Tartuffe

Transcription

Tartuffe
C
Parcours d’une œuvre
Sous la direction de Michel Laurin
Texte intégral
Tartuffe
DE
MOLIÈRE
Complément pédagogique
MARCEL FORTIN
TARTUFFE DE MOLIÈRE
TEXTE INTÉGRAL
Complément pédagogique
Collection « Parcours d’une œuvre » sous la direction de Michel Laurin
Étude de l’œuvre par Marcel Fortin
© 2003
3281, avenue Jean-Béraud
Laval (Québec) H7T 2L2
Téléphone : (514) 334-5912
1 800 361-4504
Télécopieur : (450) 688-6269
http://www.beaucheminediteur.com
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction, sous quelque forme que ce soit, en
partie ou en totalité, sont réservés pour tous les pays. Entre autres, la reproduction d’un extrait
quelconque de ce livre, par quelque procédé que ce soit, tant électronique que mécanique, en
particulier par photocopie, par numérisation et par microfilm, est interdite sans l’autorisation
écrite de l’éditeur.
LE
Le photocopillage entraîne une baisse des achats de livres, à tel point
que la possibilité pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de
les faire éditer par des professionnels est menacée.
PHOTOCOPILLAGE
TUE LE LIVRE
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme
d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) pour nos activités d’édition.
ISBN : 2-7616-1973-0
Supervision éditoriale : Claude Roussin
1
TARTUFFE
COMPLÉMENT PÉDAGOGIQUE
QUESTIONS SUR L’ŒUVRE
ACTE I
ACTE I, SCÈNE 1
Compréhension
1. a) Les reproches que madame Pernelle, aux vers 7 à 40, adresse aux membres de sa famille
permettent d’esquisser, pour chacun d’eux, un trait de caractère particulier. Résumez en quelques
mots ce trait chez Dorine, Damis, Mariane, Elmire et Cléante.
Selon madame Pernelle, Dorine s’exprime trop familièrement sur des sujets qui ne la concernent pas,
Damis est un imbécile qui risque de devenir délinquant, Mariane, apparemment sage, cache un tempérament de dévergondée, Elmire gaspille l’argent pour satisfaire sa coquetterie et son train de vie mondaine
et Cléante prend des allures de libertin.
b) Que déduisez-vous du caractère de madame Pernelle ?
Madame Pernelle est une vieille acariâtre empêtrée dans des valeurs traditionnelles et rigoristes, qui tient
à imposer sa tyrannie à la famille de son fils.
c) En quoi ses interventions sont-elles comiques ? Justifiez.
Le comique de madame Pernelle réside dans ses interruptions et dans son langage imagé qui cerne en peu
de mots les travers de ses interlocuteurs. Son tempérament bourru et sa gestuelle suscitent aussi la
moquerie.
2. Montrez en quoi la mention du nom de Tartuffe, au vers 41, constitue un ressort dramatique.
La réplique de Damis vient accentuer le conflit entre madame Pernelle et les membres de la famille, qui
ont l’intention de répliquer. Le dialogue qui suit polarise l’action autour de la pertinence de Tartuffe dans
la maison.
3. a) Quelle opinion madame Pernelle a-t-elle de Tartuffe ?
Madame Pernelle est certaine que Tartuffe est un homme de bien dont on doit suivre les maximes.
b) Quelles qualités admire-t-elle chez cet homme ?
Elle admire le rigorisme qu’il impose à la famille, sa piété et son dévouement religieux.
c) Pourquoi les membres de sa famille sont-ils en désaccord avec sa perception ?
Les membres de sa famille ne partagent pas le point de vue de madame Pernelle parce qu’ils ont deviné
l’hypocrisie qui se cache derrière l’apparence de vertu.
d) En quoi cette opposition illustre-t-elle qu’elle appartient à une autre génération ?
Cette opposition illustre que madame Pernelle appartient à une génération où les valeurs religieuses
réelles ou apparentes guident la conduite des gens. Pour cette femme bigote, la présence de Tartuffe est
un gage de salut.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
2
4. a) Montrez en quoi la vie mondaine de la famille indispose madame Pernelle (voir les vers 85
à 92).
La vie mondaine l’indispose, car elle prête le flanc aux ragots qui peuvent ternir la réputation de la
famille.
b) Quelle attitude, qui est à l’opposé de celle de madame Pernelle, Cléante propose-t-il d’adopter
(voir les vers 93 à 102) ?
Cléante propose d’ignorer les ragots et d’adapter une conduite exemplaire.
5. a) Quels sont les traits de caractère mis en valeur dans les portraits de Daphné et d’Orante que
brosse Dorine ?
Selon Dorine, Daphné est une femme dont la conduite libertine ne l’empêche pas de s’adonner à la
médisance. Oronte est une femme âgée qui est devenue prude et rigoriste malgré elle, après avoir joui des
avantages de la coquetterie.
b) À quoi servent ces portraits dans le contexte de la SCÈNE 1 ?
Ces portraits, qui débordent du cadre de la famille, illustrent la critique sociale de Molière à l’égard de
l’hypocrisie et de la calomnie. Brossés par Dorine, ces portraits constituent des arguments en faveur de la
transparence et de la vérité.
6. Quels sont les indices qui permettent de croire que la famille d’Orgon appartient à la grande
bourgeoisie française du XVIIe siècle ?
La tenue vestimentaire d’Elmire est luxueuse selon madame Pernelle. La vie mondaine évoquée par
Mme Pernelle (v. 88-90) suggère des soirées somptueuses.
7. Divisez la SCÈNE 1 en trois parties et donnez un titre à chacune d’elles.
Vers 1 à 40 : Portraits des membres de la famille du point de vue de Mme Pernelle.
Vers 41 à 92 : Portrait de Tartuffe qui suscite la controverse.
Vers 93 à 171 : Portraits de Daphné et d’Oronte pour dénoncer l’hypocrisie.
8. Expliquez pourquoi cette première scène ne peut être considérée comme une scène d’exposition
complète.
Bien que la première scène nous informe de la présence de Tartuffe dans la maison d’Orgon, nous ne
savons encore rien des intentions des deux protagonistes.
9. Quelle est l’utilité dramaturgique de commencer la pièce par une scène de groupe ?
Le fait de commencer la pièce par une scène de groupe permet à l’auteur de créer du rythme et du mouvement tout en présentant les personnages et les liens qui les unissent.
Écriture
10. Relevez, dans les propos des personnages, les expressions qui dénotent le mouvement, au début
de la scène, et qui dispensent l’auteur d’avoir recours à des didascalies.
Les expressions « Vous marchez d’un tel pas » (v. 2), « ne venez pas plus loin » (v. 3), « vous sortez si
vite ? » (v. 6) dispensent l’auteur de préciser que madame Pernelle se déplace rapidement en gesticulant.
11. Montrez en quoi la périphrase « la cour du roi Pétaut », au vers 12, est aussi une métaphore.
Cette périphrase est aussi une métaphore parce qu’elle compare le désordre de la famille à celui qui règne
à la cour du roi des mendiants.
12. Que connote la remarque que madame Pernelle adresse à Dorine aux vers 13 à 15 ?
Cette remarque connote que madame Pernelle, qui s’estime en position d’autorité, veut faire comprendre
à Dorine qu’elle tient des propos inacceptables de la part d’une domestique.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
3
13. Quel procédé comique madame Pernelle emploie-t-elle au vers 16 ? Expliquez-le.
Madame Pernelle emploie le comique de mots en précisant le nombre de lettres du mot « sot », ce qui,
ironiquement, peut connoter que Damis est un petit imbécile sans envergure.
14. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 23.
L’expression proverbiale « il n’est […] pire eau que l’eau qui dort » est une métaphore qui signifie qu’il
faut se méfier des gens discrets, car ils peuvent devenir menaçants.
15. Identifiez et expliquez la figure de style propre à la langue classique au vers 32.
« Quiconque […] n’a pas besoin de tant d’ajustement » est une litote signifiant qu’Elmire aurait intérêt à
porter des vêtements simples et à éviter la coquetterie pour plaire exclusivement à son mari.
16. Identifiez et expliquez la figure de style, qui est, en l’occurrence, un procédé comique, au
vers 34.
« Je vous estime fort […] et vous révère » exprime l’ironie de madame Pernelle à l’égard de Cléante
qu’elle déteste et méprise.
17. Que connotent les expressions « Votre Monsieur Tartuffe », au vers 41, et « ce beau monsieurlà », au vers 48 ?
Ces expressions connotent ironiquement le mépris de Damis à l’égard de l’hypocrite.
18. a) Identifiez et expliquez la figure de style introduite par l’expression « pied plat », au vers 59.
L’expression « pied-plat » est une synecdoque, car elle fait appel à la partie, les chaussures sans talons,
pour désigner le tout, c’est-à-dire le paysan qui les porte.
b) Comparez-la à la figure « n’avait pas de souliers » apparaissant au vers 63.
L’expression est une litote qui signifie que Tartuffe vit dans un grand dénuement.
19. Que connote l’adverbe « céans » aux vers 46, 62, 80 et 147 ?
L’adverbe « céans », qui dénote la maison d’Orgon, connote le caractère inviolable de la propriété que
Tartuffe est en train de parasiter.
20. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au début du vers 71.
Le mot « langue » est une synecdoque faisant appel à une partie, l’organe buccal de Dorine, pour signifier
qu’elle est médisante, qu’elle a une langue de vipère.
21. Identifiez et expliquez la figure de style contenue dans le mot « cœur » apparaissant aux vers 77
et 125.
Dans les deux cas, le nom « cœur » est une synecdoque qui fait appel à l’organe biologique pour désigner
toute la personne. Dans d’autres contextes, le mot peut aussi être une métonymie pour désigner le courage, les sentiments et l’affectivité.
22. Identifiez et expliquez le comique de mots au vers 124.
L’expression « corps défendant » signifiant malgré elle, crée une opposition entre la pudeur et le désir de
plaire.
23. Identifiez et expliquez les deux figures de style que contient le vers 140.
L’expression « penchant de l’âge » est une métaphore où la vieillesse est comparée à un déclin, à une
pente vers la mort ; le verbe « sevré » est aussi une métaphore où la personne a été privée de désirs
comme l’enfant que l’on cesse d’allaiter.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
4
24. Qu’ont de comique et de paradoxal, dans la bouche de madame Pernelle, les vers 142 et 143, de
même que les vers 161 et 162 ?
Dans les vers 142 et 143, madame Pernelle déplore qu’elle soit forcée de se taire alors qu’elle entame une
longue tirade ; dans les vers 161 et 162, elle critique le babillage de chacun auquel elle participe
allègrement.
25. Quel procédé comique est exploité à la fin de la SCÈNE 1 ? Expliquez en comparant les derniers
vers aux premiers.
Le soufflet de madame Pernelle à Flipote est un comique de geste. Frustrée de la tournure de la situation,
elle s’en prend à sa servante qui s’ennuie du radotage de sa patronne. Le vers 171 fait écho au premier
vers en suggérant l’idée de mouvement et de poursuite des deux femmes.
ACTE I, SCÈNES 2 ET 3
Compréhension
1. Identifiez les traits de caractère d’Orgon révélés par Dorine avant et après qu’il eut rencontré
Tartuffe.
Selon Dorine, Orgon a fait preuve de sagesse et de courage pour servir le roi pendant la Fronde ; en
revanche, depuis qu’il a rencontré Tartuffe, il est devenu stupide et entêté (v. 181-184).
2. a) Quelles sont les expressions, dans le portrait que brosse Dorine à la SCÈNE 2, qui révèlent
l’hypocrisie de Tartuffe ?
Les expressions « cent dehors fardés » (v. 200), « cagotisme » (v. 201) et « sermonner avec des yeux
farouches » (v. 205) révèlent l’hypocrisie de Tartuffe.
b) Quel trait de caractère précis est mis en relief par Dorine aux vers 205 à 210 ?
Les vers 205 à 210 révèlent le rigorisme et l’intransigeance de l’imposteur.
3. Quelle demande Damis fait-il à Cléante à la SCÈNE 3 ?
Damis demande à Cléante de s’informer auprès de son père de ses intentions concernant le mariage de
Mariane et de Valère.
Écriture
4. Quelle est la connotation des vers 189 et 190 ?
L’affection démesurée d’Orgon pour Tartuffe connote son aveuglement et pourrait sous-entendre une
attirance homosexuelle.
5. Pourquoi Molière a-t-il inséré une didascalie après le vers 194 ?
La didascalie « C’est une servante qui parle » justifie la trivialité des propos dont le verbe « roter » est
plus acceptable dans la bouche d’une domestique.
6. a) Identifiez et expliquez les deux figures de style apparaissant aux vers 197 et 198.
Les noms « miracles » et « oracles » sont des métaphores, car les actions et les mots de Tartuffe sont
respectivement comparés à des actes prodigieux, voire surnaturels, et à des paroles prophétiques.
b) Précisez leur connotation.
Ces deux métaphores connotent le pouvoir de Tartuffe qui est semblable à celui du Christ ou d’un saint
aux yeux d’Orgon.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
5
ACTE I, SCÈNE 4
Compréhension
1. Pourquoi Cléante reste-t-il silencieux pendant presque toute la scène ?
Cléante reste silencieux, d’une part, pour apprécier l’ironie ou le cynisme de Dorine à l’égard d’Orgon et,
d’autre part, pour observer la justesse des observations de Dorine sur son maître.
2. Analysez cette scène en faisant ressortir l’attachement excessif d’Orgon pour Tartuffe et son
désintérêt envers sa propre femme.
Loin de s’enquérir de la santé d’Elmire qui a éprouvé des malaises, Orgon s’informe de l’état de Tartuffe
dont la santé fait contraste avec celle de la maîtresse de maison. La répétition de la question « Et
Tartuffe ? » suivie du commentaire « Le pauvre homme ! » montre qu’Orgon banalise les maux de sa
femme et, qu’en revanche, il plaint son invité de n’avoir pas profité d’un confort si douillet avant
aujourd’hui.
Écriture
3. À partir de quels procédés comiques est construite cette scène ? Expliquez et justifiez leur
efficacité.
Le comique de situation apparaît dans le contraste entre la maladie d’Elmire, banalisée par Orgon, et le
confort de Tartuffe, qui ne convient pas à un homme prônant l’ascétisme comme règle de vie.
Les répliques d’Orgon constituent un procédé de répétition de mots qui illustre un comique de caractère
axé sur l’aveuglement.
Dorine a recours à l’ironie en employant les expressions « fort dévotement » et « La part que vous prenez
à sa convalescence » ; elle parodie de manière irrespectueuse le sacrement de l’eucharistie en associant les
« quatre grands coups de vin » au « sang qu’avait perdu madame » lors de la saignée (v. 254 et 255).
4. Identifiez et expliquez la figure de style sur laquelle est construit le propos de Dorine.
En opposant le malaise d’Elmire au bien-être de Tartuffe, Dorine construit les deux portraits sur
l’antithèse.
5. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 242.
L’expression « fermer […] la paupière » est une synecdoque où le singulier désigne le pluriel ; on peut
aussi considérer l’expression comme une périphrase atténuée du verbe dormir.
ACTE I, SCÈNE 5
Compréhension
1. a) Relevez, dans les deux tirades de Cléante (vers 318 à 345 et vers 351 à 407), les mots et les
expressions empruntés au champ lexical de la vue ou du regard.
Le champ lexical de la vue ou du regard comprend les mots et expressions suivants : « aveugle » (v. 319),
« avoir de bons yeux » (v. 320), « le Ciel voit » (v. 324), « on ne voit pas » (v. 327), « je ne vois »
(v. 355), « ne vois-je rien » (v. 359), « faux clins d’yeux » (v. 368), « qu’on voit » (v. 369), « on en voit
trop paraître » (v. 381), « en expose à nos yeux » (v. 383), « Regardez » (v. 385), « On ne voit point en
eux » (v. 389), « On les voit » (v. 398) et « je vous crois ébloui » (v. 407).
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
6
b) Montrez comment ils contribuent à structurer l’argumentation du personnage.
La récurrence du verbe « voir » dans les deux tirades de Cléante met en relief la nécessité d’un regard
éclairé et perspicace qui sait discerner le vrai du faux.
2. a) Dans la deuxième tirade de Cléante, aux vers 351 à 407, faites ressortir les attitudes des faux
dévots qui pourraient s’appliquer au portrait de Tartuffe qu’Orgon et Dorine ont brossé
précédemment.
Les expressions « dévots de place » (v. 361), « élans affectés » (v. 368), « brûlants et priants » (v. 371),
« prêchant la retraite » (v. 372) s’appliquent aux attitudes adoptées par Tartuffe.
b) Relevez aussi des indices de comportements qui pourraient annoncer une menace éventuelle
pour la famille d’Orgon.
Les expressions « fier ressentiment » (v. 376), « âpre colère » (v. 377), « prennent contre nous des
armes » (v. 378), « assassiner » (v. 380) évoquent la violence et la fureur dont sont capables les faux
dévots et préfigurent la vengeance de Tartuffe.
3. Pourquoi Orgon reste-il évasif dans ses réponses concernant le mariage de Valère et Mariane ?
Orgon est évasif parce qu’il a déjà en tête l’idée de marier Mariane à Tartuffe, ce que confirmera la
première scène de l’ACTE II.
4. Montrez en quoi Cléante apparaît, dans cette scène, comme le porte-parole des idées de Molière
sur les dévots en particulier et sur la religion en général.
Cléante peut apparaître comme le porte-parole des idées de Molière par son respect de la vraie dévotion et
l’éloge qu’il tient à l’égard des dévots véritables dont les attitudes empreintes d’humilité et de charité sont
en accord avec les valeurs chrétiennes.
Écriture
5. Identifiez et expliquez les figures de style récurrentes qu’emploie Cléante pour appuyer son
argumentation, plus précisément aux vers 331 à 338.
Pour appuyer son argumentation contre les faux dévots, Cléante a recours à l’antithèse où il oppose
« l’hypocrisie et la dévotion » (v. 332), « masque » et « visage » (v. 334), « l’artifice » et « la sincérité »
(v. 335), « l’apparence » et « la vérité » (v. 336), « le fantôme » et « la personne » (v. 337), « la fausse
monnaie » et « la bonne » (v. 338) ; ces antithèses illustrent le discernement de Cléante qui n’est pas dupe
des faux-semblants.
6. Identifiez et expliquez le procédé comique auquel ont recours Orgon et Cléante aux vers 346
à 352.
Le procédé comique auquel a recours Orgon aux vers 346 et 347 est l’ironie, car il se moque de son beaufrère dont il n’apprécie pas la leçon ; dans les vers 351 et 352, Cléante emploie le comique de répétition
de mots pour tourner en dérision l’ironie d’Orgon.
7. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 361.
L’expression « francs charlatans » est un oxymore, car, par définition, un charlatan est un faux médecin,
un imposteur.
8. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 372.
L’expression « prêchant la retraite au milieu de la cour » est une antithèse qui met en opposition l’action
de prôner la prière et la méditation à la cour du roi où abondent les plaisirs et les mondanités.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
7
9. a) À quelles figures de style classiques a recours Cléante pour décrire les véritables dévots aux
vers 387, 388, 389, 391, 397, 399 et 401 ?
Dans ces vers, Cléante a recours à la litote grâce à l’usage de propositions négatives : « Ce ne sont point
du tout » (v. 388), « On ne voit point » (v. 389), « Jamais […] ils n’ont d’acharnement » (v. 399), « Et ne
veulent point prendre » (v. 401).
En employant la négative pour évoquer les attitudes des vrais dévots, Cléante les oppose aux faux dévots
qui, eux, sont « fanfarons de vertu » (v. 388), « censurent […] nos actions » (v. 391), suivent la « cabale »
et les « intrigues » (v. 397).
b) Expliquez l’effet que ces figures produisent en les comparant aux figures de style baroques
désignant les faux dévots aux vers 361, 362, 371, 372, 378 et 380.
Ces litotes produisent un effet d’antithèse avec les hyperboles désignant les faux dévots comme des êtres
excessifs : « dévots de place » (v. 361), « sacrilège et trompeuse grimace » (v. 362), « brûlants et priants »
(v. 371), « prêchent la retraite au milieu de la cour » (v. 372), « prennent contre nous des armes » (v. 378)
et « Veut nous assassiner avec un fer sacré » (v. 380).
Synthèse de l’ACTE I
1. À la lumière du principe voulant qu’au théâtre un personnage se révèle parfois par ce que les
autres disent de lui, brossez un bref portrait du personnage absent et controversé qu’est Tartuffe.
À la lumière des interventions des personnages, Tartuffe est un personnage qui ne fait pas l’unanimité.
Vénéré et adulé par Orgon et madame Pernelle pour ses vertus chrétiennes, il est, en revanche, conspué
par les autres membres de la famille qui ont perçu en lui un parasite dangereux et un hypocrite opportuniste et vaniteux.
2. Entre le point de vue de madame Pernelle et d’Orgon, d’une part, et celui des autres membres de
la famille, d’autre part, lequel vous semble le plus crédible ? Justifiez.
Le point de vue des autres membres de la famille est plus crédible, car il fait preuve de nuance, de
vigilance et de distance critique à l’égard du comportement de Tartuffe. Le point de vue d’Orgon et de
madame Pernelle, trop dogmatique et excessif, ne peut susciter l’adhésion du spectateur.
3. À la lumière des propos tenus par madame Pernelle et Orgon à l’ACTE I, faites le portrait de
chacun d’eux en démontrant qu’ils se ressemblent dans leur aveuglement, dans leur désir de servir
une grande cause et d’abandonner leur pouvoir et leurs responsabilités.
Madame Pernelle et son fils Orgon sont tous deux prisonniers des valeurs rigoristes d’un catholicisme
conservateur. Ils sont sensibles aux apparences de la vertu, et, à cet égard, ils sont dupés par la mascarade
que Tartuffe leur propose. Pour madame Pernelle, l’arrivée de Tartuffe est l’occasion de remettre la
famille dans le droit chemin des vertus chrétiennes ; pour Orgon, impuissant à assurer le leadership en
matière de spiritualité, la présence du directeur de conscience dans sa maison lui permet d’abdiquer son
rôle de patriarche et d’apaiser ses angoisses métaphysiques.
4. À la fin de l’ACTE I, peut-on affirmer que l’exposition est complétée ? Justifiez.
Non. À la fin de l’ACTE I, les deux camps sont bien divisés, Orgon bien campé dans son aveuglement,
Tartuffe suffisamment décrit pour qu’on sente poindre la menace éventuelle. Même si l’intervention de
Cléante sur le mariage de Valère et de Mariane montre l’hésitation d’Orgon, il faut attendre l’ACTE II, qui
confirmera la menace réelle pour Mariane, et l’ACTE III, qui concrétisera le danger véritable que représente Tartuffe pour Elmire et Orgon.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
8
ACTE II
ACTE II, SCÈNES 1 ET 2
Compréhension
1. a) Pourquoi Orgon veut-il parler en secret à Mariane ?
Orgon veut parler en secret à Mariane pour lui faire part, en privé, de ses intentions de la marier à
Tartuffe, reniant ainsi sa parole.
b) Que connote la didascalie du vers 428 ?
La didascalie « Il regarde dans un petit cabinet » connote la méfiance d’Orgon, sa crainte d’être espionné
par les membres de sa famille. Sur le plan dramatique, elle prépare la scène où Damis s’enfermera dans le
cabinet pour épier Tartuffe et Elmire (ACTE III, SCÈNE 3).
2. Quel trait de personnalité caractérise Mariane dans cette première rencontre avec son père ?
Justifiez.
Dans cette première rencontre avec Orgon, Mariane apparaît comme une fille soumise à son père et prête
à lui obéir en toute occasion. Bien qu’elle refuse sa proposition d’épouser Tartuffe, elle n’a pas la force de
lui tenir tête.
3. a) Quelles motivations, conscientes ou inconscientes, poussent Orgon à marier sa fille à Tartuffe ?
La motivation qui pousse Orgon à marier sa fille à Tartuffe est l’intérêt que représente le fait d’avoir un
directeur de conscience comme gendre. Par le fait qu’il prononce lui-même les paroles qu’il souhaiterait
entendre de la bouche de Mariane, on peut soupçonner le désir inconscient d’Orgon de s’unir lui-même de
façon matrimoniale avec Tartuffe.
b) Montrez en quoi cette façon de faire était socialement acceptable à l’époque.
Les mœurs de l’époque autorisaient un père à marier sa fille à un parti de son choix, surtout lorsque celuici présentait un avantage social, comme celui d’être directeur de conscience.
c) Montrez en quoi elle est moralement discutable dans le contexte.
Elle est moralement discutable non pas parce qu’elle est imposée à Mariane et va contre ses désirs et son
bonheur, mais parce que Tartuffe est soupçonné d’imposture. De plus, pour Dorine, cette alliance entre
deux êtres si opposés ne peut que conduire au cocuage, c’est-à-dire au désastre.
4. Montrez en quoi ce mariage avec Mariane peut présenter un intérêt pour Tartuffe.
Ce mariage offre à Tartuffe l’occasion de s’incruster légalement dans la famille et d’accéder à la grande
bourgeoisie, ce qui représente une ascension sociale considérable compte tenu de ses origines de roturier.
5. Si ce mariage est, a priori, socialement acceptable, pourquoi Dorine le désapprouve-t-elle ?
Relevez les arguments qu’elle fait valoir pour convaincre Orgon de renoncer à son projet.
Dorine désapprouve ce mariage pour plusieurs raisons :
1- Un bigot ne peut convenir à une grande bourgeoise comme Mariane (v. 480) ;
2- Cette alliance avec un gueux ne rapporte rien à Orgon (v. 482-483) ;
3- Tartuffe montre des contradictions par sa dévotion affichée et sa prétention à la noblesse (v. 495-500) ;
4-L’union entre Mariane et Tartuffe est une mésalliance dont les conséquences seront la perte de la vertu,
le cocuage (v. 503-512) ;
5- Orgon rendra compte à Dieu de l’adultère de sa fille (v. 513-517).
6. Selon Orgon, pourquoi Valère ne représente-t-il pas un époux convenable pour Mariane ?
Valère est attiré par les jeux de hasard, selon Orgon, qui ne le voit jamais à l’église et qui « le soupçonne
encor d’être un peu libertin » (v. 524).
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
9
7. Quelles qualités de Tartuffe Orgon souligne-t-il pour persuader Mariane de l’épouser,
démolissant ainsi les arguments de Dorine ?
Tartuffe sera bienveillant, comblera tous les désirs de Mariane et sera un époux tendre, affectueux et
fidèle ; ce mariage sera empreint d’innocence et d’harmonie. Mariane pourra même manipuler Tartuffe à
son gré (v. 531-536).
8. Pourquoi Mariane reste-t-elle muette pendant toute la SCÈNE 2 ? Que révèle ce silence ?
Mariane reste muette pendant la scène parce qu’elle est soumise à son père qui a un réel « empire » sur
elle. Ce silence révèle son impuissance et son désir de s’abandonner à Dorine pour défendre sa cause.
9. Bien que Dorine ait réussi à mener le jeu par lequel elle a épuisé Orgon et attisé sa colère, peut-on
affirmer qu’elle a mieux atteint son objectif que Cléante ? Justifiez.
Malgré ses arguments et son insolence qui va jusqu’à épuiser Orgon, Dorine ne parvient pas à dissuader
son maître de renoncer au mariage de Mariane et Tartuffe. Orgon sort pour se calmer, mais il a l’intention
de réaliser son projet (v. 580-584).
Écriture
10. Identifiez et expliquez les procédés comiques exploités dans la SCÈNE 1.
On retrouve deux types de procédés comiques.
Le comique de situation : Orgon prête à Mariane les sentiments qu’il éprouve pour Tartuffe, et celle-ci
feint de ne pas comprendre.
Le comique de mots : Orgon fait la déclaration à la place de Mariane, lui met les mots dans la bouche
(v. 442-444) ; Mariane reprend en écho les paroles d’Orgon sous forme de questions (v. 446-448).
Les questions laconiques sans réponses (v. 445) pourraient amorcer un quiproquo.
11. Relevez et expliquez les figures de style qu’emploie Dorine aux vers 495 à 500.
Dorine a recours à l’antithèse en opposant la vanité à la piété, la dévotion à l’ambition ; la métaphore
« embrasse » (v. 497) suggère que l’innocence est comme une maîtresse que Tartuffe veut étreindre ; les
litotes « ne sied pas bien » (v. 496), « Ne doit point tant prôner » (v. 498) et « Souffre mal » (v. 500) soulignent l’incompatibilité, voire l’incongruité, de la vie dévote avec le prestige de la noblesse.
12. Précisez la connotation des deux pronoms personnels employés au vers 504.
Le pronom « elle », dénotant Mariane, connote le prestige de sa classe sociale de bourgeoise ; le pronom
« lui », désignant Tartuffe, connote le mépris de Dorine pour sa personne.
13. a) Relevez, identifiez et expliquez les figures de style récurrentes qu’emploie Dorine pour
évoquer l’adultère éventuel de Mariane.
Pour évoquer l’adultère éventuel de Mariane, Dorine a recours à l’euphémisme dans les expressions « on
risque la vertu » (v. 507) signifiant qu’on l’expose aux occasions de péchés, « on montre au doigt le
front » (v. 511), « Il est bien difficile enfin d’être fidèle » (v. 513), une litote signifiant qu’il est impossible d’être fidèle, c’est-à-dire que Mariane va inévitablement tromper son mari, et « des fautes qu’elle
fait » (v. 516) désignant les péchés de la chair qu’elle commettra.
b) Ces procédés de rhétorique respectent-ils la règle de la bienséance à laquelle doit se conformer
une pièce classique ? Justifiez.
Ces procédés respectent la bienséance classique puisqu’ils suggèrent à demi-mot l’adultère sans décrire
explicitement l’acte.
14. Que connote l’argument invoqué par Dorine aux vers 539 et 540 ?
En évoquant l’influence de l’astrologie sur la destinée de Tartuffe, Dorine fait preuve de superstition.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
10
15. Faites ressortir les procédés comiques exploités dans la deuxième partie de la SCÈNE 2, c’est-àdire à partir du vers 541 jusqu’à la fin, et montrez que la situation tourne à la farce.
Le comique de situation réside dans le fait qu’une servante donne la leçon à son maître au point de le
mettre en colère et de le forcer à sortir. Le ton d’Orgon est agressif à l’égard de Dorine mais complaisant
avec Mariane. L’attitude insolente de Dorine fait ressortir le comique de caractère chez Orgon, dont la
colère le rend ridicule et le met en contradiction avec ses prétentions d’homme dévot : « Ah ! vous êtes
dévot, et vous vous emportez ? » (v. 552). Le comique de mots apparaît dans les nombreuses interruptions
de Dorine dont l’ironie de ses faux apartés : « c’est un beau museau » (v. 560), « La voilà bien lotie ! »
(v. 562) ; le recours à la prétérition : « Je ne vous parle pas » (v. 568), « Je n’ai rien à me dire » (v. 574).
Cette gymnastique verbale est, bien sûr, associée au comique de gestes inspiré de la farce, comme le
silence de Dorine lorsque Orgon se tourne vers elle pour la gifler, et le soufflet manqué d’Orgon.
ACTE II, SCÈNES 3 ET 4
Compréhension
1. a) Montrez en quoi les reproches que Dorine adresse à Mariane, aux vers 585 à 608, sont justifiés.
Les reproches de Dorine sont justifiés, car Mariane est restée soumise à l’autorité de son père et n’a
invoqué aucun argument pour refuser le mariage avec Tartuffe.
b) Que dénotent les réponses de Mariane à ces reproches ?
Les réponses de Mariane dénotent son ingénuité et son impuissance à l’égard d’« un père absolu » contre
lequel elle n’ose s’opposer.
2. a) Montrez en quoi le sort de Mariane apparaît dramatique.
Le sort de Mariane est dramatique, car elle doit se plier à la volonté de son père et accepter un mariage
qui la rebute.
b) Montrez comment son sort passe du dramatique au tragique.
Son sort tourne au tragique lorsqu’elle envisage le suicide pour échapper au mariage forcé.
3. Quelle autre stratégie emploie Dorine, aux vers 636 à 674, pour convaincre Marianne de s’opposer au mariage que lui impose son père ?
Pour persuader Mariane de s’opposer au mariage, Dorine a recours à l’ironie ou à l’antiphrase, c’est-àdire à l’argumentation inverse qu’elle a servie à Orgon à la SCÈNE 2. Elle vante les mérites de Tartuffe et
les avantages du mariage avec lui alors qu’elle en pense tout le contraire.
4. La stratégie de Dorine donne-t-elle les résultats escomptés ? Justifiez.
Non, car Mariane retombe dans ses excès et sa tendance suicidaire. Elle continue à jouer son rôle de
victime tragique (v. 675-682).
5. a) Pourquoi Dorine reste-t-elle muette pendant presque toute la première moitié de la SCÈNE 4 ?
Dorine reste muette pour jouer le rôle d’une spectatrice devant la scène de dépit amoureux. Elle prend
plaisir à voir Mariane et Valère jouer les amants offensés.
b) Sa réplique, au vers 704, peut-elle être considérée comme un aparté ? Justifiez.
Oui, la réplique au vers 704 peut être considérée comme un aparté, car Dorine se parle à elle-même sans
que Mariane et Valère l’entendent.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
11
6. a) Montrez en quoi cette première partie de la SCÈNE 4 peut apparaître comme une comédie dans
la comédie, c’est-à-dire un jeu que jouent Mariane et Valère. Expliquez.
La première partie de la SCÈNE 4, jusqu’à la réconciliation des amants (v. 791), apparaît comme une
comédie que jouent Mariane et Valère, parce que l’un et l’autre n’expriment pas leurs véritables sentiments et tentent réciproquement de se mettre à l’épreuve. Le fait d’être observés par Dorine peut les
conforter dans leur rôle d’amants éconduits et les amener à espérer l’intervention de la servante pour
interrompre le jeu.
b) Quels traits de caractère des deux amants cette comédie du dépit amoureux laisse-t-elle voir à
Dorine et aux spectateurs ?
Le trait de caractère des deux amants est l’orgueil ou l’amour propre.
7. a) Quel stratagème Dorine propose-t-elle d’abord à Mariane ?
Dorine propose à Mariane de faire semblant de rester soumise à son père et de gagner du temps en
prétextant la maladie ou en évoquant quelques superstitions. Il est important surtout que les amants ne
soient pas vus ensemble (v. 795-810).
b) Quel conseil donne-t-elle à Valère pour éviter le mariage imposé par Orgon ?
Elle recommande à Valère d’avoir recours à l’aide de ses amis pour obtenir la promesse de mariage
qu’Orgon lui a faite.
8. a) Montrez en quoi, à l’ACTE II, Dorine est véritablement le moteur de l’action.
Dorine est le moteur de l’action, car c’est elle qui prend l’initiative auprès d’Orgon pour le convaincre de
renoncer au mariage forcé et auprès de Mariane, pour la forcer à réagir contre son père. Elle fait front
commun avec les amants contre Orgon.
b) Ses interventions auprès d’Orgon, puis auprès de Mariane ont-elles fait progresser l’action ?
Justifiez.
Ses interventions auprès d’Orgon et de Mariane n’ont aucunement fait progresser l’action, car le père est
sorti plus déterminé que jamais d’imposer le mariage à sa fille. De plus, le stratagème de Dorine ne sera
d’aucune utilité.
9. Comparez le portrait que Mariane a révélé d’elle-même à l’ACTE II avec celui que sa grand-mère,
madame Pernelle, a esquissé d’elle à l’ACTE I, vers 21 à 24. Quelles ressemblances et quelles
différences constatez-vous ?
À l’ACTE II, Mariane s’est révélée une jeune fille timide vis-à-vis son père mais portée sur les excès. Sa
grand-mère a vu juste en la décrivant comme une personne qui feint la réserve et la discrétion. En effet,
Mariane, par sa démesure, est une femme impétueuse et prête aux manigances ou « ressorts » (v. 794) de
Dorine pour contrer le mariage avec Tartuffe.
Écriture
10. Identifiez et expliquez la figure de style et le procédé comique qu’emploie Dorine aux vers 615
à 617.
Dorine a recours à l’ironie, car elle critique le suicide éventuel de Mariane comme moyen d’éviter le
mariage forcé.
11. a) Relevez et expliquez, dans les propos de Mariane, les mots et les expressions hyperboliques.
Les hyperboles « ouvert cent fois mon cœur » (v. 603), « me donner la mort » (v. 614) et « aux déplaisirs
des gens » (v. 620) dénotent la tendance de Mariane à exagérer ses actes et son sort.
b) Que connote l’usage de ces hyperboles dans le contexte ?
Ces hyperboles connotent son désir d’attendrir Dorine en jouant la victime d’une tragédie dont elle parodie le rôle.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
12
12. Identifiez et expliquez les procédés comiques qui soutiennent la stratégie de Dorine aux vers 636
à 674.
Les procédés qui soutiennent la stratégie relèvent du comique de mots dont l’ironie, car Dorine exprime le
contraire de sa pensée quant au mariage de Mariane et de Tartuffe. Après avoir tourné en dérision la vie
de province qui attend Mariane (v. 656-667), elle a recours à l’expression équivoque « vous en tâterez »
(v. 672) et termine avec une condamnation percutante : « vous serez […] tartuffiée » (v. 674) qui devrait
atterrer Mariane déjà au supplice.
13. Expliquez la connotation des mots « coche », « siège pliant », « grand’bande », « musettes » et
« Fagotin » dans la réplique où Dorine évoque la vie de femme mariée qui attend Mariane. Voir les
vers 657 à 666.
Ces mots auxquels a recours Dorine, dans l’évocation de la vie provinciale qui attend Mariane après son
mariage avec Tartuffe, connotent l’absence de confort, la monotonie de la vie sociale et la médiocrité de
la vie culturelle.
14. a) Identifiez et expliquez le comique de mots qui se trouve aux vers 672 et 674.
L’expression « vous en tâterez » relève du comique de mots à cause de l’ambiguïté entre le sens propre
(vivre l’expérience) et le sens figuré (toucher physiquement).
b) Compte tenu du contexte, que connote le néologisme « tartuffiée » ?
Le néologisme « tartuffiée » dénote que Mariane sera trompée, cocufiée par Tartuffe, ce qui est paradoxal
puisque Dorine a laissé croire à Orgon que Mariane serait disposée à commettre l’adultère. Dans le contexte, on peut saisir que Tartuffe la trompera comme il trompe tout le monde par son hypocrisie.
15. Identifiez et expliquez les procédés comiques exploités dans la première partie de la scène 4, puis
dans la deuxième partie, au moment où Dorine intervient pour réconcilier les amants, c’est-à-dire à
partir du vers 753. Portez une attention particulière aux didascalies.
La première partie a recours à un comique de situation où les amants se méprennent sur leurs véritables
sentiments. Le comique de mots fait usage de répétitions : « Quoi ? sérieusement ? Oui, sérieusement. »
(v. 691), de réponses laconiques et de stichomythies (v. 698-703). Le langage noble et soutenu de Valère,
dans un style cornélien, frôle la parodie des tragédies (v. 722-740). Le comique de gestes réside dans les
mouvements et déplacements qui accompagnent les répliques : les didascalies des vers 744 et 751 illustrent l’hésitation de Valère.
La deuxième partie, s’amorçant avec l’intervention de Dorine qui entend réconcilier les amants (v. 753),
offre un comique de situation et de gestes par la résistance que Valère et Mariane font semblant d’opposer
à la servante. La course de Dorine vers Mariane, puis vers Valère, crée un ballet symétrique (didascalies
des vers 763, 766 et 768). On observe aussi une contradiction entre les paroles et les gestes, alors que
Valère et Mariane disent douter de l’utilité de se réconcilier tout en donnant leur main à Dorine. En prenant la servante comme témoin de leur dispute, les deux amants poursuivent le jeu de leurs enfantillages.
16. a) Faites ressortir, dans les répliques de Mariane et de Valère, aux vers 693 à 753, les mots et les
expressions du langage galant, voire précieux, et précisez comment ils contribuent à amplifier le
caractère dramatique de la situation.
Dans les vers 693 à 753, Mariane et Valère s’accusent mutuellement de ne pas éprouver de sentiments
l’un pour l’autre dans un langage galant qui a recours aux figures d’atténuation comme la litote : « Vous
n’aurez pas grand peine à le suivre » (v. 700), « La perte n’est pas grande » (v. 727), « cette lâcheté
jamais ne se pardonne » (v. 733) ; l’euphémisme : « Et j’en sais de qui l’âme […] ma perte » (v. 725726), « Un cœur qui nous oublie engage notre gloire » (v. 730), « Et je voudrais déjà que la chose fût
faite » (v. 742). En revanche, l’usage d’expressions comme « les ardeurs de ma flamme » (v. 738), « Qui
contraignez mon cœur à cet effort extrême » (v. 746), « Vous me voyez, c’est pour toute ma vie » (v. 750)
amplifie le ressentiment que les amants tentent de dissimuler.
b) Comparez ce langage à celui utilisé aux vers 788 à 791.
Après s’être disputés de manière polie et civilisée tout en refoulant leurs véritables sentiments pour sauver
la face, Valère et Mariane, que Dorine vient de réconcilier, s’insultent réciproquement en se traitant de
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
13
« méchante » (v. 789) et d’« homme le plus ingrat » (v. 791). Paradoxalement, ces insultes lancées ironiquement sous forme de fausses questions, après la réconciliation, dédramatisent, voire banalisent, la scène
de dépit amoureux dans laquelle les amants se sont complu.
Synthèse de l’ACTE II
1. Au cours de l’ACTE II, les personnages ont continué à dépeindre Tartuffe, qui ne s’est pas encore
présenté sur scène. Faites ressortir les traits mis en valeur et montrez en quoi ils contribuent à
susciter l’intérêt du spectateur.
Au cours de l’ACTE II, Orgon a vanté à Mariane les qualités de Tartuffe comme mari, alors que Dorine a
mis en valeur ses contradictions d’homme, à la fois dévot et vaniteux, qui risque de tromper Mariane.
Après le portrait excessivement élogieux de Tartuffe par madame Pernelle et Orgon, et la charge des
autres membres de la famille, qui ont pourfendu le parasite, le spectateur éprouve déjà une réelle antipathie à l’égard du personnage, et son intérêt consistera à mesurer la performance du héros dans l’art de la
manipulation et de la duplicité.
2. À la fin de l’ACTE II, peut-on enfin affirmer que l’exposition est achevée ? Justifiez.
Non, car l’ACTE II n’a pas suffisamment fait progresser l’action. Même si on se doute qu’Orgon est sorti
plus déterminé que jamais à conclure le mariage de Mariane et de Tartuffe, on ne connaît pas encore les
vraies intentions de ce dernier à ce sujet. En revanche, on soupçonne son désir de s’incruster dans la
famille par tous les moyens.
3. Démontrez que l’ACTE II est indispensable à la progression de l’action.
L’ACTE II est indispensable à la progression de l’action parce qu’il clarifie les véritables intentions
d’Orgon (demeuré évasif à la fin de l’ACTE I), à l’égard du mariage forcé et son corollaire, le mariage
contrarié. De plus, il permet aux amants et à Dorine de faire front commun contre la menace qui plane
non seulement sur le couple, mais sur toute la famille.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
14
ACTE III
ACTE III, SCÈNES 1 ET 2
Compréhension
1. a) Quels traits de caractère Damis montre-t-il en présence de Dorine ?
Venant d’être informé sur les intentions de son père de marier Mariane à Tartuffe, Damis se montre colérique et agressif à l’égard de l’hypocrite ; son entêtement à vouloir assister à l’entretien d’Elmire et de
Tartuffe donne l’image d’un enfant terrible et espiègle.
b) Montrez en quoi ceux-ci s’opposent à l’attitude de Dorine dans cette situation.
Les traits de caractère de Damis s’opposent à l’attitude de Dorine devenue plus prudente et calme dans les
circonstances, car elle est persuadée que seule Elmire peut intervenir favorablement auprès de Tartuffe
pour empêcher le mariage.
2. a) Quel ressort dramatique fait agir Damis dans cette scène ?
La décision de son père de marier Mariane à Tartuffe constitue le ressort dramatique.
b) Montrez en quoi son intervention est utile à la suite de l’action.
L’intervention de Damis est utile à la suite de l’action, car elle annonce l’entretien d’Elmire et de Tartuffe
qu’il épiera caché dans l’armoire, à l’insu de Dorine.
3. Selon Dorine, pourquoi Elmire est-elle la personne toute désignée pour intervenir auprès de
Tartuffe ?
Elmire est la personne désignée pour intervenir auprès de Tartuffe, car elle exerce un certain ascendant
sur lui ; de plus, il « se rend complaisant à tout ce qu’elle dit » (v. 836) et pourrait bien être amoureux
d’elle.
4. a) Montrez à quoi sert la didascalie « apercevant Dorine » au début de la SCÈNE 2.
La didascalie sert à préciser que Tartuffe commence à jouer son rôle de dévot, à composer son personnage
devant Dorine à qui la réplique, formulée en apparence à Laurent, s’adresse véritablement.
b) En tenant compte de la réplique apparaissant aux vers 853 à 856, qu’est-ce que cette didascalie
révèle du personnage de Tartuffe ?
La didascalie révèle le désir de Tartuffe d’offrir une image de dévot qui se mortifie physiquement et qui
fait preuve de générosité, mais elle trahit sa duplicité ou son hypocrisie.
5. a) À quelles activités religieuses Tartuffe fait-il référence aux vers 853 à 856 ?
Tartuffe fait référence aux châtiments corporels que s’infligent certains dévots pour expier leurs péchés.
Les aumônes offertes aux prisonniers font allusion aux œuvres de charité des membres de la Compagnie
du Saint-Sacrement.
b) Compte tenu de ce que l’on a appris du personnage précédemment, ces pratiques de la vie dévote
sont-elles crédibles ? Justifiez.
Non. Ces pratiques en usage chez certains dévots ne sont pas crédibles, car Tartuffe s’exprime avec
emphase à l’intention de Dorine. De plus, la mortification des sens est incompatible avec un homme qui
« se porte à merveille » (v. 233) et fait honneur à la table d’Orgon. Même si les aumônes de Tartuffe sont
réelles, elles sont sans doute ostentatoires et réalisées dans le but d’édifier, comme l’a décrit Orgon à
l’ACTE II, vers 298.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
15
6. Pourquoi Molière n’a-t-il pas mis en aparté la réplique de Dorine apparaissant au vers 857 ?
D’abord, la réplique de Dorine illustre qu’elle n’est pas dupe du jeu de Tartuffe et qu’elle a compris que
la réplique formulée devant Laurent visait à édifier une simple servante. Molière a créé, en fait, un demiaparté, car Dorine, tout en se parlant à elle-même, souhaite que Tartuffe l’entende pour lui montrer
qu’elle peut jouer un rôle dans sa comédie.
7. a) Quel principe de la vie dévote est offensé, selon Tartuffe, aux vers 858 à 862 ?
Le principe de la vie dévote qui est offensé est la pudeur et la modestie en matière de tenue vestimentaire
de la part des femmes.
b) Quels indices laissent croire que Tartuffe joue l’offensé ?
Tartuffe joue l’offensé, car sa réaction devant le décolleté est autant exagérée dans ses gestes (« Il tire un
mouchoir de sa poche », v. 858) que dans ses paroles : « Couvrez ce sein que je ne saurais voir » (v. 860).
8. a) Expliquez le caractère paradoxal de la réplique de Tartuffe apparaissant au vers 875.
La réplique de Tartuffe : « Hélas ! très volontiers » est paradoxale, car elle illustre à la fois la déception et
l’enthousiasme de l’hypocrite à s’entretenir avec Dorine.
b) Comment Dorine interprète-t-elle cette contradiction ?
Dorine interprète cette contradiction comme une preuve que Tartuffe est amoureux d’Elmire, comme elle
l’avait laissé entendre aux vers 84 et 837.
9. a) Pourquoi le personnage de Laurent est-il muet dans cette scène ?
Le personnage est muet dans cette scène, voire invisible, car en tant que valet ou garçon, il est là pour
obéir aux ordres de Tartuffe. Son silence évitera ainsi à Tartuffe le risque de se confier à celui qui, a
priori, devrait être son seul allié ou son complice.
b) Montrez à quoi il sert sur le plan dramatique.
Sur le plan dramatique, Laurent sert de faire valoir à Tartuffe dont il est l’apprenti dévot. Dans le début de
la SCÈNE 2, il permet à l’hypocrite de se mettre en scène devant Dorine.
10. a) Pourquoi Molière a-t-il retardé à L’ACTE III l’entrée en scène de Tartuffe ?
Molière a retardé à l’ACTE III l’entrée en scène de Tartuffe pour susciter un suspense et piquer la curiosité
du spectateur. Compte tenu de la difficulté de placer en situation un hypocrite au théâtre, Molière devait
faire appel à d’autres personnages pour en offrir un portrait controversé. De plus, comme Tartuffe est une
créature d’Orgon, il était nécessaire de montrer d’abord le maître aveuglé avant l’hypocrite.
b) Cette entrée est-elle à la hauteur des attentes du spectateur ? En d’autres termes, le personnage
est-il conforme aux portraits qu’en ont brossé les autres personnages aux ACTES I et II ?
L’entrée en scène de Tartuffe est tout à fait à la hauteur des attentes du public, car l’imposteur révèle à la
fois sa duplicité de faux dévot et ses contradictions d’hypocrite prisonnier de son masque.
11. Pourquoi Molière a-t-il choisi Dorine pour présenter Tartuffe lorsqu’il apparaît sur scène pour
la première fois ? Justifiez.
Molière a choisi Dorine pour présenter Tartuffe parce qu’elle est probablement celle qui a le mieux percé
à jour la duplicité de l’imposteur. Compte tenu de son statut de servante « forte en gueule » et dégourdie,
elle peut mieux que quiconque soulever le masque de l’hypocrite et susciter le rire du spectateur qui
perçoit dans ses propos le point de vue de Molière, mais dans un registre familier.
Écriture
12. a) Montrez en quoi la réplique de Dorine, aux vers 863 à 868, est comique et cinglante.
La réplique de Dorine basée sur un comique de mots et de situation est hilarante, parce qu’elle fait
contraste avec le ton et le langage dévot de Tartuffe qui feint d’être scandalisé par le décolleté de la
servante.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
16
b) Identifiez et expliquez deux figures de style s’y trouvant.
Dorine a recours à deux litotes : « Mais à convoiter, moi, je ne suis point si prompte » (v. 866), signifiant
qu’il lui faut du temps avant d’être excitée sexuellement ; « Que toute votre peau ne me tenterait pas »
(v. 868), signifiant qu’elle aurait le dégoût de faire l’amour avec Tartuffe. Les expressions « bien tendre à
la tentation », « la chair sur vos sens […] impression ? » (v.864-865) et « convoiter » (v.866) constituent
des euphémismes qui atténuent le caractère sexuel des propos de Dorine. Les substantifs « chair » et
« peau » peuvent être considérés comme des synecdoques désignant respectivement les seins de Dorine et
l’anatomie de Tartuffe.
13. Relevez les mots empruntés au champ lexical du corps dans la SCÈNE 2 et identifiez leurs
connotations.
Les mots « sein » (v. 860), « chair » (v. 864) et « peau » (v. 868), qui appartiennent au champ lexical du
corps, connotent la sensualité et la grivoiserie de Dorine.
ACTE III, SCÈNE 3
Compréhension
1. Montrez en quoi la sollicitude de Tartuffe à l’égard d’Elmire se distingue de l’attitude d’Orgon, à
la SCÈNE 4 de l’ACTE I.
La sollicitude de Tartuffe à l’égard d’Elmire se distingue par le fait qu’il se préoccupe de la santé de cette
dernière au point où il en donnerait sa vie (v. 893), contrairement à Orgon qui, à la SCÈNE 4 de l’ACTE I,
s’est montré indifférent au récit de Dorine concernant le malaise de sa femme.
2. a) Montrez en quoi les distiques 894-895, 897-898 et 903-904 que prononce Elmire peuvent
sembler équivoques aux yeux de Tartuffe.
Les distiques que prononce Elmire peuvent sembler équivoques, car Tartuffe peut interpréter le désir d’un
entretien secret comme une ouverture du cœur de la part de la maîtresse de maison. La reconnaissance de
la sollicitude de Tartuffe (v. 895), la certitude de ne pas être épié (v. 898) et l’invitation à la confidence
(v. 904) favorisent ce début de malentendu.
b) Est-elle responsable de cette ambiguïté ? Justifiez.
Oui, Elmire peut être responsable de cette ambiguïté. En effet, comme elle se doute que Tartuffe éprouve
des sentiments pour elle (allusion de Dorine au vers 84), elle doit gagner sa confiance pour obtenir qu’il
renonce au mariage avec Mariane.
3. a) Pourquoi Elmire veut-elle s’entretenir en secret avec Tartuffe ?
Elmire veut s’entretenir en secret avec Tartuffe pour ne pas éveiller les soupçons d’Orgon qui est
déterminé à marier sa fille avec l’imposteur.
b) Quel ressort dramatique externe sous-tend son entretien ?
Le ressort dramatique qui sous-tend son entretien est le renoncement de Tartuffe au mariage avec Mariane
qu’elle affectionne comme sa propre fille.
4. Montrez en quoi le comportement de Tartuffe à l’égard d’Elmire s’oppose à l’attitude qu’il a eue
avec Dorine à la scène précédente.
À la SCÈNE 2, Tartuffe a joué l’offensé pudibond devant Dorine à qui il a demandé de couvrir sa poitrine ;
à la SCÈNE 3, en compagnie d’Elmire, il se montre bienveillant, entreprenant et sensuel en lui serrant le
bout des doigts et en posant sa main sur son genou.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
17
Écriture
5. Au début de la scène, aux vers 879 à 932, relevez les mots et les expressions empruntés au champ
lexical de la dévotion par Tartuffe et montrez comment ce vocabulaire devient de plus en plus ambigu, voire paradoxal.
Les mots et expressions « Ciel » (v. 879, 889 et 901), « bénisse vos jours » (v. 881), « prières » (v. 887),
« grâce d’en haut » (v. 888), « dévote instance » (v. 889), « grâce singulière » (v. 905), « mon âme tout
entière » (v. 906), « transport de zèle » (v. 910), « ma ferveur » (v. 913), « excès de zèle » (v. 914), « air
miraculeux » (v. 920) et « félicité » (v. 928) dénotent la dévotion de Tartuffe. Ce vocabulaire devient de
plus en plus ambigu, surtout lorsque Tartuffe commence à se livrer à des attouchements sur Elmire. Ainsi
les mots « zèle », « ferveur » et « félicité » suggèrent l’attirance de Tartuffe pour Elmire.
6. Montrez en quoi la drôlerie de ce début de scène relève du comique de caractère et du comique
de situation.
Le comique de caractère réside dans la difficulté pour Tartuffe de concilier la dévotion et la sensualité, ce
qui se traduit par un comique de situation où les gestes sensuels sont en contradiction avec les paroles.
7. Identifiez et expliquez les procédés du comique de mots et du comique de gestes employés dans ce
début de scène, plus particulièrement aux vers 879 à 932.
Le comique de mots apparaît dans l’équivoque de certains termes à caractère religieux qui prennent une
coloration de sensualité : « ma ferveur est telle » (v. 913), « par excès de zèle » (v. 914). On signale aussi
l’ambiguïté sémantique des expressions « l’ouvrage est merveilleux » (v. 919) et « les merveilleux
attraits » (v. 927) pour évoquer l’anatomie d’Elmire.
L’ironie se retrouve dans les propos d’Elmire : « Et crois que mon salut vous donne ce souci » (v. 912),
« Que fait là votre main ? » (v. 916), « vous n’aimez rien des choses de la terre » (v. 929), « je crois qu’au
Ciel tendent vos soupirs » (v. 931). Ces antiphrases qui visent à forcer Tartuffe à garder son masque de
dévot prouvent qu’Elmire a saisi la concupiscence cachée de l’hypocrite.
Le comique de gestes qui renforce le comique de mots se présente dans les attouchements de Tartuffe et
dans le jeu des chaises (v. 918).
8. Que connotent les courtes répliques d’Elmire aux vers 914, 916 et 918 ?
Ces courtes répliques, qui ont pour but de freiner les ardeurs de Tartuffe, connotent à la fois la coquetterie
et la politesse d’Elmire. En effet, elle est flattée de l’intérêt que l’hypocrite lui porte, mais elle ne peut
l’éconduire trop brutalement sans compromettre l’objet de son entretien.
9. Identifiez et expliquez les deux figures de style récurrentes apparaissant aux vers 926 à 932.
La litote apparaît dans les expressions suivantes : « Ce n’est pas le bonheur après quoi je soupire »
(v. 926) signifie que Tartuffe aspire à devenir l’amant d’Elmire ; « vous n’aimez rien des choses de la
terre » (v. 929) signifie que Tartuffe déteste les biens matériels ; « Mon sein n’enferme pas un cœur qui
soit de pierre » (v. 930) signifie que Tartuffe est un homme sensible, voire sensuel (les noms « sein » et
« cœur » sont respectivement une synecdoque désignant toute la personne et une métonymie de l’affectivité ou des émotions ; le nom « pierre » est une métaphore pour évoquer la dureté, l’insensibilité) ;
« rien ici-bas n’arrête vos désirs » (v. 932) signifie que les aspirations spirituelles de Tartuffe sont totalement détachées des préoccupations terrestres et matérialistes.
L’antithèse apparaît aussi dans les expressions suivantes : « vous n’aimez rien » s’oppose à « Mon sein
n’enferme pas un cœur » ; « au Ciel tendent vos soupirs » s’oppose à « rien ici-bas n’arrête vos désirs ».
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
18
ACTE III, SCÈNES 4 ET 5
Compréhension
1. a) Identifiez et justifiez le coup de théâtre survenant à la SCÈNE 4.
L’irruption soudaine de Damis, caché dans l’armoire pendant la SCÈNE 3, constitue un coup de théâtre
pour Elmire et Tartuffe parce qu’ils ne se doutaient pas qu’ils étaient épiés.
b) Quel geste d’Orgon, à l’ACTE II, quelle attitude de Damis, au début de l’ACTE III, et quelle
réplique d’Elmire, à l’ACTE III, SCÈNE 3, ont préparé cet incident ou cette péripétie ?
Pour le spectateur, la péripétie était prévisible, car le désir de Damis d’être présent à l’entretien (v. 847
à 852), la méfiance d’Orgon (v. 428 à 430) et la certitude d’Elmire que personne ne les épie (v. 897-898)
ont préparé le coup de théâtre.
2. Quel ressort dramatique interne fait agir Damis ?
La colère et le désir de démasquer l’imposteur motivent la stratégie de Damis.
3. Montrez en quoi l’intervention de Damis est utile à la progression de l’action.
Sans l’intervention de Damis, Elmire obtenait, en échange de son silence auprès d’Orgon, le renoncement
de Tartuffe au mariage avec Mariane et précipitait le dénouement du mariage forcé. Mais l’irruption de
Damis, qui entend révéler la déclaration d’amour de l’hypocrite et la connivence d’Elmire, devrait désabuser Orgon, dont le silence à la SCÈNE 5 contribue au suspense. L’intervention de Damis détruit la stratégie d’Elmire qui, pour éviter la confrontation, se retire par prudence, laissant le champ libre aux manœuvres de Tartuffe.
4. a) Pourquoi Elmire refuse-t-elle de dénoncer Tartuffe et s’emploie-t-elle à calmer la colère de
Damis ?
Elmire refuse de dénoncer Tartuffe parce qu’elle reconnaît implicitement sa complaisance lors de l’entretien, bien qu’elle tente de le banaliser en se moquant des « sottises pareilles » (v. 1033). De plus, comme
elle fuit les scandales, elle sait que la confrontation n’est pas la solution pour confondre l’imposteur. Elle
souscrit ici au principe de bienséance.
b) Ses explications et son attitude révèlent quels traits de sa personnalité ?
Ses explications et son attitude révèlent sa prudence et sa modération. Sa sortie avant l’intervention
d’Orgon lui évite de confirmer les accusations de Damis contre Tartuffe et se ménage ainsi un second
entretien.
5. Pourquoi Tartuffe reste-t-il silencieux pendant ces deux scènes ?
Tartuffe reste silencieux pendant les deux scènes afin d’évaluer le piège dans lequel il est tombé et d’élaborer une solution pour s’en sortir. Il constate que Damis et Elmire n’étaient pas de connivence pour le
piéger ; il comprend que la colère du fils et le départ d’Elmire favorisent la comédie qu’il se prépare à
jouer devant Orgon.
6. a) Pourquoi Elmire quitte-t-elle la scène avant d’entendre l’explication de Tartuffe ?
Elmire quitte la scène parce qu’elle ne veut pas devoir confirmer les accusations de Damis, refusant
d’avance toute confrontation.
b) À qui profite cette sortie ? Justifiez.
Cette sortie profite à Tartuffe, qui a toute latitude pour jouer sa comédie.
c) À qui est-elle défavorable ? Justifiez.
Elle est défavorable à Damis, dont la parole est mise en doute par Orgon, totalement attendri par la confession de Tartuffe.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
19
7. Malgré le caractère bouillant et colérique de Damis, quel autre trait de personnalité son attitude
révèle-t-elle dans les SCÈNES 4 et 5 ?
Son attitude révèle sa franchise et sa loyauté à l’égard de son père outragé par les intentions de Tartuffe
de le cocufier.
Écriture
8. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 1034.
L’expression « jamais d’un mari n’en trouble les oreilles » est une litote qui signifie qu’Elmire veille au
bien-être d’Orgon en lui évitant le récit des sottises de Tartuffe. Le substantif « oreilles » peut être considéré comme une synecdoque désignant toute la personne qui a des oreilles pour entendre.
9. Montrez en quoi la connotation du substantif « Ciel », employé par Damis aux vers 1023 et 1044,
se distingue de celle que lui donne Tartuffe dans la SCÈNE 3.
Bien que le substantif « Ciel » constitue la métonymie de Dieu autant pour Damis que pour Tartuffe, il
acquiert une connotation moins religieuse ou dévote dans les propos de Damis qui semble y faire ressortir un trait d’ironie.
10. Identifiez et expliquez l’ironie de Damis à la SCÈNE 5.
Les vers 1055 à 1059 contiennent l’ironie où Damis affirme à son père que Tartuffe vient de lui témoigner
une grande marque d’amitié en échange de son affection. Par antiphrases, il sous-entend que l’hypocrite a
trahi la confiance d’Orgon en voulant suborner sa femme.
11. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 1062.
Le substantif « flamme » est une métaphore qui signifie que la passion amoureuse est comparée à une
flamme, à un feu brûlant.
12. Montrez à qui réfèrent les pronoms personnels « nous » au vers 1070.
Les deux pronoms personnels « nous » réfèrent à toutes les femmes, dont Elmire fait partie.
ACTE III, SCÈNES 6 ET 7
Compréhension
1. a) À quelle astuce a recours Tartuffe pour se sortir de l’impasse dans laquelle il s’est engagé à la
3?
Pour se sortir de l’impasse, Tartuffe, après un long silence, confesse sa culpabilité en s’accusant de tous
les péchés du monde, en général dans un langage hyperbolique et d’une manière théâtrale.
b) Montrez en quoi cette stratégie lui est favorable ; en d’autres termes, faites voir comment elle
agit efficacement sur Orgon.
Cette stratégie agit efficacement sur Orgon qui, en tant que faible pécheur lui-même, ne peut qu’être
attendri par l’extrême humilité de Tartuffe dont la confession, même dans ses aspects véridiques, ne peut
être considérée comme vérité. Orgon y voit donc la preuve de l’innocence de Tartuffe.
SCÈNE
2. Faites ressortir les aspects contradictoires ou paradoxaux de la SCÈNE 6.
Les aspects contradictoires de la SCÈNE 6 résident dans les propos de Tartuffe qui s’accuse de tous les
péchés sans évoquer celui qu’il vient de commettre et dont l’accuse Damis. Tartuffe recommande à Orgon
de croire à la parole de son fils pour mieux la discréditer ; il dit la vérité sur sa vraie nature de scélérat
pour laisser croire à son innocence (v. 1074-1078 et 1094-1104) ; il réclame un châtiment sévère pour
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
20
obtenir la clémence d’Orgon (v. 1105-1106) ; il prend la défense de Damis pour mieux attiser la colère du
père contre son fils (v. 1112-1116).
3. Identifiez les vers où se trouvent les vérités que dit Tartuffe à propos de lui-même. Expliquez leur
efficacité rhétorique.
Les vers 1074 à 1078 illustrent la vérité de Tartuffe sur lui-même. Leur efficacité rhétorique réside dans le
langage hyperbolique (« Le plus grand scélérat […] ait été », « un amas de crimes et d’ordures ») et dans
les expressions généralisantes comme « Chaque instant de ma vie » qui, paradoxalement, atténuent ou
contournent le vrai crime dont Tartuffe est accusé.
Dans les vers 1093 à 1106, Tartuffe formule quatre questions auxquelles il donne des réponses qui révèlent son hypocrisie (« vous vous laissez tromper à l’apparence ») et sa médiocrité (« je ne vaux rien »). De
plus, son intervention connotée de paternalisme (« mon cher fils ») et suivie de l’énumération (« de
perfide […] d’homicide ») renforcent l’hyperbole qui culmine au vers 1106 par « aux crimes de ma vie ».
4. Parmi tous les péchés dont s’accuse Tartuffe, pourquoi ne mentionne-t-il pas celui que Damis lui
reproche, c’est-à-dire la subornation ou la tentative de séduction d’Elmire ?
Tartuffe évite de mentionner le crime dont Damis l’accuse afin de mieux le diluer dans des formules
généralisantes et hyperboliques, qui auront pour effet d’impressionner Orgon et d’attiser la colère de
Damis que le père s’emploiera à faire taire.
5. Quel ressort dramatique pousse Orgon à refuser la confession de Tartuffe et à s’en prendre à
Damis ?
L’aveuglement d’Orgon, qui ne voit que dévotion, humilité et sainteté chez Tartuffe, le pousse à refuser la
confession de ce dernier. Ce qui le motive à s’en prendre à Damis, c’est la conviction que son fils et les
membres de sa famille détestent le dévot contre lequel ils se déchaînent (v. 1118-1122). Le désir d’imposer son autorité paternelle constitue aussi un ressort dramatique (v. 1129-1132).
6. Identifiez les raisons pour lesquelles le personnage d’Orgon devient de plus en plus antipathique,
alors que Damis suscite la pitié du spectateur.
Orgon devient de plus en plus antipathique, car son aveuglement pour Tartuffe l’empêche de constater la
loyauté de Damis qui ne vise qu’à servir les intérêts de son père. Damis suscite notre pitié, car le châtiment qu’il espérait infliger à l’imposteur se retourne contre lui qui est chassé par Orgon, sans répliquer.
7. Montrez comment les SCÈNES 6 et 7 constituent, pour Tartuffe, une comédie dans la comédie qui
tend vers le drame, voire la tragédie.
En habile comédien, Tartuffe joue dans les SCÈNES 6 et 7 sa plus belle et sa plus efficace prestation
d’hypocrite devant Damis qui n’est pas dupe et Orgon complètement médusé. L’art de l’imposteur consiste presque à « surjouer » devant son hôte de manière à l’éblouir, tout en discréditant le fils. Bien que le
spectateur s’amuse du jeu ridicule, voire burlesque, de Tartuffe, il prend conscience du drame qui accable
Damis chassé par son père.
8. Quelles sont les conséquences du stratagème machiavélique de Tartuffe sur Damis, sur Mariane,
sur Elmire et sur l’ensemble de la famille ?
Damis est chassé par son père qui le déshérite et lui donne sa malédiction ; Mariane sera mariée à Tartuffe
« dès ce soir » (v. 1128) ; Elmire sera exposée aux fréquentations de Tartuffe, ce qui rendra Orgon plus
vulnérable au cocuage (v. 1174) ; finalement, toute la famille devra supporter le pouvoir renforcé de
l’imposteur dont la donation qu’il reçoit laisse poindre un péril éventuel.
9. Quel ressort dramatique interne motive les décisions d’Orgon à la SCÈNE 7 ?
D’abord aminé par la colère contre Damis, à la SCÈNE 6, Orgon, à la SCÈNE 7, supplie Tartuffe de demeurer chez lui, en dépit de toutes les difficultés auxquelles il aura à faire face, car le dévot représente des
valeurs spirituelles vitales pour lui (v. 1165). En outre, c’est un plaisir malsain, voire sadique, de « [f]aire
enrager le monde » (v. 1173) qui pousse Orgon à demander à Tartuffe de fréquenter sa femme, et c’est le
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
21
désir de « mieux braver » les siens (v. 1175) qui l’amène à « faire de [s]on bien donation entière »
(v. 1178).
10. a) Montrez comment les propos d’Orgon, aux vers 1179 et 1180, révèlent la perspicacité démontrée par Dorine à l’ACTE I, SCÈNE 2.
La perspicacité de Dorine est apparue aux vers 185 à 190 où elle soutenait que son maître éprouvait plus
d’affection pour Tartuffe que pour tous les membres de sa famille.
b) Précisez la connotation que prend la confidence d’Orgon dans cette seule scène d’intimité avec
Tartuffe.
La confidence d’Orgon, dans cette seule scène d’intimité avec Tartuffe, connote non seulement l’amitié et
la tendresse, mais une forme de passion amoureuse entremêlée de fanatisme et de déraison.
11. a) À quelle situation précédente l’expression « Le pauvre homme ! », au vers 1183, fait-elle
référence ?
L’expression fait référence à la répétition d’Orgon à la SCÈNE 1 de l’ACTE IV.
b) Montrez en quoi cette expression résume ironiquement le destin qui lie désormais Orgon et
Tartuffe.
L’expression résume ironiquement le destin qui lie les deux personnages, car, même si Orgon s’apitoie
réellement sur le sort de Tartuffe qu’il considère comme un homme éprouvé par la vie, il ne se doute pas
que l’imposteur est désormais un homme riche grâce à la donation. Le véritable pauvre homme, c’est
finalement Orgon qui vient de sacrifier son bien et faire preuve d’une imprudence digne d’un pauvre
imbécile.
Écriture
12. Quels procédés du comique de caractère, de situation et de gestes sont exploités dans les
SCÈNES 6 et 7 ? Expliquez-les.
Le comique de caractère met en valeur les contradictions d’Orgon qui se prétend dévot alors qu’il s’emporte contre son fils qu’il chasse et déshérite injustement, trop ébloui par la confession de l’hypocrite. Le
comique de situation réside dans l’inversion des rôles de Damis et de Tartuffe, où celui qui veut démasquer et châtier se voit confondu et puni, et celui qui s’affirme coupable obtient l’innocence et la récompense. Le comique de gestes apparaît dans l’attitude d’Orgon qui tente de faire taire son fils et le chasse
en réclamant le bâton de la farce (v. 1135). Sa course « tout en larmes par la porte où il chasse son fils »
(v. 1149) suivie de la scène d’intimité avec Tartuffe qu’il implore de rester tombent dans le ridicule,
surtout si on imagine les deux personnages à genoux dans les bras l’un de l’autre.
13. a) À quelle figure de style d’amplification, à la SCÈNE 6, Tartuffe a-t-il recours dans sa
confession ?
Dans sa confession, Tartuffe a recours à l’hyperbole qui lui permet d’amplifier le portrait de pécheur qu’il
brosse pour impressionner Orgon, de dissimuler son véritable crime et d’obtenir le pardon.
b) Relevez-en quatre exemples et expliquez-les brièvement en faisant ressortir leur efficacité sur le
plan du comique de mots.
L’énumération « un méchant, un coupable […] Le plus grand scélérat qui jamais ait été » (v. 1074-1076),
les métaphores « chargé de souillures […] amas de crimes et d’ordures » (v. 1077-1078), l’accumulation
d’adjectifs et de noms d’injures, « de perfide/D’infâme, de perdu, de voleur, d’homicide » (v. 1101-1102),
et l’expression « la peine la plus dure », antithèse de « la moindre égratignure » (v. 1113-1114), relèvent
du comique de mots par l’ambiguïté sémantique qui apparaît entre la part d’exagération et la part de
vérité. La franchise de Tartuffe aux vers 1094 à 1101 illustre son habileté à jouer avec l’être et le paraître.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
22
14. Que connote l’emploi du pronom « on » dans les propos qu’Orgon adresse à Damis aux
vers 1131, 1132, 1136 et 1137 ?
Le pronom « on » réfère à un « tu », c’est-à-dire à Damis ; dans le contexte, il connote une certaine
distance que tient à prendre Orgon vis-à-vis son fils à qui il veut imposer son autorité.
15. a) Quel personnage historique Tartuffe parodie-t-il dans les vers 1142 et 1182 ? Justifiez.
Dans ces deux vers, Tartuffe parodie la prière du Notre Père : « Pardonnez-nous nos offenses comme
nous pardonnons […] » et « Que ta volonté soit faites sur la terre comme au ciel ».
b) Montrez en quoi ce procédé comique a pu offusquer les dévots et les membres du clergé au
XVIIe siècle.
Ce procédé comique tournant en dérision une prière du Christ a pu offusquer les dévots et le clergé qui
s’objectaient contre l’intrusion du sacré et de la religion dans les comédies. De plus, ces paroles étant prononcées par un scélérat choquaient d’autant, ce qui amena Molière, semble-t-il, à modifier le vers 1142
(voir la note au bas de page du texte).
16. Identifiez et expliquez le procédé comique employé au vers 1166.
Il s’agit de l’ironie, car, bien que Tartuffe dise accepter l’épreuve qu’il s’impose en demeurant dans la
maison d’Orgon, il apprécie avec joie tous les avantages dont il continuera de profiter.
Synthèse de l’ACTE III
1. Identifiez les péripéties de l’ACTE III qui ont contribué à resserrer le nœud de l’action.
Vois le schéma narratif ou événementiel (page 208).
2. Brossez le portrait de Tartuffe en faisant ressortir l’art du comédien chez lui.
L’art du comédien chez Tartuffe apparaît à trois reprises :
1. L’hypocrite pudibond devant Dorine (SCÈNE 2) ;
2. Le dévot amoureux auprès d’Elmire (SCÈNE 3) ;
3. Le pécheur innocent devant Orgon (SCÈNES 6 et 7).
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
23
ACTE IV
ACTE IV, SCÈNE 1
Compréhension
1. a) Quel est l’objectif de Cléante lors de son entretien avec Tartuffe ?
Cléante espère persuader Tartuffe de pardonner à Damis son méfait, de réconcilier le père et le fils et,
surtout, de renoncer à la donation.
b) L’atteint-il ? Justifiez.
Non, Cléante n’atteint pas son objectif, car, bien que Tartuffe soutienne avoir pardonné à Damis (v. 12031206), il refuse de vivre sous le même toit que lui (v. 1208-1232) et accepte la donation (v. 1241-1248).
c) Montrez en quoi sa stratégie ou son argumentation ressemble à celle d’Elmire à l’ACTE III,
SCÈNE 3.
La stratégie de Cléante ressemble à celle d’Elmire dans la mesure où elle consiste d’abord à invoquer les
valeurs chrétiennes tout en feignant de croire que Tartuffe est un vrai dévot (v. 1185-1228). Devant
l’échec, Cléante passe à l’attaque en lui reprochant d’accepter injustement la donation, ce qui enferme
Tartuffe dans ses contradictions et l’oblige à dévoiler sa cupidité.
2. Quel ressort dramatique sous-tend l’entretien ? En d’autres termes, quelle motivation anime
respectivement Cléante et Tartuffe?
Le ressort dramatique qui sous-tend l’entretien est, pour Cléante, l’intention de confondre l’hypocrite ou,
du moins, de le forcer à révéler ses contradictions et est, pour Tartuffe, le désir de se défendre et de
conserver ses privilèges.
3. Montrez comment Cléante parvient à pousser Tartuffe dans ses retranchements, à le forcer à
dévoiler malgré lui ses contradictions d’homme soi-disant dévot qui manque à la charité chrétienne.
Cléante parvient à pousser Tartuffe dans ses retranchements en l’invitant à faire « de céans une honnête
retraite » (v. 1262), c’est-à-dire de vivre discrètement dans la maison d’Orgon, en harmonie avec le fils. À
ce dernier argument, l’imposteur n’a pour toute réplique que l’excuse de son « devoir pieux » (v. 12661268), ce qui interrompt l’entretien, mais souligne son ambition qu’il a du mal à dissimuler.
4. Montrez en quoi les propos de Tartuffe se distinguent de ceux qu’il tenait devant Orgon à la
scène 7 de l’ACTE III.
Les propos que Tartuffe tenait à Orgon, à la SCÈNE 7 de l’ACTE III, évoquaient la possibilité, pour l’imposteur, de quitter la maison afin d’éviter la confrontation avec la famille (v. 1153-1154 et 1163-1164) ; à
l’ACTE IV, devant Cléante, il attribue à autrui ses propres calculs pour justifier son refus de vivre sous le
même toit que Damis (v. 1211-1216), et il invoque le Ciel qui guide sa conduite (v. 1232).
5. Relevez, dans les répliques de Tartuffe, les vers qui illustrent sa duplicité, son hypocrisie, voire
ses manigances machiavéliques, notamment en ce qui a trait à la donation.
Dans les vers 1237 à 1248, Tartuffe soutient son désintérêt pour la donation qu’il a acceptée dans le but
d’en faire un usage charitable. Cléante se doute bien que l’imposteur a l’intention d’en faire un usage
criminel.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
24
6. Montrez en quoi cette donation constitue une nouvelle étape dans la stratégie d’ascension sociale
de Tartuffe. Identifiez les étapes précédentes et faites voir en quoi cette dernière leur est supérieure.
La donation constitue une nouvelle étape dans la stratégie d’ascension sociale de Tartuffe, car elle lui
permet de se substituer au fils déshérité et de se rapprocher de son objectif qui est de remplacer Orgon
dans son statut de maître et propriétaire.
Les étapes précédentes ont été l’installation dans la maison d’Orgon, la promesse de mariage avec
Mariane, la possibilité de cocufier le mari et la répudiation de Damis. La donation est supérieure à toutes
ces étapes, car elle rend Orgon plus vulnérable et l’expose aux abus de l’imposteur.
7. Qu’est-ce qui pousse Tartuffe à évoquer le prétexte de l’heure de sa prière pour mettre fin à la
conversation ?
Tartuffe évoque ce prétexte, car il est à court d’arguments pour répliquer à Cléante qui le presse d’agir en
véritable chrétien en acceptant de vivre honnêtement dans la maison d’Orgon.
8. Combien de temps s’est-il écoulé depuis la fin de l’ACTE III ? Justifiez.
Comme il est trois heures et demie à la fin de la SCÈNE 1, on peut compter au moins deux heures depuis la
fin de l’ACTE III. En effet, pendant l’entracte, Orgon a dû se rendre chez le notaire pour rédiger l’acte de
donation (v. 1177-1178) et obtenir le contrat de mariage (v. 1277).
Écriture
9. Montrez comment l’argumentation de Tartuffe est basée sur une idéologie religieuse aux
raisonnements spécieux, c’est-à-dire qui n’ont que l’apparence de la vérité. Pour ce faire, relevez la
présence du mot « Ciel » dans les répliques de Tartuffe et précisez-en les connotations.
La présence du mot « Ciel » dans les répliques de Tartuffe (v. 1207, 1230, 1232 et 1248) connote la responsabilité pour tout dévot de veiller aux intérêts de Dieu, de défendre les valeurs chrétiennes dont le
pardon et la charité, des principes auxquels l’imposteur ne souscrit pas. Les ordres du Ciel auxquels prétend obéir Tartuffe soulignent une conduite proche d’une forme d’intégrisme religieux.
10. Montrez comment la présence du mot « Ciel », dans les répliques de Cléante, contribue à
l’ironie du discours.
Le substantif « Ciel » et les pronoms personnels « il » et « lui », dans les répliques de Cléante (v. 12191222, 1224, 1227, 1233 et 1259), contribuent à l’ironie du discours. En effet, en recourant au même
vocabulaire dévot, le raisonneur prouve à son adversaire qu’il n’est pas dupe de ses sophismes et qu’il
doit pousser jusqu’au bout sa logique et sa soumission à Dieu.
11. Identifiez et expliquez deux des figures de style d’atténuation apparaissant aux vers 1237
à 1248.
Les vers 1239 et 1240, « Tous les biens […] peu d’appas […] je ne m’éblouis pas », constituent une litote
par laquelle Tartuffe prétend qu’il est totalement détaché des biens matériels ; les vers 1241 et 1242, « Et
si je me résous […] me faire », peuvent être interprétés comme un euphémisme pour atténuer la manipulation de Tartuffe afin d’obtenir la donation.
12. Identifiez et expliquez deux des figures de style de substitution apparaissant aux vers 1237
à 1248.
L’expression « méchantes mains » (v. 1244) est une synecdoque où la partie du corps est employée pour
signifier toute la personne méchante ; le substantif « Ciel » (v. 1248) est une métonymie par laquelle le
lieu de l’au-delà désigne l’être divin qui l’habite.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
25
ACTE IV, SCÈNES 2, 3 ET 4
Compréhension
1. Montrez comment les SCÈNES 2 et 3 tendent vers le drame, voire la tragédie, notamment pour le
personnage de Mariane. En d’autres termes, faites voir comment l’attitude d’Orgon face à Damis à
l’ACTE III, puis maintenant face à sa fille, fait monter d’un cran l’intensité dramatique de l’action.
La SCÈNE 2, qui sert de transition pour annoncer Orgon, donne le ton du drame qui se dessine à la
SCÈNE 3. Après avoir chassé et déshérité Damis à l’ACTE III, Orgon brandit le contrat de mariage qu’il
impose à sa fille. À genoux et désespérée, Mariane implore, à la manière des héroïnes des tragédies grecques comme Iphigénie, un père inflexible. Pour attendrir son cœur, elle invoque le « Ciel » (v. 1279, 1284
et 1300), fait allusion au suicide (v. 1291) et propose le don de son bien (v. 1296) et le sacrifice du
couvent en échange du mariage (v. 1299-1300), ce qui a pour effet de rendre Orgon plus cruel encore.
2. a) Identifiez et expliquez les vers prononcés par Orgon qui illustrent sa cruauté, voire son
sadisme, à l’égard de Mariane.
Les vers 1303 à 1305 illustrent la cruauté d’Orgon à l’égard de Mariane, car le mariage avec Tartuffe lui
est imposé comme une épreuve ou une pénitence par laquelle elle pourra expier ses fautes.
b) Comparez son attitude à celle qu’il a évoquée aux vers 275 à 279 de l’ACTE I.
À l’ACTE I, Orgon affirme être devenu indifférent à l’amitié et insensible à la mort des siens ; à l’égard de
Mariane, il faut preuve non seulement d’insensibilité, mais de cruauté, voire de sadisme.
3. Montrez, par ses deux répliques, aux vers 1279 à 1300, comment Mariane reste fidèle au rôle de
victime ou d’héroïne tragique qu’elle a précédemment adopté à l’ACTE II, SCÈNE 3.
Mariane reste fidèle à son rôle de victime ou d’héroïne tragique, qu’elle a adopté avec Dorine à l’ACTE II,
en suppliant son « père absolu » et en invoquant le Ciel en présence d’Elmire, laquelle se retrouve dans
une situation analogue à celle de Clytemnestre, la mère d’Iphigénie. L’évocation du suicide, l’esprit de
sacrifice devant le destin, le ton élégiaque de la plainte mènent le personnage tragique à la limite de la
parodie.
4. a) Quel ressort dramatique motive la conduite d’Orgon dans ses répliques respectivement
adressées à Dorine, à Cléante et à Elmire ?
La réplique d’Orgon à Dorine (v. 1307-1308) est motivée par la rancœur contre la servante qui l’a épuisé
par ses interruptions et son insolence à l’ACTE II ; celle qu’il adresse à Cléante (v. 1310-1312) est inspirée
par le refus des leçons et conseils de son beau-frère ; celle qu’il destine à Elmire (v. 1317-1322) est inspirée par la déception qu’il ressent vis-à-vis la connivence de sa femme et de son fils contre Tartuffe.
b) Pourquoi se montre-t-il si prompt à l’égard de Dorine et ironique à l’égard de Cléante et
d’Elmire ?
Orgon est prompt à l’égard de Dorine, car elle est une servante indisciplinée ; il est ironique à l’égard de
Cléante et d’Elmire, car ils appartiennent à la même classe sociale que lui.
5. Montrez, par sa réplique, aux vers 1323 à 1336, comment Elmire reste fidèle à la première explication qu’elle a donnée à Damis, à l’ACTE III, vers 1029 à 1034, et à Orgon, aux vers 1067 à 1072.
Par sa réplique, aux vers 1323 à 1336, Elmire rappelle qu’elle s’est moquée de la déclaration de Tartuffe,
qu’elle a horreur des débordements et qu’elle privilégie la modération, comme elle l’a expliqué précédemment à Damis et à Orgon.
6. Que signifient les paroles d’Orgon aux vers 1321-1322 et au vers 1337 ?
Dans les vers 1321 et 1322, Orgon sous-entend que le silence d’Elmire concernant l’attaque de Damis
contre Tartuffe a joué contre elle et que, si elle avait assisté à la suite de la confrontation, elle aurait été
obligée d’admettre sa complicité avec son fils. Au vers 1337, Orgon prétend qu’il connaît le fond de toute
cette affaire, qui implique Elmire, Damis et Tartuffe, et qu’il n’est pas dupe des explications de sa femme.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
26
7. a) Quelles qualités Elmire met-elle en valeur devant Orgon dans sa présentation du stratagème ?
Les qualités d’Elmire sont la ruse, la perspicacité à saisir les faiblesses du cœur humain (v. 1357-1358), la
pudeur mêlée à la hardiesse (v. 1369-1376) et la loyauté (v. 1385).
b) Ces qualités sont-elles en accord ou en contradiction avec celles que doit posséder une femme de
la classe d’Elmire ? Justifiez.
A priori, ces qualités ne sont pas en accord avec celles d’une grande bourgeoise qui prône la modération,
mais c’est par fidélité à son mari qu’Elmire, en désespoir de cause, se prête à un jeu dangereux où la
coquetterie, le mensonge et la comédie la conduiront à deux pas de l’adultère.
8. a) Quels arguments Orgon évoque-t-il pour s’objecter à la proposition d’Elmire ?
Orgon n’a pas d’arguments pour s’objecter à la proposition d’Elmire, car il est persuadé que Tartuffe ne
peut être un imposteur (v. 1348-1349).
b) Que propose Elmire pour tenter de le convaincre ?
Elmire propose à Orgon d’être témoin d’un entretien qu’elle aura avec Tartuffe et au cours duquel l’hypocrite révélera clairement son vrai visage (v. 1342-1347 et 1349-1352).
9. Montrez en quoi la situation ou la position dans laquelle Orgon doit se placer est paradoxale, en
apparence, par rapport à l’objectif visé par Elmire, qui est de lui faire voir la vérité. En d’autres
termes, identifiez le sens qu’Elmire entend solliciter chez Orgon pour lui révéler la vérité sur
Tartuffe.
La position dans laquelle Orgon se place est paradoxale, car il doit se cacher sous la table où il ne verra
rien, mais entendra Tartuffe révéler à Elmire sa véritable nature d’imposteur.
10. a) Pourquoi Elmire est-elle si confiante en la réussite de son stratagème ?
Elmire est confiante, car elle connaît les faiblesses du cœur de Tartuffe qui est amoureux d’elle (v. 13571358).
b) Montrez en quoi cette ruse constitue le dernier espoir de mettre un terme à l’aveuglement
d’Orgon et ainsi d’empêcher le mariage forcé.
Cette ruse constitue le dernier espoir de mettre fin à l’aveuglement d’Orgon, car le mariage forcé de
Mariane avec Tartuffe est imminent.
11. a) Quelles recommandations Elmire fait-elle à Orgon pour justifier la conduite qu’elle entend
adopter auprès de Tartuffe ?
Elmire prévient Orgon qu’il ne doit pas se scandaliser des moyens auxquels elle aura recours pour séduire
Tartuffe et le démasquer (v. 1370-1376).
b) Pourquoi lui fait-elle comprendre qu’il a le plein pouvoir d’interrompre le jeu au moment où il le
jugera bon ?
Elle lui fait comprendre qu’il a le plein pouvoir d’interrompre le jeu afin qu’il assume totalement la
responsabilité de la situation délicate dans laquelle elle s’engage et qui risque de le cocufier malgré elle.
Écriture
12. Relevez les mots et les expressions empruntés au champ lexical de la vue, à partir du vers 1340,
et montrez en quoi ils constituent l’élément essentiel du stratagème d’Elmire.
Le champ lexical de la vue comprend les expressions suivantes : « Si l’on vous faisait voir » (v. 1340),
« De vous le faire voir avec pleine lumière » (v. 1342), « On vous fit clairement tout voir » (v. 1346), « je
vous fasse témoin » (v. 1352), « Gardez qu’on ne vous voie » (v. 1365), « gardez de paraître » (v. 1386).
Bien que le stratagème plonge Orgon dans l’obscurité sous la table où il est caché et à l’abri du regard de
Tartuffe, le champ lexical du verbe voir, dont le sens est métaphorique puisqu’il renvoie à l’idée d’entendre et de comprendre, constitue l’élément essentiel du stratagème d’Elmire pour mettre fin à l’aveuglement de son mari.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
27
13. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 1350.
Le substantif « bouche » est une synecdoque par laquelle la partie du corps qui prononce les paroles
mensongères signifie toute la personne qui ment.
14. Montrez en quoi le stratagème d’Elmire relève de la farce.
Le stratagème relève de la farce classique, car Orgon fait preuve de complaisance à l’égard de sa femme
qui risque de le cocufier avec un invité.
15. a) Relevez et expliquez, à la SCÈNE 4, les mots et les expressions empruntés au champ lexical de
la séduction dans les propos d’Elmire et montrez de quelle figure de style ils relèvent.
Le champ lexical de la séduction comprend les expressions « Je vais par des douceurs » (v. 1373), « Flatter de son amour les désirs effrontés » (v. 1375), « Et donner un champ libre à ses témérités » (v. 1376),
« mon âme à ses vœux va feindre de répondre » (v. 1378), qui relèvent de l’euphémisme pour atténuer
l’invitation à la débauche à laquelle Elmire va convier Tartuffe.
b) Faites voir en quoi ce vocabulaire respecte la règle de la bienséance du théâtre classique.
Ce vocabulaire respecte la règle de la bienséance du théâtre par le recours à l’allusion et à l’analogie, qui
sous-entendent la réalité sans la nommer explicitement.
ACTE IV, SCÈNES 6, 7 ET 8
Compréhension
1. Quelle nouvelle opinion Orgon a-t-il de Tartuffe ? Comparez son vocabulaire à celui qu’il a utilisé précédemment au sujet de Tartuffe, à l’ACTE I, et montrez en quoi il sait encore donner dans
l’excès ou la démesure.
Orgon reconnaît en Tartuffe un traître et un scélérat en recourant à des expressions hyperboliques comme
« abominable homme » (v. 1529) et « rien de plus méchant n’est sorti de l’enfer » (v. 1535), qui s’opposent au « pauvre homme » (v. 235) et à la « sainte personne » (v. 1141) qu’il a vénéré précédemment.
2. Faites ressortir les ressemblances et les différences qui existent entre la SCÈNE 7 de l’ACTE IV et la
4 de l’ACTE III.
Dans les deux scènes, on retrouve un individu caché (Damis et Orgon) qui épie et qui surprend Tartuffe
avec Elmire, laquelle tente de justifier sa conduite. Damis et Orgon veulent se venger ; le premier, en
dénonçant à son père la subornation de l’imposteur, est réprimandé et chassé de la maison paternelle ; le
second refuse l’explication de Tartuffe qu’il expulse, réhabilitant ainsi son fils banni.
SCÈNE
3. a) Quels vers, prononcés par Orgon, illustrent son explication pour le retard qu’il a mis à se
manifester, à sortir de sous la table ?
Les vers 1547 et 1548 : « J’ai douté […] qu’on changerait de ton. »
b) Quel éclairage cette explication apporte-t-elle quant au caractère d’Orgon ?
Comme Orgon a espéré jusqu’à la dernière minute que Tartuffe reviendrait à de meilleurs sentiments, il a
refusé de croire ce qu’il entendait, parce que la vérité lui était insupportable. Son entêtement ou son aveuglement s’est maintenu même dans l’évidence.
4. Pourquoi Elmire justifie-t-elle sa conduite auprès de Tartuffe aux vers 1551 et 1552 ?
Elmire justifie sa conduite auprès de Tartuffe pour sauvegarder la bienséance interne qui lui permet de
rester une femme honnête et distinguée.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
28
5. a) Quelle excuse tente d’invoquer Tartuffe au vers 1553 ?
Par la question qu’il amorce, on peut supposer que Tartuffe tente d’insinuer que ce que vient d’entendre
Orgon était une comédie, de sa part, pour mettre à l’épreuve la fidélité d’Elmire.
b) Complétez la phrase interrompue de Tartuffe, au vers 1555, et justifiez votre réponse.
« Mon dessein… » était pur et bien intentionné, car il visait à m’assurer de la fidélité de votre épouse.
Cette réplique est tout à fait vraisemblable, compte tenu que le personnage a su précédemment faire appel
à la casuistique pour justifier son comportement (v. 1485-1496).
6. a) Montrez en quoi le stratagème d’Elmire apparaît comme une réussite. Précisez les dangers
qu’il a permis d’éviter.
Le stratagème d’Elmire est une réussite, car il a mis fin à l’aveuglement d’Orgon, écarté le mariage forcé
de Mariane, dissipé la menace d’adultère d’Elmire et rétabli Damis dans ses droits légitimes.
b) En revanche, montrez et expliquez comment ce succès éphémère crée deux nouveaux dangers.
Ce succès, qui révèle le vrai visage de l’imposteur et qui contribue à son expulsion de la maison, provoque un revirement de situation où Orgon se voit sommé de quitter son domicile à cause de la donation
(v. 1557-1558) et laisse poindre une menace par l’allusion faite à une « certaine cassette » (v. 1562-1572).
7. a) Identifiez et expliquez le coup théâtre survenant à la SCÈNE 7.
Le coup de théâtre apparaît dans la réplique de Tartuffe qui, chassé sur-le-champ de la maison par Orgon,
exhorte ce dernier à en « sortir » (v. 1557-1558).
b) Faites ressortir son caractère dramatique.
La situation devient dramatique, car, au moment où l’on attendait le dénouement, c’est-à-dire l’expulsion
de l’imposteur, Orgon se retrouve escroqué et dépossédé de ses biens à cause de la donation.
8. a) À quoi sert la dernière réplique d’Orgon aux vers 1571 et 1572 ?
La dernière réplique d’Orgon contribue à maintenir un certain suspense et à assurer la transition avec le
dernier acte où l’action sera relancée.
b) À qui ou à quoi réfère la cassette dont il parle ?
La cassette réfère à Argas, auquel elle appartenait et qui l’a « mis entre les mains d’Orgon » avant de fuir
(voir l’ACTE V, SCÈNE 1, vers 1579 à 1583).
c) En a-t-il déjà été question dans les scènes précédentes ?
Non, c’est la première fois qu’il est question de cette cassette.
9. Montrez que, même une fois démasqué, Tartuffe reprend aussitôt son masque pour continuer de
composer le personnage qu’il a joué depuis le début.
Tartuffe n’avoue pas être pris en flagrant délit de subornation. On peut présumer qu’il évoquerait la
casuistique pour justifier son comportement. De plus, il invoque le Ciel pour nourrir son désir de vengeance contre Orgon qui lui fait injure.
Écriture
10. a) Justifiez les deux répliques d’Elmire à la SCÈNE 6.
Dans ses deux répliques, Elmire réprimande Orgon parce qu’il a tardé à se manifester.
b) Identifiez et expliquez les deux procédés comiques auxquels elle a recours.
Elmire recourt à l’ironie pour tourner en dérision la trop grande prudence d’Orgon qu’elle qualifie d’imprudent. Elle a aussi recours au comique de geste en faisant mettre son mari derrière elle à l’arrivée de
Tartuffe.
11. a) Relevez et expliquez les figures de style d’atténuation (euphémisme, litote) qui contribuent à
l’écriture classique de ces scènes.
Parmi les figures d’atténuation, on retrouve les litotes suivantes : « rien de plus méchant n’est sorti de
l’enfer » (v. 1535) signifie que Tartuffe est le pire des démons ; « vous ne devez pas tant vous passion© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
29
ner » (v. 1543) signifie « modérez votre enthousiasme » ; « point de bruit […] sans cérémonie » (v. 15531554) signifie « sortez en silence et discrètement » ; « Ces discours ne sont plus de saison » (v. 1555)
signifie « vos explications sont inutiles et mensongères » ; « Qu’on n’est pas où l’on pense » (v. 1561)
signifie « vous êtes vous-même un imposteur » ; « et n’ai pas lieu de rire » (v. 1566) signifie « j’éprouve
une terrible inquiétude ».
Parmi les euphémismes, signalons les expressions suivantes : « Laissez-vous bien convaincre […]
rendre » (v. 1537) signifie « attendez d’être réellement cocu avant d’intervenir » ; « vous suivez trop votre
amoureuse envie » (v. 1542) signifie « vous avez la mauvaise tendance à assouvir vos besoins sexuels » ;
« vous […] convoitiez ma femme » (v. 1546) signifie « vous vouliez me cocufier » ; « On m’a mise […]
traiter ainsi » (v. 1552) signifie « l’aveuglement d’Orgon m’a obligée à vous jouer cette scène de
comédie » ; « C’est à vous d’en sortir » (v. 1557) signifie « je vous chasse » ; « Venger le Ciel qu’on
blesse » (v. 1563) signifie « je me vengerai impitoyablement avec la bénédiction de Dieu » ; « Je vois ma
faute […] l’esprit » (v. 1567-1568) signifie « je suis un imbécile et la donation me tourmente
énormément » ; « c’est une affaire faite » (v. 1569) signifie que la donation vient d’être légalement
constituée.
b) Quel effet ces figures donnent-elles aux situations et aux attitudes des personnages ?
Le recours aux figures d’atténuation contribue au maintien de la bienséance dans un contexte tendu où les
personnages doivent garder leur sang-froid malgré l’angoisse qui les étreint et le drame qui se profile.
Synthèse de l’ACTE IV
1. Montrez qu’Elmire apparaît, dans l’ACTE IV, comme le personnage le plus fort de la pièce.
Elmire est aux antipodes d’Orgon grâce à certaines qualités.
-La perspicacité : son entretien, à l’ACTE III, lui a permis de déceler les faiblesses de Tartuffe.
-La ruse : le stratagème qu’elle propose à Orgon lui permet de démasquer l’imposteur.
-L’art de séduire : le jeu de la coquetterie et la comédie de la séduction révèlent le vrai visage de
l’hypocrite.
-Le sang-froid : malgré l’agression dont elle est victime, elle maîtrise la situation et fait preuve d’ironie.
2. Montrez que l’ACTE IV est le plus sombre et le plus dramatique de la pièce.
L’ACTE IV est le plus dramatique de la pièce pour plusieurs raisons. D’abord, Tartuffe refuse de se réconcilier avec Damis, Orgon se présente avec le contrat de mariage en main, Mariane évoque la possibilité de
se suicider, Elmire s’expose à l’adultère, Orgon, humilié par la trahison de l’imposteur, reconnaît son
aveuglement et son erreur dans l’acte de donation par lequel il se voit expulsé de sa maison et, finalement,
l’énigme de la cassette annonce un péril encore plus inquiétant.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
30
ACTE V
ACTE V, SCÈNES 1 ET 2
Compréhension
1. a) Sur le plan de la gestuelle, qu’ont en commun le début de la SCÈNE 1 de l’ACTE I et celui de la
SCÈNE 1 de l’ACTE V ?
La course d’Orgon fait écho à la course de madame Pernelle.
b) Quel est l’effet de cette gestuelle sur l’action ?
Contrairement à la course de Mme Pernelle qui suscite le rire par son aspect ridicule et mécanique, la
course d’Orgon, qui traduit son désarroi et son impuissance, souligne le caractère dramatique de la situation. En revanche, l’affolement d’Orgon, qui contraste avec le flegme de Cléante, le rend autant risible
que pathétique.
2. a) Montrez en quoi la SCÈNE 1 de l’ACTE V ressemble à la SCÈNE 5 de l’ACTE I.
Dans les deux scènes, Orgon et Cléante ont un entretien au sujet de Tartuffe. Le premier fait toujours
preuve d’un comportement excessif et de naïveté ; le second tente de modérer les excès de son beau-frère
en discourant sur les mérites des vrais dévots, distincts des faux dévots.
b) Montez en quoi elles se distinguent en faisant ressortir, notamment, les renversements de
situations.
Contrairement à la SCÈNE 5 de l’ACTE I, Orgon et Cléante s’entendent sur la trahison de l’imposteur à la
SCÈNE 1 de l’ACTE V. Orgon soupçonnait Cléante de libertinage, c’est maintenant le raisonneur qui reproche à Orgon sa négligence en lui proposant de « [l]aisse[r] aux libertins ces sottes conséquences »
(v. 1621).
3. Pourquoi Orgon est-il désemparé ?
Orgon est désemparé parce qu’il a remis à Tartuffe une cassette que son ami Argas lui avait confiée,
laquelle contient des papiers « [o]ù sa vie et ses biens se trouvent attachés » (v. 1583). Maintenant qu’il a
expulsé l’imposteur, qui se prétend le propriétaire de la maison depuis la donation, Orgon éprouve une
terrible angoisse.
4. a) Comment Orgon justifie-t-il son geste imprudent ?
Orgon justifie son geste imprudent, c’est-à-dire la remise de la cassette à Tartuffe, en invoquant la restriction mentale, un point de doctrine jésuite traité par Pascal dans sa IXe Provinciale, qui consiste à « jurer
qu’on n’a pas fait l’acte effectivement réalisé en entendant en soi-même qu’on ne l’a pas fait un certain
jour » (voir la réplique d’Orgon, aux vers 1587 à 1592).
b) À quel autre raisonnement de Tartuffe, à l’ACTE IV, l’explication d’Orgon s’apparente-t-elle ?
L’explication d’Orgon s’apparente à la direction d’intention, un autre point de la casuistique, qui vise à
excuser les fautes par la bonne intention. C’est l’argument auquel a recours Tartuffe pour convaincre
Elmire de céder à ses avances (voir l’ACTE IV, aux vers 1489 à 1492).
c) Que révèle cette imprudence ?
L’imprudence d’Orgon révèle sa naïveté ou son aveuglement, mais surtout son manque de jugement
critique.
5. Quelle est la conséquence de cette imprudence pour Orgon ?
La conséquence de cette imprudence est évoquée vaguement par Cléante au vers 1597. La réponse apparaît explicitement à la SCÈNE 6, dans la réplique de Valère annonçant qu’un mandat d’arrestation a été
émis contre Orgon (v. 1835-1844).
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
31
6. Quel trait de la personnalité d’Orgon Cléante attise-t-il en lui reprochant son imprudence ?
Cléante attise son caractère impulsif et son sens de la démesure.
7. Montrez en quoi Cléante se distingue encore d’Orgon par son attitude et par les valeurs qu’il
préconise, aux vers 1607 à 1628.
Comme toujours, Cléante se distingue d’Orgon par sa modération ou sa mesure qui lui garantit la vigilance à l’égard des faux dévots et la reconnaissance de la vraie dévotion.
8. Quel ressort dramatique justifie le retour de Damis à la maison de son père ?
Le désabusement d’Orgon, qui annule implicitement le bannissement de Damis, constitue le ressort dramatique qui justifie le retour du fils. Bien sûr, ce retour apparaît précipité et plus ou moins vraisemblable.
9. Quel trait de caractère Damis expose-t-il dans son intervention ?
Toujours égal à lui-même, Damis, en fils loyal à l’égard de son père, est impétueux, colérique et vindicatif à l’égard de Tartuffe.
10. À quoi Cléante fait-il allusion aux vers 1640 et 1641 ?
Cléante fait allusion au début du règne de Louis XIV où l’ordre régnait, par opposition à la Fronde où les
affrontements violents étaient courants.
11. Quelle règle du théâtre classique Molière a-t-il failli transgresser à la SCÈNE 2 ? Justifiez.
Molière a plus ou moins affecté la vraisemblance, car le retour de Damis est plus ou moins bien préparé ;
il revient à la maison comme s’il n’avait jamais été chassé par son père. Cependant, la cohérence du personnage impulsif atténue cette relative invraisemblance.
Écriture
12. Quelle figure de style illustre le caractère d’Orgon dans les vers 1601 à 1606 ? Justifiez.
L’hyperbole est la figure de style qui illustre le caractère excessif d’Orgon. Les expressions « je renonce à
tous les gens de bien » (v. 1604), « une horreur effroyable » (v. 1605) et « pire qu’un diable » (v. 1606)
démontrent le revirement à 180 degrés d’Orgon, qui entend se montrer impitoyable, voire inhumain, à
l’égard des vrais dévots. Cette attitude mesquine souligne la prétendue dévotion d’Orgon, qui n’est
qu’apparence.
13. a) Sur quelle figure de style récurrente est construite l’argumentation de Cléante, aux vers 1607
à 1628 ?
L’argumentation de Cléante est construite sur l’antithèse.
b) Relevez-en trois exemples et expliquez-les globalement en faisant ressortir les champs lexicaux
auxquels ils se rattachent.
Cette figue d’opposition permet d’illustrer les contrastes entre le champ lexical de la mesure et celui de la
démesure d’Orgon et d’opposer la fausse dévotion à la bonne. On signale les exemples suivants : « vos
emportements » (v. 1607) et « les doux tempéraments » (v. 1608) ; « la droite raison » (v. 1609) et « d’un
excès » (v. 1610) ; « votre erreur » (v. 1611) et « une erreur plus grande » (v. 1614) ; « le cœur d’un
perfide vaurien » (v. 1615) et « les cœurs de tous les gens de bien » (v. 1616) ; « un fripon » (v. 1617) et
« vrai dévot » (v. 1620) ; « honorer l’imposture » (v. 1625) et « Péchez […] de cet autre côté » (v. 1628).
14. De quel procédé comique relève la solution que propose Damis ? Expliquez.
La solution que Damis propose relève du comique de caractère dans la mesure où elle souligne son impulsivité mêlée à la naïveté, et du comique de mots, par la plaisanterie bouffonne du vers 1634.
15. Identifiez et expliquez le procédé comique qu’emploie Cléante au vers 1638.
Cléante a recours à l’ironie pour tourner en dérision la violence et le manque de maturité de Damis.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
32
ACTE V, SCÈNES 4 ET 5
Compréhension
1. a) Quel ressort dramatique justifie l’intervention de M. Loyal ?
La donation d’Orgon justifie l’intervention de M. Loyal.
b) Son arrivée, ou le message qu’il apporte, peut-elle être considérée comme un coup de théâtre ?
Justifiez.
Oui, car, même si les personnages et le spectateur appréhendent la conséquence de la donation, ils ne
s’attendent pas à l’arrivée de l’huissier, suscitant d’abord un certain espoir, lequel s’assombrit lorsqu’il
annonce l’acte de saisie des biens d’Orgon.
2. Montrez en quoi, par son langage et son attitude, M. Loyal peut être considéré comme le confrère
et le complice de Tartuffe.
M. Loyal est bien un membre de la confrérie des dévots ou de la cabale par son langage affecté et son
comportement hypocrite. À l’instar de Tartuffe, il a recours à des formules qui mêlent la dévotion à la
préciosité : « Bonjour, ma chère sœur ; faites, je vous supplie » (v. 1717), « Le Ciel perde qui vous veut
nuire » (v. 1733), « Le Ciel vous tienne tous en joie » (v. 1809) ; la politesse et la violence : « Faites que
votre fils […] procès-verbal » (v. 1769-1771), « Pour tous les gens de bien […] façon moins douce »
(v. 1773-1778). On note l’ambiguïté sémantique qui frôle l’ironie : « Mon abord […] dont il sera bien
aise » (v. 1721-1722), « Ce n’est rien seulement qu’une sommation » (v. 1748), « J’aurais soin de ne pas
troubler votre repos » (v. 1787) et « Et comme je vous traite avec grande indulgence » (v. 1794). On
soupçonne que M. Loyal est le complice de Tartuffe, car il exécute l’ordre de l’imposteur dans l’illégalité
en invoquant la loi, c’est-à-dire une « certaine ordonnance » (v. 1746) pour justifier l’acte de saisie.
3. a) Quel conseil Cléante donne-t-il à Orgon avant de recevoir M. Loyal ?
Cléante recommande à Orgon de faire preuve de modération ou de calme devant M. Loyal afin d’en
arriver à une entente.
b) Pourquoi ?
Cléante donne ce conseil à Orgon, car il connaît les excès de son beau-frère dont les colères peuvent
facilement gâter les situations.
c) Orgon suit-il ce conseil ? Justifiez.
Grâce à sa courtoisie (v. 1735, 1736, 1739 et 1740), Orgon agit d’abord avec douceur, puis s’étonne dès
qu’il apprend l’acte de saisie (v. 1746, 1752, 1779 et 1780) et, finalement, tente de réfréner son désir
d’« assener/Le plus grand coup de poing » (v. 1799-1800) à M. Loyal.
4. Si l’on considère la position centrale qu’occupe M. Loyal dans cette scène de groupe, à quel autre
personnage, ayant déjà été dans une situation analogue, ressemble-t-il ? Justifiez.
Monsieur Loyal est l’écho de madame Pernelle à la SCÈNE 1 du premier acte, car il monopolise la conversation, constitue le centre d’intérêt, interrompt chacun et défend Tartuffe et les valeurs qu’il représente.
5. a) Quelle est la conséquence de l’intervention de M. Loyal pour Orgon et sa famille ?
La conséquence de l’intervention de M. Loyal qui vient exécuter l’acte de saisie est la perte de la propriété pour Orgon et l’expulsion de la famille.
b) Malgré tout, quel est l’aspect positif de cette intervention pour la famille ?
Toute la famille est désormais fixée sur l’imposture et l’appétit de Tartuffe, qui convoitait plus que la fille
et l’épouse. Madame Pernelle sort finalement de son aveuglement.
6. a) Quelle solution de dernière minute Elmire propose-t-elle afin de renverser la situation catastrophique qui s’abat sur la famille ?
Pour renverser la situation, Elmire propose de dénoncer publiquement l’escroquerie de Tartuffe dont l’imposture devrait annuler la validité de la donation.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
33
b) Ce recours serait-il efficace compte tenu du droit de l’époque ?
La solution d’Elmire constitue une piste efficace, car, compte tenu du droit français du XVIIe siècle, la
donation à un directeur de conscience est sans valeur légale ; de plus, comme Tartuffe use de manœuvres
dolosives en cachant sa véritable identité à Orgon, il commet une fraude qui annule de surcroît le contrat.
Écriture
7. Relevez et expliquez les procédés du comique de mots apparaissant dans les répliques de
M. Loyal.
Le comique de mots de M. Loyal oscille entre l’équivoque sémantique et l’ironie dans les expressions
suivantes : « Je ne suis pas pour être en ces lieux importuns » (v. 1720), « je viens pour un fait dont il sera
bien aise » (v. 1722), « je viens […] pour son bien » (v. 1723-1724). Dans ces premières répliques,
l’huissier, venant exécuter l’acte de saisie, agit comme un importun qui troublera Orgon, dépossédé de
son bien qui est désormais la propriété de Tartuffe. Les répliques « Le Ciel perde qui […] je désire »
(v. 1733-1734) et « Le Ciel vous tienne tous en joie » (v. 1809) sont tout à fait ironiques dans le contexte
où M. Loyal s’apprête à annoncer une catastrophe ou à mettre fin à une visite désagréable.
L’ironie est aussi présente dans les propos banalisant le drame de la situation (« Ce n’est rien seulement
qu’une sommation », v. 1748) ou atténuant la brutalité de l’acte de saisie (« j’ai de grandes tendresses »,
v. 1773 ; « On vous donne du temps […] surséance », v. 1780-1781 ; « J’aurais soin de ne pas troubler
votre repos », v. 1787 ; « Mes gens vous aideront […] mettre dehors », v. 1791-1792 ; « je vous traite
avec grande indulgence », v. 1794). Signalons aussi l’ironie, à l’égard d’Orgon, qui a pour effet de le
rendre muet (v. 1760-1762 et 1763-1766).
8. a) Relevez et expliquez les figures de style d’amplification apparaissant dans les répliques de
M. Loyal et précisez leur effet.
Les figures d’amplification et d’atténuation recoupent l’ironie de M. Loyal. Néanmoins, on peut considérer comme hyperboliques, voire emphatiques, les expressions qui contribuent à exagérer les sentiments de
l’huissier : « Toute votre maison m’a toujours été chère » (v. 1737), « le bonheur/D’en exercer la charge
avec beaucoup d’honneur » (v. 1743), « j’ai de grandes tendresses » (v. 1773) et « je vous traite avec
grande indulgence » (v. 1794). Ces figures révèlent l’hypocrisie évidente de l’huissier.
b) Relevez et expliquez les figures d’atténuation s’y trouvant et précisez leur effet.
Parmi les figures d’atténuation qui visent à banaliser le drame, on retrouve les litotes suivantes : « Mon
abord n’aura rien […] qui lui déplaise » (v. 1721) signifiant que la visite de l’huissier va terriblement
contrarier Orgon ; « je ne dois point avoir affaire à vous » (v. 1759) signifiant à Damis de se mêler de ses
affaires ; « Vous ne voudriez pas faire rébellion » (v. 1764) signifiant qu’Orgon va se soumettre calmement à l’acte de saisie ; « n’ayant pas pour vous le zèle […] moins douce » (v. 1777-1778) signifiant que
d’autres huissiers sans scrupules auraient pu agir plus brutalement ; « de ne rien souffrir qui ne soit à
propos » (v. 1788) signifiant que M. Loyal a l’intention de sévir contre toute contestation ; « On ne peut
pas user mieux que je fais » (v. 1793) signifiant que l’huissier accomplit son travail dans les règles de l’art
et de la courtoisie.
On signale aussi quelques euphémismes comme « un fait dont il sera bien aise » (v. 1722) atténuant l’acte
de saisie qui va choquer Orgon ; « je viens […] pour son bien » (v. 1723-1724) signifiant que M. Loyal
vient prendre possession du bien d’Orgon qui appartient désormais à Tartuffe ; « Signifier l’exploit de
certaine ordonnance » (v. 1746) signifiant annoncer l’acte de saisie en vertu d’une décision judiciaire ;
« J’aurais regret […] procès-verbal » (v. 1770-1771) signifiant que l’huissier accusera Orgon d’avoir entravé le travail d’un représentant de la loi ; « Mes gens […] mettre dehors » (v. 1791-1792) signifiant que
les hommes de main de M. Loyal expulseront la famille d’Orgon avec diligence ; « l’on décrète aussi
contre les femmes » (v. 1806) signifiant que l’on arrête et emprisonne aussi les femmes.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
34
9. De quel procédé comique relèvent les répliques de Damis, aux vers 1767, 1768, 1801 et 1802 ?
Expliquez.
Les répliques de Damis relèvent du comique de caractère, car elles illustrent le tempérament colérique du
fils qui se retient pour ne pas frapper l’huissier avec un bâton, comme on le ferait dans une farce.
10. De quel procédé comique relèvent les répliques de Dorine, aux vers 1772, 1803 et 1804 ?
Expliquez.
Les répliques de Dorine relèvent du comique de mots. Le vers 1772 oppose par antiphrase le nom
« Loyal » à l’adjectif « déloyal » ; le vers 1803 joue sur le double sens de l’expression « bon dos » qui signifie à la fois la partie de l’anatomie et la capacité d’assumer des responsabilités ; et le vers 1804 termine
la réplique sur un ton ironique évoquant aussi le désir de Dorine de frapper l’huissier avec un bâton.
11. Identifiez et analysez le procédé comique utilisé dans la réplique de Dorine, aux vers 1815
à 1820, et faites ressortir son efficacité dans le contexte de la SCÈNE 5.
Dorine ironise au moment le plus dramatique et provoque la colère d’Orgon. Elle tourne en dérision les
propos que soutenait précédemment madame Pernelle au sujet de Tartuffe comme l’avait fait Elmire avec
Orgon, à la SCÈNE 6 de l’ACTE IV. La réplique vise à servir une leçon à la mère et au fils, victimes de leur
aveuglement et de leur obstination, et contribue à détendre l’atmosphère de plus en plus angoissante.
ACTE V, SCÈNES 6 ET 7
Compréhension
1. a) Quel ressort dramatique justifie le retour de Valère à la SCÈNE 6 ?
La loyauté à l’égard de son futur beau-père, tombé en disgrâce, et le désir de le protéger, en facilitant sa
fuite, justifient le retour de Valère.
b) De quel nouveau et ultime danger est-il le messager ?
Valère annonce l’ultime danger qui guette Orgon, c’est-à-dire l’accusation de Tartuffe et la remise au roi
de la cassette compromettante (v. 1835-1840).
c) Pourquoi Molière a-t-il choisi ce personnage pour annoncer ce message ?
Molière a choisi Valère pour certaines raisons. D’abord, à l’approche du dénouement, il lui faut ramener
tous les personnages sur la scène, tout en retardant le plus longtemps possible l’entrée de Tartuffe. Valère,
plus que Cléante ou Damis, est tout à fait désigné pour faire le récit de la trahison de Tartuffe, car il est à
l’extérieur de la famille et peut donc plus vraisemblablement détenir des informations privilégiées ; de
plus, c’est en se faisant le sauveur d’Orgon, qui reconnaîtra sa générosité, qu’il obtiendra la main de
Mariane et annulera l’obstacle du mariage contrarié qui planait depuis la fin de l’ACTE I.
2. Quelle est la conséquence de cette nouvelle pour Orgon ?
Cette nouvelle a pour conséquence l’arrestation d’Orgon (v. 1842).
3. Quelle solution Valère propose-t-il à Orgon pour échapper au danger qui pèse sur lui ?
Valère propose à Orgon de fuir avec lui pour échapper à son arrestation (v. 1849-1854).
4. a) Combien de temps s’est-il écoulé depuis la fin de l’ACTE IV ?
Au vers 1836, Valère dit que Tartuffe a dénoncé Orgon « [d]epuis une heure ». Cependant, à la fin de
l’ACTE IV, on peut présumer que Tartuffe quitte la maison vers quatre heures, puisqu’à la fin de la première scène, il a signalé qu’il était « trois heures et demie » (v. 1266). On peut donc estimer à au moins
trois heures l’ellipse temporelle entre les ACTES IV et V, car, avant de se rendre à la cour, l’imposteur a dû
s’enquérir auprès de l’huissier pour faire exécuter l’acte de saisie des biens d’Orgon.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
35
b) Compte tenu des événements qui se bousculent à l’ACTE V, cette ellipse temporelle respecte-t-elle
la vraisemblance requise par le théâtre classique ? Justifiez.
L’ellipse temporelle et l’accélération de l’action sont à la limite de la vraisemblance du théâtre classique,
car, dans la réalité, il aurait fallu plus de temps à Tartuffe pour convaincre l’huissier et obtenir un entretien auprès du roi. À l’approche du dénouement, Molière a dû bousculer les événements afin d’augmenter
la tension dramatique.
5. Quel est « le détail du crime », au vers 1841, qu’ignore Valère, mais qu’Orgon a révélé
précédemment à Cléante ?
« Le détail du crime » est révélé par Orgon aux vers 1579 à 1583. Il a accepté, de son ami Argas, une
cassette qui contient des documents compromettants.
6. Montrez en quoi la trahison de Tartuffe, auprès du roi, lui permet d’atteindre son objectif ultime.
La trahison de Tartuffe couronne son objectif ultime, car, après avoir obtenu frauduleusement le bien
d’Orgon, il souhaite que le roi lui accorde son statut social en reconnaissance de sa dénonciation.
7. a) Quel ressort dramatique justifie le retour de Tartuffe à la dernière scène ?
Valère a annoncé le retour de Tartuffe accompagné de celui qui doit arrêter Orgon (v. 1843-1844). Le
ressort dramatique externe est sans doute attribuable à l’ordre du roi ; le ressort dramatique interne est lié
au désir de Tartuffe de savourer son triomphe éphémère devant son hôte.
b) Pourquoi revient-il accompagné de l’exempt ?
Tartuffe revient accompagné de l’exempt parce que ce dernier a reçu l’ordre de l’arrêter en présence
d’Orgon.
c) À quelle nécessité dramatique le retour du traître obéit-il ?
Le retour de Tartuffe n’est pas, a priori, essentiel à l’action, car l’exempt pourrait seul annoncer l’arrestation de l’imposteur. Cependant, compte tenu de l’importance de cet ultime coup de théâtre qui amorce le
dénouement heureux, Molière a dû écarter le récit et ramener Tartuffe sur la scène afin de faire voir son
vrai visage d’arriviste et de criminel.
8. a) Bien que Tartuffe se soit révélé un imposteur qui a trahi la confiance d’Orgon, montrez qu’il
continue néanmoins à jouer un rôle, qu’il reste fidèle au personnage hypocrite de faux dévot qu’il a
su composer depuis le début.
Devant Orgon qu’il nargue, Tartuffe compose toujours son personnage d’hypocrite en invoquant les valeurs qu’il défend, à la différence, cette fois, qu’il n’entend plus servir les intérêts du Ciel mais « l’intérêt
du Prince » (v. 1880) qui constitue un « devoir sacré » (v. 1881). Son langage et son attitude de faux
dévot sont fidèles à l’image qu’il a projetée et parodient presque les propos d’Orgon (v. 1883-1884) qui,
en présence de Cléante, avouait son détachement pour sa famille et ses amis (v. 276-279).
b) Quel nouvel idéal l’anime désormais ?
Servir le roi est son nouvel idéal.
9. Pourquoi l’exempt laisse-t-il parler Tartuffe, retardant ainsi le moment de son arrestation
officielle ?
L’exempt laisse d’abord parler Tartuffe afin de prolonger la tension dramatique et de favoriser l’effet de
surprise du coup de théâtre par lequel il prononcera l’arrestation de l’imposteur qui, après avoir pavoisé
avec mépris, subira un échec encore plus spectaculaire.
10. a) Montrez en quoi l’arrestation de Tartuffe constitue un coup de théâtre qui provoque le
dénouement.
Du point de vue de l’action, l’arrestation de Tartuffe constitue un coup de théâtre, car les personnages et
les spectateurs appréhendent l’arrestation d’Orgon ; du point de vue dramatique, on doit s’attendre à un
incident qui vient châtier le coupable et restaurer l’ordre familial.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
36
b) Montrez en quoi ce dénouement, relevant du deus ex machina, respecte les règles du théâtre
classique d’une part et celles de la comédie d’autre part.
Ce dénouement respecte les règles du théâtre classique, car il écarte le dernier péril de manière rapide et
décisive malgré l’intervention du deux ex machina qui s’inscrit dans l’esprit baroque ; ce dénouement
heureux souscrit aussi aux exigences de la comédie en abolissant tous les périls et en favorisant le
mariage de Valère et de Mariane.
11. Pourquoi Tartuffe ne répond-il pas aux questions que lui pose Cléante aux vers 1887 à 1896 ?
Tartuffe ne répond pas aux questions, car il reconnaît la vérité des propos de Cléante contre lesquels il n’a
aucun argument. Sa réplique s’adressant à l’exempt souligne son mépris et son pouvoir illusoire.
12. a) Pourquoi Tartuffe reste-t-il muet jusqu’à la fin de la pièce après qu’un mandat d’arrestation
eut été prononcé contre lui aux vers 1901 à 1903 ?
Après avoir interrogé l’exempt au vers 1904 et constaté sa méprise, Tartuffe reste silencieux jusqu’à la
fin, car il a perdu la partie et doit s’incliner devant le pouvoir royal qui l’a démasqué et le condamne à la
prison.
b) Comment interprétez-vous ce silence du point de vue dramaturgique, c’est-à-dire du point de
vue de la cohérence du personnage ?
Du point de vue dramaturgique, le silence de Tartuffe contribue à maintenir le caractère opaque et
énigma-tique du personne dont l’âme reste un mystère qui interpelle le spectateur après la représentation.
c) Si Molière avait donné la possibilité à Tartuffe de s’exprimer en aparté, quel type de réplique lui
aurait-il mis en bouche ? Justifiez.
Ce dernier silence de Tartuffe, comparable à celui qui a préparé son intervention à l’ACTE III, SCÈNES 4, 5
et 6, pourrait être stratégique dans la mesure où il viserait à obtenir une sanction moins sévère en suscitant
la pitié du roi. Le vers 1182, « La volonté du Ciel soit faite en toute chose », pourrait être mis en aparté
pour illustrer la cohérence de l’imposteur qui, même dans la défaite, ne joue plus, mais vit son personnage
jusqu’au bout.
13. a) De qui l’exempt est-il le messager ou le porte-parole ? Justifiez.
L’exempt est le messager du prince, c’est-à-dire le roi Louis XIV, qui a su démasquer l’imposture de
Tartuffe. L’exempt a été chargé par le roi d’accompagner Tartuffe pour l’arrêter en présence d’Orgon.
b) Pourquoi Molière n’a-t-il pas fait paraître sur scène l’auteur du message ?
Molière a dû faire appel à un représentant de l’autorité royale, car le genre de la comédie lui interdisait de
faire paraître le roi sur scène, contrairement à la comédie héroïque ou à la tragédie.
14. Grâce aux grandes qualités qui sont évoquées à son sujet, de quel personnage de la pièce
l’auteur du message peut-il représenter l’antithèse ? Justifiez.
Comme les qualités du roi sont le discernement, la raison et la perspicacité, Louis XIV apparaît comme
l’antithèse d’Orgon, ce père aveugle, excessif et fanatique. En revanche, à l’instar du roi, Orgon sait faire
preuve de loyauté à l’égard de Louis XIV et de générosité envers Valère.
15. Quelle morale ou quelle leçon Cléante tire-t-il de la démarche de Tartuffe et du sort qui
l’attend ?
La morale de Cléante est d’inspiration chrétienne, car il incite Orgon au pardon, à la mesure et à la clémence à l’égard de Tartuffe, dont il souhaite un retour à la vertu et la correction de son vice susceptibles
de lui mériter un châtiment moins sévère de la part du roi (v. 1947-1955).
16. a) Quel ressort dramatique justifie la dernière phrase d’Orgon, aux vers 1959 à 1962 ?
La loyauté de Valère et le désir de lui manifester sa reconnaissance pour la protection qu’il lui a offerte
avant l’arrivée de l’exempt et de Tartuffe justifient l’intention d’Orgon d’accorder la main de sa fille à
l’homme qu’elle aime.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
37
b) À quelle nécessité dramaturgique obéissent ces dernières paroles ?
Ces dernière paroles obéissent au dénouement final qui résout le premier obstacle, c’est-à-dire le mariage
contrarié de Valère et de Mariane.
Écriture
17. Relevez et expliquez, dans les répliques de Tartuffe, les expressions et les figures de style qui
connotent son triomphe et le mépris qu’il éprouve envers Orgon et sa famille.
Le triomphe de Tartuffe et son mépris pour Orgon et sa famille apparaissent dans des figures d’atténuation comme les litotes suivantes : « Vous n’irez pas fort loin […] gîte » (v. 1862) signifiant qu’Orgon sera
conduit à la prison ; « Vos injures […] aigrir » (v. 1867) et « Tous vos emportements […] m’émouvoir »
(v. 1871) signifiant que les injures d’Orgon et la violence de Damis le laissent indifférent. On signale
aussi l’euphémisme, la métaphore et la métonymie aux vers 1881 et 1882 : « De ce devoir sacré […] mon
cœur toute reconnaissance » qui signifient que la répression légitime qui s’abat sur Orgon empêche
Tartuffe de manifester sa gratitude à son hôte.
18. Montrez en quoi la tirade de l’exempt, aux vers 1904 à 1944, constitue, de la part de Molière, un
hommage à la gloire de Louis XIV, un éloge enthousiaste à la grandeur du pouvoir royal. À cet
égard, relevez les expressions empruntées aux champs lexicaux de la vue et de la lumière et précisez
de quelle figure de style elles relèvent.
La tirade de l’exempt évoque la perspicacité du roi en recourant à des expressions empruntées aux
champs lexicaux de la vue et de la lumière : « les yeux se font jour » (v. 1907), « une droite vue »
(v. 1910), « sans aveuglement il fait briller » (v. 1914), « par ses vives clartés » (v. 1919), « Que pour voir
l’impudence » (v. 1931) et « On vous vit témoigner » (v. 1940). Compte tenu de l’analogie entre la clairvoyance et la lumière, la plupart de ces expressions relèvent de la métaphore.
19. Dans cette tirade, relevez et expliquez trois litotes.
Parmi les litotes de la tirade, on retrouve « que ne peut tromper tout l’art des imposteurs » (v. 1908) et
« Chez elle […] en nul excès » (v. 1911-1912) qui signifient que le roi, clairvoyant, sait déjouer les complots avec raison et mesure ; « Et l’amour […] d’horreur » (v. 1915-1916) signifie que le roi, sensible aux
actions des vrais dévots, est intransigeant à l’égard des imposteurs ; « Celui-ci n’était pas […]
surprendre » (v. 1917) signifie que l’imposture de Tartuffe était trop évidente pour passer inaperçue aux
yeux du roi ; « Que jamais […] ne perd rien » (v. 1943) signifie que le mérite finit toujours par être
généreusement récompensé par le roi.
20. Identifiez et expliquez la figure de style contenue dans le substantif « cœur » apparaissant aux
vers 1907, 1915, 1920 et 1941.
La figure de style contenue dans le substantif « cœur », au vers 1907, est une synecdoque, car l’organe
biologique signifie les personnes qui ont un cœur ; on peut aussi parler de métonymie, car le cœur, organe
concret, renvoie aux concepts abstraits de la sensibilité, des émotions et de la vie intérieure, comme c’est
le cas aux vers 1915, 1920 et 1941.
21. Identifiez et expliquez les deux figures de style apparaissant aux vers 1925 et 1926.
Le vers 1925 est une métaphore où l’on compare les nombreux crimes de Tartuffe à la noirceur et à l’obscurité qui connotent le mal ; le vers 1926 est une hyperbole, car l’exempt exagère la somme des crimes
qui, dans la réalité, ne pourraient former des volumes d’histoire.
22. Identifiez le procédé syntaxique récurrent employé dans la tirade de l’exempt et précisez son
effet.
Le procédé syntaxique employé de façon récurrente dans la tirade de l’exempt est l’inversion du complément de phrase (complément circonstanciel, de nom, d’objet indirect placé avant le sujet) aux
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
38
vers 1909, 1911, 1914, 1918, 1922, 1929, 1935, 1942 et 1944. Ce procédé, renforcé par l’antéposition de
l’adjectif, contribue à souligner la prestance du roi et à suggérer son caractère presque divin.
23. Identifiez et expliquez deux figures de style apparaissant aux vers 1952 et 1953.
Dans les vers 1952 et 1953, on trouve une antithèse par l’opposition des mots « vertus » et « vice » ;
l’expression « fasse un heureux retour » est une métaphore qui établit l’analogie entre la marche arrière et
le désir de faire le bien ou d’accomplir des actions vertueuses ; l’expression « Qu’il corrige sa vie » est
une métonymie qui emploie le concept « vie » pour signifier les erreurs, les fautes de sa vie.
Synthèse de l’ACTE V
Bien qu’Orgon ait reconnu son aveuglement et récupéré une certaine autorité au cours de l’ACTE V,
montrez qu’il reste fidèle à lui-même en continuant de se fier toujours aux apparences ; en d’autres
termes, démontrez que le personnage n’a rien appris de sa mésaventure, qu’il n’a pas évolué et
qu’il pourrait éventuellement commettre d’autres erreurs semblables.
1. Orgon, désemparé, ne peut trouver seul une issue à son problème.
2. Orgon, désabusé, s’entête à persuader sa mère qu’il a vu l’imposture de Tartuffe.
3. Devant M. Loyal, Orgon finit par s’emporter.
4. Orgon s’en prend à Tartuffe, condamné à la prison.
5. Orgon veut servir le roi qui le restitue dans ses droits.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
39
QUESTIONS DE SYNTHÈSE ET SUJETS DE DISSERTATIONS
1. Tartuffe est une créature d’Orgon ; il s’ajuste à ses désirs. Orgon a créé Tartuffe par besoin de
servir une cause plus grande que lui, par désir de s’abandonner, d’abdiquer son pouvoir et de fuir
les responsabilités. Démontrez la vérité de cette affirmation.
Pour les éléments de réponse, voir :
-ACTE I, SCÈNES 3 et 5 ;
-ACTE II, SCÈNE 2 ;
-ACTE III, SCÈNES 6 et 7 ;
-ACTE IV, SCÈNES 3 et 4 ;
-ACTE V, SCÈNES 1 et 6.
2. Bien que la comédie du Tartuffe souscrive aux règles du théâtre classique, à savoir les trois unités
de temps, de lieu et d’action, montrez qu’elle a recours, dans son écriture, à certains procédés
relevant de l’esthétique baroque.
Pour les éléments de réponse, voir :
-Les questions concernant la démesure d’Orgon et les paradoxes de Tartuffe : ACTE I, sc. 4, q. 2 ; ACTE III,
sc. 1 et 2, q. 8 ; sc. 3, q. 4 et 5 ; sc. 6 et 7, q. 2, 3 et 7 ; ACTE IV, sc. 1, q. 3 ; sc. 2, 3 et 4, q. 2 ; sc. 6, 7 et 8,
q. 1 ; Extrait 1, q. 5 ; Extrait 2, q. 7 ; Extrait 3, q. 7.
-Les questions concernant les figures d’amplification (hyperboles, périphrases et métaphores fortes) et les
procédés d’insistance (répétition, pléonasme) : ACTE I, sc. 5, q. 9 ; ACTE II, sc. 3 et 4, q. 11 et 16 ;
ACTE III, sc. 6 et 7, q. 13 ; ACTE V, sc. 1, q. 12 ; sc. 4 et 5, q. 8 ; sc. 6 et 7, q. 18 ; Extrait 1, q. 13 ;
Extrait 2, q. 14 et 15 ; Extrait 3, q. 16, 17 et 18 ; Extrait 4, q. 8 et 10.
3. Montrez comment, par son intransigeance et son refus de voir la vérité, Orgon impose aux gens
de son entourage de porter un masque, les force indirectement à jouer malgré eux un rôle qu’ils
refusent.
Pour les éléments de réponse, voir :
-ACTE II, sc. 2 : Orgon impose la soumission à Mariane et contraint Dorine à l’insolence.
-ACTE III, sc. 3 : Par son désir de marier Mariane à Tartuffe, Orgon amène Elmire à obtenir le désistement de Tartuffe et Damis, à épier sa belle-mère et l’imposteur.
sc. 4 et 5 : Damis dénonce Tartuffe, Elmire se défend.
sc. 6 : Tartuffe joue la comédie du pécheur.
-ACTE IV, sc. 3 : Mariane joue la victime.
sc. 4 et 5 : Elmire propose le stratagème et joue la séductrice pour piéger Tartuffe.
4. Montrez comment Tartuffe peut être comparé à un virus ou à un cancer qui s’est infiltré dans la
maison et dans la tête d’Orgon pour le détruire. Par conséquent, faites voir les astuces ou les
remèdes parfois audacieux auxquels les membres de la famille doivent avoir recours afin de rétablir
la santé mentale d’Orgon et de ramener l’ordre dans la maison.
Pour les éléments de réponse, voir :
-ACTE I, sc. 1 : Madame Pernelle, entichée de Tartuffe, sème l’inquiétude dans la famille.
sc. 2 : Dorine souligne l’influence de Tartuffe sur Orgon.
sc. 5 : Cléante constate l’aveuglement d’Orgon.
-ACTE II, sc. 2 : Dorine, insolente, tente de dissuader Orgon de marier sa fille à Tartuffe.
sc. 4 : Dorine complote avec Mariane et Valère pour retarder le mariage forcé.
-ACTE III, sc. 3 : Damis se cache pour surprendre Tartuffe et Elmire. Celle-ci essaie d’obtenir que l’imposteur renonce à Mariane.
sc. 4 et 5 : Damis surprend Tartuffe et le dénonce à son père.
sc. 6 et 7 : Par sa comédie du pécheur, Tartuffe manipule Orgon.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
40
7-ACTE IV, sc. 1 : Cléante tente de persuader Tartuffe de se réconcilier avec Damis.
sc. 2 : Orgon impose le mariage à Mariane, mais Elmire propose le stratagème pour démasquer
Tartuffe.
sc. 3 : Stratégie de la séduction d’Elmire.
-ACTE V, sc. 3 : Madame Pernelle est toujours entichée de Tartuffe malgré les efforts d’Orgon pour la
désabuser.
sc. 7 : Seule la clairvoyance du roi peut rétablir l’ordre familial.
Plan suggéré
A. Tartuffe : un criminel redoutable
1. Un virus qui a contaminé madame Pernelle ;
2. Un cancer qui ravage l’esprit d’Orgon ;
3. Un parasite qui s’approprie l’épouse et le bien d’Orgon ;
4. Un arriviste qui trahit son hôte et convoite son statut social.
B. Les moyens pour détruire l’imposteur
1. Cléante tente de raisonner Orgon et de faire la leçon à Tartuffe ;
2. Dorine a recours à l’insolence pour dissuader Orgon de marier sa fille avec Tartuffe ;
3. Elmire a recours à la séduction pour piéger l’imposteur ;
4. Damis épie Tartuffe qu’il dénonce à son père ;
5. Le roi seul démasque Tartuffe et le condamne à la prison.
5. Le Tartuffe est une comédie classique qui a des accents de tragédie. Elle préfigure ainsi le drame
bourgeois du XVIIIe siècle. Critiquez cette affirmation.
Éléments de réponse
1. Comédie classique : une grande comédie de mœurs et de caractère
-Respect de la règle des trois unités ;
-Respect de la vraisemblance et la bienséance ;
-Recours au comique de mots, de situation, de caractère et de mœurs.
2. Accents tragiques : une technique de l’engrenage
-Le mariage forcé incite Mariane au suicide ;
-La loyauté de Damis le condamne au bannissement paternel ;
-L’aveuglement d’Orgon accentue sa vulnérabilité ;
-La visite de M. Loyal confirme la perte de la propriété ;
-La trahison de Tartuffe incite Orgon à s’enfuir ;
-Le triomphe de l’imposteur confirme l’arrestation d’Orgon ;
-L’imposture de Tartuffe est un fléau politique.
3. Préfiguration du drame bourgeois
-Personnages issus de la bourgeoisie ;
-Le problème d’Orgon est d’ordre privé ;
-Un mélange de comique et de tragique.
6. Le personnage de Tartuffe est fondamentalement athée et libertin. Critiquez cette affirmation.
Plan suggéré
1. Tartuffe, athée et libertin
-L’idéologie religieuse est un masque qui dissimule l’appétit pour le luxe et les femmes.
2. Tartuffe, chrétien et dévot
-La langage et les actes de Tartuffe révèlent une éducation catholique, à tout le moins la maîtrise
de codes religieux du catholicisme.
3. Tartuffe, un Protée mystérieux
-L’absence d’aparté et le silence de Tartuffe après son arrestation rendent le personnage opaque et
énigmatique.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
41
7. Les buts de la comédie, selon Molière, sont de plaire tout en corrigeant les vices des êtres humains. À cet égard, Le Tartuffe fait preuve de pessimisme puisque aucun des personnages de la
pièce ne s’améliore sur le plan moral. Critiquez cette affirmation.
Plan suggéré
1. Les personnages susceptibles de s’améliorer :
1.1 Cléante, sévère à l’égard de Tartuffe, réclame le pardon d’Orgon qui reconnaît la sagesse de son
beau-frère.
1.2 Elmire s’excuse d’avoir dupé Tartuffe par sa comédie de la séduction.
1.3 Désavoué par Orgon, qui lui préfère Tartuffe comme gendre, Valère fait preuve de loyauté et de
générosité.
1.4 On peut présumer que Tartuffe profitera de son séjour en prison pour se repentir et devenir
vertueux.
2. Les personnages qui risquent peu de s’améliorer :
2.1 Damis et Mariane demeurent toujours impétueux et excessifs.
2.2 Dorine, toujours forte en gueule, restera néanmoins insolente.
2.3 Madame Pernelle, prisonnière de ses préjugés, fera toujours preuve d’entêtement.
2.4 Orgon, prêt à servir le roi, peut encore abdiquer ses responsabilités.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
42
EXTRAIT 1
ACTE I, SCÈNE 5
Vers 259 à 317
Action et personnages
1. Relevez, dans les propos d’Orgon, les mots et les expressions empruntés au champ lexical de la
dévotion ou de la religion qui révèlent qu’il est un dévot.
Le champ lexical de la dévotion comprend les mots et expressions suivants : « ravissements » (v. 271),
« paix profonde » (v. 273), « mon âme » (v. 277), « l’église » (v. 283), « sa prière » (v. 286), « l’eau
bénite » (v. 290) et « Il s’impute à péché » (v. 306).
2. L’attitude et les sentiments qu’éprouve Orgon pour Tartuffe sont-ils fidèles au portrait qu’en a
brossé Dorine à la SCÈNE 2 ? Justifiez.
Oui. Aux vers 185 et 186, Dorine soutient qu’Orgon est plus attaché à Tartuffe qu’aux membres de sa
famille ; aux vers 195 à 197, elle estime que son maître est fou de son héros qu’il admire démesurément.
3. Montrez en quoi ces sentiments ressemblent au coup de foudre amoureux.
Orgon fait l’éloge de Tartuffe comme s’il était tombé amoureux de lui. Les mots « charmé » (v. 270),
« ravissements » (v. 271), « paix profonde » (v. 273) et surtout le vers 275, « Oui, je deviens tout autre
avec son entretien » illustrent l’extase et la métamorphose intérieure d’Orgon épris de son héros comme
d’une maîtresse.
4. a) Relevez, dans la réplique d’Orgon, aux vers 281 à 310, les expressions empruntées au champ
lexical de la vue ou du regard.
Les expressions du champ lexical de la vue sont : « si vous aviez vu » (v. 281), « Tout vis-à-vis de moi »
(v. 284), « Il attirait les yeux » (v. 285), « à mes yeux » (v. 298) et « Je vois » (v. 301).
b) Montrez qu’elles révèlent la stratégie de manipulation de Tartuffe et la naïveté d’Orgon.
Ces expressions illustrent l’importance pour Tartuffe d’attirer l’attention d’Orgon et de l’impressionner
par sa dévotion ostentatoire.
5. a) Mettez en valeur le caractère paradoxal du portrait qu’Orgon dresse de Tartuffe aux vers 281
à 310.
Orgon brosse le portrait d’un homme dévot, profondément pieux et humble, mais les gestes et les attitudes
ostentatoires de Tartuffe contredisent les valeurs chrétiennes où la discrétion et la sobriété seraient
appropriées.
b) Montrez comment, en vantant les mérites de Tartuffe, Orgon le présente à son insu comme un
hypocrite dont il ne perçoit que les apparences ou le masque.
En s’attardant aux signes extérieurs de la dévotion et de la charité (« se mettre à deux genoux », v. 284 ;
« il poussait sa prière », v. 286 ; « Il faisait des soupirs, de grands élancements », v. 287 ; « à mes yeux, il
allait le répandre », v. 298), Orgon décrit le comportement d’un hypocrite qui veut édifier et tromper par
les apparences.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
43
6. a) Quelle menace pour Orgon laissent présager les vers 301 à 304 ?
L’intérêt extrême et la jalousie de Tartuffe à l’égard de la femme d’Orgon annoncent le désir de l’hypocrite pour Elmire.
b) Reliez le vers 304 à l’allusion faite par Dorine au vers 84.
Au vers 84, Dorine a déjà soupçonné Tartuffe d’être jaloux d’Elmire, c’est-à-dire d’en être amoureux.
Écriture
7. Quelle est la connotation de la comparaison apparaissant au vers 274 ?
La comparaison « comme du fumier » connote le désintérêt, voire le mépris, de Tartuffe pour les gens.
8. Identifiez et expliquez la figure de style d’atténuation apparaissant aux vers 276 et 277.
La litote « à n’avoir affection pour rien » signifie devenir complètement indifférent à toute personne ; la
métaphore « détache mon âme » peut aussi être un euphémisme signifiant que Tartuffe incite Orgon à
rompre avec sa famille de manière affective, ce que confirme son indifférence à l’égard de la mort éventuelle de ses proches (v. 278-279).
9. Identifiez et expliquez la figure de style qu’emploie Cléante au vers 280.
L’expression « Les sentiments humains » relève de l’ironie, car Cléante trouve les sentiments d’Orgon
complètement inhumains et désapprouve son insensibilité.
10. Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 285.
Le verbe « attirait » est une métaphore signifiant que Tartuffe exerce un pouvoir d’attraction sur l’assemblée ; le substantif « yeux » (mot concret) peut être considéré comme une métonymie du mot regard (mot
abstrait) ou une synecdoque (une partie) désignant toutes les personnes qui regardent (le tout).
11. Identifiez et expliquez les procédés syntaxiques employés aux vers 286 et 287.
Le vers 286 contient une inversion du complément de phrase (circonstanciel) « au Ciel » précédant le
sujet de manière à accentuer la connotation prestigieuse du substantif ; le vers 287 contient une gradation
ascendante ou croissante de groupe binaire qui contribue à mettre en valeur la gestuelle ostentatoire de
Tartuffe.
12. Identifiez et expliquez la figure de style d’atténuation apparaissant au vers 296.
Il s’agit d’une litote signifiant que Tartuffe estime ne mériter que le mépris et l’antipathie d’Orgon. Il
s’agit d’une astuce rhétorique visant à susciter encore plus l’attendrissement et la compassion.
13. Faites ressortir la nature hyperbolique, voire grotesque, des actions ou des gestes de Tartuffe
que décrit Orgon.
Si les actions de l’hypocrite étaient celles d’un vrai dévot, elles passeraient inaperçues. Or, Tartuffe doit
attirer l’attention d’Orgon par des gestes d’éclat susceptibles de l’impressionner. Les soupirs, les grands
élancements, l’action de baiser humblement la terre, celle de répandre l’argent aux pauvres, l’intérêt
extrême qu’il porte à l’honneur d’Orgon, l’attitude très jalouse (« plus que moi six fois » v.304), sa
facilité à se scandaliser pour rien et sa culpabilité à l’égard d’une puce qu’il a « tuée avec trop de colère »
(v.310) illustrent la démesure et le ridicule du personnage.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
44
Sujet d’analyse littéraire
14. Analysez le caractère comique du portrait de Tartuffe en le comparant à ceux de Daphné et
d’Orante esquissés à la SCÈNE 1.
1er paragraphe : Tartuffe feint la dévotion pour tromper sa dupe et obtenir ses faveurs. Il fait preuve d’un
rigorisme apparent pour édifier Orgon.
2e paragraphe : Daphné est une femme médisante qui blâme la conduite de ses semblables pour détourner
la réprobation publique à l’égard de ses propres erreurs.
3e paragraphe : Orante condamne la vie mondaine de la maison d’Orgon et adopte une attitude de pruderie
depuis que l’âge ne lui permet plus de jouer les coquettes auprès des courtisans.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
45
EXTRAIT 2
ACTE III, SCÈNE 3
Vers 933 à 1021
Action et personnages
1. Divisez l’extrait en deux parties et donnez un titre à chacune d’elles.
Première partie (vers 933 à 960) : La déclaration d’amour de Tartuffe à Elmire.
Deuxième partie (vers 961 à 1021) : La révélation du vrai visage de Tartuffe.
2. a) Divisez la première tirade de Tartuffe (vers 933 à 960) en trois parties et faites ressortir les
articulations de l’argumentation.
1. Vers 933 à 944 : trois quatrains où Tartuffe exprime sa conception platonicienne de l’amour qui
fait de la femme une créature de Dieu.
2. Vers 945 à 952 : deux quatrains qui exposent le recul de Tartuffe à l’égard de sa passion et son
accommodement moral.
3. Vers 953 à 960 : deux quatrains où le soupirant se montre indigne de l’être aimé auquel il
abandonne son sort.
b) Faites la même chose pour la deuxième tirade (vers 966 à 1000).
La deuxième tirade laisse de côté le platonisme et la casuistique pour proposer un adultère sans risque.
1. Vers 966 à 970 : Tartuffe est un homme fait de chair.
2. Vers 971 à 986 : la beauté d’Elmire est responsable de la faiblesse de Tartuffe qui est prêt à
rendre un culte divin à sa déesse.
3. Vers 987 à 1000 : l’adultère avec un dévot est un gage de discrétion et une source de volupté
sereine.
3. Dans la première tirade, montrez comment Tartuffe essaie d’enlever progressivement son masque, mais qu’il en est, en même temps, prisonnier.
Le recours à l’amour platonicien pour exprimer son attirance physique à l’égard d’Elmire, la considération de cette inclination comme une épreuve diabolique, puis l’accommodement moral, par lequel il se
donne bonne conscience, illustrent son hésitation entre l’aveu de ses sentiments amoureux et le rôle de
dévot qu’il s’est imposé.
Le mélange du vocabulaire de la religion et de l’amour montre l’ambivalence du personnage (voir la
question numéro 13).
4. Identifiez et expliquez les vers qui illustrent l’opportunisme et l’hypocrisie de Tartuffe en matière
d’amour et de religion, dans la première tirade, puis dans la seconde.
Bien que Tartuffe apparaisse, dans la première tirade, comme un amoureux sincère à l’égard d’Elmire, on
peut douter de son honnêteté aux vers 945 à 948. Les vers 949 à 952, où il a recours à la casuistique pour
ajuster sa passion à sa pudeur, illustrent son opportunisme en matière de morale.
Dans la seconde tirade, Tartuffe, en posant le masque, fait preuve d’une plus grande sincérité de sentiments. Pourtant, les vers 976, 977 et 995 prouvent qu’il ment, car il ne se livre pas à ces pratiques de la
vie dévote et est probablement une personne médisante. Les vers 997 à 1000 révèlent l’hypocrisie de
Tartuffe et de ses confrères enclins à commettre secrètement l’adultère.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
46
5. a) Pourquoi Elmire se dit-elle surprise de la déclaration de Tartuffe ?
Même si elle se doute des sentiments de Tartuffe à son égard, Elmire se dit surprise de la déclaration de
ce dernier, car elle ne s’attendait pas à un aveu si rapide de la part d’un dévot.
b) Pourquoi n’a-t-elle pas réagi plus tôt ?
Elle n’a pas réagi plus tôt, car elle a intérêt à laisser aller Tartuffe jusqu’au bout de sa déclaration, de
manière à mieux le piéger éventuellement.
6. a) Quelle objection Tartuffe offre-t-il à Elmire pour justifier sa déclaration et son attitude ?
Pour justifier sa déclaration et son attitude, Tartuffe évoque sa nature d’homme fait de chair, laquelle,
selon lui, n’est pas incompatible avec son statut de dévot.
b) Montrez en quoi, selon lui, son comportement est tout à fait honnête et irréprochable.
Selon Tartuffe, son comportement est tout à fait honnête, car il a résisté aux charmes d’Elmire et a
déployé des efforts pour se détourner d’elle en vain ; son attitude est plus noble que celle des galants de
cour, dont l’indiscrétion met en péril l’honneur des maîtresses. La discrétion qu’assure Tartuffe mettrait
donc Elmire à l’abri du scandale.
7. Dans la deuxième tirade, aux vers 966 à 1000, montrez comment Tartuffe dévoile de plus en plus
son vrai visage d’amoureux sincère, mais de faux dévot concupiscent.
En avouant ses faiblesses d’homme fait de chair, sensible aux charmes d’Elmire et pour laquelle il
exprime « Une dévotion à nulle autre pareille » (v. 986), Tartuffe offre son vrai visage d’amoureux.
Cependant, lorsqu’il la convie à commettre l’adultère, il transgresse les règles de la morale chrétienne et
trahit les principes auxquels il est sensé adhérer.
8. Identifiez et expliquez le vers illustrant qu’Elmire est responsable des sentiments qu’éprouve
Tartuffe.
Le vers 972, « Vous devez vous en prendre à vos charmants attraits », illustre la responsabilité d’Elmire.
C’est à cause de ses charmes que Tartuffe est séduit.
9. a) Pourquoi Tartuffe fustige-t-il les galants de cour aux vers 989 à 994 ?
Tartuffe fustige les galants de cour parce qu’ils sont vaniteux de leurs conquêtes féminines et irrespectueux à l’égard de celles dont ils trahissent le secret de leurs liaisons.
b) Montrez en quoi lui et ses semblables se distinguent de ceux-ci.
Tartuffe et ses semblables, c’est-à-dire les membres du parti dévot, se distinguent des galants de cour par
leur discrétion.
10. a) À quelle astuce a recours Tartuffe pour convaincre Elmire de la sincérité de sa déclaration ?
Pour convaincre Elmire de la sincérité de sa déclaration, Tartuffe maintient le vocabulaire de la dévotion
qu’il mêle au langage amoureux. De plus, en dévoilant une partie de son masque et en exposant ses faiblesses et ses « tribulations d’[…]esclave indigne » (v. 982), l’hypocrite espère attendrir le cœur d’Elmire.
b) Réussit-il à la convaincre ? Justifiez.
Oui, la réplique d’Elmire (v. 1001-1006) prouve qu’elle est persuadée de la sincérité de Tartuffe, bien
qu’elle ne soit pas dupe de sa rhétorique.
11. Bien que le personnage de Tartuffe puisse sembler ridicule, montrez en quoi il peut devenir
pitoyable, voire pathétique.
Le personnage de Tartuffe, ridicule dans ses contradictions d’homme dévot et amoureux, devient pitoyable et pathétique parce qu’il doit s’humilier et trahir ses principes moraux pour obtenir les faveurs
sexuelles d’une femme qui ne veut rien savoir de lui.
12. À quelle condition Elmire assure-t-elle Tartuffe de sa discrétion auprès de son mari Orgon ?
Elmire assure à Tartuffe sa discrétion à condition qu’il favorise le mariage de Valère et de Mariane et
qu’il renonce à l’union avec cette dernière.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
47
Écriture
13. Dans ses deux tirades, Tartuffe mêle habilement les vocabulaires de l’amour et de la religion.
Dressez le champ lexical de chacun d’eux et déterminez-en les connotations.
Le champ lexical de l’amour comprend, entre autres, les expressions suivantes : « l’amour des temporelles » (v. 934), « les cœurs transportés » (v. 940), « ardente amour […] cœur atteint » (v. 943), « ô
beauté toute aimable » (v. 949), « cette passion » (v. 950), « oser de ce cœur » (v. 954), « Un cœur se
laisse prendre » (v. 968), « s’obstinait mon cœur » (v. 976), « Mes yeux […] mille fois » (v. 979), « ô
suave merveille » (v. 985), « brûlent d’un feu discret » (v. 995) et « De l’amour […] sans peur »
(v. 1000).
Le champ lexical de la religion comprend, entre autres, les expressions suivantes, dont certaines assurent
une antithèse avec le champ lexical de l’amour : « beautés éternelles » (v. 933), « l’auteur de la nature »
(v. 942), « mon salut » (v. 948), « je le confesse » (v. 953), « mon infirmité » (v. 956), « ma quiétude »
(v. 957), « ma béatitude » (v. 958), « De vos regards divins […] douceur » (v. 975), « jeûnes, prières »
(v. 977), « Une dévotion à nulle autre pareille » (v. 986) et « l’autel » (v. 994).
14. Montrez en quoi le langage galant de Tartuffe s’inspire de l’esthétique baroque, voire de la
préciosité, en faisant ressortir les figures de style d’amplification utilisées, notamment l’hyperbole
et la périphrase. Relevez trois exemples de chacun et expliquez-les brièvement.
En mêlant habilement le langage de la dévotion au vocabulaire de l’amour, Tartuffe exploite de nombreuses figures baroques qui versent dans les procédés littéraires d’amplification. On retrouve les hyperboles suivantes : « parfaite créature » (v. 941), « Au plus beau des portraits » (v. 944), « célestes appas »
(v. 967), « la splendeur plus qu’humaine » (v. 973), « vos regards divins » (v. 975), « vous l’ont dit mille
fois » (v. 979), « Une dévotion à nulle autre pareille » (v. 986). Ces hyperboles produisent une image
idéalisée, voire déifiée, d’Elmire et amplifient les sentiments de Tartuffe.
Parmi les périphrases, on signale « l’auteur de la nature » (v. 942) qui désigne Dieu, « du noir esprit»
(v. 946) qui réfère au diable ou à Satan, « charmants attraits » (v. 972) qui signifie la beauté et « galants
de cour » (v. 989) qui est synonyme de courtisans.
15. a) Repérez et expliquez les mots de la métaphore filée qui se développe dans les deux tirades de
Tartuffe.
La métaphore filée consiste à comparer Elmire à une créature d’origine divine avec des expressions
comme « ouvrages parfaits » (v. 936), « parfaite créature » (v. 941), « Au plus beau des portraits »
(v. 944), « célestes appas » (v. 967), « souveraine » (v. 974), « regards divins » (v. 975) et « suave
merveille » (v. 985).
b) Montrez en quoi sa progression atteint la démesure, se transforme pour ainsi dire en hyperbole.
La métaphore consiste à comparer d’abord Elmire à une créature divine, qui devient déesse régnant sur le
cœur de Tartuffe et qui a le pouvoir d’anéantir son « esclave indigne » (v. 982).
16. En revanche, afin de maintenir un équilibre dans son style, Molière a fait appel à des figures de
style d’atténuation, comme l’euphémisme et la litote, qui relèvent davantage de l’écriture classique.
Relevez quatre exemples de chacune et expliquez-les brièvement.
Parmi les figures de style d’atténuation, on signale les euphémismes suivants qui atténuent les allusions
au désir sexuel, à la sensualité : « l’amour des temporelles » (v. 934), « Nos sens […] être charmés »
(v. 935), « ardente amour » (v. 943), « Un cœur se laisse prendre, et ne raisonne pas » (v. 968), « De mon
intérieur vous fûtes souveraine » (v. 974), « tous mes vœux » (v. 978) et « acceptant notre cœur »
(v. 999). Les expressions « surprise adroite » (v. 946) et « obstacle à faire mon salut » (v. 948) peuvent
être considérées comme des périphrases atténuées pour désigner la tentation du péché.
Les expressions suivantes, qui ont recours à la négation pour signifier plus que ce qu’elles semblent dire,
sont considérées comme des litotes : « N’étouffe pas […] temporelles » (v. 934) signifie que l’amour de
Dieu permet aussi une grande liberté d’aimer les êtres mortels ; « cette passion peut n’être point coupable » (v. 950) signifie que cet amour est tout à fait honnête et légitime ; « je n’en suis pas moins
homme » (v. 966) signifie que Tartuffe éprouve des besoins sexuels malgré son statut de dévot ; « ne rai© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
48
sonne pas » (v. 968) signifie qu’il perd complètement le contrôle de ses émotions, de ses pulsions ; « je ne
suis pas un ange » (v. 970), ici la métaphore peut signifier que Tartuffe est un être humain fait de chair,
dont les intentions sont malhonnêtes ; « Votre honneur […] ma part » (v. 987-988) signifie qu’Elmire
peut se livrer à la débauche en toute sécurité avec Tartuffe qui la comblera de joie et de satisfaction ; « Ils
n’ont point de faveurs […] divulguer » (v. 992) signifie que les courtisans rendent publics leurs succès
auprès des femmes ; « De l’amour sans scandale et du plaisir sans peur » (v. 1000) signifie que, grâce à
Tartuffe, Elmire peut s’abandonner en confiance à un adultère secret et voluptueux.
17. Quelle règle du théâtre classique le recours aux figures d’atténuation permet-il de respecter ?
Justifiez.
Le recours aux figures d’atténuation permet de sauvegarder la règle de la bienséance. En effet, l’euphémisme et la litote, en évoquant ou en faisant allusion à des situations à caractère sexuel, réduisent le
caractère scabreux ou disgracieux que des termes plus explicites pourraient contenir.
18. a) À quelle figure de style l’usage du substantif « cœur », apparaissant aux vers 940, 943, 947,
952, 954, 968, 976, 994 et 999, et du substantif « yeux », aux vers 940, 947 et 979, correspond-il ?
L’usage du substantif « cœur » correspond à une synecdoque, car l’organe biologique désigne, en fait,
toute la personne qui a un cœur. Dans la plupart des cas, l’emploi du déterminant « mon » confirme qu’il
s’agit de Tartuffe ; au vers 999, le déterminant « notre » désigne l’ensemble des dévots. L’usage du substantif « yeux » correspond aussi à une synecdoque, pour la même raison que celle du mot « cœur ».
b) Expliquez-la et précisez ses connotations.
Le cœur étant considéré comme le siège de l’affectivité par métonymie, le mot connote la sincérité des
sentiments de Tartuffe et le désir d’attendrir, voire de séduire, Elmire. Le mot « yeux », au vers 947, connote la beauté d’Elmire à laquelle Tartuffe est sensible.
19. Dans les vers 966 à 1000, relevez un autre exemple de recours au champ lexical de l’anatomie
qui exploite la même figure de style et expliquez-la.
Le substantif « langue » (v. 993) relève du champ lexical de l’anatomie et désigne toute la personne qui
fait preuve d’indiscrétion, voire de médisance.
20. a) Identifiez et expliquez une autre figure de style récurrente aux vers 933-934, 948, 950, 966 et
993- 995.
La figure de style récurrente est l’antithèse, car Tartuffe oppose les mots « éternelles » et « temporelles »,
« attache » et « n’étouffe pas », « obstacle à faire mon salut » et « passion […] point coupable », « dévot »
et « homme », « langue indiscrète » et « feu discret ».
b) Quels traits de caractère de Tartuffe cette figure met-elle en relief ?
Cette figure met en relief l’hypocrisie de Tartuffe.
21. Dans sa première tirade, Tartuffe commence par employer le pronom « nous » avant de
privilégier le pronom « je » ; en revanche, dans la seconde tirade, il use abondamment du « je »
pour revenir au « nous », auquel se mêle le pronom « on ».
a) Pourquoi cette distinction entre le « je » et le « nous » ?
Le pronom « je » aux vers 941, 945, 949, 951, 953, 955, 959, 966, 969, 970, 971, 973, 980, 983, 985, 987,
de même que les déterminants « mon », « ma » et « mes » désignent exclusivement Tartuffe. Cette distinction entre les « nous » et le « je » permet à Tartuffe d’illustrer son appartenance à un groupe et de
montrer qu’il n’est pas un être exceptionnel.
b) À qui réfère le pronom « nous » ?
L’emploi du pronom « nous » aux vers 933, 934, 995, 997 et 999 peut être l’équivalent du pronom de
politesse « vous », mais il peut aussi désigner l’ensemble des dévots, dont fait partie Tartuffe.
c) Est-il synonyme du pronom « on » employé aux vers 991, 993, 996 et 999 ? Justifiez.
Le pronom « on » n’est pas synonyme du pronom « nous », car il est plus impersonnel et englobe l’ensemble des gens. Bien qu’il puisse aussi inclure le locuteur, en l’occurrence Tartuffe, il permet à ce
dernier de se distancier, tout en suggérant le pronom « vous », c’est-à-dire Elmire, notamment aux
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
49
vers 996 et 999. Notez cependant l’ambiguïté de pronom « on », au vers 1012, qui signifie à la fois « je »
et l’ensemble des hommes sensibles aux charmes féminins.
22. Quels sont les procédés comiques exploités dans les deux tirades de Tartuffe ? Justifiez.
Les procédés comiques exploités par Molière dans les deux tirades sont d’une telle richesse et d’une telle
complexité qu’il est difficile de les distinguer, car ils interagissent pour créer un sommet dans la comédie.
Le comique de caractère et de mœurs apparaît dans la difficulté qu’éprouve un directeur de conscience à
garder son masque de dévot tout en faisant la cour à une grande bourgeoise mondaine. Le comique de
situation réside dans la sincérité de Tartuffe et dans ses intentions de suborner la coquette Elmire. Le
comique de mots repose en grande partie sur l’ambiguïté sémantique du vocabulaire religieux associé au
langage amoureux, comme ce vers 986 : « Une dévotion à nulle autre pareille » qui signifie évidemment
le culte passionné pour sa divine maîtresse éventuelle.
23. Identifiez et expliquez la figure de substitution apparaissant au vers 1009.
L’expression « humaine faiblesse » est une métonymie qui a recours au concept abstrait généralisant pour
désigner la réalité particulière et concrète, c’est-à-dire l’homme faible qu’est Tartuffe.
24. Identifiez et expliquez les figures d’atténuation apparaissant aux vers 1012 et 1015.
Les expressions « Que l’on est pas aveugle » (v. 1012) et « Je ne dirai point l’affaire » (v. 1015) sont des
litotes signifiant respectivement que Tartuffe a des yeux qui savent apprécier la beauté d’une femme et
qu’Elmire fera preuve d’une entière discrétion au sujet de l’entretien.
Sujet d’analyse littéraire
25. Analysez les tirades de Tartuffe en faisant ressortir l’ambiguïté du personnage qui se montre à
la fois amoureux et dévot.
Voir les réponses aux questions numéros 3 et 13.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
50
EXTRAIT 3
ACTE IV, SCÈNE 5
Vers 1387 à 1528
Action et personnages
1. a) Comparez les ressemblances et les différences existant entre cette scène et la SCÈNE 3 de
l’ACTE III.
Dans les deux entretiens qu’Elmire a réclamé à Tartuffe, on retrouve trois personnages, dont un caché qui
espionne les deux autres. Même si Elmire amorce le jeu de la séduction dans les deux situations, elle vise
un objectif différent qui consiste à démasquer l’imposteur en utilisant les armes de l’hypocrisie et du mensonge. Le premier entretien se termine sur l’intrusion inattendue de Damis dissimulé dans le cabinet,
annulant ainsi l’entente entre Elmire et Tartuffe ; le second entretien, qui tourne à la farce du cocuage,
retarde la sortie attendue d’Orgon, prolongeant ainsi le drame d’Elmire prise à son propre jeu.
b) Montrez qu’Elmire poursuit un objectif beaucoup plus dangereux.
L’objectif que poursuit Elmire est beaucoup plus dangereux, car, en séduisant Tartuffe, elle s’expose à
l’adultère.
2. Divisez la scène en ses trois parties essentielles et montrez la progression de l’action.
1. La comédie d’Elmire et la méfiance de Tartuffe (v. 1387-1436).
Elmire tente d’abord de mettre Tartuffe en confiance en expliquant son attitude à l’égard de Damis à
l’ACTE III et en justifiant l’entretien autorisé par Orgon (v. 1388-1408) ; l’étonnement de l’imposteur
l’oblige à invoquer la pudeur féminine pour dissimuler ses sentiments à l’égard de Tartuffe qu’elle ne
veut pas partager avec Mariane (v. 1409-1436).
2. Les exigences de Tartuffe et le piège d’Elmire (v. 1437-1476).
Tartuffe, séduit par la déclaration d’amour d’Elmire, se méfie et réclame des preuves concrètes et
immédiates de ses sentiments (v. 1437-1452) ; prise au dépourvu, Elmire tousse pour prévenir son
mari et tente de freiner les ardeurs de Tartuffe (v. 1453-1478).
3. La casuistique de Tartuffe et la résignation d’Elmire (v. 1479-1528).
Les arguments d’Elmire sur la morale religieuse en matière d’adultère s’opposent à la casuistique de
Tartuffe (v. 1479-1506) ; devant le silence d’Orgon, qui devra assumer la responsabilité de l’adultère,
Elmire se résigne à subir l’agression de Tartuffe (v. 1507-1528).
3. Quels arguments Elmire invoque-t-elle pour obtenir la confiance de Tartuffe ?
Pour obtenir la confiance de Tartuffe, Elmire lui rappelle d’abord les efforts qu’elle a déployés en vain
pour s’assurer le silence de Damis (v. 1394-1398) et l’autorisation de son mari qui souhaite qu’elle et le
dévot soient « ensemble à tous moments » (v. 1404). Cependant, Elmire devient plus convaincante
lorsqu’elle évoque la méconnaissance des hommes pour la psychologie féminine (v. 1411-1414), sa pudeur personnelle à révéler ses sentiments (v. 1415-1424) et son intérêt dans le refus du mariage avec
Mariane pour posséder tout entier le cœur de Tartuffe (v. 1425-1436).
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
51
4. a) Identifiez les vers qui dénotent la méfiance de Tartuffe à l’égard des intentions d’Elmire.
Expliquez.
Les vers 1443 à 1446 dénotent la méfiance de Tartuffe qui soupçonne Elmire de vouloir le séduire afin
qu’il renonce au mariage avec Mariane.
b) Que réclame-t-il pour s’assurer de sa bonne foi ?
Pour s’assurer de la bonne foi d’Elmire, Tartuffe réclame une preuve concrète et réelle de ses sentiments
pour lui (v. 1448-1452 et 1463-1466).
5. a) Quel argument moral Elmire oppose-t-elle à Tartuffe pour freiner ses ardeurs ?
Elmire évoque la possibilité d’offenser Dieu (v. 1479-1480 et 1484).
b) Que lui réplique Tartuffe ?
Tartuffe lui réplique que le Ciel ne peut constituer un obstacle (v. 1481-1483) et qu’il trouve avec lui des
accommodements grâce à la casuistique (v. 1485-1494).
c) Montrez que sa réponse révèle sa duplicité, ou son hypocrisie, et sa personnalité de faux dévot.
Sa réponse révèle sa duplicité et sa personnalité de faux dévot, car il avoue ne pas respecter les principes
moraux qu’il prétend défendre en apparence.
6. Quel point faible du caractère de Tartuffe Elmire parvient-elle à révéler ? Justifiez.
Elmire parvient à révéler la concupiscence effrénée de Tartuffe ; le désir de l’imposteur pour la femme
d’Orgon le force à poser le masque du dévot.
7. Montrez en quoi cette scène peut être considérée comme une comédie dans la comédie en faisant
ressortir le rôle respectif d’Elmire, de Tartuffe et d’Orgon.
Cette scène peut être considérée comme une comédie dans la comédie, car les trois personnages jouent un
jeu. Devant l’imposteur dont elle a pris le rôle, Elmire joue la coquette libertine ; devant Orgon, caché
sous la table, elle joue la femme sage. Ce double jeu périlleux l’oblige à maintenir un équilibre précaire
entre la séduction et la mesure et à avoir recours à un discours équivoque ou à double sens dans les situations délicates. Malgré son rôle passif de spectateur piégé sous la table, Orgon joue aussi le rôle du mari
en voie d’être cocufié, mais il refuse, par son silence, celui de l’ami trahi. Tartuffe, dans son rôle de dévot
galant, finit par poser son masque de dévot austère pour révéler son vrai visage d’imposteur et de
suborneur lubrique.
8. Montrez à quel point le jeu d’Elmire risque de transgresser les règles de vraisemblance et de
bienséance du théâtre classique.
Par son jeu, Elmire risque de transgresser la vraisemblance, car son attitude réservée et défensive, après
avoir séduit Tartuffe, pourrait éveiller les soupçons de l’imposteur qui ne saisit pas le sens de la toux et
l’équivoque des pronoms personnels « on ». La règle de la bienséance est aussi malmenée, car Elmire
s’est placée dans une situation scabreuse où elle est victime d’une agression sexuelle.
9. À quels moyens Elmire a-t-elle recours pour inciter Orgon à se manifester sans éveiller les soupçons de Tartuffe ?
Elmire commence par tousser, puis elle a recours à un langage ambigu où le pronom « on » désigne
Orgon qui fait la sourde oreille ; finalement, elle invite Tartuffe à voir si Orgon n’est pas dans la galerie.
10. a) Pourquoi Orgon tarde-t-il à sortir de sa cachette ?
Deux raisons, entre autres, peuvent expliquer le silence d’Orgon qui tarde à sortir de sa cachette. D’abord,
on peut supposer qu’il est tellement abasourdi par les propos de Tartuffe qu’il est incapable d’interrompre
le jeu (la SCÈNE 6 le confirme) ; ensuite, il ose espérer que Tartuffe changera de ton et d’attitude au cours
de l’entretien, ce qu’il affirme à la SCÈNE 7, aux vers 1547 et 1548.
b) Quelle est la conséquence, sur l’action, de ce silence prolongé ?
Le silence prolongé d’Orgon a pour conséquence le risque de l’adultère d’Elmire avec le consentement de
son mari et la confirmation de la trahison de Tartuffe qui révèle son mépris pour son hôte.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
52
11. a) Quelle opinion Tartuffe exprime-t-il au sujet d’Orgon ?
Tartuffe méprise Orgon qu’il considère comme un homme naïf, facilement manipulable et vaniteux
(v. 1523-1526).
b) Quel effet cette opinion peut-elle avoir sur Orgon ?
Cette opinion est sans doute une épreuve plus douloureuse pour Orgon que le risque d’être cocufié, car
Tartuffe est l’objet d’une admiration infinie, voire d’un culte presque religieux.
12. Comparez les vers 1504 à 1506, prononcés par Tartuffe, à ceux prononcés par madame Pernelle
à l’ACTE I (vers 89 à 92) et montrez en quoi ils se ressemblent.
Les propos de Tartuffe et de madame Pernelle illustrent qu’ils sont tous les deux sensibles à la rumeur
publique et qu’ils craignent le scandale. Pour Tartuffe, le scandale et le mal n’existent pas lorsque l’on
n’en parle pas ; pour madame Pernelle, il suffit que l’on cause de choses tout à fait banales pour que la
rumeur se transforme en calomnie et éclabousse tout le monde.
13. a) Malgré les risques présentés par le stratagème, pour Elmire et Orgon, montrez en quoi il
atteint l’objectif fixé.
L’objectif fixé est atteint, car Tartuffe a avoué devant Orgon son désir amoureux pour Elmire et son
mépris pour son hôte.
b) Malgré l’atteinte de l’objectif, faites voir en quoi il révèle autant la fracture du couple ElmireOrgon que celle du couple Tartuffe-Orgon.
Le désabusement d’Orgon révèle la fracture du couple Elmire-Orgon, car l’épouse, déjà négligée par son
mari, découvre l’attachement de ce dernier pour Tartuffe et son peu d’empressement à éviter l’adultère ;
l’amitié du couple Tartuffe-Orgon est désormais compromise, car elle reposait artificiellement sur l’aveuglement de l’un et l’hypocrisie de l’autre.
Écriture
14. Identifiez et expliquez les figures de style apparaissant aux vers 1401 et 1407.
Les substantifs « orage » (v. 1401) et « ombrage » (v. 1402) sont des métaphores qui signifient respectivement la situation conflictuelle et les soupçons. L’expression « ouvrir un cœur » (v. 1407) est à la fois
un euphémisme qui atténue le sentiment amoureux et une synecdoque par laquelle l’organe biologique
signifie toute la personne.
15. À qui réfère le pronom personnel « on » et le déterminant « notre » dans la réplique d’Elmire,
aux vers 1411 à 1436 ? Expliquez la raison de leur usage.
Le pronom personnel « on » apparaît à treize reprises entre les vers 1411 et 1436. Au vers 1414, il réfère
aux gens en général ; aux vers 1416, 1417, 1418, 1419 et 1420, il signifie « nous », les femmes avec lesquelles se range Elmire pour expliquer son attitude ; au vers 1429, il désigne Tartuffe et Damis ; aux
vers 1432 et 1434, il réfère à Orgon ; finalement, aux vers 1434 à 1436, Elmire laisse sous-entendre le
pronom « je » derrière le « on » pour atténuer, par pudeur, les sentiments qu’elle ose tout de même
exprimer.
Elmire a recours au pronom « on », dans des sens aussi variés, afin de dépersonnaliser sa déclaration
d’amour tout en semant une certaine équivoque dans l’esprit de Tartuffe.
16. Dans cette même réplique d’Elmire, relevez et expliquez les mots dénotant son comportement
amoureux et montrez que le champ lexical auquel ils appartiennent constitue une métaphore filée.
Le comportement amoureux d’Elmire est associé au vocabulaire militaire dont il constitue la métaphore
filée avec les verbes suivants : « se défendre » (v. 1414), « combat » (v. 1415), « dompte » (v. 1417),
« défend » (v. 1419), « se rend » (v. 1420), « s’oppose » (v. 1421), « forcer » (v. 1431), « prendre »
(v. 1434). En recourant à ces verbes métaphoriques qui connotent sa combativité et sa détermination,
Elmire exprime une vision de l’amour analogue à un combat guerrier.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
53
17. a) Faites ressortir le caractère précieux du langage de Tartuffe en mettant l’accent sur les mote
et les expressions empruntés au champ lexical de la religion, aux vers 1437 à 1452.
Le champ lexical de la religion contribuant au caractère précieux du langage amoureux comprend les
expressions suivantes : « suprême étude » (v. 1441), « sa béatitude » (v. 1442), « sa félicité » (v. 1444),
« planter dans mon âme une constante foi » (v. 1451).
b) Relevez et expliquez les principales figures de style qui connotent ce mélange de galanterie et de
dévotion.
En ayant recours au vocabulaire de la dévotion pour exprimer ses sentiments à Elmire, Tartuffe établit
une analogie entre le comportement amoureux et le culte religieux et, par conséquent, crée des métaphores reliées à des synecdoques comme « une bouche » (v. 1438), « mon cœur » (v. 1442), « ce cœur »
(v. 1443) qui désignent la personne tout entière ; on signale aussi des euphémismes comme « vos
faveurs » (v. 1449) et « Des charmantes bontés » (v. 1452) qui atténuent les gestes d’affection à caractère
sexuel.
18. a) Dans la réplique d’Elmire, aux vers 1467 à 1476, relevez et expliquez les figures d’amplification (périphrase, hyperbole, métaphores fortes).
Parmi les figures d’amplification, on signale les métaphores « vrai tyran » (v. 1467), comparant l’amour
de Tartuffe à un individu oppresseur, et « furieux empire » (v. 1469) signifiant qu’il exerce un pouvoir enragé sur Elmire ; les hyperboles « vous ne donnez pas le temps respirer » (v. 1472) et « De vouloir sans
quartier » (v. 1474) signifient respectivement l’impossibilité pour Elmire de se calmer et l’acharnement
de Tartuffe. Notez que la négation contenue dans les deux derniers exemples, ainsi que dans l’expression
« on ne peut se parer » (v. 1471) désignant la vulnérabilité absolue d’Elmire, relève aussi du procédé de la
litote.
b) Précisez leur effet dans la situation.
Ces figures d’amplification créent l’effet d’un combat militaire où Elmire, agressée, est sur la défensive.
19. a) Identifiez et expliquez la figure de style apparaissant au vers 1486.
L’expression « lever les scrupules » est une métaphore par laquelle Tartuffe exprime une analogie entre
son pouvoir de transgresser les interdits moraux, c’est-à-dire l’adultère, et l’action concrète de soulever un
objet.
b) Expliquez en quoi cette figure s’inspire du procédé du comique de mots.
Dans le contexte, c’est l’ambiguïté du verbe « lever » qui constitue un comique de mots, car Tartuffe peut
laisser sous-entendre le sens figuré de supprimer et le sens propre de soulever qu’il pourrait accompagner
d’une comique de gestes de ses mains s’apprêtant à soulever la robe d’Elmire.
20. Pourquoi Molière a-t-il cru bon d’insérer la didascalie « C’est un scélérat qui parle » après le
vers 1487 ?
La didascalie, qui permet à Molière de porter un jugement sévère sur Tartuffe et de se distancier des
propos du personnage, vise à atténuer toute susceptibilité de la part du lecteur qui pourrait s’offusquer de
cette parodie de la casuistique exposée par l’imposteur.
21. Que connotent les diérèses qu’emploie Tartuffe dans sa présentation de la casuistique, aux
vers 1489 à 1492 ?
Les diérèses qu’emploie Tartuffe dans les mots « science », « liens », « conscience », « rectifier », « action » et « intention » peuvent connoter son malaise à présenter une argumentation aussi spécieuse que
moralement condamnable. L’assonance produite par la voyelle i et l’allitération produite par la consonne
s, ajoutant à l’inconfort de l’auditeur, suscitent la méfiance.
22. Expliquez le procédé du comique de mots auquel a recours Elmire, aux vers 1499 à 1501.
Le comique de mots repose d’abord sur l’ambiguïté du mot « rhume » qui réfère à Orgon, obstiné dans
son silence. L’expression hyperbolique « tous les jus du monde » désigne les bâtons de réglisse (allusion
au bâton de la farce) impuissants, dans le contexte, à sortir Elmire d’embarras. Les deux litotes « ne feront
rien » et « plus qu’on ne peut dire » illustrent bien la situation cocasse et désespérée d’Elmire.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
54
23. a) Faites ressortir l’ambiguïté sémantique du pronom « on » dans la réplique d’Elmire, aux
vers 1510 à 1519. Expliquez.
Dans cette réplique d’Elmire, toutes les occurrences du pronom personnel, sauf le deuxième « on » apparaissant au vers 1514 pour désigner un « je », c’est-à-dire Elmire, réfèrent à Orgon caché sous la table.
Tartuffe, qui ne saisit pas le double sens, interprète le « on » comme un « vous » qui lui est destiné, ce que
confirme sa réplique (v. 1520) où il reprend le « on » pour dire « je ».
b) De quel procédé comique cette ambiguïté relève-t-elle ? Justifiez.
Cette ambiguïté relève d’abord du comique de mots, par la confusion qu’elle sème dans l’esprit du spectateur, et du comique de situation, par le quiproquo dans lequel Elmire enferme Tartuffe et par la comédie
du cocuage dans laquelle se complaît Orgon.
c) Relevez un nom et un autre pronom qui contribuent à maintenir cette équivoque.
Le nom « gens » (v. 1516) et le pronom relatif « qui » (v. 1518) contribuent à maintenir l’équivoque ; le
premier désigne autant le monde en général que Tartuffe et Orgon pris individuellement ; le second vise
Orgon, mais s’applique aussi à Tartuffe.
24. Qu’est ce qui permet de croire que ni Tartuffe ni Orgon n’ont saisi l’ambiguïté du pronom
« on » et le double sens des propos d’Elmire ?
Deux raisons permettent de croire que ni Tartuffe ni Orgon n’a saisi le sens du pronom « on » : le premier
réplique à Elmire en employant le pronom « on » qui désigne un « je » (v. 1520) et le second reste immobile sous la table.
25. Identifiez et expliquez le procédé comique employé dans la proposition d’Elmire, aux vers 1521
et 1522.
Il s’agit d’un comique de situation qui fait écho à la « crainte de surprise » (v. 1390) évoquée par Elmire
au début de la SCÈNE 5 et qui rappelle l’intrusion de Damis à l’ACTE III. La réplique est aussi ironique
puisqu’elle sait que son mari est caché sous la table.
Sujets d’analyse littéraire
26. Dans la SCÈNE 5, analysez les thèmes du mensonge et de la vérité chez les personnages d’Elmire
et de Tartuffe ; en d’autres termes, montrez comment, par le stratagème de la duperie, Elmire
parvient à révéler à Orgon la véritable nature de l’imposteur.
Plan suggéré
1. La stratégie d’Elmire :
1.1 La demi-vérité sur son attitude à l’égard de Damis (V. 1390 à 1400).
1.2 L’autorisation d’Orgon pour que Tartuffe la fréquente (v. 1401 à 1408).
1.3 La pudeur féminine pour justifier son comportement (v. 1411 à 1422).
1.4 La déclaration d’amour (v. 1423 à 1436).
2. La réaction de Tartuffe
2.1 La méfiance et le désir de plaire à Elmire (v. 1437 à 1452).
2.2 L’exigence d’obtenir des preuves d’amour concrètes (v. 1459 à 1466).
2.3 Le recours à la casuistique qui révèle le vrai visage de l’imposteur (v. 1485 à 1506).
27. Analysez la SCÈNE 5 en mettant en valeur le procédé du comique de situation ; faites ressortir
l’inversion des rôles chez Elmire et Tartuffe, d’une part, puis chez Elmire et Orgon, d’autre part.
Plan suggéré
1. L’inversion des rôles chez Elmire et Tartuffe.
1.1 Elmire piège Tartuffe par le jeu de la séduction.
1.2 Tartuffe piège Elmire en acceptant sa déclaration.
2. L’inversion des rôles chez Elmire et Orgon
2.1 Elmire joue la comédie du mari cocu avec la connivence d’Orgon.
2.2 Orgon, par son silence, consent à l’adultère d’Elmire.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
55
EXTRAIT 4
ACTE V, SCÈNE 3
Vers 1642 à 1716
Action et personnages
1. a) À quelle scène de l’ACTE I peut-on comparer la SCÈNE 3 ?
On peut comparer cette scène à la SCÈNE 1 du premier acte.
b) Quelles sont les similitudes existant entre ces deux scènes ?
Dans ces deux scènes, on retrouve sept personnages qui discutent au sujet de l’hypocrite ; madame
Pernelle, toujours aussi têtue et entichée de Tartuffe, refuse de voir en lui un imposteur en répliquant par
des dictons populaires. Elmire est discrète, Cléante fait preuve de lucidité et Dorine ironise.
c) Montrez en quoi elles sont différentes.
Absent de la première scène, Orgon, qui a rejoint les rangs de la famille, est le seul à s’opposer à l’aveuglement de sa mère. Cette dernière, sensible aux rumeurs et aux apparences, à la première scène, témoigne maintenant d’une prudence excessive (v. 1679-1680) et ironique (v. 1684-1686).
2. a) Quel objectif vise Orgon dans le récit des faits qu’il offre à madame Pernelle, aux vers 1643
à 1656 ?
Orgon veut convaincre sa mère de l’imposture de Tartuffe, la sortir de l’aveuglement dans lequel il était
avant de constater la preuve concrète de sa duplicité.
b) Y parvient-il ? Justifiez.
Non, Orgon n’atteint pas son objectif, car sa mère refuse ses arguments et ses preuves, alléguant des
proverbes et des dictons qui l’enferment dans son obstination et ses idées préconçues.
3. a) Montrez en quoi madame Pernelle est fidèle aux valeurs qu’elle a défendues à la première
scène de l’ACTE I.
Madame Pernelle est fidèle aux valeurs de charité chrétienne et de rigorisme, car elle refuse la médisance
contre Tartuffe (v. 1657-1658, 1668, 1670, 1691-1692) et déplore le laxisme moral de la famille (v. 16611662).
b) Que connote cette fidélité chez ce personnage ? En d’autres termes, que révèle cette constance de
caractère chez madame Pernelle ?
Cette fidélité du personnage révèle son obstination bête et sa mauvaise foi.
4. a) Le vers 1686, prononcé par madame Pernelle, fait écho à quel vers prononcé par Elmire à la
6 de l’ACTE IV ?
Ce vers fait écho au vers 1533 : « Attendez jusqu’au bout pour voir les choses sûres ».
b) Montrez en quoi l’intention de madame Pernelle se distingue de celle d’Elmire.
Le vers 1686 de madame Pernelle, sans intention ironique a priori, illustre l’extrême prudence de la bigote
à l’égard des apparences. Cependant, à cause de l’ironie du vers 1533 d’Elmire, on peut parler d’ironie
par inversion ou d’ironie dans l’ironie.
SCÈNE
5. Quelle solution Cléante préconise-t-il pour contrer les attaques éventuelles de Tartuffe ?
Reconnaissant la force de Tartuffe et la maladresse d’Orgon, Cléante préconise la vigilance (v. 1699) et
souhaite une réconciliation apparente (v. 1711-1712).
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
56
6. À quoi voit-on que les personnages sont dans une impasse ou qu’ils sont impuissants devant le
danger qui les menace ?
On voit que les personnages sont dans une impasse par leur difficulté à trouver une solution concrète pour
contrer les menaces de Tartuffe. Orgon et sa mère s’engagent dans un dialogue de sourds, Elmire présume
illégale l’action judiciaire de Tartuffe (v. 1701-1702) et reproche à son mari de ne pas l’avoir informée de
la donation (v. 1713-1714), Orgon regrette d’avoir furieusement chassé l’imposteur (v. 1709-1710) et
Cléante, contaminé par l’hypocrisie, souhaite, en désespoir de cause, un semblant de réconciliation
(v. 1711-1712) pour diminuer les dégâts.
Écriture
7. a) À quelles répliques d’Orgon, à l’ACTE I, SCÈNE 4, et à l’ACTE III, SCÈNE 7, la réplique de
Dorine, au vers 1657, fait-elle écho ?
La réplique de Dorine fait référence aux répliques d’Orgon (ACTE I, v. 235, 241, 249 et 256 ; ACTE III,
v. 1183).
b) De quel procédé comique la réplique de Dorine relève-t-elle ? Expliquez.
En faisant écho aux répliques d’Orgon qui s’apitoyait sur le sort de Tartuffe, Dorine a recours à l’ironie
afin de tourner en dérision l’aveuglement d’Orgon, lequel a permis à Tartuffe de le déposséder et de jouir
aujourd’hui de tous ses biens. On peut aussi déceler une équivoque dans la réplique de Dorine visant
Orgon, désormais un homme pauvre et pitoyable.
8. a) Quel verbe et quel substantif, qui peuvent référer à un champ lexical particulier, Orgon
emploie-t-il pour convaincre sa mère de l’imposture de Tartuffe ?
Pour convaincre sa mère de la trahison de Tartuffe, Orgon emploie le verbe récurrent « voir » (v. 1644,
1669, 1672, 1676 et 1677) et le substantif correspondant « yeux » (v. 1643, 1672, 1676 et 1688).
b) De quelle figure de style, qui est aussi un procédé comique, l’emploi de ce verbe relève-t-il ?
Justifiez.
L’emploi de ce verbe et de ce substantif relève du comique de répétition (le participe « vu » revient six
fois entre les vers 1669 et 1677) et contribue à produire une hyperbole, compte tenu de la redondance, du
pléonasme, notamment aux vers 1676 et 1677, et de l’exagération au vers 1678.
9. a) Identifiez et expliquez le procédé du comique de situation qui entre en jeu dans la conversation
entre Orgon et madame Pernelle.
Le comique de situation de l’inversion des rôles, selon le principe de l’arroseur-arrosé, entre en jeu, car
Orgon, qui refusait de croire à l’imposture de Tartuffe, se bute maintenant à l’entêtement de sa mère.
b) Montrez en quoi cette situation relève aussi du comique de caractère.
Cette situation relève aussi du comique de caractère, car Orgon, qui s’est toujours fié à ce qu’il voyait,
c’est-à-dire le masque de Tartuffe, se tue à persuader une femme aussi obstinée qui refuse, elle, de croire
aux apparences.
10. a) Quelle est la figure d’amplification récurrente dans les répliques d’Orgon et de madame
Pernelle ?
La figure d’amplification est l’hyperbole.
b) Relevez-en trois exemples et expliquez-les.
Les expressions « Je vous l’ai dit cent fois » (v. 1644), « cent sots cartes de lui » (v. 1668), « Je l’ai vu
[…]/Ce qui s’appelle vu » (v. 1676-1677) et « Aux oreilles cent fois, et crier comme quatre » (v. 1678)
soulignent l’exagération des propos. Le chiffre « cent » et la redondance du participe passé « vu » connotent respectivement la tendance aux clichés de la bigote et l’exaspération d’Orgon.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre
57
11. Malgré le ton dramatique et excessif de la conversation entre Orgon et madame Pernelle,
montrez que Molière tente de ménager la règle de la bienséance en recourant à des procédés
d’atténuation. Relevez-en trois exemples et expliquez-les.
Pour ménager la règle de la bienséance, Molière a eu recours à des procédés d’atténuation. Parmi les
euphémismes, signalons « une action si noire » (v. 1658) signifiant un péché mortel ; « on vit d’étrange
sorte » (v. 1661) signifiant que la famille mène une vie libertine ; « vous deviez attendre à vous voir sûr
des choses » (v. 1686) signifiant qu’Orgon devait attendre la preuve concrète et irréfutable de l’adultère ;
« Vous me feriez dire quelque sottise » (v. 1689) atténuant le propos d’Orgon qui est sur le point de dire
qu’il aurait pu être un témoin consentant de son cocuage.
Parmi les litotes, on retrouve « rien n’est ici-bas qui s’en puisse défendre » (v. 1674) signifiant que les
gens vertueux doivent constamment se battre contre la médisance ; « Il ne faut pas toujours juger sur ce
qu’on voit » (v. 1680) signifiant que, parfois, il faut faire preuve d’une extrême prudence ; « Et je ne puis
du tout me mettre dans l’esprit » (v. 1691) signifiant que madame Pernelle s’obstine bêtement à refuser
les accusations lancées contre Tartuffe.
12. Identifiez et expliquez les figures de style apparaissant aux vers 1665-1666 et 1673.
On retrouve deux métonymies, dont « La vertu […] est toujours poursuivie » et « mais n’ont jamais
l’envie », qui ont recours au concept abstrait pour signifier les personnes concrètes, c’est-à-dire les gens
vertueux et envieux. La synecdoque « les langues » utilise l’organe buccal pour désigner les personnes
médisantes dont les propos sont comparés au venin d’une vipère.
Sujet d’analyse littéraire
13. Analysez la situation dans laquelle se trouvent Orgon et madame Pernelle en mettant en valeur
le ridicule de leur propos et de leur comportement.
La SCÈNE 3 présente un dialogue de sourds entre une mère et son fils se disputant et perdant un temps
précieux qui devrait être consacré aux moyens de contrer les menaces de l’imposteur. Leurs propos et leur
comportement sont ridicules, car ils soulignent le caractère puéril des personnages qui sont supposés être
les plus sérieux de la pièce, et mettent en valeur la nature conflictuelle de la relation mère-fils.
Plan d’analyse suggéré
1. Orgon et madame Pernelle : une scène d’enfantillages
1.1 Orgon, désabusé, se tue à persuader plus obstiné que lui.
1.2 Madame Pernelle, entêtée, se complaît dans son propre aveuglement.
2. Une mère et son fils : une scène de famille
2.1 Une mère qu’infantilise son fils.
2.2 Un fils qui dispute sa mère.
© 2003 Groupe Beauchemin, éditeur ltée – Collection Parcours d’une oeuvre

Documents pareils

le tartuffe - Tout Molière

le tartuffe - Tout Molière Et sous le faux espoir de quelque ressemblance, Aux intrigues qu'ils ont, donner de l'innocence,

Plus en détail