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En couverture
Le géant qui ose tout au nom du client roi
Son ADN a 20 ans: innover tous azimuts pour vendre un service à très grande échelle. Amazon domine aujourd'hui la
planète e-commerce. Quitte à cabrer la concurrence, la Bourse ou les gouvernements.
Au coeur du campus d'Amazon, au nord de Seattle, dans
le vaste salon où les dirigeants du groupe reçoivent
leurs invités, en toute décontraction, l'un des murs
est entièrement recouvert de cadres qui célèbrent les
moments-clés de l'histoire du groupe. De l'expédition de
la première commande à un certain John Waynewright le
3 avril 1995, au démarrage de la livraison de produits
frais il y a quèlques années, tout y est. L'un des rectangles
renferme deux couvertures du magazine économique
américain Barron's. La première remonte à mai 1999 et
prédit la fi n prochaine de la jeune entreprise de commerce
électronique sous ce titre incendiaire: « Amazon.bomb
». Internet, expliquait la revue, devait permettre aux
fabricants comme Dell ou Sony de vendre en direct, sans
intermédiaire. La seconde couverture date de 2009 et
célèbre « Le meilleur commerçant du monde »: Amazon.
Le cybermarchand de Seattle ne compte plus les
condamnations à mort et les retours en grâce. Au cours
dcs quinze dernières années, U a fait mieux que survivre.
Dans chacun des treize pays où il s'est implanté, il figure
sur le podium de l'e-commerce. En France, où il est
présent depuis 2000, il est devenu, pour la première
fois cette année, le numéro un incontesté du secteur,
selon le baromètre de Pricewaterhousecoopers qui mesure
l'activité sur les sites de commerce électronique dans
l'Hexagone. Le groupe possède à présent plus de 80
entrepôts géants à travers le monde, dont plus de la moitié
sont situés aux Etats-Unis, et emploie quelque 150 000
salariés, dont 17 000 ont été recrutés au cours des trois
derniers mois.
Depuis sa fondation par Jeff Bezos, il y a tout juste vingt
ans, Amazon affiche des taux de croissance explosifs toujours autour de 20 % ces dernières années. Une course
aux parts de marché au détriment des profits. L'entreprise
affichait déjà clairement sa philosophie dans sa lettre
aux actionnaires de 1997, année de son introduction en
Bourse: « Nous continuerons de prendre nos décisions
d'investissements à la lumière de considérations de
leadership à long terme sur nos marchés, plutôt que de
considérations de profitabilité ou des réactions de Wall
Street à court terme. »
Analystes financiers divisés
Peu importe si les marchés s'agitent ou se désespèrent.
Amazon n'en fait qu'à sa tête et en dit le moins possible
sur ses intentions. « Ils sont un peu plus transparents
que le Parti communiste chinois », ironise Benoît Flamant,
directeur général adjoint du fonds d'investissement
Pourpoints. Le groupe l'a encore démontré récemment lors
de la publication de ses derniers résultats trimestriels: les
ventes ont grimpé de 20 % à 20,58 milliards de dollars,
mais le groupe creuse sa perte à 437 millions. En cause,
pour une bonne part, les dépenses dans les technologies
et les contenus qui atteignent la somme stratosphérique
de 2,4 milliards pour le seul trimestre. Le résultat de son
incursion ratée dans les smartphones et de ses débuts dans
la production de séries télé pour alimenter son site de
vidéos en streaming, concurrent de Netflix. Wall Street ne
comprend plus la stratégie d'Amazon. Sa valorisation en
Bourse a chuté de 25 % depuis le début de l'année.
Et les analystes sont de plus en plus partagés. Au sein
même du cabinet Forrester, grand spécialiste des géants
du Web, les avis divergent. « Depuis seize ans que je les
suis, j'entends dire qu'ils vont devoir être plus conciliants
avec Wall Street, mais, en vérité, tant qu'ils travailleront
aussi dur pour être innovants, nous devrons nous réjouir
», estime James McQuivey. Sa collègue Sucharita Mulpuru
pense tout l'inverse: « Ils continuent d'être valorisés
comme des entreprises dc technologie, mais ils sont tout
sauf cela: ils n'ont pas les profits d'un Apple ou d'un
Google.»
Amazon est un animal à part. « Ils inventent un nouveau
mode de relation avec Wall Street, observe Georges
Nahon, le président d'Orange Institute, cellule de veille
technologique de l'opérateur dans la Silicon Valley. Ils sont
à la recherche constante de nouvelles ressources pour
créer de la valeur et de tout ce qui peut réduire leurs
coûts. » Ses dirigeants assument leur démarche jusqu'auboutiste pour ne servir, selon eux, qu'un seul objectif: le
bien du client.
Cette stratégie est de plus en plus critiquée, notamment
par la concurrence, mais aussi par les gouvernements.
La Commission européenne a ainsi ouvert une enquête
sur les conditions fiscales offertes par le Luxembourg à
la multinationale, afin qu'elle installe son siège européen
dans le grand-duché. « Nous sommes très à l'aise sur
la question de la fiscalité, assure Romain Voog, PDG
d'Amazon France et ancien de Carrefour. Nous sommes
dans le Top-10 des plus gros créateurs d'emplois en France
depuis trois ans, et nous sommes les plus gros prestataires
de La Poste. » Pour lui, « certains groupes sont actuellement
utilisés comme études de cas dans les discussions qui
s'ouvrent sur la fiscalité internationale ».
Hachette a fini par céder
La Commission enquête, mais Amazon n'a pas la
réputation d'être un grand adepte du compromis. Contre
Hachette, il a ferraillé durant six mois pour convaincre
l'éditeur de baisser ses prix. Pour parvenir à ses fins,
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il n'a pas hésité à freiner les ventes de l'éditeur sur
sa plateforme. Le groupe français a cédé. « Ils sont
très arrogants dans leur approche, commente Sucharita
Mulpuru, du cabinet Forrester. Mais c'est un jeu très
dangereux: toute l'industrie du livre souhaite qu'Hachette
gagne.»
Le géant de Seattle aime avoir raison contre tout le
monde. « Nous acceptons de ne pas être compris pendant
très longtemps », résume Eric Brossard. Amazonien de
la première heure, il a été recruté par Jeff Bezos en
1998, quand l'entreprise occupait encore un immeuble
miteux du centre-ville de Seattle. Il est aujourd'hui le
patron international de toute la Marketplace, l'espace de
la plateforme Amazon où 2 millions de commerçants tiers
ont installe leur cyberéchoppe et vendent leurs biens,
moyennant une commission de 7 à 15 %. Les fenêtres de
son bureau donnent sur le nouveau campus, une douzaine
de buildings flambant neufs, bâtis sur d'anciennes friches
industrielles. Près de 30 DOO amazoniens travaillent ici.
Cloud pour le CAC et Netfl x
renvoyé une nouvelle console. Il ignorait que le client était
journaliste au New York Times et que cette affaire vaudrait
à Amazon un article élogieux que Jeff Bezos brandirait,
hilare, les semaines suivantes dans les couloirs du siège,
à Seattle. Le client est roi. Et Amazon investit dans tout
ce qui pourrait l'inciter à venir dépenser plus sur son
site. Après les produits frais, les téléphones mobiles et les
contenus, quelle sera sa prochaine terre de conquête? La
vente aux entreprises, un marché trois fois plus gros que
celui du grand public? « Ils n'ont rien annoncé, mais ils
commencent à embaucher », assure Benoît Flamant. Les
services à la personne sont une autre piste sérieuse, tout
comme la publicité où il réaliserait déjà, selon Sucharita
Mulpuru, I milliard de dollars de chiffre d'affaires. Les
rumeurs évoquent même l'ouverture d'un magasin en dur
à Manhattan. Jeff Bezos le répète à l'envi à ses équipes: «
Nous n'en sommes qu'au premier jour. »
Sur les méthodes commerciales
Des fournisseurs déréférencés sans prévenir
Stéphane Treppoz, PDG de Sarenza
L'ambiance a change, pas la culture. « Nous sommes très
durs avec nous-mêmes, fait savoir le manager français.
Lors des réunions, nous ne parlons que de ce qui ne marche
pas. Notre objectif, c'est de résoudre les problèmes. »
La méthode Amazon, c'est de concevoir des services
capables de monter en charge à très grande échelle
et, en général, en libre-service. Comme pour la place
de marché, ou encore Amazon Web Services (AWS), sa
plateforme de stockage de données, l'un des géants du
cloud, qui oeuvre pour des clients très variés: Netfl ix, le
gouvernement américain, ou encore 70 % des entreprises
du CAC 40 lui ont confi é leurs informations. Cette division
est née il y a une dizaine d'années. Le cybermarchand
dépensait beaucoup d'énergie à concevoir une architecture
informatique capable de résister à toutes sortes de pannes.
Les chercheurs y passaient trop de temps. Pour ne pas
mettre en péril l'innovation, Jeff Bezos a externalisé cette
activité qui est devenue un business à part entière. Et dont
le premier client est Amazon.com. Les récentes révélations
d'espionnage dévoilées par l'affaire Snowden ne semblent
pas avoir rafraîchi ses relations commerciales. Et le fait que
la CIA fasse partie de ses nombreux clients lui sert même
d'argument de poids. « A chaque fois que nous amènerons
un niveau de sécurité, il profite à tout le monde », assure
Miguel Alava, directeur de la division pour la France.
Cap sur les entreprises
Amazon est incontestablement le leader planétaire de cette
industrie très prometteuse. Selon le cabinet Gartner, les
capacités dc stockage ct de calcul du cloud d'Amazon sont
cinq fois supérieures à celle de ses quatorze poursuivants
réunis, parmi lesquels Microsoft, IBM ou Google. Difficile
de suivre sur ce terrain Amazon, qui y applique son
modèle de distributeur, peu commun dans l'informatique:
gros volumes, faibles marges. En huit ans d'existence, Ic
groupe abaissé 45 fois ses tarifs. « Cela coûte cher d'être
concentré sur le client », résume Eric Brossard. Il y a
quèlques années, le service après-vente d'Amazon avait
reçu l'appel d'un client new-yorkais qui prétendait ne
pas avoir reçu la console dc jeux qu'il avait commandée,
le bordereau de livraison avait été signé par le voisin.
Une histoire embrouillée. Le téléopérateur avait illico
Amazon est un formidable concurrent qui a compris que la
satisfaction clients était la clé d'une relation de confiance.
Nous respectons profondément cette approche qui est
aussi la nôtre. Là où Amazon me pose un problème majeur,
c'est dans ses pratiques commerciales et son manque
d'éthique sociétale. Derrière une communication policée
se cache un concurrent pour lequel les fournisseurs sont
traités en fonction des priorités stratégiques du moment:
Amazon n'hésitera pas à contourner un fournisseur sans
le prévenir en traitant en direct avec ses usines ou en le
déréférençant du jour au lendemain. Encore plus grave,
Amazon fait preuve d'un cynisme absolu pour localiser
ses centres de profit en créant d'opportunes sociétés
intermédiaires dans les pays à fiscalité avantageuse, afin
de payer le moins d'impôts possible en France. C'est
moralement condamnable dans l'absolu et c'est même une
faute, car notre contrat de société repose sur la juste
contribution des uns et des autres à l'intérêt général. »
Sur les pratiques fiscales
Et pourtant l'argent public paie ses locaux!
SERGE PAPIN, PDG DE LA COOPERATIVE SYSTEME U
Ce n'est pas tant le modèle économique que la vision
insatiable du dirigeant qui m'interroge. Il veut vendre de
tout dans tous les pays. Et cette boulimie engendre des
travers qui apparaissent maintenant en pleine lumière:
ses pertes financières, en particulier. Jeff Bezos va devoir
opérer un recentrage plus modeste à moins de dire à ses
actionnaires «rendez-vous dans vingt-cinq ans». Il est son
propre ennemi. On ne peut pas être aussi gourmand, et il
n'a pas non plus les moyens de lutter contre des puissances
agrégées comme Walniart, Carrefour ou Auchan qui ont
le maillage du territoire et des processus encore plus
économiques qu'Amazon. Ce qui est inadmissible, c'est
son utilisation injuste de la fiscalité vis-à-vis des autres
opérateurs qui participent, eux, au développement des
territoires. L'argent public lui sert à créer des entrepôts,
alors qu'il ne paie pas ses impôts. Il a réinventé le
taylorisme sans transmission de savoir-faire, ni évolution
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possible pour ses employés. Il s'installe dans des zones de
confort, qu'il prend et qu'il assèche. »
transformé notre modèle pour apporter une solution de
commerce alternative.
Sur la relation clients
La Fnac offre désormais la possibilité à ses clients de
bénéficier à tout moment et en tout lieu de l'intégralité
de ses produits et services, que ce soit sur Internet, sur
mobile, et sur l'ensemble du territoire, via son important
parc de magasins. Les clients expriment également un désir
fort d'accompagnement pour comprendre les usages des
nouveaux produits techniques sur le marché. L'expertise et
la disponibilité de nos vendeurs en magasin permettent de
répondre à cette demande. A la fois global et connecté, ce
nouveau modèle de commerce est aujourd'hui la spécificité
et la force de notre enseigne face aux géants du Net. »
La nouvelle demande renforce notre enseigne
ALEXANDRE BOMPARD, PDG DE LA FNAC
Face à la révolution numérique et à l'émergence de
nouveaux acteurs de l'e-commerce tels qu'Amazon, nous
avons eu très tôt la certitude que les consommateurs
ne voulaient pas choisir entre les sites d'e-commerce et
les magasins, mais qu'ils recherchaient plutôt à cumuler
les avantages des uns et des autres. C'est avec l'objectif
de répondre à cette nouvelle demande que nous avons
G. F.
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