Rapport de stage Hôpital Général de Grand

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Rapport de stage Hôpital Général de Grand
Promotion 2014 – 2017
Année 2015 – 2016
IRFSSA
PLATEFORME SANITAIRE
FORMATION INFIRMIERE
Rapport de stage
Hôpital Général de Grand-Bassam en Côte d’Ivoire
ROULLAUD Marie
GONNINET Samantha
PAULET Meryl
~1~
SOMMAIRE
1. Contexte général sanitaire et socioculturel du terrain de stage
Page 3 à 10
1.1 Les problèmes de santé rencontrés pendant notre stage et leurs causes
1.2 Les demandes de la population concernant sa santé et ses représentations
1.3 L’organisation du système de santé
1.4 Les agents de santé communautaires
2. Soins infirmiers dispensés
Page 10 à
12
3. Facilités ou difficultés rencontrées sur le terrain
Page 12 à
21
3.1 Difficultés rencontrées sur le terrain de stage
3.1.1 L’adaptation
3.1.2 Le travail en équipe
3.1.3 L’adaptation socio-culturelle
3.1.4 La sécurité
3.2 Facilités rencontrées sur le terrain de stage
3.2.1 L’adaptation
3.2.2 Le travail en équipe
3.2.3 L’adaptation socio-culturelle
3.2.4 Le ressenti sur l’encadrement et sécurité
3.2.5 Le ressenti par rapport à la vie en groupe
* Exemple d’une journée type de stage en pédiatrie
4. Conclusion
Page 22 et
23
5. Remerciements
Page 24
~2~
6. Sources
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~3~
1. Contexte général sanitaire et socioculturel du terrain de stage1
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La Côte d’Ivoire se situe dans l’Afrique de l’ouest, dans la zone subéquatoriale et représente
une superficie de 322.462 km². Elle est limitée au Nord par le Burkina Faso et le Mali, à
l’Ouest par le Libéria et la Guinée, à l’Est par le Ghana et au Sud par le Golfe de Guinée. En
2014, la population s’élevait à 22.671.331 habitants dont environ 50% vivent en milieu rural
et 50% en milieu urbain. La population se caractérise par un taux de croissance
démographique élevé (2.8% par an) et par la proportion élevée de sa jeunesse (43% de la
population totale a moins de 15 ans). Le taux de fécondité est important et se traduisait en
2006 par un taux brut de natalité de 37.9% et un indice synthétique de fécondité de 4.6 enfants
par femme.
L’économie3 est encore basée sur l’agriculture, en particulier le cacao et le café. La capitale
administrative du pays est Yamoussoukro et la capitale économique est Abidjan.
1
DOLLET Agnès. 2015. TD : diagnostique de population et projet de promotion de la santé
(UE 1.2. S3) : IRFSSA. 03/11/2015.
2
https://www.bing.com/images/search?q=carte+de+cote+d%27ivoire&view=detailv2&&id=3A06099
EC5C6A728B5909E5CCDDCB551CE8AF784&selectedIndex=11&ccid=s9PH2udO&simid=608051
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3
http://horest-grandbassam.com/index.php/infos-et-liens-utiles/vivre-en-cote-d-ivoire
~4~
La langue officielle est le français. Et les religions les plus représentées sont l’islam (37,5%),
le christianisme (44,1%) et certaines religions africaines (18,4%).
La Côte d’Ivoire compte une soixantaine d’ethnies réparties en quatre grands groupes (Akan,
Mandé, Krou, Voltaïque). Selon l’enquête sur le niveau de vie de 2008, le niveau
d’alphabétisation est relativement faible (55.8% chez les 15-24ans). Le taux de scolarisation
dans le primaire est passé de 56.5% en 2002 à 56.1% en 2008.
Historiquement, la Côte d’Ivoire est une ancienne colonie française devenue indépendante
depuis le 7 Aout 1960. C’est une République démocratique avec un régime de type
présidentiel. Ce pays a connu de nombreuses tensions. Les dernières étant la crise politicomilitaire de 2002 liée aux crises économiques, sociales et politiques des années antérieures
(1990). S’en est suivie celle de 2010 liée aux élections qui a beaucoup aggravé la pauvreté.
Le climat est de type tropical humide et se répartit en climat équatorial humide au sud et
climat tropical de type soudanais au nord. Les températures sont généralement élevées avec
une moyenne de 30°C.
Et Grand-Bassam…
Nous avons réalisé notre stage au sein de l’ancienne ville historique et capitale de la Côte
d'Ivoire (1893-1900), située sur le littoral de l’Océan Atlantique à 43 kilomètres à l'est
d'Abidjan dans la région du Sud-Comoé. Le 3 juillet 2012, le quartier français de Grand-
~5~
Bassam, considéré comme le cœur historique de la ville, est classé au patrimoine mondial de
l'UNESCO.
En 2014, la population de Grand-Bassam s’élevait à 84030 habitants4.
Le climat de la ville est très humide et connaît quatre saisons (d'avril à la mi-juillet : grande
saison des pluies ; de la mi-juillet à septembre : petite saison sèche ; de septembre à
novembre : petite saison des pluies ; de décembre à mars : grande saison sèche).
Enfin, l’économie de la ville repose essentiellement sur le tourisme étranger et l'agriculture
grâce à la production de cacao, d'huile de palme et de café.
1.1 Les problèmes de santé rencontrés pendant notre stage et leurs causes
Durant ce stage, nous étions dans différents services de l’hôpital général de Grand-Bassam.
Nous avons découvert la médecine, les urgences, la pédiatrie, les consultations en PMI
(Protection Maternelle et Infantile) et la chirurgie. Nous avons pu remarquer que les motifs de
consultation les plus fréquents, commun à tous les services étaient : le paludisme, le
VIH/SIDA (surtout en PMI), l’anémie, les bronchites asthmatiformes, les pathologies
digestives tels que les ulcères et les malades diarrhéiques ainsi que les maladies éruptives
(surtout en pédiatrie).
Le paludisme5 est une maladie infectieuse potentiellement mortelle due à plusieurs espèces
de parasites appartenant au genre Plasmodium. Le parasite est transmis à l’homme par la
piqûre de moustiques infectés. Ces moustiques, « vecteurs » du paludisme, appartiennent tous
au genre Anophèles. Seules les femelles transmettent la maladie.
Cette maladie est très fréquemment rencontrée en Côte d’Ivoire car les moustiques
responsables se développent dans les lieux chauds et humides. Lorsqu’il pleut, l’eau de pluie
stagnante favorise la reproduction de ces anophèles femelles, de ce fait, le risque de se faire
4
https://www.bing.com/search?q=population+%C3%A0+grand+bassam+c%C3%B4te+d%27i
voire&qs=n&form=QBRE&pq=population+%C3%A0+grand+bassam&sc=0-25&sp=1&sk=&cvid=6E9AF610EE1A454DA146CA7E2066B6E4
5
https://www.pasteur.fr/fr/institut-pasteur/presse/fiches-info/paludisme
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piquer par un moustique est plus élevé. De plus, la non-utilisation de la moustiquaire
imprégnée, donnée par les services à la naissance de l’enfant, augmente ce risque.
Le Virus d’Immunodéficience Humaine (VIH)6 est l’agent causal du Syndrome
d’Immunodéficience Acquise (SIDA). Ce virus altère progressivement le système
immunitaire de l’homme. Il pénètre dans certains globules blancs, notamment les
lymphocytes T4 et les détruits. Le SIDA est la conséquence de l’atteinte du système
immunitaire au cours de l’infection par le VIH. C’est la phase la plus grave.
Le VIH se transmet majoritairement par voie sexuelle lors de rapports non protégés mais
également de la mère à l’enfant par le biais de l’accouchement et de l’allaitement. La
prévention concernant le port du préservatif est insuffisante et/ou mal comprise, de ce fait
l’utilisation du préservatif par la population est souvent inexistante ou inappropriée.
Cependant, le suivi de la mère après l’accouchement et pendant l’allaitement est plus
rigoureux et efficace seulement si la mère respecte son traitement.
L’anémie7 se caractérise par la carence de globules rouges (ou hématies, cellules sanguines
qui assurent le transport de l'oxygène) ou d'hémoglobine (protéine riche en fer et principal
constituant des globules rouges) dans le sang, qui a donc pour conséquence la perturbation du
transport d'oxygène.
En Côte d’Ivoire, l’anémie est le plus souvent un effet secondaire du paludisme, elle touche
majoritairement les enfants de 0 à 5ans. Elle est d’autant plus fréquente que la population
ivoirienne demande une prise en charge tardivement. Ainsi lorsque ceux-ci se rendent en
consultation, l’anémie est à un stade avancé, il y a très fréquemment des transfusions
sanguines chez les enfants. L’alimentation peu riche en fer ainsi que le manque de moyens
sont aussi des causes de cette anémie.
6
https://www.pasteur.fr/fr/institut-pasteur/presse/fiches-info/vih-sida
7
http://sante-medecine.journaldesfemmes.com/faq/7627-anemie-symptomes-et-diagnostic
~7~
Les bronchites asthmatiformes8 sont des affections pulmonaires reliant les symptômes de
l’asthme et de la bronchite. Cela se manifeste par des sécrétions de crachats, de la fièvre, de la
toux et une difficulté à respirer.
Dans ce pays, elles proviennent généralement de facteurs environnementaux tels que la
pollution ou les poussières, ainsi que de facteurs génétiques.
Les pathologies digestives telles que les maladies diarrhéiques, c’est-à-dire les maladies
présentant des selles de consistance liquide ou molle, plus volumineuses et nombreuses
qu’habituellement (plus de 3 selles par jour), sont ici généralement liées à un manque d’accès
à l’eau potable, une alimentation trop épicée ou à la nourriture contaminée provenant le plus
souvent des marchés.
De plus, les ulcères, à savoir la perte de substances creusée dans la muqueuse gastrique,
peuvent être la conséquence du stress engendrée par la pauvreté et la peur de ne pas pouvoir
subvenir à leurs besoins. Il a également été remarqué qu’une augmentation des ulcères
gastriques provenait du stress post-traumatique lié aux attentats du 13 Mars 2016.
Enfin, les pathologies éruptives (dermatoses ; toutes affections de la peau et des muqueuses,
indépendamment de leur cause), le plus souvent chez les enfants, sont liées à un manque
d’hygiène corporelle et de l’environnement. En effet certains parents ne prennent pas assez en
compte la nécessité d’une bonne hygiène cutanée. De plus l’insalubrité des logements peut
favoriser le développement de ces dermatoses.
1.2 Les demandes de la population concernant sa santé et ses représentations
Nous avons pu remarquer lors des consultations que la demande majoritaire de la population
était l’accessibilité aux soins à moindre coût car beaucoup ne peuvent pas se soigner par
manque de moyens (seuls les fonctionnaires possèdent une mutuelle de remboursement).
1.3 L’organisation du système de santé9
8
http://www.docteurclic.com/maladie/bronchite-asthmatiforme.aspx
Etudiants de l’école d’infirmière d’Aboisso. 2016. Cours de santé publique, Côte d’Ivoire :
Grand-Bassam. Mars – Avril 2016.
9
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Le système de santé ivoirien est structuré de façon pyramidale. Il comprend 2 versants : l'un
administratif et l'autre offre de soin. Chaque versant comprend 3 niveaux.
3ème
niveau
2ème
niveau
1er
niveau
Au premier niveau :
Sur le versant de l’offre de soin, ce sont les Etablissements de Santé de Premier Contact
(ESPC) qui constituent la porte d'entrée du système de santé. En effet, les dispensaires, les
PMI et autres centres de santé urbains privilégient les soins préventifs et effectuent les soins
de bases et vaccination. Ils orientent également les patients vers le second niveau si besoin.
~9~
Sur le versant administratif, les Directions Départementales aussi appelées « districts
sanitaires » sont chargés de coordonner l’activité sanitaire dépendant de leur ressort territorial.
Ils sont également chargés de faire des rapports mensuels sur les éventuels problèmes
rencontrés, les besoins et les demandes des populations soignées.
Au deuxième niveau :
Sur le versant offre de soin, ce sont les Hôpitaux Généraux, Hôpitaux Régionaux et certains
Centres Hospitaliers Spécialisés (CHS) qui adressent les patients lorsque les établissements de
santé de premier contact ne peuvent les prendre en charge ou bien lorsque les patients se
trouvent à proximité de ceux-ci.
Sur le versant administratif, les directions régionales ont une mission d’appui aux districts
sanitaires pour la mise en œuvre de la politique sanitaire. Ils sont également chargés de faire
des rapports mensuels.
Au troisième niveau :
Sur le versant offre de soin, les patients sont adressés en dernier recours dans les Centres
Hospitaliers Universitaires et les Centres Hospitaliers Spécialisés. C'est à dire que ce sont des
patients qui n'ont pas pu être pris en charge dans les établissements des deux autres niveaux,
souvent par manque de plateau technique ou de médecins spécialistes.
Le versant administratif est constitué par le cabinet du ministre. Il est chargé d'établir la
définition de la politique, de l’appui et de la coordination globale de la santé.
En Côte d'Ivoire, le système de santé est principalement financé10 par l'Etat au moyen de
subventions accordées aux établissements de santé publics ou de dotations financières. Les
particuliers et le secteur privé participent également au financement de ce système de santé au
moyen de soins qui sont facturés et de redevances perçues auprès des utilisateurs des services
de santé. Ces paiements s'effectuent soit directement, soit au travers des assurances ou des
mutuelles notamment.
10
http://www.goafricaonline.com/ci/articles/27-administration-sante-cote-ivoire
~ 10 ~
A notre échelle, les structures de soins présentent sont l’Hôpital Général, le centre de
Protection Maternelle et Infantile (PMI), les centres de santé comme le centre social ou le
service de santé scolaire et universitaire ainsi qu’un dispensaire régional.
Nous avons constaté qu’au sein de l’hôpital (principal lieu de stage), par manque de
personnels
soignants
(notamment
de
médecins)
et
d’organisation,
les
fonctions
professionnelles des membres de l’équipe de soins vont au-delà de leurs compétences et
d’après leurs dires, sont illégales.
En effet, les rôles de chacun ne sont pas définis, par exemple les infirmières et les sagesfemmes pratiquent des consultations et font des prescriptions médicales au même titre que les
médecins.
Les aides-soignantes réalisent des actes infirmiers (injections médicamenteuses, pose de
sonde nasogastrique…) et les agents de services hospitaliers réalisent des soins d’hygiène
mais aussi des actes infirmiers (pansements). Des formations adaptées sont cependant
dispensées afin d’assurer une continuité des soins efficace.
1.4 Les agents de santé communautaires
Les agents de santé communautaire en Côte d’Ivoire ont pour mission de définir des priorités
en matière de santé selon les situations rencontrées ainsi que selon les demandes de la
population. Ils comblent la distance entre les habitants des villages les plus reculés et les soins
qui leur sont indispensables pour rester en bonne santé. Les agents sont principalement des
bénévoles qui exercent un autre métier à côté afin d’assurer davantage de sensibilisation à
propos des maladies prévalentes dans les pays auprès des familles. Ce sont des personnes
proches des gens sur le terrain afin de leur apporter des conseils sur leur état de santé et de les
orienter vers les centres de soins.
Ces agents de santé bénéficient de formations adaptées afin d’avoir les connaissances
médicales suffisantes à la prévention.
A Grand-Bassam, nous n’avons malheureusement pas eu l’opportunité de rencontrer des
agents de santé communautaires mais cela pourrait être intéressant à développer lors les stages
suivants notamment si les étudiants visitent un village reculé.
~ 11 ~
2. Soins infirmiers dispensés
Concernant notre espace de travail, nous avons réalisé notre stage principalement au sein de
l’hôpital puis une semaine au sein de la PMI de Grand-Bassam. Cependant, nous avons visité
lors de notre temps libre le dispensaire d’un village reculé (Aby village) et l’orphelinat de
jeunes filles situé au quartier France de Grand-Bassam.
En tant que stagiaires, nous avons su nous positionner au sein des équipes soignantes en nous
adaptant aux pratiques locales. Nous avons également fait part de nos pratiques de soins
appliquées en France, cela a donc constitué un échange intéressant entre les soignants et nous.
De plus, nous avons été principalement encadrées par les sages-femmes, les infirmières, les
aides-soignantes et les médecins mais également par les « major » équivalent des cadres en
France. Nous avons cependant été autonomes lors de différents actes : injections, pesée des
enfants, prise des constantes et traçabilité dans les carnets de santé…
Dans les différents services, nous avons prodigués des soins préventifs, tels que :
- les contraceptifs (injections, dispositifs médicaux, comprimés)
- les vaccins de la mère et de l’enfant (BCG, Diphtérie, Tétanos, Poliomyélite (injectable ou
orale), Fièvre jaune, Rougeole, Oreillons, Rubéole…)
- les injections médicamenteuses comme la vitamine K (en cas de saignements importants au
niveau du cordon ombilical du nourrisson)
Nous avons également effectué des traitements curatifs :
- injections en intramusculaire d’antipaludéens
- injections en intraveineuse directe d’antalgiques et antipyrétiques
- injections en intramusculaire d’antiémétiques
- administration de thérapeutiques oraux
- administration de thérapeutiques par perfusion intraveineuse
- réalisation de pansements
Cependant, face aux soins prodigués, l’écoute active et la prévention directe auprès des
populations est tout aussi importante. Nous avons pu remarquer lors de notre stage en PMI
~ 12 ~
que les sages-femmes prenaient le temps d’expliquer aux patientes l’intérêt de la prévention
notamment face aux grossesses précoces ou aux maladies sexuellement transmissibles
(VIH/SIDA, IST). Les médecins aussi expliquaient l’importance de l’hygiène au sein des
familles notamment pour éviter la propagation d’infections.
Enfin, nous avons eu l’occasion de réaliser une séquence éducative auprès des étudiants
infirmiers et sages-femmes ivoiriens sur le port de gants.
Notre objectif était d’évaluer leurs connaissances sur ce sujet car nous avons remarqué dans
les différents services qu’ils n’utilisaient pas les gants correctement c’est-à-dire qu’ils les
utilisaient pour pratiquer des soins basiques (alimentation de nouveaux nés) et pratiquaient au
contraire des soins invasifs (prises de sang ou injections) sans gants.
C’est pourquoi, nous avons d’abord fait un apport théorique suivit d’un quizz pour évaluer
notre apport. Nous avons pu également échanger sur les pratiques soignantes entre nos deux
pays et apprendre davantage sur leur culture.
3. Facilités ou difficultés rencontrées sur le terrain
3.1 Difficultés rencontrées sur le terrain de stage
3.1.1 L’adaptation
Lors de ce stage, nous avons dû adapter nos pratiques professionnelles à la réalité du terrain à
cause du manque de moyens financiers et matériels. Nous avons eu quelques difficultés à
effectuer des soins non conformes aux bonnes pratiques françaises car cela ne nous paraissait
pas naturel.
Nous avons donc pratiqué les soins suivants :
- des vaccins avec de l’eau comme antiseptique
- des prélèvements veineux avec des aiguilles prévues pour injections intramusculaires et gant
en guise de garrot
- des prélèvements veineux réalisés plusieurs fois sur la même personne avec la même aiguille
~ 13 ~
- l’ouverture des tubes de prélèvements pour recueillir le sang au goutte-à-goutte à l’aide d’un
cathéter retiré par la suite
- la conservation d’une seule seringue par patient durant toute la durée d’hospitalisation
- des injections diverses sans port de gants
- réalisation de pansements chirurgicaux avec des produits non-antiseptiques et de différentes
familles (mélange entre Ether®, Dakin®, Alcool à 90°, Bétadine®)
Cependant, nous avons rapidement fait le lien entre l’utilisation répétée du même matériel et
le fait que ce soit la famille du patient qui paie les médicaments et le matériel de soins. De ce
fait, pour que le patient puisse bénéficier de soins, les soignants ne peuvent pas demander aux
familles d’acheter plus de matériel en plusieurs fois. La prise en charge reste malgré tout
relativement couteuse pour eux.
Plateau de vaccination
Prélèvement sur cathéter
De plus, nous avons remarqué que les salles de soins et le matériel étaient rarement
désinfectés par manque de produits. Les soignants utilisaient principalement de la javel diluée
avec de l’eau afin d’en avoir en plus grande quantité à défaut d’une efficacité optimale du
produit (exemple ci-dessous en service de chirurgie) ainsi que du produit pour laver les sols.
~ 14 ~
L’utilisation de la javel pure n’est pas une mauvaise pratique par manque d’autres produits
dans ce pays mais il en faudrait en quantité pour chaque service ce qui n’est pas le cas
malheureusement. L’hygiène et la désinfection étaient donc très mal respectées selon nos
pratiques françaises.
Il a été également difficile pour nous de réaliser des injections sur des enfants agités et
apeurés par l’acte de soins mais probablement aussi par notre présence en tant que
« banches » et « blouses blanches ». Face à une telle situation, les soignants maintenaient
l’enfant à plusieurs afin d’effectuer le geste sans réconfort et explications. Nous sommes à
plusieurs reprises sortis de la salle de soins en vue de notre impuissance. Nous avons partagé
notre ressenti avec l’équipe soignante mais nous n’avons pas eu de retour constructif. Nous
avons donc préféré garder nos habitudes en expliquant chaque soin aux enfants que nous
prenions en charge.
La prise en charge de la douleur étant souvent faible ou inexistante, les pansements en
chirurgie étaient aussi très durs à réaliser pour nous. Certaines personnes hurlaient de douleur,
nous avions l’impression que les infirmiers étaient totalement indifférents à celle-ci. Nous leur
avons donc posé la question et nous avons été surprises de leur réponse : selon eux, en
Afrique, les gens doivent apprendre à souffrir et prendre en considération la souffrance de
l’autre prouve que la personne est « faible d’esprit ». Nous avons donc constaté un réel fossé
entre la culture française et ivoirienne.
~ 15 ~
Enfin, nous nous sommes rendues compte de notre manque de connaissances sur les habitudes
de vie de la population et principalement sur leurs coutumes (maquillage, oreilles percées des
bébés…) ce qui aurait pu nous porter préjudice lors d’une prise en charge. Nous ne pensions
pas toujours à poser les bonnes questions mais nous avons su nous remettre en question et
apprendre davantage sur leur culture.
Nous avons également appris à connaitre les pathologies prévalentes ainsi que leurs signes
cliniques, signes associés et traitements tout au long de notre stage ce qui nous a permis de
mieux comprendre les consultations ou visites de médecins que nous avons pu pratiquer ou
regarder.
3.1.2 Le travail en équipe
Les rôles des soignants n’étaient pas définis comme en France, nous avons eu du mal à
comprendre leur organisation ainsi que leur place au sein de l’équipe.
Nous avons parfois eu avoir l’impression que certains soignants mettaient une distance entre
eux et nous. Ils semblaient être méfiants à notre égard, peut-être par notre présence ici, au sein
de l’Hôpital. Aussi, nous avons souvent eu des remarques sur nos situations financières plus
aisées selon eux, sur le matériel que nous avons apporté (non utilisé à bon escient, certains
nous en ont demandé d’avantage). D’autres soignants, au contraire, étaient très accueillants,
nous ont proposé des sorties et nous ont acceptés rapidement.
3.1.3 L’adaptation socio-culturelle
La barrière de la langue nous a parfois mis en difficulté car certaines familles utilisent encore
les dialectes de la région (Baoulé). Bien que la plupart parle français, leur accent reste
prononcé ce qui a engendré des problèmes de compréhension réciproque.
Nous avons été surprises par leur insistance concernant notre vie privée, à savoir si nous
étions mariées, notre religion, échange de contacts en début de conversation… Il était
compliqué pour nous de ne pas partager ces informations, d’autant plus quand il s’agissait de
personnes inconnues.
Etant donné le peu de personnes « blanches » à Grand-Bassam, nous étions souvent
interpellées avec les termes « les blanches », « blanfoué », touchées et regardées avec
insistance. Cela était déstabilisant et a parfois pu nous mettre mal à l’aise.
~ 16 ~
De plus, pour beaucoup les européens sont fortunés, ainsi ils ont tendance à augmenter les
prix en voyant notre couleur de peau. Les soignants nous ont conseillés de diviser les prix par
deux ou trois pour avoir le prix réel.
3.1.4 La sécurité
Lors d’une sortie, nous avons fait la rencontre d’une jeune femme résidant habituellement en
France. Celle-ci s’est montrée d’un premier abord sympathique ce qui nous a mis en
confiance. Nous lui avons dit que nous étions des stagiaires infirmières et que nous résidions à
l’hôpital de Grand Bassam. Rapidement, elle nous a posé beaucoup plus de questions précises
sur le logement et sur nos revenus. Nous avons pensé qu’elle était malintentionnée et sommes
rentrées. Le soir même, elle est venue à l’hôpital en nous demandant. Le garde de nuit n’ayant
pas connaissances de sa venue, lui a demandé de partir. Elle a tout de même insisté en sonnant
directement à notre logement et nous a demandé de l’argent. Nous avons pris peur et lui avons
donné 200 francs (prix du taxi). Nous avons informé la direction dès le lendemain, nous nous
sentions plus en sécurité après en avoir parlé avec eux.
3.2 Facilités rencontrées sur le terrain de stage
3.2.1 L’adaptation
Il a été possible pour nous de mettre en pratique nos connaissances sur le terrain de stage. En
effet, les apports théoriques reçus au préalable nous ont permis de mieux comprendre les
pathologies et leurs prises en charge.
Grâce au matériel fournis par l’hôpital de Moulins, nous avons pu réaliser des soins dans les
meilleures conditions possibles (port de gant autant que possible et lavage de mains au PHA
car il n’y avait pas forcément de point d’eau dans chaque salle de soin et pas de savon
liquide).
3.2.2 Le travail en équipe
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Nous avons eu l’occasion de travailler en collaboration de façon pluridisciplinaire. Nous
avons participé aux consultations aussi bien avec le médecin qu’avec les infirmières et sagesfemmes. La prise de constantes se faisait en collaboration avec l’aide-soignante.
La présence d’autres étudiants infirmiers et sages-femmes (ci-dessous) nous a permis d’être
plus à l’aise au sein des équipes soignantes.
3.2.3 Adaptation socio-culturelle
Rapidement, nous nous sommes habituées aux conditions de vie ivoiriennes, moins
confortables qu’en France : se doucher avec des bouteilles d’eau provenant d’un fût
préalablement rempli, remplissage de la chasse d’eau avec des seaux d’eau, coupure régulière
de courant, brossage de dents avec de l’eau en bouteille…
~ 18 ~
Malgré le fort accent de la majorité de la population, la langue française était tout de même un
atout pour communiquer. Ainsi nous avons pu partager sur les différences culturelles de nos
pays. Nous avons pour cela visité le musée du costume, il retrace l’histoire africaine dont la
colonisation du pays par les français.
Nous avons aussi posé beaucoup de questions sur les traditions, les coutumes lors de notre
stage : port de collier autour de la taille appelé « baya » pour embellir la silhouette,
maquillage des yeux des bébés pour repousser les mauvais esprits, boucles d’oreilles aux
nourrissons pour différencier les filles et les garçons, cicatrices sur les joues pour montrer
l’appartenance au peuple Baoulé. Cela nous tenait à cœur, et nous semblait important de
comprendre leurs coutumes et traditions pour adapter la prise en charge.
~ 19 ~
(Musée du costume)
Enfin nous avons découvert la cuisine locale, nous avions tous les soirs des plats apportés par
un restaurant africain. Nous avons gouté des plats typiques tels que le poisson grillé, l’attiké
(manioc pillé), l’aloco (banane plantain frit) … il a été parfois difficile de finir nos plats
lorsqu’ils étaient trop épicés.
Aloco – Poisson
Attiké - Poisson
~ 20 ~
3.2.4 Ressenti sur l’encadrement et sécurité
A notre arrivée à l’aéroport, nous avons été accueillies par le directeur adjoint ainsi que par
deux ambulanciers de l’hôpital. Ils nous ont conduits à l’hôpital où la directrice nous a
présenté notre logement. C’est une maison indépendante, à côté de la sienne. Située dans une
cour fermée à clef, gardée par trois chiens. L’hôpital étant lui-même fermé par des gilles et
gardé par deux agents de sécurité, nous nous sommes vraiment senties en sécurité dès notre
arrivée.
Le lendemain, nous avons pu exprimer nos souhaits pour notre stage avec la directrice de
l’hôpital et le directeur de la PMI. Ils avaient notion d’un stage se déroulant dans des services
autour de la mère et de l’enfant. Cela ne correspondait pas à ce qui nous avait était proposé
par l’hôpital de Moulins (médecine, urgences, chirurgie...). Le médecin chef a ensuite établie
notre planning en tenant compte de ce qui nous avions exprimé, celui-ci convenait à nos
attentes.
Tout au long du stage, les personnes de l’administration ont été à notre écoute. Cependant,
suite aux attentats du 13 mars 2016, nous avons eu des restrictions concernant nos sorties. En
effet nous avons peu à peu pu sortir seules dans la ville de Grand-Bassam, mais pas à
l’extérieur. Nous avons seulement pu visiter un village isolé (Aby Village) avec le médecin
chef de l’Hôpital. Cela ne nous a pas surpris, nous savions dans quelles conditions nous
partions.
~ 21 ~
3.2.5 Ressenti par rapport à la vie en groupe
Nous avons eu la chance de partir ensemble, nous nous entendions bien au sein de l’institut.
Cela nous a rassurées quant au fait de vivre en collocation pendant cinq semaines. Il n’y a pas
eu de tension au sein du groupe. En effet, nous avions les mêmes attentes pour ce stage ainsi
que pour les loisirs.
Pour faciliter les dépenses communes, nous avons élaboré un système de cagnotte. Cela a
permis d’éviter d’éventuels conflits liés à l’argent.
Exemple d’une journée type de stage en pédiatrie
Entre 7h30 et 8h30 :
- arrivée de l’équipe du jour
- « relève » entre l’équipe de garde et le(s) médecin(s) à propos de l’état de santé des enfants
hospitalisés
Entre 8h30 et 9h :
- visite du/des médecin(s) auprès de chaque patient afin d’évaluer son état de santé et
d’adapter la prise en charge
- prise des constantes par les aides-soignantes et traçabilité sur les carnets de santé des enfants
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Entre 9h30 et 10h :
- début des consultations pour les médecins et les infirmières ou les sages-femmes
- soins infirmiers pratiqués par les infirmières ou les aides-soignantes lorsque les familles de
patient ont été cherché les traitements prescrits à la pharmacie
- début des examens au laboratoire
Lors des consultations, les délégués médicaux extérieurs viennent présenter des nouvelles
thérapeutiques commercialisées depuis peu.
De 13h30 à 14h30 : fin des consultations et pause pour l’équipe en poste
4. Conclusion
Ce stage nous a permis de nous rendre compte des inégalités dans le monde et plus
particulièrement en Afrique. Malgré quelques difficultés toujours surmontées, nous sommes
heureuses d’avoir pu saisir cette opportunité de faire ce type de stage et le recommandons aux
prochains étudiants de l’IRFSSA qui seraient potentiellement intéressés. Cela nous a demandé
beaucoup d’organisation, nous leur conseillons donc d’être réellement motivés et rigoureux.
C’est tout de même une expérience enrichissante et très intéressante, aussi bien culturellement
que professionnellement, ainsi qu’une aventure inoubliable à vivre pleinement avec des
paysages idylliques.
Nous avons aussi rencontré des personnes formidables, avec qui nous avons passé de bons
moments et nous les remercions tout particulièrement.
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Equipe de pédiatrie
Barbara, élève de médecine
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Ibrahim, un agent de maintenance de l’hôpital avec qui nous avons fait beaucoup d’activités et
qui nous a accompagné tout au long de notre stage.
La plage de Grand-Bassam
Un hôtel de Grand-Bassam
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5. Remerciements
Nous souhaitons enfin remercier l’IRFSSA Croix-Rouge de Moulins de nous avoir donner
l’opportunité de réaliser des projets tels que ceux-ci,
Merci également à l’Hôpital de Moulins et en particulier à Mme Theuws Maryline de nous
avoir mises en contact avec l’Hôpital de Grand-Bassam, de nous avoir guidées dans les
démarches administratives et suivies tout au long du stage,
Merci aussi à l’Hôpital de Grand-Bassam de nous avoir accueillies et accompagnées dans
notre découverte de la région et du pays,
Enfin, merci aux BDE et à toutes les personnes qui ont contribué au financement de notre
stage.
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6. Sources
1. DOLLET Agnès. 2015. TD : diagnostique de population et projet de promotion de la santé
(UE 1.2. S3) : IRFSSA. 03/11/2015.
2.https://www.bing.com/images/search?q=carte+de+cote+d%27ivoire&view=detailv2&&id=
3A06099EC5C6A728B5909E5CCDDCB551CE8AF784&selectedIndex=11&ccid=s9PH2ud
O&simid=608051169819299392&thid=OIP.Mb3d3c7dae74eb9b4b40546a89b4fb4c0o0&aja
xhist=0
3. http://horest-grandbassam.com/index.php/infos-et-liens-utiles/vivre-en-cote-d-ivoire
4. https://www.pasteur.fr/fr/institut-pasteur/presse/fiches-info/paludisme
5.https://www.bing.com/search?q=population+%C3%A0+grand+bassam+c%C3%B4te+d%2
7ivoire&qs=n&form=QBRE&pq=population+%C3%A0+grand+bassam&sc=0-25&sp=1&sk=&cvid=6E9AF610EE1A454DA146CA7E2066B6E4
6. https://www.pasteur.fr/fr/institut-pasteur/presse/fiches-info/vih-sida
7. http://sante-medecine.journaldesfemmes.com/faq/7627-anemie-symptomes-et-diagnostic
8. http://www.docteurclic.com/maladie/bronchite-asthmatiforme.aspx
9. Etudiants de l’école d’infirmière d’Aboisso. 2016. Cours de santé publique, Côte d’Ivoire :
Grand-Bassam. Mars – Avril 2016.
10. http://www.goafricaonline.com/ci/articles/27-administration-sante-cote-ivoire
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