LA REVUE DU CLUB DES PROPRIÉTAIRES DE GRANDS CRUS

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LA REVUE DU CLUB DES PROPRIÉTAIRES DE GRANDS CRUS
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VIGNOBLES INFOS
LA REVUE DU CLUB DES PROPRIÉTAIRES DE GRANDS CRUS
S
SOMMAIRE
VIGNOBLES INFOS
LA REVUE DU CLUB DES PROPRIÉTAIRES DE GRANDS CRUS
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ERR ATUM
Merci à l’un de nos
fidèles lecteurs de
nous avoir rappelé
fort justement que
« L’ennui naquit un
jour de l’uniformité »
est un vers d’Antoine
Houdar de La Motte
et non de Jean de La
Fontaine (Vignobles
Infos n° 37, rubrique
Débat, page 5).
ÉDITO
DÉBAT
Le vin, addiction ou art de vivre ?
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5
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ACTUALITÉ
CULTURE
Du web à la vigne
PORTFOLIO
Le tri de la vendange
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10
L’ŒIL
ZOOM :
Sauternes
Nicolas Épaulard,
Guillaume Chambost, agents en vin
FIGURES :
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LA MAIN
MÉTHODE : sélections massale et clonale
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Château Petit Beauséjour
à Pomerol rejoint le fonds LFP
Grands Vignobles de France
LES PAPILLES : Château-Chalon
DÉGUSTATION : 4 vins, 4 styles
PATRIMOINE :
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15
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ACCORDS : La Table
BALADE : le
de Guy
village de Château-Chalon
ABÉCÉDAIRE
É
ÉDITO
TOUS POUR
LE VIN !
Patrick Ribouton
O
r g a n i s é e conjointement par le magazine
Vignobles Infos, vous le savez bien, est à sa manière un fervent
viticole « Vin & Société », la première édition de
« Débat », plus tranchée que d’habitude, prend fait et cause. En
Le Point et l’association de défense de la filière
« Vino Bravo » s’est tenue à Bordeaux le 30 novembre dernier.
Une journée de débats ouverte à tous où professionnels, journalistes, sociologues, économistes, scientifiques se sont retrouvés
pour parler de vin, de patrimoine, de dégustation, d’éducation, de
santé, d’art de vivre, bref de culture !
Une initiative plus que salutaire en France. Car, bien qu’étant sa
terre d’élection par excellence, le vin est stigmatisé par la loi Évin
depuis 1991 et considéré comme un alcool lambda. Récemment,
une pétition sur le web de 500 000 personnes a fait reculer le
gouvernement Ayrault qui voulait durcir encore la loi en interdi-
défenseur du patrimoine viticole. Dans ce numéro, notre rubrique
cette fin d’année, nos pages font aussi la part belle aux grands
liquoreux du Sauternais, aux mariages culinaires avec le rare vin
jaune de Château-Chalon. Elles se penchent aussi sur le métier
d’agent en vins et nous rappellent qu’une année météo compli-
quée comme 2013 ne donnera pas forcément des vins médiocres.
Vignobles Infos, c’est notre manière à nous de dire haut et fort
« Vino Bravo » !
Bonne lecture et belles fêtes de fin d’année !
sant de parler du vin positivement dans les médias !
N’hésitez pas à nous faire part de vos réactions :
Email : [email protected]
Le Club des Propriétaires de Grands Crus,
173 Bd Haussmann, 75008 Paris
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DÉBAT
LE VIN EN FRANCE,
ADDICTION OU ART DE VIVRE ?
Impossible de nier que la dépendance à l’alcool est un
fléau. Mais impossible aussi d’accepter que le vin, c’est
juste de l’alcool. Alors, loi Évin, loi en vain ?
Plaidoyer contre.
« Tapas : n’essayez pas de le prononcer la bouche
pleine » : voilà le slogan qu’on pouvait lire sur une page de
publicité « Foods and Wines from Spain » parue dans M le
Magazine du Monde le 2 novembre dernier. Le visuel ? Un bar
à vin qu’on devine chic et chaleureux, des trentenaires heureux
de se retrouver autour de bons produits et de bons verres, un
serveur en train de prendre une commande, pas de message
sanitaire « Sachez apprécier et consommer avec modération ».
Une loi enfin ?
Une première question se pose d’emblée : comment la diffusion
de cette promotion a-t-elle pu être autorisée chez nous ? Une
deuxième, conséquente de la précédente, tombe : la France (ou
plutôt ceux qui nous gouvernent) aime-t-elle son patrimoine ?
Car, nous sommes bien tous d’accord, le vin est profondément ancré dans notre culture. La réponse est facile : non. En
Espagne, la « Ley de la Vina y del Vino » a été votée il y a
déjà 10 ans. Parmi l’exposé des motifs, celui-ci : « Le vin et la
vigne sont inséparables de notre culture ». Roland Courteau,
un sénateur français, a déposé récemment une proposition de
loi en un seul et unique article : « Le vin, produit de la vigne,
fait partie du patrimoine culturel et gastronomique protégé, en
France ». On peut toujours rêver…
En France, pays producteur de vin, l’alcoolisme occupe l’inconscient collectif depuis fort longtemps. À l’ère industrielle
du xixe siècle, il est passé des couches aisées de la population,
consommatrices de vins fins, aux couches prolétaires buveuses
de « gros rouge », devenant un marqueur social péjoratif chez
les défavorisés. Aujourd’hui, l’alcoolisme n’est pas du tout perçu de la même manière selon que vous êtes riche ou pauvre,
jeune ou vieux, citadin ou paysan, homme ou femme. Mais peu
importe. Pour ses dénonciateurs, alcoolisme mondain, antisocial, occasionnel, fonctionnel… Au secours, tous les saouls
sont dans la nature !
Leonetto Cappiello, affiche éditée par le ministère de l’Agriculture en 1933.
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Les chiffres à la lettre ?
En 1995, Catherine Hill, de l’Institut Gustave Roussy, à Villejuif, annonçait dans une étude le chiffre de 45 000 décès
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DÉBAT
annuels dus à l’alcool. Récemment, la même Catherine Hill
nous apprend qu’en 2013, l’alcool tuera 49 000 personnes soit
5 000 de plus. Les ironiques diront que la loi Évin est d’une
redoutable efficacité, les sérieux argueront que la population a
augmenté donc la consommation aussi.
Tout de même, on peut s’interroger, comme l’a fait Libération,
sur la manière dont cette dernière étude a été réalisée : en ignorant totalement la recherche médicale et les soins dispensés
pour ne s’appuyer que sur les données 2009 de la mortalité en
France et que sur des entretiens réalisés par l’Insee en 20022003. Croisons ces chiffres avec ceux de la consommation de
vin en France, passée en 50 ans de 150 litres en moyenne par
personne à 50 litres. Ajoutons que les Français sont les premiers
buveurs au monde de whisky. Précisons que leur consommation de vodka a augmenté de 47 % depuis 2007. Allez, encore
un pour la route des statistiques : parmi les « cinq millions de
Français ayant un problème avec l’alcool » sont
comptés tous ceux qui avouent ne pas pouvoir
se passer d’un verre de vin au cours du repas
(voir le test édifiant sur le site www.alcoolinfoservice.fr de l’Institut National de Prévention
et d’Éducation pour la Santé).
L’alcool est-il une marque valise, sans distinguo entre qui boit quoi, où et quand ? Que
faut-il penser d’un « Rapport de la mission sur
la prévention et la lutte contre l’alcoolisme »,
rédigé par un alcoolique repenti, Hervé Chabalier ? Que penser du « French paradox » ou
effet bénéfique du vin, attesté par les experts
américains et « oubliés » par nos chers médecins français ? Bref,
beaucoup de questions font que le débat paraît bien tronqué.
« Avons-nous beaucoup évolué dans ce domaine de l’alcool
lorsque nous observons des professeurs de morale, désormais
médecins quand ils étaient prêtres, nous proposer à l’aube du
xxie siècle de manier l’interdit plutôt que la raison », déclarait
en 1991 Roland Feredj, alors Secrétaire Général du Comité
Interprofessionnel du Vin de Bordeaux, à propos de la loi Évin.
Il ajoutait : « Les médecins ou plutôt les fameux sages dont
notre pays raffole, ont quitté leur rôle de thérapeutes pour revêtir l’habit des censeurs, confondant la santé publique et la médecine, négligeant le travail des sociologues, des économistes et
des philosophes sans doute plus habilités qu’eux à explorer les
données d’un problème par définition complexe ».
Des propos encore brûlants d’actualité…
Et le vin dans tout ça ?
« Quand la France reçoit, quand la France se distingue », c’était
le titre d’un publi-reportage de Maîtres Argentiers, les maison Ravinet d’Enfert et SaintHilaire, paru en 1986. On y célébrait les grands
repas, la vaisselle fine, la belle orfèvrerie, l’art
de vivre à la française. Deux photographies
de belles tables garnies de mets délicats et de
verres pleins appuyaient le message. Incriminer l’alcool est une chose, accuser le vin en est
une autre. En associant si grossièrement vin et
alcool, nos « élites » sont tout simplement en
train de tuer le vin. L’alcool, c’est juste un produit. Le vin, c’est une histoire, un passé, une
culture. Il est élaboré selon des usages « locaux,
loyaux et constants ». Non, le vin n’est pas un fléau national
mais bien une grande cause nationale, économique, sociologique et culturelle 1 ! Plutôt que de faire la guerre au vin, mieux
vaudrait en faire un vrai sujet d’éducation et de socialisation.
Apprendre à bien boire plutôt qu’interdire ou punir. « Nous
avons besoin du vin parce qu’il fertilise la plus féconde de nos
zones d’ombre, la générosité. Le vin, produit social par excellence vit de la solidarité. Le vin n’est pas seulement mesure,
il est LA mesure par excellence », écrivait il y a trente ans
Raymond Dumay. Son livre La mort du vin 2, réédité en 2006,
est à relire de toute urgence. ■
« L’alcool estil une marque
valise, sans
distinguo entre
qui boit quoi, où
et quand ? »
La médecine ou la morale ?
Qui pourrait nier que l’alcool nuit gravement à la santé ? Personne, bien sûr. Une consommation régulière et excessive
d’alcool engendre des dégâts irréversibles tant sur un plan physiologique que sur un plan psychologique. Du coma éthylique
comme effet immédiat de l’ivresse aux complications digestives
et cardio-vasculaires, sans oublier les risques accrus de cancers
et de syndrome de Korsakoff pour la dépendance à long terme :
oui, l’alcool peut tuer, oui le corps trinque pris dans l’engrenage
de l’alcoolisme. Qui pourrait nier la nécessité, voire l’obligation
d’une politique de prévention et d’éducation pour faire évoluer
les mentalités ? Personne, bien sûr. Elle existe d’ailleurs mais le
hic, c’est qu’au travers de la loi Évin, elle repose sur l’interdit, la
tolérance zéro et la stigmatisation.
1. La première édition de Vino Bravo s’est tenue le 30 novembre
dernier à Bordeaux. Pour tout savoir sur cette journée de débats :
www.vinetsociete.fr/evnements.
2. La mort du vin, Raymond Dumay, éditions La Petite Vermillon
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A
ACTUALITÉ
2013
U
UN MILLÉSIME COMPLEXE
FAIT-IL FORCÉ MENT
UN M AUVAIS VIN ?
ne chose est certaine cette année, la récolte
des vignes. Taille adaptée, bonne répartition des
sera faible, voire très faible et pratiquement
grappes sur le ceps, drainage et travail des sols,
partout en France. Si le printemps a été géenherbement maîtrisé, composts organiques, trainéralement froid et pluvieux, retardant la pousse
tements ciblés, surveillance du feuillage : de mars
de la vigne, juillet et août ont été des mois chauds,
à septembre, pas une semaine ne doit échapper
parfaits pour la concentration des grappes. Mais
à la vigilance des vignerons et de leurs équipes.
Ensuite, la date des vendanges est cruciale.
l’été indien espéré n’est pas arrivé en septembre :
En Alsace, les rieslings vendangés avant la mià partir du 15, les pluies sont tombées sur toute la
octobre ne feront sans doute pas de SGN (sélection
France, épargnant peu de régions. La plupart des
de grains nobles) mais ils feront de bons vins secs.
vignerons ont rentré une demie récolte par rapBordeaux a retrouvé des vendanges d’octobre,
port à une année dite « normale » au regard
comme il y a trente ans. Tout s’est joué entre
des rendements autorisés par les appella•
le 2 et le 15 octobre. Enfin, le tri des raisins
tions. Certains vignobles sont particulièrepermettra de choisir les meilleurs raiment concernés après avoir subi aléas
Si la
sins, sains et mûrs. Chez Alex Gamclimatiques – grêle, pluie, froid – et
matière
bal à Santenay ou chez Éric Janin
leurs conséquences – floraison tarpremière est bonne,
en Moulin-à-Vent, un premier tri a
dive, coulure des grappes, mildiou,
le vin a toutes les
oïdium. C’est le cas par exemple en
chances d’être
été effectué à la vigne : les coupeurs
Bourgogne, sur la Côte de Beaune, sur
bon.
avaient mission de ne récolter que les
la rive droite du Bordelais en Côtes de
grappes entières et saines. Un deuxième
Castillon, dans le Sud-Ouest à Cahors, dans
tri sur tapis roulant s’est déroulé à l’entrée de
•
la Loire à Vouvray. Faut-il pour autant parler de
la cave : une dizaine de personnes ont enlevé
mauvais millésime ? Une petite quantité donne-tles grains abîmés ou pas assez mûrs. À Château
Cheval Blanc, sur une équipe de 45 vendangeurs,
elle forcément une qualité médiocre ? Non ! On ne
le répètera jamais assez. Si la matière première est
20 étaient affectés au tri ! Une fois les cuves remplies
bonne, le vin a toutes les chances d’être bon. Dire
de beaux raisins, les fermentations alcooliques et
que tout se joue à la vigne n’est donc pas usurpé.
malolactiques ont toutes les chances de se dérouler
Tout est donc, une fois de plus, affaire de métier et
dans de bonnes conditions. Ensuite, c’est la patte
de maîtrise. L’observation attentive, le suivi régudu vigneron qui fera la différence. Et là, on ne parle
lier, les bonnes interventions et les bons gestes aux
plus de qualité mais de style. Et ça c’est une autre
histoire, qui n’a pas grand-chose à voir avec la nobons moments : voilà ce qui fait la différence sur
tion de millésime.
un millésime complexe. Il y a d’abord la conduite
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C
C U LT U R E
DU WEB À L A VIGNE
Le vin est à la mode sur la Toile. Apprenti vigneron,
créateur de cuvées, achat de pieds de vignes, tout est
possible. Pour particuliers ou entreprises, les sites
internet proposant de plonger dans le monde du vin
font recette. Idée cadeau, idée séminaire, Vignobles
Infos a sélectionné pour vous les meilleurs.
• L A RÉFÉRENCE
www.vinivwine.com
Anciennement Crushpad Bordeaux, le concept a été créé en
2004 aux États-Unis par Mickael Brill, un informaticien de
la Silicon Valley. L’idée fut simple et innovante : proposer une
vinification personnalisée à des passionnés souhaitant créer
leurs propres vins. En 2009, Crushpad s’est implanté à Bordeaux offrant la possibilité d’élaborer sa propre cuvée au sein de
neuf prestigieuses appellations dont Margaux, Pauillac et SaintÉmilion, en réunissant les châteaux et l’œnologue-conseil Éric
Boissenot. En 2012, Cruhspad est devenu Viniv et s’est associé
au prestigieux cru classé Château Lynch-Bages. Un chai de vinification spécial a été installé dans le village, complétant ainsi
l’offre œnotouristique haut de gamme de Bages. Côté américain, plusieurs vins nés ainsi ont obtenu de très bonnes notes par
Robert Parker. Un objectif à atteindre côté français.
• L E PETIT DERNIER
• L ES OUTSIDERS
Créé à Lyon en 2012 par Géraldine Gossot. Petite-fille de viticulteurs, directrice marketing dans l’agro-alimentaire, elle a
tout lâché pour un retour aux sources. L’offre qu’elle propose est
sans esbrouffe et complète, misant sur la proximité de vignobles
rhône-alpins (Beaujolais, Rhône, Coteaux du Lyonnais et bientôt Savoie et Bourgogne). À noter une « offre entreprise » originale qui place le vin comme stimuli parfaitement adapté aux
enjeux de management et de stratégie.
Deux sites pour une offre similaire : louer un vignoble le temps
d’un millésime ou d’un week-end, acheter un PassCovigneron
ou participer à des Ateliers Vignerons. Vous pourrez entrer dans
la vie d’un domaine, participer à presque toutes les étapes du
vin, créer votre cuvée et votre étiquette. Les programmes sont
possibles presque partout en France avec des domaines-partenaires présents dans la plupart des grandes régions viticoles.
www.secrets-de-bacchus.com
www.covigneron.com
www.mesvignes.com
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P
PORTFOLIO
À COR
ET À TRI…
S’il y avait une étape à ne pas rater cette
année, c’est bien le tri de la vendange. Pluies,
grêle, maladies ont frappé les vignobles à peu
près partout, engendrant une floraison et une
maturation difficiles. Une fois encore, ce sont
ces années compliquées qui nécessitent un
travail sur-mesure. Le bon vin, et il y en aura,
naîtra uniquement des bons gestes.
Le tri des raisins, c’est celui qui change tout,
particulièrement en 2013.
CHÂTEAU CLIMENS
Pour produire un grand Sauternes, plusieurs tris sont
effectués dans chaque rangée. Le raisin est cueilli grain
par grain pour ne choisir que le meilleur.
6
P
PORTFOLIO
CHÂTEAU MEYNEY
CHÂTEAU SOUTARD
Concentration, dextérité, délicatesse : les mains
féminines n’ont pas d’égales pour ce travail d’expertise.
Le tri implacable du laser ne garde que des billes
noires parfaites.
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Œ
L’ Œ I L
zoom
SAUTERNES,
DE L’OR EN BOUTEILLE
© HAUT RELIEF / CIVB
Le brouillard, l’humidité et la pourriture donnent le liquoreux le plus célèbre au monde. Explications.
En servant un verre d’Yquem à François Mauriac,
vous aviez l’assurance de faire tomber sa rigueur morale. L’écrivain bordelais devenait le plus épicurien des hommes, il voyait
dans ce grand liquoreux « du soleil réellement présent dans
chaque grain de chaque grappe ». Solaire convient en effet parfaitement au sauternes. C’est de l’or en bouteille.
Bactérie et pourriture
Pourquoi alors avoir conservé ce nom dont l’étymologie signifie « pourri » ? Parce que sans pourriture, il n’y aurait pas de
sauternes, juste des vins blancs secs. Pour devenir ce vin absolument unique, le raisin a besoin du Botrytis Cinerea, un
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champignon microscopique responsable de la pourriture dite
« noble ». Il se dépose sur les grains, les colonise en laissant
apparaître de minuscules taches, puis il s’incruste sous la peau
des baies sous la forme de filaments mais sans la blesser et sans
faire couler le jus. Le Botrytis « commence alors à se transmuer, à opérer une véritable alchimie du jus, en le débarrassant
d’une partie de son eau et en se nourrissant du sucre et des
éléments acides. Le résultat pratique est le suivant : beaucoup
moins d’acidité et de sucre, mais ce sucre se trouve concentré par l’évaporation de l’eau. Il reste en réalité beaucoup plus
de sucre dans un jus diminué. » (Alexandre de Lur-Saluces,
ancien propriétaire du Château Yquem, propriétaire du Châ-
Œ
L’ Œ I L
zoom
teau de Fargues). Mais ce serait trop facile si le champignon
magique se retrouvait seul sur la grappe ! À vrai dire, il est
fort mal accompagné. Car d’autres champignons apportent,
eux, une pourriture pas noble du tout, capable de décimer une
récolte. Le tri est donc crucial. Un travail de fourmi consiste
à cueillir les grappes à point, à laisser prospérer celles impeccables, à ôter les abîmées. Selon les années, deux, trois, quatre
passages voire bien plus, sont nécessaires. À l’image des couturières pour la haute-couture, seules les petites mains des
vendangeurs sont capables de
fournir ce travail surmesure. La réussite finale
du vin est à ce prix, au sens
propre comme au figuré. Évidemment, une telle qualité se
fait aux dépens de la quantité.
« le marquis de LurSaluces aurait exigé
qu’on l’attende pour
démarrer les vendanges
qui donnèrent un vin
exceptionnel. »
Brouillard et histoire
La nature est souveraine
pour produire le liquoreux.
Sans botrytis, pas de sauternes. Sans une climatologie particulière, pas de botrytis. À
l’évidence, Sauternes, Barsac, Bommes, Preignac et Fargues,
les villages phares de l’appellation, bénéficient d’un micro-climat alliant chaleur et humidité. La fraîcheur du Ciron, petite
rivière qui prend sa source dans les Landes et qui traverse ces
villages, favorise des brouillards d’automne propices à la naissance et la croissance du botrytis. À la mi-août, une brume
se répand souvent sur les hauteurs de l’appellation et ceux qui
viennent de Bordeaux sont surpris quand ils arrivent à Sauternes, ils quittent le soleil pour plonger soudain dans le brouillard. Remarquons cependant que des années sans brouillard
ont donné aussi de belles récoltes botrytisées. Car la nature
même du sol, argilo-calcaire mêlé à des graves, et du sous-sol,
riche en poches d’argile, contribue aussi au développement de
la pourriture noble. Le paysage joue aussi un rôle déterminant
dans la production des liquoreux. Le Sauternais se niche sur les
coteaux de la rive droite du Ciron, sur un terrain très accidenté,
entre des collines douces exposées au soleil et d’étroits vallons
avec des prairies.
Si le micro-climat et la géographie, alliés aux cépages classiques
du Bordelais (Sauvignon, Sémillon et Muscadelle) permettent
naturellement l’élaboration du sauternes, c’est bien à la faveur
de l’histoire que l’appellation doit sa reconnaissance. En 1847,
le marquis de Lur-Saluces, retardé en Russie, aurait exigé qu’on
l’attende pour démarrer les vendanges qui donnèrent un vin
exceptionnel. En 1936, Monsieur Focke, négociant d’origine
allemande, aurait attendu le soleil après d’abondantes pluies
d’automne. Le vin obtenu aurait conquis les gens du Château de La Tour Blanche. Légendes ou non, il n’en reste pas
moins que, selon l’écrivain du vin Claude Peyroutet, « des vins
liquoreux étaient commercialisés dans la région dès la fin du
xvie siècle et que Thomas Jefferson, futur président des ÉtatsUnis, commandait dès 1787 du sauternes ».
Poularde et sauce thaï
Les sauternes ont du mal à s’imposer à table, on se demande
bien pourquoi alors que nos palais sont formatés au goût sucré.
Foie gras, roquefort, les carcans culinaires ont la vie dure. Leur
salut vient discrètement mais sûrement de l’Orient. Essayez une
poularde rôtie avec une sauce thaï, accompagnée d’un Château
Climens, Sudiraut ou Rieussec. À Noël, servez un Château de
Fargues pour accompagner un homard en cocotte avec des raisins de Corinthe. Ouvrez un Château Roumieu-Lacoste avec
des figues rôties. Les combinaisons sont infinies… ■
9
Œ
L’ Œ I L
figures
« NOUS AIMONS TOUS LES VINS ET
PEU IMPORTENT LES CHAPELLES ! »
NICOLAS ÉPAULARD , installé à Lyon,
a créé Vinister en 2008. GUILLAUME
CHAMBOST le rejoindra bientôt. Pour eux,
le métier d ’agent, c’est être au plus près du
vin et des vignerons.
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Œ
L’ Œ I L
V ignobles I n fos : Vous auriez pu être cavistes ou sommeliers dans une grande maison. Pourquoi avoir choisi ce métier
de l’ombre que peu de gens au fond connaissent ?
Nicolas Épaulard : Métier de l’ombre certes, mais qui me
permet d’être au plus près des vignerons. Le métier d’agent,
tel que je l’imagine, consiste à les suivre quasiment non stop, à
échanger avec eux sur leurs pratiques. Je vais les voir plusieurs
fois dans l’année à des moments-clés de leur travail. Ces jeunes
vignerons ou vigneronnes que j’ai découverts sont, je n’en doute
pas, les noms incontournables de demain. Pour travailler ainsi,
être dans l’exacte continuité de leur travail, les accompagner
dans leur démarche, les aider à vendre, développer leur réseau
de distribution, je ne voyais que le métier d’agent.
Guillaume Chambost : Drômois comme Nicolas, j’ai grandi
avec les vins du Rhône et notamment ceux de Jean-Louis
Chave. Avec quelques copains, j’avais créé une association gastronomique et les week-ends, on écumait les restaurants étoilés.
Puis j’ai suivi une formation à la dégustation à l’université du vin
de Suze-la-Rousse. J’ai rencontré Nicolas cette année. Grandes
tables et vignerons, c’était tout ce que j’aimais. J’ai découvert un
métier passionnant. Rejoindre bientôt Vinister est une évidence.
Quand on est agent, faut-il se spécialiser dans un style de vin ?
Certains le font. Ils sont reconnus comme spécialistes des vins
bio ou d’une région en particulier. Nous non. Nous aimons tous
les vins et peu importent les chapelles. Ce qui compte dans nos
choix de vignerons, c’est d’abord l’humain qui est à la base de
toute démarche. Nous aimons ceux qui s’interrogent, qui sont
capables de se remettre en question. Le vigneron qui se lève
quatre fois pendant la nuit en période de vinification pour surveiller une de ses cuves qui l’inquiète, forcément ça nous parle !
À qui vendez-vous ?
Nous avons fait le choix de cibler essentiellement les bonnes
tables lyonnaises : étoilées et bistronomie, à peu près à part
égale. Quand les vins sont bons, les chefs et les sommeliers
achètent et sont fidèles. Comme nous représentons aussi des
grands noms du vignoble français, les convaincre de s’intéresser
à des débutants inconnus est plus facile. Et pour nos petits protégés, c’est un formidable vecteur de notoriété. Actuellement,
en plus de nos achats en direct des domaines, nous gérons un
stock d’environ 5 000 bouteilles.
figures
C’est plutôt rare un stock chez un agent ?
Oui ! Il faut le porter financièrement et avoir un lieu parfaitement adapté au stockage. Mais c’est aussi une force que nous
mesurons régulièrement. Avoir un stock de bouteilles, c’est
pouvoir en effet répondre très vite à une demande particulière
et urgente des restaurateurs. Pour Noël 2011 par exemple,
Têtedoie, deux étoiles au Guide Michelin, n’avait pu être livré
à temps en champagne, à cause des chutes de neige. En une
heure, j’ai livré 240 belles bouteilles.
Vinister ,
les dates clés
1975 : Naissance de Nicolas Épaulard à Romans-sur-Isère
dans la Drôme.
2003-2007 : Travaille comme directeur logistique et
approvisionnements pour le site de vente en ligne
ChâteauOnLine. Il en profite pour déguster les vins avec
l’acheteur des vins de la société. Premier déclic pour le
vin.
2004 : Il assiste Olivier Humbrech, grand vigneron
alsacien, lors d’une dégustation à l’Hôtel Meurice à Paris.
Deuxième déclic pour le vin, radical celui-ci.
2008 : Nicolas s’installe comme agent à Lyon et crée sa
société Vinister.
2013 : Vinister compte une quarantaine de domaines,
toutes régions confondues. Le portefeuille se divise
entre jeunes vignerons récemment installés, peut-être
les grands de demain, et des références du vignoble
français, un atout considérable pour entrer dans les
grandes maisons étoilées, cible prioritaire de Vinister.
2014 : Guillaume Chambost, conseil en entreprise et
amoureux du vin, lâchera son métier pour rejoindre
Vinister comme associé.
11
M
LA MAIN
méthode
PARTIR DU BON PIED
Pour planter de la vigne, le vigneron doit choisir
entre la méthode clonale ou la méthode massale.
Explication.
« Pour moi, le grand vin c’est, entre autres, la complexité donc la variété des cépages souches », déclare
Pierre Overnoy, vigneron culte du Jura. Il est vrai que, lorsqu’on
parle des critères indispensables à la qualité d’un vin, on cite
d’abord le terroir, puis la conduite des vignes ou la vinification.
Mais rarement la plantation des cépages. C’est pourtant là que
tout commence. Autrefois, les vignobles comptaient chacun
des dizaines de cépages autochtones fortement identitaires. À
la fin du xixe siècle, la crise du phylloxéra a bouleversé cette
donne. La France perdit la quasi totalité de son vignoble et de
ses cépages. La greffe de « plants locaux fins » sur des portesgreffes américains s’avéra le seul remède possible.
Depuis, deux méthodes de plantation par bouturage sont privilégiées : la sélection clonale et la sélection massale. La première donne des pieds de vigne tous identiques au pied mère.
La recherche a permis de sélectionner des banques de clones,
les meilleurs, les plus vigoureux, les plus résistants, les plus aromatiques… les plus standardisés diront les uns. La deuxième
consiste à repérer visuellement dans les parcelles les « ceps
d’élite » qui fourniront une population de greffons hétérogènes
12
et à forte typicité… imparfaits et fragiles diront les autres. Les
puristes, drôle de paradoxe, vous diront que seule la massale
donne de grands vins. Si de plus en plus de vignerons soucieux
de typicité vont prélever chez des vignerons réputés des greffons de syrah, de pinot, de cabernet etc., la plupart choisissent
les clones pour leur qualité sanitaire. De plus, en plantant
plusieurs clones sur une même parcelle, ils revendiquent aussi
une diversité d’expressions du cépage. D’une manière générale, la sélection clonale serait mieux adaptée à une production
importante de bons vins et la massale conviendrait mieux à une
production limitée de vins originaux. Plutôt que de parler de
sélection clonale ou massale, mieux vaudrait parler de la naissance d’un cru dans un lieu donné. Pour Jean-Claude Berrouet,
son vinificateur, « Château Pétrus est né du génie du vigneron
qui a su trouver la parade au phylloxéra. Dès 1880-1890, le
paysan observateur et plein de bon sens sait qu’il faut planter
du merlot et seulement du merlot. Le fait de le greffer a permis à la plante d’acquérir des qualités fondamentales, il y a un
mariage extraordinaire qui se fait sur ces terres argileuses. Il
acquiert du classicisme, des vertus aromatiques intéressantes et
l’on découvre alors qu’on fait un vin extraordinaire ». ■
M
LA MAIN
POMEROL : CHÂTEAU PETIT BEAUSÉJOUR REJOINT
LE PATRIMOINE DE LFP GRANDS VIGNOBLES DE FRANCE
patrimoine
Des vignes très bien situées, une architecture remarquable :
Château Petit Beauséjour est paré de tous les atouts pour produire un grand vin.
Une appellation unique en son genre
Un pur style revival du xixe siècle
Touchant Libourne, le vignoble de Pomerol est composé de
petites parcelles. Le sol est constitué d’un vaste plateau légèrement
ondulé ; sableux à l’Ouest ; sablo-graveleux ou argilo-graveleux à
l’Est. Le sous-sol est argileux au Nord et au centre de la commune,
graveleux à l’Est ; vers le Sud, on trouve une terre dure ferrugineuse, « crasse de fer » ou « mâchefer ». Le Merlot règne quasi en
maître, laissant un peu de place au Cabernet Franc et au Malbec.
Les proportions du Château Petit Beauséjour sont charmantes.
Deux tours accrochent le regard : une tourelle d’angle coiffée de
son chapeau pointu, une tour arrière plus imposante, protectrice
avec ses créneaux qui se découpent sur un ciel pur. Les toits
d’ardoise marquent une pente forte alors que le décor très classique
joue l’harmonie avec ses corniches et des effets de frontons.
Un blason vient discrètement suggérer la noblesse du lieu.
Une histoire originale
Des châteaux de renommée mondiale
Le vignoble est né au xie siècle avec l’arrivée des hospitaliers de
Saint-Jean-de-Jérusalem. Isolé des autres car loin de tout port,
Pomerol fut longtemps considéré comme une « annexe » de SaintÉmilion. Au xixe siècle, l’arrivée du chemin de fer Paris-Libourne
permit la conquête des premiers marchés. Les Corréziens, firent
connaître Pomerol plus tard et le hissèrent au tout premier rang.
Pomerol, à l’inverse des autres prestigieuses appellations bordelaises ne possède aucun classement officiel. Mais les noms
de Châteaux Pétrus, Petit-Village, Vieux Château Certan, Le
Pin… suffisent pour dire qu’ici, une certaine idée du vin existe.
Pas de grands crus classés mais tellement de très grands vins
qui donnent le la pour tout le vignoble.
13
P
PAPILLE S
dégustation
CHÂTEAU- CHALON : VIN « IMPOSSIBLE »…
Le vin jaune de Château-Chalon défie toutes les lois de notre société moderne. Le vin est placé pendant
6 ans et 3 mois minimum dans des pièces de 228 litres, une aberration économique qui n’enrichit pas
le vigneron. Les fûts ne sont pas remplis complètement afin de favoriser le développement d’un voile
de levures caractéristiques du vin jaune : une aberration scientifique qui ferait tourner au vinaigre
n’importe quel autre vin. Le Château-Chalon peut se garder 20, 50 ou 100 ans : une aberration à
l’ère du « tout, tout de suite ». Il possède un goût absolument unique, qu’on adore ou qu’on déteste : une
aberration alimentaire parmi nos produits aseptisés.
le cl av elin
Bouteille seule autorisée, autrefois désignée « anglaise
clavelin 65 cl », du nom d’un abbé Paul Clavelin,
propriétaire de vignes à Névy-sur-Seille.
Elle contient 65 cl : ce qu’il reste d’un litre de vin jaune
après un élevage minimum de 6 ans et 3 mois.
AVEC CES 4 BOUTEILLES, VOUS ENTREREZ PAS À PAS
DANS LE MONDE DES VINS JAUNES.
• LE FACILE Domaine Rousset-Martin 2004
De couleur or pâle, le nez reste discret. Les épices légères dominent. La bouche apporte une sensation de minéralité, avec une
touche légèrement sèche. Faiblement alcooleux et tout en retenu,
ce château-chalon d’un vigneron récemment installé est le plus
accessible, le plus simple.
• LE STANDARD Domaine Baud Père & Fils 2005
La robe jaune, le nez mûr et intense dévoilent une belle maturité. Les arômes mêlent fruits blancs, vanille, caramel, avec une
touche de noix verte et de muscade. La bouche est fraîche et
nerveuse. L’ensemble évoque un spiritueux, entre cognac et whisky. Ce vin entre dans les canons standards du château-chalon :
expression autour de la noix, caractère sur la vigueur, style autour
des eaux-de-vie.
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• LE CL ASSIQUE Domaine Berthet Bondet 2004
La robe affiche une tonalité paille. Paille que l’on retrouve parmi
les arômes complexes et puissants de grillé, de tourbe, d’humus,
d’hydrocarbure, de noix sèche et de badiane. En bouche, c’est
l’élégance qui frappe, avec des sensations mêlées de chaleur et
de minéralité. Cette bouteille nous fait monter encore d’un
cran dans l’expression magnifique du château-chalon classique.
• LE HORS-CL ASSE Domaine Jean Macle 2005
La robe se pare d’une couleur dorée. Le nez dévoile des arômes
complexes d’une grande subtilité puisant dans le végétal, terre,
humus ; dans le fruité, amande fraîche, fruits à noyaux ; dans le
balsamique, résine. Le crémeux marque d’abord la bouche, puis
le vin révèle une matière fuselée. Elle dessine un grain particulier,
parfaite harmonie entre deux caractères bien trempés : le sec et
le voluptueux. La finale ne finit pas ! La référence absolue. Un
vin d’initié.
P
PAPILLE S
… PARFAIT AVEC UNE CUISINE CL ASSIQUE !
accords
Perdue dans un faubourg industriel de la banlieue lyonnaise,
La Table de Guy est une adresse incontournable pour les amateurs
de vin. Une clientèle d’affaires au quotidien et des aficionados
venus de toute la France se bousculent, certes pour la cuisine de
bistrot goûteuse de Guy Jandard, mais surtout pour sa carte des
vins tout simplement exceptionnelle. Le seul hic, c’est la difficulté
pour choisir : que des grandes étiquettes à petits prix ! Quand
nous lui avons dit « Château-Chalon », il s’est mis au piano avec
bonheur. Accords majeurs pour un menu de fête.
SANDRE RÔTI, ESCARGOTS ET
CHANTERELLES GRISES
Château Chalon
Baud Père & Fils 2005
Les escargots et les chanterelles ont mariné dans du vin jaune de 1994. C’est une
belle association de textures : le craquant
du poisson, le moelleux des escargots et
des champignons, le « claquant » du vin.
La noix de muscade se retrouve avec justesse dans l’assiette comme dans le verre.
POULET DE BRESSE, MORILLES,
POTIRON ET PETITS LÉGUMES
CROQUANTS
Château-Chalon
Jean Macle 2005
Accord majestueux. Le caractère fuselé du
vin épouse la chair ferme de la volaille ;
sa subtile acidité répond à la douce amertume des légumes ; sa volupté et ses parfums épicés s’unissent au crémeux de la
sauce et des morilles.
CHARLOTTE AUX MARRONS,
GL ACE MARRON
Château-Chalon
Fruitière de Voiteur 1986
Le nez du vin évoque le rhum et la fleur
d’oranger, la bouche est opulente. Ces vertus pâtissières ne pouvaient que s’accorder
avec l’onctuosité des marrons et la gourmandise du biscuit. La fraîcheur de la
glace tempère le duo dessert-vin.
La Table de Guy 58 avenue Salvador Allende 69500 Bron – 04 78 26 55 72 – www.latabledeguy.com
15
P
PAPILLE S
CHÂTEAU- CHALON, VILL AGE À PART
ACCÈS
• Autoroute
ou Raphaël Degey ☎ +32 478 339 309
Rue de la Roche
[email protected]
www.maisonadele.com
A39 à 1 h 15 de Dijon et 1 h 45
de Lyon
• Les Seize Quartiers
• Train
TGV Paris / Lyon puis TER
Lyon / Lons-le-Saunier.
• Route
20 minutes en voiture de Lonsle-Saunier
LES DOMAINES
• Le mythique
Domaine Jean Macle
Laurent Macle
Rue de la Roche
☎ 03 84 85 21 85 | 06 32 36 19 76
[email protected]
• La découverte
Domaine Geneletti
David Geneletti
Rue Saint Jean
☎ 03 84 44 95 06 | 06 81 25 03 87
www.domaine-geneletti.com
OÙ DORMIR ?
OÙ MANGER ?
• La Maison d’Eusébia
Chambres de Charme dans
l’ancienne bibliothèque des
abbesses du xviie siècle
4 chambres de 98 à 148 €
M. et Mme Le Gall Peirano
Rue Saint-Jean
☎ 03 84 44 92 10 | 06 37 48 78 73
Aucune fermeture
Cuisine traditionnelle
À partir de 26 €
Place de l’Église
☎ 03 84 44 68 23
Fermeture fin novembre et mimars, dimanche soir et lundi.
• Restaurant Le P’tit Castel
Cuisine traditionnelle
14 rue de la Roche
☎ 03 84 44 20 50
www.leptitcastel.fr
LE PLUS ?
• Atelier Cuisine et
Découverte des vins du Jura
Stage de cuisine, visite d’une
cave vigneronne et dégustation
de vins
2 jours et 1 nuit à ChâteauChalon.
À partir de 189 € par personne
Renseignements :
[email protected]
☎ 0 820 39 39 00
• La Maison de la
Haute-Seille
Place de l’Église
www.tourisme-hauteseille.fr
[email protected]
☎ 03 84 24 76 05
• La Maison Adèle
Gîte de france 4 épis
De 4 à 6 adultes à partir de 450 €
le week-end
David Edelberg ☎ +32 479 960 743
Le village est perché sur un éperon rocheux.
Il domine Lons-le-Saunier et la vallée de la
Seille. Vue imprenable, riche d’une ancienne
abbaye, de maisons vigneronnes, de caves
voûtées, le site a été classé « pittoresque et
historique » en 2006. Château-Chalon semble
hors du temps, réservé aux seuls hédonistes et
aux amoureux du vin éponyme.
© CIVJ
balade
• Le film
« Le Mystère du Vin Jaune »
Prix « Paysage et Environnement » au Festival
International Œnovideo en 2008.
• LE V I G N O B LE
Superfice : environ 60 hectares sur les 90 classés dans
l’appellation.
AOC : 4 communes : Château-Chalon, Ménétru-le-Vignoble,
Domblans, Névy-sur-Seille.
épages : exclusivement le Savagnin, cépage blanc cousin
C
du Traminer.
Sol et sous-sol : marnes bleues et noire du Lias, calcaire à
fossiles recouvrant des marnes et des gypses du Trias.
16
A
ABÉCÉDAIRE
L
A B O U R Labourer est une pratique viticole
ancestrale pour lutter contre l’envahissement des
mauvaises herbes, pour aérer la terre et pour protéger les ceps du gel. À partir des années 1960,
les viticulteurs ont quitté l’archaïsme pour le progrès : recours aux produits chimiques pour lutter
contre l’enherbement naturel des vignes, utilisation du tracteur
pour le travail de la terre ; des techniques efficaces et tellement
moins pénibles. Mais rien ne dure jamais et les années 1990 ont
vu émerger chez une jeune génération de vignerons une remise
en question de la mécanisation et de l’utilisation massive de
produits phytosanitaires. Aujourd’hui, le labour revient dans
nombre de domaines, petits ou grands, connus ou non, adeptes
du bio ou non. Avec ce commentaire unanime : le labourage
aère régulièrement le sol, favorise la vie microbienne et permet
au ceps de s’enraciner en profondeur. Des prestataires de services ont fait leur apparition et l’on peut voir régulièrement des
laboureurs derrière des chevaux de trait.
LE V U RE S La fermentation alcoolique est le procédé de
vinification qui transforme les sucres du raisin en alcool pour
donner du vin. Cette transformation s’effectue sous l’action de
levures, organismes unicellulaires qui fermentent en anaéro-
biose c’est-à-dire à l’abri de l’oxygène. On trouve ces levures naturellement sur le raisin, d’où leur
nom de levures indigènes. À partir
de là, deux écoles se distinguent
correspondant chacune à une vision
du vin et de sa typicité. L’une prône
l’utilisation exclusive de levures indigènes pour démarrer la fermentation alcoolique du raisin, apparentant la levure indigène à une levure
« terroir » seule capable de produire
un vin authentique et typé. L’autre
prône des levures adaptées et sélectionnées : autrement dit des souches
de levures sélectionnées parmi les
indigènes, donc naturelles mais
débarrassées de leurs défauts potentiels issus de contaminations
du matériel vinaire ou des chaussures du livreur de barriques ! On
les appelle des LSA, levures sèches
actives. Fabriquées industriellement, elles sont réhydratées dans
de l’eau chaude pour donner un levain qui sera ensuite incorporé
dans le moût de raisin. Du côté des « indigènes » se range la
mode des vins dits « natures », dont beaucoup sont pour la plupart imbuvables pour cause de déviations aromatiques. Du côté
des LSA se range une autre mode, celle du Beaujolais Nouveau
et son fameux arôme de banane, pas franchement buvable non
plus. Entre ces deux « idéologies » de l’extrême, on trouve des
vins sublimes nés de levures 100 % indigènes ou 100 % LSA et
pensés avec beaucoup de bon sens.
( V I NS D E ) LI Q U E U R Alexis de Lichine, dans son
Encyclopédie des Vins et des Alcools, les appelaient les « vins
vinés ». Un vin de liqueur (VDL) est produit à partir d’un jus
de raisin non fermenté auquel on ajoute une eau-de-vie de la
région de production (opération appelée mutage) : il en résulte
une sorte de mistelle associant jus de raisin et alcool. Il diffère
en cela du vin doux naturel (VDN) où la fermentation est stoppée par l’adjonction d’alcool. Le degré alcoométrique du VDL
titre entre 14° et 21,5°. Les VDL les plus connus sont le Pineau
des Charentes (mutage avec du cognac), le Floc de Gascogne
(mutage avec de l’armagnac) et le Macvin (mutage avec du marc
du Jura) et le Ratafia (mutage avec du marc de Champagne). ■
LA REVUE DU CLUB DES PROPRIÉTAIRES DE GRANDS CRUS
18
est édité par La Française Real Estate Managers
pour le Club des Propriétaires de Grands Crus
La Française Real Estate Managers est une société
du groupe La Française
ISSN : 1952-6725
Dénomination sociale de l’éditeur : LA FRANCAISE REM
Forme juridique : SAS au capital de 1 220 384 €
Adresse du siège social : 173, boulevard Haussmann 75008 Paris
Représentant légal : Xavier Lépine
Directeur de la publication : Xavier Lépine
Responsable de la rédaction : Patrick Ribouton
Conception graphique & direction artistique : Culturevin
Rédaction : Claire Brosse
Iconographie et photographies : Christophe Goussard
sauf couverture (© haut relief / CIVB), p. 2, 8, 13, 16, D.R.
Photogravure : Philippe Mesa
Impression : Imprimerie Valley à Lyon
Date de parution : décembre 2013
La Française, 173 boulevard Haussmann, 75008 Paris
Tél. : 01 44 56 10 00 - Fax : 01 44 56 11 00
EV0120 - décembre 2013
VIGNOBLES INFOS