Mise en page 1 - FRAC Basse

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Mise en page 1 - FRAC Basse
HOMES FOR AMERICA
Bill Owens, Martha Rosler, Robin Collyer
Collection Frac Basse-Normandie
Réseau académique des galeries d’art 2008-2009
9 RUE VAUBENARD 14000 CAEN 02 31 93 09 00 www.frac-bn.org
Le FRAC.BN bénéficie du concours du Ministère de la Culture et de la Communication, Direction Régionale des Affaires
Culturelles de Basse-Normandie et de la Région Basse-Normandie.
HOMES FOR AMERICA
Bill Owens, Martha Rosler, Robin Collyer
Collection Frac Basse-Normandie
SOMMAIRE
- PRÉSENTATION DU FRAC BASSE -NORMANDIE
- TEXTE DE PRÉSENTATION DE L’EXPOSITION HOMES FOR AMERICA
- “QUELQUES PISTES ”
- “QUELQUES RÉFÉRENCES ”
- BILL OWENS , MARTHA ROSLER, ROBIN COLLYER :
NOTICES BIOGRAPHIQUES ET REVUES DE PRESSE
HOMES FOR AMERICA
Bill Owens, Martha Rosler, Robin Collyer
Collection Frac Basse-Normandie
LE FRAC BASSE-NORMANDIE
Une histoire de l'art au présent
C'est bien en ces termes paradoxaux que peut se nommer l'action des Frac. Dès 1983, le parti a
été pris de réunir des œuvres qui n'avaient a priori que leur seule contemporanéité à faire valoir,
afin de constituer un patrimoine, trésor régional au risque du présent.
La collection du Frac Basse-Normandie fait état aujourd'hui de plus de 900 œuvres de près de 400
artistes. En évolution permanente, la collection trouve sa cohérence dans des lignes de force qui
vont de la peinture abstraite à un ensemble photographique qui s'approprie le paysage, le portrait,
le corps et dont une large part fait écho à la construction d'une image en relation à l'architecture.
Plus récemment, c'est la place de l'humain dans la société contemporaine (systèmes urbains, sociaux et informatifs) qui est questionnée dans des œuvres aux médiums diversifiés (photographie,
sculpture, vidéo, installation). Enfin une section est consacrée aux œuvres en rapport à l'Histoire
contemporaine.
Une collection en mouvement
D'abord conçue comme un ensemble d'œuvres disponibles pour des expositions sur le territoire
régional dans les différents lieux susceptibles de les accueillir (musées, centres, d'art, centres culturels, sites historiques), le Frac Basse-Normandie bénéficie depuis 1996 d'espaces d'expositions
propres. L'activité d'expositions se répartit donc selon ces deux axes : l'un de diffusion de la collection sur le territoire régional, l'autre d'expositions au Frac dans lesquelles sont invités des artistes
contemporains dans des expositions monographiques ou thématiques. Il est en effet essentiel au
Frac d'être en contact direct avec la création contemporaine, échanges fructueux dans le flux vivant
de l'actualité de l'art.
La rencontre
Outre cette rencontre permanente par l'exposition, c'est à une éducation du regard et à la sensibilisation des publics que le Frac Basse-Normandie consacre une large part de son activité. Les services culturels et éducatifs mettent en place ces formations dans le cadre de nombreux échanges
et collaborations qui vont de l'école primaire à l'université. Au public adulte, il est proposé des rencontres avec des artistes, des conférences, des soirées vidéo ou encore la visite commentée du
samedi après-midi.
Le Frac propose en accès libre un important fonds documentaire, monographies d'artistes contemporains, ouvrages généraux et revues. La banque de données Vidéomuseum qui répertorie l'ensemble des collections des Frac et des principaux musées d'art contemporain français y est consultable.
La collection du Frac Basse-Normandie est consultable en ligne : www.frac-bn.org/collection.htm
Contact pour les enseignants :
Julie Laisney, Chargée des publics
[email protected] - 02 31 93 92 41
HOMES FOR AMERICA
Bill Owens, Martha Rosler, Robin Collyer
Collection Frac Basse-Normandie
TEXTE DE PRÉSENTATION DE L’EXPOSITION HOMES FOR AMERICA
En 1966, l'artiste américain Dan Graham publie dans Arts Magazine Homes for America, série de
photographies de cités pavillonnaires du New Jersey accompagnées de textes liés à l'espace urbain,
la maison individuelle, la famille ... Cette œuvre constitue une réflexion critique sur le modèle urbain
qui faisait du pavillon de banlieue l'idéal de vie des années 1950 et 1960 aux Etats-Unis. Les œuvres
de Bill Owens, Martha Rosler et Robin Collyer poursuivent cette réflexion sur l' « American Way of
Life » et notamment la manière dont il s'incarne dans l'habitat.
En 1968, alors photographe de presse, Bill Owens commence un reportage sur la banlieue américaine pour le journal The Independant de Livermore (Californie). Regroupées ultérieurement dans
l'ouvrage Suburbia (1972), ses photographies, toujours accompagnées de légendes, font pénétrer le
spectateur dans l'intimité des banlieusards californiens : pavillons identiques juxtaposés le long de
rues sans issue, « réunion Tupperware » entre amies, jeune couple meublant son salon avec soin …
Le regard de Bill Owens sur les individus photographiés pourrait sembler ironique, mais il ne l'est
pas. En effet, comme l'indique Yannick Vigouroux, « le reporter est pleinement conscient de faire
partie de la communauté qu'il photographie et affirme la légitimité de ces bonheurs simples qui lui
sont devenus si familiers. Il nous convie, spectateurs guidés par son « regard caméra », à une visite de voisinage qui semble ouvrir les portes d'un rêve américain bien palpable. »
La série de collages Bringing the War Home (1967-72) de Martha Rosler est contemporaine du
Suburbia de Bill Owens. Mais c'est ici la face sombre du rêve américain qui est mise en lumière et
dénoncée avec virulence, des images de la guerre du Vietnam faisant irruption dans de confortables intérieurs de maison. Les œuvres de la récente série Bringing the War Home : House Beautiful
(2004) reprennent le même principe pour évoquer le conflit actuel en Irak. L'impact visuel est toujours aussi fort : la réalité de la guerre montrée à partir d'images d'actualité (télévision, journaux)
et intégrée à la vie quotidienne, dans les décors les plus triviaux et les activités les plus banales,
crée une tension insupportable.
Robin Collyer s'intéresse à un mode de vie radicalement opposé à celui de la banlieue et de la
société de consommation. La série Shakertown, Kentucky (1992) est ainsi consacrée à la communauté religieuse des Shakers, communauté créée à la fin du XVIIIe siècle et fondée sur le célibat, les
métiers manuels et la propriété collective. Les maisons des Shakers, rurales, communautaires et
meublées de façon très minimale, contrastent fortement avec les pavillons des “suburbs”. Les photographies de Robin Collyer témoignent cependant de l'envahissement insidieux du progrès et de
ses résidus : l'harmonie des champs est rompue par la présence d'un compresseur, celle de la maison par l'écran de télévision ou par des panneaux publicitaires. Elles font ainsi la preuve de la difficulté pour des modes de vie alternatifs d’exister face au modèle dominant.
HOMES FOR AMERICA
Bill Owens, Martha Rosler, Robin Collyer
Collection Frac Basse-Normandie
“QUELQUES PISTES” (I)
Une réflexion sur l’habitat, sur la manière dont il reflète et à la fois influence le mode de vie des
individus :
- le pavillon de banlieue fut et est encore aujourd’hui pour certains américains l’incarnation
d’un rêve (celui d’être propriétaire, d’avoir davantage d’espace pour soi) et d’une ascension
sociale (vivre mieux que ses parents et offrir un avenir encore meilleur à ses propres enfants),
comme en témoignent les photographies de Bill Owens prises en Californie dans les années
1970. Il symbolise pour certains autres, dont Martha Rosler, un ordre social oppresseur (“les
hommes au travail, les femmes au foyer”) et les excès de la société de consommation.
- le mode de vie austère des Shakers, qui s’articule autour de la prière et du travail, s’exprime
dans la simplicité, le dépouillement de leurs demeures et de leur mobilier, comme en
témoignent les photographies de Robin Collyer prises dans la communauté de Shakertown
dans le Kentucky.
Une réflexion sur différents aspects de la société nord-américaine :
- les “suburbs” : les oeuvres de Martha Rosler et de Bill Owens offrent un aperçu des pavillons typiques des banlieues nord-américaines (1).
- la guerre en Irak : les photomontages de Martha Rosler constituent un véritable réquisitoire
contre les actions militaires menées par les Etats-Unis en Irak depuis mars 2003. Elle avait
critiqué avec la même virulence la guerre au Viêtnam à la fin des années 1960.
- la société de consommation : les photographies de Robin Collyer mettent en lumière l’intrusion d’éléments issus de la société de consommation (un moniteur de télévision, un panneau
pu-blicitaire) au sein d’une communauté pourtant supposée demeurer à l’écart du “monde
extérieur” et de ses tentations matérielles.
Art et médias :
- le photo-reportage : le style documentaire (cadrage large, appareil à hauteur des individus)
des photographies de Bill Owens ainsi que la présence de légendes rapportant la parole des
individus photographiés évoquent le photo-reportage. L’artiste n’émet pas de jugement sur les
sujets photographiés mais apporte un témoignage sur leur mode de vie.
- le photomontage : Martha Rosler découpe et assemble au sein de la même image (en utilisant parfois l’informatique pour modifier le format des documents) des photographies issues
du magazine de décoration “House Beautiful” et des photographies de la guerre en Irak
extraites de différents journaux. Elle s’inscrit ainsi dans la tradition politique du photomontage telle qu’elle avait été développée dans les années 1920-1930 par des artistes comme
Hannah Höch et John Heartfield.
- la place des médias dans la vie des individus : les photomontages de Martha Rosler montrent comment les médias introduisent la violence de conflits lointains au sein de l'espace rassurant des foyers.
La série :
toutes les oeuvres de l’exposition font partie de séries, c’est-à-dire d’ensemble de photographies explorant un même sujet ou témoignant d’une même recherche formelle.
HOMES FOR AMERICA
Bill Owens, Martha Rosler, Robin Collyer
Collection Frac Basse-Normandie
“QUELQUES PISTES” (II)
(1) Urbanisation et politiques urbaines : le modèle américain
“A l’inverse de l’Europe, les Etats-Unis ont été durablement marqués par une longue tradition antiurbaine qui remonte à la création même de la nation américaine, voire avant l’Indépendance. Les colons
américains étaient des ruraux désireux de conquérir, occuper et exploiter un espace rural. La frontier
magnifiait la nature et l’opposait à la ville, domaine du vice et de la corruption. Vers 1800, aucune ville
n’atteignait 100000 habitants (alors que Londres en comptait déjà un million). La littérature (Thomas
Jefferson, Henry James, Louis Sullivan, ...) et les théoriciens de l’urbanisme (Frank Lloyd Wright) ont
exprimé cette attitude.
Celle-ci a toujours sous-tendu la société, même à l’époque du développement des métropoles industrielles. Elle a repris toute sa vigueur après la Seconde Guerre mondiale lorsque la banalisation rapide
de l’automobile a permis la suburbanisation à grande échelle. Préférant disposer d’un vaste terrain
plutôt que de la proximité d’un centre-ville qu’ils rejetaient, les ménages aisés et la classe moyenne ont
émigré vers des suburbs très hiérarchisées en fonction du revenu (la valeur de revente d’une maison
dépend avant tout de son adresse, plus que de ses caractéristiques propres). Ces quartiers sont exclusivement résidentiels. Les activités en sont absentes et les équipements réduits au minimum. Les
déplacements vers le travail, pour les achats, pour les loisirs s’effectuent en voiture. Bref, les banlieues
résidentielles sont conçues en fonction de l’automobile. Le mode de vie suburbain constitue le modèle
affiché de la société urbaine américaine.
Parrallèlement, pour les activités commerciales des localisations assurant une bonne accessibilité automobile aux clients ont été recherchées. C’est à cette époque que les promoteurs ont aménagé les premiers shopping centers, conçus en fonction de l’automobile : installés près d’un échangeur autoroutier,
ils présentent la forme d’une gigantesque boîte fermée au milieu d’un immense parc de stationnement.
Les plus importants ont accueilli des services privés, voire publics. Les centres anciens, désertés par les
commerces et les services, ont alors perdu leur vitalité, mais ils ont été rénovés pour accueillir des
sièges sociaux et des bureaux dans des immeubles-tours. Quartiers d’affaires le jour, ils sont abandonnés aux minorités la nuit. Les quartiers intermédiaires ont décliné, jusqu’à devenir parfois des friches
(Detroit).”
(Pierre Merlin, “Les relations entre la ville et sa périphérie”, in Les Cahiers français “Villes et territoires”, n°328, septembre-octobre 2005)
HOMES FOR AMERICA
Bill Owens, Martha Rosler, Robin Collyer
Collection Frac Basse-Normandie
“QUELQUES RÉFÉRENCES ” (I) : le titre de l’exposition fait référence à l’oeuvre Homes for America de
l’artiste américain Dan Graham.
Dès ses débuts en 1964, Dan Graham (né en 1942) est tour à tour galeriste, écrivain, théoricien, photographe, vidéaste, architecte. Son oeuvre se révèle tout aussi polymorphe, influencée par l’art conceptuel mais aussi ancrée dans un contexte politique, social et culturel dans lequel elle est créée.
Homes for America
maquette originale en couleur de l’article, 56,8 x 76,5 cm
Collection Daled, Bruxelles
En 1966, Dan Graham signe son œuvre-manifeste
en publiant dans la revue Arts Magazine « Homes
for America ». Cet article en double page présente
une série de photographies de cités pavillonnaires
du New Jersey accompagnées de textes liés à
l'espace urbain, la maison individuelle, la famille...
Homes for America constitue une réflexion critique
sur le modèle urbain qui faisait du pavillon de banlieue construit en série l'idéal de vie des années
1950 et 1960 aux Etats-Unis. Il vise également, de
par la publication de l’oeuvre dans un magazine, à
faire sortir la création artistique de l’espace de la
galerie et à lui assurer une diffusion plus vaste.
A la fin des années 1970, Dan Graham s’intéresse à la
musique rock, forme de culture populaire par excellence et
réalise l’oeuvre Rock My Religion (1979-1983). D’abord
conçu comme un texte lu par l’artiste en conférence,
accompagné de diapositives et de musique, il en fait par la
suite une vidéo. Dan Graham y formule une histoire qui
commence avec les Shakers, communauté religieuse dont
les membres se livrent à des danses proches de la transe
afin de se librérer du péché. Il prend comme point de
départ le renouveau religieux et analyse l’émergence de la
musique rock comme religion de la jeunesse consommatrice des banlieues du milieu des années 1950. Il prête tout
particulèrement attention à la musique et à la philosophie
de Patti Smith qui incarne cette conception du rock comme
religion.
Rock My Religion, 1984
vidéo, 60 min
Musée National d’Art Moderne, Paris
Depuis le début des années 1980, Dan Graham se consacre à la réalisation de pavillons, structures élaborées
à partir de formes géométriques élémentaires, de panneaux de verre et de miroirs double face, le plus souvent installées dans des espaces publics qu’ils soient
urbains ou naturels. Il propose ainsi une réflexion sur
l’architecture et son rapport avec l’environnement, sur
notre perception de nous-mêmes et de l’espace.
Two Adjacent Pavilions, 1978-1981,
installés dans le parc du Musée Kröller-Müller, Otterlo
HOMES FOR AMERICA
Bill Owens, Martha Rosler, Robin Collyer
Collection Frac Basse-Normandie
“QUELQUES RÉFÉRENCES” (II) : d’autres oeuvres traitant de l’architecture des banlieues pavillonnaires
et de ses implications sociales.
Dan GRAHAM
Alteration to a Suburban House, 1978
bois peint, tissu synthétique et matière plastique, dimensions
variables
“Dans la maquette Alteration to a Suburban House (1978), Dan
Graham a remplacé le mur extérieur du pavillon familial par
une cloison vitrée et placé au milieu de la maison un miroir de
telle sorte que le passant dans la rue soit non seulement
impliqué dans l'exposition d'une vie privée, mais s'y intègre
physiquement à travers le miroir, tandis que demeure invisible
la seconde moitié de la maison au-delà ce miroir. Absorption
de l'extérieur, mise en exposition de l'intérieur en même
temps qu'occultation, Alteration to a Suburban House entrave toute dimension de l'habiter au profit
d'une immersion de la vision dans l'architecture privée qui en devient en quelque sorte l'occupant. Cette
œuvre de Dan Graham fait référence à l'architecture-signe, perméable à son environnement médiatique
de Robert Venturi, Michael Graves, Frank O. Gehry, ainsi qu'aux maisons de verre de Mies van der Rohe
et Philip Johnson. Elle opère la fusion de la maison de verre et du pavillon typifié de banlieue. C'est à
nouveau une logique de renvoi spéculaire qui est à l'œuvre à travers le recours au verre et au miroir qui
s'efforce de rendre poreuses les limites intérieur/extérieur, privé/public de la maison, de les torsader
l'une dans l'autre. Dan Graham rend compte ici de la privacité de la sphère publique à laquelle répond
la mise en publicité de la sphère privée, où le "foyer" est devenu surface médiatique. L'architecture moderniste avait rejeté cette spatialité, qui recueillait l'intériorité, pour l'ouvrir sur l'extérieur, ou suspendre les fondations de la maison. La situation de l'homme moderne est celle de l'individu qui "vient
habiter une maison où l'espace intérieur a été violenté et tourné vers le dehors".” (Marie-Ange Brayer)
Pipilotti RIST (née en 1962, vit et travaille à Zürich)
Vorstadthirn (Cerveau de banlieue), 1999
installation : maquette de maison, vidéoprojections, bande
sonore
Collection Flick, Berlin
Les premières vidéos de Pipilotti Rist sont imprégnées de
son goût pour la musique et la culture pop ; depuis les
années 1990, elle réalise essentiellement des installations
vidéo, dans lesquelles elle développe une esthétique
acidulée plus abstraite, toujours axée sur le corps et l'identité féminine.
L’installation Vorstadthirn met en scène la maquette d’une maison de banlieue située aux abords d’une
autoroute sur laquelle sont projetées les images d’une famille. Les membres de la famille sont en train
de dîner et une énorme flamme sort de l’un des plats sans qu’aucun d’entre eux ne semblent le remarquer. Sur le mur du fond de la salle à manger sont projetées simultanément les images d’une femme.
Celle-ci conduit une voiture tout en racontant une histoire d’amour déçue. Le spectateur est contraint de
regarder la scène de l’extérieur et donc de prendre du recul, au sens propre comme au sens figuré, par
rapport à la scène qui se déroule sous ses yeux et peut-être également dans sa propre maison. Pipilotti
Rist critique ainsi le modèle du “Home sweet home” et le bonheur familial qui est censé l’accompagner,
modèle qui dissimule selon elle de nombreux non-dits et frustrations.
Bill OWENS
Né en 1938 à San José (Californie), vit et travaille à San Francisco (Californie)
S-67 Fourteen years ago, 1972
photographie noir et blanc, 21 x 32 cm
S-12 dyptique A&B, 1972
dyptique, photographies noir et blanc, 2 x (25 x 33 cm)
S-29 Tupperware, 1972
photographie noir et blanc, 25 x 34 cm
Collection Frac Basse-Normandie
Bill Owens commence sa carrière en 1968 comme photographe de presse. Dans ce cadre il produit de
nombreuses images d'enquête documentaire qu'il publiera en livres entre 1972 et1976 : Suburbia, Our
Kind of People, Working. Chaque ouvrage présente un aspect différent des Etats-Unis : la banlieue et ses
habitants, les fêtes et les loisirs collectifs, l'univers du travail.
Dans les années 1970, la concurrence de la télévision plonge l'activité de la presse écrite locale et du
reportage photos dans une grave crise. Bill Owens abandonne alors son activité de photojournaliste pour
celle de brasseur, plus lucrative. Son travail restera toutefois dans les mémoires et des cinéastes tels
Steven Spielberg ou Tim Burton s'en inspireront dans certains de leurs films. Cette notoriété est justifiée par la justesse et l'acuité de son témoignage documentaire, qualités que détaille Yannick Vigouroux
dans sa présentation de l'artiste :
« Bill Owens ne juge personne. Son regard est fraternel. Ce n'est pas avec condescendance mais avec
un amusement certain qu'il photographie une réunion Tupperware. La jeune femme qui présente les
produits dans son salon confie qu'elle aime organiser ces rendez-vous, parce qu'ils lui permettent de
retrouver ses amies pour discuter. C'est aussi ce que semble suggérer le photographe : peu importe le
prétexte des réunions, le plus important est la permanence du lien social et l'adhésion des individus à
des valeurs communes, que ce soit en banlieue,dans les associations ou dans le monde du travail / …/
Le regard de Owens, à la fois proche du sujet et doucement distancé parce que documentaire, n'est pas
extérieur - à quelques exceptions près - ou inquisiteur. Le reporter est pleinement conscient de faire partie de la communauté qu'il photographie et affirme la légitimité de ces bonheurs simples qui lui sont
devenus si familiers. Il nous convie, spectateurs guidés par son « regard caméra », à une visite de voisinage qui semble ouvrir les portes d'un rêve américain bien palpable. »
Bill OWENS
Autres photographies extraites de la série Suburbia, 1968-1972 :
We’re really happy, 1972
photographie noir et blanc, 28 x 38 cm
Collection FNAC
Reagan TV interior, 1972
photographie noir et blanc, 28 x 35 cm
Collection FNAC
Sans titre, 1972
photographie noir et blanc, 40 x 50 cm
Collection Frac Languedoc-Roussillon
TV with empty chairs, 1972
photographie noir et blanc, 28 x 35 cm
Collection FNAC
Responsability, 1972
photographie noir et blanc
Family with wagon and boat, 1972
photographie noir et blanc
Martha ROSLER
Née en 1943 à New York (États-Unis), vit et travaille à New York.
Photo-Op, from the new series Bringing the War Home : House Beautiful, 2004
photomontage imprimé comme photo couleur, 51 x 61 cm
Vanitas, from the new series Bringing the War Home : House Beautiful, 2004
photomontage imprimé comme photo couleur, 51 x 61 cm
Election (Lyndie), from the new series Bringing the War Home : House Beautiful, 2004
photomontage imprimé comme photo couleur, 51 x 61 cm
Collection Frac Basse-Normandie
Martha Rosler est une artiste engagée. L'ensemble de
son travail reflète l'évolution de la société contemporaine des années soixante-dix à nos jours. Par ses
œuvres, elle dénonce les réalités de la guerre avec des
photomontages incisifs et l'American way of life avec des
installations critiques. La position de la femme dans la
société, le problème de l'exclusion, celui de l'espace
privé et de l'espace public, la frontière entre l'individu et
le collectif et les relations internationales s'entremêlent
aussi bien dans ses vidéos que dans ses séries photographiques.
Dans la série de collages intitulée Bringing the War Home (1967-1972), des images de la guerre du
Vietnam faisaient irruption dans de confortables intérieurs de maison américaines. Les œuvres de
la nouvelle série Bringing the War Home : House Beautiful (2004) reprennent le même principe pour
évoquer le conflit actuel en Irak. L'impact visuel est toujours aussi fort : la réalité de la guerre montrée à partir d'images d'actualité (télévision, journaux) et intégrée à la vie quotidienne, dans les
décors les plus triviaux et les activités les plus banales, crée une tension insupportable.
Martha ROSLER
Photographies extraites de la série Bringing the war home, 1967-1972
First Lady (Pat Nixon), 1968-1972
photographie couleur d’après photomontage, 52 x 62 cm
Collection Frac Bretagne
Patio view, 1969-1972
photographie couleur d’après photomontage
Cleaning the Drapes, 1967-1972
photographie couleur d’après photomontage
Giacometti, 1969-1972
photographie couleur d’après photomontage,
62 x 51 cm
Collection Frac Bretagne
Martha ROSLER
Photographies extraites de la série Bringing the War Home : House Beautiful, 2004
Gladiators, 2004
photomontage imprimé comme photo couleur
Lounging Woman, 2004
photomontage imprimé comme photo couleur
Walker, 2004
photomontage imprimé comme photo couleur
Hooded captives, 2004
photomontage imprimé comme photo couleur
Robin COLLYER
Né en 1949 à Londres (Royaume-Uni), vit et travaille à Toronto (Canada).
Shakertown, Kentucky, 1992
3 photographies couleur, 50 x 60 cm chaque
Collection Frac Basse-Normandie
Il y a dans la diversité des créations de Robin
Collyer, sculptures ou photographies, la
recherche permanente d'un rapport objectif aux
textes, objets, images. La photographie, qu'il
aborde en 1972 en utilisant toute les capacités
technologiques nouvelles, va permettre à Robin
Collyer de créer des situations critiques où il
interroge le discours médiatique, le langage et la
représentation. Ainsi, dans les images de
paysage urbain comme celles d'Adelaïde Street
(1993) et de Temperence Street (1993), oeuvres de
la collection Frac Basse-Normandie, la photographie est travaillée à l'ordinateur pour faire disparaître toutes traces d'écrits. Le résultat de cette manipulation souligne la nature de la ville dont
l'existence se fonde autant sur les mots et le discours que sur ses constructions. L'absence de ces
signes est perçu comme un manque, une perte.
Si Robin Collyer vide volontairement la ville de ses expressions, il va rechercher les effets insidieux
de l'urbanisation dans l'environnement naturel ou les espaces réputés protégés. Les photographies
de Shakertown, Kentucky où vit une communauté rurale traditionaliste opposée à toute modernité*,
font la preuve de l'envahissement insidieux du progrès et de ses résidus. L'harmonie des champs
est rompue par la présence d'un compresseur, celle de la maison par l'écran de télévision ou la
récupération de panneau publicitaire.
* Les Shakers sont un groupe religieux fondé par Ann Lee, fille d’un forgeron de Manchester, qui partit en
Amérique avec quelques disciples à la fin du XVIIIème siècle. Ann Lee voulait y créer une communauté
utopique fondée sur le célibat, l’égalité stricte entre hommes et femmes, les métiers manuels et la propriété
collective. Le mouvement attînt son apogée en 1840 avec 6000 membres répartis dans 19 communautés. II
existe encore aujourd’hui une communauté à Sabbathday Lake, dans le Maine. Les Shakers ont en particulier développé un style de mobilier, dépouillé de tout ajout décoratif, qui a attiré l’attention des designers ces
dernières années.

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