Les Ecdysozoaires I: Les Crustacés et les Chélicérates

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Les Ecdysozoaires I: Les Crustacés et les Chélicérates
Les Ecdysozoaires I: Les Crustacés et les
Chélicérates
par Jon G. Houseman
Les Arthropodes (Embranchement :Arthropoda)
Les Arthropodes sont un groupe d'animaux très abondants et diversifiés. Les
Arthropodes représentent entre 75 et 80 % de toutes les espèces animales. En dépit de
leur grand nombre, ils possèdent de nombreuses similarités. Tous les Arthropodes ont
un exosquelette segmenté, des yeux composés et des appendices articulés.
L'exosquelette, qui est composé de cuticule inerte sécrétée par l'épiderme sous-jacent,
est un des facteurs expliquant le succès des Arthropodes. On a dit que le
développement de la cuticule par les Arthropodes était aussi important à leur succès
que le développement du plastique l'a été pour les humains. Alors que cela peut
sembler être une exagération repensez-y pendant que vous observez les différents
animaux pendant cette période de laboratoire. Souvenez-vous qu'ils ont tous été
fabriqués avec cette cuticule qui a été sculptée et moulée pour former les fines pièces
buccales d'un moustique tout comme la robuste pince du homard, sans oublier les ailes
délicates des insectes.
Les Arthropodes et les représentants de plusieurs autres embranchements, dont les
Nématodes, possèdent une cuticule de chitine. La présence de cette cuticule élimine la
possibilité d’avoir des cils et la combinaison de l’absence de cils et d’une cuticule de
chitine remplacée par la mue est caractéristique des Ecdysozoaires. Les Arthropodes
se distinguent des autres Ecdysozoaires par la présence des yeux composés, d’un cœur
tubulaire dorsal, d’appendices articulés, et de tagmes. Parmi les Arthropodes, la perte
des yeux composés, le nombre de paires d’antennes, le type de pièces buccales
(mandibulates ou chélicérates) et le type d’appendices (uniramés ou biramés) sert à
départager les Uniramés des Crustacés et des Chélicérates. Ce sont ces caractères que
vous observerez lors de votre survol de la diversité des Arthropodes.
Crustacés (Sous-embranchement : Crustacea)
Les Crustacés comprennent une gamme très variée d'animaux allant du zooplancton
marin, qui sont les herbivores principaux dans l'environnement pélagique, jusqu'aux
énormes crabes dont l'envergure des pattes se mesure en mètres. La forme ancestrale
possédait des appendices biramés attachés à chaque segment et deux tagmes: tête et
thorax. Les appendices biramés simples (semblables sur chaque segment), étaient
impliqués dans la respiration, la locomotion et l'alimentation.
Chez les Crustacés plus récents, les pattes ont tendance à être spécialisées pour l'une
ou deux des trois fonctions ancestrales. Certaines sont spécialisées pour l'alimentation,
d'autres servent à la locomotion, et certaines ne servent qu'à la respiration. Aux
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changements de fonctions correspondent également des changements de formes de ces
appendices. On dit que ces appendices représentent une homologie sérielle puisqu'ils
ont tous la même origine ontogénique mais ils ont des fonctions différentes. C'est
pourquoi vous examinerez si en détail les appendices de l'écrevisse.
Il vous serait impossible d'observer tous les types de Crustacés en une seule séance de
laboratoire et l'écrevisse servira d'exemple pour le groupe entier. Ne faites cependant
pas l'erreur de croire que l'écrevisse soit typique de tous les groupes de Crustacés.
Écrevisse
L'écrevisse est un Crustacé omnivore répandu à travers le monde entier. Elle vit dans
les ruisseaux et étangs où elle joue le rôle d'un nécrophage et se nourrit de tout ce
qu'elle trouve. Elle est considérée par plusieurs comme un délice et fait partie de la
cuisine traditionnelle dans le sud des États Unis et plusieurs régions d'Europe.
Examinez votre spécimen en tâchant d'identifier les structures caractéristiques des
Arthropodes telles que la cuticule dure, les appendices articulés et les yeux
composés. Tentez de plier doucement les diverses parties des appendices dans
différentes directions pour comprendre comment les membres s'articulent. Localisez
les membranes entre les parties articulées.
Anatomie externe de l'écrevisse
Le corps est formé de deux tagmes: le céphalothorax et l'abdomen (Figure 1). Le
céphalothorax est couvert dorsalement par la carapace et la jonction entre la tête et le
thorax est visible au niveau du sillon cervical sur la carapace. Trois des huit pattes
thoraciques sont fusionnées à la tête pour former les maxillipèdes. Le thorax a donc
cinq paires d'appendices. Derrière le sillon cervical et parallèlement à l'axe du corps se
trouvent deux sillons branchiaux qui indiquent la position des chambres branchiales
sous-jacentes. L'organisation structurale de l'abdomen est simple: dorsalement des
tergites recourbés se chevauchant et ventralement des sternites connectés par des
membranes.
Figure 1 Anatomie externe de l'écrevisse.
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Examinez la surface ventrale de votre spécimen pour voir les appendices formant
l'homologie sérielle. Les appendices sont biramés et sont formés d'un protopodite (la
composante la plus proximale), d'un exopodite (un rameau latéral ou externe qui
provient du protopodite) et d'un endopodite (un rameau médian ou interne provenant
du protopodite). Chacune de ces composantes peut être transformée de différentes
façons. Certaines parties peuvent être fusionnées, agrandies ou simplement disparaître.
Identifiez ces parties en vous référant aux diagrammes. Notez comment les parties
sont modifiées par rapport à la structure de base de l'appendice biramé.
Appendices de l'écrevisse
Observez votre spécimen et identifiez les appendices en partant des premiers:
antennules, antennes, mandibules et enfin deux paires de maxilles (Figure 2).
Figure 2 . Les appendices de la tête et les maxillipèdes.
Ces cinq appendices céphaliques sont retrouvés chez tous les Crustacés. Puis viennent
trois maxillipèdes qui indiquent la jonction entre la tête et le thorax. Ces maxillipèdes
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sont des appendices thoraciques qui servent à l'alimentation. La première des cinq
paires de pattes locomotrices (péréiopodes) est modifiée pour former un organe
préhensile appelé chélipède (Figure 3). Les quatre autres paires de péréiopodes
suivent. Enfin, il y a six paires d'appendices abdominaux: cinq paires de pléopodes et
une paire d'uropodes terminaux qui, combinée au telson, forme la queue de l'animal.
Les deux premières paires de pléopodes sont modifiées et servent d'organes
copulatoire chez le mâle. La plupart des pièces buccales ne seront pas apparentes
jusqu'à ce que vous les enleviez, plus tard dans la dissection.
Avant de disséquer l'animal, enlevez une partie de la carapace pour exposer les
branchies contenues dans la chambre branchiale. Les branchies sont-elles
attachées aux pattes? Enlevez délicatement les appendices sur le côté où vous avez
découpé la carapace. Séparez chaque appendice du corps au niveau de la membrane de
l'articulation au corps. Ce faisant identifiez les trois parties principales de chaque
appendice et faites un parallèle avec l'architecture générale d'un appendice biramé
(Figure 2 et Figure 3). Note: l'endopodite est généralement plus gros que l'exopodite et
peut être divisé en un maximum de 5 segments.
L'antennule est composée d'un coxopodite simple et d'un basipodite divisé en deux
segments. La partie dorsale du coxopodite contient un statocyste qui est perceptible
par une petite dépression à l'extérieur. Enlevez l'exosquelette sur le côté et examinez le
statocyste au microscope. Enlevez délicatement l'antenne en vous assurant que le
coxopodite y reste attaché. L'ouverture du système excréteur (la glande verte) est
située sur le coxopodite.
Orientez votre spécimen sous le microscope à dissection de manière à bien voir les
pièces buccales et retirez délicatement les appendices en partant du troisième
maxillipède et en allant vers l'avant. Soyez sûr de tenir le coxopodite de chaque
appendice avec votre pince, pour bien enlever l'appendice entier. Notez l'ordre dans
lequel ces appendices se trouvent. Les maxillipèdes ne servent pas uniquement à
manipuler la nourriture mais sont également impliqués dans la respiration. On retrouve
des branchies sur la deuxième et le troisième maxillipède. Le troisième maxillipède
illustre le mieux la structure typique des appendices de Crustacés avec un exopodite,
endopodite et un épipodite partiellement modifié en branchie (Fig. 2). Contrairement
à la première, la seconde maxille a un exopodite fusionné à l'épipodite coxal
(scaphognathite). Les mandibules ont un coxopodite avec une zone pour broyer et
une pour couper et le basipodite et l'endopodite forment une projection en forme de
doigt.
Les pattes ambulatoires, les péréiopodes, sont les appendices les plus gros et les plus
évidents. Elles n'ont pas d'exopodites mais portent toutes des branchies. La seconde et
la troisième paire portent également des pinces. Les péréiopodes sont les derniers
appendices thoraciques. Les appendices restants sont abdominaux. À l’exception des
uropodes terminaux, ils sont tous appelés pléopodes (pattes natatoires). Chacun
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Figure 3 Les appendices abdominaux et les péréiopodes.
ressemble à la forme générale biramée. Les deux premiers pléopodes sont de forme
différente chez le mâle. De quel sexe est votre spécimen?
Anatomie interne (Figure 4)
Ouvrez votre écrevisse en faisant une coupe latérale de chaque côté de la carapace et
dans la chambre branchiale jusqu'au rostre. Ne coupez pas trop profondément sinon
vous allez détruire la musculature et les organes sous-jacents. Poursuivez la coupe le
Figure 4 Anatomie interne de l'écrevisse.
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long des bordures de l'abdomen vers le telson.
Système circulatoire
Les Crustacés ont un système circulatoire ouvert ce qui implique qu'il n'y a pas de
capillaires reliant les vaisseaux sanguins allant vers le cœur et ceux qui en proviennent
(Figure 5). Ceci n'empêche pas les Crustacés d'avoir un réseau complexe d'artères et
de veines qui alimentent les différents organes et ramène le sang qui a été oxygéné
dans les branchies vers le cœur.
Figure 5 Le système circulatoire de l'écrevisse.
Examinez le cœur et les principaux vaisseaux sanguins. Le cœur est situé dans la
cavité péricardique (sinus péricardique) qui contient le sang provenant des
branchies. Ce sang pénètre dans le cœur par les ostioles. Si votre spécimen a été
injecté au latex sous une pression trop forte il est possible que le cœur et/ou les
ostioles soient endommagés. Le sinus péricardique est particulièrement fragile et il est
possible que le latex ait envahi l'hémocœlome. Dans ce cas le cœur peut être révélé en
enlevant le surplus de latex. Comment les ostioles fonctionnent-ils et comment
permettent-ils au cœur de pomper le sang?
Vous devriez pouvoir examiner la majorité des vaisseaux sanguins. Une des branche
de l'aorte antérieure devient l'artère optique. L'artère antérieure latérale se divise pour
former l'artère antennaire et l'artère hépatique. L'aorte postérieure se divise en artères
abdominales segmentaires. L'artère sternale va du cœur jusqu'à la surface ventrale de
l'animal. Ces artères dirigent le sang dans toutes les parties du corps où il est libéré
dans l'hémocœlome. Le sang dans l'hémocœlome est aspiré dans les branchies avant
de retourner au cœur par le sinus péricardique.
Système reproducteur
Les organes reproducteurs sont retrouvés tout près de la glande digestive. Les
testicules et les ovaires sont devant et un peu en dessous du cœur. L'ouverture du pore
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génital mâle est à la base de la cinquième péréiopode et celle de la femelle à la base
de la troisième. Les pléopodes du mâle sont modifiés pour faciliter le transfert du
spermatophore.
Système digestif
L'œsophage relie la bouche à l'estomac qui est situé juste derrière le rostre. La glande
digestive (hépatopancréas) est formée d'une paire de diverticules reliés à l'intestin
moyen. Pour observer le tube digestif, vous devrez enlever la glande digestive.
Procédez délicatement car elle est attachée à l'intestin moyen et aux organes
reproducteurs. Identifiez l'estomac (moulinet gastrique) qui se divise en une région
cardiaque et une région pylorique (Figure 6). L'intestin moyen est court chez
l'écrevisse mais plus long chez le homard. Dans sa partie antérieure on peut voir les
gros muscles associés à l'estomac. Enlevez l'estomac en coupant au niveau de l'intestin
et de l'œsophage. En le maintenant submergé dans un verre de montre, coupez-le en
deux. Séparez les deux moitiés et observez les dents chitineuses médianes et latérales,
ainsi que les soies chitineuses qui agissent comme des passoires. Toutes ces structures
sont composées de chitine car elles dérivent de la partie antérieure du tube digestif
tapissée de chitine.
Figure 6 L'estomac de l'écrevisse.
Système excréteur
Les glandes vertes sont des organes excréteurs situés dans la région ventrale de la tête
près de la bouche. Une des différences entre l'écrevisse et le homard est la structure du
tube. Retirez la glande pour l'examiner et identifier ces composantes.
Système nerveux
Enlevez l'estomac et les autres viscères pour localiser les ganglions sous- et supraœsophagiens ainsi que les nerfs connectifs. Identifiez le cordon nerveux et observez
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sa morphologie dans chaque segment. Est-ce que tous les ganglions ont la même
taille? Pourquoi pas? Examinez un œil composé sous le microscope à dissection.
Chelicerata
Araignées : la tarentule
Même si les Insectes dominent le milieu terrestre, leurs cousins Chélicérates ont
probablement été les premiers Arthropodes à vivre sur la terre ferme. Des Chélicérates
ressemblant à des scorpions se nourrissaient des corps mous des premiers envahisseurs
terrestres qui survivaient dans des milieux humides, par exemple des insectes et vers
primitifs. Mais les Insectes ont relevé avec succès les défis du milieu terrestre en
résolvant le problème de la perte d’eau. Avec l’acquisition du vol, cela a entraîné la
première explosion de la diversité des Insectes; la seconde explosion est venue de la
coévolution des Insectes et des plantes à fleurs. L’accroissement de la diversité des
Insectes s’est évidemment accompagné d’un accroissement de la diversité de leurs
prédateurs; ces prédateurs sont les Chélicérates. Les premières araignées utilisaient
une forme de soie pour détecter les proies qui passaient par hasard sur les fils de soie
posés à même le sol. Avec l’apparition d’insectes volants, les araignées commencèrent
à suspendre leur toile pour les attraper en vol. Les araignées primitives comme la
tarentule ne tissent pas de toile pour capturer leur proie. Elles utilisent leur soie pour
tapisser des terriers ou construire des retraites où elles attendent et sautent sur leur
proie.
À la différence des autres Arthropodes, les Chélicérates, notamment les araignées, ne
possèdent pas d’antennes, et le cerveau secondaire qui intègre normalement les
intrants sensoriels des antennes est absent. De plus, à l’exception des limules primitifs,
la plupart des Chélicérates sont dépourvus d’yeux composés. Cela ne veut toutefois
pas dire qu’ils sont aveugles. En général, quatre paires d’yeux simples (ocelles)
détectent la quantité de lumière et, chez certaines araignées, ces yeux sont devenus
suffisamment gros pour former des images. Au lieu de la vision, les araignées font
d’abord appel au toucher et à la sensation de vibration. Des sensilles en forme de fente
situées sur leurs pattes, de même que des soies sensorielles appelées trichobothries,
détectent toutes les formes de vibrations, depuis les pas des proies qui se déplacent sur
le sol jusqu’aux courants d’air produits par les proies qui approchent, en passant par le
son et bien entendu les mouvements des proies prises dans les toiles d’araignée.
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Anatomie externe
Le corps des Chélicérates comporte deux tagmes : un prosome antérieur et un
opisthosome postérieur (Figure 7). Tous ne s’entendent pas sur les termes à employer
pour désigner ces deux tagmes : certaines sources appellent le tagme antérieur
céphalothorax, et le tagme postérieur abdomen. Le terme céphalothorax est le plus
souvent réservé aux Arthropodes dont certains des appendices thoraciques ont rejoint
ceux de la tête pour aider à l’alimentation. Un exemple classique de céphalothorax est
celui de l’écrevisse, où les trois paires de pattes antérieures du thorax collaborent avec
les trois paires d’appendices post-oraux de la tête pour former l’appareil
d’alimentation. Dans ce cas, le céphalothorax est formé à partir de deux tagmes
différents. Chez les Chélicérates, l’embryologie et la segmentation d’origine
comportent un seul tagme antérieur portant six paires d’appendices : les chélicères, les
pédipalpes et quatre paires de pattes locomotrices. Pour cette raison, on utilise ici les
termes prosome et opisthosome dans la description des araignées et des autres
Chélicérates.
Figure 7 Vue dorsale de l’anatomie externe d’une araignée.
L’une des premières choses que vous allez remarquer chez la tarentule est son
revêtement velu formé de soies chitineuses. Tout comme la fourrure des Mammifères
ou les plumes des Oiseaux, ce tapis dense de soies crée le long du corps une couche
d’air immobile qui agit comme isolant et qui peut aussi jouer un rôle important pour
empêcher la perte d’eau par les poumons lamellaires, principaux organes respiratoires
de la tarentule. Comme on l’a mentionné plus haut, les soies sont également
sensorielles et peuvent jouer un rôle important pour échapper aux prédateurs. La
première défense de la tarentule consiste à se réfugier dans son terrier. Cependant, si la
tarentule est capturée, ses soies se détachent facilement, de sorte que le prédateur se
retrouve avec la bouche pleine de soies au lieu d’un repas. En Amérique du Nord et du
Sud, ce moyen de défense des tarentules est perfectionné par la présence sur
l’abdomen de soies barbelées et urticantes qu’elles projettent sur leurs prédateurs.
Quel Mammifère projette des poils barbelés pour se défendre de ses prédateurs?
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Si les poils urticants touchent ou pénètrent les membranes sensibles des yeux, du nez
ou de la peau, ils peuvent provoquer une réaction allant d’une légère démangeaison à
une forte réaction, notamment dans les yeux ou les voies respiratoires. Une fois
projetés, les poils urticants ne se régénèrent qu’à la mue suivante. Une tarentule «
chauve » en est donc une qui a utilisé ce moyen de défense. Comme toutes les
araignées, la tarentule possède un venin mais, mis à part de possibles réactions
allergiques, ce venin n’affecte pas les humains et vise plutôt à maîtriser les petits
insectes et vertébrés dont la tarentule se nourrit.
Le prosome
Il n’y a que peu ou pas d’indices de la segmentation primitive de la face dorsale de la
tarentule, et une carapace dorsale recouvre le prosome (Figure 7). Sous les poils de la
carapace, vous pourrez peut-être voir des dépressions et renfoncements de la surface
qui indiquent où se trouve la musculature sous-jacente de l’estomac suceur. Sur la face
dorsale, devant la carapace, repérez les quatre paires d’yeux simples disposées sur
deux rangées à la surface du tubercule optique. Certains de ces yeux regardent vers
l’avant, et d’autres vers les côtés. La position et la taille des yeux varient selon les
espèces d’araignées, mais leur nombre est presque toujours de huit. Les huit yeux de
la tarentule sont-ils tous de la même taille?
Figure 8 Vue ventrale de l’anatomie externe d’une araignée.
Six paires d’appendices sont fixés au prosome : les chélicères, les pédipalpes et
quatre paires de pattes locomotrices. La paire d’appendices la plus antérieure est
formée des chélicères qui possèdent deux segments : le crochet et le gros segment
basal qui relie la chélicère au prosome. Les glandes à venin, qui produisent un
mélange d’enzymes digestives et de neurotoxines, sont situées dans le segment basal,
et un conduit amène le venin jusqu’à un orifice situé à la pointe du crochet. On a déjà
mentionné que les tarentules sont des araignées primitives. Une autre raison de les
placer à la base de l’arborescence de l’évolution des araignées est le mode
d’articulation des chélicères avec le prosome. Chez les espèces évoluées, les crochets
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pivotent de côté vers l’extérieur, puis vers l’intérieur pour se rejoindre dans l’axe
médian du corps. Chez les tarentules, les crochets pivotent vers l’avant, et non vers les
côtés, puis vers l’arrière en direction du corps en tirant la proie pour la coincer contre
le prosome.
Derrière les chélicères, on trouve les gros pédipalpes formés de six segments.
Examinez la face ventrale des pédipalpes, là où ils sont attachés au corps de la
tarentule (Figure 9). Le gros segment basal est le coxa ou la hanche gnathobasique
qui couvre la bouche et dont les bords acérés servent à broyer et à mastiquer la
nourriture. Les Chélicérates se nourrissent en fait de liquide. Ils régurgitent sur leur
nourriture des sucs digestifs avant de la mastiquer tout en y mêlant les sucs digestifs.
Au bout d’un certain temps, ils pressent la nourriture et consomment la soupe liquide
digestive ainsi extraite. Ils répètent le processus jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien à
sucer, puis rejettent le restant de matériau indigestible. Quel nom donne-t-on à ce
type de digestion?
Figure 9 Pédipalpe d’une araignée mâle.
Les pédipalpes des araignées sont sexuellement dimorphes. Chez la femelle, ils
ressemblent aux autres pattes, à ceci près que le métatarse est absent. Chez le mâle
adulte (Figure 9), leur extrémité est prolongée par une structure complexe semblable à
un bulbe et appelée cymbium, formée de deux parties : le bulbe copulateur et le style
(ou embolus), qui fonctionnent ensemble comme un compte-gouttes. Le mâle adulte
tisse une petite toile spermatique sur laquelle il dépose une goutte de sperme par son
orifice génital. Il trempe ensuite l’extrémité du style dans la goutte de sperme et aspire
celle-ci dans le bulbe copulateur pour un usage ultérieur. Les araignées s’accouplent
face à face : le mâle introduit son style dans l’orifice génital de la femelle et dépose le
sperme dans la spermathèque (réceptacle séminal) de la femelle.
Une grande plaque sternale recouvre la face ventrale du prosome (Figure 8). Sur son
pourtour, la membrane pleurale relie la carapace dorsale et le sternum ventral. La
membrane pleurale est difficile à voir parce qu’elle entoure les articulations de la
hanche (articulations coxales) des quatre paires de pattes locomotrices. Chaque patte
locomotrice possède sept segments. Ce sont, à partir du corps : la hanche, le
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trochanter, le fémur, la patella, le tibia, le métatarse, et enfin le tarse, qui porte des
griffes.
L’opisthosome
L’opisthosome d’une araignée est composé de douze segments, qui sont toutefois
cachés par la cuticule membraneuse. Chaque segment comporte un tergite dorsal relié
par des membranes pleurales à un sternite ventral. Le premier segment de
l’opisthosome est modifié en un pédicelle, resserrement qui relie l’opisthosome au
prosome.
Les orifices des deux paires de poumons lamellaires ont l’aspect de fentes situées
derrière le deuxième sternite sur la face ventrale de l’opisthosome (Figure 8). Les
poumons lamellaires sont formés de lamelles, qui sont des feuillets de fine cuticule,
empilés comme les pages d’un livre, d’où leur nom de « book lungs » en anglais. Du
point de vue des échanges gazeux, les poumons lamellaires ne constituent pas la
surface la plus efficace pour un animal terrestre, parce que la grande surface exposée à
l’air a un potentiel important de perte d’eau. Le fait que les poumons soient logés dans
une cavité et en dessous d’une couche d’air immobile créée par les soies contribue à
minimiser les pertes d’eau. En plus de ces adaptations structurales, les araignées
minimisent les pertes d’eau en chassant la nuit et en se reposant dans un terrier le jour.
La plupart des araignées ont un seul poumon lamellaire combiné à un système
trachéal. On suppose que la trachée aide à contourner le problème de la perte d’eau
dans la respiration. Les tarentules ont conservé les deux paires originales de poumons,
et c’est une autre raison pour laquelle on les considère comme primitives. Le sillon
épigastrique creusé dans la cuticule suit les orifices de la première paire de poumons
lamellaires, et une plaque cuticulaire, l’épigyne, située entre les orifices des poumons
et devant le sillon épigastrique, contient l’orifice de l’appareil reproducteur femelle.
Au moment de l’accouplement, c’est dans cet orifice que le mâle insère la pointe de
son style pour remplir les réceptacles séminaux.
Les filières et les papilles anales sont situées à l’extrémité postérieure de
l’opisthosome. Contrairement à la plupart des araignées, qui ont au moins six filières,
les tarentules n’en possèdent que deux à quatre selon les espèces. Pourquoi les
tarentules ont-elles moins de filières que les araignées qui tissent des toiles? On
croit que les filières sont issues des appendices qui étaient à l’origine sur ces segments.
Repérez la fente anale à la pointe des papilles anales.
Tiques et acariens
Les tiques et les acariens comptent parmi les plus petits prédateurs du règne animal.
Toutes les tiques se nourrissent de sang, surtout de Mammifères, mais on sait qu’elles
s’attaquent à pratiquement tous les Vertébrés terrestres. Les acariens sont aussi des
prédateurs mais, contrairement à tous les autres Chélicérates, certains acariens se
nourrissent de la sève de plantes. Chez les tiques comme chez les acariens, la seule
caractéristique des Chélicérates qui soit visible est la présence de quatre paires de
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pattes; la division habituelle du corps en un prosome et un opisthosome est absente, et
aucune segmentation n’est visible.
Parce qu’elles se nourrissent de sang, les tiques sont des vecteurs d’un certain nombre
de maladies, dont la fièvre pourprée des Montagnes Rocheuses et la maladie de Lyme.
Les tiques se mettent à l’affût de leurs hôtes dans des graminées ou en hauteur dans
des branches d’arbre. Dès qu’elles détectent un dégagement de chaleur corporelle et de
dioxyde de carbone, elles se laissent tomber de la végétation et se fixent sur leur hôte.
De nombreux randonneurs et campeurs sont au courant des pluies de tiques qui
tombent à certaines époques de l’année, ainsi que de la nécessité de vérifier la
présence de tiques à la fin de chaque journée passée dans la nature.
Les acariens sont plus petits que les tiques et, bien que certains d’entre eux puissent
transmettre des maladies, ils en sont rarement la cause. La gale toutefois résulte d’une
infection par des acariens. Les acariens sont des prédateurs importants des Insectes. Ils
rampent dans leur système trachéal et le percent pour se nourrir de leur hémolymphe.
Récemment, les abeilles et d’autres pollinisateurs ont connu une baisse spectaculaire
de leur population, et cela a été attribué en partie à un acarien devenu résistant aux
produits chimiques utilisés comme pesticides dans des ruches commerciales. Les
acariens sont également d’importants prédateurs de la faune microscopique des sols, et
d’autres espèces se nourrissent de la sève de plantes qu’elles sucent.
Lames préparées – Tique Dermacentor ou Ixodes
Ces deux espèces permettent d’observer les principales caractéristiques des tiques. La
principale différence entre les deux est que Dermacentor a des yeux sur les côtés du
scutum. Chez les deux espèces, le corps est aplati dans le sens dorso-ventral, et la
subdivision habituelle entre le prosome et l’opisthosome associée aux Chélicérates est
Figure 10 Vue dorsale de l’anatomie externe d’une tique.
pratiquement absente. Au lieu de cela, on distingue à l’avant le capitulum
(gnathosome) portant les pièces buccales et, à l’arrière, l’idiosome auquel sont fixées
quatre paires de pattes locomotrices.
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Le capitulum
La partie antérieure du corps s’appelle le capitulum et est formée de trois parties
(Figure 10). La première est difficile à voir, mais la deuxième, qui porte les
chélicères, et la troisième, qui porte les pédipalpes, sont faciles à identifier. Le
capitulum est relié à l’idiosome par la base capitulaire (ou basis capituli), qui forme
un anneau cuticulaire et s’insère dans un sillon de la partie antérieure de l’idiosome.
Deux régions de la surface de la base capitulaire sont couvertes de petits pores, d’où
leur appellation d’aires poreuses. Les pores sont les orifices des glandes dermiques
situées en dessous.
Les tiques se nourrissent de sang. L’hypostome et les chélicères se combinent pour
former une paille à boire qui pénètre dans la peau de l’hôte. Repérez l’hypostome en
dessous des chélicères. L’hypostome est une extension du sternum et, si vous regardez
attentivement, vous allez voir à sa surface des dents orientées vers l’arrière. Pourquoi
les dents sont-elles orientées dans cette direction? Les chélicères sont en forme
d’aiguille et comportent deux segments. Les pédipalpes comportent quatre segments et
forment les côtés des pièces buccales perceuses. Les deuxième et troisième segments
des pédipalpes ont sur leur face interne un sillon qui entoure l’hypostome et les
chélicères. Le quatrième segment (le plus distal) est très petit et situé à la pointe du
pédipalpe.
Figure 11 Vue ventrale de l’anatomie externe d’une tique.
L’idiosome
Le reste du corps est l’idiosome, formé par la partie postérieure du prosome original et
par l’ensemble de l’opisthosome. Chez le mâle, le scutum durci recouvre toute la
surface de l’idiosome, alors que chez la femelle, il n’en couvre que la partie antérieure.
Le mâle et la femelle se nourrissent de sang, mais la femelle reste fixée plus
longtemps sur son hôte et consomme davantage de sang; son scutum plus petit lui
permet de faire de plus gros repas. Le bord de l’idiosome est découpé de onze festons
rectangulaires. Une paire d’yeux simples se trouve près des bords antérieur et latéral
du scutum. Chez Ixodes, les yeux sont imbriqués dans des tissus mous, à peu près au
Ecdysozoaires I: Les Crustacés et les Chélicérates © Houseman – page 146
même emplacement. Vers le milieu de la face dorsale, l’idiosome comporte deux
ouvertures, les fovéas, par lesquelles sont libérées les sécrétions des glandes fovéales.
L’unique orifice génital est sur la face ventrale (Figure 11), près de la ligne médiane
antérieure et derrière la plaque génitale. L’anus est au centre de l’idiosome, près de
l’extrémité postérieure de la plaque anale. La plaque anale semble être formée de
deux plaques à cause de la présence d’un sillon. Le pore génital, l’anus et la plaque
anale sont absents de la nymphe immature. Les stigmates et les plaques spiraculaires
qui les entourent sont derrière la dernière paire de pattes.
Les pattes de la première paire possèdent sept segments. Le tarse situé à l’extrémité
de ces pattes comporte un organe en forme de coupe appelé organe de Haller. Cet
organe sensoriel permet à la tique de repérer un hôte approprié pour se nourrir. Les
autres pattes sont dépourvues d’organe sensoriel et possèdent une articulation
tarsienne supplémentaire, et donc un huitième segment.
Lames préparées – acariens
Comme on l’a mentionné plus haut, les acariens sont microscopiques et constituent un
groupe d’animaux extrêmement diversifié. À cause de leur petite taille, on ignore le
nombre d’espèces d’acariens. Certains estiment que plus d’un demi-million d’espèces
restent à identifier. Cela ne serait pas surprenant, puisque les acariens sont devenus en
grande partie des ectoparasites spécialisés des Insectes, qui constituent le groupe le
Figure 12 Anatomie externe d’un acarien folliculaire (A) et d’un acarien de la gale (B).
plus diversifié d’animaux terrestres.
La partie antérieure du corps des acariens est le gnathosome, qui porte les pièces
buccales. La partie postérieure est divisée en deux parties : le propodosome (à
Ecdysozoaires I: Les Crustacés et les Chélicérates © Houseman – page 147
l’avant), qui porte les deux premières paires de pattes locomotrices, et le
métapodosome (à l’arrière) (Figure 12). La séparation entre les deux est généralement
marquée par le sillon séjugal creusé dans la cuticule. Chez certaines espèces, ce sillon
est absent. Il n’y a que peu ou pas de signes de la segmentation primitive de ces
régions. Repérez les chélicères, semblables à des aiguilles, qui servent à pénétrer les
tissus des organismes dont l’acarien se nourrit, et les pédipalpes, à l’aspect de pattes,
qui ont une fonction sensorielle en plus de permettre à l’acarien de se fixer sur sa
source de nourriture. Chez de nombreux acariens, la première paire de pattes est
également sensorielle et fonctionne comme une paire d’antennes. Ces acariens se
déplacent donc sur six pattes, d’où le risque de les confondre avec des insectes.
Même si certains acariens ont une cuticule entièrement rigide, la plupart ont un corps
mou doté de plaques cuticulaires qui entourent les orifices respiratoires (stigmates) et
l’anus. De nombreuses espèces ont également sur leur face ventrale des plaques
sternales entre les pattes. Le corps des acariens est souvent couvert de soies qui ont
une fonction mécanoréceptrice et chimiosensorielle.
Diversité des Arthropodes
Les Arthropodes sont un groupe d'animaux très abondants et diversifiés. Les
Arthropodes représentent entre 75 et 80 % de toutes les espèces animales. En dépit de
leur grand nombre, ils possèdent de nombreuses similarités. L'exosquelette, qui est
composé de cuticule inerte sécrétée par l'épiderme sous-jacent, est un des facteurs
expliquant le succès des Arthropodes. On a dit que le développement de la cuticule par
les Arthropodes était aussi important à leur succès que le développement du plastique
l'a été pour les humains. Alors que cela peut sembler être une exagération repensez-y
pendant que vous observez les différents animaux pendant cette période de laboratoire.
Souvenez-vous qu'ils ont tous été fabriqués avec cette cuticule qui a été sculptée et
moulée pour former les fines pièces buccales d'un moustique tout comme la robuste
pince du homard, sans oublier les ailes délicates des insectes.
Les Arthropodes et les représentants de plusieurs autres embranchements, dont les
Nématodes, possèdent une cuticule de chitine. La présence de cette cuticule élimine la
possibilité d’avoir des cils et la combinaison de l’absence de cils et d’une cuticule de
chitine remplacée par la mue est caractéristique des Ecdysozoaires. Les Arthropodes
se distinguent des autres Ecdysozoaires par la présence des yeux composés, d’un cœur
tubulaire dorsal, d’appendice articulés, et de tagmes. Parmi les Arthropodes, la perte
des yeux composés, le nombre de paires d’antennes, le type de pièces buccales
(mandibulates ou chélicérates) et le type d’appendices (uniramés ou biramés) sert à
départager les Uniramés des Crustacés et des Chélicérates. Ce sont ces caractères que
vous observerez lors de votre survol de la diversité des Arthropodes.
Il y a quatre sous-embranchements d'Arthropodes: Trilobitomorpha, Crustacea,
Chelicerata et Uniramia. Les Trilobites ont maintenant disparu et seules les trois autres
sous-embranchements subsistent encore aujourd'hui. Examinez les spécimens des
différents types d'Arthropodes et déterminez à quelle classe ils appartiennent. ServezEcdysozoaires I: Les Crustacés et les Chélicérates © Houseman – page 148
vous des critères suivants. Les Chélicérates se nourrissent à l'aide de leurs chélicères,
ont des membres uniramés, et n'ont ni antennes ni yeux composés. Les Crustacés se
nourrissent à l'aide de leurs mandibules, ont des appendices biramés, deux paires
d'antennes et des yeux composés. Les Uniramés se nourrissent en se servant de leurs
mandibules, marchent à l'aide de pattes uniramées, ont une paire d'antennes et une
paire de yeux composés.
Compte tenu de la simplicité relative de leur architecture, la diversité des Arthropodes
est renversante. Observez l’ensemble des spécimens mis à votre disposition et classezles en Crustacés, Uniramés ou Chélicérates. Soyez attentif! La cuticule des
Arthropodes peut être façonnée en une multitude de formes et vous devrez donc
examiner de près vos spécimens pour observer les caractéristiques ancestrales de
chaque groupe.
Ecdysozoaires I: Les Crustacés et les Chélicérates © Houseman – page 149
Ecdysozoaires I: Les Crustacés et les Chélicérates © Houseman – page 150

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