldt346), ainsi que «Les études de Winckelmann par Friedrich
August Wolf», que suivent les vingt-sept lettres adressées à Berendis, ainsi qu’un registre qui
mentionne les lettres winckelmanniennes déjà éditées. Goethe écrit au sujet de ce projet dans
les Cahiers du jour et de l’année: Afin de représenter ce qui pourrait servir de multiples façons à la
description d’un homme extraordinaire, j’ai consulté mes chers amis, Wolf à Halle, Meyer à Weimar, Fernow à
Jéna, et ainsi s’est formé, peu à peu, un ouvrage comprenant huit volumes, tel qu’il est parvenu par la suite aux
mains du public.347
Au premier regard, on constate que dans les «Remarques d’un ami» la sous-
partition en trois périodes temporelles est similaire, mais pourtant pas égale. Ainsi, dans
l’esquisse de la première moitié du XVIIIème siècle, les sous-rubriques peinture de portrait,
peinture de bataille et mosaïque sont traitées, alors que l’analyse de la deuxième période
(1750 jusqu’en 1775) est beaucoup plus courte et d’autres notions sont d’ailleurs légèrement
modifiées. La considération de la troisième période temporaire (1775 jusqu’en 1800) est la
plus détaillée et s’achève par la sous-rubrique «Littérature, méthodes et opinions de 1775
jusqu’en 1800», au lieu du diagnostique précédent de «L’état en goût et en art», ce qui, en
l’occurrence, peut être tout à fait compris au sens du tournant s’opèrant autour de 1800 pour
ce qui de est la compréhension de l’art. Vu dans l’ensemble, Fernow essaie, en réponse à
Meyer, de fonder, à partir de cette présentation panoramique de l’histoire de l’art, les
conditions générales qui encadrent l’épanouissement des beaux-arts au sein d’une société.348
Cette intention devient manifeste dès les premières lignes, dans lesquelles l’enthousiasme
religieux est désigné comme paramètre général quant au progrès de la culture: Que les arts
346
La correspondance vive entre Goethe et Humboldt s’avère également comme étant fructueuse par rapport aux
études des Anciens. Voir lettre de Humboldt à Goethe du 23 août 1804 intitulée: Alterthum, Kunst und deutsche
Literatur. Cf. également Klaus Manger, op. cit., p. 67 note n° 342.
347
WA, partie I, vol. 35, p. 181.
348
Voir WJ, p. 228: „[…] von welchen Ursachen das Steigen und Fallen der Künste abhänge.“
70
plastiques se développent seulement chez un peuple quand ceux-ci sont devenus une nécessité pour ce qui est du
développement de sa culture, que les religions des peuples se servent de préférence de ces arts comme moyen de
la représentation de leurs mythes et que l’enthousiasme religieux ait toujours été l’une des motivations les plus
importantes de leur formation, leur diffusion et leur perfection – personne ne le niera probablement.349
Suivant la logique de paragone, Fernow parvient par la suite, au cours de sa considération, à
la conclusion que la priorité de la peinture vis-à-vis des arts plastiques n’est pas due à
l’influence de l’art religieux, étant donné que le refus conscient d’une représentation trop
immanente (=plastique) s’expliquerait par une disposition naturelle de l’homme, se
manifestant par sa quête de transcendance, qui s’exprime le mieux dans l’ekphrasis de l’art.
Le classiciste, qui a érigé justement cette représentation immédiate en principe majeur de son
idéal de l’art, se défend ainsi contre les influences romantiques et le principe de la poésie
pittoresque350 qu’il juge comme trop sentimentale. Cela s’explique aussi par l’influence du
romantisme depuis les Épanchements d’un moine épris de l’art (1796/97) de Wackenroder et
les discussions sur la peinture parues dans l’Athénée (1798-1800) des frères Schlegel. On peut
observer le début d’un changement par rapport au goût de l’art, au cours duquel l’art chrétien
de la pré-renaissance et du XVIème siècle prend le relais du culte de l’Antiquité jusque-là
dominant dans l’espace germano-néerlandais. Au cours de ce processus, les hiéroglyphes
infinis de la poésie pittoresque s’opposent ainsi aux formes traditionnelles, tendance à
laquelle répondront à nouveau les classicistes weimariens par un retour aux formes idéales de
la sculpture antique. Dans Winckelmann et son siècle, le classiciste est érigé en grand
classique,351 ce qu’on pourrait concevoir, d’un point de vue littéraire, comme étant une pure
prétention ou aussi comme une propagande classiciste. Certes, cette volonté de mission des
amis d’art weimariens à faire sonner une nouvelle époque (=néoclassiciste), en formant en
349
Ibid., p. 132 s.
Helmut Pfotenhauer, Klassik und Klassizismus, Éd. Verlag Deutscher Klassiker, Francfort/M., 1995, p. 826.
351
Cf. ici et dans ce qui suit idem, VRW, p. 39 s.: „Wie ist gegenüber dieser historischen Tendenz die Autorität
des Plastischen als Inbild des Klassischen dennoch zu retten? Indem der Klassizist selbst zum Klassiker ernannt
wird! Derjenige der im Zeichen der Vergangenheit des Ideals von Kunstschönheit reflektierend an es erinnert,
wird selbst zum Ideal und verbindlichen Muster der Kunstauffassung.“
350
71
même temps une société conforme à l’idéal goethéen et schillérien d’humanité et d’érudition,
peut paraître idéaliste et parfaitement anachronique. Pourtant, le problème se pose d’une
manière beaucoup plus complexe, étant donné que les adeptes du mouvement weimarien sont
en effet plutôt partagés sur les possibilités d’une telle ‘relance’ du mouvement classique.
Alors que Fernow parle de Winckelmann encore en termes d’esprit classique de
l’Antiquité,352 Goethe évite encore une telle désignation. Dans son écrit «Du sansculottisme
littéraire»,353 il met aussi bien en évidence que la création des chef-d’œuvres classiques est
réductible aux circonstances extérieures propices et constitue donc le résultat des grands
événements historiques ayant marqué le destin d’une nation, et elle est donc unique, alors que
de telles «subversions»354 ne seraient pas forcément souhaitables dans une Allemagne privée
d’identité et de consensus nationaux. Ainsi, Winckelmann représente pour Goethe toutefois
une «nature antique»,355 qui «a dépassé l’éphémère de la vie et la contingence»356 et, pour
cette raison, sa mémoire restera à «l’image de la fraîcheur juvénile»357 dans la pensée
collective, mais pas l’esprit classique au sens propre du terme, contrairement à Fernow. Alors
que son ouvrage intitulé Les œuvres de Winckelmann358 doit prendre le relais de l’édition
352
Voir WJ, p. 195: „Winckelmann war, möchte man sagen, mit dem Geist des Altertums verwandt. Beseelt,
durchdrungen von demselben, das groβe rechte Ziel vor Augen, berührte er überall bloβ die höchsten Punkte,
unbekümmert alles, was dazwischen lag.“
353
Johann Wolfgang von Goethe: „Über literarischen Sanscülottismus“, [1795], [Hamburger Ausgabe], intitulée
Werke, Munich, 1988, vol. XII, ps. 239-44.
354
Ibid., p. 241: „Wir wollen die Umwälzungen nicht wünschen, die auch in Deutschland klassische Werke
vorbereiten könnten.“
355
Voir Pfotenhauer, VRW, 1998, p. 43: „Winckelmann ist für ihn daher Jahre später, im mittelpunkts- und
identitätslosen Deutschland, zwar eine antike Natur, die zu den Griechen zurückkehre, aber selber klassisch ist
ihm der Klassizist nicht.“ Cf. à ce sujet également: Winkelmann und sein Jahrhundert, op. cit., article intitulé
„Skizze zu einer Schilderung Winkelmann’s“, p. 211 sous la rubrique „Antikes“: „Hatte er [Winckelmann] nun
im Leben einen wirklich altertümlichen Geist, so blieb ihm derselbe auch in seinen Studien getreu […] so hat ein
Neuerer im ähnlichen Falle ein noch gewagteres Spiel, indem er bei der einzelnen Ausarbeitung des
mannigfaltigen Wiβbaren sich zu zerstreuen, in unzusammenhängenden Kenntnissen sich zu verlieren, in Gefahr
kommt, ohne, wie es den Alten glückte, das Unzulängliche durch das Vollständige seiner Persönlichkeit zu
vergüten.“
356
Ibid.
357
Voir WJ, préface: „Dass Winckelmann die Hinfälligkeit des Lebens und die Kontingenz überwunden habe.
Sein plötzlicher Tod habe ihm das Glück beschert, nicht alt werden zu müssen, und so präge sich das Bild der
unvergänglichen Jugendfrische dem Andenken ein.“
358
Le plan de l’édition prévoyait initialement la publication d’une série winckelmannienne comportant douze
volumes; de son vivant, Fernow arrive seulement à terminer deux tomes; après sa mort, Heinrich Meyer et
Johann Schulze se chargeront de la suite de la publication en collection libraire.
72
goethéenne,359 elle est en même temps censée la compléter par des écrits inédits.360 De cette
manière, on voulait achever une nouvelle édition,361 qui, contrairement à la publication
goethéenne,362 présentait une édition complète des œuvres winckelmanniennes, jusque-là
jamais réalisée. Par ailleurs, on y a ajouté, à l’issue d’un « examen soigné »,363 une annexe
critique364 sur laquelle nous allons encore revenir au cours de ce chapitre. De même, l’édition
fernowienne des œuvres de Winckelmann se distingue de l’ouvrage goethéen dans l’ensemble
par sa conception. Ainsi, Fernow place, pour ce qui est du contenu, le personnage de
Winckelmann au centre de son ouvrage, non seulement de par son importance historique,
mais également de par son parcours extraordinaire, qu’il met par ailleurs en exergue par ordre
chronologique comme une «brève esquisse de la vie de Winckelmann»365 à l’édition des
sources du premier tome, alors que Goethe se limite, dans son ouvrage, uniquement à
l’impression de deux lettres de Berendis suivies à la fin d’une présentation personnelle de
359
Goethe salue ce projet éditorial comme étant «l’un de ses vœux les plus chers» („einer [s]einer liebsten
Wünsche“ - voir lettre à Voigt du 1er mai 1807, Weimarer Ausgabe [WA], division IV, vol. 19, p. 316).
360
L’éditeur Walther formule, dans sa dédicace adressée au roi de Saxe Friedrich Auguste („Dem
Allerdurchlauchigsten Groβmächtigsten Fürsten und Herrn Herrn Friedrich August Könige von Sachsen,
Herzoge von Warschau“) son plan éditorial comme suit: „Zu diesem Unternehmen hat sich Professor Fernow,
nach einem vieljährigen Aufenthalte in Rom, verbunden mit einigen Freunden, entschlossen, und wir dürfen
hoffen, daβ diese Arbeit auch binnen zwey Jahren beendiget seyn werde. Es wird diese neue Original-Ausgabe
vor allen Französischen und Italienischen Uebersetzungen, besonders wegen der Vollständigkeit, den Vorzug
haben.“
361
WW, p. 3.
362
Ibid., p. 2.
363
Ibid., p. 6: „Das Interesse der Alterthumskunde fordert demnach, dass man diese Bemerkungen, nach
vorhergegangener, sorgfältiger Prüfung, in den Noten mit beibringe.“
364
Ibid. s. Fernow se réfère surtout, dans son commentaire de l’ouvrage, à la version condensée en italien de
l’édition winckelmannienne par Fea: „Damit aber nicht Noten auf Noten gehäuft das Werk über die Gebür
anschwellen, so hat man aus den Anmerkungen, mit welchen der Abate Fea die italiänische Uebersetzung der
Geschichte der Kunst und einiger andern Winckelmannischen Schriften in seiner Ausgabe so reichlich
ausgestattet hat, nur das zur Sache Gehörige ausgehoben, und auch die beigebrachten Bemerkungen Anderer in
zweckmäβiger Kürze zusammengefasst.“ Aux éditions de Dresde et Vienne déjà mentionnées, Fernow oppose
également la traduction de Fea: „Sachkundige fanden sogar, dass die italiänische, von Fea herausgegebene
Uebersetzung der Geschichte der Kunst in manchen Stellen des Textes einen besseren Zusammenhang hatte, und
überdem noch mit vielen schäzbaren, besonders den eigentlich gelehrten Theil betreffenden Noten und
Berichtigungen, und mit den erforderlichen Kupferstichen zur Erläuterung reichlich ausgestattet, folglich
brauchbarer war, als eine der deutschen Ausgaben; es trat also hier der sonderbare Fall ein, daβ ein klassisches
Werk der deutschen Literatur in Deutschland selbst lieber in der Uebersetzung als im Originals studirt, und von
den Alterthumsforschern in ihren Schriften angeführt wurde.“
365
WW, I.: „Kurze[n] Abriβ von Winckelmann’s Leben.“
368
Ibid., ps. 208-231: „Winckelmann wurde am 9ten Dec. 1717 zu Stendal in der Altmark gebohren. Er war der
einzige Sohn eines armen Schumachers daselbst […] Bey der groβen Armuth seiner Eltern musste
Winckelmann, dessen Neigung zum Studiren früh erwachte, seine Jugend in äuβerster Dürftigkeit hinbringen,
und sich mühsam durch Noth und Hindernisse hindurch winden, um endlich in der zweiten Hälfte seines Lebens
das Ziel seiner Bestrebungen zu erreichen.“
73
Winckelmann sous la forme des «Esquisses à une description de Winckelmann».366 En ce qui
concerne l’aspect formel, on remarque, dans un premier temps, que Fernow commence la
biographie de Winckelmann, de façon similaire comme dans ses monographies sur Arioste,
Carstens et Canova, par une situation du milieu d’origine: Winckelmann est né le 9 déc. 1717 à
Stendal dans l’Altmark. Il était le fils unique d’un pauvre cordonnier […] Vu la grande pauvreté de ses parents,
Winckelmann, dont le talent pour les études se réveillait de manière précoce, devait passer sa jeunesse dans une
extrême précarité, en se frayant péniblement un chemin entre la nécessité et les obstacles, afin d’atteindre enfin,
durant la deuxième moitié de sa vie, le but de ses ambitions.367
Lorsqu’on se concentre dans un deuxième temps sur la mise en scène littéraire de la
description biographique, on constate d’emblée la vivacité de l’extrait narratif et
l’accentuation sur la psychologie de l’individu comme étant des éléments frappants. De cette
manière, le lecteur doit se faire une image de Winckelmann en tant qu’homme, en prenant
aussi en considération les circonstances de vie peu propices et les conditions du cadre
historique, ayant également conditionné sa gloire posthume. De par cette mise en scène
consciemment classiciste, Winckelmann est quasiment érigé, autrement que chez Goethe, en
figure emblématique sur le piédestal idéel du mouvement de l’art weimarien. Cela peut être
considéré soit comme réflexe de résignation à l’égard de la production de l’art autour de 1800,
ou alors comme une génialisation atemporelle de ‘l’esprit classique.’ Mais Fernow est aussi
tout à fait conscient du fait qu’en raison de quelques inexactitudes d’ordre formel et propres
au contenu, qu’il, suivant sa démarche critique-historique, cherche par ailleurs à corriger dans
l’annexe en question, l’œuvre winckelmannienne ne peut pas revendiquer le statut d’un chef
d’œuvre littéraire. Or, il souligne en même temps, en guise de son plaidoyer, que la perfection
366
Voir à ce sujet p. 77 ibid. et WJ, ps. 208-231.
Ibid. Voir également la version goethéenne au sujet de «L’entrée» („Eintritt“), WJ, p. 210: „Eine niedrige
Kindheit, unzulänglicher Unterricht in der Jugend, zerrissenen, zerstreute Studien im Jünglingsalter, der Druck
eines Schulamtes, und was in einer solchen Laufbahn Ängstliches und Beschwerliches erfahren wird, hatte er mit
vielen andern geduldet. Er war dreiβig Jahr alt geworden, ohne irgendeine Gunst des Schicksals genossen zu
haben, aber in ihm selbst lagen die Keime eines wünschenswerten, möglichen Glücks.“
367
74
artistique, au sens de l’idéal classique, ne pourrait pas être atteinte aux temps présents.368 De
même, il faut noter ici que Fernow n’adapte pas, comme certains de ses contemporains lui en
firent le reproche par rapport à Kant, les idées winckelmanniennes, mais qu’il sonde plutôt de
manière critique ces derniers. Dans sa préface, il loue ainsi les écrits winckelmanniens en
raison de leur «simple dignité» et de «grand sens»,369 qui font de lui également un découvreur
des secrets de l’art,370 au même titre qu’un grand explorateur de l’Antiquité.371 Or, il met
clairement en relief, dans le premier tome des Études romaines, le fait qu’il ne considère pas
que la formule universelle winckelmannienne sur «la grandeur simple et calme» en tant que
«caractère de l’idéalité», comme il l’appelle, puisse desservir «la fin ultime de l’art.»372 Dans
ce contexte, on se heurte également à la question de savoir si Fernow dirige l’idéal des
Anciens délibérément contre la production de l’art de son temps, et si l’on peut considérer
cela comme une volonté d’émancipation vis-à-vis de Goethe, voire comme une légère
tentative de sa part, afin de refonder un mouvement classiciste de provenance
winckelmannienne? C’est qui est sûr, c’est que cette prise de distance critique, il réalise une
œuvre qui se distingue des publications winckelmanniennes précédentes non seulement dans
le sens où elle contient également, hormis l’édition intégrale de ses écrits jusque-là inédits,
l’annexe détaillée en question, dans laquelle il soulève, sous un jour nouveau et de façon
équitable, des questions propres à la théorie de l’art, comme par exemple à propos de
368
Ibid.: „Klassisch ist hier nicht das Werk selbst, insofern es eine vollkommene Gestalt erreicht hat; der
Kunstgeschichte ist dieser Abschnitt nicht vergönnt. Klassisch ist vielmehr der Geist antiker Grösse und
Einfachheit der sich in seinen Werken mit origineller Kraft auspräge.“
369
Voir préface WW, p. 1: „Schon seit ihrer ersten Erscheinung wurden Winkelmann’s Schriften, wegen der
einfachen Würde ihrer Schreibart, und wegen des grossen Sinnes, mit welchem er seine Gegenstände immer von
einem höheren Standpunkte betrachtet, und Ideen gemäss behandelt, nicht nur von den Deutschen, für die er
zunächst geschrieben, sondern auch von allen andern Nazionen, die auf Kunstliebe und Geschmack Anspruch
machen, und denen besonders das Hauptwerk unseres grossen Landsmannes, die Geschichte der Kunst, durch
Übersetzungen mitgetheilt worden, als klassisch anerkannt.“
370
WJ, p. 195: „Von den Geheimnissen der alten Kunst hatte Winckelmann den Schleier weggezogen und
gleichsam eine neue Welt entdeckt.“
371
Ibid.: „[…] als Künstler und Altertumsforscher Vorzügliches leistete.“ De même, Fernow mentionne dans ce
contexte Winckelmann en même temps que le philologue antique Carl Theodor Reiffenstein, dont il approuve
surtout «la méthode s’élevant par étapes» („stufenweis sich erhebende Methode“) de la genèse progressive de
l’artiste.
372
RS, I, p. 432.
75
l’allégorie. Dans une lettre adressée à Böttiger, Fernow mentionne Meyer comme l’auteur
d’une majeure partie des annotations, alors que des critères argumentatifs et thématiques
plaident plutôt pour lui comme étant le véritable rédacteur, d’une partie au moins, des
annotations, ce qui reste à déterminer, bien entendu. Abstraction faite de quelques remarques
plus ou moins pertinentes, la critique fernowienne se rapporte surtout à l’ «Essai sur
l’allégorie.»373 Dans ce contexte, il accuse Winckelmann, entre autres, de ne pas séparer
nettement les notions d’ornement, allégorie et symbole et d’avoir tendance à privilégier
l’expression allégorique. A l’opposé, Fernow voit dans le symbole le vrai signe esthétique
auto-référentiel, qui, comme signifié, peut exprimer adéquatement la sémantique de l’art, en
ayant un caractère universel, alors que l’allégorie, en étant le signifiant, ne représente qu’une
idée et, de ce fait, n’a qu’un caractère général: «La représentation allégorique ne signifie
qu’une notion différente d’elle»,374 et, pour cette raison, ne devrait pas être confondue avec les
figures
héroïques
au
caractère
symbolique,
comme,
par
moments,
le
pratique
Winckelmann.375 Un autre point de critique est l’ambition de ce dernier, de vouloir toujours
déchiffrer minutieusement des allégories nominales,376 alors qu’il ne s’agit pour la plupart que
d’ornements signifiants. Ainsi, Winckelmann distingue définitivement l’allégorie, l’ornement
et la décoration au caractère symbolique. D’après lui, c’est seulement le symbole qui est
capable d’exprimer de façon adéquatement le plus grand talent créateur. Tout à fait au sens
373
Voir annexe critique vol. II.
Ibid. p. 701. Cf. également la critique fernowienne de Winckelmann par rapport à son interprétation du lion
de Leonidas’: „Die Alten liebten dergleichen Allegorien bloβer Zeichen, die wenn sie treffend sind, durch das
Einfache [...] Der Löwe des Leonidas, den wir keinesfalls wie Winckelmann unter die Namenallegorien rechnen,
gehört dazu.“ La description de Winckelmann en question inspire par ailleurs Jean-Louis David à son tableau:
Léonidas aux Thermopyles (1814), en empruntant en grande partie les détails pittoresques de la narration Voyage
d’Anarcharsis de l’Abbé Barthélémy.
375
D’une façon générale, Meyer et Fernow font une distinction entre des allégories et des héros au caractère
symbolique comme Jupiter (image de la dignité suprême), Minerve (sagesse intelligente), Hercule (force),
Vénus (amour) et ainsi de suite. Voir Winkelmann’s Werke, II, p. 685: „[…] also Charaktere von der höchsten
Art, oder allgemeine von der Kunst verkörperte Begriffe nennt man, zum Unterschiede von allgemeinen
Allegorien, S y m b o l e.“
376
Cf. à ce sujet également l’étude plus spécifique de Gérard Raulet et Burghart Schmidt: Kritische Theorie des
Ornaments, Éd. Böhlau, Vienne, 1993. L’étude offre une vue globale sur le développement de l’ornement à
travers les époques, comme étant le synonyme pour parerga, où la relation entre ergon et parerga est mise en
évidence, et le parergonal devient le point de départ d’une considération à la fois philosophique et culturelle.
374
76
de l’esthétique référentielle, Fernow érige ainsi, en conséquence, la valeur symbolique377 en
postulat majeur d’une création premièrement orientée vers l’idéal.378 Or, la critique
winckelmannienne de Fernow sera ensuite nuancée par la remarque qu’on ne pourrait pas lui
reprocher de ne pas distinguer entre la symbolique, l’allégorie et la notion emblématique,
étant donné que les champs de l’histoire de l’art ne sont pas encore explorés avec une justesse
philosophique,379 ce qu’il laisse par ailleurs aux auteurs suivants.380 Vue dans l’ensemble,
l’édition fernowienne représente alors moins le mémorium d’un personnage historique, mais
plutôt le plaidoyer de son héritage intellectuel, ou, selon les termes de Fernow: Il n’a pas eu le
bonheur de produire l’œuvre classique, qui l’aurait préservée pour son immortalité, sous une nouvelle forme
plus achevée […] pour que sa perte irremplaçable reste d’autant plus perceptible pour la postérité.
377
381
Goethe: Über die Wahrheit und Wahrscheinlichkeit von Kunstwerken (1798), Weimarer Ausgabe, [WA], I,
ps. 255-266, ici p. 261.
378
RS, I, p. 355: „Jede wirkliche Darstellung individualisiert notwendig das Allgemeine […] das Geheimnis des
Künstlerischen besteht gerade darin, dass im Individuellen das Allgemeine nicht aufgehoben ist.“
379
Voir le commentaire de Fernow dans: Winckelmann’s Werke, II, p. 675 s.: „Hätte Winckelmann auf den
Unterschied zwischen Symbolik, Allegorie und emblematischer Bezeichnung Rücksicht genommen, so würde
wahrscheinlich die Eintheilung dieses Werkes und die Klassifikation der von ihm als Beispiele beigebrachten
Kunstwerke anders ausgefallen sein. Aber wir dürfen ihm diesen Mangel nicht zum Vorwurfe machen, als auch
jetzt diese verschiedenen Felder der Kunstdarstellung noch nicht gehörig gesondert, und ihre mannigfaltig
ineinander laufenden Grenzlinien mit philosophischer Genauigkeit bestimmt sind.“
380
Ibid, p. 676: „Nur bemerken wir, dass der, welcher in der Folge eine wohlgeordnetes und gründliches
Lehrbuch der Allegorie zu verfassen unternähme, diesen Zweck ohne eine genauere Unterscheidung und
Bestimmung jener nahe verwandten und doch zugleich verschiedenen Begriffe, nicht wohl erreichen würde.“
381
WW, p. XL, s.: „Ihm ward nicht vergönnt das klassische Werk, welches vor allen seine Unsterblichkeit
begründet, in erneuter vollkommnerer Gestalt herzustellen, damit sein unersetzlicher Verlust auch der Nachwelt
um so fühlbarer bliebe.“381
77
La critique de l’hétéronomie esthétique:
La critique de l’art contemporain et l’esquisse d’un nouvel idéal d’artiste:
Ludovico Ariosto ou Carstens versus Canova
78
II. 1. L’Arioste de Fernow: «L’un des rares favoris des dieux»
En tant qu’amateur d’art et collectionneur bibliophile, Fernow rapporte, dès son retour
d’Italie, une collection considérable d’œuvres classiques italiennes,382 qui devait finalement
arriver à Weimar en 1804, au terme des mois d’odyssée par voie navale.383 C’est précisément
à cette époque-là que Fernow commence pour la première fois à s’intéresser intensément à la
monographie d’artiste, et à en passer à l’écriture. Au départ, il projette la réédition de huit
ouvrages en langue allemande portant sur la vie et l’œuvre des personnalités italiennes en art
(Raphaël, le Titien, Leonardo de Vinci ainsi que Michel-Ange) et littérature (Dante,
Pétrarque, le Tasse et Arioste). Or, ce projet littéraire ambitieux, qui devait comporter au total
huit projets partiels ordonnés selon quatre complexes thématiques, et subdivisés en deux
tétralogies, ne verra jamais le jour, tout comme le lexique étymologique des langues romanes
qu’il avait prévu de rédiger.384 Ainsi, l’œuvre consacrée à Dante reste en grande partie
inachevée; celle au sujet de Torquato Tasso385 n’a probablement jamais été commencée; les
382
Dans une lettre adressée à Böttiger et écrite en août 1802, Fernow annonce son arrivée de la façon suivante:
„Ich bringe mir eine etwa tausend Bände starke italienische Bibliothek mit, welche nebst den Schriftstellern
dieser Nation auch die vorzüglichsten Werke zur Geschichte und Literatur dieses Landes enthält, die sich
wahrscheinlich in Deutschland nicht so leicht finden wird“ (JS, p. 77). Ainsi, Goethe devait également avoir été
au courant de l’immense collection de Fernow, probablement une raison de plus pour lui de convoquer
l’émigrant italien Fernow au terme d’un séjour de neuf ans à Rome à Weimar; d’autant plus que les trésors
littéraires de Fernow enrichissaient considérablement la collection des œuvres étrangères de la bibliothèque
Anna Amalia. Voir au sujet de la bibliothèque de Fernow l’article de Lea Ritter-Santini: Tausend Bücher Fernows Bibliothek, (VRW, ps. 114-129). Cf. au sujet du fonds fernowien à la bibliothèque Anna Amalia à cette
époque: Catalog der Bibliothek des Hrn. Professors Fernow, gefertiget im Febr. und Maerz 1809, [HAAB, Loc.
A. N. 5/6].
383
L’odyssée aventureuse des livres de Fernow (en passant e. a. par Rome et Livourne, au havre de Tönning
jusqu’à Weimar) dont les frais du voyage s’élèvent à environ 417 Taler, dure de l’été 1803 jusqu’au début de
l’année 1804. Les mois d’attente mettent la patience de Fernow à dure épreuve, étant donné qu’il craigne par
moments que ses «trésors littéraires […] étaient tombés dans les mains de pirates chrétiens» („literarischen
Schätze […] christlichen Freibeutern zum Opfer gefallen“/(JS, p. 302), et ainsi, étaient perdus pour toujours.
Déjà en juillet 1803, il confia à Böttiger ses peurs à ce propos: „Beten sie indessen mit mir zum Gott der Musen,
daβ er meine literarischen Schätze in seine Obhut nähme“ (voir JS, p. 81).
384
Fernow formule ce projet dans une lettre, datant de Weimar, le 10 février 1805, citée d’après JS, p. 335 s.:
„[die lateinischen Termini in den romanischen Sprachen (italienisch, spanisch, portugiesisch, französisch)
sollen] unter einem Gesichtspunkt, etymologisch unter ihre Stammwörter geordnet [ein] vollständiges Polyglott
der von der Lateinischen abstammenden Töchtersprachen [ergeben].“ Fernow mentionne dans ce contexte
également le projet d’une réédition des œuvres classiques chez la maison d’édition Cotta, dont il espère
l’effacement de ses dettes.
385
Fernow fut particulièrement fasciné par le poème de Torquato Tasso: «La Gerusalemme liberata.» De même,
il est possible d’établir un parallèle entre l’art poétique d’Arioste et celui du Tasse, voir à ce sujet l’étude de
79
éditions au sujet de Pétrarque386 et la monographie de Ludovico Ariosto sont les seuls
ouvrages qui se trouvent sous une forme finie. En ce qui concerne les techniques narratives de
la mise en scène littéraire, on constate au premier abord qu’on retrouve dans son écriture
monographique toujours la même structure formelle et de contenu. Ainsi il s’ensuit
généralement, après une dédicace, un passage détaillé d’introduction (numéroté en lettres
romaines), dans lequel il esquisse brièvement les buts qu’il envisage, en ce qu’il souhaite, par
cet ouvrage, apporter au lecteur. La véritable monographie commence par une reconstruction
minutieuse de la généalogie de la famille d’Arioste, dont les sources historiques utilisées sont
décrites en détail à l’aide de nombreux renvois littéraires.387 La biographie d’Arioste, quant à
elle, est rapportée de façon très précise, l’auteur étant toujours soucieux de mettre en parallèle
le parcours de l’homme et son activité littéraire. Ainsi, le lecteur découvre, au terme d’un
chapitre d’introduction (numéroté en lettres arabes), la biographie de l’artiste, dans la
tradition vasarienne,388 depuis sa plus tendre enfance; ce faisant, Fernow attache une grande
importance à l’authenticité littéraire. A part cela, il prête une attention particulière à la
portraitisation individuelle de l’artiste en ayant recours au contexte sociologique.389
Intéressons-nous maintenant de manière beaucoup plus précise aux différents points que nous
Lanfranco Caretti: Ariosto et Tasso, Turin, 1961. Au sujet de l’intérêt porté à la poésie d’Arioste et du Tasse
dans le Mercure allemand, voir également l’étude de Peter Kofler: Ariost und Tasso in Wielands Merkur, Éd.
Österreichischer Studien Verlag, Innsbruck, 1994, ainsi qu’Achim Aurnhammer: Torquato Tasso im deutschen
Barock, (Frühe Neuzeit vol. 13), Éd. Niemeyer, Tübingen, 1994, et, idem: Torquato Tasso in Deutschland. Seine
Wirkung in Literatur, Kunst und Musik seit der Mitte des 18. Jahrhunderts, (catalogue du musée de Goethe), Éd.
Manutius, Heidelberg, 1995.
386
C. L. Fernow: Francesco Petrarca: Nebst d. Leben d. Dichters u. ausführl. Ausgabenverzeichnissen, Ludwig
Hain (Éd.), Leipzig, 1818.
387
Dans l’annexe de l’œuvre on trouve au total deux cent seize annotations, que suivent un registre détaillé des
œuvres d’Arioste, qui est subdivisé selon les catégories suivantes: I. L’Orlando Furioso II. Commedie III. Le
Satire IV. Le Rime V. Erbolato VI. Poesie latine.
388
L’œuvre de Giorgio Vasari Vite de’più eccellenti pittori, scultori e architettori (1550-1568), parue pour la
première fois en 1550 (en deuxième édition en 1568), passe pour le modèle littéraire du roman traditionnel
d’artiste. Fernow possède aussi un exemplaire qui sera considéré par la suite comme ouvrage successif, Le vite
de’ pittori, scultori, ed architetti moderni, co’loro riratti al naturale (1664) de Giovanni Pietro Bellori, en
deuxième édition de l’œuvre romaine de 1728. En raison du transfert culturel France-Italie l’ouvrage contient
indirectement les thèses ekphrastiques d’André Félibien, dont Fernow a ainsi probablement pris connaissance.
Cf. Oskar Bätschmann: „Giovanni Pietro Belloris Bildbeschreibungen“, dans: Beschreibungskunst Kunstbeschreibung. Ekphrasis von der Antike bis zur Gegenwart, Gottfried Boehm et Helmut Pfotenhauer (Éd.),
Éd. Fink, Munich, 1995.
389
Cf. Daniel Lagoutte «La contribution de l’anthropologie», in: Introduction à l’histoire de l’art, Éd. Hachette,
1997 (2001).
80
venons d’énumérer, à l’aide des passages que nous avons choisis. Fernow place, en exergue
de son Arioste, une dédicace390 à laquelle il ajoute la remarque «honnêtement dévoué»,391 qui
s’adresse à son mécène et employeur, Monsieur le conseiller de la cour Wieland à Weimar:
A qui pourrais-je dédier la vie d’Ariosto avec plus de droit et de justesse qu’au poète de notre nation, qui a
enlevé le premier la muse de l’epos romantique de sa patrie méridionale et qui, le premier, a transféré le ton
épique à la fois léger et gracieux d’Ariosto, qui, jusque là, n’a jamais été atteint avec plus de justesse et de
beauté? Il a su lui conférer un si beau son qui, jusque là, n’a guère été modifié, le chanteur immortel du Nouvel
Amadis, d’Idris, d’Obéron et de beaucoup d’autres contes charmants: ainsi suis-je aussi tout à fait conscient du
fait que ce travail ne peut que très peu et d’une manière insatisfaisante rendre justice à ce destin honorable.392
Et Fernow ne se contente nullement de porter des louanges à l’art poétique de Wieland,393
mais il fait par la suite l’éloge de sa personne, à l’instar d’un héros de l’Antiquité:
Que la déesse de l’éternelle jeunesse couronne votre digne chef encore pendant longtemps avec les roses non
fanées de la santé, en égayant le soir de votre vie glorieuse avec les jolies images d’un plus beau passé.394
Cette louange adressée au «poète de la nation» a certainement suscité la sympathie de
l’éditeur du Teutsche Merkur.395 De même, il demande de façon diplomatique à Wieland «une
390
Voir Klaus Manger: Fernows literarische Formen, KAW, p. 68 s. Grâce à la diplomatie des dédicaces
Fernow peut se construire un vaste réseau de contacts, auquel appartiennent e. a. Friederike Brun, Hirt, Genelli,
Reinhart, Seume et Uhden.
391
Cf. préface ARIOST: „ehrergiebigst zugeeignet.“
392
Voir supra, ibid.: „Wem könnte ich das Leben Ariosto’s mit mêr Fug und Recht zueignen, als dem Dichter
unserer Nazion, welcher zuerst die Muse des romantischen Epos ihrer südlichen Heimat entfürte, welcher zuerst
den leichten, anmutigen Erzälungston Ariosto’s in einer von keinem andern mêr erreichten Volkommenheit und
Schönheit in unsere Sprache übertrug, und ihr einen bis dahin kaum geänderten Wolklang zu entlocken wuste,
dem unsterblichen Sänger des NEUEN AMADIS, des IDRIS, OBERON und so vieler anderer reizender
Erzälungen und Märchen: wäre ich mir nicht zugleich lebhaft bewust, wie wenig diese geringe Arbeit einer so
ehrenvollen Bestimmung genügend entspricht.“
393
Cf. le commentaire de Fernow au sujet de la version allemande de J. D. Gries Lodovico Ariosto’s Rasender
Roland (1804), dans: Jenaische Allgemeine Litteratur-Zeitung (1805), n° 27-29, tab. 227: „Unsere Sprache
besitzt keine vollkommneren Muster für den erzählenden Ton des romantischen Epos, und dürfte so leicht auch
wohl keines erhalten, welches die Leichtigkeit, die Anmuth, und das blühende Colorit Ariosts gelungener
wiedergäbe, als Wielands Oberon und Idris, obgleich die in freyeren Stanzenformen, die dieser, in der Harmonie
und anmuthigen Bewegung des gereimten Verses noch von keinem erreichte, Dichter seinem Genius und seiner
Dichterlaune am angemessensten fand.“ De même, Fernow s’essaya comme réciteur des poèmes d’Arioste dans
l’esprit des Improvisti, ce qui amusait les membres du cercle littéraire de Tiefurt et révele également les qualités
de Fernow en tant que homme de compagnie, que Goethe lui-même estimait comme «inestimable»
(„unschätzbar») «au sein de cette petite société ci-rassemblée» („die daselbst sich versammelnde Societät“).
Voir également à ce sujet la lettre de Goethe adressée à Humboldt, datant du 30 juillet 1804, citée d’après
l’édition weimarienne, quatrième section, vol. 17, Éd. Böhlau, 1895, p. 172.
394
Ibid.: „Möge die Göttin ewiger Jugend noch lange Ihr ehrwürdiges Haupt mit unverwelklichen Rosen der
Gesundheit umkränzen, und durch liebliche Bilder einer schöneren Vorzeit den Abend Ihres ruhmvollen Lebens
erheitern!“
81
réception indulgente»,396 quand il ose «mettre son honorable nom en exergue»397 de son
ouvrage, tout en exprimant son véritable vœu, à savoir de pouvoir aussi compter sur la
«sympathie personnelle»398 de son employeur et mécène pour le futur. De même, Fernow
annonce clairement, dans la préface de son Arioste, ses motivations en tant que biographe.
Ainsi revendique-t-il a priori dans son œuvre qui, d’après lui, «a été rédigée d’après les
meilleures sources»,399 le statut de l’authenticité littéraire, ce qu’il cherche à légitimer par le
fait de se concentrer principalement, en dehors des sources habituelles, sur les témoignages
provenant de la famille d’Arioste400 et d’autres documents historiques du même type. Dans ce
contexte, il est aussi intéressant de voir que Fernow présente au lecteur, déjà dans la préface,
les biographies des auteurs des œuvres précédentes consacrées à Arioste, et que, ce faisant, il
examine scrupuleusement leurs compétences en tant qu’historiens. Tout d’abord, il constate
qu’ «aucun parmi les hommes nommés n’était tout à fait contemporain de notre poète», 401 ce
qui implique également qu’il ne puisse y avoir en aucun cas une historiographie synchrone, ce
qui met en doute l’authenticité des biographes en question. En règle générale, Fernow opère,
par rapport à la bibliographie critique, une distinction entre les écrivains anciens402 comme
395
Pour plus d’informations concernant l’histoire de la réception et le spectre d’action du Mercure allemand cf.
l’étude de Andrea Heinz (Éd.): Der Teutsche Merkur - die erste deutsche Kulturzeitschrift?, (Ereignis WeimarJena. Kultur um 1800: Ästhetische Forschungen“, vol. 2), Éd. Winter, Heidelberg, 2003.
396
Ibid. ss.: „nachsichtsvolle Aufnahme.“
397
Ibid.: „verehrten Namen.“
398
Ibid.: „persönliche[s] Wohlwollen.“ Fernow rédigea comme correspondant allemand de ce dernier un certain
nombre d’articles pour le Mercure allemand, dont Wieland fut le directeur et qui l’invita aux salons littéraires de
Tiefurt, où Fernow fit également la connaissance du gendre de Wieland, l’éditeur Gessner, qui l’aida à publier le
Canova en 1806. De même, il s’essaya comme son peintre-portraitiste, dont témoignent les propos suivants de
Wieland, issus de sa correspondance avec le philosophe Karl Leonhard Reinhold, qui fut également le professeur
de Fernow, datée 28 septembre 1793: „[…] H. Fernow verlangt mein altes runzlichtes Angesicht noch eine g a n
z e S t u n d e lang zu sehen. Tant pis pour lui! Hingegen wird das Bild, das er nach selbigem zu zeichnen
angefangen hat allerdings dabey [sic] gewinnen.“ Voir Wielands Briefwechsel, op. cit. Le portrait en question
n’y figure pas (voir le commentaire de Klaus Gerlach). C’est cet hommage à Wieland que Johann Gottlieb Karl
Nauwerck a dû avoir présent à l’esprit quand il désigne Fernow comme adepte de la philosophie aristipienne
(„Adepten der aristippischen Lebensweisheit“, voir l’article de Fritz Fink: Carl Ludwig Fernow - Der
Bibliothekar der Herzogin Anna Amalia, Éd. Fink, Weimar, 1934, p. 40 et cf. également JS, p. 44.
399
ARIOST, voir l’appel du titre: „nach den besten Quellen verfasst.“
400
Comme les témoignages de son frère Gabriele et de son fils Virginio etc.
401
Ibid., p. XV: „keiner der genanten Männer […] völlig gleichzeitigen Geschlechts mit unserm Dichter [war].“
402
A savoir les écrivains avant le XVIème siècle.
82
Pigna,403 Fornari404 et Garofalo,405 et Mazzucchelli,406 ainsi que les écrivains postérieurs,407
tels que Barotti,408 Frizzi409 et Tiraboschi.410 D’après l’évaluation de Fernow, ni les
représentants du premier groupe, ni ceux du deuxième ne rendent tout à fait justice au postulat
de la représentation authentique. Sa critique se réfère surtout à la précision insuffisante, qu’il
constate surtout par rapport aux auteurs anciens:
Ces trois biographies plus anciennes d’Arioste ont non seulement en commun un manque de précision
considérable, mais aussi le défaut que la plupart des faits ci-énoncés ne sont pas définis en détail et que le récit
ne respecte pas avec justesse la suite temporelle des événements; c’est pour cette raison que beaucoup de choses
dans leurs récits restent obscures et inconnues, même si, au fond, les faits y sont énoncés avec justesse.411
Par la suite, Fernow déduit, de par cette constatation, sa propre légitimation en tant que
‘biographe authentique’, qui, à la différence des anciens comme des plus récents biographes
d’Arioste, cherche à présenter au lecteur surtout l’individualité artistique, à savoir le
„caractère humain du poète“,412 en faisant également la lumière sur l’entourage social, c’està-dire les «circonstances de vie de ces poètes»,413 car, d’après sa conviction «sans la
connaissance de celles-ci plusieurs passages dans leurs œuvres ne pouvaient être compris et
expliqués avec justesse.»414 A part cela, Fernow met un accent majeur sur la considération des
œuvres en elles-mêmes, qui, selon sa conception, reflètent le mieux l’introspection du poète:
La source la plus sûre et particulièrement riche en détails concernant la vie intérieure du poète (reflétant son
403
ARIOST, p. XVIII.
Ibid., XIX s.
405
Ibid.
406
Ibid., XXII.
407
Ibid., XXI.
408
Ibid., XXIII.
409
Ibid., s.
410
Ibid., XXV.
411
Ibid. XXI.
412
Ibid, p. XI: „menschlichen Karakter des Dichters.“
413
Ibid.: „die Lebensumstände jener Dichter.“
414
Ibid., p. X: „[…] one die Kenntnis derselben, merere Stellen in ihren Werken nicht gehörig verstanden und
richtig erklärt werden konten.“
404
83
caractère, sa pensée, ses circonstances de vie, ses talents et ses désirs) sont indubitablement les œuvres en ellesmêmes.415
Ce qui est intéressant, c’est que cette focalisation sur la psyché de l’artiste dans le contexte de
ses œuvres sera également développée au XXème siècle par les études de Ernst Kris416 et Otto
Kurz,417 qui, succédant à Freud, démontrent dans leurs études non seulement les liens entre la
psychose et le génie artistique, mais recensent également de manière critique la création d’un
mythe artistique dans la littérature. En l’occurrence, Ernst Gombrich418 va, se fondant sur les
études de Kris, formuler par la suite la théorie de la régression, d’après laquelle le
primitivisme des formes expressives en art est dû à la psychose des temps modernes. Suivant
une logique similaire, mais de façon moins drastique, Fernow veut avant tout présenter au
lecteur le parcours de l’artiste, aussi à l’égard de la genèse de ses œuvres:
Je me suis volontairement soustrait à ce genre de recherches; car qu’est-ce qui pourrait être plus attirant et plus
enrichissant que de s’intéresser à l’évolution de la formation d’esprits exceptionnels; et bientôt ceux-ci m’ont fait
un si grand effet que je suis allé plus loin que l’aboutissement à de telles fins l’aurait requis.419
De même, Fernow cherche, par le biais de la monographie d’Arioste, à montrer au lecteur la
corrélation existante entre l’esprit humain et le génie divin, à l’égard du disegno interno:420
Lorsque dans la force la plus miraculeuse et la plus irrationnelle de l’esprit humain l’apparition du divin est
admise au sens exact, il faut admettre que les Italiens, en ce qui concerne sa reconnaissance, ont été plus sévères
que trop généreux envers leurs grands poètes et artistes, mais en même temps, extrêmement justes.421
415
Ibid., XIV: „Die zuverläβsigste und besonders für des Dichters inneres Leben, für seine Gesinnung, seine
Denkweise über viele Angelegenheiten des Lebens, für seine Neigungen und Wünsche wichtige, und
reichhaltigste Quelle sind unstreitig dessen Werke selbst […].“
416
Ernst Kris: „Die Charakterköpfe des Franz Xaver Messerschmidt - Versuch einer historischen und
psychologischen Deutung“, dans: Jahrbuch der Kunsthistorischen Sammlungen in Wien, nouvelle série, vol. VI,
Wien 1932, ps. 169-228, idem: „Ein geisteskranker Bildhauer…“, dans: Imago, vol. XIX, Vienne, 1933.
417
Ernst Kris, Otto Kurz: Die Legende vom Künstler: ein geschichtlicher Versuch, Éd. Krystall, Vienne, 1934,
paru en édition élargie avec une préface de E. H. Gombrich, en traduction allemande: Éd. Suhrkamp,
Francfort/M., 1980.
418
Ernst Gombrich: Art and Illusion. A Study in the Psychology of Pictorial Representation, Éd. University
Press, Princeton, 1972.
419
ARIOST, p. XI: „Gern unterzog ich mich diesen Forschungen; denn was kann anziehender und lehrreicher
sein, als dem Entwickelungs- und Bildungsgange auβserordentlicher Geister nachzuspüren; und bald gewannen
sie so groβsen Reiz für mich, dass ich darin weiter ging als das Bedürfnis jener Zwecke forderte.“
420
Vasari fut le premier à distinguer le disegno esterno du disegno interno, en insistant sur l’aspect extérieur
(l’aspect extérieur d’un tableau) et intérieur (comme reflet de la vie intérieure de l’artiste) d’une œuvre d’art.
84
Cette glorification de la création humaine comme apparition du divin est un moment récurrent
dans l’écriture monographique et correspond parfaitement à la conception classique d’Idéa,
qui est traditionnellement attribuée au sculpteur Phidias.422 La réception italienne de l’art de la
Renaissance, à laquelle Fernow fait ici manifestement allusion, illustre par contre la quête
d’un art national et, liée à cela, l’emphase de la personnalité d’artiste, un phénomène que
Hegel interprète comme étant un principe logique de l’histoire des idées et que Jacob
Burckhardt423 thématise à l’exemple de l’imperium romanum. La réflexion d’André Chastel424
va dans une direction similaire; l’histoire de l’art a pour lui premièrement pour fonction, de
par la caractérisation d’un art national, de mettre en relief la particularité d’un pays, et, ce
faisant, de consolider le sentiment d’appartenance nationale. A l’opposé, Fernow ne met
qu’un accent en marge sur l’emphase de la personnalité d’artiste et la valorisation de l’art
national, mais insiste surtout sur la genèse d’artiste, ce qu’illustre son œuvre dédiée à Arioste.
Ainsi, l’historien Fernow s’insère parfaitement dans la lignée herdérienne425 du changement
de la perception426 de son temps, car il insiste moins sur la simple énumération des
événements historiques, en mettant plutôt l’accent sur la synthèse qui en résulte, à savoir la
philosophie de l’histoire.427 En ce qui concerne la deuxième ambition de Fernow en tant
421
Ibid., p. XXXII: „Wenn also in dem wunderbarsten und unbegreiflichsten Wirken des menschlichen Geistes
die Erscheinung des Götlichen überhaupt zugegeben wird, so mus man gestehen, dass die Italiäner, in der
Anerkennung desselben, gegen ihre grosen Dichter und Künstler vielmer zu strenge als zu freigebig, aber
zugleich höchst gerecht, gewesen sind.“
422
Cf. Karl-Heinz Simon et Martin Pfänder: Polyklet und Phidias: von Helden aus Marmor und Bronze,
(Zeitreise durch die Kunstgeschichte), Éd. Klett, Stuttgart, Düsseldorf, Leipzig, 1999.
423
Jacob Burckhardt: Zivilisation in der italienischen Renaissance, 1860.
424
André Chastel: Introduction à l’histoire de l’art français, Flammarion, (coll. Champs), Paris, 1993.
425
Il convient ici également de noter ici qu’entre Fernow et Herder, il y a eu un contact personnel au sein du
cercle littéraire regroupé autour de la duchesse Anna Amalia (cf. le commentaire de Fernow au sujet de ceux
qu’il appelle les «prêtres muses» et «hôtes de maison» („Musenpriestern“ et „Hausgenossen“) dont parmi eux
„[…] Wieland, Göthe, Herder, Schiller“, cité selon JS, p. 325).
426
Au sujet de la notion du changement de perception (Wahrnehmungswandel), voir l’étude détaillée de Klaus
Manger: Das Ereignis Weimar-Jena aus literaturwissenschaftlicher Sicht, (Sächsische Akademie der
Wissenschaften), vol. 139/cahier 5, Éd. S. Hirzel, Stuttgart/Leipzig, 2005, p. 12.
427
Cf. Concernant la fonction de la philosophie de l’histoire chez Herder, voir les études de Ralf Simon:
Das Gedächtnis der Interpretation. Gedächtnistheorie als Fundament für Hermeneutik, Ästhetik und
Interpretation bei Johann Gottfried Herder, Éd. Meiner, Hamburg 1998, ainsi que celle de Franz-Josef Deiters:
„…über einem Brette, auf offnem allweiten Meere…Johann Gottfried Herders Konzept der Dichtung als
Medium der kulturellen Identität und das Problem einer Hermeneutischen Kulturanthropologie“, in: Estudios
Filológicos Alemanes, n° 8, Fernando Magallanes Latas (Éd.), Sevilla, 2005, ps. 155-168.
85
qu’auteur, à savoir celle de l’individualisation, on peut constater que celle-ci se présente en
association avec la tendance humaniste se manifestant alors dans l’écriture historique: ainsi,
ce n’est plus l’historicité de manière isolée comme pure évaluation des événements
historiques, mais plutôt la présentation de l’individu, à savoir «l’homme entier»428 et «l’esprit
nu»,429 dans son opposition entre nature et culture,430 qui seront désormais au centre d’une
analyse historique,431 anthropologique432 et encyclopédique.433 Cela est en premier lieu dû à
l’évolution de l’anthropologie comme science indépendante basée sur la nature dualiste de
l’homme (homo/animal), qui est en même temps à focaliser comme réponse à la scission
cartésienne de l’homme en res cogitans et res extensa. La véritable origine de la philosophia
anthropologica se trouve déjà dans les tendances des Lumières, comme par exemple la
naturalisation, sensualisation et psychologisation de l’homme, qui a sans doute préparé le
chemin à une exploration physio-médicale. Dans le domaine des beaux-arts, des réflexions
anthropologiques jouent également un rôle important, aussi à l’égard des débuts de
l’esthétique autonome à cette époque, qui seront surtout conditionnés par les discours de
l’anthropologie littéraire (exempla anthropologica). Dans ce contexte, la pensée humaniste434
de Herder s’avère en contrepartie comme étant décisive pour la métaschématisation graduelle
428
Cf. Der ganze Mensch - Anthropologie und Literatur im 18. Jahrhundert, DFG-Symposium, Hans Jürgen
Schings (Éd.), Éd. Metzler, Stuttgart/Weimar, 1992.
429
Hans et Mickaël Eysenck: «L’esprit nu», in : Mercure de France, Paris, 1981.
430
Daniel Lagoutte: «La contribution de l’anthropologie», dans: Introduction à l’histoire de l’art, ps. 42-50, Éd.
Hachette, 1997 (2001), ici p. 43: «Derrière chaque artiste, et indépendamment de lui, il y a d’abord un homme.
C’est lui que l’anthropologue, celui qui étudie l’ensemble des conduites humaines, interroge d’abord.
L’anthropologie traite essentiellement de l’opposition nature/culture.»
431
Voir, pour ce qui est de la Individualsemantik dans le contexte du tournant historique qui survient dans
l’écriture biographique l’étude de Helmut Scheuer: Biographie. Studien und Funktion und zum Wandel einer
literarischen Gattung vom 18. Jahrhundert bis zur Gegenwart, Éd. Metzler, Stuttgart, 1979.
432
Voir note n° 431, ibid., p. 49: «[…] il est évident que chaque homme est une totalité bio-psycho-sociologique.
L’homme est un être culturel par nature parce qu’il est un être naturel par culture» (Edgar Morin).
433
Ulrich Schulz-Buschhaus: „Bourget und die ‘multiplicité du moi’“, dans: Die Modernisierung des Ich.
Studien zur Subjektkonstitution in der Vor- und Frühmoderne, Manfred Pfister (Éd.), Éd. Rothe, Passau, 1989,
ps. 53-63.
434
Fernow professe ailleurs sa foi profonde en l’humanité („feste[n] Glaube[n] an Humanität in der
Menschheit“, RS, III, préface). Cf. les lettres herdériennes: Briefe zur Beförderung der Humanität [10
collections, (1791-1797)] qui auraient pu inspirer cette confession d’humanité, cf. la citation de Herder:
„Betrachten wir die Menschheit, wie wir sie kennen, nach den Gesetzen, die in ihr liegen, so kennen wir nichts
Höheres, als Humanität im Menschen; denn selbst wenn wir uns Engel oder Götter denken, denken wir sie uns
nur als idealistische, höhere Menschen.“ Cf. également l’étude de Michael Zaremba: Johann Gottfried Herder Prediger der Humanität, 2002.
86
de l’individu.435 Cependant, il faut également relever le fait que Herder, à l’opposé de Fernow,
ne considère pas l’art comme le privilège de quelques esprits fortunés (bevorzugter Geister),
mais plutôt comme un don à la fois mondial et propre aux peuples (Welt- und Völkergabe). A
part cela, on peut également, suivant cette logique de la pensée humaniste, faire un
rapprochement entre l’Orlando d’Arioste, l’Obéron de Wieland et l’Arioste de Fernow à
l’échelle de l’histoire des idées. Étant donné que l’épopée chevaleresque, l’epos en vers
romantique et la monographie d’artiste dite ‘moderne’ ont en commun le fait qu’on retrouve
au centre de la présentation biocursive un protagoniste disposant des facultés supra-humaines.
Cette référence transcendantale est, dans le premier cas, le monde post-médiévale des sagas,
pour ce qui est du second, l’univers romantique du merveilleux et, quant au troisième, l’espace
utopique classique de l’Antiquité. Georges Dumézil part d’une réflexion analogue, d’après
laquelle le ‘mythe du génie’ trouve d’une manière générale son application dans le contexte
militaire, religieux et artistique, de sorte que les délimitations entre le héros, le missionnaire
et le génie se dissolvent, étant donné que tous ces personnages dépassent leur contingence
existentielle pour accéder à la sphère transcendante. A partir de cette double perspective, à la
fois authentique et individuelle, l’œuvre de Fernow portant sur Arioste illustre ainsi non
seulement le développement du genre littéraire de la biographie d’artiste après Vasari,436
mais encore le changement de paradigme ‘individualiste’ dans la littérature des ‘Vite’,437 allant
de pair avec la recherche de l’anthropologisation littéraire438 et la visualisation définie par
435
D’après la théorie herdérienne, l’homme est déjà ‘métaschématisé’ de par sa perception psycho-empirique;
voir à ce sujet les études en question qui anticipent, de manière frappante, la Gestalttheorie moderne (cf. W.
Köhler, Psychologie der Form, 1929). Dans le même sillage, Schiller prend manifestement le contrepied de la
théorie de la connaissance de Kant, voir la Metakritik zur Kritik der reinen Vernunft et Kalligone [Éd.
Hartknoch, Leipzig, 1799 et 1800]. Cf. à ce sujet également W. Köhler, Psychologie der Form, Éd. Bergmann,
Munich, 1929.
436
Cf. Hans-Martin Kruckis: „Biographie als literaturwissenschaftliche Darstellungsform im 19. Jahrhundert“,
dans: Wissenschaftsgeschichte der Germanistik im 19. Jahrhundert, Jürgen Fohrmann et Wilhelm Voβkamp
(Éd.), Éd. Metzler, Stuttgart & Weimar, 1994.
437
Pour ce qui est la genèse du genre littéraire de la biographie d’artiste dans l’espace germanophone, voir
l’étude de Karin Hellwig: Von der Vita zur Künstlerbiographie, Éd. Akademie Verlag, Berlin, 2005.
438
Cf. Helmut Pfotenhauer: Literarische Anthropologie. Selbstbiographien und ihre Geschichte - am Leitfaden
des Leibes, (Germanistische Abhandlungen n° 62), Éd. Metzler, Stuttgart, 1987.
87
Erwin Panofsky439 de l’artiste en tant qu’homme. Dans ce contexte, Jean Clair relève
également la question, de savoir dans quelle mesure la genèse de l’histoire de l’art peut être
considérée comme l’histoire des idées, à savoir le „point de vue anthropographique“
comparaison ethnographique des cultures, qui se situe, du point de vue scientifique, entre
l’herméneutique et la psychanalyse. Dans ce contexte, il constate, entre autres, que celle-ci
reflète l’histoire de l’homme, et pas seulement celle d’un développement formel, et de par
cela, doit être vue dans le contexte de l’histoire des sciences et du progrès technique.
Cette recherche d’un déchiffrement rationnel de l’art herméneutique universel,440 est
également à mettre en perspective en étroite corrélation avec le souci scientifique d’un
décodage empirique de l’homme dans son entité,441 qu’il cherche d’ailleurs à réaliser sur le
plan littéraire. Ut homo rerum natura ou scientia poetica:442 l’objet est désormais la
représentation de l’homme lui-même, à l’égard des circonstances extérieures, comme l’illustre
également le personnage d’Orlando dans le Roland furieux:
Son grand poème captive le lecteur par cette richesse infinie de vie, qui s’impose de façon complexe au regard
du lecteur, de manière qu’il se perde dans le labyrinthe des événements en constant changement, qui, comme le
fil d’un textile artistique, se rejoignent dans une diversité bariolée. Stupéfié, il regarde ainsi le génie géant, qui a
su donner naissance à un tel monde, en représentant, comme s’il se livrait à un jeu léger, dans l’ordre un sujet
énorme recouvrant mille étoffes à une entité artistique, dont le contenu et la dimension perturbent même le
439
Erwin Panofsky: Meaning in the Visual Arts, Doubleday, New York, 1955 et Jean Clair: Méduse,
(Connaissance de l’inconscient), Gallimard, Paris, 1989. Quant à l’élaboration successive de l’herméneutique au
sens d’une «anthropologie du visuel», à partir de la metapsychologie freudienne et la somatique, cf. l’étude de
Rosalind Kraus: The Optical Unconscious, The MIT Press, New York, 1993. Voir également Georges DidiHuberman: Devant l’image - Questions posées aux fins d’une histoire de l’art, Éditions de minuit, Paris, 1990,
ps. 219 s.: «Au modèle ordinaire de visibilité auquel l’historien se sacrifie le plus spontanément, nous avons
tenté de substituer une exigence de nature plus anthropologique, une exigence que nous abordons à travers le
terme de visuel.»
440
Ruth Peter: Hermeneutica universalis. Die Entfaltung der historisch-kritischen Vernunft im frühen 18.
Jahrhundert, (Frankfurter Hochschulschriften zur Sprachtheorie und Literaturästhetik, vol. 12), Éd. Lang,
Francfort/M., 2002.
441
Cf. le commentaire fictif de Goethe attribué au philosophe dans Le collectionneur et les siens, qui se réfère à
Schiller: „Aber der Mensch ist nicht bloβ ein denkendes, er ist zugleich ein empfindendes Wesen. Er ist ein
Ganzes, eine Einheit vielfacher, innig verbundender Kräfte und zu diesem Ganzen des Menschen muβ das
Kunstwerk reden, es muβ dieser reichen Einheit, dieser einigen Mannigfaltigkeit in ihm entsprechen.“
442
Cf. Norbert Elsner et Werner Frick (Éd.): Scientia poetica - Literatur und Naturwissenschaft, Éd. Wallstein,
Göttingen, 2004. L’étude a pour objet de démontrer comment l’antagonisme entre les sciences naturelles et
humaines formulé par J. P. Snow s’applique aussi à la littérature.
88
regard le plus scrutateur et le plus complexe. C’est ici que se révèle l’artiste, de par la grandeur de sa création,
comme un être surhumain.443
Il est intéressant que cette thématique renvoie également à la dix-neuvième lettre de Schiller
sur l’esthétique, dans laquelle on trouve une métaphore similaire, à la différence que Fernow
remplace l’univers schillérien des apparitions444 par celui des événements changeants.
D’après lui, le génie d’Arioste se manifeste non seulement dans la légèreté de jeu
caractérisant son écriture, mais également par rapport à la diversité idéelle, qui, malgré la
richesse en facettes, laisse transparaître une unité littéraire de l’ensemble. On pensera
notamment à la technique du décousu de Diderot dans son œuvre Le rêve d’Alembert, qui
excelle par l’enchaînement arbitraire des transitions, à la fois rapides et légères, au cours
d’une conversation ou d’une correspondance littéraire. De même, Yves Belaval445 voit dans
cette construction de toute évidence spontanée, mais pourtant bien réfléchie, non seulement la
preuve pour le savoir-faire littéraire de Diderot et l’illustration de son enthousiasme artistique,
mais également la preuve de son véritable génie. Fernow aspire également à cette unité dans
la diversité dans le corpus littéraire, même s’il reste toujours fidèle au fil rouge dans sa
narration, à la fois à l’égard chronologique et topologique. Mais pourtant, ce serait sousestimer l’œuvre de Fernow, que de réduire son contenu à la simple genèse du génie classique,
étant donné que Fernow rend tout à fait justice à ces deux postulats en tant qu’auteur critique:
c’est la revendication de l’authenticité littéraire, d’un côté, et la volonté de la mise en scène de
l’individualité artistique, de l’autre. Vu sous cet aspect, il paraît aussi moins hyperbolique de
constater que Fernow réussit à réaliser, au niveau littéraire, quelque chose de comparable à ce
443
ARIOST, p. XII s.
AW, p. 102.
445
Yves Belaval in Encyclopédie universalis, version Cd-Rom, 2005: «C'est le décousu de la conversation avec
ses ‘liaisons rapides et légères’, soit dans un groupe, soit cette conversation imite la conversation; cet
enthousiasme s’écoute. Ce décousu exige une grande maîtrise, et la maîtrise nous renvoie toujours à l'unité de
quelque pensée forte. Il suffit de se laisser aller à ces sortes de rêve: un d'Alembert y engendre toujours un
monde à partir du chaos.» Cf. à ce sujet les études de Yves Belaval: L'Esthétique sans paradoxe de Diderot, Éd.
Armand Colin, Paris, 1950, et par ailleurs Jacques Chouillet: La Formation des idées esthétiques de Diderot, Éd.
Gallimard, Paris, 1973, et: Diderot. Poète de l'énergie , Éd. PUF, Paris, 1984.
444
89
qu’il admire chez son idole: la multiperspectivité ou la plurifocalité de la présentation, non
seulement vue sous la forme d’une anthologie poétique, mais également comme
agglomération épique, qui se joint, malgré l’hétérogénéité des parties, à une entité homogène.
Si Fernow insère ainsi Arioste à la fin de son ouvrage parmi les favoris des dieux, non
seulement le titre en ajout «Le divin»446 s’explique, mais également le cercle des poetae
laureatae se clot: Wieland et Arioste sont éternisés comme pairs dans l’Olympe littéraire de
Fernow, en servant quasiment de modèle à la genèse de génie de Carstens, comme nous allons
le voir dans le chapitre suivant.
446
Cf. ARIOST, titre.
90
II. 2. Asmus Jakob Carstens: «Le génie né pour les beaux-arts»
Tout d’abord, on remarque que l’ouvrage de Fernow dédié à La vie et l’œuvre d’Asmus Jakob
Carstens suscite, dès sa première parution en 1806, aussi de l’intérêt en France, car le premier
chapitre apparaît en traduction française déjà en 1808, dans le journal artistique intitulé
Magasin encyclopédique de l’éditeur Louis-Aubin Millin de Grandmaison,447 qui est réputé
comme germanophil et ami proche de Baggesen.448 Cette circonstance est peut-être en partie
déductible au postulat original de l’auteur, qui revendique dans son œuvre, entre autres, une
authenticité parfaite dans la représentation biographique, étant donné qu’il peut se faire
prévaloir «de plusieurs années vécues en confidence avec celui-ci», à côté de nombreux
propos qu’il prétend pouvoir rapporter «de sa propre bouche» (XIII). Ainsi, Fernow
représente quasiment un intermédiaire en tant que porte-parole fictif de Carstens,449 à qui il
fait raconter à la première personne une partie de la description de sa propre vie, depuis sa
formation précoce jusqu’à son retour du voyage en Italie. En l’occurrence, le véritable centre
d’intérêt de l’œuvre réside non pas dans la biographie de l’artiste, mais plutôt dans la genèse
d’artiste «comme celui-ci est devenu ce qu’il est devenu.» Dans la préface, Fernow esquisse
ainsi sa conception du vrai génie, dont il voit l’épanouissement créatif surtout conditionné par
des facteurs extérieurs, d’ordre socio-économique comme socioculturel, qui peuvent s’avérer
à la fois comme étant propices ou défavorables à la formation de son talent:
447
Fernow: Leben des Künstlers Asmus Jakob Carstens, ein Beitrag zur Kunstgeschichte des achtzehnten
Jahrhunderts, Éd. Hartknoch, Leipzig, 1806.
448
Voir à ce sujet Geneviève Espagne et Bénédicte Savoy (Éd.): Aubin-Louis Millin et l'Allemagne. Le Magasin
encyclopédique - Les lettres à Karl August Böttiger, Série Europaea Memoria (Studien und Texte zur Geschichte
der europäischen Ideen, n° 41), Éd. Olms/Weidmannsche Verlagsbuchhandlung, Hildesheim, 2005.
449
Cf. Joachim Rees: „Jenseits des vielfach beschworenen freundschaftlichen Verhältnisses zeigt sich doch auch
eine agonale Struktur, die dem eloquenten Kritiker die Definitionsmacht über den ‘stummen Künstler’ einräumt.
Wenn der Biograph dem Künstler buchstäblich seine Worte in den Mund legt, und diese seitenweise in
wörtlicher Rede berichten lässt, was doch genuine Stoffgestaltung des Autor ist, so ist dies jenseits aller
Vitentopik auch ein Schritt zur ‘Fiktionalisierung’ des Künstlers.“ Voir la h-net review, à consulter sur:
http://www.hnet.org/reviews/showrev.cgi?path 99941045849201, (H-Arthist/update: juillet 2002/ consultée le
14. 03. 2009).
91
La vraie vie d’artiste consiste dans la formation de ses dons et dans l’exercice de son talent. Les circonstances
extérieures qui l’accompagnent ne sont bizarres que dans la mesure où elles empêchent ou favorisent le
développement de ces facultés, qui ont donné au génie telle ou telle direction, par laquelle le caractère bizarre de
ses œuvres, comme produit uni de son talent inné et de sa formation, a aussi été défini en grande partie.450
D’après cette définition de la spécificité artistique comme «produit unie du talent et de la
formation», Fernow démontre à partir d’une considération historique, que ce sont uniquement
des artistes d’exception qui ont trouvé une entrée dans l’histoire de l’art.451 Suivant son
raisonnement, le vrai génie reposerait principalement sur la spécificité du caractère ou la
«finalité supérieure ou subordonnée de l’art.» Cela signifie notamment une prise de distance
de l’esthétique d’imitation au sens de l’esthétique de production moderne.452 Dans l’œuvre
d’art autonome (=lieu de la pure visibilité), la vérité extérieure (réalité) est ainsi relayée par la
vérité intérieure (vérité de l’artiste=sujet à l’origine de la perception). Fernow se prononce à
maintes reprises contre la «pure imitation de l’habituel et du réel»,453 en faveur de la
«véritable originalité.»454 Dans ce contexte, il déplore par la suite le fait que beaucoup
d’artistes qui, selon lui, n’ont «rien produit d’exceptionnel» (VII) aient trouvé leur entrée dans
l’histoire de l’art, ce qu’il déduit de la circonstance que ceux-ci appartenaient à des académies
de l’art, ces «instituts de serre artificiels de luxure et de pompe» (VIII), qui, comme il le
450
CARSTENS, p. V, s.: „Das wahre Leben eines Künstlers besteht in der Ausbildung seiner Anlagen und in der
Ausübung seines Talents. Die äusseren Umstände, die es begleiten sind nur in sofern bedeutend und merkwürdig,
als sie auf die Enwickelung seines Vermögens hindernd oder fördernd einwirkten, als sie seinem Genius dies
oder jene Richtung gaben, durch welche der eigenthümliche Karakter seiner Werke, als vereintes Erzeugnis der
Naturanlage und Bildung, groβsentheils mitbestimmt.“
451
Ibid., p. VII: „Da nun in der Kunstgeschichte nur das wissenswürdig ist, was irgend einen für ihre
theoretische und praktische, ihre technische und ästhetische Entwickelung und Fortbildung fruchtbar gewesen
ist, was sie richtig geleitet oder irre geführt hat: so kann auch nur solcher Künstler Leben der Geschichte
angehören, welche durch eine ausgezeichnete Eigenthümlichkeit der Anlagen, oder durch eine hohe Stufe der
Ausbildung irgend eines Theils der Kunst, oder durch eine besondere Richtung des Geschmaks, ihre
Selbstständigkeit an den Tag gelegt, und so auf irgend eine Weise, sei es durch Hervorbringung vorzüglicher
Werke oder durch Einführung einer besondern Methode, oder durch ihr ernstliches Hinstreben auf einen höheren
oder untergeordneten Kunstzwek, ihr Dasein für die Kunst entweder förderlich und nüzlich, oder durch eine
zwekwidrige Richtung des Geschmaks nachtheilig und verderblich, erwiesen haben.“
452
Konrad Fiedler: Schriften zur Kunst, 2 vol., Gottfried Boehm (Éd.), Munich, 1971. Cf. également Friedrich
Weltzien: „Produktionsästhetik und Zeitlichkeit. Zur Dynamisierung des Kunstbegriffs bei Konrad Fiedler“, in:
Momente im Prozess. Zeitlichkeit im künstlerischen Schaffensprozess, Martin Peschken et Karin Gludovatz
(Éd.), Berlin, 2004, ps. 43-56.
453
RS, II, p. 83.
454
RS, I, p. 51.
92
constate, les ont soutenus de manière décisive. A cela il oppose de façon antagoniste l’élan du
génie authentique, la soi-disant «vraie pulsion de l’art» (IX), qui est aussi capable de résister
à des circonstances peu propices:
La vraie pulsion de l’art se manifeste d’une façon particulièrement frappante, là, où des circonstances peu
propices se sont opposées à son épanouissement et elle brille avec d’autant plus d’éclat là où tout se réunit, afin
de l’exterminer. Ainsi observons-nous, de temps à autre, dans le nord peu accueillant et hostile à l’art, loin de
tout ce qui est capable de réveiller et de nourrir la pulsion de l’art somnolente, resurgir le grand talent qui,
dépourvu de tous les moyens d’aide, se développe à partir de soi-même.455
D’après la théorie dialectique fernowienne, le génie se manifeste surtout là où il se heurte à
une résistance. La résistance, c’est l’entourage social, la famille et le milieu.456 Cette
introduction esquisse déjà la thématique de base de la biographie de Carstens, dont le but est
de démontrer, dans un esprit d’amitié,457 le parcours d’une vie d’artiste dont l’épanouissment
créatif a été arraché aux conditions peu favorables «au nord peu accueillant et hostile à
l’art»458 et, par la suite, a dû se développer, loin du mécénat de l’église et des académies, de
455
Ibid., p. VII: „Der echte Kunsttrieb offenbart sich besonders auffallend, wo ungünstige Umstände sich seiner
Entwickelung widersetzen, und er glänzt da um so heller empor, wo alles sich vereint, ihn auszulöschen. So
sehen wir zuweilen im kunstlosen unfreundlichem Norden, fern von Allem, was fähig wäre den schlummernden
Trieb zu wecken und zu nähren, ein groβses Talent hervorgehen, und von allen Hülfsmitteln entblöβst sich aus
sich selbst entwickeln.“
456
Johanna Schopenhauer va, dans la biographie dédiée à Fernow, entreprendre une stylisation similaire du génie
de l’art, cf. JS, préface, III-IV: „Aber es ist möglich, daß manches Junge Gemüth, in welchem, wie einst in ihm,
der göttliche Funke glüht, das wie er einst gegen den gewaltigen Druck der äußern Umstände ankämpfen muß,
um zu dem hohen Ziel zu gelangen, zu welchem auch er strebte, angespornt durch sein Beispiel, gestärkt durch
die klare Anschauung seines Gelingens, mit erneueter Kraft vorwärts bringt, und Muth fasst, wo es vielleicht
sonst hoffnungslos unterläge.“
457
Cf. l’homélie de Fernow consacrée à Carstens devant la pyramide de Cestius, citée selon JS, p. 426: „Geist
und Staub des Entschlafenen! Theurer geliebter Bruder und Freund! Ich trenne mich auf immer von Dir. Du
kehrst zurück in den Schoos [sic] der ewigen Natur, wohin auch wir einst früher oder später Dir folgen. Ich
trenne mich auf immer von Dir, aber Deine Freundschaft, Deine Liebe, Dein strebender Geist und Dein redliches
Herz werden mir und Allen, Die dich kannten, unvergeßlich sein.“
458
Cf. à ce sujet la dédicace de Fernow adressée au peintre Reinhart à Rome in: „Über die Landschaftmalerei“ ,
RS II, ps. 11-130: „Es scheint, dass der Sinn für Formenschönheit nur da sich gedeihlich entwickelt, wo die
Natur selbst mit Liebe schönere Formen gebildet hat, im glüklichen Süden. Darum Freund, bleiben Sie dort, im
Lande des Schönen; aber lassen sie öfter die ihres Genius diesseits der Alpen erscheinen.“ Par ailleurs, Fernow
constate par rapport au colorit, RS II, p. 19: „Der blonde Nordländer hat ein anderes Kolorit, als der
Südeuropäer.“ La polarité nord-sud devient, à partir de Herder, également un thème de l’anthropologie culturelle
moderne et de l’ethnologie, en s’élargissant, au cours du XIXème siècle, à l’esthétique. Cf.: La tension Nord/Sud:
aspects historiques, anthropologiques, esthétiques: essai d’étude diachronique, Jean Mondot (Éd.), Toulouse,
2001.
93
façon autonome «à partir de soi-même»,459 étant donné «qu’il ne pouvait plus porter les
attaches […] qu’il pouvait briser.»460 Dans ce contexte, Fernow reconstruit en détail, comme
déjà dans la biographie d’Arioste, la véritable genèse d’artiste. Multiples y sont les influences
que Carstens connut dès sa plus tendre enfance, à commencer par la mère-artiste talentueuse,
les premières impressions, que Carstens recut dans la cathédrale de Slésvig, en contemplant
les travaux de Jurian Ovens,461 jusqu’à la fascination qu’exerceront sur lui par la suite les
œuvres de Rembrandt,462 Rubens463 et Michel-Ange.464 Par contre, le véritable événement clef
demeure pour lui la visite dans la salle des antiques à Copenhague, où il voit «le plus grand et
le plus excellent»,465 et, ce faisant, se rend finalement compte de sa véritable vocation
artistique. La rencontre qu’il fait au hasard avec un peintre de toile anonyme l’amène à faire
un premier dessin en détail d’après une tête de Minerve de Giuseppe d’Arpino.466 Il s’ensuit la
recherche d’un mentor, et le refus d’une formation coûteuse chez des peintres renommés
comme Tischbein467 ou Ipsen,468 un stage qu’il fait contre son gré chez un marchand de vin à
Eckernförde, jusqu’à son admission comme boursier à l’académie à Copenhague.469
459
RS, I, p. 51.
CARSTENS, p. 17: „Fesseln die er zerreißen konnte […] nicht mehr tragen konnte.“
461
Gertrud Schlüter-Göttsche: Jürgen Ovens: ein schleswig-holsteinischer Barockmaler, Éd. Westholsteinische
Verlagsanstalt Boyens, Heide in Holstein, 1978.
462
Sarah Miano: Rembrandt van Rijn, Éd. Fischer, Francfort/M., 2007, ainsi que Michael Bockemühl:
Rembrandt (1606-1669), Éd. Taschen, Cologne, 2007.
463
Eveliina Juntunen: Bildimplizite Kunsttheorie in ausgewählten mythologischen Historien, Éd. Imhof,
Petersberg, 2005, ainsi que Nils Büttner: Rubens, Éd. Beck, Munich, 2007.
464
Cf. Antonio Forcellino: Michelangelo - eine Biographie, Éd. Pantheon, Munich, 2007.
465
CARSTENS, p. 19.
466
Herwarth Roettgen: Il cavalier Giuseppe Cesari d’Arpino. Un grande pittore nello splendore della fama e
nella incostanza della cultura, Ugo Bozzi (Éd.), Rome, 2002.
467
Carstens projette de faire un stage dans l’atelier de Tischbein, mais il y renonce finalement, non seulement à
cause des coûts considérables que cela représente, mais également en raison de la demande de Tischbein, qui
requiert de ses élèves de lui rendre service en tant que cocher et homme de main, ce que Carstens considère
comme inadmissible. Heinrich Wilhelm Tischbein: Aus meinem Leben, Kuno Mittelstädt (Éd.), Éd. Henschel,
Berlin, 1956 et par ailleurs Petra Maisak (Éd.): Goethe und Tischbein in Rom, Éd. Insel, Francfort/M. et Leipzig,
2004.
468
Povl Ipsen, frère de Jakob Ipsen, cohabite avec Carstens jusqu’en 1796, qui lui fait rencontrer Fernow. Parmi
ses travaux les plus connus compte également son portrait du général de Slésvig Jakob Georg et le Hofpriester
von Glucksburg, Philip Ernst Liider, qui date de 1784, et qui passe en 1796 en possession de Carstens.
469
Fernow mentionne dans ce contexte également que Carstens fréquente, à cette époque-là, les lectures en
danois sur l’anatomie du professeur Wiedehaupt, et s’intéresse aussi en détail aux théories de l’esthète anglais
Daniel Webb (à côté de l’étude de Kröker et Diepenbeck). Cf. Daniel Webb: Untersuchung des Schönen in der
Mahlerey, und der Verdienste der berühmtesten alten und neuern Mahlern, Éd. Orell Geßner et Comp., Zurich,
1766 [trad. all.].
460
94
Cependant, Fernow éclipse par moments généreusement le fait que cette dernière accorde à
Carstens une aide financière qu’il touchera pendant plusieurs années. A part cela, il parvient à
mettre en scène une certaine authenticité littéraire, notamment en documentant le litige
académique berlinois dans lequel Carstens a été impliqué avec le ministre Freiherr von
Heinitz,470 à l’aide des passages de lettres citées d’après la correspondance originale. Ce
faisant, il prétend rapporter les faits de façon objective et d’un point de vue neutre, ce qui ne
signifie pas pour autant que sa propre position soit impartiale. Ainsi, Fernow cherche à
démontrer au lecteur comment Carstens, de par son aspiration à la liberté artistique et
personnelle, est peu à peu devenu la victime du complot von Heynitz.471 De surcroît, des
critères du contenu ainsi que l’argumentation pointue de la correspondance laissent
soupçonner que non pas Carstens, mais plutôt Fernow est l’auteur, du moins de la dernière
lettre, étant donné qu’il constate ailleurs que Carstens, en raison de son tempérament
artistique très émotif, est plus doté de sens rhétorique que de talent littéraire:
Comme Carstens ne comprenait rien à l’art d’exprimer ses pensées par des propos clairs et neutres, mais qu’il
disait, à l’écrit comme à l’oral, tout directement comme il le pensait, sa franchise pouvait paraître au ministre,
qui n’était pas habitué à entendre un tel langage, rien d’autre qu’extrêmement prétentieuse et maladroite.472
Ainsi, le naturel artistique de Carstens et sa façon de parler spontanée ne peuvent, selon la
conviction fernowienne, que brusquer un non-artiste comme Heinitz. Au moins la phrase
finale fulminante de la correspondance, dans laquelle Carstens exprime de manière solennelle
sa volonté d’abandonner à jamais l’académie de Berlin, rend tout à fait justice au stéréotype
de l’artiste rebelle:
470
Johannes Mager: „Friedrich Anton von Heynitz (1725-1802): Streiflichter aus seinem Leben und familiären
Umfeld“, dans: Der Aufschnitt (vol. 55, cahier 1, ps. 2-27), Éd. Glückauf, Essen, 2003, ainsi que: Benno von
Heynitz: Beiträge zur Geschichte der Familie von Heynitz und ihrer Güter, partie I-III, Kirchrode, 21971.
471
Cité d’après: Frank Büttner: Der Briefwechsel zwischen Asmus Jakob Carstens und Minister Friedrich Anton
von Heinitz, in: Asmus Jakob Carstens, Slésvig, 1992, ps. 75-95.
472
Ibid., p. 159: „Da Carstens nichts von der Kunst verstand, seine Gedanken in glatte, unmasgebliche Worte zu
kleiden, sondern schriftlich wie mündlich gerade heraus sagte, was und wie er es dachte, so konnte seine
Freimüthigkeit dem Minister, der eine solche Sprache nicht zu hören gewöhnt war, nicht anders als höchst
anmaβsend und dünkelhaft erscheinen.“
95
D’ailleurs je dois dire à votre excellence que je n’appartiens pas à l’académie de Berlin, mais au genre
humain.473
Ainsi Fernow va prendre l’exemple de Carstens comme point de départ, afin d’exprimer sa
critique de la société et il ne s’arrête pas, après sa parade contre l’académie de Berlin, avant le
public, qui, d’après lui «n’a pas laissé libre cours à sa volée de comète» (XX). Par la suite, il
érige le génie au-dessus des conventions de la société:
Le génie né pour l’art est plus directement et étroitement lié à la nature que l’homme utile, ordinaire, qui est
destiné à être citoyen et servir fidèlement les fins diverses de la société.474
Afin de donner un autre exemple pour une telle situation de conflit entre la «nécessité
intérieure et l’arbitraire extérieur» (XIX), il se ne réfère dans ce qui suit à personne d’autre
que Schiller et son implication dans le conflit avec le duc Carl August:
N’en allait-il pas de même avec notre Schiller, qui en brisant de façon violente les liens qui l’attachaient à sa
patrie et à son empereur, qui compte même parmi les amateurs d’art, a dû conquérir sa vie de poète, qui lui a
valu une gloire immortelle et une splendeur supérieure à notre littérature?475
Le génie de Carstens est ainsi mis à égalité avec celui de Schiller, tout en attirant l’attention
sur les problèmes sociopolitiques auxquels les deux ont dû faire face:
Il y a parmi les institutions de nos constitutions sociales et politiques des contradictions inconciliables, quelquesunes, où seule une faille dans la disproportion entre la nature et le code civil ou entre la nécessité intérieure et
l’arbitraire extérieure puisse réconcilier le conflit existant entre celles-ci.476
Fernow critique surtout l’existante «disproportion entre la nature et le code civil», qu’il
ramène aussi à la religion. Ainsi, il érige «de façon catégorique et kantienne» le postulat de
l’art libéré477 en maxime dans la production créatrice, qu’il lie à trois conditions sociales:
473
Ibid., p. 205: „Übrigens muβ ich Euer Excellenz sagen, daβ ich nicht der Berliner Akademie, sondern der
Menschheit angehöre.“
474
Ibid., p. XXI: „Das zur schönen Kunst geborene Genie ist unmittelbarer und enger mit der Natur verbunden,
als der gewöhnliche, zum Staatsbürger und getreuen Unterthan bestimmte, und zu mannigfaltigen Zwecken der
Geselschaft brauchbare Mensch.“
475
Ibid., p. XIX: „Muste nicht [...] auch unser Schiller sein Dichterleben, das ihm unsterblichen Ruhm und
unserer Litteratur einen höheren Glanz gab, erst durch eine gewaltsame Zerreiβung der Bande, die ihn an sein
Vaterland und an seinen Fürsten knüpften, der sogar unter die kunstliebenden gezält wird, erringen?“
476
Ibid.: „Es giebt in den Einrichtungen unserer geselschaftlichen und politischen Verfassungen der
unvereinbaren Gegensätze so manche, wo nur ein Ris durch das Misverhältnis zwischen Natur und bürgerlicher
Verfassung, oder zwischen innerer Nothwendigkeit und äuβerer Wilkür den Streit derselben schlichten
kann.“[sic]
96
1. La libération de l’artiste de la contrainte de conditions conventionnelles,
2. la liberté universelle de l’artiste appartenant à l’ensemble du genre humain,
3. le soutien de l’artiste d’après le principe libéral du désintérêt parfait.
Anticonformisme, universalité et liberté - par ces mots clefs pourrait-on alors résumer dans
l’ensemble la nouvelle conception de l’artiste selon Fernow. En gros, ses postulats tendent
vers un retrait de l’artiste du public dans la sphère privée,478 en marquant ainsi le passage de
l’art financé par l’État vers l’art libre reposant sur lui-même. Un problème sur lequel vont
aussi se pencher par la suite Hegel,479 Stendal480 et Karl Marx.481 En l’occurrence, cette
stylisation de l’artiste comme «citoyen du monde indépendant» (XXV) traduit clairement les
convictions franc-maçonnes482 de Fernow. Dans ce contexte, des parallèles éventuels avec les
477
Ibid., p. XX: „die freigewordene Kunst, der Stütze aber auch zugleich des Zwanges der Religion enthoben,
mus hinfort auf sich selbst ruhen […].“
478
Werner Hofmann: Das entzweite Jahrhundert - Kunst zwischen 1750 und 1830, Éd. Beck, Munich, 1995.
479
Hegel thématise également le problème de l’artiste moderne, qui est affranchi de l’église, du clergé et de l’état
en soulignant que cela aura pour conséquence un réflexe de compensation idéel: „Selbst der ausübende Künstler
ist nicht etwa nur durch die um ihn her laut werdende Reflexion, durch die allgemeine Gewohnheit des Meinens
und Urteilens über die Kunst verleitet und angesteckt, in seine Arbeiten selbst mehr Gedanken hineinzubringen;
sondern die ganze geistige Bildung ist von der Art, daß er selber innerhalb solcher reflektierenden Welt und ihrer
Verhältnisse steht und nicht etwa durch Willen und Entschluß davon abstrahieren oder durch besondere
Erziehung oder Entfernung von den Lebensverhältnissen sich eine besondere, das Verlorene wieder ersetzende
Einsamkeit erkünsteln und zuwege bringen könnte“ (cf. Ästhetik, n° 25, Éd. Suhrkamp, Francfort/M.), cité selon
Angelo Raciti: Möglichkeiten des Daseins. Eine gesellschaftliche Analyse des ‘Kunstgesprächs’ in Büchners
Lenz, in: PhiN 3/1998.
480
Les thèses pertinentes (feu de saillie) de l’écrivain et théoricien de l’art Stendal, de son vrai nom Henri Beyle,
vont marquer, de par leur portée sociocritique et morale, la rupture avec les théories de Chateaubriand, Mme de
Staël et les romantiques allemands. Ainsi, Stendal ne considère pas la grandeur physique des statues antiques
(force physique) comme le seul idéal artistique, mais réclame surtout l’expression des sentiments
(expressivisme). Cf. Patrizia Lombardo: Stendal et l'idéal moderne, (Nineteenth Century French Studies), vol.
35, n° 1, 2006, ps. 226-246.
481
Karl Marx va également thématiser cette problématique dans sa dissertation: „[…] so sucht der
Nachtschmetterling, wenn die allgemeine Sonne untergegangen, das Lampenlicht des Privaten“ (1840). Werner
Hofmann (cf. note n° 478, ci-dessus) interprète cela comme l’introduction de l’époque non-hégélienne („nachhegelianische[n] Epoche“/p. 645), en décrivant la mise au service successive de l’artiste par l’état: „Eine
Mischung aus Ehrgeiz und Engagement treibt sie den staatlichen Auftraggebern in die Arme, die genau wissen,
daß Kunstwerke ihre Legitimität bekräftigen und dem Bürger anschaubar machen. Dieser Prozeß führt zu
verschiedenen Formen der Re-Integration, welche die Spannungen vergessen machen möchten, die wir unter
dem Gesichtspunkt von Desintegration und Plurifokalität kennengelernt haben. Konversion und Versöhnung
sind angesagt. Nicht nur Ingres’ Apotheose Homers ist davon geprägt“ (ibid.).
482
JS, p. 85: „Er [Baggesen] fragte mich unter anderm, ob ich Maurer sey? Und freute sich sehr, als ich es
bejahen konnte.“ De même, on trouve dans le registre de la Bertuch’schen Buchhandlung des chants pour Francmaçons redigés par Fernow („zum Gebrauche aller Teutschen Logen“), Friedrich Justin Bertuch (Éd.), imprimé
pour la Loge Anna Amalia zu den drei Rosen, [3], VIII, 324 p. -- 16°. Voir note suivante de HAAB: les chants
contenus dans cette publication proviennent e. a. de: F. J. Bertuch, J. A. Blumauer, M. Claudius, C. L. Fernow, J.
W. L. Gleim, J. W. v. Goethe, J. G. v. Herder, L. H. C. Hölty, A. v. Kotzebue, F. v. Schiller, F. L. Graf zu
Stolberg, J. P. Uz, J. H. Voß et C. M. Wieland. Autopsie des exemplaires de la HAAB, signatures: Bh 224 et 39,
97
théories propres à la philosophie naturelle de Jean-Jacques Rousseau483 ne sont pour le moins
absurdes. Or, en même temps, il souligne également que le génie de l’art est capable de
s’élever au-dessus des contraintes institutionnelles et économiques:484
[…] comme la nature du grand talent, qui, dans la pulsion de la compétition dispose d’assez de courage et de
force, pour briser ses chaînes. Et tandis que l’État, dans les institutions entretenues de manière artificielle et très
coûteuse, cherche en vain à éduquer de grands artistes, il va les perdre tous ou laisser crever misérablement, ceux
qui, seuls, étaient capables de le devenir. 485
Ce faisant, Fernow critique non seulement le mécénat forcé des «serres académiques»,486
mais encore les méthodes rigides adoptées pour l’éducation des jeunes artistes, qu’il réduit au
simple principe de «l’imitation désappropriée» (XXVI) qui consiste, selon lui, dans un pur
remplissage de normes conformes, par laquelle «l’autonomie du talent est plutôt supprimée
qu’exercée, et seulement la main d’œuvre d’art est promulguée.»487 Par ailleurs, il attaque la
passivité créative de la pédagogie académique, un phénomène, qu’il voit encore favorisé par
la sécularisation488 et la muséalisation489 des arts.490 Selon sa conviction l’imitation fidèle à
8: 13, ainsi que l’exemplaire de la bibliothèque de Goethe (Ruppert), signature: 1915, cf. également Tausch,
KAW, p. 36, et par ailleurs Joachim Bauer et Gerhard Müller: Des Maurers Wandeln, es gleicht dem Leben Tempelmaurerei, Aufklärung und Politik im klassischen Weimar, Éd. Hain, Rudolstadt, 2000.
483
Voir Jean-Jacques Rousseau: Traité sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes et leurs causes, [traduit en
allemand par Moses Mendelssohn et contenant un envoi pour Monsieur le magistrat Lessing et complété par une
lettre adressé à Voltaire], Éd. Voss, Berlin, 1756. Cf. également Jean-Marie Paul: «Rousseau et Kant: de l’utilité
de la civilisation», in: La volonté de comprendre, Maurice Godé et Michel Grunewald (Éd.), Éd. Lang,
Francfort/M., 2005.
484
Cf. CARSTENS, préface.
485
Ibid.: „ [...] als die Natur ein groβses Talent hervorbringt, das im Drange dieses Widerstreits Muth und Kraft
genug hat, seine Fesseln zu zerbrechen. Und wärend der Staat in künstlichen, mit groβen Kosten unterhaltenen
Anstalten vergebens groβse Künstler zu erziehen bemüht ist, wird er die verlieren oder kümmerlich zu Grunde
gehen lassen, die es allein werden konten.“
486
Ibid., p. XVIII: „akademischen Treibhausanstalten.“
487
Ibid., ps. XXVI-XXXVII: „Selbstständigkeit des Talents vielmehr unterdrükt als geübt, und blos das
Handwerk der Kunst gefördert wird […] Diese bequeme Art mit leerem Kopf ein Künstler zu werden,
begünstigen vornehmlich groβse Kunstsammlungen und Gallerien. Wie im Leben groβser Reichthum und zu viel
Bequemlichkeit der Geistesbildung eher schädlich als nüzlich zu sein pflegen, so findet vielleicht ein Gleiches in
der Kunst statt.“
488
Christina von Braun (Éd.): Bilanz und Perspektiven einer umstrittenen These, Éd. Münster, Berlin, 2007.
489
Ulrich Borsdorf (Éd. e. a.): Musealisierung und Geschichte, Éd. Transcript, Bielefeld, 2004. Les différentes
contributions de l’ouvrage se focalisent autour des différents aspects de l’interaction complexe entre la
muséalisation et l’histoire de l’art à partir d’une perspective, à la fois interdisciplinaire et culturelle, qui est
centrée sur le musée, vu sous l’aspect d’une institution.
490
RS, I, ps. XXVI-XXXVII: „Diese bequeme Art mit leerem Kopf ein Künstler zu werden begünstigen
vornehmlich groβse Kunstsammlungen und Gallerien. Wie im Leben groβser Reichthum und zu viel
98
l’original présente un obstacle à l’épanouissement de la créativité artistique, auquel il oppose
le principe de la «main sûre du maître»,491 également valable pour la poésie et la technique de
la traduction. A part cela, il considère que la contemplation continuelle des mêmes œuvres
d’art porte atteinte à la motivation de base de l’artiste:
Le regard continuel des mêmes [œuvres d’art], et la légèreté de se les approprier, affaiblit l’enthousiasme
animé.492
De même, il faut noter ici que l’interprétation unilatérale que Fernow fait de l’imitation
comme étant un acte à la technique et reproductif, présente manifestement une «déformation
historique»493 de la notion de mimésis désignant à l’origine le jeu de la liberté artistique.494
Pour aller à l’encontre de la théorie d’après laquelle le concept de la pure imitation de la
nature n’aurait connu aucun changement de la Frühe Neuzeit jusqu’au préclassicisme,495 il
faut, d’après les connaissances les plus récentes, plutôt partir du principe que la notion d’art
mimétique et allégorique est à comprendre non pas au sens d’un simple principe de l’imitation
de la nature, mais plutôt, selon sa signification depuis l’âge industriel, comme «maîtrise de la
nature», quasiment comme la célébration de l’«utopie de la liberté humaine», subissant donc
Bequemlichkeit der Geistesbildung eher schädlich als nüzlich zu sein pflegen, so findet vielleicht ein Gleiches in
der Kunst statt.“
491
Cf. Andrea Heinz et Stefan Blechschmidt: Dilettantismus um 1800, (Ereignis Weimar-Jena. Kultur um 1800:
Ästhetische Forschungen), vol. 16), Éd. Winter, Heidelberg, 2007, ibid., voir l’article de Daniel Ulbrich:
Mittelmäßiges Übersetzen. Übersetzerpositionen zwischen (professionalisierter) Liebhaberei und (genialischer)
Professionalität im 18. Jahrhundert, ps. 141-160, ici p. 159: „In Fernows Skizze von 1804 sollen diese beiden
Lager mit ihren zum Teil gegensätzlichen Legaten in dem Begriff der ‘sicheren Meisterhand’, als der Einheit
von sprachlich-sachlicher Angemessenheitund veredelnder Tendenz erneut miteinander versöhnt werden. Würde
sich Fernows Position hierauf reduzieren, so bliebe freilich ein Problem bestehen: Mit dem Insistieren auf einer
institutionalisierten Trennung zwischen rezeptivem und produktivem Aktionsfeld ist über die Rolle von Genie
als Vermögen dichterischer Spontaneität im Übersetzungsprozeß noch nichts gesagt.“
492
Ibid., p. XXVII: „Der stete Anblik derselben [Kunstwerke], und die Leichtigkeit sich ihn zu verschaffen,
schwächt den belebten Enthusiasmus.“ Par ailleurs, Fernow distingue entre l’enthousiasme vivant de l’artiste et
l’enthousiasme vive du public (RS, II, p. 305).
493
Voir PhiN, 18/2001, p. 52.
494
Ansgar M. Cordie: „Mimesis bei Aristoteles und in der Frühen Neuzeit“, dans: Kunst und Natur in Diskursen
der Frühen Neuzeit, Éd. Laufhütte, Wiesbaden, ps. 277-288: „[Mimesis bedeutet dass] der freie Mensch im
freien Spiel den freien Menschen nachahmt.“
495
Peter-André Alt: Begriffsbilder. Studien zur literarischen Allegorie zwischen Opitz und Schiller, Éd.
Niemeyer, Tübingen, 1995.
99
un changement décisif en tant qu’«acte productif de la réception reproductive.»496 De même,
on constate que Fernow ne se limite nullement à la seule représentation d’une genèse de génie
classique, étant donné qu’il prend aussi en considération des aspects propres à la critique
d’art. Ainsi, il mentionne par exemple les défauts humains et les maladresses artistiques de
Carstens, qu’il passe scrupuleusement à la loupe, ce qui, en l’occurrence, doit souligner sa
crédibilité et ses aptitudes en tant que théoricien de l’art, tout en tenant compte de façon
tactique de sa réception par le lecteur. En ce qui concerne la présentation formelle de
l’ouvrage, Helmut Pfotenhauer497 a déjà souligné l’effort entrepris par Fernow pour établir un
schéma subdivisé en rubriques, que par ailleurs Goethe esquisse dans son Laokoon,498 d’après
le modèle du catalogue classique de règles. Ainsi, Carstens classifie la recension des œuvres
carstensiennes en neuf catégories, d’après le style, le dessin, le choix du sujet, l’expression, le
coloris, la draperie, les accessoires, la formation de l’esprit et l’ambition à l’art. En ce qui
concerne le premier critère, il faut d’abord mettre en relief le fait que la question du style
déclenche, à la différence de la notion que Goethe donne de la manière,499 une véritable
controverse dans le discours de l’art autour de 1800. Qu’est-ce que le style? L’homme
même,500 comme expression d’un savoir-faire objectif ou plutôt le résultat d’une mise en scène
subjective? D’une manière générale, Fernow considère le style comme un mode de
représentation comportant «toutes les parties de la représentation»501 qui est «fixé sur la
496
Cf. note n° 496, ci-dessus, ibid.: „Naturbeherrschung“, „Utopie menschlicher Freiheit“, „produktiver Akt
reproduktiver Rezeption.“ Ansgar M. Cordie se réfère ici au discours Post festum d’Aristotèle, qui conçoit l’art
mimétique au sens d’une libre imitation de la nature comme réaction à la perte d’une autorité politique.
497
Cf. Helmut Pfotenhauer: Klassik und Klassizismus, Éd. Deutscher Klassiker, Francfort/M., 1995, p. 826, ibid.,
p. 834 s.: „Fernow benutzt dieses Schema auf bezeichnende Weise modifiziert, um den Künstler Carstens zu
charakterisieren.“
498
Ernst Osterkamp: Im Buchstabenbilde. Studien zum Verfahren Goethescher Bildbeschreibungen, Éd. Metzler,
Stuttgart, 1991.
499
Ibid.: „Der Stilbegriff spielt ja in der Ästhetik der Jahrhundertwende überhaupt eine gewichtige Rolle […]
gemeint ist dabei mit ‚Stil’ ein künstlerisches Schaffen, das analog zur Natur Werke von hoher innerer
Organisiertheit hervorbringe und darin die Subjektivität des Künstlers zum Objektiven aufhebe.“
500
D’après le discours d’entrée de Buffon à l’Académie française, le 25 août 1753: Le style est l’homme même.
Cf. Discours sur le style. Discours prononcé à l'Académie française par Buffon, le jour de sa réception, précédé
de la biographie de Buffon, M. Hémardinquer (Éd.), Delagrave, Paris, 1877.
501
RS, I, p. 43.
100
Gestalt.»502 Par la suite, il distingue la «spécificité objective» (=vraie originalité) de l’
«individualité subjective» (=ajout étrange).503 Le trait le plus marquant de la notion de style
chez Fernow est qu’il parte a priori d’un traitement subjectif du sujet d’après des critères
objectifs, ou, comme Humboldt, de l’élévation de la «vraie idéalité à l’idéal»,504 et, ce faisant,
il envisage toujours l’impression de la conception organique dans son ensemble, c’est-à-dire
«l’idée de l’ensemble.»505 De même, il définit l’art, en règle générale, et contrairement à la
juxtaposition goethéenne entre l’art et la nature,506 comme une «nature supérieure.»507 Ainsi, il
concède à l’artiste la possibilité d’une imitation d’après la nature dans la tradition de
Bellori,508 mais qu’il ne comprend plus au sens de la mimésis antique, mais plutôt comme le
résultat d’une «imitation libre des objets [de la nature] d’après des lois générales»,509 et ainsi
donc pas comme une «imitation sans esprit des formes antiques.»510 La comparaison avec la
notion herdérienne de l’art national est aussi intéressante, étant donné que celle-ci s’oriente
également vers les modèles antiques, mais cependant pas de manière exclusive.511 Par rapport
à la production artistique de son temps, il critique surtout la «manière hasardeuse»512 ainsi que
le «style individuel ou l’idéal individuel»513 des «artistes contemporains.»514 A la place, il
502
Ibid.
RS, I, p. 51.
504
CARSTENS, p. 72.
505
RS, II, p. 14.
506
Goethe: «L’essai sur Diderot» (1799), in: Écrits sur l’art, Éd. Flammarion, 1996, ps. 192-200. Goethe y
défend la thèse selon laquelle la nature agit pour elle même, au contraire de l’homme, qui, en tant qu‘homme,
agit pour l’homme. Cf. également Gerhard M. Vasco: “Diderot and Goethe: A Study in Science and Humanism”,
in: The Modern Language Review, vol. 76, n° 1, 1981, ps. 240s., ainsi que Roland Krebs: «Le dialogue avec
Diderot», in: Jean-Marie Valentin (Éd.): Johann Wolfgang Goethe. L’Un, l’Autre et le Tout, Éd. Klinksieck, ps.
113-129.
507
RS, I, p. 319: „Sie [die Kunst] erscheint als eine höhere Natur […]. “
508
Giovanni Pietro Bellori: Le Vite de’ Pittori, scultori ed architetti moderni, co’ loro ritratti al naturale, Rome,
2
1728. Cf. également: Die Idee des Künstlers, Kurt Gerstenberg (Éd.), Éd. Berthold, Berlin, 1939.
509
Ibid.
510
RS, III, p. 11.
511
Cf. Gunter E. Grimm: „Kunst als Schule der Humanität. Beobachtungen zur Funktion griechischer Plastik in
Herders Kunst-Philosophie“, in: Johann Gottfried Herder (1744-1803), Gerhard Sauder (Éd.), Éd. Meiner,
Hambourg, 1987, ps. 352-363.
512
JS, p. 364: „zufällige Manier.“
513
Ibid.: „Individualstil oder Individualideal.“
514
Ibid., p. 362: „jetzt lebenden Künstler.“
503
101
suggère une création inspirée par la «la nature réelle»,515 pour produire des «œuvres pleines
d’esprit et vivantes.»516 Celles-ci sont autonomes, à savoir orientées vers la liberté idéale,517 et
suivent par la suite la logique d’une création pygmalienne, qui «quoique au-dessus de toute
réalité, semblent être de vrais êtres vivants.»518 C’est cette même idée que reprend Honoré de
Balzac519 dans sa nouvelle intitulée le «Le chef d’œuvre inconnu». Dans ce récit, en effet, le
peintre Frenhofer incarne parfaitement l’artiste, qui, à la recherche de son Pygmalion520
artistique, desespère littéralement. Dans la première moitié du XIXème siècle, Charles
Baudelaire,521 va thématiser, à partir d’un portrait de femme, le topos de l’éphémère de
l’existence humaine, en mettant également en question les limites du principe d’incarnation
dans l’art, par la dépendance à la matière, qu’il voit uniquement fixée dans la capacité de
mémoire du spectateur. Défendant un point de vue moins drastique, Fernow fait surtout
référence à l’imagination des grands peintres,522 ayant «[…] abstrait leur idéal d’art de la
nature qui les a entourés.»523 Selon lui, c’est la force d’imagination artistique qui est décisive
pour une composition réussie, ou aussi la force d’imagination plastique, qui ne doit pas
toujours correspondre au catalogue traditionnel des règles académiques.524 Or, celle-ci
s’oriente plutôt vers l’idéal d’une nouvelle corporalité, qui, en l’occurrence, est issue d’abord
515
Ibid.
Ibid.
517
Ibid., p. 247: „[…] von der untersten Stufe der Nachahmung allmählich durch Wahrheit und Schönheit bis zur
idealischen Freiheit ausgebildet [hat].“
518
JS, p. 364.
519
Honoré de Balzac décrit, entre autres, l’ambition artistique de Frenhofer de créer des œuvres vivantes,
comme il le démontre dans l’exemple d’un portrait de femme, qu’il croit avoir réanimé. Cf. «Le chef d’œuvre
inconnu», [1831], Éd. Flammarion, 1981, ps. 64 s.: «Vous êtes devant une femme et vous cherchez un tableau
[…] Où est l’art? perdu, disparu! Voilà les formes mêmes d’une jeune fille […] Elle va se lever, attendez.»
520
Cf. Roland Kanz et Hans Körner: Pygmalions Aufklärung. Europäische Skulptur im 18. Jahrhundert, Éd.
Deutscher Kunstverlag, Munich/Berlin, 2006.
521
Charles Baudelaire: Les fleurs du mal, Éd. Librio, Paris, 2003, p. 42: «Noir assassin de la Vie et de l’Art, tu
ne tueras jamais dans ma mémoire celle qui fut mon plaisir et ma gloire.»
522
Comme Leonardo, Raphaël, Corregio, Rubens, Holbein, Cranach. Voir JS, p. 362.
523
JS, p. 362: „[…] ihr Kunstideal von der sie umgebenden Natur abstrahirt.“
524
Déjà Ingres se distancie, en tant que boursier de l’académie et comme son réformateur, de l’imitation
atomique (atomistisches Nachbilden), ce qui lui vaut à Rome le très convoité prix de l’académie. Fernow
séjourne à cette époque dans la métropole italienne et a, comme observateur attentionné de la scène d’art,
probablement connaissance de l’art du tableau d’Ingres. Cf. par ailleurs Uwe Fleckner: Abbild und Abstraktion:
die Kunst des Porträts im Werk von Jean-Auguste-Dominique Ingres, Éd. v. Zabern, Mayence, 1995, ainsi que
Vincent Pomarède, Stéphane Guégan, Louis-Antoine Prat, Eric Bertin (Éd.): Jean-Dominique-Auguste Ingres
(1780-1867), catalogue de l’exposition, Éd. Gallimard/coédition musée du Louvre, Paris, 2006.
516
102
de la considération intérieure525 ou «[…] la faculté plastique de la force d’imagination de
concevoir l’image des objets […] comme réellement ronds.»526 Les artistes de la
postmodernité recherchent aussi un idéal similaire propre à l’expression d’une nouvelle
corporalité, en renouant souvent dans leurs œuvres avec le naturalisme du XIXème siècle. De
même, ils représentent partiellement, en césure avec les formes parfaites du statuaire grec, les
contingences de l’existence issues de la considération intérieure, et adaptées selon le caractère
artistique.527 Carstens opère de façon similaire, mais en privilégiant toujours, à l’opposé de ces
derniers, l’impression harmonieuse de l’ensemble, au sens d’une «poésie de l’invention »:528
En mettant l’âme dans une disposition harmonieuse, il incite en même temps notre imagination, notre esprit, et
toutes les forces plus nobles de notre âme.529
Analogue à cela, il distingue, par rapport à la peinture de paysage, la représentation des scènes
de nature idéalisées et de celles de la peinture de prospectus, qui «sont soit copiées fidèlement
d’après la nature ou soit inventées poétiquement.»530 Il illustre cela dans son traité «De la
peinture du paysage», à l’exemple de Philipp Hackert:
Hackert appartient au fond aux peintres de prospectus; cependant ses paysages s’élèvent, comme par le choix du
beau, comme par l’expression caractéristique de la nature italienne, et par les parties singulières, particulièrement
apparentes dans les premiers plans, d’une aide idéalisante du réel vers un tout, à la fois beau et pittoresque, audessus de la peinture de prospectus habituel.531
525
Helmut Börsch-Supan: Die deutsche Malerei von Anton Graff bis Hans von Marées 1760-1870, Éd. Helmut
Beck, Munich, 1988, p. 178: „Solches Hervorbringen aus einer inneren Anschauung war Gewähr für eine
Geistigkeit, mit der sich die der Poesie und der Philosophie ebenbürtig an die Seite stellten.“
526
HT, p. 257. Cf. à ce sujet également le principe du faux dessin (‘Falschzeichnens’) que Hegel approuve
également: „[...] das plastische Vermögen seiner Einbildungskraft, das Bild der Gegenstände [...] wirklich rund
aufzufassen.“
527
Marianne Alphant: Art moderne. Rupture ou parenthèse, Éd. Flammarion, Paris, 2005, ainsi que Kostas
Mavrakis: Art moderne. Rupture et renouveau, Éd. Éditions de Paris, Versailles, 2006.
528
Voir Peter Springer: „Artis Germanicae Restitutor. Asmus Jacob Carstens als ‘Erneuerer’ der Deutschen
Kunst“, in: Jahrbuch des Schleswig-Holsteinischen Landesmuseums Schloss Gottorf, N.f. 3, (1990/91), ps. 4582, ici p. 58.
529
RS, III, p. 43: „Indem er das Gemüth in eine harmonische Stimmung sezt, beschäftigt er zugleich unsere
Fantasie, unsern Geist, und alle edleren Kräfte der Seele.“
530
Ibid., p. 11: „[…] entweder treu der Wirklichkeit nachgebildet oder dichterisch erfunden.“
531
RS, II, ps. 117-128, ici p. 117: „Hackert gehört eigentlich nicht sowohl zu den Prospektmalern; indessen
erheben sich doch seine Landschaften, sowohl durch die schöne Wahl, als durch den karakteristischen Ausdruck
der italienischen Natur, und durch die in einzelnen Theilen, besonders in Vorgründen, nicht zu verkennende
103
Par rapport à l’imagination poétique de Carstens, il constate par la suite que Carstens, quant
au choix du sujet, préfère principalement des «thèmes empruntés de la mythologie nordique et
du monde d’Ossian»,532 en se démarquant des peintres historique traditionnels,533 mais, en
même temps, en raison du traitement sentimental du sujet qui caractérise ses tableaux,534
révèle une certaine affinité avec les artistes romantiques,535 ce que Fernow passe
volontairement sous silence. En ce qui concerne l’expression, il reconnait à Carstens le talent
de créer une expression authentique, c’est-à-dire «[…] faire monter dans son imagination un
caractère conforme à sa physionomie qui correspond à un haut degré.»536 Par rapport à
l’habit, il loue par la suite la prise de distance de Carstens avec le style lourd de Le Brun,537
qui, d’après sa conviction, se prélasse, surtout quant aux accessoires, dans un monde théâtral
de paillettes, ce qu’il considère comme étant une rupture de style artistique et ce qu’il rejette
avec véhémence:
[…] qui aime le théâtral, cette faute si commune, de décorer, par un amour de luxe incompréhensif, avec une
architecture […] riche et présomptueuse, des scènes des temps de l’Antiquité précoce, pauvre en art.538
Pourtant, il ne faudrait pas considérer l’âge classique comme étant pauvre en art. Pour
Fernow, c’est justement ce caractère fragmentaire de la sculpture classique, causé par les
ravages du temps, qui, comme un hiéroglyphe de ce qu’il a été, devrait sensibiliser le sub-
idealisierende Nachhülfe des Wirklichen zu einem malerisch-schönen Ganzen, weit über die gewönliche
Prospektmalerei.“
532
Ibid. p. 262. Quant à l’histoire de la réception d’Ossian dans l’espace germanophone cf. l’étude de Wolf
Gerhard Schmidt: Homer des Nordens und ‘Mutter der Romantik. James Macphersons Ossian und seine
Rezeption in der deutschsprachigen Literatur, Éd. De Gruyter, Berlin, 2003, [thèse, Univ. Sarrebrouck, 2002].
533
Ibid., p. 264. Fernow évoque dans son essai sur la peinture du paysage le style des peintres historiques, dont
parmi eux le Titien, Hannibale, Carracci, Dominichino, Albano et Nicolas Poussin (RS, II, p. 92 s.).
534
Cf. Mareike Hennig: Asmus Jakob Carstens - sensible Bilder: eine Revision des Künstlermythos und der
Werke, Éd. Imhof, Petersberg, 2005 [thèse, Univ. Giessen, 2005].
535
Cf. à ce sujet le commentaire suivant: „Neben Porträts malte er vor allem große, allegorische und historische
Kompositionen in einem romantisch-klassischen Stil, der an Füßli und Thorvaldsen erinnert“, in: Du Mont’s
Bildlexikon der Kunst, Ann Hill (Éd.), Éd. Du Mont Buchverlag, Cologne, 1976, p. 149.
536
Ibid., p. 271.
537
Ibid., p. 289 s.: „den kostspilligen Apparat der französischen Schule zum Drappieren.“
538
Ibid.: „Die das Theatralische liebt, so gemeinen Fehler, aus unverständiger Prachtliebe Scenen aus den Zeiten
des frühen, kunstarmen Alterthums mit einem Grunde von reicher und prächtiger Architektur [...] zu verzieren.“
Cf. RS, III: „Über Rafaels Teppiche“, ps. 115-210, ici préface: „[…] noch auch die theatralische Manier der
Pariser Schule [zur wahren Kunst] führen könne.
104
conscient aux ombres du passé, telle une image de rêve renvoyant à une idylle perdue.539
Ainsi, l’Antiquité est imaginée comme étant un horizon de référence insaisissable, stimulant
la force d’imagination, qui offre en même temps un espace de projection idéal pour les
«pauvres artistes de ces derniers temps», à la recherche d’un sujet.540 De même, la question
se pose de savoir comment définir la psyché de l’artiste541 au contexte du discours sur la
mélancolie,542 comme l’évoquent par exemple Goethe543 ou Shaftesbury.544 A partir des thèses
d’Aristotèle, Jean Clair545 cherche par exemple à démontrer par la suite que ce sont surtout
des personnalités et des talents d’exception qui se trouvent atteints de cette maladie sacrée, se
manifestant souvent par une dualité de l’être, parfois oscillant entre le génie et la folie.546 De
même, on retrouve dans l’art antique des indices iconographiques des représentations de cette
disposition particulière de l’âme se caractérisant par une étrange tristesse et une souffrance
muette. Ce qui est étonnant, ce qu’on constate, c’est qu’au fil des siècles, l’image de la
mélancolie n’a pratiquement pas changé. Nous voudrions également remarquer en marge
qu’on observe, depuis le naturalisme547 jusqu’à l’hyperréalisme,548 des déplacements d’accent
d’importance moindre, en considérant traditionnellement la fascination morbide portée à l’état
539
Cf. également à ce sujet Fernow dans RS, II, p. 5: „Wenn wir ein glükliches Dasein durchlebt haben, und nur
die Erinnerung allein noch davon übrig ist, so möchten wir gern wenigstens das Schattenbild der entflohenen
Wirklichkeit an etwas Bleibendes heften und durch ein ET IN ARCADIA EGO den Freuden, mit denen wir so
gute Zeiten verlebten, unser Andenken lebendig erhalten […] Wie eine reizende Ferne liegt mein Aufenthalt in
Italien hinter mir.“
540
Cf. lettre de Schiller, datée Stuttgart, le 30 août 1797, in: Weimarer Ausgabe [WA], 4ème section: Goethes
Briefe, vol. 12, 197, p. 275 s.
541
Ulrich Pfisterer: „Künstlerliebe. Der Narcissus-Mythos bei Leon Battista Alberti und die Aristoteles-Lektüre
der Frührenaissance“, in: Zeitschrift für Kunstgeschichte, 64 vol., cahier n° 3, (2001), ps. 305-330.
542
Zur historischen Entwicklung der Melancholiediskussion cf. e. a. les études de Hans Joachim Schings:
Melancholie und Aufklärung, Éd. Metzler, Stuttgart, 1977, ainsi que Thorsten Valk: Melancholie im Werk
Goethes. Genese - Symptomatik - Therapie, (Studien zur deutschen Literatur, vol. 168), Éd. Niemeyer,
Tübingen, 2004.
543
Cf. également Goethe: „Zart Gedicht wie Regenbogen wird nur auf dunklem Grund gezogen, darum behagt
dem Dichtergenie das Gemüt der Melancholie“, cité d’après „Sprichwörtliches“, in: Vollständige Ausgabe
letzter Hand, vol. I-IV, Éd. Cotta, Stuttgart et Tübingen, [1827], WA, I, 2, S. 237.
544
Cf. Shaftesbury, A. A.: “A Letter on Enthusiasm“, in: “Characteristics of Men, Manners, Opinions, Times
with a Collection of Letters”, vol. I. Basil, 1711, ps. 1- 46.
545
Jean Clair (Éd.): Mélancolie, génie et folie en Occident, Éd. Gallimard/coédition musée du Louvre, Paris,
2005.
546
Ibid.
547
Dominik Rimbault: In the footsteps of van Gogh, Éd. Arthaus Musik, Leipzig, 2007.
548
Heiner Bastian (Éd.): Ron Mueck, Éd. Hatje Crantz, Ostfildern-Ruit, 2005.
105
de souffrance passive comme l’une des motivations à l’origine de l’activité créatrice. Pour
Werner Hofmann,549 Carstens ne correspond cependant pas vraiment au modèle d’un
mélancolique ou d’un artiste déchu. Il voit plutôt dans la naiveté de son autoportrait
confirmant également le tableau que Fernow brosse de lui comme un talent naturel en friche
qui «[était] venu à l’art sans aucune formation préparatoire.»550 Or, il considère cela comme
étant tout à fait un point positif, car, selon lui, Carstens résiste, grâce à cela, sa vie durant, à la
contrainte de correspondre aux normes esthétiques propres de son époque et, ce faisant, put
épanouir son talent de manière authentique:
Sa méconnaissance totale de l’esprit moderne l’a rendu d’autant plus capable, afin de saisir l’esprit de l’Antiquité
dans sa pureté et vérité […] Ainsi, il a prêté son talent à l’art de façon pure et libre et a reçu ses premières
impressions profondes et inextinguibles.551
L’esprit de l’Antiquité ne peut donc pas être appris péniblement, mais est plutôt ressenti de
façon spontanée. En ce qui concerne l’ambition artistique, ou, l’aspiration individuelle à
l’art552 comme Fernow l’appelle, Carstens excelle d’après sa conviction non seulement par
ses qualités en tant qu’autodidacte, mais également de par sa capacité à l’autodétermination et
la quête de «son propre chemin»:
Carstens avait très tôt, garçon et jeune, l’œil et la main pour le dessin technique […] Si Carstens, sans s’en
apercevoir, avait été mené plus tôt à l’art sous la direction d’un maître, celui-ci l’aurait mené sur le chemin
commun de l’imitation […]; il reste à savoir s’il serait sorti de cette école aussi pur et libre, aussi particulier et
autonome, qu’il l’a fait en empruntant son propre chemin? […] Sa méthode, qui consiste à ne rien imiter, mais à
tout saisir par la contemplation, et à appliquer les connaissances ainsi acquises dans ses propres travaux, a
donné l’avantage à Carstens d’exercer sans cesse son talent de représentation à l’aide des objets.553
549
Cf. Werner Hofmann, 1995, p. 644: „Ist dem Selbstbildnis von Asmus Jakob Carstens - intim trotz der
Frontalität - anzumerken, daß dieser Jüngling seinerzeit von der Kopenhagener Akademie relegiert wurde?“
550
RS, I, p. 291 s.
551
Ibid.: „Die völlige Unbekantschaft mit dem modernen Zeitgeiste macht ihn nur desto fähiger, den Geist des
Alterthums wahr und rein aufzufassen [...] Er brachte also sein Talent rein und unbefangen zur Kunst und
empfing ihre ersten tiefen, unauslöschlichen Eindrücke.“
552
Cf. au sujet de la genèse de la notion d’art chez Goethe l’étude de Charles Handschin: „Goethe und die
bildende Kunst“, in: Modern Philology, vol. 12, n° 8 (1915), ps. 489-494.
553
Ibid., p. 304 s.: „Carstens hatte bereits frühe, als Knabe und Jüngling, Auge und Hand im Technischen der
Zeichnung [...] Wäre Carstens früher, ehe er sich bewust ward, unter der Anleitung eines Meisters zur Kunst
106
Dans ce contexte, il reste à savoir si Fernow assimile l’aspiration à l’art généralement à
l’effort actif de l’artiste ou s’il envisage le terme plutôt au sens passif comme le résultat d’une
inspiration divine. Peut-être trouve-t-on aussi la réponse dans l’interprétation du modèle
traditionnel d’ingegno,554 selon lequel l’artiste crée son œuvre librément d’après une
inspiration spontanée. De même, Fernow souligne que Carstens se distingue des copistes
traditionnels des académies, ces «imitateurs et réciteurs»,555 grâce à la formation spécifique
de son œil artistique. La prise de distance apparente du chemin académique de l’imitation est
également significative pour le changement de la compréhension de l’art au sens du disegno,
qui va de pair avec une mise en valeur du caractère, à laquelle aspire également Winckelmann
dans les Pensées sur l’imitation.556 Déjà Addison avait remarqué, dans ses écrits, l’importance
de l’ocular sense au sens de la vision artistique comme étant le «plus parfait et le plus
délicieux des sens humains.»557 Cette autopsie artistique était, déjà à l’époque des Lumières,
devenue la partie complémentaire du paradigme esthétique, de l’imitatio, jusque-là
dominante, et devait, peu à peu, être relayée par l’inventio parlant plus au public. De même,
on constate à ce propos que Fernow ne met pas l’accent sur une analyse ekphrastique et
immanente de l’œuvre. Quant à cela, il est frappant que sa recension des œuvres de Carstens
est moins détaillée, également en ce qui concerne les questions du style et de la forme. De
gekommen, so würde dieser ihn auf den gewöhnlichen Weg der Nachahmung geführt [...]; ob er auch aus dieser
Schule so rein und unbefangen, so eigenthümlich und selbstständig wieder hervorgegangen [sein] als er sich auf
seinem eigenen Wege erhielt? [...] Bei seinem Verfahren, nichts nachzuzeichnen, sondern alles durch
Betrachtung aufzufassen, und die so erworbenen Kentnisse in eigenen Arbeiten anzuwenden, hatte Carstens den
Vortheil, dass er sein Darstellungsvermögen unaufhörlich an neuen Gegenständen übte.“
554
Cf. au sujet de la conception d’un ingegno comme un don divin par exemple un vers de Michelangelo
Buonarotti, cité selon: Rime, Éd. Ophrys, Paris, 2005, n° 149, vers 1-10: «Non posso non mancar d'ingegno e
d’arte a chi mi to’ la vita con tal superchia aita, che d'assai men mercé più se ne prende. D’allor l’alma mie parte
com’occhio offeso da chi troppo splende, e sopra me trascende a l’impossibil mie; per farmi parial minor don di
donna alta e serena, seco non m’alza; e qui convien ch’impari che quel ch’i’ posso ingrato a lei mi mena. Questa,
di grazie piena, n’abonda e ‘nfiamma altrui d’un certo foco, che ‘l troppo con men caldo arde che’l poco.»
555
JS, p. 276: „Nachahmer und Nachbeter hingegen findet man in Menge, und ich bin wahrhaft auf die
Kunstakademien ergrimmt, die diesen sinnlosen Schlendrian pflegen und befördern.“
556
Cf. WW, p. 14.
557
Cf. Milizia Francesco, in: Dell’ arte di vedere nelle belle arti di disegno, cité d’après: Studi di Estetica, IIIème
série, année XXVII, fasc. II (20/1999): «Vedere e consumara divergono, nel secolo che fui detto ‘dei Lumi’, due
aspetti complementari di quel medesimo paradigma estetico che, disarticolando la triade Canova-committenteconoscitore-artista (Fumaroli), pone al centro della scena dell’arte un pubblico sempre più vasto ed eterogeneo
di fruitori [...].»
107
même, il se limite dans l’ensemble à une simple description des scènes mythologiques558
représentées, sans pourtant s’intéresser davantage aux aspects picturaux. Il n’y a que deux
tableaux, qui passent également pour les chef-d’œuvres de Carstens, qui sont décrits de façon
plus détaillée: La nuit avec ses enfants et L’âge d’or. Fernow remarque par rapport à ce
premier:
La nuit avec ses enfants peinte d’après une poésie d’Hésiode. La nuit, représentée comme mère des autres
personnages, est la figure centrale d’une composition et forme avec les génies du sommeil et de la mort assoupis
dans son giron un groupe magnifique.559
La nuit, dont Carstens emprunte le motif à la théorie des dieux de Moritz,560 et qu’on retrouve
également dans les écrits winckelmanniens,561 remonte initialement aux textes de
Pausanias,562 et d’Hésiode.563 D’après ce dernier, l’avènement du monde des dieux remonte
au premier âge, à partir de la mère d’origine Gaïa, qui donne naissance à Uranos, qui sera par
la suite détrôné par Cronos. Ce dernier domine le genre doré des hommes mortels, qui, sous
son règne, mènent une vie heureuse. Après la chute de Cronos, cet état terrestre idéal sera
alterné par les âges successifs du monde (par Zeus). Quant à la composition, le dessin de
558
Comme la description des vingt-quatre scènes propres à la saga des Argonautes dans le Carstens de Fernow.
Johanna Schopenhauer: Gabriele. Ein Roman. In zwei Theilen. Erster Theil, Éd. Brockhaus, Leipzig, 1819, p.
140: „Die Bildszene stellt die in einer jungen Frauengestalt personifizierte Nacht mit ihren beiden Kindern
Schlaf und Tod dar, der auf der linken Seite des Tableaus Nemesis, die Tochter der Nacht und Göttin der
Vergeltung gegenüber gestellt wird. Das Schicksal, vermutlich ebenfalls in Gestalt einer Frau, steht mit
verhülltem Haupt neben ihr und hält in ihren Händen ein Buch, aus dem sie den drei Parzen Lachesis, Klotho
und Atropos die Schicksale der Menschen vorträgt.“ Cf. également par ailleurs Herbert von Einem: Asmus Jacob
Carstens - die Nacht mit ihren Kindern, Éd. Westdeutscher, Cologne/Opladen, 1958. Ibid., s.: „[...] die Nacht mit
ihren Kindern nach der Dichtung Hesiodus vorstellend. Die Nacht, als Mutter der übrigen Gestalten, ist die
Hauptfigur der Komposizion, und macht für sich mit den in ihrem Schoβse ruhenden Genien des Schlafs und des
Todes eine herliche Gruppe.“
560
Voir Karl Philipp Moritz: Götterlehre oder Mythologische Dichtungen der Alten, Francfort/M., 1979, ps. 1045.
561
Voir Winkelman’s Werke, C. L. Fernow (Éd.), vol. II, p. 549: „Die Nacht hält über das Haupt ein fliegendes
Gewand voll Sterne, wie diejenige Figur auf einem geschnittenen Steine ist, welche Maffei eine Göttin der
Stunden nennet, und eine ähnliche Figur, deren fliegendes Gewand blau ist, die eine umgekehrte Fackel hält, mit
der Üeberschrift NYE, ‘die Nacht’, bringet Montfauçon bey aus einem Gemälde einer alten Handschrift.“ Meyer
écrit dans sa note: „Sehr schön ist die Nacht gebildet auf zwei Grablampen, S. Passeri Luc. fict. t. I. tab. 8. et
Bellori Luc. Sepulcr. p. I. tab. 8: „Auf dem Deckel einer groβen Graburne in der Kirche St. Lorenzo vor Rom
breitet die Figur der Nacht ihr Gewand aus, dem mit zwei Pferden bergabfahrenden Abend entgegen“, (signé M/
ibid., p. 706, note n° 112).
562
L’écriture historique de Pausanias sert par ailleurs également à l’instrumentalisation du mythe de l’aurea
aetas à l’âge d’Auguste. Cf. à ce sujet John Pollini: “The Tazza Farnese: Augusto Imperatore: ‘Redeunt Saturnia
Regna’!“, in: American Journal of Archaeology, vol. 96, n° 2, 1992, ps. 283-300, ainsi que Karl Galinsky:
“Venus, Polysemy, and the Ara Pacis Augustae“, ibid., vol. 96, n° 3, 1992, ps. 457-475.
563
Cf. Hesiod: Götterlehre, Otto Schöneberger (Éd.), Éd. Reclam, Stuttgart, 2002 [en traduction allemande].
559
108
Carstens n’est pas une représentation allégorique au sens traditionnel du terme, mais plutôt à
concevoir – tout au sens des réflexions sur la théorie de l’art de Moritz - comme une «langue
de la fantaisie […] en même temps un monde en soi […] sorti du contexte réel des choses »
étant donné que « la fantasie règne dans son propre domaine selon le plaisir.»564 De même,
Johanna Schopenhauer mentionne le tableau sous la forme d’un petit passage de texte
allusoire dans son roman Gabriele.565 L’œuvre de l’âge d’or était censée devenir le chefd’œuvre de Carstens, une composition de tableau dont il a probablement été inspiré par une
lecture d’Hésiode566 et d’Ovide,567 renouant avec le mythe antique de l’aurea-aetas, qui
esquisse cet état paradisiaque où les hommes coexistent en paix et en harmonie. Des
perversions de civilisation provoquées par la guerre, la soif du pouvoir et la déchéance morale
sont alors les causes d’une détérioration progressive des conditions de vie, qui vont engendrer
par la suite la succession de l’âge d’argent, de bronze et de fer. Le sujet de l’âge d’or sera,
après Carstens, relevé par la suite également par Jean-Auguste-Dominique Ingres,568 qui sera
chargé par le duc de Luynes de la réalisation d’une œuvre sous la forme de deux peintures
564
Voir Karl Philipp Moritz: „Über die bildende Nachahmung des Schönen“ et „Nachbildung des groβen
Ganzen der Natur“ [1788], cf. Hans Joachim Schrimpf (Éd.): Karl Philipp Moritz: Schriften zur Ästhetik und
Poetik, édition critique, Tübingen, 1962, ps. 63-93. Voir à ce sujet également Goethe: „Über die Wahrheit und
Wahrscheinlichkeit von Kunstwerken“, [WA], I, p. 261: „[Kunst als einer] kleinen Welt für sich.“
565
Johanna Schopenhauer s’est également inspirée de l’œuvre de Carstens, comme le prouve le passage suivant
dans son roman Gabriele, op. cit., ibid., p. 42: „Das Tableau stelt die Nacht vor, die ihren dunkelblauen
Sternenschleier über ihre Kinder, den Schlaf und den Tod, ausgebreitet hält. […] Zu ihren Füβen schlummerten
zwei liebliche, blonde Genien, der eine war mit Mohnblumen geschmückt, der andre, mit der ausgelöschten
Fackel, trug einen Kranz von Zypressen.“ Cette scène imaginaire au sens d’un tableau vivant aboutit sur
l’apparition de la protagoniste du roman, Gabriele: „Bunte, fantastische Traumgestalten drängten sich hinter ihr,
unter ihnen stand Gabriele, als ein trüber, Unheil verkündender Traum, in ihren langen, schwarzen Schleier
gehüllt, unter welchem die goldglänzenden Locken tief herabrollten. Beim Lampenlicht, mitten unter
rosenwangigen, schimmernden Gestalten schien sie, ohne alle Schminke noch blässer als sonst.“ Gabriele
devient ainsi une sculpture vivante pygmalionienne, à l’instar du tableau vivant: „Sie glich Pygmalions
Meisterwerk bei der ersten Regung des erwachenden Lebens. So glühend strahlte ihr dunkles Auge aus dem
Marmorgesicht, denn ihr Blick traf auf Ottokarn, der in einiger Entfernung in ihrem Anschaun verloren stand.“
566
Cf. note n° 565 ci-dessus.
567
Cf. les Métamorphoses d’Ovide, dans lesquelles on trouve également un passage de texte correspondant (1,
vers 89-110, ici p. 89 s.): «Aurea aetas est aetas, quae vindice nullo, sponte sa, sine lege, fidem rectumque
colebat. Poena metusque aberant nec verba minantia fixo aexa laegabantur, nec supplex turba timebat judicis ora
su, sed erant sine vindice tutti.»
568
Comme Carstens, Ingres s’intéresse surtout aux sujets de la mythologie antique et mythique (en 1813 il
achève son œuvre la plus connue Le rêve d’Ossian). Après la mort de sa femme en 1849 il arrête la peinture; sa
dernière composition L’âge d’or, est ainsi restée inachevée. Cf. Karin H. Grimme: Jean-Auguste-Dominique
Ingres: 1780 - 1867, Éd. Taschen, Cologne, 2007.
109
(L’âge d’or et L’âge de fer) pour la décoration de l’intérieur de son château de Dampierre
(Yvelines). Il commence seulement la peinture de l’âge d’or, qui reste inachevée. Ce qui est
assez étonnant, c’est que l’esquisse du tableau ressemble par plusieurs aspects tout à fait au
dessin de Carstens (en ce qui concerne la perspective, la composition du tableau, le coloris et
le contraste). Or, les motivations à l’origine de ces deux œuvres sont pourtant
fondamentalement différentes. Ainsi, Carstens vise principalement avec sa représentation la
visualisation de l’idée de nation, qui est probablement aussi motivée par le désir de fonder une
nouvelle identité allemande. Cependant le tableau reste, ironie du sort, tout comme celui
d’Ingrès, inachevé, étant donné que Carstens décède, avant d’avoir pu le terminer, des suites
d’une maladie de cœur congénitale:
[…] qui a conçu une idée de l’âge d’or ou de l’état naturel de l’homme sophistiqué par l’idéal du poète, mais qui
n’a plus eu le temps, de le finir, car les maux de poitrine, la fièvre et la faiblesse revenaient de nouveau.569
Il compense par ailleurs ce manque de la perfection artistique en tant que défenseur théorique
de l’art de Carstens en attirant successivement l’attention sur l’intention de l’artiste à la base
de cette œuvre, ou bien la volonté de l’art, qu’il met toujours en valeur vis-à-vis du véritable
savoir-faire de l’art. Déjà le choix de ce sujet du mythe de l’aurea aetas illustre pour lui ainsi
l’enthousiasme exemplaire de ce premier:
Déjà le choix d’un sujet aussi hilarant et plaisant, à un moment où son corps souffrait sans cesse et commençait à
se soumettre à la destruction envahissante, faisait preuve de la force toujours inébranlable et de la gaieté de son
esprit.570
A l’exemple des études propres à Homère et l’enfer de Dante, il essaie par la suite d’illustrer
la spécificité artistique de Carstens.571 Le style pur de ce dernier excelle, d’après Fernow, de
569
Ibid., s.: „[...] eine Idee des goldenen Zeitalters, oder des durch das Dichterideal veredelten Naturzustandes
der Menschen entwarf, aber nicht mehr Zeit gewan, sie zu endigen; denn Brustübel, Fieber und Schwäche
kehrten aufs neue zurück.“
570
Ibid., p. 231: „Schon die Wahl eines so heiteren, gefälligen Gegenstandes zu einer Zeit, wo sein Körper
ununterbrochen litt, und der hereinbrechenden Zerstörung zu erliegen anfing, bewies die noch immer
ungeschwächte Kraft und Heiterkeit seines Geistes.“
571
Ibid.: „[...] Studien zum Homer und Dante’s Hölle durch ihren Stil, den reinen Stil, und durch die sorgfältige
Ausführung, womit sie verfertigt sind, auszeichnen.“
110
par son rejet des représentations à la fois sensuelles et suggestives,572 son renoncement à la
couleur en faveur du contraste strict noir sur blanc, et sa simple limitation aux contours. A
cela s’ajoute la prise de distance d’un dessin anatomiquement correct, en faveur d’une
productivité de l’introspection. A la fin, il pose la question de savoir si le chemin autodidacte
de Carstens avait été «le plus juste et le plus adapté»,
573
en arrivant à la conclusion
surprenante que:
Ce chemin ne devrait pas être recommandé comme étant généralement praticable et d’autant moins qu’il devrait
être élargi aux élèves des écoles et académies d’art, étant donné que dans ces instituts on forme, d’après la règle,
des talents imitateurs et non pas créateurs, et c’est pour cela que le plan de formation de celles-ci doit être
mesuré d’après le talent de ces élèves.574
La vie de Carstens, affranchi de l’académie, peut donc servir de modèle non seulement pour
les artistes en herbe, mais également pour des talents créateurs exceptionnels, de sorte:
qu’au moins sa biographie ne soit pas tout à fait perdue à cette fin; qu’elle élève chez certains jeunes artistes
cette notion de dignité de la vocation, en l’enthousiasmant de cette décision, qui est si naturelle aux âmes
pénétrées par la dignité de leur profession, cette décision de n’avoir pour ambition, sans faire attention à l’esprit
frivole de l’époque contemporaine et aux applaudissements d’une foule incompréhensive, que la vraie
excellence, qui, elle seule, garde à chaque changement du goût l’approbation des connaisseurs.575
Avec cette fin dithyrambique, Carstens est présenté comme un artiste anti-académique, 576 qui,
à l’instar de «l’artiste maudit», ne se plie ni au goût de son époque, considéré par Fernow
comme décadent, ni aux applaudissements de la «foule incompréhensive» et la faveur de ses
572
Cf. Hofmann, 1995.
Ibid., p. 311: „[…] für ihn der rechte und angemessenste.“
574
Ibid., s.: „Als allgemein gangbar würde jedoch dieser Weg nie zu empfehlen noch weniger zu einer breiten
Heerstraβe für die Zöglinge der Kunstschulen und Akademien auszuweiten sein, weil in solchen Anstalten der
Regel nach, nur nachahmende nicht schöpferische Talente gebildet werden, daher auch vornehmlich auf das
Vermögen jener, nicht dieser, der Bildungsplan derselben berechnet werden muss.“
575
Ibid.: „Möchte wenigstens die Darstellung seines Lebens für diesen Zwek nicht ganz verloren sein; möchte
sie in manchem jungen Künstler den Begriff von der Würde seiner Bestimmung erhöhen, und ihn zu dem
Entschlusse begeistern, welcher edlen, von der Würde ihres Berufs durchdrungenen Gemüthern so natürlich ist,
zu dem Entschlusse, ohne Rücksicht auf den frivolen Geist des Zeitalters und den Beifall der unverständigen
Menge, nur nach wahrer Vortrefflichkeit zu streben, die allein, wie die Werke der alten Künstler, in jedem
Wechsel des Modegeschmaks den Beifall der Kenner behauptet.“
576
Cf. Rees, op. cit.
573
111
mécènes, mais qui est, grâce à la «poésie de son invention»,577 «devenu ce qu’il est
devenu.»578 D’un point de vue historiographique, non seulement la problématique de la
corrélation entre le talent artistique et son épanouissement individuel dans la société moderne
est soulevée, mais aussi le personnage, à la fois fictif et authentique, de Carstens est
instrumentalisé par Fernow comme le véhicule de ses propres convictions esthétiques et
politico-culturelles. Cela offre pour lui aussi l’exemple par excellence du statut précaire de
l’artiste dans la société moderne, une problématique, qui, par la suite, va être relevée, entre
autres, par Goethe579 et James Joyce.580 Ainsi, Goethe décrit dans les Années d’apprentissage
et de formation de Wilhelm Meister le parcours du protagoniste du même nom, qui, au bout de
nombreuses errances et confusions, trouve sa véritable vocation, à savoir celle de médecin.
Suivant une thématique similaire, Joyce décrit au XXème siècle, dans son ouvrage de toute
évidence autobiographique, intitulé A Portrait of the Artist as a Young Man, le parcours du
jeune artiste Stephen Dedalus, dont la personnalité sensible entre en conflit avec la famille et
l’autorité dans l’Irlande au tournant du siècle. De même, Fernow met clairement en avant
cette intention sociocritique, de façon que, si paradoxal que cela puisse paraître au premier
regard, la fiction qu’il crée autour de Carstens581 peut être considérée comme une sorte
d’anticipation de l’anti-artiste moderne, du moins dans l’espace germanophone, et cela encore
avant les Migrations de Franz Sternbald de Ludwig Tieck.582 Pourtant, on ne prêta, à cette
époque-là, que très peu d’attention à l’inauguration fernowienne d’un nouveau topos de la vie
577
RS, I, 270.
Voir Fernow: Carstens, Leben und Werke. Von K. L. Fernow, H. Riegel (Éd.), Hanovre, 1867, p. 185: „In
dem Leben eines Künstlers von so entschiedenen Anlagen und so durchaus eigener, trotz den ungünstigesten
Umständen glücklich durchgeführter Selbstbildung ist nichts merkwürdiger, als zu sehen, wie er ward, was er
geworden.“
579
Cf. Gero von Wilpert, in: Goethe-Lexikon, Éd. Alfred Kröner, Stuttgart, 1998, ps. 1187-1191, ici p. 1189,
ainsi que idem: Sachwörterbuch der deutschen Literatur, ibid., 2001, p. 917.
580
Cf. Richard Ellmann: James Joyce, Éd. Oxford University Press, 1959.
581
Cf. Rees, op. cit.: „Carstens als eine Erfindung, oder im Idiom des 18. Jahrhunderts ausgedrückt: eine Kreatur
Fernows in kunsttheoretischer Absicht?“
582
Ludwig Tieck: Franz Sternbald’s Wanderungen - eine altdeutsche Geschichte, Johann Friedrich Unger (Éd.),
Berlin, 1798.
578
112
d’artiste, ce qui est surtout dû à une réception dans l’ensemble plutôt réservée de l’œuvre.583
Tandis que des auteurs de langue allemande (comme par exemple F. Brun, J. H. Meyer, A. W.
v. Schlegel) partagent tout à fait les remarques polémiques de Fernow concernant le style
éclectique de Canova, d’autres y sont plutôt sceptiques (A. v. Kotzebue, J. G. Seume). Comme
le constate par ailleurs Ansgar M. Cordie,584 ce qui manque à Fernow, c’est finalement un
public répondant au marché. Or, vu dans l’ensemble, cela ne change rien à l’importance
littéraire de la biographie de Carstens en tant qu’œuvre novatrice585 reposant d’abord sur les
postulats d’authenticité et d’individualisation du nouveau genre de la biographie d’artiste, un
rang qui lui est indubitablement dû, même si une certaine tendance à une «auto-intrônisation
du théoricien face à l’homme critique»586 ne peut pas tout à fait être réfutée. Par ailleurs, la
composante sociocritique, sous la forme d’une prise de distance par rapport au modèle
traditionnel d’écriture biographique, reste bien manifeste. Cette réhabilitation publique de
Carstens devrait non seulement aller de pair avec un démenti des reproches que von Heinitz
avait prononcés, du temps de son vivant, contre l’artiste, mais également influencer de
manière positive la réception de l’héritage carstensien, en le mettant en valeur devant Canova
et Arioste, ce qui fera l’objet du chapitre suivant.
583
Cf. Alexander Auf der Heyde: „Carl Ludwig Fernows Monographie ‘Über den Bildhauer Canova und dessen
Werke (1806)’: eine exemplarische Auseinandersetzung mit der italienischen Gegenwartskultur. Anmerkungen
zur Entstehung und Rezeption des Textes“ [exposé du colloque du SFB 482 (Université de Jéna 2-5 avril 2006)].
584
Cf. Ansgar M. Cordie: „Zu fragen wäre nach den Bedingungen für ein Publikum […] das Kunst nicht reinen
Marktgesetzen unterwirft, sondern an ihrer Autonomie wie an ihrer lebensweltlichen Einbettung lebhaften Anteil
nimmt“, cité d’après: PhiN 18/2001 (ps. 47-54/ ici p. 52).
585
Voir Herbert von Einem: „Carl Ludwig Fernow“, in: Deutsche Biographie, Historische Kommission bei der
Bayerischen Akademie der Wissenschaften (Éd.), vol. 5, Berlin, 1961, ici p. 99: „[…] die erste moderne
Künstlermonographie in deutscher Sprache.“
586
Cf. Rees, op. cit.
113
II. 3. Antonio Canova: «L’attrait plaisant et flatteur de Canova»
Si nous avons vu, au chapitre précédent, les éléments essentiels de la biographie de
Carstens587 d’après les aspects propres au contenu et à la forme, nous allons voir, dans ce qui
suit, que la biographie de Carstens peut être interprétée comme étant l’antithèse artistique
parfaite à Canova et cela à maints égards. Les deux biographies sont publiées en 1806, aux
éditions Gessner et Hartknoch, ce qui nous amène notamment à soupçonner que la
publication presque synchronisée des deux monographies d’artistes est également destinée à
des fins propagandistes. Ce faisant, la gloire posthume de Carstens est influencée de manière
positive, alors que l’œuvre de Canova est soumise à une analyse plutôt critique. Au fait, ce
regard en simultané de deux vies d’artiste, qui, quant au contenu, ne sont pas seulement
diamétralement opposées, mais se complètent aussi paradoxalement dans la mesure où
chacune représente l’antiportrait de l’autre, semble merveilleusement se prêter à ces fins. De
même, la dichotomie apparente n’est nullement due au hasard. De fait, ce contraste en noir et
blanc ne pourrait mieux intriguer l’œil du lecteur attentif, ce qui se reflète également au
niveau de la composition littéraire. Ainsi, Fernow commence, à la manière comparable à
Vasari,588 la description de la vie de Carstens, tout comme celle de Canova d’ailleurs, à partir
de leur plus tendre enfance:
Tandis que Carstens naît comme le fils d’un meunier et né à Sankt Jürgen dans le SlésvigHolstein, au nord de l’Allemagne, que Fernow qualifie de manière péjorative de nord hostile à
l’art, Canova est issu d’une ancienne famille de sculpteurs (Scalpellini), à Possagno, dans la
Terra ferma située dans région de Venise, qu’il appelle le sud propice à l’art. Contrairement à
Canova, Carstens grandit ainsi dans un milieu social qui est dès le départ propice à
587
Fernow dédie la biographie de Canova à la poétesse Friederike Brun (Der edlen Dichterin und Freundin des
Schönen Friederike Brun geb. Münter zu Kopenhagen), voir préface RS, vol. I, Éd. Gessner, Zurich, 1806.
588
D’après la thèse de Svetlana L. Alpers, le récit biographique dans les Vite de Vasari sert uniquement de cadre
pour la description ekphrastique des œuvres: “Ekphrasis and aesthetic attitudes in Vasari’s Lives“, in: Journal of the
Warburg and Courtauld Institute, n° 23, (1960), ps. 190-215.
114
l’épanouissement de ses dons artistiques. Pendant que Canova peut, durant ce temps-là,
s’adonner intensément à la contemplation de la nature, Carstens doit entraîner son œil
artistique de manière autodidacte en regardant les chef-d’œuvres des Anciens.
Et, plus encore, Canova bénéficie, dès sa plus tendre jeunesse, du mécénat de la cour de
Rome,589 alors que Carstens décline un prix qui lui est accordé par l’académie de Berlin, en
formulant le reproche d’un concours illicite, et à part cela, est toujours contraint à se justifier
face au ministre Heinitz au sujet de sa bourse. De même, Carstens se voit constamment
confronté aux polémiques venant de ceux qu’il appelle les jaloux, comme par exemple le
peintre Müller590 et Chodowiecki,591 tandis que Canova ne s’est jamais heurté à ce genre de
difficultés, car il est, comme Fernow le constate à plusieurs reprises, après la mort précoce de
celui qui aurait pu être son seul rival potentiel, le très prometteur sculpteur Alexander
Trippel,592 quasiment sans concurrence et sans critiques. Fernow le formule ainsi:
589
Ainsi Canova commence sa formation, seulement âgé de 11 ans, en 1768, sur la recommandation du sénateur
Giovanni Falieri, chez le sculpteur Bernardi Torretti dans la province du Trévise Pagnano d’Asolo, avant d’être
accueilli à l’Accademia Santa Marina à Venise, où il est instruit par des professeurs de renom.
590
Cf. aussi Rolf Paulus et Eckhard Faul: Maler-Müller-Bibliographie, Éd. Winter, Heidelberg, 2000.
591
Ibid., p. 223: „[…] Maler Müller, der sich bis dahin im Umgange immer freundschaftlich gegen ihn erwiesen
hatte, zog durch einen weiten Umweg, von Deutschland aus, feindselig gegen ihn zu Felde.“ Le ‘Maler Müller’
avait publiquement critiqué la biographie de Carstens dans les Heures, provoquant ainsi une contre-critique de
Fernow dans le Teutschen Merkur, ce qui amuse Goethe et Schiller - dans le Teutschen Merkur. De même,
Daniel Chodowiecki se prononce de façon négative sur Carstens; voir: Briefe Daniel Chodowieckis an Anton
Graff, Charlotte Steinbrucker (Éd.), [1921], Éd. de Gruyter, Berlin/Leipzig, 1971, p. 106 et p. 158: „Er hat zu
viel Eigendünkel […]“, et: „[…] er ist die Charikatur von Michelangelo geworden.“
592
Fernow exagère à ce sujet, de toute évidence, étant donné que le talent du sculpteur suisse Alexander Trippel
est sous-estimé par ses contemporains et seulement réfuté de manière posthume. Son parcours ressemble à un
certain égard à celui de Carstens, car Trippel parvient à l’art, tout comme Carstens, seulement à travers des biais.
Après un stage interrompu chez un luthier à Londres, il apprend le dessin chez Christian Ludwig von Lücke et
déménage en 1759 à Copenhague, où il est reçu à l’académie d’art danoise. Durant ce temps, il est très influencé
par le style préclassique du sculpteur Johann Wiedewelt et Carl Frederik Stanley, qui vont par la suite
l’encourager à continuer sa formation à Rome. Là-bas, il réalise plusieurs travaux, mais le succès escompté se
fait attendre. Ainsi, son esquisse pour le monument en l’honneur de Friedrich II. est refusé, tout comme sa
candidature comme vacataire du sculpteur à la cour de Leipzig. Malgré cela, il est nommé membre d’honneur à
l’académie prussienne des sciences. Après un court séjour à Paris, où il fait la connaissance du graveur Christian
von Mechel, il rentre en Suisse. En 1778, il s’installe définitivement à Rome, où, jusqu’à sa mort, en 1793, il
dirige un atelier de peinture, dans lequel résident par moments des artistes comme Gottfried Schadow et Johann
Jakob Schmid. Parmi ses œuvres les plus connues figurent deux bustes en marbre qu’il fait de Goethe. Cf. à ce
sujet Friedemann Walbrodt (auteur et Éd.): J. W. von Goethe in Stein: von Pierre Jean David d'Angers Alexander Trippel, Berlin-Dahlem, 2003, ainsi que C. H. Vogler: Der Bildhauer Alexander Trippel aus
Schaffhausen: Mit d. Portr. u. 4 Tab. Abb. von Werken Trippels, Éd. Schoch, Schaffhausen, 1893 und Jörn
Albrecht: Alexander Trippel (1744-1793); Skulpturen und Zeichnungen, (catalogue de l’exposition du 25
septembre au 21 novembre 1993), Éd. Museum zu Allerheiligen, Schaffhausen, 1993, ainsi que Hans Wahl et
Anton Kippenberg: Goethe und seine Welt, Éd. Insel, Leipzig, 1932, ps. 105 et 126.
115
Quand l’auteur a écrit cela, Canova a été en fait le seul artiste de son domaine à Rome, qui devait accomplir de
grands travaux […]. Ainsi, Canova était resté, après la mort de Trippel, […] pendant longtemps sans concurrent
[…] Canova aurait eu en lui un concurrent dangereux.593
Dans la préface des Études romaines, Fernow tente ainsi de définir de plus près le problème
du jugement esthétique, ce qui devient en même temps le point de départ de sa considération
des œuvres de Carstens:
Chaque jugement d’art qui ne s’appuie pas uniquement sur le sentiment, mais qui se fonde sur des raisons,
présuppose un système de principes critiques ou reposant sur l’intelligence de la nature et de la finalité de l’art.
Si, sans base théorique solide, les notions dominantes sur l’art sont différentes, il se peut que deux juges d’art
s’accordent selon leurs principes et leurs jugements: ainsi devient-il quasiment nécessaire qu’on expose, de
même que les jugements sur les œuvres d’art, les raisons et le point de vue à partir desquels on considère l’art,
afin de ne pas être mal compris. L’auteur a suivi ce principe dans son premier essai sur Canova et ses œuvres.594
Fernow cherche donc plutôt à souligner son authenticité en tant que biographe, en se référant
non pas à son sentiment en tant que spectateur, mais surtout à sa faculté de juger en tant que
critique d’art. Il attache par la suite une grande importance au fait de paraître crédible aux
yeux du lecteur aussi en tant qu’historiographe. Ainsi, il présente dans son introduction
intitulée Du sculpteur Canova et de ses œuvres une sorte d’état des lieux de la production
d’art du XVIIIème siècle, en diagnostiquant un tournant important dans la peinture et la
sculpture qu’il considère comme étant une césure épocale. Il y voit l’une des raisons dans les
«circonstances favorisantes», qu’il ramène en premier lieu au savoir-faire de deux artistes:
«David, le fondateur d’une nouvelle école en peinture»595 et «Canova, qui a ouvert un
593
Ibid. p. 18 s.: „Als der Verfasser dies schrieb, war in der That Canova der einzige Künstler seines Faches in
Rom, der grosse Arbeiten auszuführen hatte [...] So war Canova seit Trippels Tode [...] lange ohne Nebenbuhler
geblieben [...] Canova hätte in ihm einen gefährlichen Mitbewerber zur Seite gehabt [...].“
594
RS, I, p. X: „Jedes, nicht blos auf Gefühl, sondern aus Gründen gefällte Kunsturtheil sezt ein Sistem kritischer
Grundsätze voraus, das auf der Einsicht vom Wesen und Zwek der Kunst beruhet. Da nun bei dem Mangel einer
festen theoretischen Grundlage, die herschenden Begriffe über Kunst so verschieden sind, dass vielleicht nicht
zwei Kunstrichter in ihren Grundsätzen und Urtheilen übereinstimmen: so wird es gewissermassen nothwendig,
dass man, mit seinen Urtheilen über Kunstwerke, zugleich auch die Gründe und den Gesichtspunkt darlege, aus
denen man die Kunst betrachtet, um nicht missverstanden zu werden. Dies hat der Verfasser in dem ersten
Aufsatze über Canova und dessen Werke gethan.“
595
Ibid., I, p. 11: „David als Stifter einer neuen Schule in der Malerei.”
116
nouveau chemin en sculpture.»596 En comparaison, les deux se distinguent, d’après Fernow,
par la force d’expression, qui trouve beaucoup d’imitateurs, d’où la production augmentée
dans les ateliers, qui semble quasi légitimer l’espoir d’un retour d’un «âge florissant», après
le «siècle de Bernini.» En l’occurrence, il attribue la décadence du goût par rapport à l’art de
son temps principalement aux influences romantiques, dont se sont également inspirées de
sculpteurs comme par exemple Cavaceppi,597 ce qui a eu pour conséquence que seuls «des
produits sans goût de la sculpture» ont été créés. D’après lui, la glorification des œuvres
canoviennes réside surtout dans le populisme artistique, dont il se distancie avec véhémence:
Dans cette platitude de la critique se fonde également en partie la raison que les juges d’art italiens savent mieux
écrire des éloges que des critiques - cependant, nous ne voulons, ni par cette coutume, qui n’est favorable qu’à la
faiblesse, ni par l’enthousiasme de toute une nation, ni par la reconnaissance des décrets du pape, qui sont
considérés comme étant infaillibles, exprimer avec franchise notre jugement bien réfléchi sur l’artiste Canova et
ses œuvres.598
Ainsi, il est d’avis que même si le style de Canova plaît à l’amateur, il ne peut pas pour autant
charmer le véritable connaisseur:
Si l’attrait plaisant et flatteur [de l’art] de Canova avait envoûté la foule des amateurs, la justesse plus rigide et la
définition des formes de Trippel, ainsi que son style plus épuré avaient gagné la faveur des connaisseurs.599
Par cette critique indirecte du style et de la forme artistiques choisis par Canova, Fernow a
déjà planté le décor, pour procéder ensuite à une vue critique de l’art canovien, qui sera
complétée par un point de vue personnel sur le caractère de l’artiste:
596
Ibid.: „Canova, der in der Bildnerei einen neuen Weg betrat, auf welchem er seitdem mit immer steigendem
Ruhme fortwandelt.“ Idem pour les citations suivantes.
597
Ibid., p. 13: „Cavaceppi war der einzige Bildhauer jener Zeit der einigen Ruf hatte; aber ihn beschäftigte
meistens die Ergänzung alter Bildwerke für die Sammlungen Roms und für seinen eigenen Antikenhandel.“
598
Ibid., p. 28 s.: „In dieser Seichtheit der Kritik liegt auch zum Theil der Grund, dass die italienischen
Kunstrichter sich besser darauf verstehen Elogien als Kritiken zu schreiben. - Wir wollen indes weder durch
diese nur der Schwäche günstige Sitte, noch durch den Enthusiasmus einer ganzen Nazion, noch durch das
Ansehen päpstlicher Dekrete, deren Aussprüche nur in Sachen der Religion für unfehlbar gelten, abhalten lassen,
unser eigenes, wohl erwogenes Urtheil über Canova den Künstler und seine Werke freimüthig zu äussern.“
599
Ibid., p. 20: „Wenn Canova’s gefälliger schmeichelnder Reiz die Menge der Liebhaber bezaubert hätte, so
würde dagegen Trippels strengere Richtigkeit und Bestimtheit der Formen, und sein reinerer Stil die Kenner für
sich gewonnen haben.“
117
Canova mérite l’estime en tant qu’artiste magnifique, et la considération générale dont il jouit en tant qu’homme
à tous ces égards. Mais il est aussi le signe d’une grande âme de ne pas s’enivrer d’une toute grande louange,
comme de ne pas se faire anéantir par un grand malheur.600
La force de l’âme dans l’ivresse des louanges601 - voici un autre postulat que Fernow adresse à
la psyché de l’artiste, qu’il voit réalisée dans la «droiture naturelle»602 de Carstens, dont il
croit qu’elle remonte, de toute évidence, à l’idéal antique603 véhiculé par Winckelmann. Dans
ce contexte, Fernow critique par la suite la prétention sous-jacente de Canova de présenter, de
manière ostentatoire, ses plastiques éclectiques à côté des œuvres de l’Antiquité. De même, il
juge que Canova dépasse dans ses œuvres maniérées les principes du pur goût, une
transgression qu’il attribue également aux nouveaux artistes de son époque:
Presque tous les nouveaux sculpteurs se sont rendus coupables d’une telle digression de la voie du pur goût […]
Les arts plastiques s’attachent à peindre dans le marbre et la peinture copie les formes abstraites de l’Antiquité
de façon froide et inanimée sur la toile. Oui, l’art plastique devrait s’estimer heureux si chaque artiste, dont la
peinture présente une nouvelle manière, fixait aussi de nouveaux caractères, enrichissant aussi l’art avec de
nouvelles individualités.604
Il ramène le problème esquissé ci-dessus de «peindre dans le marbre», qui par ailleurs
correspond à l’art romantique, au dénominateur suivant, propre à la critique d’art, qui délimite
la forme de représentation subjective (maniérisme) du purisme de style de l’Antiquité
(classicisme):
600
Ibid., p. 22 s.: „Canova verdient die Schätzung die er als ein vortreflicher Künstler, und die algemeine
Achtung die er als Mensch geniest, in jeder dieser Hinsichten. Aber es gehört eine eben so starke Sele dazu, von
zu grossem Lobe nicht berauscht, als von grossem Unglücke nicht niedergedrückt zu werden.“
601
Voir à ce sujet également les pistes de réflexion evoquées au cours de la troisième partie du présent travail.
602
CARSTENS, p. 132: „natürliche Geradheit.“ Cette même droiture d’esprit est attribuée à Fernow par J. G.
Gruber, dans une nécrologie datant du 20 janvier 1809: „[…] Verachtend jeden Schein, nicht eben stolz, aber
doch Seines Werkes sich wohl bewusst, war er überall männlich und gerade und behauptete stets jene
unerschütterliche Ruhe, welche nur das Eigentum kräftiger Seelen ist.“
603
Johann Joachim Winckelmann: Gedancken zur Nachahmung der griechischen Kunstwerke in der Mahlerey
und Bildhauerkunst, op. cit., p. 21: „[…] so wie die Tiefe des Meeres allezeit ruhig bleibt, die Oberfläche mag
noch so wüten, eben so zeiget der Ausdruck in den Figuren der Griechen bey allen Leidenschaften eine grosse
und gesetzte Seele.“
604
RS, p. 35 s.: „Einer solchen Abweichung von der Bahn des reinen Geschmaks haben sich mehr oder weniger
alle neueren Bildhauer schuldig gemacht [...] Die Plastik versucht in Marmor zu malen und die Malerei trägt die
abstrakten Idealformen der Antike kalt und unbelebt auf die Leinwand über. Ja, die bildende Kunst dürfte sich
glüklich schätzen, wenn nicht jeder Künstler, der mit einer neuen Manier auftritt, auch neue Karaktere aufstellte,
und die Kunst nicht blos mit neuen Bildwerken, sondern auch mit neuen Individualitäten bereicherte.“
118
Le principe est valable seulement chez les modernes: chaque artiste se projette dans son œuvre. L’artiste antique
disparaissait derrière la sienne.605
L’antinomie entre les notions d’antique-moderne et de subjectif-objectif forme donc l’axe
principal du système esthétique fernowien. Ainsi, la véritable critique des œuvres
canoviennes606 que Fernow considère lui-même comme le résultat «d’un jugement issu d’une
contemplation calme et objective»607 se termine sur une critique, qui finit par trouver son point
culminant dans la description de la statue du Persée. Le commentaire que Fernow fait à ce
sujet ressemble en effet à un affront artistique: «En tout, la statue est grosse et lourde»608 - tel
est - en résumé, le jugement négatif de Fernow à propos du chef d’œuvre de Canova, qu’il
identifie comme étant l’antithèse parfaite du Jason609 de Thorvaldsen.610 D’après la thèse de
Pierre Cabanne,611 on constate chez Thorvaldsen un tournant par rapport à la notion de
sculpture classiciste,612 dans la mesure où la sensualité élégante de la statuaria antique est
remplacée par les formes froides de la sculpture moderne au sens d’un art glacé.613 Pour
605
Ibid., p. 50. Voir p. 61: „Nur bei den Neueren gilt der Satz: jeder Künstler drükt sich selbst in seinen Werken
ab. Der alte Künstler verschwand hinter dem seinigen.“
606
Ibid., p. 245 s. Fernow subdivise la récension en groupes suivants: 1. figures rondes et groupes 2. bustes 3.
travaux sublimes 4. tableaux.
607
Ibid., p. 29: „[…] Urtheil einer ruhigen, unbefangene[n] Betrachtung.“
608
Ibid., p. 205: „Die Figur ist im Ganzen plump und schwer.“
609
RS, I, p. 198: „Dass die moderne Kunst diese Forderungen wohl erfüllen kan, hat gerade in jener Zeit, ein
junger in Rom lebender Künstler durch die That erwiesen.“
610
JS, p. 302. Bertel Thorvaldsen commence sa formation à l’académie de Copenhague dès l’âge de onze ans, avant
de s’installer à Rome en 1798, où il s’exerce par la suite en contemplant les idoles antiques. C’est là-bas qu’il
rencontre son compatriote Carstens et qu’il fait également la connaissance de Fernow, avec lequel il entretient une
relation amicale. Initialement, il projette de détruire le Jason, son chef-d’œuvre de cette époque, par insatisfaction
artistique, après l’avoir achevé, mais son mécène, le marchand hollandais Hope finit par l’en empêcher, en
l’achetant tout simplement. Cf. par ailleurs aussi Jürgen Wittstock: Geschichte der deutschen und skandinavischen
Thorvaldsen-Rezeption bis zur Jahresmitte 1819, [thèse, Univ. Hambourg, 1975].
611
Pierre Cabanne: Le classique et l’art baroque, Éd. Payot, Paris, 2006, p. 133: «Le Danois Thorvaldsen, dont
la réputation ne fut pas moindre à celle de Canova fit du néogrec un art glacé […] progressivement la sensualité
élégante va céder à la froideur qu’accentue le polie excessif du marbre amollissant les formes.»
612
Cf. aussi Rudolf Zeitler: Der abgewandte Blick. Bemerkungen zu Skulpturen des Klassizismus um 1800.
Interpretationen zu Werken von David, Canova, Carstens, Thorvaldsen, Koch, Éd. Hatje, Stuttgart, 1993, ps. 167176.
613
Henrik Bramsen estime que le Jason de Thorvaldsen représente une mauvaise copie du Doryphore, en raison de
l’absence de l’entité intérieure, qu’il réduit à la composition arbitraire des éléments hétérogènes, qui, dans
l’ensemble, ont un aspect froid et renfermé: „Det påpeges, at Jason ligner Doryforos („spydbæreren“) mere end
nogen anden antik statue, og at den ved sammenligningen røber sine svagheder. Den mangler naturlig harmoni,
savner indre sluttethed og er sammenstykket af elementer hentet her og der. Den er demonstrativt ideal og derfor
kold og afvisende. Som en util nærmelig heldt bygget på teori står Jason, medens Doryforos stille og i ligevægt
kommet os i møde.“ Cité selon: Ny dansk kunsthistorie - Fra rokoko til guldalder, vol. 3, avec des textes de Kirsten
Nørregaard Pedersen, Éd. Palle Fogtda, Kopenhagen, 1994, p. 104.
119
Fernow, ce mode de représentation se rapproche le plus des formes de l’Antiquité au contraire
de l’art de Canova, à qui il attribue, quant à la touche sensuelle dans ses œuvres, un
eclecticisme rompant avec les formes strictes du style classique. Il se réfère surtout à la
précision anatomique des vieux maîtres (p. ex. la mise en valeur des muscles), contrastant
avec les parties du corps fluctuantes qui ne font qu’esquisser les transitions dans les sculptures
de Canova:
Vu de près, on retrouve le bouffi, l’enflé des muscles, qui est si frappant et exagéré sur les statues nommées cidessus [Thésée, pugiliste], sur toutes les figures de Canova, même sur celles qui sont d’une grâce juvénile, à un
degré moindre […] Mais il est indéniable, dès qu’on compare ses Hébés, Psychés, Amors à des figures antiques
du même caractère; sur celles-ci, les muscles apparaissent, tout en ayant une densité tendre, une certaine surface,
en paraissant, de par l’expression pure de la forme, en même temps forts et toniques. On ne retrouve pas ces
légers reliefs sur les figures de Canova, étant donné que là tout s’emmêle de façon ronde et indéfinie, en donnant
à sa manière un certain caractère.614
En fait, ce reproche à la ‘manière’ de Canova est justifié dans le sens où ce dernier a adapté la
statue de Persée au goût de l’époque en y ajoutant des éléments anachroniques,615 mais à
réfuter en ce qui concerne les ornements colorés,616 étant donné qu’on retrouve ces derniers
déjà dans l’art hellénique, contrairement à l’opinion générale. Par la suite, Fernow s’en prend
également à d’autres œuvres de Canova, qui, jusque-là, étaient considérées comme
614
RS, I, p. 230 s.: „Das Aufgedunsene, Angeschwellte der Muskeln, das an den oben genanten Statuen
[Theseus, Faustkämpfer] so auffallend und übertrieben ist, findet sich bei genauerer Untersuchung an allen
Figuren Canova’s, selbst bei den jugendlichzarten, nur in geringerem Grade […] Aber es ist unverkenbar, sobald
man seine Heben, Psychen, Amors, mit antiken Figuren von gleichem Charakter vergleicht; an diesen zeigen die
Muskeln bei ihrer zarten Fülle doch immer eine gewisse Fläche, wodurch sie bei dem reinen Ausdruk der Form
zugleich fest und spankräftig erscheinen. An Canova’s Figuren findet man diese sanften Verflächungen nicht,
sondern alles fliest da mehr rundlich und unbestimmt in einander, und dies gibt seiner Manier ihren eigenen
Charakter.“
615
Comme le bonnet phrygien sur la statue de Napoléon. Canova fait par ailleurs le portrait de Napoléon, en
prenant la pose d’empereur. Cf. Ferdinand Boyer: «Autour de Canova et Napoléon», in: Revue des études
italiennes organe de l’Union intellectuelle franco-italienne, 1937, Éd. (S. L.), Paris 1937, idem: Le monde des
arts en Italie et en France de la Révolution et de l’Empire - Études et recherches, Éd. Società Éd. Internazionale,
Turin, 1969.
616
Cf. Ansgar Cordie souligne que, contrairement à la conception winckelmannienne de la noble simplicité de la
statuaire grec, les statues étaient en effet décorées avec des ornements colorés et les ajouts les plus divers
(ornaments, accessoires, bijoux), comme le prouve par exemple une tête de bronze de Delos et la statue aux yeux
insérés du jeune homme de Marathon. Cf. le commentaire de Basileios Petrakos, in: Das Nationalmuseum von
Athen, Éd. Kleio, Athènes, 1992 (11981), p. 97: „Wunderbar ausgeführt, mit eingesetzten Augen, voller
Ausdruck der Leidenschaft und des inneren Lebens.“
120
inattaquables par les experts en art. On mentionnera ici, de façon représentative, pour
«l’insuffisance et le dépouillé de ces représentations»,617 la Vénus d’Adon, qu’il qualifie de
«dépourvue de caractère»,618 ainsi que la mise en scène exagérée d’Amor et Psyché619 qu’il
considère comme étant trop allégorique et le Mars pacifer620 que Fernow assimile, quant à
l’exécution technique, au Persée. Cependant, les statues représentant Thésée et Minotaure,621
le lion de Léonidas, ainsi que le monument du pape Rezzonico622 et la sculpture originale
d’Amor et Psyché623 retiennent par moments son attention bienveillante, quoique réservée.624
En ce qui concerne la collection des tableaux de Canova, Fernow conteste l’idée que ses
œuvres révèlent au fond des qualités picturales; mais, en contrepartie, il loue le coloris de
Canova, en le mettant, en ce qui concerne la forme, sur la même échelle que Bernini:
Quand les sculpteurs peignent, on retrouve en règle générale dans leurs travaux la forme comme élément
prédominant, car c’est l’essence de leur art et le sujet principal de leur ambition artistique. Cela illustre de
manière frappante les peintures de Michel-Ange, dans lesquelles un sens plastique prime sur le sens pictural.
Dans les peintures de Canova, on retrouve le contraire, et ce dernier ressemble à tel point à Bernini, qui, comme
Canova, avait beaucoup plus de talent pour rendre la matière attirante, que pour définir les formes
caractéristiques; et ainsi fut-il un Rubens dans les arts plastiques. Les peintures de Canova sont si mal définies et
faibles quant au dessin, si dépourvues de forme et de caractère, si douces et si tendres, que l’on pourrait les
prendre pour des créations d’un talent féminin. Oui, les tableaux d’Angelika, qui portent visiblement le signe du
617
Ibid., p. 125: „Die Dürftigkeit und Leerheit dieser Darstellungen [...] und auch bei dem besten Willen
etwas Lobenswerthes an diesen Arbeiten zu finden, suchen wir umsonst danach.“
618
Ibid. p. 110.
619
Ibid., p. 212: „[…] wer den natürlichen Ausdruks der Affekte dem allegorischen vorzieht, wem eine
schöne Idee mehr gilt, als eine schöne Ausführung, der wird sich bei aller Schönheit des modernen Werks
für die antike Gruppe erklären.“
620
Ibid., p. 206: „[…] dass weder die Kunst noch der Ruhm des Künstlers einen Verlust erleiden würden, wenn
diesen Mars Pacifer auch das Schiksal des Palamedes träfe.“
621
Ibid., p. 76: „[...] Theseus auf dem erschlagenen Minotaur sitzend, war das erste grosse Werk [...]; und
obgleich der Gedanke, den Helden auf dem Bauche des erschlagenden Ungeheuers sitzen lassen, nicht fein ist, so
gehört sie doch zu den vorzüglicheren unsers Künstlers.“
622
Ibid., p. 186: „Dass Canova Löwen zu bilden weis, hat er an dem Denkmal des Papstes Rezzonico bewiesen.“
623
Ibid., p. 206: „[die] Gruppe Amor und Psyché, die Canova’s Triumf ist.“ On ne saurait juger ici de l’ironie de
cette remarque.
624
Afin de compléter, il faut également mentionner ici que la statue de Ferdinand de Bourbon comme Minerve
est également approuvée par Fernow. Voir le commentaire de Fred Licht, cité selon: Antonia Canova - La
statuaria, Ottorino Stefani (Éd.), Éd. Electa, Milan, 2003, p. 171: «Ludwig Fernow, uno dei pochi critichi ad
attaccare incessantemente Canova in quanto i suoi gusti estetici e le sue inclinazioni patriottiche gli facevano
preferire e sostenere Thorvaldsen, fece un eccezione soltanto per questa scultura, l’unica che ricevette le sue lodi.
In questo abbiamo una sufficiente dimostrazione che essa era ritenuta valida e convincente dai contemporanei.»
121
sexe faible, ont beaucoup plus de définition quant au dessin, beaucoup plus de notion de forme et d’apparence,
que les siens.625
Ainsi, il classe Canova dans la catégorie des artistes à la fois efféminés et maniérés, en le
mettant, dans ce contexte, au même rang qu’Anton Raphaël Mengs. Cependant, il approuve sa
technique de peinture, mais son verdict demeure néanmoins critique:
Canova a été comparé, par l’auteur d’une histoire de l’art du XVIIIème siècle, dont une partie de l’œuvre est
consacrée à l’œuvre remarquable de Winckelmann et son siècle, d’une manière très juste à Mengs, son égal non
seulement en ce qui concerne le talent naturel, mais également quant à la formation et l’application de celui-ci, et
avec lequel il a beaucoup plus en commun qu’un simple trait de caractère. C’est notamment ce manque d’une
imagination plastique originale, d’où l’incapacité d’inventer le caractéristique et la plasticité atomique; c’est ce
manque de définition, de rigueur de la forme pour des sujets sérieux, puissants, héroïques et pathétiques; c’est
cette aspiration à la beauté plus douce, charmante, ce manque de style et le plaisir de la perfection mécanique,
qui sont les traits frappants du caractère artistique de Mengs, que l’on retrouve également chez Canova.626
Le manque d’une véritable imagination plastique (ingegno)627 et le manque de style et de
forme - c’est à cette courte formule que Fernow ramène son jugement quant à l’art de Canova
et (et celui de Mengs!), qu’il caractérise comme un phénomène du temps et qu’il constate
aussi chez d’autres artistes. Fernow déduit l’aporie imaginaire en majeure partie du travail de
copiste d’un certain Canova ou de Mengs,628 qui enthousiasment la foule avec leurs œuvres.
Mais qu’en était-il véritablement de la réception de Canova en Allemagne? Afin d’éclaircir
625
Ibid., p. 235 s: „Wenn Bildhauer malen so herscht gewöhnlich in ihren Arbeiten die Form vor, weil diese das
Element ihrer Kunst, und der Hauptgegenstand ihres Kunststrebens ist. Dies zeigen auffallend die Malereien
Michelangelo’s, in denen sein plastischer Sin dem malerischen vorwaltet. In Canova’s Gemälden findet man
gerade das Gegentheil, und er gleicht auch darin dem Bernini, der, eben so wie Canova, mehr Sin für den Reiz
der Materie, als für Bestimmtheit der Form für Karakter hatte, und gleichsam ein Rubens in der Plastik war.
Canova’s Gemälde sind so unbestimt und schwach von Zeichnung, so form- und karakterlos, so weich und zart,
dass man sie für Schöpfungen eines weiblichen Talents halten könnte. Ja, die Gemälde der Angelika, die den
Karakter ihres zartern Geschlechts so sichtbar an sich tragen, haben mehr Bestimtheit der Zeichnung, und zeigen
mehr Begrif von Form und Gestalt, als die seinigen.“ Cf. les propos tenus par Fernow au sujet de la réception de
Carstens, voir Leben des Künstlers Asmus Jakob Carstens, 1806, p. 186 s.: „Deine Bilder haben, - heisst es dort den Professionsneid unserer - abgerechnet, allgemein soviel Aufsehen erregt dass du beinahe, und besonders der
kraftvollen männlichen Figuren halber, bei unseren Schönen die angebetete Angelika verdrängt zu haben
scheinest.“
626
CARSTENS, p. 138 s.
627
Cf. p. 42.
628
Cf. Steffi Roettgen: Die Erfindung des Klassizismus - Anton Raphaël Mengs (1728-79), Éd. Hirner, Munich,
2003.
122
cette question, il faut encore prendre en considération le contexte historique. Ce fut
notamment à partir de 1786, après la création très saluée, et pas seulement par les cercles
d’art, du monument papal de l’église Saint Pierre à Rome et le funéraire de l’archiduchesse
Christine d’Autriche,629 que le renommé de Canova commençait à se répandre à toute vitesse
dans toute l’Europe. De même, une vaste propagande de ses deux amis, admirateurs et
défenseurs théoriques de son art, Quatremère de Quincy630 et Leopoldo Cicognara,631 a
considérablement contribué à désigner Canova comme un rénovateur du style antique. Un
article issu de la plume de Quincy consacré à l’art de Canova parut pour la première fois en
traduction allemande dans le Journal du Luxe et des Modes,632 dans lequel Canova est
présenté comme un artiste d’imitation classique et l’auteur met également en relief, tout au
sens d’un biographe authentique, son apport personnel quant au Making of an artiste:
[Canova] s’est formé par quelques études d’après la nature, où il ne cherchait rien d’autre que la simple vérité du
modèle. […] Il était encore indécis quant au chemin et au style qu’il devait choisir, et j’ai peut-être un peu
contribué à ce qu’il prît une décision rapide […] Jusqu’alors, aucun sculpteur n’avait osé concourir avec
l’Antiquité de cette manière, telle que je la concevais.633
Cette image d’un concurrent de l’Antiquité devait aussi conditionner la réception de Canova,
non seulement en Allemagne, mais partout en Europe. Les amis d’art weimariens voyaient
cela d’un œil plutôt sceptique.
Déjà dans Winckelmann et son siècle (aussi en 1805), on trouve quelques pages critiques
consacrées à l’art de Canova, qui, toutefois, adoptent un ton assez neutre. Il ne faut pas non
629
Au sujet des aspects historiographiques et hermeneutiques de l’art canovien cf. l’étude détaillée: „Bei den
Alten war die Wirklichkeit so gediegen und reich an Leben“, HT, ps. 241-255.
630
Fernow cite Quatremère également dans RS, I, 1806, p. 16 ss.
631
L’œuvre théorique majeure de Leopoldo Cicognara Storia della scultura dal suo risorgimento in Italia sino al
secolo di Napoleone per servire di continuazione alle opere die Winckelmann e di d’Agincourt [3 vol. Venise,
1813-1818] est conçue être la suite logique de L’histoire de l’art de Winckelmann.
632
Cf. Das ‘Journal des Luxus und der Moden’ : Kultur um 1800, vol. 8, Angela Borchert et Ralf Dressel (Éd.),
Éd. Winter, 2004.
633
[Quatremère de Quincy:] „Bemerkungen über den Bildhauer Canova in Rom, seinen Ruhm, seine Werke
überhaupt und besonders über seine neueste Statue, den Fechter“, in: Journal des Luxus und der Moden, n° 19,
sept. 1804, p. 421 s.: „[Canova hat] sich durch einige Studien nach der Natur gebildet, wo er nichts suchte, als
die einfache Wahrheit des Modells [...] Noch war er unentschlossen, welchen Weg und welchen Styl er wählen
sollte, und ich trug vielleicht etwas dazu bei, daβ er einen etwas raschen Entschluβ faβte [...] Noch hatte kein
Bildhauer sich unterstanden, in der Manier, wie ich mir sie dachte, mit der Antike zu wetteifern.“
123
plus oublier que Fernow connaissait déjà merveilleusement bien les œuvres de Canova depuis
ses années à Rome (1793-1803), ce qui lui vaut la réputation, surtout après la publication de
ses Portraits des mœurs et cultures de Rome (1802)634 dans le Mercure allemand, d’être un
bon connaisseur de la scène culturelle à Rome. Au cours des lectures sur l’art, Canova avait
aussi évoqué à plusieurs reprises l’art de Canova. De même, c’est Schelling lui-même qui lui
demande conseil, afin de lui expliquer la nature de la sculpture antique et moderne. 635 Après
la traduction d’une grande partie de la monographie carstensienne, un autre article paraît
encore dans le journal napolitain Giornale Enciclopedico,636 ce qui fait entrer le nom de
Fernow sur la scène culturelle italienne ce qui sollicite également des polémiques de la part de
ses admirateurs, qui vont se mobiliser à une contre-action. Ainsi Leopoldo Cicognara637 parle
par exemple de l’envie critique de Fernow - «L’invidia una sol volta tentasse di morderlo»,
qu’il croit déceler dans la dichotomie de Carstens-Canova:
L’envie de le mordre, ne serait-ce qu’une seule fois […] La censure qui vient de lui être infligée dans cette petite
œuvre [du Monsieur Fernow] se trouve clairement affectée par la jalousie du maître […] et suggérée par la
rivalité des arts.638
Cicognara réduit donc l’origine de la critique fernowienne aux sentiments passionnels et - de
ce fait - peu rationnels de Fernow, comme l’envie, la jalousie et la rivalité dans l’art, qui,
selon lui, ont été à l’origine de sa critique très indécente à propos de l’œuvre de Canova. On
pourrait y voir une ironie du sort, en considérant le fait qu’il avait formulé ce verdict face aux
634
[Carl Ludwig Fernow:] Sitten- und Kulturgemälde von Rom, (Gemaehlde der merkwürdigsten Hauptstädte
von Europa. Ein Taschenbuch auf das Jahr 1803), J. Perthes (Éd.), Gotha, 1802.
635
Friedrich Wilhelm Joseph Schelling: Briefe und Dokumente, Horst Fuhrmans (Éd.), vol. 2, Éd. Bouvier,
Bonn, 1973, p. 413: „[…] meiner empirischen Armut so weit auszuhelfen, als es nötig wäre selbst diese Lehre
vorzutragen.“
636
Voir: Giornale Enciclopedico di Napoli, (2), 1807, IV, ps. 65-82; V, ps. 245-261; VIII [fin]. Il s’agit d’une
traduction de la note en français: «Notice Napoli sur la Vie et les Ouvrages de Carstens du Magasin
Encyclopédique, ou Journal des Sciences, des Lettres et des Arts», A. G. Millin (Éd.), n° 4, Paris, (1808), ps. 25-66.
637
Voir la lettre de Saverio Scrofanis à Visconti, dans: «Al Signor Cavaliere Ennio Quirino Visconti lettere di
Saverio Scrofani sopra alcuni quadri della Galleria Giustiniani ed una statua del Cav. Antonio Canova esposta
nel Museo Napolione l’anno 1808», Éd. Dondey-Dupré, Paris, 1809, p. 48 s.
638
Cf. Leopoldo Cicognara: Storia della scultura dal suo risorgimento in Italia fino al secolo di Canova, per
servire di continuazione all’opere di Winckelmann e di d’Agincourt, Éd. Giachetti, Prato, 21823-24, p. 99, et, du
même auteur: Biografia di Antonio Canova, Éd. Missiaglia, Venise, 1823: «L’invidia una sol volta tentasse di
morderlo [...] Le censure, che in quest’opuscolo [del signor Fernow] gli vennero fatte, si vedevano palesemente
dettate da gelosia di mestiere [...] e suggerite dalla rivalità dell’arte.»
124
voix critiques vis-à-vis de Carstens. C’est alors que ce même reproche retombait sur luimême, même s’il ne faisait plus alors partie du monde des vivants. Fernow se serait
probablement très peu offusqué de telles polémiques, en l’approuvant «d’un sourire
satirique»,639 étant donné qu’il avait déjà formulé, dans la biographie de Canova, ces phrases
sibyllines:
Tout un chacun qui juge en public les œuvres d’artistes vivants et connus doit s’attendre à des interprétations
erronées et à des contradictions, même si son jugement était entièrement dithyrambique; et l’auteur s’y attend,
mais sans les craindre pour autant.640
Finalement, Fernow est tout à fait conscient du fait que l’on ne peut plus mettre en question la
gloire posthume de Canova, même s’il juge que le talent artistique de ce dernier se trouve
assez souvent surestimé par ses contemporains:
Le véritable mérite dans l’art de Canova est, même après la suppression de celui qui adhère à son estimation
exagérée, toujours assez grand pour lui assurer une place parmi les plus grands artistes de l’époque moderne.641
En résumé, Fernow met en évidence le fait que, même si Canova n’est, à ses yeux, pas un
artiste virtuose, il dispose cependant d’une image populaire très solide:
[qu’il] n’a pas d’ennemi, même pas parmi ceux qui envient son bonheur et sa gloire; et, si partagées que soient
les opinions sur son mérite artistique parmi les connaisseurs et les artistes, il n’y a pourtant qu’une seule voix qui
est entendue quant à sa valeur humaine.642
Si Fernow, dans cette phrase de conclusion solennelle, relègue finalement le jugement sur la
valeur artistique à la faculté de juger critique du sujet, il ouvre en même temps la perspective
639
J. G. Gruber décrit Fernow dans la nécrologie qui lui est consacré (Jenaische Allgemeine LiteraturZeitung/20. 1. 1809) comme un homme critique non-conforme: „Überall das Gute anerkennend, stets gerecht
gegen jedes Verdienst, war er doch zu verständig, als nicht auch ein strenger Prüfer zu sein, weswegen keine
Autorität der Welt ihm imponierte, und, wenn Sie sich aufdrängen wollte, ihm nur ein satirisches Lächeln,
bisweilen Seinen Spott erregte“, cité selon F. Fink: Carl Ludwig Fernow. Der Bibliothekar der Herzogin Anna
Amalia, Éd. Fink, Weimar, 1934, p. 38.
640
RS, I, p. XI: „Jeder der über die Werke eines lebenden und berühmten Künstlers öffentlich urtheilt, mus zum
Voraus, selbst wenn seine Beurtheilung auch durchgängig lobend ausfiele, auf Misdeutungen und Widersprüche
gefasst seyn; und der Verfasser ist darauf gefasst, aber er scheuet sie nicht.“
641
Ibid.: „Canova’s wirkliches Künstlerverdienst ist, auch nach Abzug dessen, was eine übertriebene Schätzung
ihm beilegt, immer noch gros genug, um ihm neben den grösten Künstlern der neueren Zeit seinen Plaz zu
sichern.“
642
Ibid., p. 242: „[...] selbst unter denen, die sein Glük und seinen Ruhm beneiden, keinen Feind hat; und dass,
so getheilt auch unter Kennern und Künstlern die Meinungen über sein Kunstverdient sind, doch über seinen
Werth als Mensch nur Eine Stimme gehört wird.“
125
à la dimension anthropologique, la vision de l’artiste en tant qu’homme, comme autre option
de la critique d’art, en ne précisant pas à quelle instance (transcendantale?) il soumet, en fin
de compte, le jugement sur la valeur humaine. Un problème, qui offre peut-être aussi la
possibilité d’une interrogation philosophique. De même, il paraît ironique de savoir, que
Fernow ne va pas vivre l’époque où Canova se fait un nom en tant que mécène pour la
promotion des jeunes artistes. A part cela, il s’occupe, en tant que curateur et diplomate, de la
reconduite des trésors d’art enlevés par Napoléon (dont la Bibliotheca Palatina),643 et réalise
de vrais exploits.644 Rien que cela devrait fournir la réponse, au moins en partie, à la question
de la valeur humaine. Or, la monographie de Fernow n’arrive pas à ce ‘bouclage’ idéel, de
sorte que son œuvre doit finalement passer pour inachevée, un fait qu’il avait toujours mis en
valeur par rapport à Carstens, et qui, curieusement, s’applique aussi à lui. Mais finalement
l’allusion à l’activité bénévole de Canova n’aurait probablement rien changé à l’intention de
Fernow en tant qu’auteur. Comme nous l’avons vu, il lui importe surtout de valoriser l’art de
Carstens vis-à-vis de Canova, en l’insérant également dans la lignée de ses biographies
d’artiste et en l’élevant au même rang qu’Arioste et ce dernier. Cette mission littéraire
esquisse déjà en filigrane l’émancipation de Fernow en tant que critique d’art autonome et
défenseur d’une esthétique idéale, dont nous allons présenter les traits fondamenteaux au
cours de la troisième partie du présent travail.
643
Erik Jayme: Antonio Canova (1757-1822) als Künstler und Diplomat: zur Rückkehr von Teilen der
Bibliotheca Palatina nach Heidelberg in den Jahren 1815 und 1816, (Heidelberger Bibliotheksschriften, vol.
50), Éd. Universitätsbibliothek, Heidelberg, 1994.
644
Idem: Antonio Canova - die politische Dimension der Kunst, Éd. Frankfurter Stiftung für Deutsch-Italienische
Studien, Francfort/M., 2000.
126
L’idéal de l’autonomie de l’art:
L’émancipation de Fernow en tant que théoricien de l’art et la légitimation de l’esthétique
autonome idéale
127
III. 1. Du beau dans l’art: «…la fin sublime de l’art»
La question du beau dans l’art occupe sans doute une place primordiale dans les idées
esthétiques de Fernow. Comme déjà dans la biographie de Carstens, il tente, dans la préface
de son traité «Du beau dans l’art», de définir de plus près la nature du beau dans l’art:
Le beau n’est, d’après sa nature, qu’une entité; mais en réalité il est indéfiniment divers et différent. Une
explication complète et satisfaisante du beau n’est possible que d’après la nature ou l’idée, mais pas à partir des
apparitions de cette dernière.645
De par cette définition du beau, Fernow renoue non seulement avec la tradition d’Idéa,646
mais se rapproche également de la théorie schillérienne, en considérant la beauté comme belle
apparence. De même, on peut y déceler un autre postulat de sa théorie de l’art: légitimer la
conceptualité du beau, d’après «la nature ou l’idée» et, ce faisant, tenter de réinventer la
philosophie transcendantale kantienne, qui est fondée subjectivement, paradoxalement, de
manière objective. Cela apparaît comme une quadrature du cercle, en partant du fait que
d’après Kant, le jugement esthétique est par principe un jugement de goût et qui, par
conséquent, se rapporte au sujet, et pour cette raison, ne peut être que subjectif. Pour résoudre
ce conflit, il se réfère au principe schillérien de la beauté comme principe idéal qui lui fournit
la réponse adéquate, afin de réaliser le postulat de l’objectivisation esthétique. Fernow
s’oriente donc de toute évidence au système schillérien, tout en critiquant la théorie de la
Gestalt, ce qui ne l’empêche d’ailleurs pas d’emprunter quelques parties de l’esthétique
idéale. On en distingue notamment deux principes: c’est l’idée de génie d’un côté, et le
principe de la mission éthique de l’art, de l’autre.
645
646
Ibid., voir préface du traité intitulé „Über das Kunstschöne“, ps. 291-450.
Karl-Heinz Simon und Martin Pfänder: Polyklet und Phidias: von Helden aus Marmor und Bronze, op. cit.
128
Ainsi, Schiller définit le talent de l’art comme union entre la raison et la sensualité, comme la
pulsion à la production esthétique comme conséquence du jeu et de la forme,647 ce que
Fernow appelle en termes analogues la pulsion à la représentation648 (Kunststreben) propre à
l’espèce et l’ambition à l’art, qui, quant à elle, est individuelle. En ce qui concerne la mission
éthique de l’art, il conteste la théorie schillérienne dans la mesure où il ne croît pas à l’art
comme moyen d’éducation du genre humain, car, d’après sa conviction, cette dernière ne peut
servir qu’à l’épanouissement artistique personnel de l’individu.649 De même, il supprime la
distinction anthropologique650 schillérienne entre la beauté du mouvement et celle de la
Gestalt.651 Suivant son raisonnement, la beauté est en règle générale assimilable à l’idée de
cette dernière. La conséquence logique de cette prise de distance avec le système schillérien et
kantien (beauté=Gestalt) est donc la différenciation entre la forme et le contenu, ce que
Fernow appelle également la finalité intérieure et extérieure (l’idée de raison ou l’idée
normale chez Kant), qui, à l’unisson, constituent l’idéal de la culture humaine, dont il déduit,
en l’occurrence, l’idéal de la beauté humaine d’après le principe beauté=Gestalt:
647
Pierre Hartmann interprète dans son article intitulé «La question esthético-politique chez Rousseau et
Schiller», (in: Revue internationale d’études germaniques, n° 22, 2004, ps. 119-132) la théorie du jeu
(‘Spieltheorie’) de Schiller comme étant un substitut d’une esthétique d’identification aliénante („entfremdenden
Identifikation“) qui, de par l’autonomie retrouvée du sujet prépare à l’émancipation de celui-ci au niveau
politique. Par ailleurs, Pierre Hartmann voit dans cette équation aristotélicienne entre l’art et la politique
l’origine des pires déraillements („schlimmsten Entgleisungen“) de l’histoire. Voir aussi l’étude de Stefan
Matuschek: „Coincidentia oppositorum und transzendentale Muße. Spiel als ästhetische Autonomie bei Kant und
Schiller, in: Literarische Spieltheorie, Éd. Winter, Heidelberg, 1998, ps. 183-214 et: Schiller im Gespräch der
Wissenschaften, op. cit.
648
Cf. à ce sujet aussi S. M. Schneider, VRW, p. 58.
649
Cf. HE, p. 125.
650
Cf. Gilles Darras: «La satire du génie dans l’œuvre du jeune Schiller», ainsi que Marion Heinz: «La beauté
comme condition de l’humanité. Esthétique et anthropologie dans les ‘Lettres sur l’éducation esthétique’», in:
Revue internationale d’études germaniques, n° 22, 2004, ps. 7-24 et ps 133-144. Tandis que Gilles Darras se
concentre principalement, dans son étude, sur les différents aspects de la satire à l’égard de l’œuvre antérieure
vus sous l’aspect d’une «anthropologie littéraire», Marion Heinz démontre, à l’exemple de l’esthétique
schillérienne, que celle-ci est principalement fondée sur des aspects de la métaphysique critique. De par cette
«définition anthropologique de la Gestalt» („anthropologische[n] Bestimmung der Schönheit“) la beauté,
conçue sous la forme d’une Gestalt vivante („lebenden Gestalt“), perd donc son fondement métaphysique, en
renvoyant à un ordre du monde divin („metaphysische Fundierung einer göttlichen Weltordnung“) et, de même,
la théorie du bien suprême, vue au sens d’une condition réductible à la critique de la raison et de la sensualité,
perd son fondement au niveau pratique.
651
Ibid. Schiller comprend la beauté de la Gestalt comme la perfection de l’apparence devenue perceptible
(„wahrnehmbar gewordene Perfektion“).
129
[…] l’idéal de la finalité extérieure de la Gestalt, et l’idéal de la finalité intérieure des talents intellectuels, qui,
ainsi unis, constituent l’idéal de la culture humaine, […] et d’où résulte, de l’union de ces deux constituants,
l’idéal de la beauté humaine.652
A part cela, Fernow ne se contente donc pas de la «forme idéale vide.»653 Ainsi, il exige de la
belle forme aussi un contenu, ainsi qu’une certaine vivacité expressive de la Gestalt
«caractère, expression, vie et action.»654 De même, Fernow envisage la beauté idéale comme
étant un archétype qui est à la base de la conscience humaine sous la forme de l’abstraction
de la Gestalt:
On peut comparer la beauté idéale au liquide le plus pur de tous les liquides, l’élément clair et purifié d’une
source, qui, incolore, insipide et sans odeur, réjouit par sa seule pureté simple et qui est, en même temps,
l’élément de base de tous les autres liquides, qui, par l’ajout d’autres éléments, prennent les couleurs, les goûts et
les odeurs les plus divers. Ainsi, la beauté pure et abstraite de la Gestalt, qui, au même titre, est le fondement de
l’expression idéale, car elle imite chaque caractère, chaque ambiance, chaque couleur de la sensation, et qui ne
s’oppose qu’à sa nature (comme par exemple l’huile à l’eau), en se modifiant d’après celle-ci de façon
multiple.655
En l’occurrence, la beauté de la Gestalt résulte par la suite de l’imagination créatrice de
l’artiste, qui lui apparaît quasiment comme une image originale:
le schéma de la beauté, qui inspire l’imagination de l’artiste, qui correspond à la fois au schéma de la Gestalt et
qui s’adapte à chaque caractère, chaque expression.656
Fernow distingue également cette «beauté pure et essentielle» de la «beauté supérieure, qui
n’est plus tout à fait pure»,657 qu’il soumet à l’idée de grandeur. Cette réflexion l’amène à la
question de la délimitation du beau idéal, de l’idéal de beauté et de la beauté idéale, en
aboutissant à la conclusion suivante:
652
Voir à ce sujet également RS, III, ps. 115-210: „Über Rafaels Teppiche“, ici préface.
RS, I, p. 354: „leere Idealform.“
654
Ibid., s.: „Karakter, Ausdruk, Leben, Handlung.“
655
Ibid.
656
Ibid., p. 355: „[...] das der Einbildungskraft des Künstlers vorschwebende, zugleich mit dem Schema der
Gestalt jedem Karakter, jedem Ausdruk sich anschmiegende, Schema der Schönheit.“ Afin d’étayer son
argumentation, Fernow se réfère aux œuvres d’art suivantes: le Polyklet de Doryphore, l’Antinous capitolien et
la Vénus de Médicis qui, selon lui, illustrent à titre exemplaire ce principe de la beauté artistique en tant qu’
archétypes idéels.
657
Ibid. s.
653
130
On appelle enfin beauté idéale toute beauté qui, au même titre que la Gestalt, est érigée comme idéal au-dessus
de la nature réelle; car si la Gestalt est idéale, la beauté doit nécessairement l’être dans la même mesure. De
même, le sens est différent si l’on parle de la belle représentation de l’idéal, ou de la représentation du beau idéal
de beauté.658
La notion du beau dans l’art est conçue comme doxologie d’idéalité, de beauté et de
caractère qui est soumise à une finalité supérieure de l’art:
Idéalité, beauté et caractère font à l’unisson toute l’utilité de l’art, telle que nous la voyons atteinte tantôt plus
achevée, tantôt plus inachevée dans les œuvres des Anciens. Nous retrouvons ces trois éléments également dans
les trois principes de l’art de Winckelmann, de Lessing et de Hirt.659
Ce faisant, Fernow arrive en effet à unir, comme le constate par ailleurs aussi Arthur
Schopenhauer,660 les différentes positions dans la discussion de Laokoon, mais sans en ajouter
une nouvelle. Ainsi, il oriente, à la manière de Winckelmann, la beauté artistique vers la noble
simplicité et la grandeur calme,661 en fixant, à l’instar de Lessing, la finalité de l’art dans la
précision du moment représenté, et comme Hirt, qui, suivant sa théorie, avise toujours
l’impression d’ensemble de l’œuvre d’art, authentique et marquée par la nature, quoique non
pas imitée de façon esclavagiste.662 A part cela, ses explications concernant la hiérarchie des
arts, la recherche d’un moment663 en peinture, en sculpture et dans l’art dramatique, 664
également à la lumière des théories de Barthes665 et Adorno666 concernant la ditropique et le
658
Ibid., p. 358: „Eine idealische Schönheit endlich heist jede Schönheit, die mit der Gestalt zugleich über die
wirkliche Natur zum Ideale erhoben ist; denn wenn die Gestalt ideal ist, so mus es nothwendig auch die
Schönheit in gleichem Masse seyn. Eben so ist auch der Sin verschieden, wenn man von der schönen Darstellung
des Ideals, oder von der Darstellung eines schönen Ideals oder von der Darstellung des Ideals der Schönheit
spricht.“
659
Ibid., p. 430.
660
Selon Arthur Schopenhauer Fernow aurait discuté et évalué toutes ces trois opinions, sans en ajouter aucune
nouvelle, mais il les a mis en relation et unifiés („[…] alle jene drei Meinungen erörtert und abgewogen,selbst
jedoch keine neue hinzugethan, sondern jene drei vermittelt und vereinigt“), cité d’après: Die Welt als Wille und
Vorstellung, Paul Deussen (Éd.), Éd. Piper, Munich, 1911, § 46, p. 268.
661
Cf. à ce sujet le chapitre consacré à Winckelmann du présent travail.
662
Selon Fernow (RS, II, p. 42) l’artiste ne doit ni copier, ni inventer, mais s’approprier l’esprit et le style de
l’idéal („[sich den] Geist und Stil des Ideals zu eigen machen“).
663
Peter-André Alt e. a. (Éd.): Prägnanter Moment. Studien zur deutschen Literatur der Aufklärung und Klassik,
Éd. Königshausen & Neumann, Wurzbourg, 2002.
664
RS, III, p. 11.
665
Roland Barthes: «Diderot, Brecht, Eisenstein», in: Essais critiques, sous le chapitre: «représentation»,
in: Œuvres complètes, Eric Maray (Éd.), Éd. Seuil, Paris, 2002.
131
caractère de l’image, sont d’une acuité comparable. A l’instar de Lessing, Fernow distingue
par ailleurs différents moments de la représentation artistique qui, selon le genre (la poésie, la
sculpture, la peinture, l’art dramatique et musical etc.), dépendent des différentes formes de
la contemplation (l’espace et le temps). Ainsi privilégie-t-il principalement la poésie avant les
autres arts, étant donné que celle-ci permet une représentation globale de plusieurs moments,
à la fois par ordre temporel et spatial. Ce faisant, Fernow entreprend une séparation des arts
dans la mesure où il distingue l’art plastique et la «sculpture ronde»,667 tout en considérant la
peinture comme «une imitation trompeuse»668 et l’art dramatique d’une action comme «un
beau tout»:669
[…] [étant donné que] la peinture, dans sa représentation la plus parfaite de la forme, reste toujours derrière les
arts plastiques, elle doit remplacer cette imperfection par d’autres atouts, de par lesquels elle est supérieure aux
arts plastiques.670
Suivant cette logique, il évoque une citation de Michel-Ange:
„[…] que la peinture [sera] toujours d’autant plus excellente qu’elle se rapproche de la sculpture et, en revanche,
la sculpture d’autant plus mauvaise qu’elle se rapproche de la peinture.671
En l’occurrence, l’art dramatique exerce, en tant que spectacle unissant tous les genres d’art,
une plus grande attirance sur le spectateur, étant donné qu’il est «supérieur en force
dramatique.»672 Or, Fernow se prononce en même temps en faveur d’une stricte séparation
entre les arts, étant donné que «chacun de ces genres d’art » maintient « son propre rang.»673
En ce qui concerne la séparation entre la peinture et la sculpture, Fernow défend par la suite le
point de vue que cette dernière devrait «s’élever au-dessus de son utilité indiquée.» De même,
666
Theodor W. Adorno: Ästhetische Theorie, Gretel Adorno et Rolf Tiedemann (Éd.), (Gesammelte Schriften, n°
7), Éd. Suhrkamp, Francfort/M., 1984.
667
RS, II, p. 26: „Über die Grenzen der dramatischen Malerei.“
668
Ibid., p. 18.
669
Ibid., p. 26.
670
Ibid., p. 37: […] [da] die Malerei in der volkommensten Darstellung der Form immer hinter der Plastik
zurückbleibt, so mus sie diese Unzulänglichkeit durch ihre anderen Vorzüge, durch die sie der Plastik überlegen
ist, ersezen.“
671
Ibid., s.: „[…] die Malerei immer desto vortreflicher sein [werde], je mehr sie sich der Plastik näheret und im
Gegentheil, die Plastik desto schlechter, je mehr sie sich der Malerei nähere.“
672
Ibid., p. 102
673
Ibid., p. 22.
132
il se trouve en accord avec Michel-Ange quand il juge que «[…] la sculpture qui est dans la
Gestalt, la forme, et le dessin, le caractère la base de la peinture»,674 ce qui place la sculpture
indubitablement dans la hiérarchie des arts, au-dessus de la peinture, étant donné que celle-ci
est tridimensionnelle, et, pour cette raison, capable de rendre le moment représenté avec
d’autant plus d’intensité, ce que, en l’occurrence, la peinture doit compenser avec le coloris.
En contrepartie, il voit dans l’art dramatique la réalisation d’une forme universelle de l’art, car
la suite rapide des moments temporaux et spatiaux contient non seulement un certain degré de
divertissement pour le spectateur, mais unit par la suite de façon harmonieuse plusieurs
formes d’expression artistique (la mimique-gestuelle, la musique etc.) De même, il partage
l’avis de Lessing en disant que «[…] le seul destin d’un art peut être l’achèvement le plus
parfait, ce dont il est capable sans l’aide d’un autre.»675 Contrairement à Lessing, Fernow
supprime des moments négatifs d’émotion de la part du spectateur, comme par exemple la
peur ou la compassion, en intégrant des états d’âme positifs comme la sympathie ou
l’émotion,676 qui selon lui varient d’après les différentes formes du caractère,677 et, ce faisant,
«procurent le plaisir d’une existence plus parfaite.»678 De la même façon, il différencie deux
sortes d’intérêt: «l’intérêt du beau» d’un côté et «l’intérêt du contenu»,679 de l’autre. Fernow
en conclut par la suite l’auto-référentialité de l’œuvre d’art, qui doit exclusivement «s’
expliquer par soi-même»,680 selon le cercle d’action indiqué (plus restreint) et celui permis
(plus élargi),681 qu’il déduit, par contre, du principe de Lessing: «l’art ne doit pas tout ce qu’il
peut.»682 En l’occurrence, il inverse la phrase en disant que «chaque art doit plus qu’il ne
674
Ibid., p. 40.
RS, III, p. 14: „[…] dass [nur das] die Bestimmung einer Kunst sein [kann], wozu sie allein geschikt ist, und
was sie ohne Beihülfe einer anderen am volkommensten zu leisten vermag.“
676
Ibid., p. 19.
677
RS, III, p. 68
678
RS, III, p. 36: „[…] den Genus [sic] eines volkomneren Daseins, bewirken.“
679
Ibid.
680
Ibid., p. 34. Fernow formule cette règle de base par rapport au choix et le traitement du sujet: „[…] ein
Kunstwerk sol durch sich selbst verständlich sein; es sol seinen Inhalt durch sich selbst erklären.“
681
Ibid.
682
Ibid., s.: „Jede Kunst kann und darf mehr als sie sol[l].“
675
133
peut.» Ainsi, il voit dans Laokoon un rapprochement particulièrement frappant entre la
peinture et la sculpture, étant donné que «l’individu à l’expression idéale» et « le moment
intéressant»683 sont unis dans un tout organique de manière esthétisante. En ce qui concerne le
beau dans l’art, il met en évidence que le caractère, sur lequel nous allons encore revenir au
cours de notre travail, suit ses propres lois, et, pour cette raison, doit être délimité du
caractère:
Le beau dans l’art est donc essentiellement différent du caractéristique et de la vérité dans l’art; il ne réside ni
uniquement dans celui-ci, ni uniquement dans celui-là; mais dans l’union entre la vérité idéale et la beauté du
contenu avec la belle forme de la représentation consiste toute l’utilité de l’art.684
En d’autres termes: le beau dans l’art, le caractère et la vérité artistique ne sont pas à voir de
façon isolée, mais légitiment tous ensemble, en union avec la vérité idéale, la beauté du
contenu et la belle forme de la représentation, la finalité totale de l’art, qui se résume par
l’idéal esthétique. D’une manière générale, il érige l’esthétisation de la forme et du contenu
comme le postulat suprême de la beauté artistique. Or, Fernow ne se limite pas à cela. Ce
n’est que la symbiose parfaite de la vérité et du caractère, en accord avec l’idéalité de la
forme et la beauté de la représentation qui, selon ses propos, correspond seule aux exigences
de la beauté, subjective comme objective, dans l’art:
La vérité et le caractéristique ne font alors ni la finalité exclusive et complète, ni la finalité supérieure de l’art; il
faut ajouter à cela l’idéalité de la forme et la beauté de la représentation […] Oui, la beauté subjective ou
extérieure n’est même pas concevable sans cette sous-classification […] c’est ce que demande la notion d’objet,
qui maintient la forme, à travers laquelle le tout apparaît comme une belle image.685
683
RS, III, p. 60.
Ibid., p. 430: „Das Kunstschöne ist also von dem Karakteristischen oder der Kunstwahrheit wesentlich
verschieden; und weder in diesem allein, noch in jenem allein, sondern in der Vereinigung der idealischen
Wahrheit und Schönheit des Inhalts mit der schönen Form der Darstellung besteht der ganze Zwek der Kunst.“
685
Ibid., p. 406: „Wahrheit und Charakteristik sind also weder der ganze, volständige, noch auch der höchste
Zwek der Kunst; zu ihr mus noch die Idealität der Form und die Schönheit der Darstellung hinzukommen [...]
Ja, die subjektive, oder äussere Kunstschönheit läst sich ohne diese Unterordnung überhaupt nicht einmal
denken [...] welche der Begrif des Gegenstandes fo[r]dert, die Form erhält, durch welche das Ganze als ein
schönes Bild erscheint.“
684
134
En ce qui concerne la beauté, Fernow interroge de façon critique l’idéal winckelmannien de la
«simplicité noble, calme grandeur»: D’après Winckelmann, la simplicité noble et la calme grandeur
étaient les principes de base de l’art antique […].686
Or, il modifie plus loin cette constatation en ajoutant que:
[ces deux principes] qui caractérisent les œuvres de l’art antique et les distinguent de celles de l’art nouveau.687
Bien qu’il désigne Winckelmann comme esprit classique, il souligne en même temps que son
principe lui paraît aussi tout à fait insuffisant et ne peut être considéré que comme simple
essai de ramener l’essence de l’art antique à une seule formule:
On ferait tort à Winckelmann si l’on prenait son principe pour plus que le premier essai de s’orienter dans le
terrain de l’art antique […] et de réduire l’impression principale de celle-ci à une seule nation.688
Ainsi, il juge le postulat winckelmannien comme «insuffisant à tous les égards»689 mais,
pourtant, il remarque que ce dernier a seulement, dans son premier traité, défini cela comme
principe, dont il déduit par ailleurs le postulat d’une réédition de l’œuvre winckelmannien:
Cela éclaire suffisamment, que W. [Winckelmann] l’a seulement, dans son écrit le plus ancien «Sur l’imitation
des œuvres grecques», énuméré comme le signe général par excellence des œuvres grecques en l’appliquant à
l’expression du Laokoon. Et Lessing prit cela comme point de départ. Dans ses écrits tardifs, W. a clairement
expliqué qu’il reconnaissait la beauté, à savoir celle de l’idéal, comme le véritable principe de l’art antique.690
Comme preuve, il se réfère à un commentaire tardif de Winckelmann en langue italienne,
qu’il reconnaît comme «une confession tardive»:
686
Ibid.
Ibid., p. 427 s. Nach Winckelmann war edle Einfalt und stille Gröβe das Grundgesetz der alten Kunst [...]
welches ihm die Werke der alten der Kunst durchgängig zu charakterisieren und von denen der neueren Kunst
zu unterscheiden schien.“
688
RS, I, p. 438: „Man würde Winkelmann Unrecht thun, wenn man sein Prinzip für mehr halten wollte, als den
ersten Versuch sich in dem Gebiete der alten Kunst [...] zu orientieren und den Haupteindruck derselben auf
einen Begriff zurückzuführen.“
689
Ibid., p. 441: „[…] in jeder Hinsicht unzulänglich.“ Dans ce contexte, les principes de Lessing et de Hirt lui
apparaissent insuffisant dans le sens où ils mettent à la même échelle la vérité et la beauté avec l’expression et,
par conséquent, ne distinguent par la suite pas entre la vérité réelle (nature) et la vérité beauté art.
690
Ibid., p. 438: „Dies erhellet hinlänglich daraus, dass W. [Winckelmann] blos in seiner frühesten Schrift: Über
die Nachahmung der grichischen Werke als das allgemeine vorzügliche Kennzeichen der griechischen
Meisterwerke aufgeführt, und dasselbe auf den Ausdruk des Laokoon anwendet. Und von jener Stelle ging
Lessing in seinem Laokoon aus. In seinen spätern Schriften hat W. deutlich genug erklärt, dass er Schönheit und
zwar die idealische für das eigentliche Prinzip der alten Kunst anerkannte.“
687
135
Le raisonnement de l’art du dessin des Grecs est la chose même qui traite de la beauté dans toutes ses
dimensions, car elle était la base et la fin de leur art. L’idée à l’origine qui transparaît dans leurs œuvres était
l’essence du beau, en soumettant tant l’habileté technique qu’ils ont voulu représenter dans celles-ci, tout ce qui
se reflète indistinctement dans la nature et dans les expressions, comme pour représenter telle ou telle apparence,
qu’ont due avoir les figures etc.691
Et il parvient à la conclusion qu’ici «la beauté est [nommée] comme étant la fin et le centre de
l’art»692 - un principe esthétique que, comme nous avons pu le constater, Fernow va redéfinir
à partir de Kant, Schiller et Winckelmann et élargir au caractère, ce qui sera le sujet du
prochain chapitre.
691
Ibid., voir des extraits du Trattato preliminare dei monumenti antichi de Winckelmann, cité selon Fernow: «Il
ragionar del’ arte del disegno de’ Greci è la cosa medesima che trattar della bellezza in tutte le sue parti, pochè
questa della loro arte di disegnare si fu la base ed il fine. Ce lo dimostrano le opere loro, in far le quali ben
vedesi, che all’ idea ch’è si erano fatti del bello, soggettarono tanto la scienza ch’eglino avrebbono avuto di
figurare nelle stesse opere tutto cio, che indistintamente si mira nella natura, quanto l’espressioni, che per
rappresentarne questo e quel fatto, avrebbono dovuto aver le figure etc.»
692
RS, I, p. 439: „[…] ausdrücklich die Schönheit als Endzwek und […] Mittelpunkt der Kunst.“692
136
III. 2. Du caractéristique: „…ou la vérité de la représentation“
Selon la conception fernowienne, la perception de la beauté en art est étroitement liée à la
notion de représentation caractéristique, qui, au fond, constitue la clef de voûte théorique de
ses écrits esthétiques. En règle générale, il subdivise le caractère (=expression de la Gestalt)
en trois catégories, comme suit:
1.
Le caractère du genre (Gattungscharakter),
2.
le caractère de l’espèce (Artcharakter),
3.
le caractère individuel (Individueller Charakter).
Alors que le caractère du genre unit tous les individus de tous les genres, le caractère de
l’espèce regroupe seulement les individus du même signe caractéristique, le caractère
individuel étant propre à chaque individu, lequel rassemble dans son être cette trichotomie
caractéristique: «chaque individu de la nature porte ce triple caractère en soi.»693
A part cela, le caractère du genre se subdivisé en deux sous-catégories:
1. Le caractère général (Allgemeinen Charakter).
2. Le caractère particulier (Besonderen Charakter).
Fernow constate à ce sujet:
Chaque vraie représentation individualise nécessairement le général […] le secret de l’artistique consiste en ce
que le général ne soit pas supprimé par l’idéal.694
A partir cette distinction entre le caractère général et le caractère particulier (=beauté) Fernow
fonde par la suite le principe individuel de l’art, car, en lui, seul l’individu, en non pas le
genre humain dans sa totalité, peut apparaître. Ainsi fusionne-t-il dans l’individu, comme être
doté de talent artistique (schöpferisch begabtes Wesen), l’expression générale du caractère
(=genre humain) avec l’expression particulière (=beauté): «La beauté est aussi l’expression
693
Ibid. p. 351: „Jedes Individuum der Natur trägt diesen dreifachen Karakter an sich.“
Ibid. p. 355: „Jede wirkliche Darstellung individualisiert notwendig das Allgemeine […] das Geheimnis des
Künstlerischen besteht gerade darin, dass im Individuellen das Allgemeine nicht aufgehoben ist.“
694
137
particulière de celui-ci [le caractère] en art.»695 Au delà, Fernow différencie la beauté du
caractère: car, selon lui, tout ce qui est beau n’est pas nécessairement caractéristique et vice
versa. De même, tout ce qui est caractéristique ne correspond pas forcément au principe de la
beauté esthétique. Fernow expose son raisonnement de façon suivante:
Nous allons nous convaincre du fait qu’on a l’impression, en ce qui concerne les représentations idéales de l’art
plastique, que l’expression caractéristique et l’expression du mouvement constituent le fondement et la base
même de la beauté, mais que cela n’est qu’une pure illusion, qui disparaît lors d’une étude détaillée […]. Cette
illusion est produite par le fait que le général ne peut paraître qu’à travers le particulier, le genre que par
l’individu et l’idéal comme la beauté de l’érudition humaine dans l’art, à condition d’une modification d’un
caractère qui les définit.696
Ainsi, Fernow légitime la modification du caractère au sens d’une idéalisation ou d’une
esthétisation du sujet en se référant aux caractères de l’espèce, qui, selon lui, «[…] définissent
la forme du genre en la modifiant d’une manière signifiante.»697 Au delà, le caractère de
l’espèce tel qu’il le conçoit englobe plusieurs formes qualitatives de développement du corps
humain, allant du naïf au sublime, ainsi que des talents physiques et moraux de l’être humain
(nature, tempérament, éducation, formation).698 Comme, suivant la conviction fernowienne,
la nature dans sa «diversité infinie de ses individus»,699 comporte ces modèles souvent sous
une forme «inachevée et avec défauts»,700 la définition de la beauté, ne peut, par conséquent,
découler que du caractère global.701 Fernow mentionne par ailleurs également un passage de
695
Ibid., p. 359: „Schönheit ist, auch der besondere Ausdruk derselben in der Kunst.“
Ibid., s.: „Wir werden uns davon überzeugen, dass es in den idealischen Darstellungen der bildenden Kunst
zwar scheint, als ob der Karakterausdruk und der Bewegungsausdruk die Schönheit begründe und trage; dass
aber dieses blosse Täuschung ist, die bei einer gründlichen Einsicht verschwindet; [...].Jene Täuschung entsteht
daraus, dass, wie bereits bemerkt worden, das Allgemeine nur an dem Besonderen, die Gattung nur an dem
Individuum, und das Ideal sowohl als die Schönheit der menschlichen Bildung in der Kunst nur unter der
Modifikazion eines sie bestimmenden Karakters erscheinen können.“
697
Ibid.: „[...] weil sie die Gattungsform bestimmen und auf eine bedeutende Weise modifizieren.“
698
Ibid., p. 362.
699
Ibid.: „unendlichen Mannigfaltigkeit ihrer Individuen.“
700
Ibid.: „unvolkommen und mangelhaft“
701
Ibid., p. 365: „einen bestimten fisiognomischen Karakter, der durch das fisiognomische Gefühl im
Totaleindruck der Gestalt wahrgenommen und verstanden wird.“
696
138
la conception du caractère selon Jean-Paul Richter702 dans l’école préparatoire de
l’esthétique (Vorschule der Ästhetik) comme étant une apparition finie issue de l’infinité des
mondes. Or, vu dans l’ensemble, il reste plutôt fidèle au système de déchiffrage optique de Le
Brun,703 en orientant sa conception du caractère artistique d’après des critères pour la plupart
physiognomiques, pathognomiques et physiologiques,704 c’est-à-dire fondamentalement selon
l’aspect extérieur, mais il ne l’interprète en aucun cas au sens phrénologique que lui confère
un certain Lavater,705 comme en témoigne une lettre à Reinhold.706 Fernow associe la notion
de caractère plutôt en adéquation avec sa définition de la beauté idéale,707 qu’il assimile,
comme degré d’expression spécifique à l’espèce, au principe de la force d’imagination
artistique708 et généralement identique à la digression de la forme normale (=caractère du
702
RS, III, p. 68: „Wahr und treffend ist, was Jean Paul Richter in seiner Vorschule der Ästhetik, p. 346 über
diesen Gegenstand sagt. ‘In jedem Menschen - heist es dort - wohnen alle Formen der Menschheit, alle ihre
Charaktere; und der eigene ist nur die unbegreifliche Schöpfungswahl Einer Welt unter der Unendlichkeit von
Welten, der Uebergang der unendlichen Freiheit in die endliche Erscheinung. Wäre das nicht, könten wir keinen
andern Karakter verstehen, oder gar errathen, als unsern wiederholen.“
703
Charles Le Brun présente pour la première fois ses idées esthétiques, orientées vers l’expression des états
d’âme humains, dans le cadre d’un exposé sur Philippe de Champaigne: Sur l’expression générale et
particulière [1668], en empruntant de toute évidence quelques parties du Traité sur les passions [1649], parues
quelques années plus tôt, de René Descartes. Cf. Henri Souchon: «Descartes et Le Brun. Étude comparée de la
notion cartésienne des ‘signes extérieurs’ et de la théorie de l’Expression de Charles Le Brun», in: Les Études
philosophiques, (1980), ps. 427- 458.
704
Cf. RS, III, p. 36: „Stellt er [der Plastiker] seine Gestalt oder Gruppe noch überdies im bestimmten Momente
einer Situazion oder Handlung dar; gibt er ihr, nebst dem fisiognomischen Karakter einen bestimmten
pathognomischen und mimischen Ausdruk, welcher die Bedeutsamkeit und das Leben der Gestalten noch
erhöhet.“ Il énumère comme exemples l’Apollino, Adonis, Antinous, Niobé, Laocoon, l’éscrimeur mourant, ainsi
que le boxeur et l’aiguiseur. En plus du caractère physionomique, Fernow distingue aussi l’expression
pathognomique et mimique de la Gestalt, qu’il n’associe non seulement à l’apparence physique de l’homme,
mais également sur tous les objets de la représentation artistique de la nature organique et anorganique. Celui-ce
ne correspond pas au principe de la beauté objective dans l’art et ne peut plaire que par le mode de représentation
choisi.
705
Johann Caspar Lavater: Physiognomische Fragmente [1775-1778]. A la différence de Le Brun, qui fonde les
représentations de la passion principalement sur la théorie des affects, Lavater va mettre l’accent en majeure
partie sur le saisi sciéniste de la physiognomie humaine. Cf. en édition allemande de Charlotte Steinbrucker:
„Lavaters Physiognomische Fragente im Verhältnis zur bildenden Kunst“, Éd. Wilhelm Bomgräber, Berlin,
1915, ainsi qu‘Eleanora Louis: Die Beredsamkeit des Leibes. Zur Körpersprache in der Kunst, Ilsebill Barta
Fliedl et Christoph Geissmar (Éd.), Éd. Residenz (Veröffentlichungen der Albertina, vol. 31), Salzbourg/Vienne,
1992.
706
Voir la lettre de Fernow adressée à Reinhold, redigée à Berne, le 9 novembre 1793, cité d’après Johanna
Schopenhauer (1810), p. 79: „daβ Lavater von eigentlicher Kunst […] wirklich zu wenig weiβ um Andere zu
bilden, so viele und scharfsinnige Bemerkungen er auch als Physiognom und Psycholog über Menschen gemacht
hat.“
707
Cf. RS, p. 447: „[Kunstschönheit als] schöne Darstellung des Ideals unter karakteristischen Bedingungen.“
708
Ibid., p. 270: „Jenen muss seine Einbildungskraft erfinden.“
139
genre), ceci étant dit que le caractéristique ne représente nullement toujours la «source du
beau dans l’art»:709
Que le caractéristique, en étant loin d’être […] la beauté en art même, repousse, de par son importance, plutôt la
beauté.710
Il s’ensuit que Fernow mesure l’idéal de l’art à l’équilibre entre la forme et le contenu. A part
cela, il voit la catégorie la plus haute placée au-dessus du caractère du genre ou la perfection
de la Gestalt dans le mélange réussi entre la grandeur et le sublime:
Au contraire, il y a des digressions du bel équilibre, qui élèvent la perfection et la beauté au-dessus du genre en
l’élevant, par la grandeur et le sublime, vers le divin.711
D’après Fernow, cette apothéose de l’art reste exclusivement réservée aux Anciens, qui, de
par l’imitation dite idéale, sont vraiment parvenus à l’expression d’une «idée sublime de
grandeur adéquate»712 dans leurs œuvres.713 Par conséquent, l’idéal des dieux et des héros de
l’Antiquité lui apparaît comme la meilleure illustration de l’idéal de beauté et, ainsi, du
caractéristique, car:
[…] tout le caractéristique des Gestalten, quel qu’il soit, qui a été produit par des digressions du canon,
correspondant à une certaine notion d’utilité, ou l’idéal pur de la Gestalt.714
A partir de la réflexion selon laquelle la nature unit tous les archétypes propres aux différents
caractères, qu’ils soient du genre humain ou de nature divine dans son être hétéroclite sous la
forme d’un grand bric-à-brac où, selon Fernow, ils sont représentés «dissipés, et, par
conséquent, jamais purs»,715 il quitte par la suite le terrain de l’éclectio716 classique, en faveur
709
Ibid., p. 375: „Quelle des Kunstschönen.“
Ibid.: „Dass das Karakteristische, weit […] das Kunstschöne selbst zu seyn, vielmehr durch sein Übergewicht
die Schönheit verdrängt.“
711
Ibid., p. 366: „Im Gegentheile giebt es Abweichungen von dem schönen Gleichgewichte, welche die
Volkommenheit und Schönheit der menschlichen Gestalt noch über die Gattung erheben, und sie durch Grösse
und Erhabenheit zum Göttlichen steigern.“
712
Ibid., ss.: „erhabenen Idee angemessenen Grosheit“
713
Il cite dans ce contexte comme exemples les divinités comme Jupiter, Minerve, Juno, Hercule, Vénus etc.
714
Ibid., p. 371: […] alles Karakteristische der Gestalten, sei es welcher Art es wolle, durch bedeutende, einem
bestimmten Zwekbegrif entsprechende, Abweichungen von dem Kanon, oder dem reinen Ideale der Gestalt
hervorgebracht wurde.
715
Ibid.
716
D’après la conception de la théorie antique d’éclectio, surtout nourrie par les anecdotes autour de Zeuxis et
Raphaël, l’atteinte du beau idéal dans l’art est surtout due à la sélection parmi les beautés naturelles.
710
140
de la valorisation du mérite subjectif de l’artiste717 dont la tâche est de filtrer, à partir de
l’hétérogénéité de la nature, une unité homogène:
Ainsi l’art anoblit et idéalise aussi de par la Gestalt, et par celle-ci, le caractère qui lui correspond; et la beauté,
qui adhère à l’idéal, se modifie de la même manière et dans la même mesure que la Gestalt, d’après le caractère,
dont elle accompagne l’expression.718
De même, Fernow considère l’idéal d’homogénéité de la Gestalt comme un privilège de l’art
des Anciens.719 Ainsi, l’art antique, loin de se borner à la représentation de l’idéal suprême,
comporte également la représentation des caractères plus communs ou plus restreints, étant
donné que le principe idéal (=art), ainsi que le principe individuel (=nature) se trouvent
toujours en opposition:
Ainsi les degrés de l’idéal de l’art se limitent aux formations plus parfaites de la nature; même si le principe
idéal qui est prédominant chez l’un, et le principe individuel, qui est prédominant chez l’autre, maintiennent
toujours un gouffre entre la nature et l’art. 720
C’est pour cette raison que Fernow assimile le manque de style des nouveaux artistes à la
pauvreté esthétique des temps modernes: […] nos artistes n’ont ni de la nature, ni de l’idéal, ni de l’art
même qu’ils pratiquent, une notion juste.721
Ce manque de notion est aussi à l’origine de la confusion moderne entre la particularité
subjective au sens d’une mise en scène artistique et la beauté objective vue comme
717
Voir Pfotenhauer, 1995, p. 825: „[…] die Eclectio-Lehre (etwa, die Vorstellung vom Erreichen des
Idealschönen durch die Auswahl aus den Schönheiten der Natur, welche durch die Anekdoten um) verschwindet,
damit die zeitlose Vorbildlichkeit der Alten der neuen kritischen die zeitlose Vorbildlichkeit der alten kritischen
Philosophie gemäß als Ideal schöpferischer Subjektleistungen und nicht als Regelkanon der Mimesis behauptet
werden kann.“
718
RS, I, p. 372: „So veredelt und idealisirt die Kunst mit der Gestalt, und durch sie, zugleich auch den Karakter
derselben; und die Schönheit, welche dem Ideal anhängt, modifizirt sich eben so und in demselben Masse wie
die Gestalt, nach dem Karakter, dessen Ausdruck sie begleitet.“
719
Ibid. Dans ce contexte, des divinités et héros de la mythologie gréco-romaine comme p. ex. Apollon, Bacchus,
Mercure, Antinous, Hercule, Dioscure, guerrier, faune, etc. sont évoqués.
720
Ibid., p. 374: „So gränzen die Stufen des Kunstideales an die volkommeneren Bildungen der Natur; obgleich
das idealische Prinzip das in jener, und das individuelle Prinzip das in dieser herscht, zwischen Natur und Kunst
immer eine Kluft erhalten [...].“
721
Ibid.: „[...] weil unsere Künstler weder von der Natur noch vom Ideale, noch von der Kunst selbst, die sie
treiben, einen richtigen Begriff haben.“
141
représentation spinoziste: Le principe est valable seulement chez les modernes: chaque artiste se projette
dans son œuvre. L’artiste antique disparaissait derrière le sien.722
Par ailleurs, Fernow estime que le principe classique du «pur goût» se trouve dénaturé dans
l’esprit de son temps. Il s’ensuit que la séparation sévère entre tous les genres et les styles
d’art est significative pour la conception de Fernow du beau dans l’art, qui, quant à elle,
résulte fondamentalement de l’observation de la nature et de ses formes caractéristiques. Or,
Fernow met aussi en avant qu’une représentation trop accentuée, comme la «caricature»,723
ne peut jamais être belle, étant donné qu’elle ne correspond pas à la belle présentation de
l’idéal.724 De même, il se détache nettement de la conception du caractère725 formulée par
Hirt, qui, suivant le modèle winckelmannien, ne requiert de «l’artiste pensant»,726 «pas
d’œuvres imitées de manière esclavagiste ou sans esprit.»727 Dans ce contexte, il évoque par
ailleurs la question de l’affect comme une possibilité afin d’exprimer, selon un «signe
essentiel et caractéristique»,728 des états d’âme humains qui sont perceptibles par
l’observateur à travers le «sentiment sympathique.»729 Ses explications à ce sujet sont, par
moments, indubitablement teintées par la théorie des affects de Le Brun;730 cependant,
Fernow essaie d’aller plus loin en distinguant, à partir des différences spécifiques aux peuples
quant à la représentation des affects, l’expression du caractéristique comme la vérité
artistique, à l’opposé de la beauté artistique dans le sens d’une représentation idéalisée.731
L’affect, en tant qu’expression d’un état d’âme humain, est par la suite à catégoriser selon le
722
Ibid., p. 50: „Nur bei den Neueren gilt der Satz: jeder Künstler drükt sich selbst in seinen Werken ab. Der alte
Künstler verschwand hinter dem seinigen.“
723
Ibid., p. 375.
724
Cf. à ce sujet également, KU, § 17, A 58 s.: „Das Charakteristische von dieser Art […] heisst Karikatur.“
725
Aloys Hirt: „Versuch über das Kunstschöne“, in: Die Horen. Eine Monatsschrift, Schiller (Éd.), 1797, (3), 7.
pièce, p. 34: „Unter Charakteristik verstehe ich nemlich jene bestimmte Individualität […] Nur durch die
Beobachtung dieser Individualität kann ein Kunstwerk ein wahrer Typus, ein ächter Abdruk der Natur werden.“
726
JS, p. 357.
727
Ibid., s. Giorgio Vasari: Die Künstler der Raffael-Werkstatt, Alessandro Nova (Éd.), Éd. Wagenbach, Berlin,
2007.
728
Ibid., p. 381: „eigenthümliches, karakteristisches Zeichen.“
729
Ibid.: „sympathetische[n] Gefühl[sl.“
730
Cf. Aloys Hirt: „[…] Leidenschaften der Seelen, und wie diese den Körper rühren“, [1762].
731
Ibid., p. 378: „[…] durch den Ausdruck des Karakteristischen eigentlich nur die Kunstwahrheit, nie die
Kunstschönheit einer Darstellung bewirkt werden kann.“
142
caractère individuel732 et le caractère idéal. Le premier correspond à l’état naturel de l’âme
humaine et comprend non seulement le caractère physiognomique, en tant qu’expression du
mouvement, mais également le caractère maladif du pathognome et le caractère mimique, qui
n’est autre que celui de l’âme. Ce deuxième s’oriente principalement vers l’idéal de l’art (=le
beau dans l’art) et, par conséquent, ne peut jamais être d’ordre pathognomique, mais
uniquement d’ordre physionomique ou mimique, étant donné que la laideur s’oppose tout
naturellement au beau. Alors que l’état dit naturel incorpore toutes les formes du caractère
individuel, le beau dans l’art se borne pour lui en règle générale exclusivement aux formes du
caractère idéal.733 Au terme de ces considérations, Fernow établit même un parallèle avec
l’art du spectacle (Schauspielkunst), et plus précisément la pantomime, car l’artiste des arts
plastiques et le comédien ont, d’après sa conviction, en commun qu’ils cherchent, chacun à sa
façon, à atteindre l’idéal de la représentation artistique. Quant à cela, la beauté de l’expression
mimique se réfère avant tout à la façon de paraître de la Gestalt, et, de ce fait, ne peut être
produite que par le charme, la grâce ou la dignité ou d’autres formes d’expression basiques
suscitant la sympathie ou l’émotion, ce qui exclut donc le caractère pathognomique. En
l’occurrence, l’état pathognomique est aussi un sujet de la pantomime, qui n’est pas rendu de
manière hasardeuse, mais de façon idéale. Au fond, la vraie beauté de la représentation
réside, selon Fernow, dans l’harmonie de l’âme humaine, ce qui fait à la fois penser à l’état
néoplatonicien d’une monade reposant sur elle-même, ou l’inébranlable de l’âme des
Stoïciens. Par ailleurs, Winckelmann se prononce également, dans les Pensées sur l’imitation
sur l’importance de la sensation intérieure pour la représentation du caractère, qui a également
dû inspirer Fernow:
732
Dans ce contexte Fernow critique la production d’art de son temps, en se référant surtout aux œuvres de De
Vinci, Raphaël, Dürer, Holbein et le théâtre de Goldoni, Ifland et Kotzebue, car, selon sa conception, ces
derniers n’opèrent pas de façon idéale et caractéristique, mais de manière individuelle et caractéristique, en
représentant premièrement les hasards et aléas de l’existence humaine, mais sans les esthétiser par l’idéalisation.
733
Fernow s’en prend ici manifestement aux méthodes didactiques de l’école française, comme par exemple la
représentation des affects selon Charles le Brun: Sentiments des plus habiles peintres (1696) et Sur l’expression
générale et particulière, (1698) [Discours officiel devant l’Académie royale de beaux-arts à Paris].
143
La sensation intérieure forme le caractère de la vérité; et le dessinateur, qui veut donner le même à ses
académies, n’arrivera pas à obtenir une ombre du vrai, sans se substituer à ce que n’éprouve pas une âme calme
et indifférente au modèle, ni par une action qui peut exprimer ce qui est propre à une certaine sensation ou
passion.734
A part cela, on pourrait également penser, comme l’évoque par ailleurs Herbert von Einem, à
la notion d’humaniora735 chez Kant. Cet état est réservé à l’individu dit idéal,736 exprimant le
caractère de l’espèce, contrairement à l’état de l’individu de la nature,737 de manière parfaite
et harmonieuse:
Une telle image idéale est un individu, qui n’est concevable qu’en art, qui, à la différence de n’importe quel autre
individu de la nature, n’est plus le produit du hasard mais contient d’autant plus d’essence; il s’ensuit, par
nécessité, que la représentation idéale exprime un objet d’art, la notion d’utilité, ou la nature de celui-ci, d’une
façon plus définie, plus pure, plus complète, avec aussi une plus grande vérité de son caractère particulier, que
l’imitation la plus fidèle pourrait le faire.738
En ce qui concerne la question du style, il parvient à la conclusion suivante:
Il n’y a qu’un seul style qui est à la fois pur et exemplaire, comme il n’y a qu’un seul goût qui est à la fois bon et
juste […] Le style d’un tableau est le caractère esthétique qui se fonde objectivement, et qui, dans chaque art, est
défini par l’idéal de celui-ci, et dans chaque représentation par la relation entre l’individuel et l’idéal, qui réside
dans la notion du sujet.739
734
Cf. Winckelmann in: Gedancken zur Nachahmung der griechen Kunstwerke in der Mahlerey und
Bildhauerkunst, op. cit., p. 14: „Die innere Empfindung bildet den Charakter der Wahrheit; und der Zeichner,
welcher seinen Academien denselben geben will, wird nicht einen Schatten des wahren erhalten, ohne eigene
Ersetzung desjenigen, was eine ungerührte und gleichgültige Seele des Modells nicht empfindet, noch durch eine
Akzion [sic], die einer gewissen Empfindung oder Leidenschaft eigen ist, ausdrücken kann.“
735
Voir KU, § 60: „Die Propädeutik zu aller schönen Kunst, sofern es auf den höchsten Grad ihrer
Vollkomenheit angelegt ist, scheint nicht in Vorschriften, sondern in der Kultur der Gemütskräfte durch
diejenigen Vorkenntnisse zu liegen, welche man Humaniora nennt: vermutlich, weil Humanität einerseits das
allgemeine Teilnehmungsgefühl, andererseits das Vermögen, sich innigst und allgemein mitteilen zu können,
bedeutet […].“
736
Ibid., p. 392.
737
Ibid., p. 395.
738
Ibid., p. 393: „Ein solches Idealbild ist nur durch Kunst mögliches Individuum, welches nichts Zufälliges und
mehr Wesentliches enthält, als irgend ein Individuum der Natur enthalten kan; woraus also nothwendig folgt,
dass die idealische Darstellung eines Naturgegenstandes, den Zwekbegrif oder das Wesen desselben bestimmter,
reiner, volständiger, also auch mit grösserer Wahrheit seines eigenthümlichen Karakters, ausdrükt, als es die
treueste Nachahmung vermag.“
739
Ibid., p. 38 s.: „Es gibt nur einen reinen, musterhaften Stil, so wie es nur einen guten und richtigen
Geschmack gibt. [...] Der Stil eines Bildwerks ist nämlich der objektiv-bedingte ästhetische Karakter desselben,
der in jeder Kunst durch das Ideal derselben, und in jeder einzelnen Darstellung durch das in dem Begriffe des
Gegenstandes gegründete Verhältnis des Individuellen zum Ideale bestimmt wird.“
144
Il s’ensuit que Fernow se prononce manifestement pour l’idéal du style pur servant de modèle,
qu’il mesure selon le caractère esthétique qu’il fonde de façon objective, à partir de la relation
entre l’individuel et l’idéal. Or, il ne conteste pas le fait qu’il n’y ait pas une forme idéale pure
dans la nature, selon la théorie de l’éclectio, mais il se réfère à «un schéma ou un archétype
issu de la nature»,740 se manifestant dans l’art du style de par la Gestalt:
Le style comporte tous les éléments de la représentation, mais, dans le domaine des arts plastiques, se fixe
principalement sur la Gestalt (chaque représentation doit porter en elle-même ce double caractère, qui définit
l’idéal de l’art). Le caractère individuel, comme le celui de Dédalus, ne peut être exprimé qu’à travers les
formes et les relations qui lui sont propres; et tous les deux dépendent, dans chaque cas particulier, de la notion
de l’objet à représenter. 741
Ce faisant, Fernow cherche à accorder la maxime de l’idéalisation du caractère avec le
postulat de la vérité individuelle. Ainsi, il n’est point étonnant, qu’il occupe quasiment, dans
la discussion sur le Laokoon,742 le rôle d’un médiateur théorique, entre Lessing, Winkelmann
et Hirt, comme le constate d’ailleurs Arthur Schopenhauer:743
Les principes sur l’art de Winkelmann et de Lessing sont indéniablement insuffisants, si on veut les considérer et
appliquer comme étant des fondements pleinement valables de l’art, à tous égards. Mais aussi le principe de Hirt
sur le caractéristique ne l’est pas moins; et s’il accuse ses deux grands prédecesseurs d’unilatéralité, ce même
reproche retombe d’autant plus sur lui-même, qu’il cherche justement à imposer, de manière beaucoup plus
explicite et exclusive que ces premiers le leur, son principe du caractéristique comme étant le fondement
supérieur de l’art antique, et comme étant le seul fondement des arts plastiques.744
740
Ibid. p. 39 s.: „der Natur zum Grunde liegende[s] S c h e m a oder U r b il d.“
Ibid., p. 43: „Der Stil umfasst alle Theile der Darstellung, doch haftet er in der bildenden Kunst vornemlich
an der Gestalt. Der individuelle sowohl als der idealische Karakter einer Gestalt (jede Darstellung mus diesen
zwiefachen Karakter, der das Kunstideal ausmacht, an sich tragen) kann nur durch die Formen und Verhältnisse
derselben ausgedrückt werden; und beide sind in jedem besonderen Falle von dem Begriffe des darzustellenden
Gegenstandes abhängig.“
742
Cf. au sujet de la discussion autour du Laokoon Marie-Christin Wilm: „Laokoons Leiden. Oder über eine
Grenze ästhetischer Erfahrung bei Winckelmann, Lessing und Lenz“, in: Ästhetische Erfahrung: Gegenstände,
Konzepte, Geschichtlichkeit, (online-publication du Sonderforschungsbereich 626), Berlin, alinéas 1-25:
http://www.sfb626.de/veroeffentlichungen/online/aesth_erfahrung/aufsaetze/wilm.pdf (consultée le 14.03.2009).
743
RS, I, p. 258.
744
Cf. RS, I, „Über das Kunstschöne“, ici p. 441: „Unläugbar sind also Winkelmanns und Lessings
Kunstprinzipe, wenn man sie als volgültige Grundsätze der Kunst betrachten und anwenden will, dazu in jeder
Hinsicht unzulänglich. Aber auch Hirts Prinzip der Karakteristik ist es nicht weniger; und wenn er seine beiden
grossen Vorgänger der Einseitigkeit beschuldigt, so fällt derselbe Vorwurf noch stärker auf ihn selbst zurük,
wenn er weit ausdrüklicher und ausschliessender als jene beiden das ihrige, sein Prinzip der Karakteristik als
741
145
A partir de l’exemple du Laokoon, Fernow formule ainsi le postulat du beau comme étant
l’utilité supérieure, tout en subordonnant le caractéristique à l’idéal, en lui attribuant
cependant une place intermédiaire située entre la beauté et l’idéal. Il légitime ensuite, comme
Kant, «l’utilité que l’art doit [remplir] pour l’homme» 745 comme étant l’objectif principal de
cet ensemble esthétique, dont le but est de plaire et de «divertir l’âme de façon esthétique.»746
De cette sorte, «l’état du libre équilibre de toutes les forces de l’âme»747 est atteint, qui est «le
plus approprié à la nature humaine»748 et qui «réjouit l’âme de façon harmonieuse et
vitalisante.»749 De par cette corrélation entre l’esprit et la nature, «l’âme [doit se sentir] libre
de toute obligation et quand même occupée»,750 afin de se trouver ainsi dans «l’état du libre
jeu des facultés de connaissance.»751 A part cela, Kant oriente le plaisir généralement vers le
beau (=l’art), au bien (=la morale) et vers l’agréable (=la jouissance), en mettant toujours le
désintérêt de l’objet esthétique au premier plan. Il faut opposer à cette notion du beau le
sublime, qui provoque un état d’émotion libre (p. ex. la mouvance), en formant ainsi un pôle
diamétralement opposé à l’état de l’équilibre libre (=contemplation calme). Le sentiment du
sublime est par contre conditionné par «un drôle de mélange entre l’inutile et l’utile.»752 Ce
qui est étonnant ici, c’est que Fernow va, à partir de cette problématique de base, déduire le
principe idéal de l’art, qu’il considère, par rapport à l’homme, selon l’idée esthétique normale
comme «le pur idéal de la Gestalt, dans la mesure où elle est seulement l’idéal de l’utilité
extérieure de la formation humaine.»753 Suivant cette logique, il part de l’idéal de l’utilité
obersten Grundsaz der alten Kunst, und als den einzig wahren Grundsaz der bildenden Kunst überhaupt
aufstellen will.“
745
Voir I. Fernow, 1936, p. 20: „Zweck, den die Kunst um des Menschen willen.“
746
RS, II, p. 102: „Gemüt ästhetisch zu beschäftigen.“
747
RS, I, p. 383: „Zustand des freien Gleichgewichts aller Gemütskräfte.“
748
Ibid.: „Ideal der menschlichen Natur am angemessensten.“
749
RS, III, p. 129: „Gemüt harmonisch beleb[t] und erfreu[t].“
750
RS, II, p. 25: „Gemüt von aller Bestimmung frei und doch beschäftigt.“
751
Voir Kant, KU, § 9, A 28: „Also muβ der Gemütszustand in dieser Vorstellung der eines Gefühls des freien
Spiels der Vorstellungskräfte an einer gegebenen Vorstellung zu einem Erkenntnisse überhaupt sein.“
752
Cf. I. Fernow, 1936, p. 34: „merkwürdige Verbindung von Zweckwidrigkeit und Zweckmäßigkeit.“
753
Ibid.: „blosse Ideal der Gestalt, insofern es eigentlich nur das Ideal der äusseren Zweckmässigkeit der
menschlichen Bildung ist.“
146
intérieure, qu’il définit comme étant «la nature spirituelle de l’homme, dans le sens où elle
peut devenir visible elle-même.»754 En ce qui concerne la forme artistique, il évalue, à l’instar
de Kant, la forme et la matière selon l’utilité. Il formule son idée de base comme suit: «La
matière est d’après sa nature seulement réelle et ne peut pas être idéalisée comme la
forme.»755 Il en déduit en l’occurrence que la matière (p. ex. le coloris) peut être soumise à un
traitement idéal, alors que la laideur de la forme, le véritable dégoûtant chez Kant, est à
exclure comme objet de la représentation en art, étant donné qu’il porte atteinte au plaisir
esthétique. De même, Fernow considère, tout comme Kant, deux sortes de grandeur: la
grandeur «intérieure, intensive» et la grandeur «élargie, extensive.»756 Par ailleurs, il distingue
la grandeur extensive (quantitas), de la grandeur intensive (magnitudo) et intérieure
(grandiosità). Dans ce contexte, la grandeur intensive est à situer au-dessus de la grandeur
extensive, étant donné que seulement cette première:
[…] [émeut] le sens intérieur, [s’empare de] l’âme, et qui [est] si indispensable à l’expression de la grandeur
dans les œuvres des arts plastiques, de sorte qu’un colosse n’apparaît pas grand, s’il lui manque la grandeur
intérieure.757
De ce principe résulte aussi pour Fernow l’opposition entre la sculpture et l’architecture, et il
constate:
De toute façon l’architecture est moins capable d’incarner la grandeur intérieure, que plutôt la sculpture [et]
qu’elle augmente […] de par la grandeur et le sublime, vers le sublime [et ce faisant] met en jeu la faculté
sympathique du spectateur [et] impressionne notre cœur.758
De la même manière, il conçoit la grandeur extensive comme étant un décalage positif de
l’idée normale,759 il isole par la suite la grandeur extensive (=extérieure) de la grandeur
754
Ibid: „geistige[n] Natur des Menschen, insofern diese sichtbar an derselben erscheinen kann.“
Cf. RS, II, p. 206: „Die Materie ist ihrer Natur nach bloss real und lässt sich nicht idealisieren wie die Form.“
756
RS, II, p. 267: „innere, intensive“ et „ausgedehnte, extensive Gröβe.“
757
Ibid., f.: „[…] den inneren Sinn [rührt], das Gemüth [ergreift], und für den Ausdruck der Größe in Werken
der bildenden Kunst so unentbehrlich [ist], dass auch ein Koloβ nicht groß erscheint, wenn ihm die innere Größe
mangelt.“
758
RS, II, p. 366 ss.: „Überhaupt ist weniger die Baukunst fähig, die innere Größe zu verkörpern, als vielmehr
die Bildnerei, da sie die „Vollkommenheit der menschlichen Gestalt […] durch Größe und Erhabenheit zum
Göttlichen steigert [und] das sympathetische Vermögen des Betrachtenden mit ins Spiel [zieht] [und somit
imstande ist] auf unser Herz zu wirken.“
755
147
intensive (=intérieure). En outre, Fernow met en question la possibilité d’une représentation
parfaite de l’idée normale (=l’idée de la raison) comme le juge par exemple Kant, de par les
formes géométriques dans la mathématique comme étant «complètement et concrètement»760
possible. Par la suite, il le conteste «si jamais un artiste s’est imaginé une telle image
géométrique dans cette pureté tout à fait abstracte et vide.»761 De même, il pense que la
représentation de l’idée normale (l’utilité intérieure chez Kant) «dans cette pureté parfaite est
impossible à concevoir.»762 Vu dans l’ensemble, on observe également qu’il s’opère chez
Fernow un déplacement d’accent par rapport à Kant. Tandis que ce dernier idéalise la forme
pure, tout en négligeant le caractéristique, en cherchant «non pas une augmentation en
définition individuelle, mais une augmentation du contenu idéel»,763 Fernow n’envisage donc
pas le «canon géométrique de la Gestalt» („geometrische[n] Kanon der Gestalt“) comme
finalité supérieure, mais l’individualité de ce qui est représenté. Et cette individualisation du
général comme étant le secret du sens artistique est étroitement liée à l’enthousiasme de
l’artiste, ce qui sera le sujet du prochain chapitre.
759
Cf. Irmgard Fernow, 1935, p. 39
Kant, KU, § 25, A 80 s.: „Vom Mathematisch-Erhabenen.“Cf. aussi HE, p. 88: „völlig in concreto.“
761
RS, I, p. 348: „[…] ob je ein Künstler sich ein solches bloss geometrisches Bild in dieser durchaus abstrakten
Reinheit und Leerheit vorgestellt oder gebildet habe.“
762
RS, I, p. 355: „in dieser vollkommenen Reinheit für undarstellbar.“
763
HE, p. 89: „nicht eine Zunahme an individueller Bestimmtheit, sondern eine Zunahme an idealem Gehalte.“
760
148
III. 3. De l’enthousiasme de l’artiste: «…cette inspiration divine»
Fernow débute son traité intitulé «De l’enthousiasme de l’artiste» par le postulat suivant: Seul
l’ecclésiastique devrait parler du sacré, seul l’artiste devrait parler de l’enthousiasme.764
De par cette adéquation entre l’art et le sacré, il légitime par la suite la définition de
l’enthousiasme artistique comme inspiration divine, comme secret, qui ne peut pas être
expliqué par le logos de la raison sobre:
Mais l’artiste se satisfait de l’effet; la façon dont il le produit reste aussi un secret pour lui. A vous, cher ami
[=Eberhard Wächter], cette disposition géniale n’est pas étrangère. Dans toutes vos sensations, qui, comme un
libre produit de votre imagination issu d’un sujet choisi par vous-même, portaient dans votre bélisar, votre
famille sainte, dans votre hiob, et d’autres, que j’ai encore vu de vous à Rome, l’empreinte du véritable
enthousiasme est infaillible, qui ne se laisse ajouter à aucune œuvre de la raison sobre, ou de simples talents
techniques.765
Comme dans la monographie d’Arioste, Fernow demande ici, probablement pour des raisons
tactiques et afin d’influencer de manière positive l’accueil de l’œuvre, une «réception
indulgente»766 de son traité, vu qu’il est tout à fait conscient de la problématique que pose sa
définition de l’enthousiasme de l’artiste comme «inspiration divine»:
Que ces quelques feuilles trouveront une réception plus indulgente que parmi certains artistes et connaisseurs
pour lesquels le génie est une chose fâcheuse et l’enthousiasme une bêtise car, ni de l’un ni de l’autre, ils n’ont
764
Voir ici et dans ce qui suit le traité intitulé „Über die Begeisterung des Künstlers“, RS, I, p. 253: „Nur der
Geweihte sollte vom Heiligen, nur der Künstler vom Enthusiasmus sprechen.“ Cf. la réflexion sur
l’enthousiasme de l’artiste, formulée par Dante Aligheri: «Ô puissance d’imaginer, toi qui nous emportes parfois
si loin de nous qu’on ne s’aperçoit pas que sonnent alentour mille trompettes, qui ne te mets pas en mouvement,
si les sens ne t’excitent», in: Georges Kraft, 1000 citations sur l’œuvre d’art, Éd. Ellipses, Paris, 1993, p. 26.
765
Ibid., p. 253: „Aber dem Künstler genügt die Wirkung; wie er sie hervorbringt, bleibt auch ihm ein
Geheimnis. Ihnen, werther Freund [Eberhard Wächter], ist diese genialische Stimmung nicht fremd. In allen
ihren Empfindungen, die ein freies Erzeugnis Ihrer Einbildungskraft aus einem selbstgewählten Stoffe waren in
Ihrem Belisar, in Ihrer Heiligen Familie, in Ihrem Hiob, und anderen, die ich noch in Rom von Ihnen gesehen,
ist der Stempel echter Begeisterung unverkenbar, der sich keinem Werke des nüchternen Verstandes, oder einer
blos technischen Kunstfertigkeiten, anfügen lässt.“
766
Cf. la dédicace à Wieland, figurant dans l’avant-propos de Leben Ludovico Ariosto’s des Götlichen, Éd.
Gessner, Zurich, 1809.
149
jamais éprouvé une étincelle en eux-mêmes. Je souhaiterais seulement indiquer l’indicible; et si vous trouvez
encore de l’un ou de l’autre la trace d’une idée juste de cette inspiration divine.767
Afin de mieux évaluer la conception de l’enthousiasme artistique fernowienne, une
clarification de sa conception du génie s’impose. Dans un premier temps, celle-ci repose chez
lui, tout comme chez Schiller, essentiellement sur «la liberté de l’artiste qui est l’élément du
génie.»768 Dans ce contexte, il distingue strictement l’artiste de l’artisan:
Le talent imitateur, dont les niveaux inférieurs se perdent dans la main d’œuvre pure, et le talent créateur, dont
on désigne les niveaux supérieurs de préférence par le mot génie, se limitent réciproquement en ce qui concerne
le don artistique de multiples façons et produisent d’innombrables nuances, allant du plus haut au plus bas, entre
le génie d’un Michel-Ange ou d’un Raphaël et le talent appauvri d’un peintre romain d’armoiries et de
cornichons.769
De même, Fernow sépare le «bon dessinateur» du «bon coloriste» et, en analogie, entre le
«talent de l’invention » du «talent de l’imitation de la réalité.»770 Ainsi, le degré de formation
du talent artistique est principalement décisif pour la définition de génie. Ce qui est intéressant
ici, c’est surtout la réflexion fernowienne sur la comparaison entre l’artiste et l’artisan, dans
laquelle il distingue, tout comme Kant,771 le sens supérieur, le sens pour la forme (Sinn für die
Form) et le sens artistique inférieur ainsi que le sens pour le caractère matériel (Sinn für den
materiellen Charakter):
767
RS, III, préface et JS, p. 342: „Werden darum diese wenigen Blätter eine nachsichtsvollere Aufnahme finden,
als bei gewissen, durchaus verständigen Künstlern und Kennern, denen Genie ein Ärgernis und Begeisterung
eine Thorheit ist, weil sie weder von dem einen noch von der andern je einen Funken in sich verspürten. Ich
wünschte das Unaussprechliche blos anzudeuten; und wenn sie die Spur einer richtigen Ahndung jenes
göttlichen Anhauches darin finden.“
768
Voir pour cette citation la monographie de Carstens, op. cit., p. 39: „Freiheit ist das Element des Genius.“
769
Ibid., p. 188: „Das nachahmende Talent, dessen untere Grade sich in bloβes Handwerk verlieren, und das
schöpferische Talent, dessen höhere Grade man vorzugsweise durch das Wort Genie bezeichnet, beschränken
einander wechselseitig in der Kunstanlage auf die mannigfaltigste Art und bringen jene zahllosen Abstufungen
hervor, welche zwischen dem Höchsten und Niedrigsten, zwischen dem Genie eines Michelangelo und Raffael
und dem armseligen Talent eines römischen Wappen- und Gurkenmalers liegen.“
770
RS, II, p. 181: „gute[n] Zeichner“, „guten Koloristen“, „Talent der Erfindung“ et le „Talent zur
Nachahmung der Wirklichkeit.“
771
Voir Kant, § 43, A 174: „Wird auch Kunst vom Handwerk unterschieden; die erste heiβt freie, die andere
kann auch Lohnkunst heiβen.“ L’abbé Pierre fait une première distinction quant à la compétition des arts dans
son traité «Les beaux-arts réduits à un même principe», Paris, 1747.
150
Le sens pour la forme, qui repose sur l’imagination, va plus souvent de pair avec le talent de l’invention – à
l’opposé, le sens pour le caractère matériel des objets va plus habituellement de pair avec le talent de l’imitation
du vrai dans la société. 772
Pour Fernow, le bel art comme invention est forcément l’art du génie;773 mais, pourtant, il
n’exclut nullement la possibilité d’une imitation matérielle de la réalité, comme la pratique
l’artisan. Ce qui est décisif pour l’épanouissement du talent artistique, c’est d’après lui la
faculté du talent imitateur, qui «selon des règles académiques et doté d’une technique
scientifique exercée, est capable de composer une œuvre de façon artistique.»774
En règle générale, il différencie donc la production des objets d’art habituels et la création des
œuvres d’art exceptionnelles, qu’il considère comme étant un privilège du génie, qui,
appartenant à une sphère supérieure, a atteint le degré le plus haut de la formation artistique.
Ainsi, il correspond aux règles objectives de l’art de par sa «force originelle.»775 Dans ce
contexte, on pensera également au mythe classique de Pygmalion, en complétant, d’après
Helmut Pfotenhauer,776 cela par l’instance transsubjective sous la forme d’une déesse qui
insuffle la vie à l’œuvre de l’artiste. Le philosophème de Henri-Louis Bergson sur l’élan vital,
la vis vitalis vue, selon Manfred Naumann, comme une ‘force évolutionnaire comme
spirituelle’777 y paraît aussi congruent. Cette dernière ne peut pas être saisie par la raison,
mais seulement par l’intuition et se manifeste dans le milieu artistique, comme dans le
772
Ibid., p. 180 s.: „Mit dem Sinne für Form, der in der Einbildungskraft beruhet, findet sich häufiger das Talent
der Erfindung - mit dem Sinne für den materiellen Karakter der Gegenstände hingegen gewöhnlicher das Talent
zur Nachahmung des Wirklichen vergesellschaftet.“
773
Ibid., § 43, A 178: „Schöne Kunst ist Kunst des Genies.“
774
Ibid., p. 188 s.: „[…] nach Schulregeln und mit wissenschaftlicher Technik wohl ausgerüstet und geübt, eine
Komposition kunstmässig zusammenzustellen [kann].“ Dans ce contexte, il nomme Raphael Mengs comme le
«représentant de tous les artistes doués» („Repräsentanten aller geschickten Künstler“), cf. également Fernow,
introduction, p. 259 ss., tout comme van Huysum et Claude Gelée.
775
Cf. à ce sujet les propos de Helmut Pfotenhauer, VRW, p. 43: „Nicht der Keim, der von Anfang an da ist und
sich immer wieder ausfaltet, bestimmt das Leben, sondern eine spezifisch biologische Organisationskraft, die im
Andersgeschlechtlichen das Eigene neu produziert, also eine nicht uranfängliche, sondern nachfolgende Genese
(Epigenesis) bewirkt.“
776
Ibid.: „Platonisches Erbe macht sich geltend; trotz des herbeizitierten Pygmalion-Mythos, demzufolge das
Werk des Künstlers selbst ja lebendig wird, er also aus sich heraus schafft. Aber offenkundig muß man hier die
Göttin des antiken Mythos hinzudenken, die Leben einhaucht und ohne die als transsubjektive Instanz
Inspiration nicht möglich wäre.“
777
Cf. Manfred Naumann: Lexikon der französischen Literatur, Bibliographisches Institut (Éd.), Leipzig, 1987:
„evolutionären wie geistigen Kraft.“
151
domaine scientifique.778 En ce qui concerne la légitimation du génie artistique, le
Kunstgenius, comme Fernow l’appelle, on constate que celle-ci s’insère à la fois dans le
champ de tension situé à mi-chemin entre la philosophie transcendantale de Kant et
l’idéalisme esthétique de Schiller, étant donné qu’il s’inspire des deux systèmes
équitablement. Ainsi, il désigne la force créatrice tout à fait au sens de la conception
kantienne comme «don naturel»,779 qui est «remis par la nature»,780 et, pour cette raison, il
est seulement réservé au génie:
[…] que chaque élargissement légitime [de l’imagination créatrice] soit l’affaire du libre talent du génie
créateur, qui s’ouvre lui-même de nouvelles voies, […] là où la raison la plus lucide […] manque de théories.781
Ainsi, Fernow conteste ici decidément le principe sur la didactique de l’art, car il élève
l’esprit créateur de l’artiste au-dessus de la raison la plus brillante. Contrairement à Kant, il
autorise au génie le dépassement de la règle kantienne, la Verstandesregel, en légitimant cette
transgression paradoxalement par ce même postulat kantien de l’originalité artistique:782
[…] ses digressions de la règle, même ses débordements [incitent] l’admiration et non pas le refus de la part de la
critique […] des idées inimitables sont un privilège du génie.783
Contrairement à cela, Kant considère l’art arbitraire comme «liberté anarchique» qui ne
produit «rien que du non-sens»784 et qui, pour cette raison, doit être tempéré:
«[…] afin d’éviter qu’il transgresse les limites du vrai, du beau et du sublime dans le feu et
l’élan de l’imagination.» Or, Fernow admet, quant à cela, que «le génie aussi admirable qu’il
puisse être […] n’est qu’une force naturelle aveugle, un talent quasiment instinctif.» Or, pour
778
Henri Bergson: Denken und schöpferisches Werden, Éd. EVA TB, Francfort/M., 1993. Cf. aussi l’étude de
Mirjana Vrhunc: Bild und Wirklichkeit, Zur Philosophie Henri Bergsons, Éd. Fink, Munich, 2002.
779
KU, § 46, A 178 s.: „Genie ist das Talent [Naturgabe], welches der Kunst die Regel gibt.“
780
Voir le Neue Teutscher Merkur, 1795, SB 5, 22.
781
RS, III, p. 41 s.: „[…] jede erlaubte Erweiterung dem freien Vermögen des schöpferischen Kunstgeistes
überlassen, der auch da sich neue Bahnen öffnet, […], wo der helleste Verstand […] mit [seinen] Theorien zu
kurz [kommt].“ Cf. Kant § 46, A 180: „Genius, dem eigenthümlichen, ein bei der Geburt mitgegebenen,
schützenden und leitenden Geist.“
782
KU, § 46, A 182: „[…] dass Genie ein Talent sei […] folglich daβ O r i g i n a l i t ä t seine erste Eigenschaft
sein müsse.“
783
RS, II, p. 91: „[…] seine Abweichungen von der Regel, selbst seine Ausschweifungen […] [nötigen] der
Kritik statt Tadel Bewunderung [ab] […] unnachahmliche Einfälle sind ein Vorrecht des Genies.“
784
Ibid: „gesetzlosen Freiheit [die] nichts als Unsinn hervor[bringt].“
152
résoudre ce conflit apparent, il distingue par la suite entre deux sortes d’affect: d’un côté, c’est
le génie divin (dominé par son talent créateur) et, de l’autre, c’est le génie primitif (guidé par
son instinct primitif). Tandis que ce premier est réductible à un état d’âme positif (des
émotions supérieures, la compassion), ce dernier est défini par un état d’âme négatif (des
émotions inférieures, le dégoût). Généralement, il part du principe selon lequel:
L’affect est un état de souffrance, qui limite la liberté de l’âme et qui le force à une tension et une orientation
arbitraire de ses forces [vers ou de ce même objet] ou son idée […] [L’affect] est aveugle, soit en ce qui concerne
le choix de sa finalité, soit, si celui-ci est dicté par la raison, en ce qui concerne le choix des moyens pour
l’atteindre.785
Pour cette raison, Fernow rejette de façon catégorique toute restriction du génie: «Le génie
[…] agit même dans les plus grands degrés de l’enthousiasme avec calme et liberté», étant
donné «qu’il est formé par le bon goût.»786 Le bon goût devient ainsi le modulateur de l’affect
aveugle, étant donné que l’artiste génial est, de par la «force de sa personnalité»,787 tout à fait
capable de juger de manière objective, afin «d’être pénétré, soulevé, enthousiasmé, mais non
pas dominé»,788 ce qui implique en même temps le principe de la maîtrise technique. Mais
Fernow va encore plus loin et distingue au delà l’enthousiaste (dominé par les affects) de
l’enthousiasme du génie (porté vers les idées), tout en différenciant clairement dans la même
mesure, l’enthousiasme du fanatisme (qu’il soit religieux, politique ou patriotique).
De même, il définit l’enthousiasme moral (humanitaire) et l’enthousiasme esthétique
(artistique):
Comme il existe pour l’activité des êtres dotés de raison seulement trois sujets d’une aspiration absolue, à savoir
le vrai, le bon et le beau, de même il n’y a que trois sortes de véritable enthousiasme […] à savoir
785
Ibid., p. 255.: „Der Affekt ist ein leidender Zustand, der die Freiheit des Gemüts hemmt und es zu einer
unwillkürlichen Spannung und Richtung seiner Kräfte [zu oder von dem Gegenstande] oder der Vorstellung
desselben nötigt […] [Der Affekt ist] blind, entweder in der Wahl seines Zweckes, oder, wenn dieser auch durch
Vernunft gegeben worden, doch in der Wahl der Mittel zur Erreichung desselben.“
786
RS, I, p. 259: „Das Genie […] wirkt auch in den höchsten Graden des Enthusiasmus mit Besonnenheit und
Freiheit, denn es ist durch den Geschmack gebildet.“
787
Ibid.: „Kraft seiner Persönlichkeit.“
788
Ibid. s.: „[…] von seinem Gegenstande durchdrungen, emporgehoben, begeistert, aber nicht beherrscht [zu
sein].“
153
[l’enthousiasme] philosophique, moral et esthétique. L’enthousiasme philosophique est réveillé par l’idée de
vérité, - l’enthousiasme moral par les idées et fins morales, - l’enthousiasme esthétique par le beau et le
sublime.789
En revanche, pour Fernow, l’enthousiasme véritable est non seulement un affect positif, dans
le sens d’un état d’âme supérieur, mais aussi le véritable état idéal de l’artiste, car d’après lui
celui-ci:
[de par] la tension et l’élévation des forces de l’âme par les idées […] est autonome de façon esthétique; mais
l’enthousiasme à des fins morales, pour la vérité, la liberté et le droit est également moral et esthétiquement
autonome.790
De même, l’enthousiasme (esthétique) est assimilé au degré suprême de la force productive
du génie créateur:
Le degré suprême de l’affect qui est lié aux idées et conditionnées par celles-ci […] Seul le génie, ou la
disposition intellectuelle productive, est capable d’atteindre ce degré et cette forme d’enthousiasme. Seul le
génie peut, sans être limité dans sa liberté et sans agir contre la raison, de par sa force intellectuelle qui est
augmentée de par sa nature au-dessus de l’ordinaire, s’élever vers la force de l’enthousiasme, d’où résultent des
actes nobles, de nouvelles découvertes au royaume de la vérité et du savoir et qui engendrent de belles œuvres
d’art.791
789
Ibid., p. 260 s.: „Da es für die Täthigkeit vernünftiger Wesen nur drei Gegenstände eines unbedingten
Strebens giebt, nämlich das Wahre, das Gute und das Schöne, so giebt es auch nur drei Arten wahrer
Begeisterung […], nämlich die filosofische, die moralische und die ästhetische. Die filosofische Begeisterung
wird durch die Idee der Wahrheit, - die moralische durch sitliche Ideen und Zwecke, - die ästhetische durch das
Schöne und Erhabene geweckt.“
790
Ibid., p. 257 s.: „als Spannung der Erhebung der Gemüthskräfte durch Ideen, […] ästhetisch erhaben [ist];
aber nur der Enthusiasmus für sitliche Zwecke, für Wahrheit, Freiheit und Recht ist zugleich moralisch und
ästhetisch erhaben.“
791
Ibid., p. 258: „Der höchste Grad des mit Ideen verbundenen und durch sie bewirkten Affektes […] Dieses
Grades und dieser Art des Enthusiasmus ist aber nur das Genie, oder die produktive Geistesanlage fähig. Das
Genie allein kann sich, als eine schon durch seine Natur über das gewöhnliche Mass erhöhete Geisteskraft, ohne
in seiner Freiheit gehemmt zu werden, und ohne vernunftwidrig zu wirken, zu der Stärke des Enthusiasmus
erheben, aus welcher erhabene Thaten, neue Entdeckungen im Reiche der Wahrheit und des Wissens, und
schöne Kunstwerke hervorgehen.“
154
Pour prouver le principe génétique de la force imaginative, qui échappe à toute définition et à
tout enseignement, Fernow se réfère aux œuvres des maîtres italiens de la Renaissance792 et de
l’Antiquité grecque:
[…] que la nature n’est pas seulement une force imaginative et un sentiment énergétique, mais aussi une force
de jugement juste, capable de donner un sens de vérité et de beauté infaillibles, soutenant le génie sans autres
règles que celles puisées en lui-même, dans la voie et l’esprit de l’artiste, toujours en harmonie avec lui-même.
Que la contrainte de la règle et la vivacité de l’esprit affaiblissent son esprit, et tuent l’énergie de son sentiment;
au contraire, ce qu’on lui enlève en feu sauvage et en force non maîtrisée d’un côté, il va, de l’autre, le gagner en
double en force intense, en fermeté et en définition du caractère, en abondance et en habileté de fantaisie.793
L’enthousiasme esthétique assimile ainsi dans l’artiste génial la subjectivité de l’individu et
l’objectivité de l’idée. Il n’est point nécessaire ici d’insister davantage sur le refus apparent de
la mimésis antique de par la nature de l’art. L’art est, tout comme la poésie, orienté vers les
idées et ainsi lié à la pulsion représentative, le Darstellungstrieb:
[…] une pure imitation de la nature, telle qu’elle est en réalité, mais dans la belle représentation de ses fins
générales et suprêmes ou dans l’idéal du beau […]. Même le plus bel individu de la nature, l’homme le plus
beau, l’acte le plus noble, la région la plus charmeuse, l’œuvre d’art la plus achevée est la matière, le mobile,
l’incitation de sa pulsion représentative, l’idéal de la perfection et de la beauté, qui vit dans son âme et dont le
présent avive l’enthousiasme dans son imagination, afin de l’exprimer, sinon, il ne produirait que des imitations
et non pas des œuvres de génie.794
792
Dont, parmi eux des esprits plus fragiles (sanftere Gemüter) comme Giotto, Ghiberti, da Fiesole, Perugino,
Rafael, Dominichino, Claude Gelée, tandis que Fernow décrit Michel-Ange, Julius Romanus, Rubens et Salvator
Rosa comme des esprits de feu (Feuergeister).
793
Ibid., voir préface: „[…] daβ die Natur nicht bloβ Einbildungskraft und ein energisches Gefühl, sondern auch
eine richtig leitende Urteilskraft, einen untrüglichen Wahrheits- und Schönheitssinn zu erteilen vermag, der das
Genie ohne andere als aus sich selbst geschöpfte Regeln im Gleise und den Geist des Künstlers immer mit sich
selbst in Harmonie erhält […] daβ der Zwang der Regel die Lebhaftigkeit seines Geistes schwächen, die Energie
seines Gefühles töten werde; im Gegenteil wird er das, was ihm auf der einen Seite an wildem Feuer und roher
Kraft genommen wird, auf der anderen an intensivster Stärke, an Festigkeit und Bestimmtheit des Charakters, an
Fülle und Gewandtheit der Phantasie doppelt gewinnen.“
794
Ibid., p. 264 s.: „[…] bloβe Nachahmung der Natur, wie sie wirklich ist, sondern in die schöne Darstellung
ihrer allgemeinen und höchsten Zwecke oder in das Ideal des Schönen […] Auch das schönste Individuum der
Natur, der schönste Mensch, die erhabenste Handlung, die reizendste Gegend, das vollkommenste Kunstwerk
selbst ist in ihm Stoff, Veranlassung, Anreizung seines Darstelungstriebes, das Ideal der Vollkommenheit und
Schönheit, das in seiner Seele lebt und dessen lebhafte Gegenwart in der Phantasie ihn begeistert, auzudrücken,
sonst würde er nur Nachahmungen, nicht Werke des Genies hervorbringen.“
155
De même, Fernow différencie entre trois catégories de «véritable enthousiasme», 795 qui ne
sont pas à confondre avec l’émotion (=sentimentalité): l’enthousiasme philosophique (l’idée
de la vérité) l’enthousiasme moral (l’idée de la moralité et de l’utilité), l’enthousiasme
esthétique (l’idée du beau et du sublime). L’enthousiasme philosophique et moral sont moins
compatibles du point de vue formel, ils ont néanmoins en commun le côté objectif, le
Gegenständliche, à savoir qu’ils obéissent à une idée normative vers l’idée de raison,796 ce
sont des génies pratiques. A l’opposé, le génie de l’art s’oriente plutôt vers l’idée de raison,
en concentrant celle-ci de manière épurée sur l’essentiel, et en la modifiant selon l’utilité:
[le génie] ne représente jamais comme abstractum, mais comme représentation dans la robe de la beauté […] Il
la reconnaît et la pense seulement dans le déshabillage sensuel.797 Grâce à sa force d’imagination il peut ainsi
ressembler à la raison ou plutôt être en relation avec celle-ci […] [produire] une image qui est purifiée de tout
ce qui est particulier ou aléatoire du genre, qui contient seulement le particulier, le général et le nécessaire
[…] 798
Ces trois sortes d’enthousiasme trouvent un consensus dans l’enthousiasme religieux, qui peut
cependant facilement dégénérer en le sentimentalisme romantique, la Schwärmerei
(sensiblerie), car il est: […] plus ou moins enclin à représenter son objet spirituel comme sentiment de
manière perceptible, et saisissable par l’imagination, si celle-ci n’est pas sans cesse retenue et modérée par la
raison.799
L’idéal en commun est l’atteinte de la sphère divine, assimilée à l’idéal de la nature humaine,
qui est considérée comme commune à toutes les religions. Suivant cet raisonnement, il
distingue entre trois religions: la religion des Grecs (esthétique, spirituel, génial), la religion
chrétienne (morale, moins esthétique, plutôt pratique), la religion catholique (anti795
Ibid., p. 260 s.: „Rührung.“
Ibid. Fernow se réfère ici à la Normalidee et la Vernunftidee chez Kant.
797
Ibid., p. 263: „[…] nie als abstractum [darstellt], sondern als Erscheinungen im Gewande der Schönheit […]
Es erkennt und denkt sie nur in sinnlicher Einkleidung.“
798
Ibid., p. 340: Dank seiner Einbildungskraft kann es so „vernunftähnlich oder vielmehr in Verbindung mit der
Vernunft“ […] ein von allem Besondern und Zufälligen geläutertes Bild der Gattung [hervorzubringen], das bloβ
das Wesentliche, das Allgemeine und Nothwendige derselben enthält.“
799
Ibid., p. 261: „[…] mehr oder weniger geneigt ist, sich ihren rein geistigen Gegenstand als dem Gefühl
wahrnehmlich, und der Fantasie anschaulich vorzustellen, wenn sie nicht unaufhörlich von der Vernunft davon
zurükgehalten und gezügelt wird.“
796
156
esthétique !, réglementaire, a-sensuelle). Et la conclusion que Fernow tire de ce classement
triadique des religions n’est pas pour le moins étonnante. D’après sa propre conviction, le
summum de l’art du génie enthousiaste d’inspiration religieuse a déjà été atteint dans
l’Antiquité grecque, car celle-ci:
[…] était tout à fait esthétique; elle se composait d’idées de la force d’imagination, qui tendaient vers l’idéal du
beau. Elle était tout à fait orientée vers le sens d’une nation du génie, et plus que toutes les autres religions du
peuple, elle était favorable aux arts plastiques. Ses dogmes étaient de belles poésies et ses divinités provenaient
d’elles-mêmes par la main des plus grands sculpteurs, en prenant une forme visible.800 Ou: Nous voulons avoir
l’art plastique, les Grecs l’avaient.801
Selon lui, le monde hellénique, ainsi que ses dieux et ses héros antiques, semblent avoir
inspiré le génie artistique à maints égards, alors que le christianisme a plutôt restreint ce
dernier. Ainsi, il considère le monde chrétien comme un univers à la fois spirituel et sensuel
au sens d’une religion du cœur:
[la] sympathie de l’amour du dieu et des hommes; elle n’est pas inesthétique, mais, comme religion du cœur,
plutôt apte à la vie pratique, qu’elle n’est enthousiasmante pour l’art.802
En l’occurrence, Fernow présente la religion catholique comme entièrement inesthétique:
Contrairement au caractère à la fois spirituel et sensuel de la foi chrétienne au sens de la
conception romantique d’une ‘religion du cœur’, Fernow, en tant que résidant à Rome et
connaisseur du vatican, présente la religion catholique comme entièrement inesthétique:
[…] car elle prescrit des conditions et demande des sensations qui contredisent la perfection sensuelle, et
s’opposent aussi à la beauté extérieure. Ses saints, ses martyres et ses héros de la foi ne sont pas de sujets qui
pourraient s’appliquer à l’art, afin de représenter l’idéal de beauté. 803
800
Ibid., p. 276 s.: „ganz ästhetisch [war]; sie bestand aus Ideen der Einbildungskraft, die zum Ideale des
Schönen hinstrebten. Sie war ganz auf den Sin einer genialischen Nazion berechnet, und mehr als alle alten und
neuen Volksreligionen den bildenden Künsten günstig. Ihre Dogmen waren schöne Dichtungen, und ihre
Gottheiten gingen aus jenen durch die Hand der grösten Bildner in sichtbarer Gestalt hervor.“
801
Ibid., s.: „Wir wollen bildende Kunst haben, die Griechen hatten sie.“ Le postulat d’imitation des Grecs
remonte initialement à Georg Friedrich Klopstock: „NACHAHMEN soll ich nicht, und dennoch nennet Dein
lautes Lob mir immer Griechenland? Wenn Genius in deiner Seele brennet, So ahm’ den Griechen nach. Der
Griech’ erfand“, dans: Ausgewählte Werke, Éd. K. A. Schleiden, Munich, 31969, p. 180.
802
Ibid., p. 277: „[die] Simpathie der Gottes- und Menschenliebe; sie ist nicht unästhetische, aber, als Religion
des Herzens, mehr für das praktische Leben als für die Kunst begeisternd.“
157
L’anti-esthétisme, la rigidité des dogmes et l’hostilité à la sensualité – c’est à cette formule
courte que l’on pourrait réduire la critique de religion de Fernow, même s’il concède toutefois
que la production d’art religieux de son époque ait connu, grâce au catholicisme, un essor
positif, constat qu’il va pourtant réfuter ailleurs.804 D’après sa conviction, l’art d’inspiration
spirituelle peut tout à fait enthousiasmer la verve religieuse, mais sans pour autant procurer du
plaisir esthétique.805 Or, l’idéal de beauté demande les deux formes de l’enthousiasme,
religieux comme esthétique:
L’idéal de beauté, qui dans son apparence est l’expression de la perfection de l’humanité, ne pouvait être produit
que par l’enthousiasme religieux de la force d’imagination.806
De même, Fernow défend la thèse selon laquelle l’homme, en tant qu’être doté de raison,
dispose d’une «nature morale», devient manifeste dans l’aspiration à la liberté, à travers
l’idéal de beauté:
L’idéal de beauté, qui trouve son expression dans l’apparence de l’humanité parfaite, ne pouvait être produite
que par l’enthousiasme religieux de la force d’imagination […] Car aussi longtemps que l’homme cherchait en
dehors de soi la nature du divin qu’il porte, grâce à sa nature morale, en soi (sa liberté, son plus grand maître et
juge), afin de la visualiser pour une vénération extérieure. Rien n’était plus apte à développer l’idée de beauté en
lui et de l’enthousiasmer pour l’idéal de celle-ci, qu’une religion, qui était encore tout à fait à la religion de la
force d’imagination, et, sous l’apparence de l’être humain, vénérait la divinité en priant. Sans une telle religion
803
Ibid.: „[…] da sie Bedingungen vorschreibt, und Empfindungen fordert, die der sinlichen Volkommenheit,
also auch der äusseren Schönheit widerstreiten. Ihre Heiligen, ihre Märtirer und Glaubenshelden sind keine
Gegenstände, an denen die Kunst das Ideal der Schönheit darstellen könnte.“
804
RS, III, „Über Rafaels Teppiche“, voir préface: „[…] jener erkünstelte Pietismus, der, durch die Nachäffung
der einfältig-Schwachen und Leichtgläubigen zu erregen sucht, und in den Madonnenbildern, Kruzifixen und
Martern des Katholizismus das Heil der Kunst verkündigt.“
805
Chez Goethe se trouvent aussi des approches similaires pour l’évaluation d’un problème art-religion, qui
reflètent en même temps le canon de base idéologique d’une époque. La question de savoir si Fernow s’inspire
véritablement de la conception de Goethe ne reste ici que pure hypothèse. Pour ce qui est de la contextualiation
des différents points de touche discursifs, spirituels, piétistes tout comme propres à la critique de la religion dans
l’œuvre intégrale de Goethe, voir les études de Johannes Anderegg et Edith Anna Kunz (Éd.): Goethe und die
Bibel, (Arbeiten zur Geschichte und Wirkung der Bibel, vol. 6, Deutsche Bibelgesellschaft), Stuttgart, 2006.
806
Ibid.: „Das Ideal der Schönheit, das in der Erscheinung der Ausdruk vollendeter Menschheit ist, konnte nur
durch religiöse Begeisterung der Einbildungskraft erzeugt werden.“
158
sensuelle, dépourvue du besoin de simulacres humains, l’art grec n’aurait eu aucune incitation à chercher
l’idéal.807
Quels facteurs pourraient donc avoir une incidence négative sur l’enthousiasme de l’artiste?
Étant donné que l’aspiration à l’art repose sur des ambitions nobles, Fernow défend la thèse
que ni la «recherche vaniteuse de gloire»,808 ni «la voie du mérite»809 ne peuvent inspirer
l’activité artistique, mais uniquement l’idée en elle-même et «l’amour de gloire»810 ou
l’aspiration «au vrai mérite.»811 De même, Fernow constate que la force créatrice du génie
dépend a priori de la disposition intérieure de l’artiste:
L’artiste peut se mettre de façon arbitraire et à n’importe quel moment dans un état d’âme qui est nécessaire à
la production d’une œuvre d’art. Il doit être produit par une incitation intérieure ou extérieure en lui […] Où une
telle incitation manque, où l’artiste ne fait que composer un sujet pur d’après des études de la nature, par ci et par
là, où il n’y a pas d’idée enthousiasmante qui unit le divers dans un tout organique, il est possible de produire
une composition conforme aux règles académiques, mais non pas une œuvre de génie […]. Le génie se trouve
aussi longtemps dans l’état enthousiaste que perdurent les idées de son œuvre d’art. Il est alors constamment
effectif, là, où, encore pendant la représentation, de nouvelles idées sont produites, et qui tiennent en élan l’âme
de l’artiste, sans laquelle il ne pourrait pas donner vie à son œuvre.812
807
Ibid., p. 275: „Denn so lange der Mensch das Göttliche, das er kraft seiner moralischen Natur in sich trägt
(seine Freiheit, seinen höchsten Gesezgeber [sic] und Richter), noch als ein Wesen ausser sich suchte, und zur
äusseren Verehrung sichtbar darzustellen strebte, war nichts fähiger die Idee der Schönheit in ihm zu entwickeln
und ihn für das Ideal derselben zu begeistern, als eine Religion, die noch ganz Religion der Einbildungskraft
war, und unter dem Bilde der Menschengestalt die Gottheit anbetend verehrte. Ohne eine solche sinliche
Religion, ohne das Bedürfnis menschlicher Götterbilder, hätte die griechische Kunst keine Veranlassung gehabt,
das Ideal zu suchen.“
808
Ibid., p. 274.
809
Ibid., cf. également l’idée de gloire selon Socrate: „Erst derjenige, der auf den Siegespreis verzichtet,
obgleich er ihn hätte erlangen können, ist der wahre Meister, er steht souverän über der Situation.“ Voir Gernot
Böhme: Der Typ Sokrates [1988], Suhrkamp, Francfort/M., 1992, p. 98.
810
Ibid., p. 274.
811
Ibid. s.
812
Ibid., p. 266 et RS, II, p. 66 s.: Der Künstler kann sich nicht willkürlich und zu jeder Zeit in die Stimmung
versetzen, die zur Hervorbringung eines Kunstwerks erforderlich ist. Sie muβ durch irgendeine innere oder
äuβere Veranlassung in ihm hervor gebracht werden […] Wo eine solche Veranlassung fehlt, wo der Künstler
seinen Stoff bloβ aus Studien nach der Natur von hier und dort zusammenträgt, wo keine begeisternde Idee das
Mannigfaltige in ein Ganzes organisch vereinigt, da kann wohl ein schulgerechte Komposition, aber kein
genialisches Werk entstehen […] Das Genie befindet sich so lange in dem Zustande der Begeisterung, als die der
Ideen zu dem Kunstwerke dauert. Sie ist also da, wo noch wärend der Darstellung neue Ideen erzeugt werden,
fortdauernd wirksam, und erhält das Gemüth des Künstlers im Schwunge, ohne welchen er seinem Werke keinen
wahren Lebensgeist mittheilen kann.
159
Ce qui est également remarquable, c’est qu’Arthur Schopenhauer, le fils de la biographe de
Fernow, Johanna Schopenhauer, va par la suite concevoir un modèle de création artistique
similaire, qui, de toute évidence, porte également l’empreinte de l’influence intellectuelle de
Fernow.813 Or, finalement, la nature de l’art échappe aux possibilités de la connaissance de
l’empirisme humain et du raisonnement philosophique:
[…] il est aussi incompréhensible à la raison pure, comme il [est] inimitable à l’homme ordinaire.814
Par ailleurs Karl Philipp Moritz, se prononce de façon comparable, en définissant cette
inimitabilité du beau comme l’indicible:
des lèvres mortels ne pourraient prononcer aucun mot plus sublime du beau que il est.815
On pourrait également voir cette idée en relation avec le «Je ne sais quoi »816 de François de
la Rochefoucauld. Suivant son raisonnement, la sensation du beau est intuitive et ne peut ni
être expliquée par la raison, ni être saisie de façon objective et, de ce fait, elle est
subjectivement variable. De cet inexplicable du jugement esthétique résulte d’après Fernow
également le magique de l’art, qui offre au spectateur la projection dans une autre réalité:
Ainsi la nature nous a-t-elle donné un talisman infaillible contre les aléas de la réalité, et elle a voulu que nous
égayions les jours maussades de notre existence par des images heureuses. Et qui est si pauvre, qu’il n’aurait pas
une image plaisante, un souvenir consolant en tête?817
Mais il revendique en même temps:
813
Fernow connaît le fils de Johanna Schopenhauer, Arthur, dès sa plus tendre enfance, puisqu’il était un ami
proche de sa mère, à qui il suggère de laisser son fils faire des études de philosophie, vu son talent (qu’il avait
probablement détecté très jeune), et non pas, comme c’était prévu, lui faire suivre une formation académique.
Ainsi la carrière philosophique tardive de Schopenhauer est, de toute évidence, indirectement due à l’influence
bienveillante de Fernow. Dans Die Welt als Wille und Vorstellung Schopenhauer se prononce non seulement sur
la position de Fernow dans la discussion sur le Laokoon, mais ébauche également un idéal de désintérêt
artistique, qui peut tout à fait être vu en analogie des réflexions de Fernow à ce sujet.
814
Ibid., I, p. 262: „[…] dem bloβen Verstande ebenso unbegreiflich, als für den gewöhnlichen Menschen
unnachahmlich [ist].“
815
Cf. Helmut Pfotenhauer: ’Die Signatur des Schönen’ oder In wie fern Kunstwerke beschrieben werden
können? Zu Karl Philipp Moritz italienischer Ästhetik, in idem (Éd.): Kunstliteratur als Italienerfahrung, Éd.
Niemeyer, Tübingen, 1991, ainsi que A. Simonis: ’Das Schöne ist eine höhere Sprache’ - Karl Philipp Moritz’
Ästhetik zwischen Ontologie und Transzendentalphilosophie, in: DVjs (Deutsche Vierteljahrsschrift für
Literaturwissenschaft und Geistesgeschichte, vol. 68), n° 3, ps. 490-505.
816
François de La Rochefoucauld, op. cit.
817
RS, III, V: „So hat die Natur selbst uns in ihr einen unfehlbaren Talisman gegen das Ungemach der
Wirklichkeit mitgegeben, und gewollt dass wir die trüben Tage des Lebens durch frohe Bilder der Vergangenheit
erheitern sollen. Und wer ist so arm, dass er nicht irgend ein freundliches Bild, eine tröstende Erinnerung in petto
hätte?“
160
L’occupation du beau dans l’art, qui nous élève vers un monde idéel, ne doit pas nous rendre indifférent au
monde réel.818
Si Fernow formule ici le postulat d’un art réel, il légitime en même temps le sublime du beau
dans l’art vis-à-vis de la causalité de la nature:
Il [l’art] apparaît comme une nature supérieure […] Cette faculté de l’art, de former des êtres idéaux parfaits et
l’incapacité de la nature d’atteindre ce but aussi par elle-même, est fondée par l’être de la nature tel qu’il est et
celui de l’artiste en tant qu’homme: l’homme est libre, mais la nature est restreinte dans son action, elle dépend
des choses hasardeuses.819
Ainsi l’art offre pour Fernow non seulement l’espace de projection d’un monde idéal, qui est
supérieur à la nature en faisant oublier la tristesse de la vie de tous les jours, mais il est aussi,
d’un point de vue philosophique, la preuve de la liberté de l’homme à travers le miroir de
l’autonomie de l’artiste. Cette approche de Fernow ne dépasse non seulement la juxtaposition
dualiste entreprise par Kant, Schiller, Winckelmann entre l’art et la nature, ainsi que
l’Antiquité et les temps modernes, mais forme également la véritable clef de voûte de son
esthétique idéale, affranchie de tout système. Suivant son raisonnement, l’art, en tant que
représentation idéale, a cessé d’être une représentation fidèle à la nature ou une belle illusion,
mais il est devenu un élément consolidant qui intègre et transgresse toutes les oppositions: une
nature supérieure.
818
Voir pour la présente citation RS, III, préface et JS, p. 342: „Die Beschäftigung mit dem Schönen und der
Kunst, die uns in eine ideelle Welt erhebt, darf uns für die wirkliche nicht versteinern.“
819
RS, I, p. 319: „Sie [die Kunst] erscheint als eine höhere Natur […] Dieses Vermögen der Kunst, idealisch
vollkommene Wesen zu bilden und die Unfähigkeit der Natur, dies Ziel selbst auch zu erreichen, liegt begründet
in dem Wesen der Natur als solcher und des Künstlers als Menschen: der Mensch ist frei, die Natur aber in ihrem
Wirken gehemmt, von Zufälligkeiten abhängig.“
161
IV. Conclusion: L’image idéale de l’Antiquité - un espace utopique des temps modernes?
En tant que théoricien et critique d’art, le personnage de Fernow apparaît sans doute sous une
double lumière se manifestant par un profond ancrage dans la pensée antique, d’un côté, et, de
l’autre, l’ambition de réformer, à partir de Kant, l’idéal classique, en y ajoutant des approches
théoriques nouvelles. Ainsi, on constate un parfait accord par moments entre lui et Kant quant
à la définition du génie artistique, mais également une certaine incongruité quant à la
légitimation objective de l’esthétique transcendantale kantienne, orientée d’abord vers la
faculté de juger esthétique du sujet, que Fernow cherche à légitimer de manière objective.
A la lumière de ses contemporains il opère par la suite, dans le sillage de l’idéalisme
schillérien, ce tournant de la considération subjective à l’objectif, avec le but d’éliminer
l’antagonisme entre le subjectif et l’objectif, et, ce faisant, fonder l’esthétique classiciste
d’autonomie d’une nouvelle façon. De même, la notion fernowienne d’artiste est largement
inspirée de la conception schillérienne, dont il emprunte les moments suivants: l’idée du libre
génie, l’équation entre la faculté de produire et de juger productive, tout comme le principe
de l’enthousiasme de l’artiste, que Fernow base, tout comme Kant, sur la pulsion à la
représentation (pulsion au jeu et à la forme) et sur l’ambition individuelle à l’art (pulsion à la
formation esthétique).
Cependant, Fernow se distancie en même temps de la mission pédagogico-éthique de Schiller,
qu’il considère comme étant une transgression illicite du champ esthétique et donc une
aliénation de l’art. L’art sert, d’après sa conviction, exclusivement à l’épanouissement
individuel et ne peut, par conséquent, pas être subordonné à ces fins collectives destinées à
l’éducation morale.
Par rapport à Winckelmann, on constate en revanche une émancipation de sa pensée ancrée
dans l’héritage antique. Ainsi Fernow considère Winckelmann comme un esprit classique par
162
excellence, mais il s’écarte, en même temps, de son dogmatisme normatif propre à la théorie
de l’art. En s’affranchissant de Winckelmann, il esquisse par ailleurs non seulement une
théorie de l’art idéal, qui se réfère non seulement à l’art, mais aussi à l’artiste à priori. En
libérant ce dernier de façon anarchique à la fois des lois académiques et des conventions
sociales, il le fait consciemment entrer en opposition avec la production d’art de son temps.
Cela devient notamment manifeste dans l’exemple de la déchéance de Carstens. Quant à cela,
il est évident que la publication synchrone de la biographie de Canova peut également être
réduite aux fins de la critique d’art et de l’artiste, étant donné que Fernow développe, à partir
de ces deux portraits d’artiste, une dichotomie opposant nettement le favori de l’académie
devant le génie d’art méconnu, en instrumentalisant en même temps son ami Carstens,
qualifié de génie, comme le porte-parole fictif de ses propres convictions esthético-politiques.
L’identification faite par Fernow de la force créatrice comme étant un élément épigénétique
visant à l’autogenèse de l’artiste, apparaît ainsi non seulement comme la conséquence logique
de sa prise de distance de l’idéal d’art classique ou classiciste, allant de pair avec la quête
d’une nouvelle base de l’idéal de l’art esthétique, qui peut être interprété à la fois comme étant
motivée par la défense de l’héritage classique, tout comme par l’offense du classicisme.
Vu dans l’ensemble, la quête de Fernow d’un nouveau point de fuite dans la production
artistique s’explique par ce redimensionnement des sciences au spectre du rationalisme et de
l’empirisme, qui ne peut être autre que l’homme même. Cette importance, attachée à
l’autoréférentialité de l’artiste, fondée sur le changement de perception, caractérise non
seulement sa compréhension de l’art, mais est également la conséquence d’une évolution
philosophique, voire anthropologique. De même, il reflète dans la théorie de l’art de Fernow
non seulement le cercle d’action pluridisciplinaire des influences postclassiques, mais aussi
des impulsions venant de l’idéalisme allemand et des courants pré-romantiques, ce qui le
caractérise comme un théoricien en avance sur son temps du discours sur l’art autour de 1800.
163
Ce qui est étonnant dans ce contexte, c’est qu’il anticipe non seulement indirectement les
approches de l’esthétique autonome du XXème siècle, mais également que ses idées propres à
la théorie de l’art peuvent être représentées comme le résultat de son émancipation en tant que
théoricien de l’art, car Fernow aspire à dépasser l’homonomie de la pensée antique et
l’hétéronomie de l’esprit du temps classiciste, pour créer un idéal de l’art qui s’oriente
premièrement vers l’autonomie.
Si sa théorie de l’art reste finalement à l’état de genèse, quasiment comme l’esquisse
inachevée de sa conception de l’esthétique idéale, il faut toutefois mettre en relief le fait qu’il
lui revient le mérite de transgresser le postulat d’imitation classiciste en faveur de
l’autonomie créative de l’artiste d’un côté et de renouer, de l’autre, avec l’idéal de l’art
antique, un antagonisme, qui fait justement la spécificité de la théorie de l’art fernowienne.
Or, cela ne devrait pas être vu de façon unilatérale comme reflexe réactionnaire, mais plutôt
comme le résultat de ce processus dialectique, qui contient en lui une dynamique: à savoir
celle de la progression à partir du précédent. C’est justement à travers ce dualisme entre
antique et moderne se manifestant par la quête de l’autonomie esthétique de Fernow, que se
reflète l’idéal de l’art moderne à partir de l’abstraction orientée vers la réalité, la mise en
avant de la valeur symbolique et la quête de l’autoréférentialité. Vu sous cet aspect, il paraît
donc ici tout à fait légitime de considérer l’image idéale de l’Antiquité - non seulement par
rapport aux idées esthétiques de Fernow mais également à l’égard de la production de l’art
contemporain - comme un espace utopique des temps modernes.
164
BIBLIOGRAPHIE
SOURCES820
Œuvres de Carl Ludwig Fernow
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und Kunstfreunde in Rom“, NTM, vol. I, 1796, ps. 233-270.
- „Über die Kunstplünderungen in Italien und Rom“, NTM, vol. III, 1796, ps. 249-280.
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- „Rom, den 7. April 1797“, NTM, vol. II, 1797, ps. 80-82.
- „Rom, den 16ten April 1797“, NTM, vol. II, 1797, ps. 173-176.
- „Die beweglichen Theater des Kurio“, NTM, vol. II, 1797, ps. 307-331.
- „Über den Maler Kavaluzzi“, NTM, vol. II, 1797, ps. 334-338.
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- „Italisches Ausleerungsgeschäft“, NTM, vol. I , 1798, ps. 129-144.
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- „Rom den 14ten April“, NTM, vol. II, 1798, ps. 99-104.
• „Über den gegenwärtigen Zustand der Kunst“, NTM, vol. III, 1798, ps. 279-289.
• „Über den Zweck der bildenden Kunst“, in: Deutsches Magazin [DM], n° 17, 1799, ps. 337-375.
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820
Les références marquées d’un point ont été citées tout au long de notre ouvrage ou présentent, selon l’auteur,
un intérêt particulier pour une étude élargie.
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W. Kolbe“, cahier I-III, vol. 22, n° 5, 1807, ps. 279-285.
- „Den Manen der verewigten Herzogin Anna Amalia“, JDM, vol. 22, 1807, n° 5, S. 279-285.
- „Zoëga’s Sammlung antiker Basreliefs/Zoëga Bassirilievi antichi di Roma, incisi da Piroli“, JDM, vol.
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• „Briefe von Fernow an Böttiger“, NTM, vol. I, 1809, ps. 69-82 et ps. 116-124.
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Weimar, Éd. Wachholtz, Neumünster, 1992.
Antonio Canova
• MUSEO CORRER (Éd.): Antonio Canova, Venice, 2000.
• SKIRA (Éd.): Catalogo della Mostra a cura di Antonio Canova, Mailand, 2003/04 [exposition à
Bassano del Grappa, 22. 11. 2003 - 18. 4. 2004].
CATALOGUES & OUVRAGES ILLUSTRÉS
- ALBRECHT, Jörn (Éd.): Alexander Trippel: (1744-1793) - Skulpturen und Zeichnungen, Éd. Museum
zu Allerheiligen, Schaffhausen, 1993 [exposition du 25. 9. au 21. 11. 1993].
- BAUDOUX, Marc (Éd.) [VASARI, Giorgio:] Catalogue complet des peintures, Éd. Bordas, Paris,
1991.
- BERNHARD, Julia et BAVAJ, Ursula (Éd.): Schadow in Rom: Zeichnungen von Johann Gottfried
Schadow aus den Jahren 1785 bis 1787, Éd. Stiftung Archiv der Akad. Der Künste, 2003.
- BUETTNER, Nils e. HEINEN, Ulrich (Éd.): Peter Paul Rubens: Barocke Leidenschaften, Munich,
2004 [exposition au musée du duc Anton Ulrich à Brunswick, du 8. 8. au 31. 10. 2004].
- BROCKHAUS, Christoph (Éd.): Lehmbruck, Rodin et Maillol, Éd. Wienand, Cologne, 2005
[exposition de la fondation du musée Wilhelm Lehmbruck - centre de la sculpture internationale
Duisbourg, du 25. 9. 2005 au 29. 1. 2006; trad. all. par Susanne Lötscher].
- BUSSAGLI, Marco: L’art de Rome, 2 vol., Éd. Mengès, Paris, 1999.
• CLAIR, Jean (Éd.): Mélancolie - génie et folie en Occident, Éd. Gallimard, Paris, 2005 [exposition au
Grand Palais, Paris, du 10. 10. 2005 au 16. 1. 2006].
• CROOK, John Mordaunt: The Greek Revival, John Murray (Éd.), London, 1972.
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- DI MAIO, Elena, JØRNÆS Bjarne et SUSINI, Stefano: Berthel Thorvaldsen - Scultore danese a
Roma, Éd. de Luca, Rom, 1989/90.
- GALLERIA d’Arte moderna (Éd.): Il nudo fra ideale e realtà - una storia dal neoclassicismo ad
oggi, Bologna, 2004 [exposition du 20. 1. au 9. 5. 2004].
- GREGORI, Mina: Le musée des Offices et le Palais Pitti - la peinture à Florence, Éd. Place des
Victoires, Paris, 2000.
- HEINZ Marianne, EISSENHAUER, Michael et SCHMIDT, Hans Werner (Éd.): 3 x Tischbein und
die europäische Malerei um 1800: [catalogue de l’exposition consacrée à Johann Heinrich Tischbein,
Johann Friedrich August Tischbein et Johann Heinrich Wilhelm dans les musées nationaux, nouvelle
galerie, Kassel, du 1. 12. 2005 au 26. 2. 2006; musée des arts plastiques, Leipzig, 18. 3. - 5. 6. 2006].
- HUBER, Judith: „Ausstellungen deutscher Künstler in Rom“, in: Die Nazarener in Rom. Ein deutscher
Künstlerbund der Romantik, Éd. Galleria Nazionale d’Arte moderna, Rome, 1981.
• HILL, Ann (Éd.): Du Mont’s Bildlexikon der Kunst, Éd. Du Mont, Cologne, 1976 [en édition
allemande par Karin Thomas e. Gerd de Vries].
- MAAZ, Bernhard et BLOCH, Peter (Éd.): Johann Gottfried Schadow und die Kunst seiner Zeit,
Kunsthalle/Staatliche Museen, Düsseldorf/Berlin, 1994 [catalogue d’exposition dans la galerie d’art à
Düsseldorf, du 5. 11. 1994 au 29. 1. 1995, musée national germanique de Nuremberg, du 30. 3. au 18. 6.
1995; exposition des musées nationaux de Berlin, du 14. 7. au 24. 9. 1995].
- MILDENBERGER, Hermann: Johann Heinrich Wilhelm Tischbein: Aquarelle, Gouachen und
Zeichnungen, Stiftung Weimar (Éd.), 2006 [exposition du 7. 4. au 11. 6. 2006, musée du château de
Weimar].
• PETRAKOS , Basileios (e. a.): Nationalmuseum von Athen, Éd. Kleio, Athen, [19811], 1992.
- SAUR (Éd.): Allgemeines Künstlerlexikon, Éd. Saur, München, 1995.
- SCHULZE, Sabine (Éd.): Goethe et die Kunst, Éd. Hatje, Stuttgart, 1994.
- ZÖLLNER, Frank (Éd.): Léonard de Vinci - tout l’œuvre peint et sculpté, Éd. Taschen, Paris, 2003.
* * *