Polyarthrite rhumatoïde - Service de Rhumatologie

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Polyarthrite rhumatoïde - Service de Rhumatologie
Cours DCEM3 – Polyarthrite rhumatoïde – Mise à jour du 20/03/2011
Polyarthrite rhumatoïde
Etiologie, diagnostic, évaluation, principes de traitement et surveillance
Module 14 - Pathologie de l'appareil locomoteur - rhumatologie DCEM3
Internat n° 121 - Mise à jour 2011
•
•
•
La polyarthrite rhumatoïde (PR) est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques de l'adulte.
Elle touche 0,53 p.100 de la population française.
Sa cause est inconnue, mais on incrimine l'interaction d'une prédisposition génétique et de facteurs
d'environnement toxiques et infectieux notamment.
ÉTIOLOGIE
A. Génétique de la PR
Les jumeaux homozygotes sont plus souvent concordants pour la PR (15 à 30 %) que les jumeaux dizygotes (5 à 10 %).
Plusieurs gènes vont intervenir dans le déterminisme de la PR. Ils comptent pour 60 % environ dans le risque de développer
la maladie. Le plus connu est le gène HLA-DRB1 situé sur le chromosome 6 humain (ce gène à lui tout seul représente 30 %
du risque génétique à développer une PR) : certains allèles sont associés de façon statistiquement significative : DRB1*0401,
0404, 0405, 0408, 0101, 0102, 1001 et 1402. Nombre de ces allèles ont en commun une séquence sur le troisième segment
hypervariable appelé épitope partagé. Environ 75 % des patients caucasiens d'Europe du Nord sont porteurs de l'un de ces
allèles contre 25 % environ dans la population générale. Les autres gènes sont actuellement en cours de localisation sur le
génome et divers gènes candidats font l'objet d'études sur des populations de PR et leurs parents. Le 2ème gène de
susceptibilité confirmé est PTPN22 qui code pour une phosphatase impliquée dans la transduction du signal des récepteurs
clonotypiques des lymphocytes T (TCR) et B (BCR). Bien d'autres gènes de susceptibilité à la PR ont été, soit confirmés, soit
encore en attente de réplication sur une cohorte indépendante. Ils peuvent être classé selon la fonction de la protéine pour
laquelle ils codent : signalisation intracellulaire/transduction, transcription, voies de co-stimulation et récepteurs
membranaires. Nombre de ces gènes sont associés non seulement à la PR, mais également à d'autres maladies autoimmunes
(tableau I).
Tableau I : Principaux facteurs de susceptibilité génétique impliqués dans le déterminisme de la polyarthrite rhumatoïde
Gène
Localisation Fonction
Sous-type de PR
Présentation de l’antigène
HLA-DRB1*
6p21
Présentation d’antigène
SE :
ACPA+
- 0401, O402
- 0404, 0405, 0408
- 1001, 1402
- 0101, 0102
- 0301
ACPATransduction du signal et signalisation intra-cellulaire
PTPN22
1q13-3
Signalisation TCR et BCR
ACPA+
TNFAIP3/OLIG3
6q23
Signalisation TNFR/voie NFkB
ACPA+
TRAF1
9q33
Signalisation TNFR/voie NFkB
ACPA+
Facteurs de transcription
IRF5
7q32
Voie IFN type I
ACPA+
STAT4
2q32-2
ACPA+
Voie IFN γ
c-Rel
2q13
Voie NFkB expression de CD40
Voies de co-stimulation et récepteurs membranaires
CTLA4
2q33
Co-stimulation T
CD40
20q12
Co-stimulation T/voie NFkB
Enzymes de citrullination
PADI-4
1p36
Citrullination (peptidyl arginine
PR asiatiques
déiminase 4)
B. Facteurs d'environnement
Ils restent mal connus. Le premier est le tabac, en particulier pour les PR avec facteurs rhumatoïdes et anticorps antiprotéines citrullinées (ACPA). Il existe une interaction gène-environnement assez forte, notamment entre HLADRB1* portant
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l'épitope partagé et le tabac chez les PR avec ACPA. Plusieurs agents infectieux joueraient également un rôle déclenchant,
mais peut-être de façon indirecte :
•
Le virus EBV a des propriétés d'activateur polyclonal des lymphocytes B. Les lymphocytes T de PR, semblent
déficients pour contrôler la prolifération des lymphocytes B déclenchée par l'EBV.
•
Les mycobactéries ont été incriminées par l'intermédiaire de protéines du choc thermique, HSP 65kD, susceptibles
de déclencher une réponse proliférative T croisée avec certaines protéines du choc thermique des chondrocytes
humains.
•
Diverses bactéries d'autre nature produisent aussi différentes HSP, telle DNAJ, capables de reconnaître certaines
molécules HLA de classe II DRB1*0404.
•
Les superantigènes bactériens peuvent stimuler de nombreux clones T dont certains sont particulièrement
représentés dans les synoviales de polyarthrite rhumatoïde.
•
Certaines bactéries de la flore buccale produisent une peptidyl arginine déïminase (PAD) capable de citrulliner les
protéines riches en arginine. Les protéines citrullinées antigéniques pourraient susciter la production d'anticorps
correspondants (ACPA). Porphyromonas gingivalis est associé aux parodontopathies, affection fréquente dans la PR.
Elle produit une PAD capable de citrulliner les protéines humaines.
C. Mécanismes intermédiaires
L'inflammation rhumatoïde, quelque soit la cause, résulte d'une infiltration de la synoviale par des cellules inflammatoires
(lymphocytes T, lymphocytes B, monocytes macrophages) qui viennent renforcer le potentiel inflammatoire des synoviocytes
résidants : type A d'origine macrophagique et type B d'origine mésenchymateuse fibroblastique. Les cellules présentatrices
d'antigène (telles les cellules dendritiques) produisent des cytokines telles que l'IL18, l'IL12 et l'IL1 qui activent les
lymphocytes T. Le TNFalpha joue également un rôle important de chef d'orchestre des cytokines proinflammatoires. Les
monocytes macrophages produisent des facteurs d'angiogénèse tel que le VEGF qui favorisera l'apport de cellules
inflammatoires. La réponse T spécifique est de type Th1 avec production d'IL2 et d'INFgamma, et plus accessoirement de
type Th2 avec production d'IL4, d'IL10 et d'IL13. Les Th17 produisant de l'IL17A seraient un acteur important de la réaction
immunologique et de l'ostéolyse produite par les ostéoclastes. A un stade plus évolué de la réaction inflammatoire, les
monocytes macrophages produisent de grandes quantités d'IL1 et de TNF alpha dont l'activité ne peut être suffisamment
freinée par leurs inhibiteurs naturels, IL1-Ra et récepteurs solubles de l'IL1 d'une part, récepteurs solubles du TNFalpha
d'autre part. Les fibroblastes produisent également de l'IL1 et du TNFalpha, ainsi que des chimiokines (chimiotactiques) telles
que l'IL8, des métalloprotéases et du NO, des radicaux libres, des prostaglandines PGE2. Le phénotype de ces fibroblastes
synoviaux est proche de celui de cellules transformées avec expression de divers oncogènes (C-myc). Les chondrocytes
participent aux phénomènes de chondrolyse en produisant de l'IL1 et des métalloprotéases et en diminuant ses capacités de
synthèse des protéoglycanes. Enfin, les monocytes, stimulés par le TNFalpha et diverses molécules des lymhocytes T tel que
RANK-ligand, se différencient en pré-ostéoclastes puis en ostéoclastes qui résorbent l'os sous chondral (figure 1).
La réaction inflammatoire synoviale libère les PAD monocytaires et des polynucléaires qui vont citrulliner diverses protéines
du tissu conjonctif (vimentine), du cartilage (collagène type II) et de protéines exsudées du plasma (fibrine). Dégradés par les
cellules présentatrices d'antigène, les épitopes citrullinés seront présentés aux lymphocytes Th synoviaux par les molécules
HLA de classe II portant l'épitope partagé (DRB1*04 et DRB1*01) déclenchant la production d'ACPA par les lymphocytes B.
Les complexes immuns formés vont ainsi entretenir la réaction inflammatoire synoviale.
DIAGNOSTIC
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Nous prendrons pour type de description la polyarthrite rhumatoïde chez la femme de 50 ans.
A. Début
Le début est progressif, insidieux : c'est la période des hésitations diagnostiques. Il est cependant très important de porter le
diagnostic dès cette période car le traitement précoce est seul à même de limiter les risques de détérioration articulaire
définitive (notion de "fenêtre d'opportunité" pour la meilleure efficacité des traitements de fond). C'est surtout la clinique et
la biologie qui permettent l'orientation, la radiologie étant souvent sans particularité à ce stade. L'Association des
Rhumatologues Américains a proposé en 1987 une série de critères pour la classification de la polyarthrite rhumatoïde
(tableau II). Ils sont souvent pris en défaut à cette période précoce de l'évolution.
Tableau II : Critères de l'American College of Rheumatology 1987 pour la classification de la polyarthrite rhumatoïde*
1. Raideur articulaire matinale : raideur matinale articulaire ou périarticulaire, durant au moins une heure avant
l'amélioration maximale.
2. Arthrite d'au moins 3 groupes articulaires : gonflement des tissus mous ou épanchement (et non pas saillie osseuse isolée)
d'au moins 3 groupes articulaires touchés simultanément, observés par un médecin. Les 14 groupes possibles sont, à droite
ou à gauche, les IPP (interphalangiennes proximales), les MCP (métacarpo-phalangiennes), les poignets, les coudes, les
genoux, les chevilles et les MTP (métatarso-phalangiennes).
3. Arthrite des articulati ons des mains : gonflement d'au moins un groupe articulaire (voir définition en 2) parmi poignets,
IPP ou MCP.
4. Arthrite symétrique : atteinte simultanée des mêmes groupes articulaires (voir définition en 2) des deux côtés du corps
(l'atteinte bilatérale des IPP, des MCP, ou des MTP est acceptable sans symétrie absolue).
5. Nodules rhumatoïdes : nodules sous-cutanés, sur les proéminences osseuses, les surfaces d'extension, ou dans les régions
para-articulaires, observés par un médecin
6. Facteur rhumatoïde sérique mise en évidence de quantités anormales de facteur rhumatoïde sérique par une méthode
dont les résultats sont positifs chez moins de 5 % des sujets témoins normaux.
7. Modifications radiologiques : modifications radiologiques typiques de polyarthrite rhumatoïde sur les radiographies de
face des mains et des poignets, avec obligatoirement des érosions ou une décalcification osseuse évidente localisée des
articulations atteintes ou de façon plus nette dans les régions adjacentes à ces articulations (des modifications d'allure
seulement arthrosique ne conviennent pas).
* Au moins 4 des 7 critères sont exigés
Les critères 1 à 4 doivent être présents depuis au moins 6 semaines
Plus récemment des critères ACR/EULAR ont été proposés pour la classification et le diagnostic de polyarthrite nécessitant un
traitement de fond par le méthotrexate, ce qui peut être assimilé aux polyarthrites rhumatoïdes. Ces critères s'appliquent
aux formes sans érosion osseuse aux radiographies (tableau III).
Tableau III : Nouveaux critères ACR/EULAR de la polyarthrite rhumatoïde (2010)
Score
Articulations atteintes
1 grosse articulation
0
2 à 10 grosses articulations (symétriques ou non)
1
1 à 3 petites articulations
2
4 à 10 petites articulations
3
>10 articulations (dont au moins une petite)
5
Autoanticorps (FR et ACPA)
FR- et ACPA0
FR+ et/ou ACPA+ à faible taux (1 à 3 x normale)
2
FR+ et/ou ACPA+ à taux élevé (>3 x normale)
3
Durée d’évolution des synovites
< 6 semaines
0
> 6 semaines
1
Marqueurs biologiques de l’inflammation (VS et CRP)
VS et CRP normales
0
VS et/ou CRP anormale
1
Score > 6 Polyarthrite rhumatoïde
1. Clinique
a. Signes articulaires aux mains
L'atteinte des mains inaugure les signes articulaires :
•
Douleur et enraidissement matinal des poignets et des doigts constituent les signes fonctionnels d'appel ;
•
Une tuméfaction (gonflement en fuseau des interphalangiennes) est notée dès l'inspection
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•
On note une douleur à la pression à la mobilisation des doigts qui est limitée.
Vont orienter vers une polyarthrite rhumatoïde débutante :
•
La topographie des arthrites : l'atteinte porte sur les poignets, les métacarpophalangiennes, et les
interphalangiennes proximales, surtout des IIème et IIIème doigts, respectant les interphalangiennes distales :
•
Les arthrites sont fixes, bilatérales et grossièrement symétriques ;
•
L'enraidissement douloureux est maximal le matin au réveil et cède après un temps variable de " dérouillage "
grossièrement proportionnel au degré de l'inflammation ; il s'accompagne parfois d'une ténosynovite des
extenseurs ou des fléchisseurs des doigts (gonflement des gaines tendineuses).
b. Autres atteintes articulaires
L'atteinte des mains et des poignets s'associe souvent à des arthrites des avant-pieds : métatarsophalangiennes surtout.
c. Examen général
•
L'état général est en règle conservé : tout au plus note-t-on une fébricule, un amaigrissement modéré, une asthénie
•
L'examen clinique est normal. Il existe parfois des adénopathies superficielles d'aspect inflammatoire
2. Radiographies
a. Technique
L'examen radiologique est toujours bilatéral et comparatif. Il comprend un cliché de face et parfois de profil selon l'article
intéressé.
b. Résultats
A ce stade, les radiographies ne montrent pas grand chose :
•
parfois on note une déminéralisation juxtaarticulaire " en bande " des métacarpophalangiennes
•
mais les interlignes articulaires sont respectés dans leur hauteur et leur forme.
La présence, à ce stade, de pincement de l'interligne ou d'érosions osseuses témoigne d'une forme particulièrement
agressive de polyarthrite rhumatoïde.
3. Echographie
Couplée au Doppler puissance, l’échographie articulaire est très performante pour confirmer l’existence des synovites et des
ténosynovites.
4. Biologie
a. Syndrome inflammatoire
Certains signes témoignent du caractère inflammatoire de l'atteinte articulaire :
•
la vitesse de sédimentation est augmentée
•
l'hémogramme est peu modifié : discrète anémie (11 à 12 g d'hémoglobine/dl), rarement hyperleucocytose ou
hyperplaquettose
•
présence de protéine C réactive
b. Facteurs rhumatoïdes
Les réactions de détection des facteurs rhumatoïdes (latex et Waaler-Rose) sont parfois négatives à ce stade (40 % des cas
environ des polyarthrites vues en service hospitalier), ce qui bien sûr n'élimine pas le diagnostic.
c. Anticorps antiprotéines citrullinées
Ces anticorps sont présents chez 90 % des polyarthrites avec facteurs rhumatoïdes et 15 % des polyarthrites sans facteurs
rhumatoïdes. On les détecte par ELISA à partir de peptides riches en citrulline (acide aminé résultant de la déimination de
l'arginine), les anti-CCP ou ACPA, plus rarement de protéines citrullinées (vimentine, fibrine).
En règle, en quelques mois, soit d'une seule tenue, soit par des poussées successives, l'évolution de la polyarthrite
rhumatoïde se fait vers une diffusion des arthrites.
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B. Stade de polyarthrite rhumatoïde évoluée
Le diagnostic est facile
1. Clinique
a. Les mains
Les signes articulaires prédominent encore aux mains :
•
les gonflements touchent poignets et doigts
•
ils sont toujours grossièrement symétriques
•
ils s'accompagnent d'un enraidissement douloureux maximal au réveil
•
les destructions articulaires et capsuloligamentaires aboutissent à des déformations caractéristiques :
De profil la main rhumatoïde prend un aspect en dos de chameau : gonflement dorsal du poignet et gonflement des
métacarpophalangiennes sont séparés par une dépression qu'accentue l'atrophie musculaire des interosseux
Les doigts sont déviés vers le bord cubital de la main, classique " coup de vent " initialement réductible (figure 2)
Les articulations interphalangiennes proximales, d'abord renflées en fuseau, s'enraidissent soit en flexion (aboutissant aux
doigts en boutonnière, pouce en " Z ") soit en extension (doigts en col de cygne)
La tête cubitale est parfois le siège d'une mobilité anormale, en touche de piano, et peut se luxer en arrière, venant menacer
les tendons extenseurs qui peuvent se rompre (figure 3).
Aux signes articulaires peuvent s'associer un amincissement de la peau, une atrophie des muscles et parfois un érythème
vermillon de la paume de la main
b. Autres atteintes articulaires
Pieds : les atteintes sont volontiers associées à celles de la main :
•
elles touchent les métatarsophalangiennes qui sont tuméfiées, douloureuses, limitées; les signes sont ici aussi
grossièrement symétriques ; des déformations vont s'installer par effondrement de l'arche plantaire antérieure et
subluxations métatarsophalangiennes (avant-pied rond, orteils rétractés en marteau ou en griffe, hallux valgus
aboutissant à un avant-pied triangulaire) ;
•
une atteinte médiotarsienne ou tibiotalienne est plus rare.
Grosses articulations des membres : elles ne sont pas épargnées. Leur atteinte garde souvent un caractère de
symétrie. Elle se traduit par un gonflement douloureux spontanément et à la mobilisation, aboutissant à une limitation de
l'amplitude articulaire. Ainsi sont habituellement touchés: les genoux, les coudes, les épaules. La hanche est rarement
atteinte. Les genoux sont volontiers le siège d'un épanchement comme l'atteste l'existence d'un choc rotulien. L'examen du
liquide synovial est utile au diagnostic. On palpe le creux poplité et le mollet à la recherche d'un kyste synovial dont la
rupture peut en imposer pour une phlébite. Il convient de faire un bilan précis des atteintes articulaires (amplitude chiffrée
des mouvements, rétractions, attitudes vicieuses, laxité)
Petites articulations : leur atteinte est beaucoup plus rare (temporomaxillaires surtout).
Rachis :
•
le rachis cervical est fréquemment le siège de douleurs inflammatoires; son atteinte peut aboutir à une luxation
atloïdoaxoïdienne, antéropostérieure longtemps asymptomatique, ou verticale risquant de comprimer le tronc
cérébral ou la moelle.
•
la polyarthrite rhumatoïde épargne le rachis dorsal et lombaire.
c. Examen général
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Il cherche :
•
un phénomène de Raynaud
•
surtout des nodules cutanés rhumatoïdes, de grande valeur diagnostique : fermes, indolores, mobiles, de taille
variable (quelques millimètres à plusieurs centimètres), recouverts d'une peau normale, ils siègent électivement
dans la région olécrânienne, les crêtes cubitales ou au voisinage des articulations atteintes.
2. Radiographie
a. Signes radiographiques
Ils associent:
•
un épaississement des parties molles
•
une déminéralisation des épiphyses
•
un pincement de l'interligne articulaire traduisant l'amincissement du cartilage ;
•
des érosions osseuses juxtacartilagineuses au voisinage des zones de réflexion synoviale ;
•
des géodes sous-chondrales
•
mais pas d'ostéophytes.
b. Topographie des lésions
•
Aux pieds, signalons la précocité des érosions de la tête du 5' métatarsien.
•
Aux mains, les interlignes carpiens se pincent précocement, des géodes apparaissent, aboutissant tardivement à une
véritable fusion des os du carpe ("carpite " rhumatoïde). S'y associe une atteinte des métacarpophalangiennes et,
plus tardivement, une atteinte des interphalangiennes distales.
•
•
A la hanche, le pincement global de l'interligne aboutit parfois à une protrusion acétabulaire.
En C1C2 une distance entre l'arc antérieur de l'Atlas et le bord antérieur de l'ondotoïde dépassant 5 mm (cliché de
profil en flexion active) traduit une luxation C1-C2.
3. Autres imageries
•
l'IRM est sans doute l'examen d'imagerie le plus sensible pour dépister les géodes et l'oedème inflammatoire
épiphysaire
•
l'échographie avec doppler puissance permet à moindre frais de détecter les synovites actives et les érosions
débutantes.
4. Biologie
a. Signes inflammatoires
Selon l'évolutivité de l'atteinte rhumatismale, les signes biologiques d'inflammation sont plus ou moins accentués: vitesse de
sédimentation,
hyperalpha-2-globulinémie,
hypergammaglobulinémie,
présence
de
protéine
C
réactive,
hypercomplémentémie.
b. Facteurs rhumatoïdes et anticorps anti-peptides citrullinés
Les recherches de facteurs rhumatoïdes par les réactions d'agglutination du latex ou d'hémagglutination de Waaler-Rose
sont habituellement positives (85 p. 100 des polyarthrites rhumatoïdes).Il faut exiger un taux de 1/64 pour le Waaler-Rose et
de 1/80 pour le latex. Ces réactions ne sont pas spécifiques de la maladie rhumatoïde et un résultat positif doit être
interprété en fonction du contexte clinique. Les anticorps anti-peptides citrullinés sont spécifiques de la polyarthrite
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rhumatoïde (98% de spécificité) et présents chez 85% des PR avérées. L'association des deux autoanticorps est quasipathognomonique de la PR.
c. Autres anticorps
D'autres anticorps sont plus rarement rencontrés: anticorps antinucléaires (25 p. 100 des polyarthrites rhumatoïdes) surtout,
en général à un taux faible posant parfois des problèmes de diagnostic différentiel.
5. Ponction articulaire
L'examen du liquide synovial apporte de précieux renseignements. La ponction sera faite avec des précautions d'asepsie
rigoureuse.
•
Le liquide est souvent de viscosité diminuée.
•
La cellularité est variable souvent entre 5 000 et 50 000 éléments à majorité de polynucléaires. Certains
polynucléaires contiennent des inclusions cytoplasmiques arrondies et prennent un aspect en grains de raisins
(ragocytes). Un tel aspect n'est pas spécifique de la polyarthrite rhumatoïde.
•
Le liquide est riche en albumine et en immunoglobulines.
•
Il existe fréquemment des facteurs rhumatoïdes et des anticorps anti-peptides citrullinés (mais pas plus
fréquemment que dans le sérum).
•
Le taux de complément synovial est habituellement effondré, témoin de la consommation intra articulaire des
facteurs du complément par les complexes immuns.
6. Biopsie de synoviale
La biopsie synoviale n'est nullement nécessaire au diagnostic mais peut rendre parfois service dans les formes
oligoarticulaires.
Lorsqu'elle est pratiquée, elle peut montrer plusieurs modifications dont le groupement permet seulement d'évoquer le
diagnostic car aucun n'est spécifique de l'inflammation rhumatoïde :
•
multiplication des synoviocytes de surface qui s'agencent en 3 à 5 assises cellulaires ; hypertrophie des villosités
synoviales ;
•
infiltrats cellulaires lymphoplasmocytaires périvasculaires, soit en nappes, soit groupés en nodules lymphoïdes. Il
s'agit majoritairement de lymphocytes TCD4+ de type Th1 et Th17 mais aussi de lymphocytes B CD19+ et de
quelques plasmocytes CD128+ ;
•
dépôts fibrineux à la surface ou à l'intérieur des franges synoviales
•
foyers de nécrose.
C. Formes cliniques
1. Formes de début
a. Symptomatiques
Topographiques : citons les formes de début suivantes:
•
début asymétrique monomélique
•
début ténosynovial ou bursal: surtout aux mains
•
début monoarticulaire (5 p. 100 des cas) touchant surtout le poignet, plus rarement le genou, exceptionnellement la
hanche (posant le problème parfois difficile avec une tuberculose: intérêt de la biopsie synoviale)
•
début par les grosses articulations des membres (15 p. 100 des cas): genoux, épaules, chevilles, rarement coudes ou
hanches;
•
début par atteinte isolée des avant-pieds (15 p. 100 des cas), métatarsalgies avec raideur matinale.
Selon l'intensité :
•
début aigu (5 à 15 p. 100 des cas) du fait de la brusquerie des signes et l'intensité des phénomènes inflammatoires
pouvant simuler un rhumatisme articulaire aigu
•
début arthralgique simple, sans gonflement ni enraidissement
•
début à type de rhumatisme palindromique
•
début extraarticulaire.
b. Après un facteur déclenchant
•
Polyarthrites post-virales : des PR avec FR et ACPA ont été décrites après une infection à PVB19 mais aussi après
infection à flavivirus (Chikungunia)
•
Polyarthrites post-angineuses posant un problème diagnostique avec le RAA
•
Polyarthrites débutant sur une articulation traumatisée posant un problème médicolégal
•
Polyarthrites débutantes après une prise médicamenteuse (IFN alpha, anti-aromatases).
2. Formes anatomiques
a. Destructrices
•
Articulaires, aboutissant parfois dans des formes "historiques" à la main à l'aspect classique de doigts en lorgnette.
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•
Tendineuses, conséquence d'une ténosynovite négligée ou d'une luxation de la tête cubitale. Un traitement
préventif doit permettre d'éviter cette complication.
b. Non destructrices
Après plusieurs années d'évolution.
3. Formes selon le terrain
a. Polyarthrite de l'homme adulte
Elle est rare (20 p. 100 des cas). Souvent atypique dans son début (monoarticulaire). L'atteinte de la hanche y serait plus
fréquente.
b. Femme enceinte
Au cours de la grossesse, la polyarthrite entre en rémission spontanée une fois sur deux. La rechute survient après
l'accouchement.
c. Ictère
Infectieux ou rétentionnel, il est également l'occasion d'une rémission spontanée.
d. En cas d'hémiplégie
Les signes articulaires du côté paralysé vont habituellement régresser.
e. Polyarthrites infantiles et juvéniles
•
La polyarthrite rhumatoïde avec facteurs rhumatoïdes IgM peut survenir chez l'enfant de moins de 15 ans, souvent
aux alentours de la puberté, et volontiers chez la fille.
•
Mais l'enfant fait habituellement une maladie différente de celle de l'adulte parce que séronégative.
•
Cette entité est à séparer des autres rhumatismes inflammatoires de l'enfant :
•
forme systémique ou maladie de Still
•
forme oligoarticulaire avec anticorps antinucléaires, extensive ou non, et risque d'uvéite torpide à rechercher
systématiquement par un examen bisannuel ;
•
forme oligoarticulaire avec enthésopathies HLA B27 positive qui se complique volontiers d'une spondylarthrite
ankylosante
•
forme associée à un psoriasis cutané.
4. Formes viscérales
a. Manifestations hématologiques
Certaines sont fréquentes :
•
adénopathies (30 p. l00) dans le territoire des articulations enflammées
•
splénomégalie (5 à l0 p. l00), habituellement modérée ;
•
anémie normochrome normocytaire, parfois hypochrome, peu régénérative avec fer sérique abaissé et coefficient
de saturation de la sidérophylline peu diminué
•
hyperleucocytose et hyperplaquettose inconstantes témoignant du syndrome inflammatoire.
D'autres sont plus rares :
•
éosinophilie : elle doit faire rechercher une intolérance médicamenteuse ; ailleurs elle témoigne d'une forte
évolutivité ;
•
leuconeutropénie: exceptionnelle, elle constitue avec la splénomégalie et la polyarthrite un des trois éléments du
syndrome de Felty. La polyarthrite évolue souvent depuis plus de dix ans lorsque la neutropénie est découverte; elle
est souvent éteinte, laissant des séquelles mécaniques variables. Les manifestations viscérales et cutanées sont
fréquentes. La biologie permet de noter une forte séropositivité, la présence presque constante d'anticorps
antinucléaires. L'évolution est variable, dominée par le risque infectieux souvent mortel.
•
Pseudo-syndrome de Felty consécutif à une lymphoprolifération à grands lymphocytes granuleux (LGL) parfois
réversible.
b. Syndrome sec
•
Il associe xérostomie (sécheresse buccale), xérophtalmie (sécheresse des yeux) et polyarthrite.
•
Sa fréquence au cours de la polyarthrite rhumatoïde varie selon les tests utilisés pour le mettre en évidence: le test
de Shirmer et l'épreuve au rose bengale suffisent en pratique pour le dépister (mais la biopsie des glandes salivaires
accessoires, voire la scintigraphie salivaire dynamique permettent d'aboutir à une fréquence du syndrome sec
voisine de 50 p. l00 chez les PR). Contraitement au syndrome de Sjögren primitif, les anticorps anti-SSA (Ro) sont
rares (5%) et les anti-SSB (La) exceptionnels.
c. Manifestations nerveuses
Elles sont de plusieurs types.
•
Centrales : compression médullaire par dislocation atloïdoaxoïdienne, exceptionnelle alors que le diastasis Cl-C2 est
très fréquent sur le cliché de profil en flexion. La luxation verticale C0C1C2 est plus souvent à l'origine de
complications médullaires graves. Il en est de même des rares dislocations cervicales plus bas situées (C3 à C7).
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Cours DCEM3 – Polyarthrite rhumatoïde – Mise à jour du 20/03/2011
•
Périphériques :
compression tronculaire dans un défilé: médian au canal carpien, tibial postérieur dans la gouttière
rétromalléolaire interne
•
multinévrites sensitivomotrices: le tableau est celui de mononévrites multiples, asymétriques, survenant au
cours de polyarthrites rhumatoïdes sévères avec nodosités sous-cutanées, taux élevés de facteurs rhumatoïdes
et de complexes immuns solubles, parfois cryoglobulinémie et hypocomplémentémie de consommation;
certaines formes se rapprochent anatomiquement de la périartérite noueuse;
•
polynévrites sensitives pures se traduisant par des paresthésies et une hypoesthésie symétrique en gants et en
chaussettes, avec abolition des réflexes ostéotendineux mais sans déficit moteur; il s'agit inconstamment de
polyarthrites sévères et l'évolution régressive est possible en quelques semaines ou mois. D'autres formes
évoluent comme une multinévrite d'angéite nécrosante.
d. Manifestations cutanées
•
Nodules rhumatoïdes : 10% des PR hospitalisées (donc plus sévères)
•
•
Lésions de vascularite (purpura nécrotique, micro-infarctus digitaux des doigts et des orteils, pulpes et sertissures
des ongles): elles peuvent s'observer au cours de polyarthrites sévères, parfois accompagnant d'autres
manifestations viscérales (PR maligne).
•
Signalons la fréquence des ulcères de jambe.
e. Manifestations oculaires
•
Elles sont dominées par le syndrome de Gougerot-Sjögren secondaire : il se traduit par une xérophtalmie à l'origine
d'une kératoconjonctivite fréquente (30 à 40%). Biologiquement il existe souvent des AAN (30%) rarement des antiSSA (5%). Il est possible d'observer plus rarement des lésions de sclérite rhumatoïde: épisclérite le plus souvent,
sclérite dans le cadre d’une vascularite associée, pouvant se compliquer de scléromalacie perforante
(exceptionnelle).
•
Les autres manifestations oculaires sont le fait de complications des anti-paludéens de synthèse : dépôts cornéens
sans gravité, rétinite pigmentaire irréversible exceptionnelle si on respecte la limite de 6 mg/kg/j
d'hydroxychloroquine et que le sujet se plie à une surveillance ophtalmologique annuelle.
f. Manifestations pleuropulmonaires
•
Les pleurésies rhumatoïdes sont rares. Elles peuvent survenir en l'absence de poussée articulaire. Le liquide pleural
est caractérisé par une formule d'exsudat, avec hypoglycopleurie et chute du complément total.
•
Les nodules pulmonaires sont exceptionnels (0,4 p. 100), plus fréquents chez l'homme ; ils surviennent dans les
polyarthrites sévères après plusieurs années d'évolution. Il s'agit de nodules arrondis ou ovalaires, de siège souspleural, de taille variable (0,5 à 3 cm de diamètre), souvent de simple découverte radiographique. Ils sont stables
durant de longues années, pouvant disparaître ou confluer, voire s'excaver, posant le problème d'une surinfection.
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Ils peuvent se rompre dans la plèvre et créer un pneumothorax. Leur fréquence était toute particulière chez les
mineurs atteints de silicose et de polyarthrite rhumatoïde (syndrome de Caplan-Colinet).Avec la fermeture des
mines, cette entité est devenue exceptionnelle.
•
Les alvéolites interstitielles sont plus fréquentes et peuvent se compliquer de fibrose au pronostic sévère quel que
soit son type hystologique. TDM et EFR avec DLCO sont utiles au dépistage.
•
Une bronchiolite oblitérante est parfois constatée aux épreuves fonctionnelles respiratoires en dehors de toute
toxicité médicamenteuse.
g. Manifestations cardiovasculaires
•
La péricardite serait fréquente (40%), sans traduction clinique, son dépistage est aidé par l'échocardiographie. Le
liquide, rarement étudié, a les mêmes caractéristiques que le liquide de pleurésie. La péricardite clinique est rare
(<5%) touchant plus souvent l'homme que la femme. L'évolution vers la constriction a été décrite.
•
Le myocarde est en général respecté, parfois à l'origine d'un trouble de la conduction.
•
L'endocarde est le siège d'épaississements valvulaires mitroaortiques dépistés par l'échographie car le plus souvent
muets cliniquement.
h. Amylose
•
C'est une complication non exceptionnelle de la polyarthrite rhumatoïde. Sa fréquence anatomique (15 p. 100)
dépasse la fréquence de son expression clinique. (1 %)
•
C'est une amylose hépato-spléno-rénale de type AA
•
Elle se révèle habituellement par une protéinurie, voire un syndrome néphrotique qu'il faut savoir différencier d'une
complication iatrogène devenue exceptionnelle avec l'abandon des sels d'or et de la D-Pénicillamine..
•
La biopsie rénale, rectale, gingivale, ou de glande salivaire accessoire, avec les colorations spécifiques (thioflavine,
rouge Congo) permet son diagnostic.
D. Diagnostic différentiel
Le diagnostic de la polyarthrite rhumatoïde se pose différemment selon le tableau clinique réalisé.
1. Devant un début aigu polyarticulaire
Il faut discuter les affections suivantes.
a. Rhumatisme articulaire aigu
Le problème se pose rarement en pratique chez l'adulte jeune; on recherche une infection streptococcique récente, une
atteinte cardiaque associée, et on s'aide, non pas d'un prélèvement de gorge, négatif à ce stade, mais du dosage des
antistreptolysines ou des antistreptodornases.
b. Polyarthrite inaugurale d'hépatite virale
Intérêt du dosage des transaminases, de l'antigène HBs et des IgM anti-HBc; la polyarthrite guérit avec l'apparition de l'ictère.
c. Autre polyarthrite virale
Rubéole et Parvovirus B19 surtout, Chikungunia à la Réunion, Océan Indien et Pacifique.
d. Manifestations articulaires de l 'endocardite d'Osler
Intérêt des hémocultures, de l'échocardiographie à la recherche de végétations valvulaires; ce diagnostic est d'autant plus
important que les facteurs rhumatoïdes sont fréquents (50 p. l00) au cours des endocardites subaiguës.
2. Devant un début monoarticulaire
Il faut discuter les affections suivantes.
a. Tuberculose
Intérêt de la biopsie synoviale.
b. Crise de goutte ou plus souvent de chondrocalcinose articulaire
C'est dire l'intérêt de la recherche des microcristaux dans le liquide synovial.
c. Arthrite infectieuse d'expression abâtardie par un traitement antibiotique
Beaucoup plus souvent discutée.
3. Devant une polyarthrite non destructrice
On élimine les affections suivantes.
a. Connectivite
Non pas tant une sclérodermie ou une dermatopolymyosite qu'une maladie lupique au cours de laquelle peut survenir une
polyarthrite.
En effet, on sait la fréquence des anticorps antinucléaires au cours de la polyarthrite rhumatoïde (25 p. 100). Par ailleurs les
facteurs rhumatoïdes se rencontrent dans 20 p. 100 des LED. Pourront être utiles au diagnostic de LED : l'absence d'anticorps
anti-peptides citrullinées, une hypocomplémentémie. PR et lupus sont parfois exceptionnellement associés ("rhupus").
b. Syndrome de Sjögren primitif
Il peut se révéler par des manifestations extra-glandulaires systémiques et notamment une polyarthrite bilatérale et
symétrique.
4. Devant une polyarthrite destructrice
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On élimine les affections suivantes.
a. Rhumatisme psoriasique
Il peut simuler en tous points une polyarthrite rhumatoïde; on y pensera devant :
•
le caractère moins symétrique de l'atteinte articulaire;
•
l'atteinte, sinon exclusive, du moins précoce, des articulations interphalangiennes distales
•
surtout la découverte de signes cutanés de psoriasis, parfois oubliés car anciens ou cantonnés aux sièges d'élection
(cuir chevelu, coudes, genoux, ombilic, sillon interfessier ou rétroauriculaire, ongles) ; I'atteinte articulaire peut
précéder les signes cutanés.
b. Manifestations périphériques d'une spondylarthrite ankylosante (SPA)
•
Il s'agit habituellement d'un homme jeune. L'interrogatoire retrouve les douleurs rachidiennes et sacro-iliaques,
l'existence possible d'une iritis. La prédominance des manifestations périphériques doit faire chercher une étiologie:
syndrome de Fiessinger-Leroy-Reiter, psoriasis, entérocolopathie (Crohn et rectocolite hémorragique).
•
Tous ces rhumatismes inflammatoires avec atteinte axiale surviennent sur un terrain génétique particulier : 85 % des
malades ayant une SPA sont porteurs de l'antigène d'histocompatibilité HLA-B27. Les fréquences sont moins élevées
dans les autres spondylarthropathies.
5. Autres diagnostics différentiels
Deux diagnostics ne doivent pas être oubliés :
•
la pseudopolyarthrite rhizomélique devant une polyarthrite débutant aux ceintures chez un sujet âgé: I'association à
une maladie de Horton fait courir un risque oculaire qui nécessite un traitement urgent
•
l'ostéoarthropathie hypertrophiante pneumique de Pierre Marie devant une " polyarthrite " acromélique :
l'hippocratisme digital doit orienter et mener à la radiographie pulmonaire qui révèle habituellement un cancer
pulmonaire.
Un diagnostic est exceptionnel: le rhumatisme de l'hypogammaglobulinémie de type variable à révélation tardive de l'adulte.
Doivent y faire penser les antécédents d'épisodes infectieux à répétition. Ces sujets n'ont pas de facteurs rhumatoïdes.
ÉVOLUTION ET PRONOSTIC
A. Évolution générale
•
La maladie rhumatoïde est une affection chronique dont la progression sans traitement est le plus souvent régulière,
sans rémission: l'inflammation gagne toutes les jointures, aboutissant à une impotence douloureuse plus ou moins
importante.
•
Parfois l'évolution se fait par poussées successives, sans facteur déclenchant, laissant des séquelles fonctionnelles
croissantes.
•
Rarement la polyarthrite s'éteint totalement.
•
Les causes de rémission spontanée sont la grossesse, l'ictère, l'hémiplégie.
•
Les traitements actuels, en particulier l'usage précoce des biothérapies, permettent d'espérer obtenir la rémission
chez 30% des PR débutantes avant le stade des destructions articulaires.
B. Pronostic
•
Les formes à début aigu seraient de meilleur pronostic.
•
Il en serait peut-être de même pour les formes à début tardif.
•
La précocité des érosions osseuses au contraire laisse présager une évolution fonctionnelle défavorable. Après 10
ans d'évolution 60 % des patients doivent cesser leur travail.
•
L'atteinte de la hanche est fonctionnellement grave chez les sujets jeunes.
•
La présence de facteurs rhumatoïdes, et surtout d'anticorps anti-peptides citrullinés (ACPA) est prédictif d'une
évolution destructrice plus sévère.
•
La présence d'anticorps antinucléaires accompagne les formes avec manifestations extraarticulaires.
•
Le décès est le fait des complications iatrogènes (infections, perforation d'ulcère, accident cardiovasculaire). Les
polyarthrites rhumatoïdes ont une espérance de vie réduite de 10 ans par rapport la population générale. Les
maladies cardiovasculaires athéromateuses, favorisées par l'inflammation chronique, sont à l'origine d'une
surmortalité par rapport à la population générale. Les facteurs de risque devront faire l'objet d'un dépistage régulier
et de mesures thérapeutiques visant à les corriger.
PRINCIPES DU TRAITEMENT
La prise en charge d'une polyarthrite rhumatoïde repose sur deux types de traitements généraux habituellement utilisés en
association :
•
les anti-inflammatoires, qui visent à maîtriser les phénomènes inflammatoires articulaires; leur action est purement
suspensive ; la récidive survient dès l'arrêt du traitement ;
•
les traitements dits de fond (DMARDs), qui tentent d'agir sur le génie évolutif de la maladie rhumatoïde.
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L'étiologie de l'affection étant toujours inconnue, ces traitements restent imparfaits.
On insiste actuellement sur l'impérieuse nécessité de mettre en route un traitement de fond dès les premiers mois
d'évolution d'une polyarthrite possiblement rhumatoïde, seul à même de limiter les destructions ostéoarticulaires (plus
rapides au début de l'affection) et améliorer la fonction. Le choix du traitement de fond dépendra de la gravité de la
polyarthrite, de l'existence de manifestations extraarticulaires associées sévères, des contre-indications liées au malade et à
ses antécédents, des préférences des patients et des habitudes du médecin. Des recommandations ont été publiées par la
Haute Autorité de Santé (HAS) et par les sociétés savantes nationales (SFR) et internationales, notamment européennes
(EULAR) pour la prise en charge de la PR.
A. Traitements généraux
En période évolutive le repos physique et moral est indispensable.
1. Anti inflammatoires
a. Non stéroidiens (AINS)
•
On utilise peu l'acide acétylsalicylique à la dose maximale tolérée: entre 3 et 4 g/24 h répartis dans la journée.
•
En cas d'intolérance digestive ou autre, les anti-inflammatoires non stéroidiens ayant une activité anti-Cox1 peuvent
prendre le relais des dérivés salicylés : dérivés indoliques (indométacine) et propioniques (kétoprofène, ibuprofène,
naproxene, flurbiprofène), diclofénac, etc ..
•
L'association aux salicylés est déconseillée
•
Les effets secondaires sont surtout digestifs et l'ulcère gastroduodénal en poussée reste une contre-indication à
respecter
•
Les AINS anti-Cox2 exclusifs sont à l'origine d'une surmortalité cardiovasculaire bien qu'ils restent d'un apport utile
chez les malades grastro-intolérants aux anti-Cox1. Leur utilisation au long cours doit se faire à la dose minimale
efficace. Les antiagrégants plaquettaires peuvent être associés si indiqués.
b. Stéroidiens
Les corticostéroïdes sont très efficaces sur les manifestations inflammatoires générales et articulaires mais exposent à long
terme à des effets secondaires graves :
•
diabète
•
HTA
•
ostéoporose, myopathie
•
infection, tuberculose
•
troubles psychiques
•
ulcère digestif (pour certains).
C'est dire les précautions d'emploi qu'il faut prendre :
•
ne pas les utiliser de première intention chez les sujets jeunes, préférer d'abord les anti-inflammatoires non
stéroïdiens;
•
ne pas dépasser la dose de 0,15 mg/kg/24 h de prednisone (sauf complication viscérale grave: certains préconisent
les assauts cortisoniques de 100 mg à 1 g de Solumédrol® IV sur 3 h, 1 à 3 jours de suite) pour aider à "passer un
cap" ; en effet ce traitement une fois débuté est habituellement définitif, le sevrage ne pouvant se faire que très
progressivement devant une polyarthrite bien contrôlée par le traitement de fond ;
•
une surveillance régulière est indispensable (TA, glycémie, radio des poumons)
•
une prévention systématique de l'ostéoporose cortisonique.
Ils s'associent sans inconvénient aux anti-inflammatoires non stéroïdiens.
Les corticoïdes, utilisés tôt, auraient des propriétés freinatrices des destructions ostéoarticulaires au même titre que les
autres traitements dits "de fond" avec lesquels ils sont souvent co-prescrits.
2. Traitements de fond
Ils sont associés aux traitements anti-inflammatoires.
a. Methotrexate (Novatrex®) (c'est le traitement de référence)
S'utilise per os à la posologie maximale de 0,3 mg/kg/semaine. Cette posologie sera à atteindre en trois mois en débutant à
15 mg/semaine, mensuellement augmentée, jusqu'à 25 mg en cas d'effet incomplet, voire utilisée par voie IM ou souscutanée (Metoject®) avant d'en abandonner l'usage. En effet, c'est aujourd'hui le produit qui a le meilleur taux de
maintenance. Ce taux traduit à la fois l'efficacité et la tolérance. Les intolérances sont avant tout hépatiques (hépatite
cytolytique) et hématologiques. Avant traitement, on demandera des transaminases, une sérologie d'hépatite B et C et une
radiographie pulmonaire. On surveillera les transaminases 2 fois par mois au début, puis mensuellement ainsi que la
numération formule sanguine. Une adjonction d'acide folique (10 mg par semaine) diminuerait la toxicité. Une contraception
efficace est indispensable (risque tératogène).
b. Leflunomide (Arava®) s'utilise par voie orale, à la dose initiale de 20 mg/jour tous les jours. Son efficacité est comparable à
celle du méthotrexate. Les effets secondaires principaux sont la cytolyse hépatique (précoce), l'HTA, parfois une alopécie et
un amaigrissement important. La surveillance impose de doser ASAT et ALAT tous les 15 jours. Une contraception efficace est
indispensable.
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c. La Salazopyrine®
Elle s'utilise per os à la dose de 2 à 3 g/jour (4 à 6 cp). Elle expose à des intolérances digestives (nausées), hépatiques
(hépatite cytolytique), hématologique (agranulocytose, thrombopénie) à dépister par une surveillance mensuelle. Son emploi
sera précédé d'une recherche d'un déficit en G6PD qui la contrindiquerait.
d. Antimalariques
A la dose de 400 mg/24 h, l'hydroxychloroquine (Plaquenil®) (2 cp/j) est un traitement de fond efficace dans les polyarthrites
bénignes. Les antimalariques exposent à des accidents d'intolérance digestive, mais surtout oculaire (rétinite) qui imposent
une surveillance ophtalmologique annuelle (FO, champ visuel central, vision des couleurs) et un électrorétinogramme tous
les deux ans.
e. Les autres traitements de fond d'origine chimique (petites molécules) ne sont plus guère utilisés qu'en cas d'impasse
thérapeutique car leur rapport bénéfice / risque est devenu défavorable (peu ou pas d'activité stabilisatrice des
détériorations radiographiques et/ou toxicité parfois sévère).
Sels d'Or
Le seul dérivé disponible par voie parentérale en France est l'aurothiomalate (Allochrysine®). Il s'utilise par voie IM :
•
à la dose de 0,05 à 0,10 g par injection une fois par semaine jusqu'à une dose totale de 1,20 g
•
puis :
•
soit en traitement d'entretien à la même dose, mais une fois par mois ou toutes les trois semaines
•
soit, après un repos de quelques mois, en nouvelle cure hebdomadaire.
Une surveillance attentive est indispensable car les sels d'or exposent à des accidents cutanés (valeur prédictive d'un prurit),
rénaux : glomérulonéphrite extra-membraneuse (GEM) (recherche de protéinurie avant chaque injection) et hématologiques
(numération formule sanguine mensuelle avec numération plaquettaire), risque de thrombopénie, voire de pancytopénie..
Dérivés thiolés (Trolovol® et Acadione®) : Ils s'utilisent par voie orale mais actuellement très rarement prescrits.
•
A la dose progressivement croissante de 300 mg puis 600 mg/24 h, la D-pénicillamine, ou Trolovol®, constituait un
traitement de fond alternatif aux sels d'or.
•
Comme ces derniers, elle expose à des accidents multiples, d'où une surveillance régulière : rénale (GEM, d'où
protéinurie tous les mois), sanguine (NFS mensuelle avec numération plaquettaire - risque de thrombopénie),
cutanée, musculaire (risque de myosite)
•
La Thiopronine ou Acadione® s'utilise per os à la dose de 4 ou 6 cp/j. Elle comporte les mêmes effets secondaires,
donc la même surveillance
La ciclosporine A (Neoral®) (peu utilisée en France) se prescrit à la posologie initiale de 2,5 mg/kg/j avec augmentation
mensuelle par paliers de 0,5 mg/kg/j sans dépasser 4 mg/kg/j. Une surveillance de la TA (risque d'HTA) et de la créatininémie
toutes les deux semaines au début est nécessaire pour adapter (diminution de 25 %) la posologie à la tolérance
f. Parmi les immunosuppresseurs, le cyclophosphamide oral expose à des effets secondaires immédiats d'hypoplasie, de
cystite rhumatologique, et tardifs oncogènes (leucémies et cancer de vessie) et de ménopause prématurée. Son emploi est à
réserver aux PR compliquées d'amylose et aux vascularites nécrosantes mettant en jeu le pronostic vital. La voie orale est
remplacée par les bolus mensuels ou bimensuels. On lui préfère actuellement l'azathioprine (3 mg/kg/j).
g. Drogues ciblées : elles ont bouleversé la prise en charge thérapeutique de la PR débutante ou avérée. Elles résultent des
connaissances sur la physiopathologie de la synovite rhumatoïde. On utilise les anti-TNFalpha et les anti-cytokines (IL1, mais
surtout IL6), les anti-lymphocytes B CD20+ et le CTLA4-Ig (Orencia®). Elles bloquent (ou freinent) très significativement les
détériorations structurales radiographiques articulaires. Elles sont capables d'induire une vraie rémission prolongée dans
30% des cas.
•
Anti-TNFalpha : on dispose du récepteur soluble du TNFalpha (Enbrel®) qui s'utilise sous-cutané à la dose de
50 mg par semaine, des anticorps monoclonaux anti-TNFalpha (Remicade® ou Infliximab en perfusion IV toutes les 8
semaines à 3 mg/kg/perfusion après une période d'attaque de 3 perfusions à S0, S2 et S6, de l'adalimumab à 400 mg
sous cutané tous les 14 jours (Humira®) et du certolizumab pegylé (Cimzia® à 400 mg à J0, J15, J30 puis 200 mg tous
les 14 jours).
•
Anti-IL1 : on dispose de l'inhibiteur naturel ou IL1-Ra (Anakinra Kineret®) 100 mg sous cutané tous les jours.
•
L'anti-CD20 (Rituximab ou Mabthera®) s'utilise IV 1000 mg deux fois à 14 jours d'intervalle avec réinduction tous les
6 à 9 mois.
•
L'abatacept (Orencia ®) (ou CTLA4 Ig) est une molécule de fusion qui s'oppose au signal d'activation TB CD28 - B71/B7-2. Il s'utilise en perfusion IV à la posologie de 10 mg/kg une fois par mois.
•
Le toxcilizumab (Roactemra (®) est un anticorps monoclonal anti-récepteur de l'IL6 qui bloque l'activité de l'IL6. Il
s'utilise à la posologie de 8 mg/kg IV une fois par mois.
Ces drogues ciblées s'utilisent toutes de préférence en association avec le méthotrexate. En première biothérapie on peut
utiliser un anti-TNFalpha ou l'abatacept. Elles ont un effet suspensif et prédisposent aux infections notamment tuberculeuse
pour les anticorps monoclonaux anti-TNFalpha.
Mises à part les drogues ciblées (anti-TNFalpha) qui agissent souvent dès les premières semaines, tous ces traitements de
fond n'agissent qu'après un mois et demi à trois mois. Leur effet se dissipe dans les 6 à 10 mois qui suivent la cessation de
leur utilisation. Le méthotrexate et les drogues ciblées actuelles ont un effet souvent purement suspensif, mais ils
permettent d'obtenir des états de rémission stable chez 30% des malades traités. Dans certains cas la cessation de la
biothérapie après 12 mois de rémission stable et la continuation du méthotrexate permet de conserver l'état de rémission.
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B. Traitement locaux
Les traitements locaux sont un complément indispensable aux mesures générales.
1. Synoviorthèses
a. Cortisoniques
Grâce aux dérivés d'action prolongée (hexacetonide de triamcinolone), ils permettent souvent de réduire une inflammation
localisée résistant aux traitements généraux
b. Isotopiques
Chez les sujets plus âgés et/ou pour les petites articulations
2. Physiothérapie
a. Attelles
Elles peuvent limiter les déformations
b. Autorééducation
Elle sera entreprise en dehors des périodes inflammatoires
c. Ergothérapie
Elle permet d'entretenir une certaine agilité manuelle.
3. Mesures orthopédiques
a. Synovectomies (parfois sous arthroscopie)
Elles sont source d'enraidissement. Elles ont été en partie supplantées par les synoviorthèses. Les indications se limitent au
poignet et parfois aux métacarpophalangiennes.
b. Ténosynovectomies
Elles voient au contraire leurs indications se confirmer pour éviter les accidents de rupture tendineuse
c. Chirurgie de la main et de l'avant-pied
Elle fait appel aux interventions de réalignement avec un bon effet fonctionnel et antalgique. La résection de la tête cubitale
permet d'éviter les ruptures tendineuses. Elle est actuellement supplantée par les interventions de réaxation stabilisation du
poignet.
d. Arthroplasties de hanche, voire de genou
Elles permettent de rendre leur autonomie à des malades parvenus à un stade d'invalidité majeure
e. Chirurgie du rachis cervical (C1 C2)
S'adresse aux luxations occipito-cervicales, verticales ou antéropostérieures, compliquées de signes neurologiques. Il s'agit
d'arthrodèse.
SURVEILLANCE D'UNE POLYARTHRITE RHMATOIDE ET STRATEGIE THERAPEUTIQUE
•
•
•
•
•
Elle a pour but d'évaluer périodiquement l'activité de la polyarthrite sous traitement, d'adapter rapidement les
traitements de fond en cas d'activité persistante et/ou détérioration structurale radiographique. Parallèlement on
dépistera les éventuelles complications favorisées par les thérapeutiques.
L'activité de la PR est évaluée sur des mesures objectives tel le score DAS28 dont les critères sont : le nombre
d'articulations douloureuses (sur 28), le nombre d'articulations gonflées, l'état général évalué par l'opinion du
patient sur une échelle (EVA) de 0 à 10, le chiffre de la VS à la première heure (ou de la CRP). On peut y associer des
paramètres tels que la durée de la raideur matinale, le nombre de réveils nocturnes imputables à la PR. D'autres
index composites peuvent être utilisés (tableau).
Seuils d’activité de la PR en fonction des différents scores composites
DAS
DAS28
SDAI
CDAI
Activité importante
>3,7
>5,1
>26
Activité modérée
>2,4
>3,2
>11
>10
Faible activité
<2,4
<3,2
<11
<10
Rémission
<1,6
<2,6
<3,3
<2,8
La fonction peut être évaluée par le score de qualité de vie HAQ qui comporte des questions standardisées sur des
gestes de la vie courante
La fatigue sera quantifiée sur une EVA de 0 à 10
L’état structural articulaire sera apprécié au minimum par des radiographies annuelles des mains et des avant-pieds.
Les autres examens d’imagerie sont l’échographie qui autorise un diagnostic structural, mais également apprécie les
synovites et ténosynovites plus sûrement que l’examen clinique. L’IRM est encore d’accès limité, mais les images
d’œdème épiphysaire seraient prédictives d’érosions ultérieures.
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•
•
•
Toute biothérapie fera l’objet d’un bilan préalable à la recherche d’un foyer infectieux, d’une tuberculose latente
nécessitant un traitement préalable pour éviter une flambée infectieuse (tableau). Les vaccinations par vaccins
inactivés (non vivants) seront mises à jour (grippe, Pneumocoque)
L’objectif thérapeutique est la rémission (tableau des critères de rémission) pour les PR débutantes et l’état de
faible activité (DAS28 < 3,1) dans les PR plus anciennes. Pour remplir cet objectif, diverses stratégies thérapeutiques
ont été proposées qui toutes font appel aux méthotrexate en première intention, souvent associé aux corticoïdes, et
en cas d’efficacité insuffisante à la dose maximale de 25 mg/semaine d’y associer soit d’autres petites molécules
(salazopyrine + hydroxychloroquine) soit une biothérapie (anti-TNFα).
Le dépistage des complications iatrogènes et liées à la PR et à l’inflammation chronique sera périodique et
systématique.
o par l’interrogatoire et l’examen clinique complet
o une radiographie pulmonaire annuelle, soins dentaires réguliers
o biologie adaptée aux particularités de chaque traitement de fond
o la normalisation des facteurs de risque cardiovasculaire (poids, BMI, TA, glycémie, bilan lipidique complet,
arrêt du tabac...) en adaptant les mesures thérapeutiques
o prévention de l’ostéoporose cortisonique
o correction d’un déficit en vitamine D dont on connaît par ailleurs les propriétés immunomodulatrices
correctrices de l’autoimmunité.
o Recherche d’un cancer débutant favorisé/révélé à l’occasion d’une biothérapie (basocellulaire et mélanome,
col utérin...)
o Vérification de l’observance d’une contraception et information sur les délais à respecter après l’arrêt d’un
traitement de fond pour autoriser une grossesse (en général 5 demi-vies) (tableau)
Durée d’arrêt des biothérapies avant conception
INFLIXIMAB
6 mois
ADALIMUMAB
5 mois
ETANERCEPT
Pas de recommandation
CERTOLIZUMAB PEGOL
5 mois
ABATACEPT
4 mois
RITUXIMAB
6 mois
TOCILIZUMAB
3 mois
Le délai est de 3 mois après l’arrêt pour le METHOTREXATE
Tableau : Critères de rémission de la PR fondés sur les index composites
Critères
Formule pour calculer les scores
DAS44
DAS28
SDAI
CDAI
FDA
Limite de
score pour
la rémission
< 1,6
< 2,6
< 3,3
< 2,8
DAS44 = 0,56 x sqrt(IR) + 0,065 x (AG /44) + 0,33 x In(VS) + 0,0072 x score état général
DAS28 = 0,56 x sqrt(AG/28) + 0,28 x sqrt(AG/28) + 0,70 x In(VS) + 0,014 x Score général
SDAI = AG/28 + AD/28 + CRP (ml/dl) + patient10 – cmEVA + médecin10 – cm EVA
CDAI = AG/28 + AD/28 + patient10 – cmEVA + médecin10 – cmEVA
Critères ACR + arrêt radiographique par méthode Larsen ou Sharp pendant 6 mois après arrêt de
tout traitement
sqrt = racine carrée ; ln = log népérien ; IR = indice articulaire de Ritchie ; EVA = échelle visuelle analogique (de 0 à 10 cm)
AG = articulations gonflées ; AD = articulations douloureuses
Définitions de la rémission ACR/EULAR 2011
1. Définition selon l’analyse booléenne
A chaque évaluation, le patient doit satisfaire tous les items suivants :
•
Nombre d’articulations douloureuses < 1
•
Nombre d’articulations gonflées < 1
•
CRP < 1 mg/dl
•
EVA globale patient < 1 (échelle 0-10)
OU
2. Définition selon les index
A chaque évaluation le patient doit avoir un score SDAI < 3,3 [nombre d’articulations douloureuses/28 + nombre
d’articulations gonflées/28 + EVA globale patient/10 + EVA globale médecin/10 + CRP (mg/dl)).
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Cours DCEM3 – Polyarthrite rhumatoïde – Mise à jour du 20/03/2011
Les tableaux et algorithmes suivants sont extraits des recommandations de l’HAS sur la prise en charge de la polyarthrite
rhumatoïde. (Les recommandations et l’argumentaire scientifique sont consultables dans leur intégralité sur www.hassante.fr Haute Autorité de Santé – Septembre 2007
Polyarthrite débutante : diagnostic et prise en charge initiale selon l’HAS (2007)
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Cours DCEM3 – Polyarthrite rhumatoïde – Mise à jour du 20/03/2011
Bilan et traitements d’une polyarthrite rhumatoïde débutante selon la HAS (2007)
Service de rhumatologie du Pr Meyer, CHU Bichat
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Cours DCEM3 – Polyarthrite rhumatoïde – Mise à jour du 20/03/2011
Tableau synthétique des recommandations : indication des anti-TNFα
α dans la PR [Pham T et al. La lettre du
rhumatologue, 2006, n°324, p. 23-30]
Diagnostic de PR
Activité inflammatoire
et sévérité structurale
de la PR
PR certaine :
- répondant aux critères de l’ACR 1987
- diagnostiquée par un médecin spécialiste ayant une expertise dans la prise en charge de la
polyarthrite rhumatoïde
PR active ou évolutive sur le plan structural :
- activité inflammatoire, persistante depuis au moins un mois, définie par :
o DAS 28 > 5,1 ou DAS 28 > 3,2 avec une corticodépendance
o Et signes objectifs d’inflammation, cliniques (synovites) ou biologiques (VS ou CRP)
- évolutivité structurale, définie par l’apparition et/ou l’aggravation des lésions sur 2
examens radiographiques successifs
Traitements
antérieurs de la PR
PR en échec du méthotrexate (MTX), pris pendant au moins 3 mois à dose optimale tolérée
(0,3 mg/kg/sem. Sans dépasser 25 mg/sem). En cas d’intolérance ou de contre-indication au
MTX, d’échec à un autre traitement de fond ayant une efficacité structurale (léflunomide ou
sulfasalazine), maintenu(s) pendant au moins 3 mois à dose optimale tolérée (léflunomide 20
mg/j, sulfasalazine 40 mg/kg/j)
Exceptionnellement, PR vierge de traitement de fond ayant une atteinte structurale précoce
et sévère
Comorbidités à
rechercher
Contre-indications absolues ou relatives :
- Infections aiguës ou chroniques, qu’elles soient bactériennes, virales, fongiques ou
parasitaires (en particulier la tuberculose, le VIH et l’infection chronique par le VHB)
- Situation à haut risque d’infection :
o Ulcère cutané
o Antécédent de tuberculose non traitée
o Sepsis sur prothèse dans les 12 derniers mois
o Cathétérisme urinaire à demeure
- Népolasie ou hémopathie, sauf carcinomes basocellulaires et des cancers traités depuis
plus de 5 ans et considérés comme guéris
- Lésion précancéreuse (polypes coliques ou vésicaux, dysplasie du col de l’utérus,
gammapathie monoclonale, myélodysplasie) en l’absence de l’avis d’un cancérologue ou
d’un hématologue
- Maladie démyélinisante
- Insuffisance cardiaque sévère
- Grossesse ou allaitement
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Cours DCEM3 – Polyarthrite rhumatoïde – Mise à jour du 20/03/2011
Tableau synthétique des recommandations : initiation des anti-TNFα
α dans la PR [Pham T et al. La lettre du
rhumatologue, 2006, n°324, p. 23-30]
Bilan préthérapeutique
Examens complémentaires à demander
- Hémogramme
- Electrophorèse des protides sériques
- Transaminases
- Sérologie des hépatites B et C ; sérologie VIH (après accord patient)
- Ac antinucléaires ; si significativement positifs, Ac anti-ADN natifs
- Radiographie de thorax
- Intradermoréaction à la tuberculine (5 unités)
- Contrôle et mise à jour des vaccinations
Choix de la molécule
Il n’y a pas de hiérarchie des molécules fondées sur l’efficacité
Le choix se fera sur
- les caractéristiques du patient et sa préférence
- les modalités de prescription et de délivrance
- les données de tolérance disponibles
Traitement associé
L’association au méthotrexate (MTX) est recommandée, quel que soit l’anti-TNFα
α
En cas d’impossibilité d’utilisation du MTX, il est recommandé de recourir à un autre
traitement de fond en association avec l’adalimumab et l’infliximab
Surveillance
Le suivi des patients - surveillance de l’efficacité des traitements et de l’apparition
d’éventuels effets indésirables - doit comprendre :
- cliniquement : le recueil des éléments nécessaires au calcul du DAS 28
- biologiquement :
o une VS, une CRP, un hémogramme, des transaminases
o les paramètres de surveillance du traitement conventionnel associé
- radiologiquement : des radiographies des mains et poignets de face, des radiographies des
pieds de face, des radiographies des articulations symptomatiques
La surveillance clinique et biologique se fera :
- lors des perfusions : infliximab
- à 1 mois, 3 mois, puis tous les 3 mois : étanercept, adalimumab
La surveillance radiographique sera annuelle, voire plus espacée si la PR est ancienne
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