Historique détaillé du Lycée

Transcription

Historique détaillé du Lycée
La petite histoire du Lycée français...
Tout a commencé par une petite école de société : c’était ici, en Afrique du Sud, et la société s’appelait Socea
Bonna. L’école scolarisait alors simplement les enfants du personnel. Peu à peu, cette petite école s’ouvre à
davantage d’enfants, mais elle doit cependant fermer ses portes en 1970. C’est ainsi qu’avec dix-sept premiers
élèves le « Petit cours de français de Johannesbourg » voit le jour afin de pérenniser la scolarisation de ces
enfants francophones. L’école est située à Parktown, 40 Oxford Road, plus précisément dans le « Convent of
the Holy Family ». Au début, ce n’est qu’une école primaire à laquelle on adjoint finalement, en 1972, une
maternelle. Il n’y a alors que quatre institutrices travaillant sans directeur d’école. D’après les lois sud-africaines alors en vigueur, tout enfant de six à seize ans doit poursuivre ses études dans
une école sud-africaine : c’est pourquoi les élèves francophones sont en premier lieu scolarisés dans des
établissements du pays, où ils apprennent l’anglais et l’afrikaans. Les cours de français n’ont donc lieu que de
15 heures à 18 heures, ce qui fait des journées bien remplies. Les locaux sont modestes : quatre salles de 5
mètres sur 7 louées pour 900 rands par an ! A partir de 1972, la petite école est reconnue par le Ministère de
l’Education Nationale français et reçoit une subvention, laquelle s’élèvera par exemple en 1975 à 3400 rands. Il
y a par ailleurs un partenariat mis en place avec le Centre National de Télé-Enseignement (CNTE), l’équivalent
d’alors du CNED d’aujourd’hui.
En 1973, l’école connaît un premier grand changement. Elle s’établit dans l’Ecole Allemande, 11 rue Sans
Souci, encore à Parktown . Ce n’est toujours qu’une école française à mi-temps donnant ses cours toute la
semaine de 15 h à 18 h. En fait, l’école française loue à la Deutsche Schule six classes, pour 240 rands par mois.
A l’époque, en juin 1975 par exemple, les frais de scolarité s’élèvent pour un élève à 28 rands par mois. Début
1974, l’école compte 35 élèves, dont 33 Français et 2 Sud-Africains. Le 1er septembre 1974, le Comité de
l’Association des parents d’élèves francophones de Johannesbourg, présidé par M. de Roissard de Bellet,
décide de faire appel à la Mission Laïque française : celle-ci envoie le très actif M.Déusa, qui sera le premier
directeur pédagogique. Mais les parents d’élèves et les enseignants ont encore d’autres ambitions.
Début 1975, une campagne est lancée auprès des sociétés françaises présentes en Afrique du Sud en vue de la
constitution d’un fonds : l’ambition, relayée par une Association de parents d’élèves volontaire et par son
secrétaire M.Monier, chargé de la gestion, est de permettre la création d’une école française encore plus
autonome et efficiente. Il est vrai que les effectifs croissent : 55 élèves en janvier 1975, 61 élèves en octobre
1975, 74 élèves en février 1976. De généreux donateurs sont alors au rendez-vous : Peugeot, Renault, les
Laboratoires Roussel, la Société Générale ou encore Thomson -pour ne citer qu’eux- répondent ainsi présents.
Par ailleurs, le Ministre français du Commerce extérieur, Monsieur Norbert Segard, parvient, lors de sa visite
en Afrique du Sud, à obtenir un accord de principe portant sur la reconnaissance officielle de l’école, accord qui
ne devient effectif qu’après de longues négociations. Enfin, l’autorisation de transférer celle qui est maintenant
« l’Ecole française de Johannesbourg » est accordée.
Tout ceci permet à l’Ecole française de connaître un nouveau tournant : le 28 octobre 1976, à 17 heures, en
présence du Ministre de l’Education sud-africain, le Dr P.G.J. Koornhof, et de l’Ambassadeur de France,
M.Jacques Schricke, est inauguré le nouvel établissement. Celui-ci, déjà ouvert depuis début septembre, se situe
dans les locaux de l’école Jan Celliers, Lower Park Drive, à Zoo Lake : il se compose de huit classes louées au
« Transvaal Education Department » ainsi que d’un bureau et d’une bibliothèque pour enfants. Les cours,
maintenant à temps plein, commencent à 7 h 50 et finissent à 13 h 00 pour la Maternelle et le CP et à 13 h 30
pour les plus grands ; l’après-midi est consacré aux clubs ou au sport : basket, natation, cricket, tennis, rugby ou
athlétisme sont ainsi pratiqués. Les élèves portent un uniforme : pour les filles, cardigan vert, chemisier blanc et
robe verte sont de mise, et pour les garçons, blazer vert, chemise blanche, cravate rayée de jaune et de vert et
pantalon gris. Les résultats sont rapidement encourageants : on compte ainsi 100 % de réussite au BEPC en
1977. En novembre 1978 a lieu la publication de l’Ecole au Journal Officiel, dans la liste des établissements
d’enseignement situés hors du territoire de la République Française, et c’est bien là la consécration d’un long
travail pédagogique.
Les témoignages de l’époque –ceux des époux Lopez notamment- nous renseignent sur
l’ambiance à l’école, plutôt radieuse ; la coopération avec l’école Jan Celliers est en effet très bonne et se
traduit par des manifestations sportives, culturelles et même religieuses en commun. Ainsi, quelques jours avant
Noël, lors d’une veillée, les enfants des deux écoles se réunissent et, éclairés par des dizaines de bougies,
entonnent des chants en anglais, en français et en afrikaans. Le Carnaval donne également lieu à une grande
fête où tous se déguisent, y compris ce professeur qui en 1979 arrive habillé en élève pour la plus grande joie de
tous. Mais parfois, le port de l’uniforme, la prière du matin, les langues en présence, le coup de sifflet strident
annonçant la fin des récréations, voire même les coupes de cheveux des élèves français, rendent difficiles
l’entente parfaite mais l’équipe pédagogique fait alors de son mieux pour que « l’école française [vive] en
bonne intelligence avec ses hôtes ».
Il faut dire, comme l’avouent des professeurs de l’époque, que le cadre de Zoo Lake est superbe et permet de
nombreuses escapades au zoo, ou des joies simples comme l’observation de ce faucon planant au-dessus de la
cour de récréation. Des parents d’élèves bénévoles et des enseignants dévoués achèvent de faire de l’Ecole un
lieu de vie agréable en organisant, les après-midis, des clubs variés : poterie, émaux, philatélie et journal de
l’école. Ainsi, avec l’Alliance française de Johannesbourg créée en 1945, l’Ecole française de Zoo Lake devient
rapidement à la fin des années 70 « le point de ralliement de tous les Français de la ville ».
Le succès est
donc croissant : l’Ecole compte ainsi, pour l’année scolaire 1978-1979, 112 élèves, dont quatre Allemands, trois
Italiens et deux Belges. En 1979, elle se compose, de la maternelle à la troisième, de dix classes, auxquelles
s’ajoutent deux sections (seconde et première) pour lesquelles un simple soutien aux cours du CNTE de Rouen
est assuré en mathématiques, en physique et en français. Au début des années 80, l’attrait exercé par l’Ecole ne
se démentit pas : on passe ainsi de 114 élèves en 1980 à 141 en 1984 (avec toujours, au gré des départs et des
arrivées, une grande fluctuation des effectifs au cours des années scolaires). Cette même année 1984 est d’ailleurs celle de la création de l’école du Cap, qui devient dès l’année suivante,
sur une suggestion faite par M. Schoeffel, aujourd’hui professeur des écoles à Johannesbourg, et adoptée par
l’Association des Parents d’Elèves du Cap, l’Ecole François Le Vaillant : ce Français du XVIIIème siècle,
grand admirateur de Rousseau, fut un important botaniste et explorateur, auteur de deux expéditions
remarquables en Afrique du Sud, et dont le souvenir demeure notamment grâce aux deux espèces d’oiseaux
sud-africains auxquels il a donné son nom, Levaillant’s Cuckoo et Levaillant’s Cisticola. Le milieu des années
80 voit par ailleurs l’arrivée en Afrique du Sud de certaines enseignantes de l’Ecole française qui font
aujourd’hui affectueusement figure d’ « Anciennes » : Marie-Jeanne Boyssac (1983), Michèle Redford (1986),
Marie-Christine Hunt (1986) et Sylvie Lammens (1989).
Toujours mieux établie, l’Ecole française n’a de cesse de s’ouvrir au pays d’accueil en encourageant des
échanges, notamment sportifs, avec les écoles locales : Sandown High School, Redhill School ou encore H.A.
Jack School, qui jouera bientôt un rôle encore plus important. Néanmoins, un problème demeure : celui de
permettre à une Ecole française toujours plus active de « s’installer dans ses propres locaux » comme le
recommande depuis 1983 l’Association des Parents d’élèves francophones de Johannesbourg. Ainsi, en janvier
1987, est examinée à nouveau la possibilité pour l’Ecole de s’installer dans le « Ballet School » de
Johannesbourg. Le projet est prometteur : les locaux (une villa, une salle de théâtre ainsi que sept corps de
bâtiment) devraient permettre la création d’une vraie « Maison de France, regroupant les associations françaises
et l’Ecole ». Malheureusement, en raison d’un bail maximal d’à peine trois ans, le projet ne se concrétise pas,
mais l’envie demeure… En attendant, on se débrouille : le secondaire, d’abord délocalisé 38 Summit Road à
Morningside depuis 1986 environ, est implanté en 1989 à l’Ecole anglophone H.A. Jack, bientôt suivi par les
classes de CM 1 et de CM 2 afin de permettre de libérer de l’espace à l’Ecole Jan Celliers pour une
bibliothèque- salle des maîtres et un vestiaire. Malgré la très bonne entente avec son nouvel hôte, Mr.Sinclair,
Principal de la Jack School, l’Ecole, maintenant bicéphale, ne peut s’épanouir ainsi : où établir l’administration,
par exemple, se demandent parents d’élèves et enseignants ? Comment assurer la croissance toujours espérée de
cet établissement dispersé ? En effet, une politique de mise en valeur de l’Ecole française est parallèlement
menée avec ardeur, politique qui passe notamment en 1989 par une campagne de publicité et l’apparition de la
« French School » dans l’annuaire téléphonique de Johannesbourg. En avril 1989, il y a maintenant 132 élèves
et la devise de départ « Croître » n’est pas oubliée, et ne le sera pas. En effet, dès juin 1989, le projet « Nouvelle Ecole Française » s’affirme : le Ministère des Affaires Etrangères
français, la Société Française de bienfaisance de Johannesbourg et les sociétés françaises présentes en Afrique
du Sud acceptent, par leur contribution respective, de rendre économiquement viable ce projet, lequel pourra
être consolidé par un emprunt local et un prêt français auprès de la Caisse des dépôts. Un terrain opportun a été
en plus repéré depuis 1988 aux environs de Ballyclare Drive. Les tractations s’avèrent néanmoins longues et
difficiles, et ce n’est que le 13 juin 1991, sous la plume de Mme Eliane Solanet, Secrétaire de l’Association des
parents d’élèves, que l’on peut lire : « Enfin ! Le projet de la nouvelle Ecole Française de Johannesburg sort du
domaine du rêve et prend forme sur notre terrain de Morningside. (…) Aujourd’hui, l’Ecole Française de
Johannesburg aura son terrain et ses locaux qui donneront la possibilité de dispenser à tous les enfants
francophones en âge scolaire, un enseignement dans des conditions optimales ». La nouvelle adresse,
qu’aujourd’hui beaucoup connaissent, sera : Corner Bauhinia and Cestrum Roads, à Morningside.
Les travaux d’aplanissement et de construction achevés, c’est en février 1992 qu’est inaugurée la nouvelle
Ecole qui deviendra alors l’Ecole Jules-Verne. En effet, grâce à « une boîte à idées de nom » lancée en février
1991 par M. O’Connor, Directeur de l’établissement, la nouvelle Ecole Française de Johannesbourg porte le
nom du célèbre romancier français du XIXème siècle ; Jules Verne, amateur de science et de fantastique, fut
notamment l’ auteur d’un texte portant sur l’Afrique du Sud, L’Etoile du Sud. « Le pays des diamants » (1883),
ainsi que de nombreuses autres références à cette partie du monde comme dans Cinq semaines en ballon (1862)
où l’écrivain décrit : « Le 30 mars, 27 jours après le départ de Londres, la montagne de la Table se profila sur
l’horizon ; la ville du Cap, située au pied d’un amphithéâtre de collines, apparut au bout des lunettes
marines. »
Les bâtiments initiaux du nouvel établissement Jules-Verne sont composés de presque dix classes, d’un
laboratoire, d’une bibliothèque et de bureaux et sont construits sur la parcelle 609 de Morningside Extension 40.
Ils ont surtout l’intéressante particularité de former un « F » -celui de la francophonie-, émouvant écho de ce
« F » composé près de quinze ans plus tôt par les premiers enfants francophones de l’Ecole Jan Celliers, et
reproduit alors en photographie dans le journal « The Citizen » daté du 9 septembre 1976.
Et depuis,
conformément à la devise de départ -« Croître » -, l’Ecole française a grandi : le « F » originel a laissé la place à
un petit alphabet de bâtiments, les élèves, leurs parents et les enseignants se bousculent, et les invités aussi
d’ailleurs. A l’image de ses débuts, « c’est une école qui bouge, qui vit ». D’ailleurs, en 2001, c’est à Prétoria
que se poursuit cette croissance avec l’ouverture de l’école Miriam Makeba, en l’honneur de la chanteuse
engagée dans la lutte contre l’apartheid, qui s’exila en France.
Ainsi, scolarisant aujourd’hui presque huit cent élèves et plus de quarante nationalités, forte de plus de quarante
années d’histoire, portée par une succession de volontés patientes et passionnées, le Lycée Jules-Verne est
devenue une école consciente de ses capacités et de son identité plurielle, qui s’ouvre au pays qui l’accueille et
au monde qui l’entoure. Finalement, dès avril 1979, les parents et les enseignants dans leur « Présentation de
l’école » pressentaient avec justesse ce destin heureux : « Nous sommes confiants dans l’avenir car tout notre
travail s’inscrit dans un contexte favorable à son épanouissement et correspond à des besoins réels tant au
niveau des enfants que de leurs parents. »
Rédigé en 2008 par J.Christophe, professeur de philosophie, avec l’aide des élèves de Première L (Kévin
Adjayeno, Margaux Alla, Fleur Kalasa, Guy-Audrey Kombila, Muriel Munkeni, Rudy-Joan Perreira et Gabaza
Tiba) et la collaboration de Mme Hunt, professeur d’anglais, de Mme Redford, enseignante en CM2 et de
M.Schoeffel, enseignant en CM2. Avec également la gracieuse relecture de Mme Brigitte Canet.
Revu en 2011.

Documents pareils