Dropkick Murphys : « c`est important de se souvenir de ses racines »

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Dropkick Murphys : « c`est important de se souvenir de ses racines »
Dropkick Murphys : « c’est
important de se souvenir de
ses racines »
Vendredi soir, au Caribana, ce sont les Américains de Dropkick Murphys qui ont ouvert les concerts de la Grande Scène. Les sept Bostoniens ont su mettre le feu au public avec leur punk celtique déjanté. Quelques heures plus tôt, L’auditoire avait rendez-­‐vous avec Al Barr, le chanteur du groupe, qui est revenu avec nous sur leur dernier album et l’historique de la formation. Interview. L’auditoire : Votre dernier album, Going out in style raconte la vie de Cornelius Larkin, un émigré irlandais qui arrive en Amérique. Vous avez toujours revendiqué vos racines irlandaises, est-­‐ce que cet album était l’étape suivante pour rendre hommage à vos origines et à votre famille ? Al Barr : Cornelius Larkin est un personnage fictif. Son histoire n’existe pas vraiment, mais elle est basée sur les expériences vécues par les familles des membres du groupe. Le joueur de cornemuse et moi sommes d’origine écossaise, moi je suis écossais-­‐allemand. Mais toutes nos familles, à un moment donné, sont venues en Amérique : nous sommes un groupe américain, nous habitons à Boston. Le but de l’album n’était donc pas de rendre hommage à l’Irlande, ou de se revendiquer comme étant irlandais. On voulait juste raconter une histoire. On connait tous des anecdotes en lien avec l’immigration, et notre but était donc plutôt de rendre hommage à la lutte de tous les émigrés américains. Il y a une certaine prépondérance des irlandais, la majorité du groupe étant d’origine irlandaise, mais pour nous c’est important de se souvenir qu’on est un groupe américain, et on n’essaie pas d’être quelque chose que l’on est pas. Vous avez collaboré avec différents artistes à l’écriture de cet album, notamment Bruce Springsteen et NOFX. Comment ont débuté ces collaborations ? Nous avons rencontré Bruce Springsteen en 2007. Son fils était fan du groupe et lui avait montré ce qu’on faisait. Ensuite il a commencé à nous mentionner dans des interviews ; on n’y croyait pas. Lors d’un concert à New York, il est venu nous voir jouer. On l’a rencontré, il a regardé tout le concert et nous a envoyé un message pour nous dire qu’il avait adoré. Plus tard, quand il est venu jouer à Boston, une partie du groupe est allé voir le concert. On a fini par jouer avec lui et notre guitariste a même demandé sa femme en mariage sur sa scène. On avait donc une sorte de relation avec lui. Quand on a commencé à enregistrer Going Out in Style on s’est dit, pourquoi ne pas tenter notre chance et voir si Bruce Springsteen serait intéressé à chanter sur notre album. On pensait qu’il n’aurait pas le temps et que ça n’arriverait pas, mais qui ne tente rien n’a rien. Et il s’est trouvé qu’il l’a fait. C’est fou. On est vraiment honoré de l’avoir sur ce projet. Fat Mike, on le connaît depuis des années. On a joué avec NOFX en tournée et ça c’est donc fait très simplement. On les a appelé et on leur a dit qu’on les voulait sur note disque. Pour Bruce c’était bien sûr un peu plus compliqué que ça puisque c’est Bruce ! Je pense que les collaborations sont amusantes, elles donnent au disque une saveur spéciale. Vous êtes actuellement en tournée en Europe . Votre musique étant largement inspirée de sons celtiques traditionnels, rencontrez-­‐vous d’autant plus de succès quand vous jouez en Irlande ou en Angleterre? En fait, c’est l’inverse ! Après l’Amérique, le pays où nous rencontrons le plus de succès est l’Allemagne. L’Irlande est peut-­‐être notre plus petit marché. En dehors du côté punk, nous nous inspirons en effet beaucoup de musiques folkloriques irlandaises et ce n’est pas quelque chose que les jeunes de là-­‐bas aiment écouter. C’est la musique que connaissent leurs parents et du coup, ils ne trouvent pas ça cool. En Angleterre, je crois qu’on embrouille les gens : on est un groupe américain, on joue une musique influencée par la tradition irlandaise, et on la mélange à du punk rock. Là-­‐bas il aiment le punk, mais pas le côté folklorique. On a donc des fans dans ces pays, mais on ne touche pas un très grand public. Dans une interview vous dites que vous voulez « vous lancer des défis et ne jamais faire le même album deux fois ». Vous avez déjà des idées pour votre prochain disque ? J’aimerais clarifier cette phrase. On fait toujours ce que l’on fait : on trouvera toujours dans nos compositions une influence irlandaise, du punk, et du rock’n’roll. Mais après, on n’aime pas se reposer sur ça. On veut mettre le feu au public, l’exciter. Notre façon de le tester est de regarder si ça nous excite nous-­‐mêmes. Si c’est le cas, on peut espérer qu’on transmettra notre énergie aux gens. C’est notre but. Notre prochain album, on en a déjà 80% et je pense qu’il sera bien mieux que Going Out in Style. Ça fait 16 ans qu’on travaille ensemble ; au début on était quatre, ensuite on a rajouté les instruments traditionnels et on est passés à sept. On a toujours voulu mélanger la musique irlandaise et le punk, mais à nos début on composait en deux parties : certain morceaux punk, et certains morceaux traditionnels avec un peu de punkitude dedans. Aujourd’hui on obtient plutôt un style qui mélange les deux. Notre prochain album sera donc une extension de ce travail, mais après, ce ne sera bien sûr pas le même album. J’ai découvert votre musique en l’entendant dans la BO des Infiltrés de Scorsese. Comment s’est monté ce projet ? On a fait l’album The Warrior’s Code avec notamment la chanson I’m Shipping Up to Boston dessus. On a ensuite découvert que Robbie Robertson de The Band était un grand fan de Dropkick Murphys. Le premier film de Martin Scorsese étant un documentaire sur le groupe The Band, Robbie Robertson et lui étaient de très bons amis depuis des années. Quand The Warrior’s Code est sorti, Robertson et Leonardo DiCaprio, tous les deux fans de Dropkick Murphys, l’ont fait écouter à Scorsese en lui disant qu’ils pensaient qu’une chanson du disque serait parfaite pour le film. Il a tout de suite adoré et a utilisé la chanson. Je n’y ai pas cru jusqu’à ce que je sois assis dans le cinéma et que j’entende la musique ! Beaucoup de gens, comme toi, nous ont découvert par ce biais. Ça a amené pas mal de gens à écouter ce qu’on fait, ce qui est génial. Vous avez monté une œuvre de charité à Boston. C’était important pour vous d’utiliser votre célébrité pour aider les gens, essayer de faire changer les choses ? C’est Kenny (ndlr. Ken Casey, chanteur du groupe) qui a initié ce projet. On l’a tous aidé, mais lui travaille vraiment dessus sans relâche. Il a toujours eu le sens de la communauté, comme le reste du groupe. Comme on a eu beaucoup de chance ces dernières années, on trouvait important de ne pas oublier d’où on vient, de rester lié à notre communauté. Je n’aime pas le mot célébrité, je ne me considère pas comme quelqu’un de célèbre, mais on a une certaine popularité dont on se sert pour attirer l’attention des gens sur des problèmes que l’on trouve importants. On essaie par exemple d’aider les vétérans, des gens qui ont perdu un proche à la guerre, des drogués, des alcooliques ; simplement des gens dans une mauvaise passe qui pourraient apprécier un peu d’aide. Kenny a donc mis sur pied The Claddagh Fund, et on a récolté des fonds à Boston, mais aussi à Philadelphie, et on commence à ouvrir des centres ailleurs. Je crois que le rêve de Ken serait d’en voir dans chaque état. C’est donc simplement une histoire de donner en retour. Quand le succès te sourit, c’est facile d’oublier d’où tu viens et c’est dommage. C’est important de se souvenir de ses racines.