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SUPPLÉMENT SPÉCIAL Réduire les coûts des régimes d’assurancemédicaments – Mais à quel prix? Par Johnny Ma, RPh, président, Mapol inc. Les ressources sont limitées. Voilà la prémisse sur laquelle les décideurs basent leurs décisions relatives aux régimes d’assurancemédicaments publics et privés pour garantir que ces derniers restent durables et abordables dans le futur. Votre attention, s’il vous plaît Les médicaments n’agissent pas tous de la même manière pour chacun. De plus, tous les médicaments ne sont pas conçus ni préparés de la même façon. Cela est particulièrement vrai dans le cas des médicaments utilisés dans le traitement des maladies mentales, comme la dépression et le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH). Bien que la modification du comportement soit un élément important du traitement du TDAH, elle ne suffit habituellement pas, à elle seule, à en améliorer les symptômes principaux 1. En général, ce sont les médicaments agissant comme stimulants qui traitent le Qu’est-ce que le TDAH? Le TDAH est une affection biologique du cerveau qui touche environ 5 à 12 % des enfants et qui persiste à l’âge adulte chez 60 % des patients 2. On estime que la prévalence du TDAH chez l’adulte est de 2 à 5 %, un pourcentage qui s’apparente à celui de la dépression clinique, problème de santé mentale bien connu dans le milieu du travail 3. L’inattention, l’impulsivité et l’hyperactivité constituent les symptômes principaux du TDAH. Ils peuvent entraîner des dysfonctionnements à de multiples niveaux comme le rendement à la maison, à l’école, au travail et au sein de la communauté. S’il est mal pris en charge, le TDAH peut entraîner de graves conséquences, entre autres, l’échec scolaire, une faible estime de soi, un risque accru de se blesser ou d’avoir un accident, et au final, l’échec professionnel et des problèmes relationnels et de toxicomanie. CE SUPPLÉMENT SPÉCIAL A BÉNÉFICIÉ D'UN SOUTIEN FINANCIER DE JANSSEN Ase/Shutterstock.com Le remplacement d’un médicament de marque par un médicament générique est à la base du fonctionnement des régimes d’assurance-médicaments. Avec l’expiration des brevets d’un certain nombre de médicaments de marque au cours de ces dernières années et les réformes des régimes d’assurance-médicaments qui ont fait baisser le coût des médicaments génériques à environ 25 % de celui des médicaments de marque, l’argument en faveur d’une politique de remplacement obligatoire par des médicaments génériques est fort. Un certain nombre de compagnies d’assurance-maladie de groupe ont par conséquent appliqué ce principe de remplacement à tous leurs régimes d’assurance-médicaments. En gros, cette politique entraînera une réduction automatique du prix d’un médicament d’ordonnance de marque à chaque fois que Santé Canada en approuvera la version générique. Selon son régime d’assurance-médicaments, un employeur ne rembourse que le prix d’un médicament générique, et ce, même si un membre décide de continuer à prendre son traitement de marque. Toutefois, si en théorie ce principe semble raisonnable, des preuves de plus en plus nombreuses viennent mettre en lumière les risques qui existent à appliquer ce principe à toutes les catégories de médicament, indépendamment du type de préparation ou de la maladie traitée. TDAH le plus efficacement. Environ 80 % des personnes atteintes de TDAH répondent au traitement stimulant. Les psychostimulants touchent certaines zones du cerveau que l’on juge importantes pour la concentration, l’examen des conséquences, la prévoyance et l’inhibition des actions. Ces zones ne semblent pas suffisamment stimulées chez les personnes atteintes de TDAH. En général, ce sont les médicaments agissant comme stimulants qui traitent le TDAH le plus efficacement. Environ 80 % des personnes atteintes de TDAH répondent au traitement stimulant. Au Canada, le méthylphénidate, offert en différentes teneurs et préparations, est le stimulant le plus couramment prescrit pour le TDAH. Avant le lancement de CONCERTA® (chlorhydrate de méthylphénidate à libération prolongée) en 2003, les patients devaient prendre leur médicament de deux à trois fois par jour ce qui posait des problèmes importants de respect et d’observance du traitement pour les patients, qui devaient prendre au moins une de leurs doses à l’école ou au travail. CONCERTA®, un produit multiphasique à libération prolongée à base de méthylphénidate, a été conçu pour lever ces obstacles en particulier; son système de libération unique, la technologie OROS (ORal OSmotic), permet de ne prendre qu’une dose par jour. Avec un début d’action survenant en moins d’une heure, CONCERTA® agit rapidement et assure une libération continue du médicament pendant 12 heures. Cette technologie de libération a éliminé la dose de la mijournée et de la fin d’après-midi. En 2010, Santé Canada a approuvé une préparation générique qu’elle a jugée bioéquivalente à CONCERTA®, Teva-Methylphenidate ER-C. Il est intéressant de noter qu’avant l’approbation de Santé Canada, Teva avait prouvé devant les tribunaux que la forme posologique de son produit ne libérait pas la dose de méthylphénidate selon une dose augmentant de façon soutenue et par conséquent, ne pouvait pas enfreindre le brevet de CONCERTA®. Depuis, de plus en plus de données semblent indiquer qu’il existe non seulement des différences cliniquement significatives entre les deux produits, mais aussi des problèmes d’utilisation abusive attribuables aux différences dans la façon dont ils sont fabriqués. Bioéquivalence ne signifie pas interchangeabilité Lorsque Santé Canada évalue un nouveau médicament générique pour en approuver l’utilisation au Canada, elle passe en revue les études menées par le fabricant du médicament générique afin d’évaluer la « biodisponibilité comparative » entre le médicament générique et le médicament de marque. Ces études doivent démontrer que le médicament générique libère dans le sang du patient la même dose de principe actif, au même taux et avec la même efficacité que le médicament de marque. Le terme utilisé pour décrire ce rapport est « bioéquivalence ». Toutefois, la façon dont le médicament affecte le patient, ce qu’on nomme « équivalence thérapeutique », n’est pas mesurée. Selon les exigences de Santé Canada, pour qu’un médicament soit réputé bioéquivalent, la quantité de médicament générique présente dans le sang doit être comprise entre 80 et 125 % de la dose du médicament de marque, et ce, pour la concentration maximale et la quantité totale du médicament libéré. Pour certains médicaments métabolisés rapidement par l’organisme, qui ont un intervalle thérapeutique étroit ou un profil complexe de différentes concentrations libérées à divers moments de la journée, cette variabilité du médicament peut avoir un impact significatif sur la façon dont celui-ci fonctionne chez les patients. Bien que Santé Canada ait déclaré que CONCERTA® et Teva-Methylphenidate ER-C étaient bioéquivalents, les décideurs statuant sur les régimes provinciaux d’assurance-médicaments ne sont pas aussi prompts à estimer que les produits sont interchangeables au nom du principe de remplacement par les génériques. Par exemple, en 2011, le Conseil du médicament du Québec a ajouté Teva-Methylphenidate ER-C à la liste de médicaments de la RAMQ, mais a également déclaré qu’il « considère cependant que certaines différences entre les produits pourraient se traduire par des différences cliniques et un plus grand potentiel d’usage illicite. Comme les conséquences d’une déstabilisation de la maladie peuvent être considérables, le Conseil, par prudence, ne souhaite pas appliquer la méthode du prix le plus bas à la dénomination commune » (extrait du site de l’INESSS)3. De plus, aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) recommande d’utiliser des mesures de bioéquivalence supplémentaires (en plus de celles utilisées par Santé Canada) pour évaluer les médicaments génériques et en assurer la bioéquivalence et l’interchangeabilité. Aucune version générique de CONCERTA® n’a encore été approuvée aux États-Unis. Dans une autre affaire, la FDA a récemment (2 octobre 2012) imposé le retrait de la version générique de Wellbutrin XL à 300 mg (chlorhydrate de bupropion) fabriquée par Impax Laboratories Inc. et mise sur le marché par Teva Pharmaceuticals USA Inc., car elle a jugé qu’elle n’était pas équivalente sur le plan thérapeutique à la version de marque4. Le retrait s’est produit à la suite de l’échec des tests de bioéquivalence menés sur les deux produits dosés à 300 mg. Les tests de bioéquivalence originaux qui avaient mené à l’approbation portaient sur CE SUPPLÉMENT SPÉCIAL A BÉNÉFICIÉ D'UN SOUTIEN FINANCIER DE JANSSEN Un risque potentiel d’utilisation abusive réduit Bien que le méthylphénidate soit largement accepté pour le traitement du TDAH, des inquiétudes subsistent concernant le risque potentiel d’utilisation abusive. Des études récentes, menées notamment au Canada et aux États-Unis, démontrent que l’utilisation abusive, le mésusage et le détournement des médicaments stimulants posent problème surtout chez les étudiants universitaires et les jeunes adultes, mais également chez les enfants du primaire et du secondaire. Dans l’ensemble, ces données laissent à penser que, lorsqu’on leur prescrit des stimulants, les enfants, les adolescents et les adultes atteints du TDAH sont soumis à une pression énorme de détournement de leur médicament5. Le fabricant de CONCERTA® a apaisé ces inquiétudes en changeant la façon dont le médicament était conçu et fabriqué. CONCERTA® est un comprimé dont le mécanisme unique de libération est fait d’une enveloppe de résine épaisse qui diminue la possibilité de l’écraser pour le réduire en une poudre qui pourrait être inhalée ou dissoute dans de l’eau pour être injectée par voie intraveineuse, comme c’est le cas d’autres stimulants délivrés sur ordonnance actuellement sur le marché. En fait, les données révèlent que CONCERTA® est l’objet de moins d’utilisation abusive ou de mésusage que les autres stimulants6, tant et si bien qu’il est le seul médicament à longue durée d’action contre le TDAH en Alberta qui n’exige pas de prescription en trois exemplaires (une mesure de sécurité permettant de surveiller l’utilisation des narcotiques)7. Données concrètes De plus en plus de données indiquent que les résultats de bioéquivalence entre CONCERTA® et le médicament générique pourraient ne pas se traduire par une équivalence thérapeutique8. En d’autres termes, TevaMethylphenidate ER-C peut ne pas produire, comme on s’y attendrait, les mêmes effets cliniques que CONCERTA®. Deux études canadiennes récentes menées auprès d’enfants et d’adultes ont montré que CONCERTA® et Teva-Methylphenidate ER-C pourraient ne pas être interchangeables. Dans l’étude menée auprès d’enfants, l’auteur a conclu que le médicament générique ne semble pas être cliniquement équivalent à CONCERTA® et il recommande que, « puisque les modifications dans les traitements médicamenteux contre le TDAH peuvent engendrer des coûts élevés pour le patient et la société, la consultation de tous les intervenants en soins aux patients atteints du TDAH est essentielle avant toute modification du traitement médicamenteux9. » Dans l’étude menée auprès d’adultes atteints du TDAH, les auteurs ont conclu qu’en raison des différences cliniquement et statistiquement significatives entre les résultats, mais aussi d’un taux plus important d’abandons dans le groupe de patients recevant le médicament générique, les autorités de santé publique devraient envisager avec prudence le remboursement du produit générique, car la spécificité du produit de marque tient plus à son système de libération qu’à l’agent thérapeutique lui-même10. Les deux études indiquent que l’efficacité et le profil d’effets indésirables des deux produits peuvent différer. Ces observations reposent sur l’analyse d’une base de données de Santé Canada, la Base de données en ligne des effets indésirables de Canada Vigilance, et sur les données relatives aux demandes de remboursement d’IMS Health. L’analyse a confirmé que l’incidence des effets indésirables du médicament générique était significativement plus élevée, jusqu’à 60 fois plus, que celle de CONCERTA®11. Afin de confirmer ces résultats, 335 pharmaciens communautaires de l’Ontario12 et 145 du Québec13 ont été sondés, permettant de montrer ce qui se passe réellement au comptoir des pharmacies lorsque les patients passent au médicament générique. Les deux groupes de pharmaciens ont signalé une prévalence élevée d’effets indésirables liés au passage de CONCERTA® à TevaMethylphenidate ER-C. En Ontario, le passage CE SUPPLÉMENT SPÉCIAL A BÉNÉFICIÉ D'UN SOUTIEN FINANCIER DE JANSSEN ©iStockphoto.com/ Nicolas Hansen/Daniel Laflor la dose de 150 mg et les résultats avaient été extrapolés à la concentration de 300 mg, puisque cette méthodologie suivait les lignes directrices de la FDA au moment où les produits ont été approuvés. Depuis, la FDA a conclu que cette approche n’était plus appropriée pour établir la bioéquivalence entre les comprimés de chlorhydrate de bupropion à 300 mg à libération prolongée et Wellbutrin XL à 300 mg et ses lignes directrices concernant la façon d’étudier à l’avenir la bioéquivalence des produits à libération prolongée sont en cours de révision. Ces changements aux États-Unis mettent en lumière le fait que les résultats obtenus actuellement aux tests de bioéquivalence ne reflètent pas toujours une équivalence thérapeutique. Incidence sur les employeurs d’un médicament à l’autre était la raison la plus courante pour laquelle les pharmaciens déclaraient des effets indésirables liés au médicament. Au Québec, deux tiers des 145 pharmaciens sondés ont déclaré des effets indésirables liés au médicament après le passage de CONCERTA® à TevaMethylphenidate ER-C13. Que disent les experts? Les experts du traitement du TDAH ont commencé à tenir compte de ces différences dans les lignes directrices thérapeutiques du TDAH. Les lignes directrices de pratique de la CADDRA (Canadian ADHD Resource Alliance) de 2011 traduisent bien ces inquiétudes selon lesquelles les normes actuelles de mesure de la bioéquivalence entre CONCERTA® et Teva-Methylphenidate ER-C pourraient ne pas refléter l’équivalence thérapeutique de ces médicaments14. Garantir un traitement optimal du TDAH, que ce soit pour un enfant ou un adulte, est dans l’intérêt du patient, de sa famille et de son employeur. Alors qu’il y a de plus en plus de préoccupations au sujet de la durabilité et de l’abordabilité à long terme des régimes d’assurancemédicaments, des mesures de compression de coûts, comme le remplacement obligatoire par un générique, sont mises en place à plus grande échelle. Cependant, il ne s’agit pas de faire des économies hâtives au détriment de régimes d’assurancemédicaments judicieusement conçus pour équilibrer, de façon optimale, les coûts à court et à long terme et les avantages pour l’employé et le commanditaire du régime d’assurance-médicaments. ©iStockphoto.com/ Troels Graugaard RÉFÉRENCES 1.Canadian Attention Deficit Hyperactivity Disorder Resource Alliance. Novo-Methylphenidate ER-C . caddra.ca/cms4/pdfs/ ConseilduMedicament_NovoMethylphenidate.pdf (consulté le 16 oct. 2012). 2. Centre for ADHD Awareness, Canada. What is Attention Deficient Disorder? CADDAC. caddac.ca/cms/page.php?67 (consulté le 16 oct. 2012). 3. Arnold LE. et al. Multimodal treatment study of ADHD (MTA). National Institute of Mental Health (NIMH) 1997. 4. U.S. Food and Drug Administration. FDA Update: Budeprion XL 300 mg not therapeutically equivalent to Wellbutrin XL 300mg. fda.gov/ Drugs/DrugSafety/PostmarketDrugSafetyInformationforPatientsandProviders/ucm322161.htm (consulté le 16 oct. 2012). 5. Goldman LS. et al. Diagnosis and treatment of Attention-Deficit/Hyperactivity Disorder in children and adolescents. JAMA 1998;279(14):1100-1107. 6. Dupont RL. et al. Characteristics and motives of college students who engage in nonmedical use of methylphenidate. Am. J. Addict 2008; 17(3):167-71. 7. College of Physicians and Surgeons of Alberta. Triplicate Prescription Program Medication List, février 2012. cpsa.ab.ca/Libraries/Pro_TPP/ TPPMedicationList_Generic.sflb.ashx (consulté le 16 oct. 2012). 8. Schram MJ. et al. 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Reporting of adverse drug reactions by community pharmacists in Ontario. Poster presentation, Canadian Pharmacists Association Annual Meeting, 28-31 mai 2011. Montréal. 13. Rouleau B. et al. Reporting of adverse drug reactions by community pharmacists: A qualitative study in Quebec. Drug Information Journal 2011, 45: 627-639. 14. Canadian Attention Deficit Hyperactivity Disorder Resource Alliance (CADDRA): Canadian ADHD Practice Guidelines, Third Edition, Toronto ON; CADDRA, 2011. http://www.caddra.ca/cms4/index.php?option=com_content&view=article&id=26&Itemid=70&lang=fr (consulté le 16 oct. 2012). 15. Dick E, Balch D. ADD/ADHD and caregiver productivity. Benefits and Pension Monitor, octobre 2004. Un sondage mené auprès d’employés canadiens a mis en évidence le fardeau du TDAH sur le milieu de travail au Canada. Trente-quatre pour cent des employés ayant des enfants atteints du TDAH ont déclaré s’être absentés de leur travail à cause de la maladie, sur une période de deux semaines. De ceux-là, 29 % ont été absents de 1 à 10 h eures et la majorité, jusqu’à 20 heures15. De plus, près de la moitié des participants ayant des enfants atteints de TDAH ont déclaré que leur productivité au travail avait baissé à cause de la maladie15. Les conséquences du passage de CONCERTA® à la version générique peuvent être vraiment considérables. On les remarque surtout quand les patients traités par CONCERTA® passent au médicament générique, comme c’est le cas des patients soumis à un régime d’assurance-médicaments régi par des règles de remplacement par le générique. L’incidence de ce passage peut être considérable et peut déstabiliser des patients qui souvent n’arrivent pas à stabiliser de nouveau leurs symptômes liés au TDAH15, ajoutant ainsi au fardeau mis sur eux, leur famille et leur employeur. Pour réduire cet impact, certains assureurs ont mis en place des mécanismes pour les patients et employés qui, après avoir rempli certains formulaires, peuvent bénéficier d’une exception pour le remboursement du médicament de marque. CE SUPPLÉMENT SPÉCIAL A BÉNÉFICIÉ D'UN SOUTIEN FINANCIER DE JANSSEN